Couverture de RFP_663

Article de revue

Expériences traumatiques, expériences analytiques

Pages 691 à 709

Notes

  • [1]
    Ce titre s’inspire de celui d’une conférence que C. David avait faite à la SPP, Expérience(s) esthétique(s), expérience(s) analytique(s), qui a été publiée dans son livre La bisexualité psychique (1992), Paris, Payot.
  • [2]
    A. Green (1974), Introduction à l’article de S. Ferenczi (1929), Principe de relaxation et néocatharsis, NRP, no 10. Cet article a été publié dans S. Ferenczi (1932), Psychanalyse 4, Œuvres complètes, 1927-1933, Paris, Payot.
  • [3]
    S. Ferenczi (1932), Réflexions sur le traumatisme, op. cit.
  • [4]
    A. Green (2000), Le chiasme (partie II), Bulletin de la FEP, no 49, p. 32.
  • [5]
    S. Ferenczi (1932), op. cit. Pour de plus amples développements sur ce point particulier du trauma-clivage, mais aussi pour tout ce qui concerne l’intérêt d’une mise en correspondance des conceptions de Freud et de Ferenczi sur la question du traumatisme, je vous renvoie à ce qu’a écrit T. Bokanowski sur ce sujet.
  • [6]
    M. Neyraut (1997), Les raisons de l’irrationnel, Paris, PUF.
  • [7]
    J.-C. Rolland (2000), Guérir du mal d’aimer, Paris, Gallimard, p. 94.
  • [8]
    Titre d’un des chapitres du livre de C. Janin, Figures et destins du traumatisme, Paris, PUF, 1996.
  • [9]
    S. Freud (1931), Sur la sexualité féminine, La vie sexuelle, Paris, PUF, p. 149.
  • [10]
    S. Freud (1931), op. cit., p. 140.
  • [11]
    R. Roussillon (1999), Agonie, clivage et symbolisation, Paris, PUF, p. 14.
  • [12]
    C. et S. Botella (2001), Figurabilité et regrédience, RFP, 2001/4.
  • [13]
    C. et S. Botella (1983), Notes cliniques sur la figurabilité et l’interprétation, RFP, 1983/3.
  • [14]
    En 1916-1917 il écrit que le traumatisme est un « événement qui apporte à la vie psychique en un court laps de temps une augmentation d’excitation si puissante que l’élimination ou l’élaboration de celle-ci de la façon normale et habituelle échoue, d’où doivent résulter de durables perturbations de l’activité d’énergie (Energiebetrieb) ».
  • [15]
    Dans la suite de mes remarques introductives, je rappellerai à ce propos combien Ferenczi mettait l’accent sur ce qu’il appelait l’ « expérience vécue », l’ « Elerbnis ».
  • [16]
    C. Janin (1996), op. cit., p. 24.
  • [17]
    Chez Maria, l’hallucination négative et la compensation hallucinatoire positive – pour reprendre les termes de Ferenczi –, présentes toutes deux dans la figuration du jet blanc, seront décondensées par le travail analytique. Le blanc halluciné sera référé à deux séries de représentations : d’une part celle de la perte, de la disparition maternelle, et d’autre part celles de substances vitales, le lait et le sperme.
  • [18]
    A. Green (1993), Le travail du négatif, Paris, Éd. de Minuit, p. 260-261.
  • [19]
    S. Freud (1923), Le Moi et le Ça : « Ce que le moi redoute du danger extérieur et du danger libidinal dans le ça, on ne saurait le préciser ; nous savons que c’est le débordement ou l’anéantissement, mais on ne peut pas le concevoir analytiquement. »
  • [20]
    S. Freud (1894), Les Psychonévroses de défense, Névrose, psychose et perversion, Paris, PUF, 1973, p. 12.
  • [21]
    Selon la formulation de Freud dans ses Remarques sur un cas de parano ïa : « Il n’était pas exact de dire que la sensation réprimée à l’intérieur (innerlich unterdrückte) était projetée vers l’extérieur ; nous reconnaissons bien plutôt que ce qui a été aboli à l’intérieur (das innerlich Aufgehobene) revient de l’extérieur. »
  • [22]
    Maria découvrira en cours d’analyse, en lisant la correspondance abondante échangée entre sa mère et sa grand-mère, que sa mère se sentait complètement débordée, et que les trois dernières grossesses n’avaient pas été désirées.
  • [23]
    A. Green (1980), La mère morte, Narcissisme de vie, narcissisme de mort, Éd. de Minuit, 1983, p. 230.
    Les développements apportés par C. Janin à cette notion de « noyau froid du traumatisme », les réflexions de C. Smadja sur le « noyau traumatique narcissique du fonctionnement mental » constituent à mes yeux d’importantes avancées actuelles sur la question des traumatismes.
  • [24]
    Au système évolué activité-passivité se substitue le système « activité-épuisement » (M. Fain (1992), Vie opératoire et potentialités traumatiques, Revue française de psychosomatique, no 2, Paris, PUF, p. 18).
  • [25]
    R. Roussillon (1999), op. cit.
  • [26]
    A. Green, La position phobique centrale, RFP, no 2000/3, Paris, PUF ; souligné par moi.
  • [27]
    C’est me semble-t-il ce qu’envisageait A. Green, lorsqu’il écrivait que « le désinvestissement que constitue l’évanouissement ne se borne pas à revivre une expérience de fusion, mais réalise également une expérience de coupure, de vide... qui troue l’inconscient (...) L’hallucination négative en est le correspondant dans l’ordre de la représentation » (Narcissisme de vie, narcissisme de mort, op. cit., p. 154).
  • [28]
    Dosto ïevski « craignait de tomber, la nuit, dans un sommeil semblable à la mort, et demandait qu’on ne l’enterrât qu’après un délai de cinq jours ».
  • [29]
    S. Freud (1929), Dosto ïevski et le parricide, Résultats, idées, problèmes, Paris, PUF, 1985.
  • [30]
    Voir à ce sujet les développements proposés par R. Roussillon, dans le chapitre « Violence et culpabilité primaire » de son livre Agonie, clivage et symbolisation, op. cit.
  • [31]
    C. Smadja et G. Szwec (1992), États traumatiques, états somatiques, Revue française de psychosomatique, no 2, PUF.
  • [32]
    Ce toit que la jeune fille nue, qui appelait son père, avait désespérément cherché à atteindre.
  • [33]
    S. Freud (1939), L’Abrégé de psychanalyse, Paris, PUF, 1964.
  • [34]
    S. Ferenczi (1985), Journal clinique (janvier-octobre 1932), Paris, Payot, p. 137.
  • [35]
    A. Green (1980), La mère morte, Narcissisme de vie narcissisme de mort, op. cit., p. 226.
English version
“ Des idées fondamentales sont présentées ici : le clivage psychotique comme conséquence du refoulement traumatique primaire, la haine comme moyen de fixation plus puissant que la tendresse... D’autres idées mettront longtemps avant de refaire surface : l’hallucination négative qui suit le clivage avant la compensation hallucinatoire positive. Notre dette est grande à l’égard de Ferenczi pour avoir ouvert ces questions. ” [2]

