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Article de revue

Au temps du renouveau de Freud : le plaisir de « Lire la psychanalyse française »

Pages 1250 à 1264

Notes

  • [1]
    Reading French Psychoanalysis, Édité par Dana Birksted-Breen, Sara Flanders et Alain Gibeault, New York, Routledge, 2010, 840 p.
  • [2]
    J. McPhee et E.P. White sont des romanciers et essayistes américians contemporains, tous deux lauréats du prix Pullitzer (respectivement en 1999 et 1978). McPhee est considéré comme le pionnier de la « non-fiction » (creative nonfiction) (NDT).
  • [3]
    Il s’agit d’un extrait de « Fantasme originaire, Fantasmes des origines, Origines du fantasme », Les Temps Modernes, 1964 (NDT).
  • [4]
    Tous les termes suivis d’un astérisque sont en français dans le texte (NDT).
  • [5]
    Passibilité est le terme emprunté par Dominique Scarfone aux descriptions de l’expérience esthétique de Jean-François Lyotard. Il se rapporte à une ouverture vers ce qui est activement réceptif et, selon Scarfone, contribue toujours à une véritable écoute psychanalytique.
  • [6]
    En français dans le texte.

1 Cet article est traduit par Catherine Alicot.Pour ceux d’entre nous qui connaissent davantage la France à travers la douceur de sa cuisine et de ses vins, qu’à travers la violence de son histoire et de sa politique, la monumentale anthologie intitulée Reading French Psychoanalysis risque de constituer un rude rappel à la réalité. Ce livre présente de beaux défis intellectuels pour la plupart des lecteurs américains, même les plus exigeants. Il raconte l’histoire d’un univers psychanalytique surgi des ruines de la Seconde Guerre mondiale et qui s’est transformé, dans les années 1980-90, en une culture créative à la fois classique et innovante.

2 Les premiers analystes français étaient groupés en deux camps ; d’un côté de jeunes psychiatres comme Angelo Hesnard, Édouard Pichon et René Laforgue affirmaient leur sensibilité nationaliste en soutenant des maîtres tels Jean-Martin Charcot et Pierre Janet. Ceux-là rêvaient d’une psychanalyse française débarrassée de ses racines allemandes ; d’un autre côté, Marie Bonaparte et un groupe d’émigrés parmi lesquels Rudolf Lowenstein et Eugenie Sockolnicka – une Polonaise qui avait fait une analyse didactique avec Freud avant de s’établir à Paris – restaient tout dévoués à l’œuvre de Freud et au mouvement psychanalytique international.

3 Après la Deuxième Guerre mondiale, les divisions entre les deux groupes reprirent sous de nouvelles formes. Il est certain que le retour de Lacan à Freud – une relecture des travaux de Freud à la lumière du structuralisme qui imprégnait alors la philosophie et l’anthropologie – s’inscrivait dans la droite ligne de ses maîtres nationalistes.

4 L’anthologie Reading French Psychoanalysis débute avec l’immédiate après guerre, alors que Laforgue, président de la Société Psychanalytique de Paris et membre du courant nationaliste, est publiquement désavoué du fait de sa collaboration avec Matthias Göring. Göring, qui était alors directeur de l’Institut allemand de Recherche en Psychologie et en Psychanalyse de Berlin, est peut-être familier des lecteurs comme étant celui qui a contribué à la destruction de l’Institut Psychanalytique de Vienne tout autant qu’à la dissolution de la Société Psychanalytique Allemande. Comme les bureaux et la bibliothèque de la Société Psychanalytique de Paris avaient été hébergés au domicile de Laforgue, la société se retrouva sans adresse quatre années durant.

5 Parallèlement, de nombreux analystes du groupe des émigrés partirent pour les États-Unis. Ils avaient travaillé comme formateurs dès le début de la Société au tournant des années 1920, en sorte que le bénéfice de leur analyse et de leur supervision avec Freud à Vienne disparut avec eux. Du coup, le groupe des analystes à qui il appartint de diriger et de re-former la Société Psychanalytique de Paris de l’après-guerre devint spécifiquement français.

6 L’apprentissage d’une langue est une discipline corporelle agréable. Un enfant accorde son corps – sa gorge, sa respiration, son maintien – à son oreille comme s’il apprenait à jouer d’un instrument de musique. Ma propre éducation – du corps à l’oreille et de l’oreille au corps – s’est déroulée en France, là où mon père travaillait comme chercheur scientifique. Aujourd’hui, pas moins de quarante ans plus tard, je parle encore un français enfantin : lorsque je me cogne un orteil, je crie « aïe » plutôt que « ow »; lorsque je lange un bébé en gazouillant avec lui, ce sont des onomapatopées françaises plutôt qu’américaines qui sortent de ma gorge.

7 Tout comme le langage parlé, la lecture fait resurgir des sensations physiques oubliées. Les poètes symbolistes, comme Stéphane Mallarmé et Arthur Rimbaud, en ont donné de magnifiques illustrations. Parmi tous les écrits auxquels a donné lieu la psychanalyse française, ce sont indiscutablement ceux de Michel de M’Uzan et de Jean-Bertrand Pontalis qui m’ont procuré les plus grands bonheurs de lecture. Leur écriture est claire, précise et vivante. Chez eux, la métaphore artistiquement employée donne l’idée d’un mouvement et c’est sans surprise que nous apprenons qu’ils sont réputés aussi bien l’un que l’autre pour la clarté et la qualité de leurs présentations cliniques.

