Couverture de RFSP_601

Article de revue

La politique malgré elles

Mobilisations féminines catholiques en France et en Italie (1900-1914)

Pages 37 à 60

Notes

  • [1]
    Annarita Buttafuocco, Donne e cittadinanza. Donne e diritti sociali nell’Italia liberale, Sienne, Protagon editori Toscani, 1997 ; Anna Rossi Doria, Diventare cittadine, il voto alle donne in Italia, Turin, Riuniti, 1996 ; Gianna Pomata (a cura di), Ragnatele di rapporti, Turin, Rosenberg & Sellier, 1988 ; Giulia Galeotti, Storia del voto alle donne in Italia, Rome, Biblink, 2006 ; Michèle Riot-Sarcey, Femmes et pouvoir, Paris, Kimé, 1993 ; Anne Verjus, Le cens de la famille, Paris, Belin, 2002.
  • [2]
    Lucetta Scaraffia, « Fondatrice e imprenditrice », dans Emma Fattorini, Santi, culti, simboli (1815-1915), Turin, Rosenberg & Selliers, 1997, p. 479-491.
  • [3]
    La législation autrichienne autorisait, en Vénétie et en Lombardie, les femmes propriétaires séparées de corps (i.e. les veuves et les célibataires) à voter aux élections municipales.
  • [4]
    Bernard Lacroix, « Ordre politique et ordre social », dans Madeleine Grawitz, Jean Leca (dir.), Traité de science politique, t. 1 : La science politique, science sociale, ordre politique, Paris, PUF, 1985, p. 469-565 ; Jacques Lagroye (dir.), La politisation, Paris, Belin, 2003 ; Yves Déloye, La sociologie historique du politique, Paris, La Découverte, 2007 ; sur la politisation masculine en Italie dans des structures mises en place par des élites locales : Gilles Pécout, « Les sociétés de tir dans l’Italie unifiée de la seconde moitié du 19e siècle », Mélanges de l’École française de Rome. Italie Méditerranée, 102 (2), 1990, p. 533-676 ; Maurizio Ridolfi, Il circolo virtuoso. Sociabilità democratica, associazionismo e rappresentenza politica nell’Ottocento, Florence, Centro editoriale toscano, 1990.
  • [5]
    Archives de l’Action catholique des femmes (AACF), H1 « Recueil de statuts ». Elle prend d’abord le nom de Ligue patriotique libérale des Françaises le 21 mai 1902, puis de Ligue patriotique des Françaises action libérale populaire le 13 juin 1902.
  • [6]
    Ces chiffres sont repris à la fois par la Sûreté générale et par les informateurs du Vatican. Comme tous ceux fournis par la Ligue sur les adhésions et manifestations ne peuvent être établis avec certitude, les fichiers d’adhérentes, pourtant tenus avec soin, n’ont pas été conservés.
  • [7]
    Pour l’histoire française : Florence Rochefort, Laurence Klejman, L’égalité en marche, le féminisme sous la Troisième République, Paris, Des Femmes/Presses de Sciences Po, 1989 ; Paul Smith, Feminism and the Third Republic. Women’s Political and Civil Rights in France, 1918-1945, Oxford, Oxford University Presse, 1996 ; Christine Bard, Les filles de Mariane, histoire des féminismes (1914-1945), Paris, Fayard, 1995 ; pour l’histoire italienne : Franca Pieroni Bortolotti, Alle origini del movimento femminile in Italia (1848-1892), Torino, Einaudi, 1963, et Femminismo e partiti politici in Italia (1919-1926), Roma, Riuniti, 1978 ; Lucetta Scaraffia, Anna Maria Isastia, Donne ottimiste. Femminismo e associazioni borghesi nell’Ottocento e Novecento, Bologne, Il Mulino, 2002 ; Maria Linda Odorisio, Monica Turi, Lucetta Scaraffia (a cura di), Donna o cosa ? I movimenti femminili in Italia dal Risorgimento a oggi, Turin, Cara, 1991.
  • [8]
    L’historienne Odile Sarti fut la première à envisager cette activité politique dans un contexte de sécularisation dans A Feminine Response to the Secularization of French Society, New York, Garland, 1992. Les travaux de Bruno Dumons (Les dames de la Ligue des femmes françaises, Paris, Cerf, 2006) ont mis en évidence le rôle des femmes de la Ligue des femmes françaises lors des élections de 1902. Cependant, cette association se retire explicitement des affaires politiques pour revenir à un terrain « strictement religieux » ; Anne Cova montre comment la maternité a servi d’entrée dans les affaires publiques à ces organisations catholiques (Au service de l’Église, de la patrie et de la famille. Femmes catholiques et maternité sous la Troisième République, Paris, L’Harmattan, 2000). Elle ne s’attarde pas sur les processus d’inclusion à l’activité électorale ni à leur retrait après 1919. Enfin, une monographie est disponible en Italie, mais le rôle politique de l’UDCI est assez peu évoqué. Cf. Cecilia Dau Novelli, Società, Chiesa e associazionismo femminile. L’Unione fra le donne cattoliche d’Italia (1902-1919), Roma, A.V.E., 1988 ; Magali Della Sudda, « Une activité politique féminine conservatrice avant le droit de suffrage en France et en Italie. La ligue patriotique des Françaises (1902-1933) et l’Unione fra le donne cattoliche d’Italia (1909-1919) », thèse de doctorat d’histoire, Paris/Rome, EHESS/La Sapienza, 2007.
  • [9]
    Yves Déloye, « Pour une sociologie historique de la compétence à opiner “politiquement”. Quelques hypothèses de travail à partir de l’histoire électorale française », Revue française de science politique, 57 (6), décembre 2007, p. 775-798.
  • [10]
    L’ouvrage classique tiré de l’enquête commandée par l’UNESCO en 1952 mentionne l’importance des organisations féminines catholiques dans l’encadrement des Françaises et leur rôle dans la socialisation politique. Sur ce point, cf. Mattei Dogan, Jacques Narbonne, Les Françaises face à la politique, comportement politique et condition sociale, Paris, Armand Colin, 1955, chap. 4 « Les incidences politiques des sentiments religieux des femmes », p. 50-60, et « Les organisations féminines et leur rôle dans la propagande politique », p. 113-133. Cette piste de recherche n’a pas été poursuivie plus en amont ni en aval du moment des premières consultations électorales.
  • [11]
    Yves Déloye, Les voix de Dieu. Pour une autre histoire du suffrage électoral : le clergé catholique français et le vote 19e-20e siècle, Paris, Fayard, 2006.
  • [12]
    Jean-Pierre Rioux, Nationalisme et conservatisme. La ligue de la patrie française 1899-1904, Paris, Beauchesne, 1977.
  • [13]
    Archives de la Compagnie de Jésus, Province de France (ASJPF), fonds Pupey-Girard (HPu60), « Ligue 1901-1906 », lettre manuscrite, probablement du P. Pupey-Girard, sd, sn.
  • [14]
    Les membres de la Société des Filles du Cœur de Marie sont consacrées dans le secret. Elles prononcent à l’issu de leur noviciat les trois vœux d’obéissance, de chasteté et de pauvreté et y ajoutent celui du secret de leur consécration. Elles vivent ainsi dans le monde sans résider dans la maison commune, tout en restant fidèles à leurs vœux, et accomplissent leur apostolat auprès de populations que l’habit religieux rebuterait. Dépendant de la Compagnie de Jésus, elles sont les premières sollicitées au moment de la loi de 1901 puisqu’elles sont les seules congrégations à ne pas être soumise à l’autorisation préfectorale du fait du caractère secret de leur organisation. Archives secrètes vaticanes (désormais ASV), fonds des Affaires ecclésiastiques extraordinaires (AES), Stati ecclesiastici, IV periodo, anno 1930-1933, 446 PO, fasc. 429, « La Société des Filles du cœur de Marie », rapport dact., sn, sd [1930], 9 p. ; ff. 4-12.
  • [15]
    Voir infra.
  • [16]
    La Ligue des femmes françaises fondée à Lyon en 1901 par Jeanne Lestra et son directeur spirituel, A. Eymieu ; cette association a pour but l’œuvre électorale. Le comité parisien fait scission en 1902 suite au différend qui porte sur l’attribution des fonds à des candidats royalistes ou ralliés. Cf. B. Dumons, Les dames de la Ligue…, op. cit.
  • [17]
    ASV, fonds Secrétairie d’État (Seg.di Stato), anno 1907, rubr. 248, facs. 2, n° 1791. Lettre anonyme et non datée ; elle s’insère dans un dossier de renseignements fournis par Jacques Piou au cardinal Montagnini au sujet des liens entre les Filles de Marie – société secrète religieuse –, l’Action libérale populaire et la Ligue patriotique des Françaises. Elle doit dater de 1906, date à laquelle correspond à peu près au chiffre de 300 000 adhérentes pour la Ligue. C’est aussi cette année que la première crise éclate à la direction de la LPDF au sujet de l’extension du mandat religieux à l’action électorale : la supérieure des Filles de Marie souhaite retirer ses Filles de l’association. Il faut donc pour Jacques Piou convaincre en haut lieu de la nécessité vitale pour l’ALP de maintenir ce réseau féminin dans l’entreprise politique. « Un certain nombre de filles de Marie s’occupent très activement de la Ligue patriotique des Françaises unie à l’Action libérale populaire. Elles en organisent les cadres principaux des organisations à travers la France. C’est grâce à leur concours qu’on a pu regrouper plus de trois cent mille adhérentes bien organisées et disciplinées car personne dans les Comités ne sait qu’elles sont filles de Marie, aussi peuvent-elles maintenir la même discipline dans tous les comités. Les résultats obtenus sont considérables : elles ont facilité beaucoup l’organisation des comités de l’Action libérale populaire et tant à Paris que par les Comités de Province, “la Ligue patriotique” a pu rassembler près d’un million [de francs] pour la lutte électorale grâce à leur concours et leur discipline. Monsieur Jacques Piou attache une très grande importance à leur concours pour l’avenir de l’Action libérale populaire. »
  • [18]
    Magali Della Sudda, « La charité et les affaires. Le cas de la Ligue patriotique des Françaises (1901-1914) », Entreprise et histoire, 56, 2009.
  • [19]
    AACF, H565, circulaire n° 4, 1902.
  • [20]
    AACF, H565, PV du 2e conseil, sd, sn.
  • [21]
    Parti socialiste-Section française de l’internationale ouvrière, sans titre, « déclaration commune des organisations socialistes adoptée le 13 janvier 1906 », p. 38-39.
  • [22]
    Le salaire journalier féminin était en 1914 de 1 à 2 francs : Laura Downs, « Salaires et valeur du travail. L’entrée des femmes dans les industries mécaniques sous le sceau de l’inégalité en France et en Grande-Bretagne », Travail, genre et sociétés, avril 2006, p. 36 ; Catherine Omnès, Ouvrières parisiennes, Marché du travail et trajectoire professionnelles au 20e siècle, Paris, EHESS, 1997.
  • [23]
    « La Ligue, ce qu’elle est, ce qu’elle veut », circulaire n° 22, insérée dans L’Écho de février 1904, mars 1904, et dans le recueil de L’Écho de 1909.
  • [24]
    ASV, Seg. di Stato, anno 1907, rubr. 12, fasc. 7, n° 25 929, copie du télégramme du card. Merry del Val à la baronne Reille, présidente de la LPDF, Rome, 30 septembre 1909.
  • [25]
    Emmanuel Barbier, Le devoir politique des catholiques à l’heure présente, Paris, Jouve, 1910, p. 316-318 ; Émile Poulat, Histoire, dogme et critique dans la crise moderniste, Paris, Casterman, 1962 et « Panorama internazionale della crisi modernista », dans Giuseppe Rossini (a cura di), Modernismo, Fascismo, communismo, aspetti e figure della cultura e della politica dei cattolici nel 900, Bologna, Il Mulino, 1972, p. 3-13 ; Pierre Colin, L’audace et le soupçon. La crise du modernisme dans le catholicisme français 1893-1914, Paris, Desclée de Brouwer, 1997 ; sur le féminisme moderniste, voir Roberta Fossati, Elite femminili e nuovi modelli religiosi nell’Italia tra Otto e Novecento, Urbino, QuattroVenti, 1997.
  • [26]
    Archives nationales (AN), F7 878 « Action libérale populaire », P[réfecture de] P[olice], extrait du rapport du 28 juillet 1911 ; ceci est confirmé par AACF, H567, lettre d’Henri Bazire, les Sables-d’Olonne, le 11 mars 1914 à Mlle Frossard : « J’hésite à vous écrire cette lettre de candidat honteux mais Flornoy m’y encourage et j’ai déjà trop éprouvé votre bienveillance pour ne pas agir bien simplement avec vous. On me dit que peut-être la Ligue pourrait m’aider dans ma propagande de Vannes ». Le candidat malheureux obtiendra une aide de la part de la Ligue, AAL, 9II3 « Exposé des raisons qui ont amené des divergences de vue dans le conseil central : Subvention de candidats en 1910 via les subventions à la Presse ». Et en 1914 : « Réduction des subventions mais via deux journaux de Vendée, don de 500 frs à Bazire ». Les ligueuses financent également les candidats ALP, Gailhard-Bancel et Denais en 1911 (AACF, H566).
  • [27]
    Archivio di Stato di Roma, fondo CNDI, busta n.1. Claudia Frattini, Il primo congresso delle donne italiane, Naples, Biblink, 2009.
  • [28]
    L. Scaraffia, A. M. Isastia, Donne ottimiste…, op. cit.
  • [29]
    Cecilia Dau Novelli, Società, Chiesa e associazionismo femminile. L’Unione fra le donne cattoliche d’Italia (1902-1919), Rome, AVE, 1988 ; Archivio generale ordine praedicatorum (AGOP), XIV 950 GIB 1, « Alcuni punti sulla storia dell’Unione », manuscrit, sd, 51 p.
  • [30]
    AGOP, XIV 950 GIB 7, Cristina Giustiniani Bandini, cahier manuscrit, Quaderno IV, s.l., s.d. p. 2.
  • [31]
    Maurizio Ridolfi, « Partiti elettorali e trasformazioni della politica nell’Italia unita », dans Pier Luigi Ballini, Maurizio Ridolfi (a cura di), Storia delle campagne elettorali in Italia, Milan, Mondadori, 2002, p. 65-88.
  • [32]
    AGOP XIV 950 GIB 103, « Viaggi della presidente » – dans ce cahier sont consignés tous les voyages de fondation des comités locaux.
  • [33]
    Y. Déloye, Les voix de Dieu…, op. cit., p. 205-216 ; Bruno Dumons, Catholiques en politique, un siècle de Ralliement, Paris, Desclée de Brouwer, 1993, p. 15 ; Yves-Marie Hilaire, « Les catholiques se rallieront-ils à la République ? », dans Gérard Cholvy, Yves-Marie Hilaire, Histoire de la France religieuse, Toulouse, Privat, t. 4, 1986, p. 83-95.
  • [34]
    Michel Offerlé, « Capacités politiques et politisations : faire voter et voter 19e-20e siècles », Genèses, 68, septembre 2007, p. 153-154.
  • [35]
    AGOP XIV 950 GIB 15, Quaderno XIV, Cristina Giustiniani Bandini, cahier manuscrit rédigé vers 1912, p. 24. On observe cela chez les hommes catholiques : l’Action libérale populaire se définit comme « surtout une association fraternelle où les liens d’une solidarité réelle et étroite unissent les uns aux autres tous les membres. C’est une famille immense dont la parenté s’étend à tous les individus innombrables, chacun d’eux ayant les mêmes droits à l’affection et à la protection de tous » (dans Emmanuel Saillard (dir.), Annuaire de l’Action libérale populaire et de la Ligue patriotique des Françaises 1904-1905. Recueil de renseignements pratiques à l’usage des adhérents, correspondants, délégués et membres des comités, Paris, secrétariats de l’ALP et de la LPDF, 1905, p. 6).
  • [36]
    A. Verjus, Le cens de la famille, op. cit.
  • [37]
    La prise de Rome, territoire pontifical, par les troupes italiennes – les Bersaglieri – en 1870 ouvre une période de tension entre le pape Pie IX, prisonnier dans ses propres États et le Royaume d’Italie, qui ne trouvera une issue qu’avec les accords de Latran en 1929.
  • [38]
    Emma Mana, « Le campagne elettorali in tempi di suffragio ristretto e allargato », dans P. L. Ballini, M. Ridolfi (a cura di), Storia delle campagne elettorali in Italia, op. cit., p. 89-136.
  • [39]
    M. Ridolfi, Il circolo vertuoso, op. cit.
  • [40]
    Fiorenza Taricone, Teoria e prassi dell’associazionismo italiano nel 19 e 20 secolo, Cassino, Università degli studi, 2003, et L’associazionismo femminile italiano dall’unità al fascismo, Milan, Ed. Unicopli, 1996.
  • [41]
    Liviana Gazzetta, « Votate all’obbedienza. Parabole esemplari di dirigenti cattoliche », Genesis, 2006, p. 79-98.
  • [42]
    R. Fossati, Elites femminili…, op. cit. ; Paola Gaiotti De Biase, Le origine del movimento cattolico femminile, Brescia, Morcelliana, 2002 ; une synthèse des textes de ce courant a été réunie dans Francesco Maria Cecchini (a cura di), Il femminismo cristiano. La questione femminile nella prima democrazia cristiana, Rome, Riuniti, 1979. Isabella Pera, « La questione femminile nel mondo cattolico nel primo Novecento », Ricerche di Storia sociale e religiosa, 59, 2001, p. 67-89.
  • [43]
    L. Gazzetta, « Votate all’ obbedienza… » art. cité.
  • [44]
    Magali Della Sudda, « La Ligue patriotique des Françaises et la condamnation de l’Action française (1926-1929). Une piste de recherche à la croisée de l’histoire religieuse et de l’histoire du genre », colloque Pie XI, École française de Rome, 4-6 décembre 2008, à paraître en 2010.
  • [45]
    Anne Cova (ed.), Comparative Women’s History, New Approaches, Social Science monographs, Boulder, Columbia University Press, 2006 ; et son intervention dans le séminaire « Genre, féminisme et mobilisations collectives », EHESS/EFiGiES, Paris, ENS, 20 février 2009.
  • [46]
    Charles Turgeon, Le féminisme français, Paris, 2 vol., 1902.
  • [47]
    Cf. annexes, Cristina Giustiniani Bandini.
  • [48]
    « Discours de Mme Reille », Écho de la LPDF, novembre 1905, p. 240.
  • [49]
    AGOP, XIV 950 GIB 4, « femminismo odierno ».
  • [50]
    Cf. M. Della Sudda, « Une activité politique féminine conservatrice… », cité, chap. 2.
  • [51]
    Magali Della Sudda, « La nébuleuse conservatrice. Réseaux féminins catholiques et réforme sociale 1900-1914 », intervention dans le séminaire « Le genre de la réforme sociale », Paris, EHESS, 17 février 2009.
  • [52]
    Liviana Gazzetta, « Antifemminismo e antimodernismo : Elena da Persico e la nascita dell’Unione fra le donne, cattoliche dItalia », dans Anna Maria Calapaj Burlini, Saveria Chemotti (a cura di), Donne in-fedeli. Testi, modelli, interpretazioni della religiosità femminile, Padova, Il poligrafo, 2005, p. 217-238.
  • [53]
    Ainsi la Primrose League proche des Tories au Royaume-Uni compte-t-elle principalement des femmes : voir Philippe Vervaecke, « La politique sans le parti. La Primrose League et la culture politique britannique, 1883-1919 », Politix, 81 (1), 2008, p. 81-104. Cette ligue sert de modèle à la LPDF.
  • [54]
    Philippe Levillain (dir.), Dictionnaire historique de la papauté, Paris, Fayard, 1994.
  • [55]
    AGOP, XIV 950 GIB 1, « Alcuni punti sulla storia dell’Unione », p. 18.
  • [56]
    Cristina Giustiniani Bandini (1869-1854) est issue de l’aristocratie romaine et proche des milieux pontificaux. Dominicaine, elle possède un capital culturel important. De fait, sa position défavorable dans une institution caractérisée par la hiérarchie des genres est contrebalancée à la faveur de ce contexte.
  • [57]
    ASV, Affari ecclesiastici straordinari (AES), Francia, 666 PO, Elezioni politiche 1928 – « Circa il cambiamento du denominazione dell’Action liberale populaire de sig Piou », n° 1449/28, Lettre de la nonciature apostolique de France, Luigi Maglione à Sua Eminenza Card. Gasparri, Seg di Stato di Sua Santità, Parigi, le 11 giugno 1928, et mémoire transmis par Jacques Piou sur l’ALP.
  • [58]
    AACF, H509, lettre de la vicomtesse de Vélard à Mme Terrasson de Senevas, 3 juillet 1910.
  • [59]
    Ibid.
  • [60]
    AGOP, XIV 950 GIB 84, correspondance avec Sabina Parravicino, déléguée régionale lombarde et fondatrice du comité de Milan.
  • [61]
    Sur le lien entre féminisme et modernisme, voir Alessandro Cavallanti, Modernismo e modernisti, Brescia, Tip. Ven. A. Lugazzo, 1907, chap. 9 « Il femminismo », p. 178 et suiv.
  • [62]
    Ornella Confessore, L’Americanismo cattolico in Italia, Rome, Studium, 1984, p. 29, Dizionario storico del movimento cattolico, Casale Monferrato, Marietti, vol. 3, 1982, p. 630.
  • [63]
    Sandor3. Agócs, « Christian Democracy and Social Modernism in Italy during the Papacy of Pius X », Church History, 42 (1), mars 1973, p. 73-88, notamment p. 74-76.
  • [64]
    Sn, UDCI, n° 1, « Per la sincerità e la chiarezza », p. 1.
  • [65]
    AGOP XIV 950 GIB 4 femminismo odierno.
  • [66]
    Paolina Carloni, « Dove vogliamo arrivare ? », UDCI, 24, 1912, p. 2.
  • [67]
    Après la réforme électorale de 1918 et l’acception du suffrage par le pape Benoît XV, la nouvelle présidente de l’UDCI, Maddalena Patrizzi, emboîte le pas et promeut activement le vote féminin.
  • [68]
    AGOP XIV 950 GIB 40 Circolari, cahier manuscrit.
  • [69]
    L’autonomie statutaire de l’Union féminine a été âprement débattue et défendue par la présidente, avec l’appui de Pie X, contre la volonté de Giuseppe Toniolo de rassembler catholiques hommes et femmes dans les comités de l’Union populaire.
  • [70]
    ASV, Seg.di Stato, 1910, rubr. 12, fasc. 9, UFCI, sopplemento mensile all’ACF, octobre 1910, p. 3.
  • [71]
    AN F7 12 878 « Action Libérale populaire », « Projet de constitution libérale et documents présentés aux comités de l’ALP par la section d’études sociales 1907 ». L’étude approfondie du projet politique de cette formation masculine et de ses évolutions reste encore à faire.
  • [72]
    Charles Tilly, « Les origines du répertoire d’action collective contemporaine en France et en Grande Bretagne », Vingtième Siècle. Revue d’histoire, 4 (4), 1984, p. 89-108 ; pour une lecture critique et un bilan des usages de cette notion, voir Michel Offerlé, « Retour critique sur les répertoires de l’action collective (18e-20e siècles) », Politix, 81 (1), 2008, p. 181-202.
  • [73]
    « On proteste », Écho de la LPDF, 28, avril 1905.
  • [74]
    Baronne René Reille, Écho de la LPDF, 1903 ; Danielle Tartakowsky, « Place de la Concorde, de 1880 à nos jours. La construction sociale de l’espace politique », French Historical Review, 27 (1), 2004, p. 145-174. Le choix de la place de la Concorde n’est pas laissé au hasard : en 1895, une première manifestation à l’initiative de l’abbé Garnier y avait eu lieu pour défendre les congrégations.
  • [75]
    L’ALP se rapprochant du parti de cadres dans la typologie classique de Maurice Duverger.
  • [76]
    Mlle de Montcuit, « Compte rendu de la manifestation du 11 février 1903 », Écho de la LPDF, 2, février 1903, p. 23.
  • [77]
    Nathalie Dompnier, « Voter avant le droit de vote », communication à la journée d’études Triangle/Grispo « Existe-t-il un vote féminin ? », organisé par Anne Verjus et Renaud Payre, Lyon, ENS-LSH, 27 juin 2008.
  • [78]
    Serge Noiret, « Le campagne elettorali dell’Italia liberale, dai comitati ai partiti politici », dans Pier Luigi Ballini (a cura di), Idee di rappresentenza e sistemi elettorali in Italia tra Ottocento e Novecento, Venise, Istituto Veneto di Scienze, Lettere ed Arti, 1997.
  • [79]
    Marthe de Vélard, Vingt-cinq ans d’action catholique, Faire face (1902-1927), Paris, LPDF, 1927, p. 18-19.
  • [80]
    Sur le rôle de l’épouse dans la carrière politique, cf. Éric Phélippeau, L’invention de l’homme politique moderne. Mackau, l’Orne et la République, Paris, Belin, 2002.
  • [81]
    « Mon voyage à Rennes », Écho de la LPDF, 18, 2e année, juin 1904, p. 382.
  • [82]
    « Réunion du Comité central 30 juin 1904 », Écho de la LPDF, 20, 2e année, août 1904, p. 421.
  • [83]
    « Discours de la baronne Reille », Écho de la LPDF, 21, 2e année, septembre 1904, p. 441.
  • [84]
    « Rapport de la Baronne de Boury », Réunion de la Presse, Congrès de la LPDF à Lourdes et Tarbes, 1906, Paris, Diéval, 1906, p. 93-94.
  • [85]
    E. Saillard (dir.), Annuaire…, op. cit. ; Louis Laya, La révision des listes électorales, législation et jurisprudence, Lille, Impr. Typographique et lithographique, 1907.
  • [86]
    AN F7 12 771, « Élections 1902 », rapport de Marseille, le 20 janvier 1902, du Commissariat spécial : « La propagande faite parmi les femmes pour les élections à la question politique, a porté : partout dans les salons, au théâtre, dans l’église, au confessionnal même, les dames de la haute société marseillaise s’occupent des élections législatives prochaines. Les membres des comités constitués sous le patronage de “l’Action libérale” et de “la Patrie française” font des quêtes à domicile, elles ne négligent pas surtout de s’adresser particulièrement aux divers fournisseurs, couturières, modistes, etc. “ l’Association pour la défense des droits civiques rue Grignan 5, qui s’occupe comme on le sait de surveiller la confection de la liste électorale, et qui s’occupe en outre de la surveillance des bureaux de vote pendant les scrutins, un grand nombre de femmes se sont présentées, qui pour vérifier l’inscription de leurs époux ou fils, qui pour faire inscrire leurs parents, leurs domestiques ou leurs fermiers. Plusieurs de ces derniers n’avaient jamais songé à se faire porter sur les listes électorales ».
  • [87]
    « Rapport de Mlle de Beaulieu du Comité de Nantes », dans Réunion de la Presse, Congrès de la LPDF, p. 99.
  • [88]
    Mlle de Forcade, « Rapport de Mlle de Forcade », p. 125.
  • [89]
    Ph. Vervaecke, « La politique sans le parti… », art. cité.
  • [90]
    AGOP, XIV 950 G.I.B. 4, Cristina Giustiniani Bandini, « Azione cattolica e femminismo odierno », p. 25.