INTRODUCTION

1J’ai trouvé passionnant de relire les grands textes tardifs où Freud s’interroge sur l’impact du traumatisme, et sur son destin transférentiel dans la cure, en ayant présentes à l’esprit les ouvertures de Ferenczi évoquées dans cette phrase mise en exergue.

2Je me limiterai à mettre en parallèle quelques notations de Ferenczi et de Freud, choisies parce qu’elles m’ont paru susceptibles d’éclairer le cas clinique que j’exposerai ensuite. Elles témoignent sur le vif, de ce qui faisait écrire à Freud, dans sa notice d’adieu à Ferenczi, que « plus d’un article qui plus tard, sous son nom ou sous le mien, prit place dans la littérature » trouva dans leurs conversations sa première forme.

31 / Ferenczi faisait donc l’hypothèse suivante dans « Principe de relaxation et néocatharsis » (1929) que « la première réaction à un choc (est) une rupture avec la réalité, d’une part sous la forme d’hallucination négative, d’autre part souvent sous la forme d’une compensation hallucinatoire positive ».

4Freud, lui, dans « Constructions dans l’analyse », remarquait à ce propos que l’ « on n’a pas encore assez apprécié ce caractère peut-être général de l’hallucination d’être le retour d’un événement oublié des toutes premières années, de quelque chose que l’enfant a vu ou entendu à une époque où il savait à peine parler ».

52 / Ferenczi soulignait dans ses « Réflexions sur le traumatisme » (1932) que si on veut atteindre les origines d’un « choc inattendu, non préparé et écrasant, il faut répéter le traumatisme lui-même et, dans des conditions plus favorables, l’amener, pour la première fois, à la perception et à la décharge motrice. (...) Cela implique l’abandon complet de toute relation au présent, et une immersion complète dans le passé traumatique. Le seul pont... est la personne de l’analyste » [3]. Avec une étonnante modernité, Ferenczi s’est en effet interrogé sur les modalités de retour transférentiel des expériences traumatiques précoces et sera amené à remettre « en cause l’attitude de l’objet (et par voie de conséquence celle de l’analyste). Le traumatisme ici concerne tout autant les réponses de l’objet qui avaient fait défaut que celles qui avaient été données, de manière inappropriée » [4].