8 Si John McPhee ou E.B. White [2] s’avisaient d’appliquer leur art de la description au monde intérieur, on obtiendrait sans nul doute un recueil d’essais de Michel de M’Uzan. Dans les années 1970-80, la beauté, le caractère accessible et l’élégance de ses écrits lui ont valu des admirateurs dans l’ensemble de la communauté psychanalytique française. La qualité unique de sa voix et de son choix de métaphores a posé des problèmes à ses traducteurs et sans doute à ses critiques, ce qui explique sans doute la rareté de ses publications disponibles en anglais. Une anthologie de son œuvre a seulement paru en anglais au printemps 2013.

9 La traduction du Vocabulaire de Psychanalyse de Laplanche et Pontalis, traduit en anglais sous le titre The Language of Psychoanalysis (1973), ne connut pas les mêmes retards. Le livre de psychanalyse le plus lu après les travaux de Freud – Le Vocabulaire, comme disent les Français – ne fut qu’un parmi les nombreux succès de publication de Laplanche et Pontalis. Trois ans auparavant, Pontalis avait fondé La Nouvelle Revue de Psychanalyse, la plus respectée de toutes les revues françaises de psychanalyse. Indépendante de toute institution psychanalytique, elle offrait une possibilité d’échanger en toute liberté – et Pontalis, tout comme de M’Uzan, rallièrent bien des suffrages de tous bords dans le champ conflictuel de la psychanalyse française. Cette revue publiait également des auteurs étrangers et constitua une ouverture vers l’extérieur pour bien des analystes français. Pontalis traduisit et publia pour la première fois en français de nombreux textes de D.W. Winnicott, ainsi que ceux du psychanalyste américain Harold Searles.

10 L’ouverture aux différences, l’abandon des résistances narcissiques et de la fixation aux objets sont des thèmes majeurs dans l’œuvre de Pontalis. Dans son autobiographie, il décrit son combat pour la liberté de penser, tout en maintenant ses liens à deux hommes de pouvoir, Jean-Paul Sartre et Jacques Lacan. C’est au début des années 50 que Pontalis commença son analyse avec Lacan, tout en tenant la chronique des fameux séminaires de ce dernier à l’hôpital Sainte-Anne à Paris. Dans les années 40, Sartre enseigna la philosophie au jeune Pontalis au Lycée Pasteur, et dix ans plus tard, alors que ce dernier faisait ses premiers pas dans la carrière d’éditeur et d’écrivain, Sartre devint son mentor. En 1994, Pontalis écrivait ceci à son propos :

11

Sartre avait l’intelligence gaie, skieuse – schuss et slalom – mais il rendait parfois la mienne triste et piétinante : je n’étais pas sûr d’être à la hauteur ! Aujourd’hui encore, il y a une forme d’intelligence qui me fait à la fois envie et horreur, celle qui n’a jamais rendez-vous qu’avec elle-même […] : la vaine productrice et consommatrice d’« idées ». […] La machine tourne, fonctionne, produit, mais est-ce vrai ?
(Pontalis, 1994, p. 51-52).

12

Avec Sartre, je n’eus ni mal ni mérite à faire preuve de mon incapacité à l’allégeance. […] Puisqu’il ne se reconnaissait pas de père, il n’allait quand même pas s’encombrer de fils, tout aussi dépendants dans la révolte que dans la soumission
(ibid., p. 133).

13 En revanche, Lacan ne semblait que trop enclin à vouloir des enfants :

14

Lacan, lui, chacun le sait, s’offrait à tenir la place vide du Maître, mot, fonction pour moi à l’époque des plus suspects où venaient se conjoindre l’infatuation de la personne et l’abus de pouvoir
(Pontalis, ibid., p. 134).

15 En 1964, dans sa revue Les Temps Modernes, Sartre publiait l’essai de Laplanche et Pontalis intitulé « Fantasme originaire, fantasmes des origines, origines du fantasme », critique et questionnement sur l’assertion de Freud selon laquelle les fantasmes originaires sont à la source des scènes fantasmées observées dans la clinique et associées au conflit œdipien. Selon Laplanche et Pontalis, c’est le poids traumatique de la vie inconsciente d’un parent sur la psyché naissante de l’enfant – un composant structurel de l’éducation elle-même – qui explique le mieux l’origine du fantasme. L’évidence clinique de cette rencontre renforce la vérité de la théorie de la séduction, qui est selon eux la découverte la plus radicale de Freud.

16 L’article rend bien compte de l’excitation de la génération d’après-guerre qui découvrait pour la première fois l’œuvre de Freud. Dans les années 1950-60, Freud était encore peu traduit en France et, par conséquent, cette génération, la première après Lacan, aborda Freud sans grands repères ou idées préconçues. Laplanche et Pontalis s’offrirent la liberté de découvrir ce qui est le plus vivant chez Freud, à savoir une tension dynamique des mouvements progrédients et régrédients par laquelle il aborda puis recouvrit ses insights radicaux. Selon leurs propres termes, la méthode elle-même de « retour à Freud » « sans prendre un billet d’aller simple vers Lacan » (cité par Claude Janin, 1997, p. 13) constituait le point central de leur article.