1En France comme en Italie, l’avènement des démocraties libérales s’est accompagné d’une double marginalisation des femmes catholiques dans le jeu politique : en tant que femmes d’abord, sous la Troisième République et le Royaume d’Italie, elles sont exclues du corps électoral jusqu’au lendemain de la seconde guerre mondiale [1] ; en tant que catholiques, ensuite, elles sont cantonnées par l’Église dans leur rôle de gardiennes de la foi et du foyer, tenues de rester à l’écart des activités politiques [2]. De sorte qu’au début du 20e siècle, pour des raisons comparables mais selon des traditions différentes, les Italiennes et les Françaises ne sont ni électrices, ni éligibles [3].

2À travers l’étude de deux associations féminines de masse, la Ligue patriotique des Françaises (LPDF) et l’Union des femmes catholiques d’Italie – Unione fra le donne cattoliche d’Italia (UDCI) – fondées durant la première décennie du 20e siècle, cet article met au jour les effets du genre, d’une part, et le rôle de l’Église catholique, d’autre part, dans la diffusion de l’apprentissage démocratique. Plus précisément, l’étude de ces associations éclaire un paradoxe qui permet de revisiter l’histoire du suffrage et celle de la politisation : celui de la participation des femmes catholiques, hostiles au vote, à la compétition électorale en l’absence de suffrage [4]. La LPDF a été fondée pour préparer la reconquête catholique par les urnes à l’occasion des élections de 1902 [5]. Elle est dirigée par des aristocrates proches des milieux politiques conservateurs. Rapidement, elle revendique plusieurs centaines de milliers de membres, et devient l’association féminine la plus importante du siècle, avec plus d’un million et demi d’adhérentes en 1933 [6].
Sa « petite sœur italienne », l’UDCI, voit le jour en 1909. Après l’offensive laïque du congrès féministe de Rome en 1908, l’UDCI est proclamée à Rome lors des fêtes de la béatification de Jeanne d’Arc. Cette cérémonie est l’occasion pour les deux associations féminines catholiques de mettre leur action sous le patronage de la sainte et de sceller leur lien. Dirigée par des aristocrates, l’UDCI a cependant un recrutement moins large, elle revendique 40 000 membres en 1914, et surtout, elle semble se tenir à distance de l’action électorale.