6Freud, quant à lui, écrira dix ans plus tard, dans L’homme Mo ïse, à propos des « effets positifs du traumatisme », qu’ils sont des efforts pour le remettre en œuvre, pour remémorer l’expérience oubliée, pour la rendre réelle, pour en vivre à nouveau une répétition, pour la faire revivre dans une relation analogue à une autre personne.

73 / Dernier parallèle : selon Ferenczi les traumatismes entraînent ce qu’il appelle en 1932 un « clivage narcissique », au « moment où, dans le temps, savoir et sentir avaient mené de la rage impuissante, à une autodestruction, à une cassure (Zerreissung) des contenus psychiques » [5].

8Il est vrai qu’en ce qui concerne l’impact narcissique des traumatismes, Freud, pour sa part, se contentera – toujours dans L’homme Mo ïse – d’une simple mention au rôle des « atteintes précoces au moi (blessures narcissiques) », à côté de leur étiologie sexuelle ou agressive. Mais ce qu’il décrit alors comme « effets négatifs du trauma » s’applique tout à fait aux problèmes que nous rencontrons de nos jours avec des patients chez qui la pathologie narcissique, la négativité ou le recours à l’acte sont au premier plan.

9Les réactions négatives par fixation négative au traumatisme tendent au contraire, précise-t-il, à ce que le trauma ne soit pas remémoré. De façon générale, les traumatismes de l’enfance vont fournir les plus fortes contributions à la formation du caractère, et entraîner des modifications du moi, comparables à des cicatrices. Dans certains cas « les symptômes aussi bien que les limitations du moi et les changements de caractère vont manifester avec une grande intensité psychique une indépendance considérable par rapport à l’organisation des autres processus psychiques ». « Ils sont en quelque sorte un État dans l’État, un parti inaccessible » qui impose sa loi et peut même entraîner une dévastation du moi.

10Ces propos freudiens de 1939 annoncent bon nombre de nos avancées actuelles : sur les problématiques de la négativité, telles que la fixation se fait non au plaisir, mais à un trauma douloureux ; sur les modalités d’inscription et de retour de l’expérience clivée ; sur les défenses mises en place en amont du refoulement secondaire pour restreindre l’impact du traumatisme, ce qu’un auteur comme M. Neyraut a proposé d’appeler les « logiques primitives anti-traumatiques » [6] ; sur les failles de l’organisation représentative ; sur nos échecs thérapeutiques.

REMARQUES PRÉALABLES SUR LE CAS CLINIQUE

11Cliniquement, j’ai emprunté la même démarche que dans cette brève introduction. Je proposerai à la discussion mes « considérations actuelles » sur une analyse très lointaine – c’était il y a trente ans –, celle d’une patiente qui avait subi un traumatisme majeur durant son enfance. J’en ferai une relecture guidée par ces « idées fondamentales » tissées entre Ferenczi et Freud.

12J’ai retenu particulièrement deux séquences de cette cure, dans lesquelles la question du traumatisme est au premier plan. La première se situe lors de son instauration. La seconde se réfère aux conséquences traumatiques, psychiques et physiques, d’une perte objectale survenue dans le cours de l’analyse. Je conclurai sur la manière abrupte dont elle a mis fin à sa cure, ce que je relie aujourd’hui à ses défenses par le « caractère » comme modalité de cicatrisation de ses traumatismes infantiles. Mais auparavant je ferai quelques remarques :

13À l’époque – faute d’expérience clinique et théorique – je n’avais pas mesuré l’importance des dysfonctionnements narcissiques de cette patiente, liés à des conditions traumatiques ayant précédé l’impact du traumatisme événementiel survenu lorsqu’elle avait presque cinq ans. Faute d’avoir pu envisager à l’époque la complexité des différents niveaux traumatiques et de leurs effets en après-coup, sur les plans dynamique, topique et économique, je n’ai pas su mobiliser suffisamment les défenses qu’elle avait édifiées pour combler son déficit narcissique initial. Ainsi le cas de Maria est resté depuis toutes ces années une des sources vives de mes réflexions ultérieures. Elles ont porté sur les modalités d’inscription du traumatisme dans la psyché, ses modalités de reviviscence dans le transfert ; elles ont porté également sur l’hallucinatoire et l’illusion d’absence, sur la mélancolie, et la perte d’origine inconnue.