17 À sa mort en janvier 2013, Pontalis avait quatre-vingt-neuf ans. En tant que psychanalyste, il avait enseigné, supervisé, exercé, publié tout en dirigeant une revue de psychanalyse de premier plan. Parallèlement, il a mené une carrière littéraire, non seulement comme romancier mais également comme éditeur et directeur de collection chez Gallimard, la toute première maison d’édition française.

18 Sans doute devait-il à son talent de romancier l’art de faire de belles fins. Alors qu’il approchait de ses soixante-dix ans, après avoir publié pendant vingt ans cinquante numéros de La Nouvelle Revue de Psychanalyse qu’il avait fondée, il décida brusquement d’en arrêter la publication. De nouveau, il écartait de lui d’éventuelles ambitions dynastiques et le narcissisme d’imposer sa propre empreinte.

19 Pontalis avait la ferme conviction que le langage doit éclaicir et rendre vivant et non obscurcir. Il pensait qu’un langage concret et métaphorique, écrit ou parlé en analyse, pouvait ouvrir une fenêtre sur l’inconscient et éventuellement sur l’intime. Il voyait dans la psychanalyse une poétique de la subjectivité.

20 Par ailleurs, dans l’aventure intellectuelle qu’est la théorie, il devinait une maladie qui étouffait lentement ses adeptes. Dans son livre poétique Fenêtres, Pontalis exprime son désarroi face à l’excès de théorie :

21

Chaque fois que je vois un collègue fabriquer un néo-concept, son concept, je pense alors à ces médecins dont les noms nous sont restés parce qu’ils sont accolés à une maladie : le syndrome de Cottard, de Gilles de la Tourette, la maladie de Dupuytren, de Kaposi, de Charcot. Rien de tel pour passer à la postérité tant que la maladie existe. Serais-je envieux, n’ayant jamais inventé le moindre concept et n’ayant jamais découvert comme tout un chacun que la « maladie humaine » ?
(Pontalis, 2000, p. 17-18).

22 Reading French Psychoanalysis ne reprend qu’un seul texte de Pontalis, « Fantasme et origines de la sexualité », coécrit avec Laplanche [3]. Toutefois, l’esprit de Pontalis apparaît clairement dans l’approche des éditeurs. Alain Gibeault, Sara Flanders et Dana Birksted-Breen ont divisé l’anthologie en sept parties, chacune d’elles rouvrant un débat pour comprendre la manière dont les analystes français conçoivent le processus analytique.

23 Les trois premières parties introduisent également l’histoire du mouvement psychanalytique français, avec les contributions des trois « pères » fondateurs – Jacques Lacan, Maurice Bouvet et Sacha Nacht – avec un dialogue sur l’établissement du cadre. Les dernières parties sont consacrées aux conceptions françaises de la sexualité et au travail avec les patients très perturbés. Les troisième et quatrième parties, intitulées « Fantasme et représentation » et « Le corps et les pulsions » constituent le point central du livre, à la fois matériellement et conceptuellement.

24 Ces parties centrales devraient, à l’évidence, être le point de depart de tout étudiant abordant la pensée psychanalytique française. Les éditeurs nous introduisent à un dialogue avec les analystes de l’Âge d’or français, tels que Laplanche, Julia Kristeva, André Green, Didier Anzieu et Piera Aulagnier, tous analysants ou étudiants de Lacan, qui ont réévalué son enseignement et ses théories souvent séduisants.

25 D’autres auteurs qui n’étaient pas sous l’influence de Lacan apportent une contribution cruciale à ce livre. Ainsi la Néo-Zélandaise Joyce McDougall reprenait à son compte l’ouverture de Freud sur les racines infantiles de la sexualité adulte. Michel de M’Uzan qui avait débuté sa carrière en publiant des études sur la somatisation et sur les patients semblant comme atteints du symptôme d’Asperger a décrit la manière dont un processus créatif et intersubjectif de mentalisation et de symbolisation est recréé dans le transfert. Rappelant les travaux de Bion et des Baranger, ses essais montrent comment ces phénomènes surviennent dans toute rencontre analytique et incluent une communication intersubjective étrange qu’il nomme « pensée paradoxale ».

26 Ce que partagent ces analystes et leur donne ce caractère particulièrement français est leur objectif de dépister les capacités de leurs patients à se représenter progressivement leurs expériences psychiques encryptées. L’apparition d’un bon objet dans le champ analytique, le premier rêve d’un patient après des années de cure, une nouvelle compréhension de l’histoire de ses origines, « les mots pour le dire » (Marie Cardinal, 1975), un lien ou un attachement qui donne un nouveau sens jusqu’alors inexistant – tout cela constitue des façons quotidiennes de se référer à la représentation comme à une réalisation accomplie du processus analytique.

27 Le terme de représentation met en pleine lumière ce qui ne fait qu’affleurer dans la perception de l’analyste. Son attention à cette perception initiale indique le début d’une série d’étapes dans la transformation de ce qui était auparavant la source absente ou inconnue d’une oppression ou d’une douleur en présence psychique. En termes métapsychologiques, la représentation est la liaison d’un élément au niveau du préconscient de manière à ce que, suite à cette liaison, une image ou un mot soient reconnus comme séparés de la chose elle-même. De plus, cette transformation permet au mot ou à l’image d’être éventuellement oubliés dans le travail de refoulement.