Chronologies des associations

1901 : Loi sur les associations qui vise à établir un contrôle préfectoral sur les congrégations religieuses. Fondation de la Ligue des femmes françaises à Lyon.
1902 : Élections législatives, contre-offensive catholique, fondation le 17 mai 1902 de l’Action libérale populaire par Jacques Piou et de la Ligue patriotique libérale des Françaises (21 mai) pour favoriser l’élection des candidats catholiques. Échec électoral des candidats catholiques.
1903 : Mort de Léon XIII, élection de Pie X. Merry del Val secrétaire d’État du Vatican.
1904 : Élections municipales en France ; atténuation du non expedit en Italie.
1905 : Loi de Séparation.
1906 : Élections législatives en France, nouvel échec électoral pour les catholiques. La baronne Reille succède à la baronne de Brigode à la présidence de la LPDF
1907 : Congrès de Lourdes de la LPDF ; crise moderniste : le pape Pie X demande à la Ligue de rester sur le terrain social et religieux. Abandon officiel de l’œuvre électorale féminine et du nom LPDF-ALP. La Ligue de femme rompt avec l’ALP.
1908 : Rome, congrès féministe auquel prennent part les catholiques italiennes, vote d’une motion contre l’enseignement religieux obligatoire à l’école.
1909 : Béatification de Jeanne d’Arc, cérémonies de célébration à Rome et proclamation de la naissance de l’Union des femmes catholiques d’Italie ; Cristina Giustiniani Bandini nommée présidente par le pape.
1910 : Mort de la baronne Reille, la vicomtesse de Vélard est nommée présidente de la LPDF.
1911 : Premières plaintes auprès des évêques de la part de conférencières de la direction de la Ligue.
1913-1914 : Enquête du cardinal Sevin, préconise la dissolution de la Ligue en tant qu’association loi 1901.

3Si l’action des féministes a fait l’objet de nombreux travaux [7], celle des femmes catholiques, qui ne revendiquaient pas les mêmes modalités de participation aux affaires publiques que les hommes, reste encore méconnue [8]. La centralité et la sacralité du vote dans les études menées sur l’apprentissage démocratique ont peut-être contribué à faire oublier que l’exercice démocratique ne se réduit pas au dépôt du bulletin dans l’urne, mais implique toute une série d’activités connexes, de la propagande à la distribution même des bulletins, en passant par la lutte contre la fraude électorale, qui pouvaient impliquer des femmes [9]. Les premières enquêtes menées sur les électrices ont souligné la dimension « parapolitique » des organisations féminines catholiques, sans pour autant approfondir les réflexions sur l’insertion de ces structures dans la compétition électorale [10]. Dans la lignée des travaux de sociologie historique menés sur l’apprentissage du suffrage et le rôle du clergé dans les mobilisations électorales [11], c’est à ces formes indirectes de participation à la compétition électorale que cet article s’intéresse.
Pourquoi, tandis que les catholiques françaises interviennent dans les affaires électorales dès 1902, les catholiques italiennes sont-elles invitées à agir par d’autres moyens pour mettre en conformité la cité terrestre et la cité de Dieu ? Quel espace d’action publique et collective ces associations définissent-elles à la jonction de l’engagement religieux et politique ? Comment le répertoire d’action politique élaboré par les groupes masculins est-il réapproprié par celles qui, bien que citoyennes, n’ont pas pour perspective immédiate la participation directe au système démocratique ?

Naissance de l’action catholique féminine en France et en Italie

Le comité électoral, la forme première de la Ligue patriotique des Françaises

4L’association féminine est d’abord fondée dans le but de collecter des fonds pour les élections de 1902 et constituer un Bloc de défense religieuse pour contrer le Bloc de défense républicaine emmené par Waldeck-Rousseau. Le premier aumônier de la Ligue, le jésuite Régis Pupey-Girard, rend compte de ce climat de concurrence électorale qui entoure la fondation et explique l’intervention des femmes dans la compétition électorale. Le comité parisien est mis en place autour de Jacques Piou, député fondateur de l’Action libérale populaire en mai 1902, et de Jules Lemaître, président de la Ligue de la Patrie française alors moribonde [12].

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« Un groupe de Dames parisiennes cherchait le moyen d’aider les hommes à sauver le pays et elles eurent l’idée de faire des quêtes pour soutenir les élections des bons candidats. Après avoir eu le plein assentiment du Vén. Card. Richard, elles cherchaient à s’organiser, lorsqu’elles apprirent qu’une Ligue, ayant ce but, venait d’être fondée à Lyon et de suite elles s’y unirent. » [13]

6Le rôle des jésuites, tout comme celui de la Supérieure de la société des Filles de Marie [14], Mlle Faivre, est volontairement minimisé [15]. En effet, le comité parisien de la Ligue des femmes françaises avait été fondé à l’initiative du provincial de la Compagnie de Jésus [16], de l’archevêque de Paris, de la Supérieure, à la demande des candidats catholiques ralliés soucieux du financement de leur campagne aux élections législatives de 1902. À la suite de ces élections qui sont un échec pour les catholiques, le comité parisien fait scission, prenant d’abord le nom de Ligue patriotique libérale des Françaises, puis en juillet 1902, celui de Ligue patriotique des Françaises-Action libérale populaire. Les premières membres du bureau sont des Filles du cœur de Marie ou des proches d’hommes politiques de l’ALP.

7L’association se développe rapidement, s’appuyant sur les réseaux d’associations catholiques féminines et enfantines pré-existantes, aidée par un clergé favorable à l’apostolat féminin encouragé par le pape Léon XIII [17]. Elle recrute ses dirigeantes d’une part chez les Filles du cœur de Marie et d’autre part dans la noblesse d’Empire et d’Ancien régime. Le souci d’intégrer des représentantes de la bourgeoisie industrielle et du commerce est manifeste dès les premières réunions [18]. La baronne Geneviève Reille (1844-1910) conférencière et fondatrice de la LPDF, épouse du député-sénateur René Reille et mère d’Amédée et René Reille fils, tous deux députés ALP, évoque très clairement cette nécessité. Une circulaire mentionne de façon explicite la question des ressources financières et humaines : elle recommande pour fonder un comité d’« intéresser à l’organisation quelques personnes riches et [de] recruter de nombreuses adhérentes à la LPDF » [19]. La baronne Reille précise même la composition sociale d’un comité local efficace : « 5 personnes de l’aristocratie, 5 de la bourgeoisie, 5 du commerce, 5 du peuple » [20]. L’aristocratie est volontairement surreprésentée, de même que le commerce et la bourgeoisie, dont on peut supposer qu’il s’agit des milieux d’affaires plus fortunés.
Au sein de l’association, les membres sociétaires qui versent 25 francs de cotisation annuelle ou qui s’acquittent d’au moins 500 francs se distinguent des adhérentes qui paient une cotisation d’un franc par an. À titre de comparaison, les cotisations de la Section française de l’internationale ouvrière étaient de 0,25 francs par an en 1906 [21]. La cotisation annuelle à la LPDF est abordable pour les travailleuses mais reste beaucoup plus élevée que celle de la formation ouvrière [22]. Les dirigeantes de la LPDF entendent donc dès sa fondation s’appuyer sur une élite sociale et religieuse – aristocrates et consacrées – pour fonder un mouvement féminin de masse afin d’étendre l’influence de l’Église auprès des électeurs. Les œuvres sociales constituent alors un moyen pratique d’apostolat pour attirer les femmes des milieux populaires et lier l’adhésion à un ensemble de services sur le modèle des organisations ouvrières [23].
À partir de 1906, des tensions au sein de la direction centrale se font jour entre les Filles du cœur de Marie qui considèrent que l’activité électorale outrepasse leur mandat religieux et celles qui entendent poursuivre l’œuvre électorale. La baronne de Brigode est sommée de démissionner de la présidence. Elle est remplacée par la baronne Reille qui, tout en se soumettant aux directives pontificales de 1907 qui interdisent l’action électorale féminine [24], poursuit le financement électoral de manière officieuse. En effet, l’élection de Pie X en 1903 amorce un changement de position de la hiérarchie. La Séparation de 1905, puis l’échec électoral de 1906 semblent donner raison à celles qui voient dans l’action électorale un moyen peu sûr de regagner la France à Dieu. C’est aussi à cette période que l’offensive antimoderniste débute, ayant pour ligne de mire les libéraux et parmi eux la LPDF en tant qu’alliée de l’Action libérale populaire de Jacques Piou [25]. Lors du congrès de Lourdes de 1907, le secrétaire d’État de Pie X, le cardinal Merry del Val demande donc aux ligueuses de rester sur les terrains strictement religieux et social et d’abandonner définitivement l’œuvre électorale. Les liens avec ALP sont officiellement rompus et la Ligue patriotique abandonne cette partie de son nom. Toutefois, les financements ponctuels se poursuivent de façon plus discrète, notamment quand les candidats de l’ALP sont en difficulté [26].

Une réaction au féminisme laïque, naissance de l’UDCI

8La proclamation de l’Unione fra le donne cattoliche d’Italia (UDCI) advient quelques années plus tard. Pour comprendre le contexte de fondation de cette organisation, il faut revenir sur le moment qui rigidifie la ligne de partage entre les organisations féminines catholiques et féministes italiennes. En 1908, à Rome, se tient le premier congrès national féministe sous l’égide du Conseil national des femmes italiennes (CNDI), qui fédère différentes associations féministes, et sous le patronage du maire socialiste Ernesto Nathan. Y prennent part des catholiques milanaises qui se revendiquent du féminisme chrétien [27]. Ce congrès se déroule sans heurts jusqu’à la séance sur l’éducation. C’est une caisse de résonance des débats ayant eu lieu à l’Assemblée quelques mois auparavant sur l’instruction religieuse à l’école primaire. Les représentantes des organisations affiliées au CNDI votent le caractère facultatif de cet enseignement à l’école publique, certaines catholiques prennent part au vote tandis que d’autres manifestent publiquement leur désaccord.

9S’opposant au féminisme du CNDI qui se définit principalement par son attachement à l’égalité civile et la promotion de la laïcité, les catholiques proches des milieux pontificaux réagissent [28]. La princesse Cristina Giustiniani Bandini (1869-1959), tertiaire dominicaine ayant renoncé à la vie conventuelle et proche du pape Pie X, sollicite les cercles féminins catholiques romains pour fonder une union féminine catholique capable de contrer les « féministes maçonnes » [29].

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« Un mouvement féministe irréligieux et antireligieux existe, et il nous impose, à nous catholiques, non seulement l’obligation de la vigilance la plus attentive, mais encore d’une fédération de nos volontés, qui vise à protéger les principes religieux immuables. » [30]

11Le recrutement est d’abord aristocratique, notamment dans le sud de la péninsule, semblant obéir à des logiques notabiliaire et clientélaire assez comparables à celles observées pour les formations politiques masculines conservatrices [31]. Mais il a ceci de spécifique qu’il s’appuie aussi sur une sociabilité religieuse féminine et qu’il est étroitement lié aux rapports entretenus avec la hiérarchie ecclésiastique. Le comité central romain puise dans les relations de la princesse Giustiniani Bandini ; les comités locaux sont fondés comme à la LPDF : une conférence est organisée par une aristocrate locale, qui invite les paroissiennes de son milieu les plus zélées à venir écouter C. Giustiniani Bandini dans ses salons ou ceux de l’ordinaire (archevêque ou évêque). Les noms de la présidente locale, de la vice-présidente, de la secrétaire, préalablement soumis à l’approbation de la présidente nationale, sont alors proposés et approuvés par l’auditoire et le représentant du clergé qui sera l’assistant ecclésiastique dudit comité [32]. L’association italienne revêt un caractère explicitement élitiste : il faut former une élite féminine capable d’aller regagner au catholicisme les masses sécularisées par sa culture et sa solide formation religieuse. Ceci explique en partie pourquoi l’association revendique peu d’adhérentes au regard de la LPDF (40 000 à l’UDCI, contre 545 000 à la LPDF en 1914).
Le champ de bataille ne se situe donc pas sur le même plan dans les deux pays : dans le contexte français, l’organisation féminine catholique répond à une politique gouvernementale, tandis qu’en Italie, l’UDCI doit contrer l’influence du féminisme laïque auprès des femmes, y compris des catholiques.

Les logiques nationales de la mobilisation féminine catholique

La règle du jeu électoral

12La question des frontières de l’activité politique légitime est un des points d’achoppement sur lesquels les catholiques ont buté depuis la Révolution.

13L’élargissement du corps électoral introduit en 1848 en France s’est traduit par une reformulation théologique de la participation au régime démocratique et par le Ralliement [33]. Celui-ci est imposé par le sommet de la hiérarchie et l’activité électorale, en tant que corollaire de la démocratie et du libéralisme politique, reste associée à la division partisane. Léon XIII, dans ses encycliques, insiste sur le rôle de l’électeur-chef de famille dans la restauration d’une société chrétienne qui passe tout autant par le bon vote que par l’éducation chrétienne des enfants. Se dessine à travers cette représentation catholique de la démocratie une stricte répartition sexuelle des rôles politiques : aux hommes la charge de l’élaboration des lois et du gouvernement, aux femmes l’entretien des coutumes, qui seraient des moyens bien plus puissants et efficaces pour faire advenir la conformité de l’ordre social terrestre aux principes chrétiens.

14En Italie, à l’occasion des élections de 1904, Pie X atténue le non expedit pour faciliter la victoire face aux candidats socialistes ou ministériels suspects d’anticléricalisme. Ce non expedit avait été prononcé par le pape Pie IX après l’ultime conquête territoriale unitaire : la prise de Rome en 1870 pour en faire la capitale italienne. La réforme électorale de 1912 contraint à nouveau la hiérarchie à redéfinir ses positions en matière de suffrage : si l’ensemble des Italiens est appelé aux urnes, les catholiques peuvent-ils s’abstenir ? Le pacte Gentiloni, du nom du dirigeant de l’Union électorale catholique autorise les candidats catholiques à se présenter en tant que tels aux élections législatives.