14Je ne m’étais pas non plus interrogée alors sur certains éléments évocateurs chez cette femme d’une dépression ancienne, « essentielle » diraient peut-être aujourd’hui les psychosomaticiens. Je pense en particulier à la tentative de suicide qu’elle avait faite à l’adolescence, au relatif gel de sa vie psychique, à son sentiment de vide tenace, à ses mécanismes de maîtrise. Je réalise avec le recul, que même s’il s’agissait d’une structure névrotique, il y avait chez cette patiente des zones traumatiques enclavées mal cicatrisées, et une profonde destructivité sous-jacente.

15Enfin une précision s’impose : je n’ai conservé du matériel de cette analyse que des notes fragmentaires, sur telle ou telle séquence du matériel. « Les fragments de cette cure utilisés dans ce travail n’appartiennent donc plus tout à fait à la clinique, mais à ma mémoire d’analyste – condition éthique que je crois bon d’exiger pour en disposer théoriquement. » [7] J’ai fait miens ces propos de J.-C. Rolland.

ENTRETIEN PRÉLIMINAIRE

16Lorsque j’ai reçu Maria pour la première fois, j’avais été frappée par son regard, sombre et comme sans fond, par sa coiffure d’une autre époque avec ses longs cheveux noirs nattés, qui couronnaient sa tête. Elle n’avait pas quitté son manteau, était restée, pendant tout l’entretien, assise à l’extrême bord de son fauteuil, le dos droit, les mains nouées. Elle m’avait expliqué qu’elle était très déprimée depuis que son mari et elle s’étaient séparés. Ce n’était pas un mariage d’amour, elle était très jeune, elle cherchait seulement à être comme tout le monde. Mais elle n’y était pas arrivée, ils ne s’entendaient pas et c’était elle qui lui avait demandé de partir.

17Après avoir pris cette décision, elle s’était sentie mieux pendant quelques mois, sauf que ça n’avait pas duré ; à nouveau elle éprouvait ce tenace sentiment d’incapacité, ce mal-être. Elle s’en voulait de ne pas supporter sa fille Solène qui était une enfant très difficile, faisant des rages épouvantables, se cognant la tête contre les murs. C’est la psychothérapeute de sa fille qui lui avait conseillé d’entreprendre une analyse. Compte tenu de la situation matérielle de Maria – qui ne disposait d’aucune ressource personnelle – elle l’avait adressée au Centre de psychanalyse de la rue Saint-Jacques. « J’ai cru, avait poursuivi Maria, mais je ne le crois plus aujourd’hui, que Solène guérirait. De toute façon, il n’est pas sûr que je sois coupable, et je devrais essayer de m’en sortir pour mon propre compte. C’est surtout que je n’ai envie de rien, je souffre de n’avoir désir de rien, d’avoir du mal à entrer en relation avec autrui. »

18Maria m’avait expliqué qu’elle avait quitté l’Italie à l’âge de 18 ans, pour s’éloigner de ses parents avec qui les relations avaient toujours été conflictuelles. Elle était venue à Paris, où résidait une cousine éloignée, et avait mené à bien des études d’économie. C’est alors qu’elle avait rencontré Jean, s’était mariée, et ensuite n’avait jamais cherché à travailler. Son père était un homme de pouvoir, avec lequel elle ne s’entendait pas. Sa mère était morte quand elle avait cinq ans, et Maria avait mal supporté le remariage de son père quelques années plus tard. Elle était entrée en conflit ouvert avec sa belle-mère, qui la punissait en l’enfermant des journées entières dans sa chambre. C’est là, m’a-t-elle dit, qu’elle s’était « habituée au silence », à réfléchir pour elle-même. Elle avait même pensé entrer au couvent.

19Maria avait ensuite associé sur le fait qu’elle était tombée amoureuse pour la première fois lorsque Solène avait trois ans, et à nouveau, comme lors de son adolescence recluse, elle avait éprouvé que les heures passaient comme des minutes. C’était à ce moment-là que l’état de sa fille lui était apparu dans toute sa gravité. Mais en était-elle responsable ? Gilles, son amant, était marié, il avait l’âge du père de Maria, et tout comme lui, sa carrière politique était la seule chose vraiment importante ; elle souffrait de cette situation, et peut-être était-ce aussi la cause de sa dépression actuelle.