28 En France, la façon de penser la représentation offre de nombreux parallèles avec la description que fait Bion de la fonction alpha et elle ressemble à ce que Thomas Ogden (2009) a décrit comme un aspect de la fonction psychanalytique de l’esprit « qui rend le conscient inconscient ». C’est comme si l’analyste et son patient s’unissaient pour rechercher en forêt les traces du fameux arbre que personne n’a entendu tomber. Il faudra à chacun d’eux un certain temps pour entendre l’écho actuel de l’arbre tombé et pour abandonner l’illusion que cela a pris naissance dans un passé mythique, alors qu’en même temps ils acceptent le fantasme qu’il y a bien eu jadis un arbre et qu’il est introuvable.

29 Pour Laplanche (op. cit., p. 310-337), les pulsions surgissent lors des premiers contacts physiques parents-enfant, particulièrement lors des biberons, des langes et des caresses. L’assymétrie fondamentale entre les soignants adultes qui ont une vie inconsciente et le bébé qui n’en a pas peut quelquefois plonger ce dernier dans un état confusionnel. Le tout-petit ne comprend pas l’attention que porte le soignant à ses impulsions inconscientes. Comme il n’a pas d’inconscient, il s’explique du mieux qu’il peut les intentions cachées de ses parents.

30 Au fur et à mesure de sa croissance, le bébé ajoute associations, clarifications et sens à ces premières « marques » de confusion qu’il ne peut que partiellement se rappeler ou réexpérimenter. La traduction que fait l’enfant en devenir (Laplanche, 1999) à la fois explique et masque la trace de l’autre – l’inconscient des parents – et devient le point central de la relation transférentielle. Dans la formulation de Laplanche, la pulsion surgit dans l’effort que fait l’enfant pour diminuer la confusion qu’il ressent, liée aux traces de l’inconscient de son parent-analyste.

31 Piera Aulagnier (op. cit., p. 738-751), contemporaine de Laplanche, relie l’expérience psychosomatique de l’absence parentale à une image sensorielle, un pictogramme (Aulagnier, 1986). D’une façon générale, provenant des soins et des contacts physiques des parents, rencontre entre deux corps ou plus, ces pictogrammes peuvent tour à tour représenter l’expérience de plaisir (besoins satisfaits) et de déplaisir (besoins non satisfaits) ou même des contacts non stimulants (traumas au-delà du principe de plaisir). Les deux premières formes de représentation (du plaisir ou du déplaisir) s’inscrivent dans la psyché comme images sensorielles (visuelles, orales, haptiques, gustatives). À l’opposé, la perturbation sévère causée par le traumatisme constitue une troisième alternative qui efface les souvenirs de la psyché et leur mécanisme de représentation, effaçant ainsi toute expérience vécue et créant une image ou un signe vide de toute substance ou de sens.

32 En accord avec les conceptions de Laplanche et d’Aulagnier, les premières contributions de Julia Kristeva (op. cit., p. 421-434) et notamment sa notion de chora sémiotique suggèrent que l’écoute de l’analyste est un substrat sensoriel du langage (Kristeva, 1980). Autrement dit, l’analyste est attentif à l’effet émotionnel causé par l’utilisation du langage du patient ou à la musique derrière les mots. Selon Kristeva, et contrairement aux nombreux stéréotypes qui présentent les analystes français comme uniquement centrés sur le langage, l’analyste utilise son expérience sensorielle et corporelle pour comprendre le transfert et interpréter. L’acquisition du langage adulte est une phase tardive du développement, elle ne peut intervenir que lorsque le processus de représentation a commencé à se mettre en place.

33 Dans sa discussion sur la pulsion de mort et son utilisation dans le travail clinique, André Green (op. cit., p. 496-515) intègre l’influence de Bion tout en rendant hommage aux contributions de Piera Aulagnier pour la compréhension de la représentation de l’absence. Green décrit l’incapacité de certains patients à donner un sens à leur expérience de vie. Ces patients qui sont sujets à des taches aveugles ou hallucinations négatives, effacent les perceptions de leurs objets et en conséquence font l’experience d’une identité et d’un temps fragmentés. Comme ils sont coupés de leurs propres perceptions, ces patients limites manquent de données sociales élémentaires et ne peuvent alors trouver de sens à leurs expériences quotidiennes. Pour remplacer cette absence de sens de continuité, ils construisent une narration ou une néo-réalité qui incorpore des processus illusoires et hallucinatoires après-coup.

34 Pour expliquer l’origine de pareils phénomènes, Green souligne un processus d’externalisation, une extension de la pensée de Bion à propos de l’identification projective. Les objets sont projetés vers l’extérieur et ne trouvent cependant pas de place dans l’esprit de l’analyste-parent pour se développer et se transformer. Les deux membres de la dyade perdent la trace de ces contenus psychiques qui disparaissent tout simplement du champ intersubjectif.

35 Le patient fait alors l’expérience d’une double perte : celle du sens et la capacité de se relier aux objets dont le rôle est d’offrir du sens à son expérience interne. Green rattache ce processus à la fonction désobjectalisante de la pulsion de mort. Il utilise le terme de fonction objectalisante pour le rattacher aux processus d’identification projective, de métabolisation et de réintrojection qui se succèdent dans l’expérience interne d’abord ingérable du bébé-analysant.