15Les deux contextes nationaux placent donc les citoyennes dans des positions apparemment similaires, elles ne peuvent voter, mais selon des modalités différentes [34]. Dans le contexte français de suffrage universel et de Ralliement, mais aussi de structuration du champ politique avec des formations partisanes, la hiérarchie a besoin de l’appui des femmes pour contribuer à influencer le vote. Elle présente l’absence du droit de vote féminin comme la condition même d’un dépassement des clivages partisans par des catholiques organisées, qui réalisent l’union là où les hommes sont impuissants [35].

16Dans le régime censitaire et capacitaire italien, les Italiennes semblent ne pas être inclues dans le corps électoral selon un « cens familial » qui n’est pas sans rappeler le suffrage censitaire masculin de 1830 à 1848 en France, et place les citoyennes dans la même situation que les citoyens les moins fortunés et les moins éduqués [36]. C’est le père de famille aisé ou instruit, représentant sa domesticité qui est électeur. Les élections sont pensées sur deux niveaux : politique/national et administratif/local, où la compétition est plus ouverte. Le non expedit limite la participation des hommes catholiques électeurs au jeu politique et la constitution de formations partisanes catholiques. Tant que le suffrage masculin est « restreint », que la Question romaine n’est pas réglée [37], la sociabilité politique catholique trouve son expression dans des structures différentes des partis politiques qui ne visent pas en premier lieu la conquête du pouvoir au moyen des élections [38]. Les catholiques, tout comme les socialistes, privilégient une action électorale municipale et un engagement associatif [39]. Ne pouvant voter, n’étant pas majoritairement concernés par les élections, les citoyens passifs mobilisent d’autres voies que le vote pour rendre visible leurs revendications politiques [40]. Pour la hiérarchie catholique, l’inclusion des femmes dans le corps électoral, leur participation aux élections politiques pour constituer un électorat de masse n’est donc pas envisageable.
Dans les deux cas, il n’est donc pas question de vote féminin direct. Mais les limites de l’interdit fluctuent selon les configurations politiques nationales.

Les effets du contexte local sur les conceptions de l’action collective

17Dans le contexte général de la coordination des revendications féministes peu après 1900, la question féminine et celle du suffrage semble gagner certains milieux catholiques de la région milanaise [41]. Plus particulièrement, des femmes comme Adelaide Coari ou Luisa Anzoletti préconisent une plus grande égalité civile, économique et politique entre les hommes et les femmes en lien avec un projet démocrate chrétien [42]. Trois éléments font de Milan le centre du féminisme chrétien : c’est une ville industrielle où une élite féminine bourgeoise et cultivée est présente sur le terrain social, où les forces politiques s’organisent selon les cadres du système démocratique moderne, et par conséquent, où les hommes catholiques sont sensibles à la démocratie chrétienne.

18Le Congrès féministe de Milan tenu en 1907 et promu par le Faisceau féminin d’Adelaïde Coari et Sabina Parravicino élabore un programme féminin minimum en accord avec les autres groupes féministes laïques milanais. Le vote y figure, ainsi que l’égalité salariale et l’accès des femmes aux professions, témoignant de l’ouverture à la modernité de ces féministes chrétiennes milanaises. Leur programme diffère cependant de celui de leurs coreligionnaires masculins en ce qu’il entend d’abord résoudre la question féminine et qu’il insiste sur les œuvres et les qualités supposées féminines. Ce courant féministe chrétien est rapidement marginalisé : la nomination d’Elena Persico, proche de la ligne pontificale à la tête de la revue milanaise L’Azione muliebre en 1904 pour contrer l’influence d’Adelaide Coari d’abord, puis le choix de nommer Cristina Giustiniani Bandini comme présidente de l’UDCI témoignent de la volonté du pape de mettre au pas la tentative de conciliation entre féminisme et catholicisme. La revendication du suffrage administratif (municipal) constitue alors le point de rupture le plus important entre les orthodoxes et les suspectes de modernisme [43]. Ce courant subit ainsi le même sort que les démocrates chrétiens de l’Opera dei congressi, empêchant durablement les femmes catholiques d’intervenir dans la compétition politique (nationale).
De façon comparable à ce qui se produit dans le cas milanais, les configurations catholiques et électorales locales en France ne sont pas sans influer sur l’implantation de la LPDF et sur ses prises de position. Ainsi, tout en respectant une ligne ralliée sur le plan national, certains comités locaux peuvent soutenir explicitement la ligue d’Action française. C’est le cas notamment du comité du Mans, fondé avec l’aide de Mme Havard de la Montagne, épouse du journaliste d’Action française. La marquise Madeleine Leclercq de Juigné, née Schneider, en prend la tête en 1908 et soutient la carrière politique de son mari élu député de la Loire-inférieure en 1906 et opposé à l’Action libérale populaire. La condamnation de l’Action française en 1926 sera l’occasion d’expliciter les positionnements locaux des comités de la LPDF et de mettre au jour les tensions sur la ligne politique à adopter [44].

Les logiques religieuses de l’engagement féminin

Se distinguer des féministes laïques

19À la faveur d’un contexte d’offensive du gouvernement radical en France et libéral en Italie, l’institution catholique attachée à la hiérarchie traditionnelle des genres où les hommes et les valeurs associées au masculin sont dominantes, cède et fait une place à certaines femmes qui, parce qu’elles appuient leur revendication d’organisation autonome sur les propriétés associées à leur sexe (conservatrices de la vertu, instruments de la régénération de la famille, attachées à l’ordre), se voient investies de la mission de défendre l’Église et les autres femmes. L’organisation des femmes catholiques fait aussi pendant au regroupement des associations féministes au sein du Conseil national des femmes françaises et du Conseil national des femmes italiennes [45]. Ces fédérations promeuvent l’égalité civile entre les sexes, le droit de suffrage, le droit au travail, et sont attachées à la laïcité [46]. Toute la difficulté pour les catholiques organisées est de se distinguer de ces féministes d’un mauvais genre pour affirmer que le véritable féminisme ne peut être que chrétien [47]. C’est ce dont témoigne la baronne Reille, présidente de la LPDF de 1906 à 1910.

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« On nous traitera d’extravagantes qui s’occupent de politique ; on dira que nous sommes des féministes. De la politique, nous n’en voulons pas faire, elle est trop au-dessous de nous ! Quand au féminisme, Dieu nous garde de bouleverser l’ordre établi par lui ! Nous acceptons et nous aimons notre rôle de femme ; nous ne demandons qu’à être des auxiliaires dévouées ; mais puisque les hommes faiblissent dans leur tâche et que nos prières ne suffisent plus, nous saurons nous unir pour combattre et pour vaincre. » [48]

21Reprenant à son compte la hiérarchie de genre, la baronne précise cependant les cas où les femmes peuvent accomplir les activités considérées comme masculines. La faiblesse des hommes dans les affaires publiques nécessite l’intervention de « femmes fortes », de « chrétiennes viriles » qui pallient les hommes défaillants. Ce discours se rapproche du Féminisme chrétien fondé en France par Marie Maugeret en 1896. Antidreyfusarde, soucieuse d’avoir l’appui de la hiérarchie catholique, Marie Maugeret rassemble quelques centaines de personnes dans son mouvement parisien qui se distingue des autres groupes catholiques par la promotion du vote féminin. Elle organise également les congrès Jeanne d’Arc chaque année où la Ligue des femmes françaises, la Ligue patriotique des Françaises et d’autres groupes catholiques sont représentés.

22En Italie, l’opposition au féminisme maçonnique est théorisée par la présidente et diffusée dans ses conférences [49]. Les véritables racines du féminisme se trouvent, selon elle, dans le christianisme qui a fait la femme libre à l’égal de l’homme [50].
Si la nécessité d’affirmer sa singularité par rapport au féminisme tel qu’il est défini par les organisations nationales affiliées au Conseil international des femmes est si prégnante, c’est que la concurrence est forte entre les groupes de catholiques et les féministes dans le domaine de la réforme sociale. La spécificité des catholiques va résider dans la fondation d’œuvres sociales ancrées dans une tradition charitable et à finalité apostolique [51]. Cette action sociale est sous-tendue dans les deux associations par l’idée que la restauration de la société chrétienne ne passera pas prioritairement par la voie des urnes, mais par celle des œuvres [52]. Elle peut aller, dans le cas français, jusqu’à l’entrée indirecte dans la compétition électorale [53]. Sans toutefois revendiquer le suffrage, puisque la complémentarité dans l’œuvre électorale préside à l’action politique des ligueuses.

La hiérarchie catholique et l’organisation des femmes : entre tradition patriarcale et pragmatisme

23La politique est définie par la hiérarchie catholique – et plus généralement par les hommes politiques de l’époque – comme une activité avant tout masculine. Aussi, l’irruption de femmes organisées pour mener une action collective, acceptée sous le pontificat de Léon XIII, ne va-t-elle pas de soi sous celui de son successeur Pie X, attaché à combattre les dérives de la modernité dans et hors de l’Église [54]. Ce dernier, qui doit faire face au développement d’un courant moderniste en France puis en Italie, est réticent à voir s’affirmer une action collective féminine ayant des prétentions à l’intervention dans les affaires publiques, comme en témoigne la fondatrice de l’UDCI dans son manuscrit sur l’histoire de l’UDCI.

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« Le Saint Père […] se montra contraire à toute organisation féminine et avec sa bonhomie il ajouta dans son cher dialecte vénitien : “La femme, qu’elle plaise, qu’elle se taise et qu’elle reste à la maison”.
Je répliquai que certainement, c’était plus commode, mais que quand la femme était devenue la cible, comme en témoignaient l’intérêt de la secte [maçonnique] pour la préparation de ce premier congrès [féministe de Rome en 1908] et l’affirmation de certains maçons notoires, cela devenait un devoir pour nous, femmes catholiques, non seulement de nous défendre, mais de veiller à sauver nos sœurs imprudentes et en danger. » [55]

25L’aristocrate romaine mobilise alors ses réseaux mondains et religieux pour convaincre le sommet de la hiérarchie. Elle entend, par le soutien du pape, créer un rapport de force favorable aux femmes catholiques contre les féministes laïques et socialistes, mais aussi contre les féministes chrétiennes réunies dans la Fédération féminine milanaise. Au nom même de la défense de l’institution, certaines femmes dotées de propriétés sociales particulières parviennent à déstabiliser les rapports sociaux de sexe au sein de l’institution catholique, sans pour autant les remettre en cause de façon explicite ou revendicative [56].
L’argument du danger imminent convainc le pape de la nécessité de voir ces femmes se défendre pour étendre l’influence de l’Église et, en son sein, ramener les brebis égarées à l’orthodoxie. Et qui mieux que des militantes animées par une spiritualité de combat peut constituer un rempart contre l’offensive maçonnique ? L’argument de la nature spécifique féminine joue ici pour laisser au sein de l’Église se constituer ces « phalanges de femmes » se levant pour porter le drapeau de l’Église et de la patrie en danger.

Les enjeux de la qualification politique

26Continuum de l’engagement religieux, comment l’action collective féminine catholique est-elle qualifiée ou disqualifiée ? Dans un contexte de mise au pas des tentatives démocrates chrétiennes, qui passe notamment par la dissolution de l’Opera dei Congressi en Italie et par celle du Sillon en 1910, le qualificatif politique prend un tour péjoratif et dépréciatif. Mais il ne désigne pas les mêmes catholiques selon que l’on se trouve à Rome ou à Milan, à Paris ou en Vendée. La qualification de formes d’apostolat nouvelles chez des catholiques organisées fait l’objet d’une lutte pour définir les pratiques légitimes.

27Pour les dirigeantes de la LPDF, les femmes qui contreviennent aux directives pontificales sont celles qui ont choisi le camp royaliste où l’on est « politique d’abord ». L’association féminine s’inscrit dans la tentative d’Albert de Mun et de Jacques Piou de fonder en France un grand rassemblement catholique modéré à l’instar du Zentrum allemand [57]. Comme l’explique en 1910 la présidente nouvellement élue, Marthe Terrasson de Sénevas vicomtesse de Vélard (1859-1949), les « politiciennes » sont les monarchistes parce qu’elles contestent le régime républicain et la ligne pontificale du Ralliement. Les divisions politiques ne sont pas admises pour tout ce qui touche aux principes mêmes de l’organisation des pouvoirs. Discuter la forme du régime participe de la remise en cause de la politique conciliatrice de Léon XIII et surtout de la contestation des catholiques libéraux ou ralliés en France. Cette opinion est manifeste dans la lettre que la présidente adresse à sa mère, ligueuse, le 3 juillet 1910. Elle explique son refus de s’unir à la ligue d’Action française de la marquise de Mac-Mahon, qui pourtant était présente à la LPDF lors de sa fondation, car « Mme de M[ac] M[ahon] est à la tête d’un groupe politique. Elle le dit hautement ; son but est de rétablir la royauté » [58]. L’accusation de faire de la politique revient à discréditer une activité militante féminine royaliste qui remet en cause les tentatives de regroupement des catholiques de l’Action libérale populaire. Le groupement politique de femmes apparaît ainsi en désaccord avec la hiérarchie et tout le travail initial des associations consiste à légitimer leur existence en échappant à cette catégorisation.

28La qualification politique sert aussi à délégitimer l’action féminine catholique en Italie. La présidente s’en défend, jouant sur l’acception du terme.

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« Seulement dans la religion, dans l’Église et avec l’Église, nous, femmes italiennes, pourront atteindre toutes les fins providentielles et nous élever […] aux plus hautes cimes de la vie morale et civile. Est-elle politique la divine mission de l’Église catholique ? Nous serons ouvertement avec l’Église catholique, même au prix de paraître ce que nos adversaires disent de nous. » [59]

30Au prix de la qualification d’association de parti – celui de l’intransigeance – qui divise les rangs catholiques au lieu de maintenir leur unité, les militantes de l’UDCI doivent poursuivre leur action pour défendre l’Église. Le parti pris de l’intransigeantisme, garant de la conformité de l’action aux vues du pape suscite des réticences dans le monde catholique que la présidente invite à dépasser, quitte à ce que sa position soit qualifiée de politique par ses adversaires [60].