36 Nombreux sont les analystes américains qui connaissent les noms de Kristeva, Green, Aulagnier et de M’Uzan, même si leurs écrits sont restés pour eux assez inaccessibles. Reading French Psychoanalysis se propose ainsi d’être, pour les analystes de langue anglaise, une ouverture sur d’autres travaux tout à fait inédits, même si ces auteurs sont incontournables [4]* (littéralement inévitables et concrètement à portée de main) pour les lecteurs français

37 L’un d’eux, Serge Lebovici (op. cit., p. 286-310), mettant à mal le stéréotype des analystes français qui veut qu’ils soient fondamentalement philosophes et anti-empiriques, apporte une contribution particulièrement notable. Ses écrits font connaître le travail d’éminents analystes d’enfants britanniques et américains tels que Margaret Mahler, Anna Freud et Donald W. Winncott. Il fait preuve d’une ouverture à d’autres disciplines psychologiques incluant les études cognitives sur le développement et l’observation empirique de l’enfant.

38 Lebovici a lu de très près les travaux de Melanie Klein tout en prenant ses distances avec ses théorisations et sa technique clinique. Ses réserves portent sur sa notion de phylogenèse des fantasmes primaires, c’est-à-dire l’héritage générationnel de fantasmes inconscients bien organisés tels que l’envie primaire du bon sein.

39 La contribution de Lebovici à la compréhension du développement primaire des relations d’objet partiel l’a conduit à remettre en cause la justesse des conceptions de Melanie Klein. Selon lui, les premières représentations des expériences d’objet partiel sont des sensations corporelles plutôt que des images ou des objets internes : sur un plan pré-objectal, les désirs ne sont liés à aucune représentation d’objet. La recherche développementale a montré que, du point de vue des affects, l’investissement de l’objet précède toute perception. La perception des visages à l’âge de trois mois survient avant celle du biberon ou du sein. De plus, cette perception n’a de sens que si elle concerne les affects de plaisir et de déplaisir liés à la satisfaction des besoins. (Gibeault, in op. cit., p. 272).

40 Lebovici, de M’Uzan et Green décrivent des patients organisés si primitivement ou si régressés qu’ils semblent incapables d’un processus primaire de pensée. Aucun des scénarios de destruction fantasmés émanant d’une envie primaire ou de processus défensifs de clivage et de projection ne peut suffisamment expliquer leurs expériences cliniques. En effet, d’après ces analystes, les défenses telles que le clivage semblent constituer des réussites.

41 La dernière partie du livre est centrée sur la compréhension qu’ont les analystes français des processus psychotiques et des perturbations sévères (op. cit., p. 683-774). Dans son article intitulé Le Bouclier de Persée ou psychose et réalité (1971), Francis Pasche offre une approche typiquement française de travail avec les processus psychotiques des patients. À partir du mythe de Persée à qui Athena donna un bouclier pour l’aider à vaincre Méduse, l’une des Gorgones, il compare le processus psychotique au regard de Méduse qui transforme les gens en pierre. Selon Pasche, l’analyste tient le bouclier pour le patient. Le bouclier lui-même a la capacité de favoriser simultanément trois processus : l’internalisation d’un bon objet maternel, la séparation du narcissisme de l’objet externe et la création d’un espace protégé pour le fonctionnement de l’esprit – pour ainsi dire, une chambre à soi qui offre à la fois un refuge contre les objets parentaux intrusifs et les stimuli écrasants de la réalité externe. Ces fonctions contenantes sont une synthèse entre la notion de Bion du rêve comme bouclier protecteur et celle d’environnement contenant de Winnicott ; elles méritent la comparaison avec les synthèses du travail de Ogden sur ces deux concepts (Ogden, 1995).

42 Piera Aulagnier, qui déménagea de Rome à Paris au milieu des années 50, travailla à l’hôpital Sainte-Anne avec des patients sévèrement traumatisés et des psychotiques. Elle enseigna à une génération d’analystes, dont Haydée Faimberg, la transmission inter-générationnelle du traumatisme. Elle a fait un rapport détaillé de son travail avec les adolescents et les enfants adultes de parents psychotiques. Elle relie les défaillances du fonctionnement symbolique de ses patients aux récits confus de leurs parents quant à leurs origines. Ces récits manquent d’une logique élémentaire et échouent à décrire les réalités internes ou sociales.

43 Pour Aulagnier, les défaillances proviennent d’un manque dans la fonction de porte-parole* maternel, terme emprunté aux négociations syndicales ou à d’autres organisations dont un représentant marchande avec autorité. La fonction maternelle de porte-parole facilite l’internalisation progressive des règles familiales sous-jacentes et celle des structures sociales institutionnelles. Lorsque la fonction de porte-parole est défaillante, le patient est incapable de se dégager du lien maternel pour développer de nouvelles relations d’objet.

44 En écho aux influences structuralistes de Lacan (2002) et de Claude Lévi-Strauss (1958), qui ont utilisé le terme symbolique pour signifier cette logique du social, Aulagnier en tant qu’analyste fonctionne comme le porte-parole qui « crée un espace dans l’ordre symbolique pour faire advenir le “je” » (Aulagnier, 1975, p. 131,132). En accord à la fois avec les idées de Pasche et de Winnicott, le porte-parole maternel protège la subjectivité du patient, tout en introduisant petit à petit la tiercéité, terrain psychique du symbolique.

45 Cette partie du livre s’achève sur la description que fait Alain Gibeault de la technique du psychodrame psychanalytique (op. cit., p. 752-764). Ce mode de traitement, qui requiert plusieurs thérapeutes membres du groupe de psychodrame, vise à aider le patient à traduire ses fantasmes inconscients en scénarios externes et concrets. En théorie, le psychodrame offre une possibilité thérapeutique semblable à ce qui nous arrive en nous réveillant d’un rêve perturbant pour découvrir qu’après tout ce n’était qu’un rêve et non pas la réalité.

46 Le savoir-faire du psychodramatiste est essentiel pour évaluer le bénéfice de l’externalisation d’un fantasme inquiétant par rapport au risque qu’il apparaisse comme une menace trop réelle. Lors de la mise-en-scène du psychodrame, l’équipe thérapeutique cherche à donner au patient une capacité de distance interprétative qu’il peut utiliser pour modifier son fantasme. La perlaboration et l’internalisation se produisent au cours du travail de psychothérapie individuelle et en groupe.

47 L’avant-dernière partie de cette anthologie (op. cit., p. 553-682) fait état des débats français à propos de la sexualité infantile comme organisateur central des liens. La bisexualité psychique joue un rôle primordial en créant, concevant et maintenant le cadre psychanalytique. Les fonctions protectrices du cadre – incluant la clarté des limites telles que la durée des séances – mais aussi l’interprétation, représentent les fonctions sexuelles « masculines ». À l’opposé, l’ouverture à l’autre, la capacité à contenir, l’empathie, les nuances et la flexibilité face à l’évolution du patient relèvent toutes des fonctions sexuelles « féminines » telles que la réceptivité ou la passibilité[5]. Bien sûr la plupart, sinon tous les analystes aux États-Unis seraient d’accord avec cette idée fondamentale qui consiste à être ouverts, réceptifs et capables d’accepter les projections les plus intenses.

48 Pour les analystes français, l’enfant internalise les représentations du corps de ses parents de sexes différents. Expérimenter le plaisir dans la fluidité des identifications fantasmatiques avec, tour à tour, un corps masculin ou féminin (et ses fonctions psychiques) est un élément essentiel dans toute relation. Si on se place du côté de l’analyste, la fonction masculine de l’interprétation et les fonctions féminines d’écoute et de contenant relient celui-ci à ses propres plaisirs sexuels infantiles associés à son activité et à sa réceptivité d’être vivant dans un corps masculin ou féminin. La créativité de l’analyste résulte du lien entre ses fonctions masculine et féminine.

49 En comparaison, la tradition psychanalytique britannique semble ne pas tenir compte des aspects de genre et de sexe dans le fonctionnement de l’analyste. Cette différence commence à devenir illusoire à partir du moment où l’on examine en profondeur le travail des théoriciens les plus importants. Ainsi Bion (1970) choisit le symbole de l’union hétérosexuelle, ♂♀, pour représenter la fonction contenant-contenu.

50 Autres contributions importantes à Reading French Psychoanalysis, celles de Janine Chasseguet-Smirgel, Jean et Monique Cournut et Christian David décrivent les corollaires cliniques de ces théorisations. Tous utilisent la tension entre les identifications bisexuelles psychiques de chaque membre de la dyade clinique et les enjeux défensifs émergeant du transfert et du contre-transfert. La révision cruciale que propose Chasseguet-Smirgel des conceptions freudiennes de la sexualité féminine (op. cit., p. 563-600) et sa fameuse étude sur les formes perverses de la relation (1981) sont, à juste titre, bien connues. Tout comme Green, M. de M’Uzan et bien d’autres, elle rend hommage à la méthode critique française tout en « mettant Freud au travail » pour élaborer et clarifier ses imprécisions, et dénouer les noeuds de sa pensée.

51 Il se peut que l’accent porté sur la bisexualité psychique dérange la nouvelle génération de lecteurs américains. Certains auteurs de ce livre ont travaillé sur des cas caricaturaux d’homosexuels et de transsexuels (des cas de « transgenres » dans le langage américain moderne). Pas un seul n’évoque la raison pour laquelle leurs patients (et leurs collègues analystes) homosexuels ou transgenres pourraient manquer de la capacité à intégrer psychiquement un rôle sexuel masculin ou féminin.

52 La plupart des analystes français croient que ceux qui ont fait un autre choix d’orientation sexuelle ou d’identité de genre refusent nécessairement les « si belles » différences entre les sexes et donc le caractère créatif des rapports sexuels. La bisexualité psychique est une réussite exclusivement réservée aux sujets hétérosexuels et biologiquement assignés homme ou femme.

53 Les raisons qui se cachent derrière cette assertion restent obscures. Il semblerait que l’application de ce concept ou sa concrétisation relèvent plus du préjugé social que de la rigueur analytique. Parmi les contributeurs à ce livre, seule Joyce McDougall, formée à Londres et ayant travaillé à Paris, voit vraiment un processus créatif de vie potentielle sous-tendant les identités sexuelles, les attirances et les fantasmes de ses patients. Elle découvre chez eux des capacités d’ouverture importantes vers la maturité, même chez ceux dont les relations d’objet sont des plus limitées.