31La présidente retourne alors le stigmate et renvoie la catégorie « politique » aux promotrices du suffrage féminin. Ce sont alors les catholiques libérales, celles accusées de promouvoir le modernisme qui sont disqualifiées au nom du caractère politique de leur action. En effet, le pontificat de Pie X est marqué par l’accentuation de la lutte contre le modernisme et ses avatars [61]. La question de l’application de la méthode historique à l’exégèse dépasse très vite le cadre intellectuel et religieux pour s’étendre en Italie à des aspects plus larges de la vie sociale. Or, parmi les promotrices de l’américanisme et du modernisme en Italie, se trouve la comtesse Sabina Parravicino Thaon di Revel (1865-1944). Cette catholique sensible aux idées démocratiques est la traductrice d’écrits des évêques des diocèses de la côte Est des États-Unis qui incitaient les laïques et le clergé à œuvrer avec les organisations neutres ou protestantes pour faire face à la question sociale et contrer le mouvement ouvrier [62]. Elle collabore à des revues catholiques progressistes et souhaite un rapprochement des catholiques avec les féministes. La publication par le Corriere della Sera en avril 1914 de sa correspondance avec son directeur spirituel, le cardinal Rampolla, archevêque de Milan, provoque l’ire de la présidente romaine : les lettres teintées de contestation de l’autorité pontificale et de modernisme lui valent son « excommunication » par la présidente et sa démission en 1914.
Ainsi, les enjeux de la qualification de cette activité collective féminine qui s’oppose tant dans les modalités que dans les principes aux mobilisations féministes conduisent à des réappropriations multiples du terme politique. Si la politique est identifiée comme masculine, la comparaison nous montre que, selon le courant du catholicisme et la configuration partisane nationale – voire locale –, le terme peut désigner aussi bien l’action menée par les catholiques intransigeantes que par les plus enclines à la modernité.

Matrices spirituelles de l’action catholique féminine

32La transgression des normes de genre au nom même de la défense des identités sexuelles distinctes se fait au moyen d’une justification théologique de l’intervention féminine dans les affaires publiques.

La reconquête par le verbe, l’influence dominicaine à l’UDCI

33L’association italienne, dirigée et fondée par une dominicaine, a gardé de sa matrice originelle une caractéristique de l’ordre des frères prêcheurs. C’est donc par le verbe et par la culture que l’UDCI ramènera « les brebis égarées au troupeau ». L’action de l’UDCI s’appuie sur l’idée que toute autorité vient de Dieu. Contre le modernisme, elle doit tout restaurer dans le Christ et faire advenir son règne sur terre par une pratique rigoureuse et la conformité des lois terrestres aux lois divines [63]. Cette vulgate est diffusée au moyen des bulletins et surtout des conférences de l’infatigable Cristina Giustiniani Bandini. En février 1910, l’Azione cattolica femminile, le bulletin pour les cadres et l’Unione femminile cattolica, celui destiné aux adhérentes de l’UDCI, publient un texte qui résume la mission apostolique des catholiques italiennes et définit la pratique politique légitime pour celles-ci. C’est avant tout la formation spirituelle et morale des femmes que son association entend assurer puisqu’« elle a pour but de rassembler les femmes italiennes afin de raffermir la profession de la foi catholique, de leur faciliter la diffusion d’une saine culture adaptée à la mission de la femme chrétienne, et de rendre plus pratique, plus efficace et répondant à la nécessité des temps les œuvres auxquelles la femme se dédie, dans le champ de la religion, de la charité, de l’action sociale » [64].

34Faisant preuve d’un certain pragmatisme quant à la nécessité pour l’institution ecclésiale de répondre aux problèmes de la société démocratique et industrielle par des moyens modernes, la présidente clarifie les buts de l’action féminine catholique. L’UDCI se donne ainsi pour vocation première de regrouper les femmes catholiques italiennes afin de leur permettre d’accomplir leur mission divine et leur apostolat d’une façon adaptée aux temps modernes. L’union incite à un regroupement large des femmes catholiques italiennes, pourvu qu’elles aient cette foi « virile » qui anime les âmes d’élite. En appelant à la communauté naturelle des femmes et à la communauté naturelle de la patrie, la présidente mobilise le registre de la « similitude » comme élément de mobilisation féminine catholique. Elle propose ainsi aux femmes catholiques d’élargir le terrain de l’apostolat, réclamant qu’elles mettent en conformité la cité terrestre avec la cité de Dieu, par l’éducation religieuse et les œuvres.

35L’action politique féminine est acceptable si elle est entendue non pas comme l’activité partisane qui divise, mais comme celle de chrétiennes étendant à toutes les ramifications de la vie sociale l’influence de l’Église. C’est une manière de désamorcer la présomption de division associée à la politique qui semble s’opposer à la légitimation de l’action catholique féminine.

36

« Le bon chrétien ne peut assister indifférent à l’athéisme de l’État qui gouverne : s’il a le pouvoir, il doit se mettre à l’œuvre pour que sa foi ne soit pas vilipendée, mais respectée et représentée sincèrement, partout, dans les municipalités, dans les Parlements, les bureaux de travail, dans les chambre de Commerce, dans les congrégations de charité. Nous devons faire sentir partout l’efficacité de notre foi, si nous avons une foi vivante. Est-ce une foi de parti politique ? C’est l’antique foi de nos martyres et de nos mères qui inspire tout notre programme. »
L’exercice du pouvoir ne passe donc pas par la désignation de représentants mais plutôt par l’implication directe dans toutes les institutions où s’incarne le pouvoir politique et/ou économique. Mais cette évolution, cette réappropriation de la modernité ne peut se faire que si elle est ancrée dans des pratiques religieuses féminines. La présidente en appelle ainsi aux martyres chrétiennes, aux mères antiques, mères de la patrie et mères de l’Église qui renvoient également à une époque où les femmes pouvaient baptiser, où elles venaient d’être affranchies de l’esclavage antique, puisque le Christ a fait d’elles les égales des hommes devant Dieu [65].

Une réappropriation féminine catholique des formes de l’activité politique moderne

37Comment, dès lors, se traduit la tension entre ce refus du suffrage féminin et la nécessité d’utiliser les moyens modernes développés dans les régimes démocratiques pour rallier les voix des électeurs ?

Les positions vis-à-vis du suffrage

L’abstinence électorale de l’UDCI

38Tant que le suffrage était censitaire en Italie, le refus du suffrage féminin semble aller de soi au sein de l’UDCI. Mais à partir de la réforme de 1912 se pose de façon très discrète dans la presse interne de l’UDCI la question du suffrage féminin. Un premier article publié à la fin de l’année 1912 par Paolina Carloni témoigne du refus du suffragisme, plus que du suffrage. C’est une inflexion importante.

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« Certes, le jour où un tel droit [le vote administratif et politique] sera reconnu à la femme, ce sera un devoir pour nous d’en profiter, il ne peut en être autrement si nous ne voulons pas renoncer à une arme qui entre des mains sectaires se retournerait vite contre les grands principes chrétiens, précipitant ainsi la ruine de la famille. Mais nous ne lèverons pas le petit doigt pour hâter le lever de ce jour, persuadées que nous sommes que ce n’est pas dans les turbines des passions politiques que s’exerce la véritable, la plus bénéfique influence féminine ! » [66]

40Tant que le droit de vote n’est pas accordé aux femmes, ce n’est pas aux femmes catholiques d’en précipiter l’obtention. En revanche, une fois celui-ci accordé, les catholiques espèrent s’en servir comme d’une arme pour contrer les projets des radicaux et des libéraux hostiles au pouvoir temporel de l’Église [67]. Cette position pragmatique est rapidement contrée par la présidente Cristina Giustiniani Bandini, plus intransigeante. La circulaire rédigée le 24 décembre 1912 rappelle aux présidentes des comités locaux qu’il faut « laisser la politique de côté ».

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« Cette année auront lieu en Italie les élections générales. Rappelons-nous, s’il tant est qu’il en soit besoin, que dans l’intérêt de notre mouvement collectif, nous devons nous abstenir de tout ce qui pourrait sembler une adhésion à la campagne électorale qui sera menée avec ardeur par les partis politiques. C’est pour cela que le Bureau de la Présidence, est déterminé à recommander à nos Comités de ne pas prendre part durant toute l’année 1913 aux Congrès promus par les “Unions” et associations masculines et par les Directions diocésaines, où, même selon les meilleurs critères d’analyse, le sujet des élections devra nécessairement être traité. » [68]
Les discussions et divisions partisanes qu’impliquerait la participation des catholiques à la campagne électorale inquiètent la présidente de l’UDCI. Non seulement l’union connaît des tensions liées aux prises de position intransigeantes de la présidente, mais en plus, le combat aux côtés des unions catholiques masculines paraît susceptible de menacer l’autonomie de l’UDCI difficilement acquise [69]. Le conflit religieux sur les relations entre laïcs et consacrées se double d’un conflit de genre autour de l’autonomie de l’action collective féminine. En effet, l’Union des femmes catholiques d’Italie devrait alors se soumettre aux directives de l’Union électorale, seule habilitée à trancher ces questions pour les catholiques italiens. Aux femmes catholiques de faire les mœurs si elles veulent que les hommes fassent de bonnes lois [70].

Au-delà du Ralliement, un révélateur de l’incomplète acceptation du régime démocratique

42Le discours de la présidente italienne illustre l’un des paradoxes de cette invisible politisation féminine, nécessaire pour restaurer le pouvoir de l’Église. Cette politisation des œuvres – qui deviennent les instruments de la transformation politique et passent ainsi du registre de la pratique charitable à celui d’une mise en forme des principes chrétiens dans la société – s’opère en France en révélant l’imparfait ralliement à la République. Elle remet ainsi en question les effets de label : la LPDF se revendique du libéralisme, tout comme l’ALP. Mais le refus du suffrage témoigne tout autant du refus d’agir comme les hommes que de la méfiance à l’égard d’un système où l’autorité vient du peuple. Le projet constitutionnel rédigé par la section d’études sociales de l’ALP propose un suffrage familial sur le modèle belge, ainsi qu’un collège de grands électeurs désignés selon les professions, et donne un indice du degré d’acceptation de la République par les membres de cette section [71]. Tout comme à l’ALP, le projet politique de la LPDF repose sur une organisation sociale régie par les corporations et où l’autorité politique viendrait de Dieu. La participation féminine indirecte à la compétition est présentée comme la poursuite sur le terrain institutionnel de la lutte pour la reconquête religieuse. Le suffrage n’est alors qu’un moyen parmi d’autres de mettre en conformité les lois terrestres et les lois divines et non l’expression aboutie de la souveraineté populaire.

Un répertoire d’action genré ?

43Pour comprendre la façon dont ces femmes conservatrices tentent d’imposer en France leur conception du débat public et de faire changer les lois sans passer par le vote, l’analyse d’un répertoire d’action à la lumière du genre s’avère intéressante [72]. C’est-à-dire que l’ensemble des moyens utilisés pour agir collectivement est contraint par le système représentatif inégalitaire qui exclut les femmes de la représentation politique démocratique et par l’appartenance sociale des membres de ce groupement. Pour être légitimes, les actions collectives féminines catholiques doivent passer par une réappropriation de gestes commis par des hommes, tout en se distinguant des actions menées par les féministes ou les femmes socialistes.

44Comment définir alors la spécificité d’un « répertoire d’action féminin conservateur » ? Comme les hommes, elles utilisent des « moyens d’action autonomes différents de ceux dont font usage les autorités », mais excluant par exemple tout recours à l’autorité (publique) ou la force, elles défendent leurs intérêts dans un cadre associatif. Ce cadre n’est pas seulement mobilisé par des femmes. Mais tandis que les hommes ont un éventail plus large de formes d’organisations collectives, il devient pour les femmes la forme quasi unique de mobilisation.

45Elles interpellent les autorités contre la politique « laïcarde » du bloc en introduisant une mise en scène de la fonction maternelle et éducatrice qu’elles considèrent comme spécifiquement féminine. La première pétition de femmes catholiques réunissant plusieurs millions de signatures est portée en 1901 à Mme Loubet. Le 13 mai 1905, pendant les discussions à la Chambre, Mlle Frossard présente le travail accompli par la Ligue lors du Congrès Jeanne d’Arc. Elles ont déjà recueilli en quelques semaines plus 525 000 signatures, 30 000 venaient de Toulouse, 25 000 de Bretagne [73]. Elles en auront 4 millions au moment du vote de la loi.

46Elles tiennent des assemblées où elles élaborent des programmes. Mais ces assemblées revêtent parfois des formes qui s’apparentent au salon bien plus qu’aux réunions publiques. « La présentation publique de programme » se fait à travers les tracts, la presse ou dans la rue. Les manifestations de rue, moins fréquentes mais plus spectaculaires font partie des actions nouvelles pour ces femmes conservatrices. La première manifestation importante fut celle du mois de juillet 1902 à Paris, qui rassembla, aux dires des organisations, 50 000 personnes à l’initiative de l’ALP et de la LPDF. Présentée comme la manifestation des « mères de famille », elle est un moyen pour les conservateurs de créer un rapport de force en utilisant un élément habituel du répertoire d’action collective du mouvement ouvrier. Les dirigeantes de la LPDF revendiquent le fait de ne pas « laisser la rue aux Apaches » et de s’approprier ainsi un lieu d’expression privilégié du mouvement ouvrier [74].
Ce discours est absent de la formation masculine alliée de la LPDF qui ne veut pas se placer sur le même terrain que les hommes de la partie adverse. La manifestation de la place de la Concorde est légitime parce que ce sont les femmes qui l’organisent. Ce mode d’action n’est pas celui auquel recourent les militants de l’Action libérale populaire, qui lui préfèrent une activité de lobbying, de propagande plus conforme à leur habitus de notables [75]. Les aristocrates de la Ligue, parce qu’elles sont des femmes, échappent à la nécessité de la distinction et peuvent, quand l’urgence des temps le requiert, utiliser les techniques du mouvement ouvrier pour créer le rapport de force. Le patronage de Jeanne d’Arc, qui leur permet d’assumer un rôle de combattante contre la « politique sectaire » en puisant dans l’histoire un modèle de guerrière pour justifier leur action, les prémunit contre l’accusation d’irruption dans un monde masculin selon des modalités combatives. Mais, en ces temps de suffrage dit universel, le tract, le bulletin de vote ont supplanté les épées. Et la mise en scène de la foule peut contribuer à créer un rapport de force avec le gouvernement. Attentives aux mobilisations ouvrières et aux méthodes utilisées par les féministes « maçonnes » pour étendre leur influence, les dirigeantes de la LPDF ne reculent donc pas devant les manifestations, qui, pour être efficaces, n’en doivent pas moins rester exceptionnelles.

Illustration 1

« Manifestation des “Mères de famille” »

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« Manifestation des “Mères de famille” »

Source : L’Illustration, 3101, 2 août 1902, p. 32.