54 Ce livre contient nombre de caractéristiques qui aident le lecteur à s’orienter dans le langage et l’histoire de la psychanalyse française. Les deux essais historiques qui ouvrent la première partie donnent un cadre à ce qui suit. Le psychanalyste et historien Alain de Mijolla propose une chaleureuse mais rigoureuse vue d’ensemble du mouvement tout entier. Quasiment sur le ton d’un correspondant de guerre, Daniel Widlöcher raconte l’excitation de vivre l’Âge d’or et l’in­- fluence à la fois libératoire et contraignante de Lacan sur ses contemporains.

55 Les éditeurs ont particulièrement soigné la présentation matérielle du livre. Les nuances vert pâle des encadrés qui mettent en valeur les définitions des termes français dans le texte, tout comme le glossaire très clair en fin de volume donnent la sensation d’être en présence d’un ouvrage scientifique. Les tableaux montrant qui fut l’analyste de qui pendant cinq générations – ceux de la plus récente ont maintenant dans les 80-90 ans – agrémentent les premières pages.

56 Dana Birksted-Breen, Sara Flanders et Alain Gibeault proposent, au début de cette anthologie, une série d’essais sur la création du cadre analytique. Ils font l’hypothèse que contrairement aux psychanalystes français (et plus généralement des Européens et Sud-Américains qui sont plus familiers des courants philosophiques français), les lecteurs britanniques et américains seront plutôt attirés par les articles traitant des questions de technique. Cette hypothèse est sans doute fondée. En pratique, cependant, ces articles seront d’autant plus accessibles qu’on sera parvenu à une meilleure compréhension des théorisations, exposées, elles, dans les parties suivantes du livre.

57 La chronologie mise à part, cette partie propose de découvrir certains des essais les plus originaux de la psychanalyse française. Celui de Jean-Luc Donnet sur l’utilisation de la règle fondamentale contrevient à l’idée selon laquelle la psychanalyse française se centrerait exclusivement sur les caractères névrotiques des patients. Les contributions de Michel de M’Uzan, Serge Viderman, Michel Neyraut et Haydée Faimberg décrivent l’attention et l’utilisation progressives du contre-transfert de l’analyste dans la rencontre analytique. Bien qu’elles se soient développées tout à fait à l’écart de l’influence de Bion, certaines de ces approches rejoignent sa révision des idées de Melanie Klein sur l’identification projective.

58 La réunion d’un si grand nombre d’articles en un seul volume et les traductions nouvelles ou révisées – pour ne rien dire de la remarquable érudition des éditeurs et de leurs synthèses des concepts français – sont des réussites exceptionnelles. Devant un travail aussi ambitieux, colossal et rare, le principe selon lequel less is more est particulièrement important. En conséquence, c’est avec beaucoup d’hésitation que j’ose relever quelques omissions.

59 Deux des auteurs du livre, Sara Flanders et Dana Birksted-Breen, expliquent précisément pourquoi elles se sont centrées sur la pensée non-lacanienne en France (op. cit., p. 1-2). Mais comme elles le signalent elles-mêmes, même lorsque des analystes français n’utilisent pas les termes lacaniens, rares sont ceux qui, depuis Lacan, négligent de se référer à l’inconnaissable ou à l’irreprésentable, au réel ou à l’entrée dans le symbolique comme une phase du processus analytique. L’essai de Lacan sur la nouvelle d’Edgar Poe, La lettre volée, montre magnifiquement l’interaction du réel et du symbolique avec l’imaginaire, terme qui réfère à un royaume où les fantasmes inconscients s’élèvent de façon défensive afin de nier la perte des liens construits avec la mère. Afin de souligner l’importance de ce système tripartite de la vie mentale, Lacan a fait de son essai sur La lettre volée la pièce centrale du seul livre qu’il ait lui-même publié, Écrits (1966). La discussion de cet essai et de l’interaction entre ces domaines est essentielle dans tout écrit psychanalytique français et manque cruellement dans ces pages.

60 Lacan, Laplanche, Green, Scarfone et bien d’autres analystes franco­- phones ont apporté les contributions les plus importantes et les plus originales à la compréhension de la temporalité dans le processus analytique. Dans leur introduction générale, les éditeurs abordent le concept d’après-coup[6]*, et ils ont inclus un article essentiel de Haydée Faimberg sur le sujet. Mais dans une vue d’ensemble de la pensée française aussi complète que celle-ci, le sujet méritait d’être plus amplement traité, peut-être même dans un chapitre à part.

61 Assez ironiquement, pour une tradition qui insiste tant sur la représentation des plaisirs et des déplaisirs de l’expérience corporelle dans la vie mentale, c’est finalement le corps du livre lui-même – son format et son volume – qui pose le plus grand problème pratique à ses lecteurs. Le livre pèse en effet 1,6 kg pour un format de 24,50 sur 17,50 cm. De ce point de vue, tenir le livre alors qu’on est assis, bien droit, pour le feuilleter ou le lire tranquillement, représente un véritable tour de force.

62 Sans aucun doute, jusqu’à un certain point, la modicité de son prix – moins de soixante-dix euros pour quelque huit cents pages en broché – compense ce désavantage. Vivant près de la Silicon Vallée, j’appartiens à cette minorité qui défend l’idée de préserver et respecter le papier imprimé ; malgré tout, l’épreuve physique que représente la lecture de ce livre fait espérer une édition numérique bien faite pour bientôt.