47La manifestation est mixte, les aristocrates sont en chapeau et cela donne un spectacle étonnant. Bien que les hommes soient présents, les mères de famille sont mises en avant [76].
En plus de ces actions « classiques », les femmes de la LPDF revendiquent deux activités spécifiques associées à une spécificité de genre : l’action en terme d’influence et la lutte contre la fraude électorale. Non que la mobilisation de réseaux ou le contrôle de la fraude électorale soient le monopole des femmes catholiques [77].Mais ces actions sont légitimées à la LPDF par le fait qu’elles correspondraient aux normes de genre en vigueur et aux comportements féminins attendus. De la distribution des bulletins à la proclamation des résultats, différentes étapes scandent le déroulement de la compétition qui peuvent voir des femmes prendre une part active à certaines de ces activités [78]. Tout l’enjeu consiste alors pour les associations à légitimer la participation des femmes catholiques à des activités connexes au scrutin, normalement accomplies par des hommes.

Le vote sous influence

48La reconquête par les urnes est le premier objectif de ces groupes féminins, comme le rappelle la vicomtesse de Vélard pour les 25 ans de la fondation de la LPDF en 1927.

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« L’occasion s’offrait, propice grâce aux élections de mai 1902. Mais […] comment les femmes feraient-elles le premier pas dans l’action civique alors qu’on ne pouvait envisager aucune action directe, le vote féminin n’étant pas encore à l’ordre du jour ? Deux moyens d’agir s’offraient à la femme chrétienne : celui d’exercer une influence méthodique et organisée et celui de recueillir les subsides nécessaires à une campagne électorale. » [79]

50Le premier moyen qui sied aux femmes pour intervenir indirectement dans l’issue du scrutin est l’influence auprès des hommes [80]. Les normes de genre, en même temps qu’elles sont transgressées de façon pratique, sont ainsi rigidifiées de façon discursive. On prête aux femmes le pouvoir d’influencer, de faire l’opinion et de ranimer le courage des hommes catholiques, rappelant ainsi les stéréotypes de genre qui associent l’influence et la persuasion au pouvoir féminin. Les ligueuses elles-mêmes se font volontiers l’écho de cette représentation, comme en témoigne cet article d’une ligueuse anonyme :

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« Enfin, tâchons d’agir sur nos maris, en les disposant à bien voter. Car, ne l’oublions pas, tout dépend des élections. […] Si vous le voulez, femmes, vous le pouvez car la France a de l’intelligence, du vouloir, et beaucoup plus de puissance qu’on ne croit. À plusieurs reprises, en effet, ce sont des femmes qui ont sauvé la Patrie. Rappelez-vous de Judith qui sauva la nation Juive, rappelez-vous de Jeanne d’Arc qui a sauvé la France. » [81]

52Pour la baronne Reille, « il faut refaire la mentalité du pays par les femmes ». Les organisatrices de la ligue doivent ainsi « labourer le terrain » [82], convaincre les hommes de bien voter ou, quand ce sont des notables, de se présenter devant les électeurs. La baronne Reille revient sur ce mode d’influence lors du congrès de Rennes en 1904 qui se tient après les élections municipales.

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« Nous avons mis notre marque sur les dernières élections municipales, et ces faits témoignent que nous ne sommes pas trop présomptueuses quand nous prétendons arriver à changer la mentalité de la France… Nous avons protesté contre l’indifférence et maintenant, aucun homme n’oserait avouer qu’il se désintéresse des luttes électorales ; il serait accueilli à son foyer par un sourire de dédain… Nous avons protesté contre la fermeture des écoles, contre le vol de nos libertés ; nous n’avons pas réussi mais nous ne désarmons pas et instruisons le peuple qu’on trompe. » [83]
Ainsi, là où les autres formes de l’action collective sont restées infructueuses, les dirigeantes insistent sur la persuasion, afin de ranimer le courage des adhérentes. Elles désamorcent aussi le reproche de faire de la politique, comme nous l’avons vu plus haut, puisque celle-ci apparaît comme le seul moyen qui reste aux ligueuses pour faire valoir leurs droits.

Illustration 2

La division sexuelle du travail électoral

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La division sexuelle du travail électoral

Source : Archives de la Province de France, Fonds Pupey-Girard, IPd655.

Nettoyer les listes électorales

54Autre action revendiquée comme légitime et seyant aux femmes : la moralisation de la vie politique par la lutte contre la fraude électorale – préfectorale, devrait-on dire du point de vue des ligueuses – et le quadrillage des électeurs. Le bilan électoral dressé lors du congrès de 1906 par la baronne de Boury, responsable de la section de la Presse, offre un aperçu du savoir-faire électoral de certaines ligueuses.

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« Je suis persuadée que tous nos efforts pour la presse seront inutiles au point de vue des élections si nous n’arrivons pas à obtenir autour de nous la révision des listes électorales. Nos déléguées de Presse peuvent déjà y aider en faisant des classements de tous ceux qui reçoivent le bon et le mauvais journal dans leur localité, leur quartier ; dans les villes, c’est plus difficile, mais je connais pourtant une zélatrice qui, en 1902, dans un seul quartier de Paris a réussi à faire rayer 1 200 noms indûment inscrits. Je sais aussi qu’à Nantes, le même effort a été tenté avec succès. À Marseille, nous savons tous les résultats obtenus il y a quatre ans, lors des élections municipales par la révision des listes. Je pourrais citer aussi un faubourg parisien où, cette année, plusieurs milliers de voix ont été ainsi supprimées, ce qui a permis de lutter avec chance de succès. » [84]

56Le rapport, qui ne porte pas à première vue sur l’œuvre électorale, est l’occasion d’évoquer l’action électorale des ligueuses. Dès 1902, les femmes se sont emparées de l’institution démocratique, « toilettant » les listes, bien qu’elles n’y figurent pas, faisant de la propagande pour les « bons candidats ». Les manuels électoraux destinés aux militants de l’ALP sont aussi diffusés à la LPDF et expliquent les rouages du système électoral [85]. Les comités locaux de la LPDF sollicitent les paroissiennes les plus zélées pour connaître les bons et mauvais électeurs. Elles établissent un classement méthodique des électeurs selon les informations obtenues par la dizainière ou la dame de quartier, recoupées par le type de journal lu dans la famille. Ensuite, elles s’attachent à vérifier l’inscription sur les listes électorales et à signaler les fraudes. Le code électoral stipule que tout citoyen peut se procurer une copie des listes mais que seuls les électeurs ont le droit de faire des réclamations. La section de la Presse, qui impose un quadrillage systématique, « méthodique », des quartiers, est le lieu d’acquisition d’une compétence pour cette tâche particulière de mise à jour des listes électorales. Elle s’associe à des associations d’électeurs pour faire faire par les hommes ce que le code leur interdit en tant que femmes.

57La moralisation de la vie politique, par des femmes qui se pensent plus vertueuses, aptes par « nature » à mettre de l’ordre dans et mettre en ordre la vie publique prend ici une forme très concrète. Cette action est confirmée par la Sûreté générale qui constate qu’« en somme, on n’a jamais assisté à Marseille à un réveil aussi important du corps électoral, surtout dans les milieux hostiles aux socialistes » [86]. Les inscriptions d’électeurs se font plus nombreuses. Dans la circonscription de Nantes, Mlle de Beaulieu, conférencière, indique que « notre active propagande, la révision des listes électorales, que nous avons faites dans une circonscription où se présentait “un candidat blocard”, a contribué dans une certaine mesure à lui enlever 5 000 voix » [87]. Dans le Lot-et-Garonne, où Mlle de Forcade préside le comité, la Ligue « a bien souvent été la caisse qui facilitait par voie de tract ou d’affichage, les répliques à telle calomnie lancée contre le candidat catholique, qui inondait tous les foyers de la belle lettre pastorale sur le grave devoir actuel de l’électeur français » [88].

58L’activité électorale ne vise pas seulement à faire de la propagande pour les bons candidats, mais aussi à s’assurer que le scrutin se déroulera d’une façon favorable en épurant les listes électorales des électeurs indûment inscrits, en favorisant au contraire l’inscription des bons électeurs. L’externalisation de ces tâches à des militantes bénévoles participe de la division sexuelle du travail politique dans une démocratie moderne qui n’est pas sans rappeler la répartition des rôles au sein de la Primrose League anglaise [89]. Cette division sexuelle du travail électoral ne se retrouve pas en Italie où les comités électoraux masculins catholiques n’existent pas en raison du non expedit et où la situation de l’UDCI dans un courant intransigeant empêche les militantes catholiques d’approcher de trop près les urnes électorales.

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À travers la comparaison franco-italienne, deux matrices nationales d’engagement féminin ont pu ainsi être distinguées : selon la structuration du champ politique et selon l’organisation des hommes catholiques dans le jeu politique, les groupes de femmes organisés sous la houlette du clergé n’utilisent pas les mêmes registres de l’action collective. Aux côtés des catholiques entrés en politique, les ligueuses françaises mettent en place un répertoire féminin conservateur de l’action collective qui à la fois emprunte aux techniques modernes de conquête des suffrages et s’inscrit dans le prolongement d’activités identifiées comme plus spécifiquement féminines. En revanche, le contexte politique et religieux italien ne laisse pas d’espace pour une telle intervention électorale des catholiques italiennes aux côtés de l’Union électorale catholique, qui n’a pas pour objet premier la conquête des suffrages mais la formation des citoyens catholiques. Ces schémas nationaux, brossés à grands traits, sont complexifiés quand le niveau de comparaison n’est plus national (bidimensionnel) mais se situe au niveau local, ou au niveau de la nébuleuse des organisations féminines et féministes. Les organisations féminines catholiques s’opposent ainsi aux féministes laïques et proposent un modèle d’action collective complémentaire de l’action collective masculine de leurs coreligionnaires. Si l’association italienne, marquée par la spiritualité dominicaine et par l’intransigeance, propose des modalités d’action collective fortement ancrées dans un répertoire d’action ancien – patronné mais tendant à devenir national –, l’association française propose à ses membres des actions empruntant aux techniques modernes de la mobilisation. Au nom de la complémentarité, les femmes conservatrices de la LPDF vont se réapproprier des façons d’agir du mouvement ouvrier – manifestation de rue, adhésion ouvrant droit à un éventail d’œuvres sociales – que les hommes de l’ALP ne peuvent utiliser en raison de leur situation de concurrence avec les formations partisanes dans le champ politique.
La position de ces associations changera avec la Grande Guerre, En effet, la participation des catholiques aux gouvernements d’Union sacrée, l’avènement d’un pape « démocrate » en 1914, et la part prise par les femmes dans l’effort de guerre ont légitimé la revendication du suffrage féminin. Celui-ci devient un moyen d’action envisageable tant par la LPDF en 1919 que par l’UDCI en 1917. S’ouvre alors une ère de préparation civile des catholiques françaises et italiennes, rapidement close en Italie, abandonnée en 1933 en France lors de la fusion de la LPDF avec la Ligue des femmes françaises.


Annexes

Sources

61Les deux organisations ont laissé des archives qui ont fourni le matériau principal de cet article. Les archives de la LPDF sont conservées à l’Action catholique des femmes, à Paris. Elles témoignent de la bureaucratisation et de la professionnalisation de l’engagement en son sein et de la volonté de conserver les traces de l’orthodoxie durant les premières années de l’association. En revanche, les archives de l’UDCI sont d’abord des archives personnelles, celles de la présidente et fondatrice. Elles sont conservées en l’église Santa Sabina, à Rome, dans les archives générales de l’ordre prêcheur.

62Les documents conservés aux Archives secrètes vaticanes – correspondance avec la hiérarchie et rapports annuels – sont venus compléter ces sources, ainsi que les archives de la Sûreté générale pour la France. Les Archives secrètes vaticanes indexent la déviance : le sommet de la hiérarchie est l’ultime instance de règlement des conflits au sein de ces structures catholiques. C’est aussi vers le Vatican que les regards des dirigeantes se tournent pour avoir les lignes de leur action. La Sûreté générale a surveillé la LPDF en raison de son caractère politique et de son rôle électoral. L’association italienne, sans doute en raison de son absence d’intervention électorale, n’a pas fait l’objet d’une telle surveillance de la part des autorités italiennes durant la période libérale (1900-1914).

La rupture de 1907 entre la LPDF et l’ALP

63ASV, Seg. di Stato, anno 1907, rubr. 12, fasc. 7, n° 25929, copie du télégramme du card. Merry del Val à la baronne Reille, présidente de la LPDF, Rome, 30 septembre 1909. Il remercie pour le rapport du congrès précédent et indique la ligne à suivre pour le nouveau congrès de 1907.

64« Il m’a fait constater une fois de plus le caractère éminemment apostolique et social de votre grande Association. Les 330 comités de la Ligue attestent du développement toujours incessant de cette œuvre et du bien qu’elle fait pour vous encourager et pour donner un gage d’espérance sur l’avenir de votre cher pays. Le Saint-Père a beaucoup agréé la déclaration par laquelle vous avez voulu vous offrir comme les “auxiliaires humbles, dociles et zélées du clergé”. Les nombreux témoignages d’évêques vous ont prouvé que vos vœux étaient agréés. Tout en maintenant les cadres et les groupements de votre Association rattachés les uns aux autres dans une union qui fait leur force, vous savez répartir les plus précieux concours entre les œuvres diverses de l’Église de France.

65Du Vénéré Cardinal de Paris, d’un grand nombre d’évêques, vous avez reçu les plus bienveillants encouragements. Le Saint-Père, qui vous a déjà manifesté toute la satisfaction que lui donne votre grande œuvre, se réjouit de ses progrès. Il fait des vœux pour que la ligue prenne un essor de plus en plus grand. La netteté de son programme, la fin qu’elle se propose, ses méthodes de propagande, les moyens qu’elle emploie dans ses œuvres, le patronage des évêques, la présence d’un Aumônier dans son conseil de direction, accrédité par S.E. le Card. de Paris, sont autant de garanties de caractère apostolique, en dehors de toute action politique. Le Saint-Père vous approuve et vous encourage à poursuivre avec confiance la tâche entreprise pour le bien de l’Église et de la France.

66Les conditions ne peuvent qu’attirer de plus en plus la sympathie et le concours des femmes chrétiennes, des membres des Associations religieuses, qui trouveront, en s’y dévouant, une heureuse application de l’esprit d’apostolat.

67Vous préparez un nouveau Congrès pour le mois d’Octobre prochain, dans les mêmes conditions que l’an dernier.
En vous félicitant de ce zèle, S.S. vous adresse les plus complets encouragements et vous accorde la bénédiction apostolique ainsi qu’à toutes les femmes chrétiennes de France qui y prendront part. »

Le féminisme chrétien selon l’UDCI

68Cristina Giustiniani Bandini a consigné sur des feuillets le texte d’une de ses conférences « Azione cattolica et femminismo odierno », dans laquelle elle trace la limite entre son mouvement et le féminisme. Cet extrait explique clairement la différence entre les deux mouvements et la tentative de réappropriation du féminisme par l’association catholique.

69« La femme est la christianisatrice par excellence, parce que le christianisme est toute une loi d’amour, comme Dieu lui-même est amour ; et personne mieux que la femme ne peut le comprendre et avoir l’intuition intime de la vertu. Enlever à la femme sa mission silencieuse de purification et de sacrifice dans la société revient tout simplement à précipiter la ruine de cette haute dignité où le Christ l’avait reconduite. C’est pour cela que les agitateurs incroyants modernes sont les principaux responsables des revendications féminines ; c’est pour cela que le mouvement féminin actuel est principalement soutenu et encouragé par les socialistes. Alors qu’un développement massif du féminisme chrétien sera toujours un signe de progrès social voulu par l’esprit même du christianisme, et auquel l’Église ne fera jamais obstacle, un mouvement qui n’est pas déterminé par les hauts idéaux chrétiens sera une anomalie, une vraie aberration ! Mesdames, j’aime le féminisme qui élève la femme sans rien lui faire perdre de ses convenances [decoro] et de ses attraits féminins, je condamne la concurrence et la lutte de la femme avec l’homme, qui, en étant contraires aux préceptes divins du Christianisme, sont contraires à la nature même de son aimable et affectueuse féminité, qui n’est pas avide d’honneur mais de sacrifice. J’exclus l’organisation féminine à base d’exaltation et d’exagération, je la soutiens si elle est fondée sur le bon sens et de tempérance. » [90]