63 Une telle édition numérique offrirait de nombreux avantages, ne serait-ce qu’en termes de poids et de volume. Elle pourrait aussi permettre à chaque lecteur de concevoir une version adaptée à ses intérêts et à son niveau d’expérience. Ainsi, un débutant pourrait rassembler dans un seul dossier les magnifiques et lumineuses introductions d’Alain Gibeault à chacune des sept parties du livre. À eux seuls, ces essais pourraient constituer une belle introduction au champ de la pensée psychanalytique française. Tel autre lecteur pourrait donner la priorité aux sections-clés sur la représention et le fantasme si intelligemment traitées par Flanders et Birksted-Breen, de même qu’à leur longue introduction générale complétant les articles de cette anthologie au coeur de ce généreux travail.

64 Tels des jumeaux séparés à la naissance et qui auraient été élevés indépendamment, les cultures psychanalytiques française et américaine font parfois preuve d’une rivalité qui peut prendre une forme implacable, voire même violente. Ce livre réussit l’inestimable exploit de réunir ces frère et sœur doués dont l’un avait choisi de prendre ses distances. Il offre également l’occasion de jeter un regard intransigeant sur nos hypothèses et nos incompréhensions – y compris ce qui est aujourd’hui notre marque de fabrique et que Tuckett (2005) a nommée le pluralisme du « tout-est-acceptable ». Mieux que tout autre groupe de penseurs en psychanalyse, les Français aiment s’expliquer avec ardeur, sans se départir de leur rigueur intellectuelle.

65 Je pense que Reading French Psychoanalysis est de loin la seule et la meilleure introduction à la pensée psychanalytique française. Tout ce qui a été entrepris pour la publication de ce livre mérite des félicitations. Quel que soit le format dans lequel il se présente, souhaitons qu’il parviendra à toucher une nouvelle génération de psychanalystes de langue anglaise.

66 (Traduit de l’américain par Catherine Alicot.)

67 Eric Glassgold
ericbizint@gmail.com

Références bibliographiques

  • Aulagnier P. (1975), La Violence de l’interprétation. Du pictogramme à l’énoncé, Paris, Puf, 1981.
  • Aulagnier P. (1986), Du langage pictural au langage de l’interprète, in Un Interprète en quête de sens, Paris, Payot, p. 427-442.
  • Bion W.R. (1970), L’Attention et l’interprétation, Paris, Payot, 1986.
  • Cardinal M. (1975), Les Mots pour le dire, Paris, Grasset.
  • Chasseguet-Smirgel J. (1981), La perte de la réalité dans la perversion, Journal of the American Psychoanalytic Association, 29, 3.
  • Janin C. (1997), J.-B. Pontalis, Paris, Puf.
  • Kristeva J. (1980), Place names, in Desire in Language: a Semiotic Approach to Literature and Art, New York, Columbia University Press, p. 271-294.
  • Lacan J. (1966), Écrits, Paris, Le Seuil.
  • Laplanche J. (1992), L’interprétation entre déterminisme et herméneutique : une nouvelle position de la question, in Le Primat de l’autre, Paris, Aubier.
  • Laplanche J. Pontalis J.-B. (1964), Fantasme originaire, Fantasmes des origines, Origines du fantasme, Les Temps Modernes ; Paris, Pluriel, 2010.
  • Laplanche J. Pontalis J.-B. (1967), Vocabulaire de la psychanalyse, Paris, Puf.
  • Levi-Strauss C. (1958), Le sorcier et sa magie, in Anthropologie structurale, Paris, Plon.
  • M’Uzan M. de (2013), De l’art à la mort, Paris, Gallimard, 1977 ; La bouche de l’inconscient, Paris, Gallimard, 1994; Aux confins de l’identité, Paris, Gallimard, 2005.
  • Ogden T.H. (1995), Analyzing Forms of aliveness and deadness of the transference and Counter-transference, in International Journal of Psychoanalysis, 76, p 695-709.
  • Pontalis J-.B. (1994), L’Amour des commencements, Paris, Gallimard.
  • Pontalis J-.B. (2000), Fenêtres, Paris, Gallimard.
  • Scarfone D. (2010), In the hollow of transference: the analyst between activity and passivity, Sitegeist, 4, p. 7-20.
  • Tuckett D. (2005), Does anything go? Towards a framework for the more transparent assessment of psychoanalytic competence, in International Journal of Psychoanalysis, 86, p. 1-49.

Date de mise en ligne : 22/09/2015

https://doi.org/10.3917/rfp.794.1250

Notes

  • [1]
    Reading French Psychoanalysis, Édité par Dana Birksted-Breen, Sara Flanders et Alain Gibeault, New York, Routledge, 2010, 840 p.
  • [2]
    J. McPhee et E.P. White sont des romanciers et essayistes américians contemporains, tous deux lauréats du prix Pullitzer (respectivement en 1999 et 1978). McPhee est considéré comme le pionnier de la « non-fiction » (creative nonfiction) (NDT).
  • [3]
    Il s’agit d’un extrait de « Fantasme originaire, Fantasmes des origines, Origines du fantasme », Les Temps Modernes, 1964 (NDT).
  • [4]
    Tous les termes suivis d’un astérisque sont en français dans le texte (NDT).
  • [5]
    Passibilité est le terme emprunté par Dominique Scarfone aux descriptions de l’expérience esthétique de Jean-François Lyotard. Il se rapporte à une ouverture vers ce qui est activement réceptif et, selon Scarfone, contribue toujours à une véritable écoute psychanalytique.
  • [6]
    En français dans le texte.

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