Date de mise en ligne : 17/03/2010

https://doi.org/10.3917/rfsp.601.0037

Notes

  • [1]
    Annarita Buttafuocco, Donne e cittadinanza. Donne e diritti sociali nell’Italia liberale, Sienne, Protagon editori Toscani, 1997 ; Anna Rossi Doria, Diventare cittadine, il voto alle donne in Italia, Turin, Riuniti, 1996 ; Gianna Pomata (a cura di), Ragnatele di rapporti, Turin, Rosenberg & Sellier, 1988 ; Giulia Galeotti, Storia del voto alle donne in Italia, Rome, Biblink, 2006 ; Michèle Riot-Sarcey, Femmes et pouvoir, Paris, Kimé, 1993 ; Anne Verjus, Le cens de la famille, Paris, Belin, 2002.
  • [2]
    Lucetta Scaraffia, « Fondatrice e imprenditrice », dans Emma Fattorini, Santi, culti, simboli (1815-1915), Turin, Rosenberg & Selliers, 1997, p. 479-491.
  • [3]
    La législation autrichienne autorisait, en Vénétie et en Lombardie, les femmes propriétaires séparées de corps (i.e. les veuves et les célibataires) à voter aux élections municipales.
  • [4]
    Bernard Lacroix, « Ordre politique et ordre social », dans Madeleine Grawitz, Jean Leca (dir.), Traité de science politique, t. 1 : La science politique, science sociale, ordre politique, Paris, PUF, 1985, p. 469-565 ; Jacques Lagroye (dir.), La politisation, Paris, Belin, 2003 ; Yves Déloye, La sociologie historique du politique, Paris, La Découverte, 2007 ; sur la politisation masculine en Italie dans des structures mises en place par des élites locales : Gilles Pécout, « Les sociétés de tir dans l’Italie unifiée de la seconde moitié du 19e siècle », Mélanges de l’École française de Rome. Italie Méditerranée, 102 (2), 1990, p. 533-676 ; Maurizio Ridolfi, Il circolo virtuoso. Sociabilità democratica, associazionismo e rappresentenza politica nell’Ottocento, Florence, Centro editoriale toscano, 1990.
  • [5]
    Archives de l’Action catholique des femmes (AACF), H1 « Recueil de statuts ». Elle prend d’abord le nom de Ligue patriotique libérale des Françaises le 21 mai 1902, puis de Ligue patriotique des Françaises action libérale populaire le 13 juin 1902.
  • [6]
    Ces chiffres sont repris à la fois par la Sûreté générale et par les informateurs du Vatican. Comme tous ceux fournis par la Ligue sur les adhésions et manifestations ne peuvent être établis avec certitude, les fichiers d’adhérentes, pourtant tenus avec soin, n’ont pas été conservés.
  • [7]
    Pour l’histoire française : Florence Rochefort, Laurence Klejman, L’égalité en marche, le féminisme sous la Troisième République, Paris, Des Femmes/Presses de Sciences Po, 1989 ; Paul Smith, Feminism and the Third Republic. Women’s Political and Civil Rights in France, 1918-1945, Oxford, Oxford University Presse, 1996 ; Christine Bard, Les filles de Mariane, histoire des féminismes (1914-1945), Paris, Fayard, 1995 ; pour l’histoire italienne : Franca Pieroni Bortolotti, Alle origini del movimento femminile in Italia (1848-1892), Torino, Einaudi, 1963, et Femminismo e partiti politici in Italia (1919-1926), Roma, Riuniti, 1978 ; Lucetta Scaraffia, Anna Maria Isastia, Donne ottimiste. Femminismo e associazioni borghesi nell’Ottocento e Novecento, Bologne, Il Mulino, 2002 ; Maria Linda Odorisio, Monica Turi, Lucetta Scaraffia (a cura di), Donna o cosa ? I movimenti femminili in Italia dal Risorgimento a oggi, Turin, Cara, 1991.
  • [8]
    L’historienne Odile Sarti fut la première à envisager cette activité politique dans un contexte de sécularisation dans A Feminine Response to the Secularization of French Society, New York, Garland, 1992. Les travaux de Bruno Dumons (Les dames de la Ligue des femmes françaises, Paris, Cerf, 2006) ont mis en évidence le rôle des femmes de la Ligue des femmes françaises lors des élections de 1902. Cependant, cette association se retire explicitement des affaires politiques pour revenir à un terrain « strictement religieux » ; Anne Cova montre comment la maternité a servi d’entrée dans les affaires publiques à ces organisations catholiques (Au service de l’Église, de la patrie et de la famille. Femmes catholiques et maternité sous la Troisième République, Paris, L’Harmattan, 2000). Elle ne s’attarde pas sur les processus d’inclusion à l’activité électorale ni à leur retrait après 1919. Enfin, une monographie est disponible en Italie, mais le rôle politique de l’UDCI est assez peu évoqué. Cf. Cecilia Dau Novelli, Società, Chiesa e associazionismo femminile. L’Unione fra le donne cattoliche d’Italia (1902-1919), Roma, A.V.E., 1988 ; Magali Della Sudda, « Une activité politique féminine conservatrice avant le droit de suffrage en France et en Italie. La ligue patriotique des Françaises (1902-1933) et l’Unione fra le donne cattoliche d’Italia (1909-1919) », thèse de doctorat d’histoire, Paris/Rome, EHESS/La Sapienza, 2007.
  • [9]
    Yves Déloye, « Pour une sociologie historique de la compétence à opiner “politiquement”. Quelques hypothèses de travail à partir de l’histoire électorale française », Revue française de science politique, 57 (6), décembre 2007, p. 775-798.
  • [10]
    L’ouvrage classique tiré de l’enquête commandée par l’UNESCO en 1952 mentionne l’importance des organisations féminines catholiques dans l’encadrement des Françaises et leur rôle dans la socialisation politique. Sur ce point, cf. Mattei Dogan, Jacques Narbonne, Les Françaises face à la politique, comportement politique et condition sociale, Paris, Armand Colin, 1955, chap. 4 « Les incidences politiques des sentiments religieux des femmes », p. 50-60, et « Les organisations féminines et leur rôle dans la propagande politique », p. 113-133. Cette piste de recherche n’a pas été poursuivie plus en amont ni en aval du moment des premières consultations électorales.
  • [11]
    Yves Déloye, Les voix de Dieu. Pour une autre histoire du suffrage électoral : le clergé catholique français et le vote 19e-20e siècle, Paris, Fayard, 2006.
  • [12]
    Jean-Pierre Rioux, Nationalisme et conservatisme. La ligue de la patrie française 1899-1904, Paris, Beauchesne, 1977.
  • [13]
    Archives de la Compagnie de Jésus, Province de France (ASJPF), fonds Pupey-Girard (HPu60), « Ligue 1901-1906 », lettre manuscrite, probablement du P. Pupey-Girard, sd, sn.
  • [14]
    Les membres de la Société des Filles du Cœur de Marie sont consacrées dans le secret. Elles prononcent à l’issu de leur noviciat les trois vœux d’obéissance, de chasteté et de pauvreté et y ajoutent celui du secret de leur consécration. Elles vivent ainsi dans le monde sans résider dans la maison commune, tout en restant fidèles à leurs vœux, et accomplissent leur apostolat auprès de populations que l’habit religieux rebuterait. Dépendant de la Compagnie de Jésus, elles sont les premières sollicitées au moment de la loi de 1901 puisqu’elles sont les seules congrégations à ne pas être soumise à l’autorisation préfectorale du fait du caractère secret de leur organisation. Archives secrètes vaticanes (désormais ASV), fonds des Affaires ecclésiastiques extraordinaires (AES), Stati ecclesiastici, IV periodo, anno 1930-1933, 446 PO, fasc. 429, « La Société des Filles du cœur de Marie », rapport dact., sn, sd [1930], 9 p. ; ff. 4-12.
  • [15]
    Voir infra.
  • [16]
    La Ligue des femmes françaises fondée à Lyon en 1901 par Jeanne Lestra et son directeur spirituel, A. Eymieu ; cette association a pour but l’œuvre électorale. Le comité parisien fait scission en 1902 suite au différend qui porte sur l’attribution des fonds à des candidats royalistes ou ralliés. Cf. B. Dumons, Les dames de la Ligue…, op. cit.
  • [17]
    ASV, fonds Secrétairie d’État (Seg.di Stato), anno 1907, rubr. 248, facs. 2, n° 1791. Lettre anonyme et non datée ; elle s’insère dans un dossier de renseignements fournis par Jacques Piou au cardinal Montagnini au sujet des liens entre les Filles de Marie – société secrète religieuse –, l’Action libérale populaire et la Ligue patriotique des Françaises. Elle doit dater de 1906, date à laquelle correspond à peu près au chiffre de 300 000 adhérentes pour la Ligue. C’est aussi cette année que la première crise éclate à la direction de la LPDF au sujet de l’extension du mandat religieux à l’action électorale : la supérieure des Filles de Marie souhaite retirer ses Filles de l’association. Il faut donc pour Jacques Piou convaincre en haut lieu de la nécessité vitale pour l’ALP de maintenir ce réseau féminin dans l’entreprise politique. « Un certain nombre de filles de Marie s’occupent très activement de la Ligue patriotique des Françaises unie à l’Action libérale populaire. Elles en organisent les cadres principaux des organisations à travers la France. C’est grâce à leur concours qu’on a pu regrouper plus de trois cent mille adhérentes bien organisées et disciplinées car personne dans les Comités ne sait qu’elles sont filles de Marie, aussi peuvent-elles maintenir la même discipline dans tous les comités. Les résultats obtenus sont considérables : elles ont facilité beaucoup l’organisation des comités de l’Action libérale populaire et tant à Paris que par les Comités de Province, “la Ligue patriotique” a pu rassembler près d’un million [de francs] pour la lutte électorale grâce à leur concours et leur discipline. Monsieur Jacques Piou attache une très grande importance à leur concours pour l’avenir de l’Action libérale populaire. »
  • [18]
    Magali Della Sudda, « La charité et les affaires. Le cas de la Ligue patriotique des Françaises (1901-1914) », Entreprise et histoire, 56, 2009.
  • [19]
    AACF, H565, circulaire n° 4, 1902.
  • [20]
    AACF, H565, PV du 2e conseil, sd, sn.
  • [21]
    Parti socialiste-Section française de l’internationale ouvrière, sans titre, « déclaration commune des organisations socialistes adoptée le 13 janvier 1906 », p. 38-39.
  • [22]
    Le salaire journalier féminin était en 1914 de 1 à 2 francs : Laura Downs, « Salaires et valeur du travail. L’entrée des femmes dans les industries mécaniques sous le sceau de l’inégalité en France et en Grande-Bretagne », Travail, genre et sociétés, avril 2006, p. 36 ; Catherine Omnès, Ouvrières parisiennes, Marché du travail et trajectoire professionnelles au 20e siècle, Paris, EHESS, 1997.
  • [23]
    « La Ligue, ce qu’elle est, ce qu’elle veut », circulaire n° 22, insérée dans L’Écho de février 1904, mars 1904, et dans le recueil de L’Écho de 1909.
  • [24]
    ASV, Seg. di Stato, anno 1907, rubr. 12, fasc. 7, n° 25 929, copie du télégramme du card. Merry del Val à la baronne Reille, présidente de la LPDF, Rome, 30 septembre 1909.
  • [25]
    Emmanuel Barbier, Le devoir politique des catholiques à l’heure présente, Paris, Jouve, 1910, p. 316-318 ; Émile Poulat, Histoire, dogme et critique dans la crise moderniste, Paris, Casterman, 1962 et « Panorama internazionale della crisi modernista », dans Giuseppe Rossini (a cura di), Modernismo, Fascismo, communismo, aspetti e figure della cultura e della politica dei cattolici nel 900, Bologna, Il Mulino, 1972, p. 3-13 ; Pierre Colin, L’audace et le soupçon. La crise du modernisme dans le catholicisme français 1893-1914, Paris, Desclée de Brouwer, 1997 ; sur le féminisme moderniste, voir Roberta Fossati, Elite femminili e nuovi modelli religiosi nell’Italia tra Otto e Novecento, Urbino, QuattroVenti, 1997.
  • [26]
    Archives nationales (AN), F7 878 « Action libérale populaire », P[réfecture de] P[olice], extrait du rapport du 28 juillet 1911 ; ceci est confirmé par AACF, H567, lettre d’Henri Bazire, les Sables-d’Olonne, le 11 mars 1914 à Mlle Frossard : « J’hésite à vous écrire cette lettre de candidat honteux mais Flornoy m’y encourage et j’ai déjà trop éprouvé votre bienveillance pour ne pas agir bien simplement avec vous. On me dit que peut-être la Ligue pourrait m’aider dans ma propagande de Vannes ». Le candidat malheureux obtiendra une aide de la part de la Ligue, AAL, 9II3 « Exposé des raisons qui ont amené des divergences de vue dans le conseil central : Subvention de candidats en 1910 via les subventions à la Presse ». Et en 1914 : « Réduction des subventions mais via deux journaux de Vendée, don de 500 frs à Bazire ». Les ligueuses financent également les candidats ALP, Gailhard-Bancel et Denais en 1911 (AACF, H566).
  • [27]
    Archivio di Stato di Roma, fondo CNDI, busta n.1. Claudia Frattini, Il primo congresso delle donne italiane, Naples, Biblink, 2009.
  • [28]
    L. Scaraffia, A. M. Isastia, Donne ottimiste…, op. cit.
  • [29]
    Cecilia Dau Novelli, Società, Chiesa e associazionismo femminile. L’Unione fra le donne cattoliche d’Italia (1902-1919), Rome, AVE, 1988 ; Archivio generale ordine praedicatorum (AGOP), XIV 950 GIB 1, « Alcuni punti sulla storia dell’Unione », manuscrit, sd, 51 p.
  • [30]
    AGOP, XIV 950 GIB 7, Cristina Giustiniani Bandini, cahier manuscrit, Quaderno IV, s.l., s.d. p. 2.
  • [31]
    Maurizio Ridolfi, « Partiti elettorali e trasformazioni della politica nell’Italia unita », dans Pier Luigi Ballini, Maurizio Ridolfi (a cura di), Storia delle campagne elettorali in Italia, Milan, Mondadori, 2002, p. 65-88.
  • [32]
    AGOP XIV 950 GIB 103, « Viaggi della presidente » – dans ce cahier sont consignés tous les voyages de fondation des comités locaux.
  • [33]
    Y. Déloye, Les voix de Dieu…, op. cit., p. 205-216 ; Bruno Dumons, Catholiques en politique, un siècle de Ralliement, Paris, Desclée de Brouwer, 1993, p. 15 ; Yves-Marie Hilaire, « Les catholiques se rallieront-ils à la République ? », dans Gérard Cholvy, Yves-Marie Hilaire, Histoire de la France religieuse, Toulouse, Privat, t. 4, 1986, p. 83-95.
  • [34]
    Michel Offerlé, « Capacités politiques et politisations : faire voter et voter 19e-20e siècles », Genèses, 68, septembre 2007, p. 153-154.
  • [35]
    AGOP XIV 950 GIB 15, Quaderno XIV, Cristina Giustiniani Bandini, cahier manuscrit rédigé vers 1912, p. 24. On observe cela chez les hommes catholiques : l’Action libérale populaire se définit comme « surtout une association fraternelle où les liens d’une solidarité réelle et étroite unissent les uns aux autres tous les membres. C’est une famille immense dont la parenté s’étend à tous les individus innombrables, chacun d’eux ayant les mêmes droits à l’affection et à la protection de tous » (dans Emmanuel Saillard (dir.), Annuaire de l’Action libérale populaire et de la Ligue patriotique des Françaises 1904-1905. Recueil de renseignements pratiques à l’usage des adhérents, correspondants, délégués et membres des comités, Paris, secrétariats de l’ALP et de la LPDF, 1905, p. 6).
  • [36]
    A. Verjus, Le cens de la famille, op. cit.
  • [37]
    La prise de Rome, territoire pontifical, par les troupes italiennes – les Bersaglieri – en 1870 ouvre une période de tension entre le pape Pie IX, prisonnier dans ses propres États et le Royaume d’Italie, qui ne trouvera une issue qu’avec les accords de Latran en 1929.
  • [38]
    Emma Mana, « Le campagne elettorali in tempi di suffragio ristretto e allargato », dans P. L. Ballini, M. Ridolfi (a cura di), Storia delle campagne elettorali in Italia, op. cit., p. 89-136.
  • [39]
    M. Ridolfi, Il circolo vertuoso, op. cit.
  • [40]
    Fiorenza Taricone, Teoria e prassi dell’associazionismo italiano nel 19 e 20 secolo, Cassino, Università degli studi, 2003, et L’associazionismo femminile italiano dall’unità al fascismo, Milan, Ed. Unicopli, 1996.
  • [41]
    Liviana Gazzetta, « Votate all’obbedienza. Parabole esemplari di dirigenti cattoliche », Genesis, 2006, p. 79-98.
  • [42]
    R. Fossati, Elites femminili…, op. cit. ; Paola Gaiotti De Biase, Le origine del movimento cattolico femminile, Brescia, Morcelliana, 2002 ; une synthèse des textes de ce courant a été réunie dans Francesco Maria Cecchini (a cura di), Il femminismo cristiano. La questione femminile nella prima democrazia cristiana, Rome, Riuniti, 1979. Isabella Pera, « La questione femminile nel mondo cattolico nel primo Novecento », Ricerche di Storia sociale e religiosa, 59, 2001, p. 67-89.
  • [43]
    L. Gazzetta, « Votate all’ obbedienza… » art. cité.
  • [44]
    Magali Della Sudda, « La Ligue patriotique des Françaises et la condamnation de l’Action française (1926-1929). Une piste de recherche à la croisée de l’histoire religieuse et de l’histoire du genre », colloque Pie XI, École française de Rome, 4-6 décembre 2008, à paraître en 2010.
  • [45]
    Anne Cova (ed.), Comparative Women’s History, New Approaches, Social Science monographs, Boulder, Columbia University Press, 2006 ; et son intervention dans le séminaire « Genre, féminisme et mobilisations collectives », EHESS/EFiGiES, Paris, ENS, 20 février 2009.
  • [46]
    Charles Turgeon, Le féminisme français, Paris, 2 vol., 1902.
  • [47]
    Cf. annexes, Cristina Giustiniani Bandini.
  • [48]
    « Discours de Mme Reille », Écho de la LPDF, novembre 1905, p. 240.
  • [49]
    AGOP, XIV 950 GIB 4, « femminismo odierno ».
  • [50]
    Cf. M. Della Sudda, « Une activité politique féminine conservatrice… », cité, chap. 2.
  • [51]
    Magali Della Sudda, « La nébuleuse conservatrice. Réseaux féminins catholiques et réforme sociale 1900-1914 », intervention dans le séminaire « Le genre de la réforme sociale », Paris, EHESS, 17 février 2009.
  • [52]
    Liviana Gazzetta, « Antifemminismo e antimodernismo : Elena da Persico e la nascita dell’Unione fra le donne, cattoliche dItalia », dans Anna Maria Calapaj Burlini, Saveria Chemotti (a cura di), Donne in-fedeli. Testi, modelli, interpretazioni della religiosità femminile, Padova, Il poligrafo, 2005, p. 217-238.
  • [53]
    Ainsi la Primrose League proche des Tories au Royaume-Uni compte-t-elle principalement des femmes : voir Philippe Vervaecke, « La politique sans le parti. La Primrose League et la culture politique britannique, 1883-1919 », Politix, 81 (1), 2008, p. 81-104. Cette ligue sert de modèle à la LPDF.
  • [54]
    Philippe Levillain (dir.), Dictionnaire historique de la papauté, Paris, Fayard, 1994.
  • [55]
    AGOP, XIV 950 GIB 1, « Alcuni punti sulla storia dell’Unione », p. 18.
  • [56]
    Cristina Giustiniani Bandini (1869-1854) est issue de l’aristocratie romaine et proche des milieux pontificaux. Dominicaine, elle possède un capital culturel important. De fait, sa position défavorable dans une institution caractérisée par la hiérarchie des genres est contrebalancée à la faveur de ce contexte.
  • [57]
    ASV, Affari ecclesiastici straordinari (AES), Francia, 666 PO, Elezioni politiche 1928 – « Circa il cambiamento du denominazione dell’Action liberale populaire de sig Piou », n° 1449/28, Lettre de la nonciature apostolique de France, Luigi Maglione à Sua Eminenza Card. Gasparri, Seg di Stato di Sua Santità, Parigi, le 11 giugno 1928, et mémoire transmis par Jacques Piou sur l’ALP.
  • [58]
    AACF, H509, lettre de la vicomtesse de Vélard à Mme Terrasson de Senevas, 3 juillet 1910.
  • [59]
    Ibid.
  • [60]
    AGOP, XIV 950 GIB 84, correspondance avec Sabina Parravicino, déléguée régionale lombarde et fondatrice du comité de Milan.
  • [61]
    Sur le lien entre féminisme et modernisme, voir Alessandro Cavallanti, Modernismo e modernisti, Brescia, Tip. Ven. A. Lugazzo, 1907, chap. 9 « Il femminismo », p. 178 et suiv.
  • [62]
    Ornella Confessore, L’Americanismo cattolico in Italia, Rome, Studium, 1984, p. 29, Dizionario storico del movimento cattolico, Casale Monferrato, Marietti, vol. 3, 1982, p. 630.
  • [63]
    Sandor3. Agócs, « Christian Democracy and Social Modernism in Italy during the Papacy of Pius X », Church History, 42 (1), mars 1973, p. 73-88, notamment p. 74-76.
  • [64]
    Sn, UDCI, n° 1, « Per la sincerità e la chiarezza », p. 1.
  • [65]
    AGOP XIV 950 GIB 4 femminismo odierno.
  • [66]
    Paolina Carloni, « Dove vogliamo arrivare ? », UDCI, 24, 1912, p. 2.
  • [67]
    Après la réforme électorale de 1918 et l’acception du suffrage par le pape Benoît XV, la nouvelle présidente de l’UDCI, Maddalena Patrizzi, emboîte le pas et promeut activement le vote féminin.
  • [68]
    AGOP XIV 950 GIB 40 Circolari, cahier manuscrit.
  • [69]
    L’autonomie statutaire de l’Union féminine a été âprement débattue et défendue par la présidente, avec l’appui de Pie X, contre la volonté de Giuseppe Toniolo de rassembler catholiques hommes et femmes dans les comités de l’Union populaire.
  • [70]
    ASV, Seg.di Stato, 1910, rubr. 12, fasc. 9, UFCI, sopplemento mensile all’ACF, octobre 1910, p. 3.
  • [71]
    AN F7 12 878 « Action Libérale populaire », « Projet de constitution libérale et documents présentés aux comités de l’ALP par la section d’études sociales 1907 ». L’étude approfondie du projet politique de cette formation masculine et de ses évolutions reste encore à faire.
  • [72]
    Charles Tilly, « Les origines du répertoire d’action collective contemporaine en France et en Grande Bretagne », Vingtième Siècle. Revue d’histoire, 4 (4), 1984, p. 89-108 ; pour une lecture critique et un bilan des usages de cette notion, voir Michel Offerlé, « Retour critique sur les répertoires de l’action collective (18e-20e siècles) », Politix, 81 (1), 2008, p. 181-202.
  • [73]
    « On proteste », Écho de la LPDF, 28, avril 1905.
  • [74]
    Baronne René Reille, Écho de la LPDF, 1903 ; Danielle Tartakowsky, « Place de la Concorde, de 1880 à nos jours. La construction sociale de l’espace politique », French Historical Review, 27 (1), 2004, p. 145-174. Le choix de la place de la Concorde n’est pas laissé au hasard : en 1895, une première manifestation à l’initiative de l’abbé Garnier y avait eu lieu pour défendre les congrégations.
  • [75]
    L’ALP se rapprochant du parti de cadres dans la typologie classique de Maurice Duverger.
  • [76]
    Mlle de Montcuit, « Compte rendu de la manifestation du 11 février 1903 », Écho de la LPDF, 2, février 1903, p. 23.
  • [77]
    Nathalie Dompnier, « Voter avant le droit de vote », communication à la journée d’études Triangle/Grispo « Existe-t-il un vote féminin ? », organisé par Anne Verjus et Renaud Payre, Lyon, ENS-LSH, 27 juin 2008.
  • [78]
    Serge Noiret, « Le campagne elettorali dell’Italia liberale, dai comitati ai partiti politici », dans Pier Luigi Ballini (a cura di), Idee di rappresentenza e sistemi elettorali in Italia tra Ottocento e Novecento, Venise, Istituto Veneto di Scienze, Lettere ed Arti, 1997.
  • [79]
    Marthe de Vélard, Vingt-cinq ans d’action catholique, Faire face (1902-1927), Paris, LPDF, 1927, p. 18-19.
  • [80]
    Sur le rôle de l’épouse dans la carrière politique, cf. Éric Phélippeau, L’invention de l’homme politique moderne. Mackau, l’Orne et la République, Paris, Belin, 2002.
  • [81]
    « Mon voyage à Rennes », Écho de la LPDF, 18, 2e année, juin 1904, p. 382.
  • [82]
    « Réunion du Comité central 30 juin 1904 », Écho de la LPDF, 20, 2e année, août 1904, p. 421.
  • [83]
    « Discours de la baronne Reille », Écho de la LPDF, 21, 2e année, septembre 1904, p. 441.
  • [84]
    « Rapport de la Baronne de Boury », Réunion de la Presse, Congrès de la LPDF à Lourdes et Tarbes, 1906, Paris, Diéval, 1906, p. 93-94.
  • [85]
    E. Saillard (dir.), Annuaire…, op. cit. ; Louis Laya, La révision des listes électorales, législation et jurisprudence, Lille, Impr. Typographique et lithographique, 1907.
  • [86]
    AN F7 12 771, « Élections 1902 », rapport de Marseille, le 20 janvier 1902, du Commissariat spécial : « La propagande faite parmi les femmes pour les élections à la question politique, a porté : partout dans les salons, au théâtre, dans l’église, au confessionnal même, les dames de la haute société marseillaise s’occupent des élections législatives prochaines. Les membres des comités constitués sous le patronage de “l’Action libérale” et de “la Patrie française” font des quêtes à domicile, elles ne négligent pas surtout de s’adresser particulièrement aux divers fournisseurs, couturières, modistes, etc. “ l’Association pour la défense des droits civiques rue Grignan 5, qui s’occupe comme on le sait de surveiller la confection de la liste électorale, et qui s’occupe en outre de la surveillance des bureaux de vote pendant les scrutins, un grand nombre de femmes se sont présentées, qui pour vérifier l’inscription de leurs époux ou fils, qui pour faire inscrire leurs parents, leurs domestiques ou leurs fermiers. Plusieurs de ces derniers n’avaient jamais songé à se faire porter sur les listes électorales ».
  • [87]
    « Rapport de Mlle de Beaulieu du Comité de Nantes », dans Réunion de la Presse, Congrès de la LPDF, p. 99.
  • [88]
    Mlle de Forcade, « Rapport de Mlle de Forcade », p. 125.
  • [89]
    Ph. Vervaecke, « La politique sans le parti… », art. cité.
  • [90]
    AGOP, XIV 950 G.I.B. 4, Cristina Giustiniani Bandini, « Azione cattolica e femminismo odierno », p. 25.

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