PREMIÈRE SÉANCE

20À sa première séance Maria s’était allongée en position de gisante et avait gardé longuement le silence. Puis elle m’avait dit que lors de l’entretien que nous avions eu précédemment, elle n’avait pas eu l’occasion de me préciser les circonstances de la mort de sa mère.

21Lors d’un des bombardements alliés à la fin de la guerre, Maria, ses deux jeunes sœurs et sa mère enceinte de huit mois se trouvaient dans le jardin, où son père les avait laissées pour se réfugier dans la maison. Maria était juste derrière sa mère, qui s’était couchée sur les deux petites, en essayant de leur faire un rempart de son corps. Un éclat d’obus avait dû lui sectionner l’artère fémorale par derrière ; il y avait sûrement eu du sang, pourtant elle ne se souvenait pas du sang, mais seulement d’une espèce de grand jet blanc. Elle avait entendu sa mère dire d’une voix calme qu’elle était blessée et appeler son père. « Je n’ai pas réalisé qu’elle était en train de mourir, je n’ai rien ressenti, j’ai perdu non pas les souvenirs, mais tout ce que j’ai ressenti à ce moment-là. » On lui avait dit ensuite qu’un voisin médecin avait pratiqué, dans l’urgence et avec les moyens du bord, une césarienne, pour tenter de sauver le bébé, une petite fille, qui était morte elle aussi.

« Quand le traumatisme survient chez l’analyste » [8]

22J’avais été traumatisée par ce récit et après tant d’années j’ai retrouvé intacte l’émotion d’alors. Certes l’analyste ne peut rester insensible devant une telle expérience traumatique et ses conséquences, toujours susceptibles de mobiliser en lui ces « motions pulsionnelles sombres » [9], avec toute l’ambivalence de « ce premier lien à la mère, si blanchi par les ans, comme soumis à un refoulement particulièrement inexorable » [10]. Ce sont là, vous les aurez reconnus, les termes que Freud a employés dans son premier texte sur la sexualité féminine, écrit un an après la mort d’Amalia.

23Mais je pense qu’aujourd’hui je n’aurais pas été ainsi sidérée, et que j’aurais pu donner un sens à la manière « blanche » dont Maria m’avait relaté cette tragédie, de telle façon que je ressente une vague d’angoisse et de douleur, alors qu’elle ne manifestait aucun affect. La dynamique transférentielle de cette première séance présente en effet des caractéristiques que j’ai appris depuis à considérer comme des « indicateurs » d’une répétition traumatique agie et non représentée.

24Lorsqu’elle me relate cette scène, Maria m’attribue sa place d’enfant, par un « retournement » des positions respectives de sa mère et d’elle-même, et me fait vivre « en parallèle mais clivé de ses possibilités d’intégration (...) ce qu’(elle) n’a pu vivre de son histoire » [11]. Transfert par retournement donc, comme le formule R. Roussillon, ou encore « transfert par substitution », tel que l’ont défini S. et C. Botella lors du dernier Congrès des psychanalystes de langue française [12]. C’est d’ailleurs dans leur premier travail sur la figurabilité, qui date de 1983, que j’avais trouvé cette formulation, « le souvenir du trauma doit être traité comme un souvenir-écran ou un rêve » [13], formulation qui va me permettre d’introduire la suite de mon propos.

Le souvenir-écran de la mort de sa mère

25Les « souvenirs-écrans » des patients, comme leurs rêves sont en effet les traces figuratives et représentatives privilégiées des expériences traumatiques survenues pendant les premières années. C’est bien ce qu’indique Freud lorsqu’il note que « ces expériences (traumatiques) (...) ne sont pas accessibles au souvenir (qu’) elles se situent dans la période de l’amnésie infantile, le plus souvent battue en brèche par des restes mnésiques isolés, nommés souvenirs-écrans ».

26La singularité de ces formations psychiques tient au fait qu’elles peuvent non seulement donner accès à la période couverte par l’amnésie infantile, mais également à d’autres époques, à d’autres strates temporelles, dont la plus récente est transférentielle.

27— Hic et nunc, il est en effet significatif que ce souvenir-écran vienne à l’esprit de Maria, au moment où, pour la première fois, elle vit l’expérience traumatique d’être couchée devant moi, sans me voir.

28— L’écran du souvenir lui permet aussi de rétroprojeter en quelque sorte des expériences de traumas plus tardifs, notamment ceux de l’adolescence. Je ne donnerais, à propos de Maria, qu’un exemple de la condensation en une seule image – celle d’une effraction sanglante – de deux temps traumatiques séparés par la période de latence : « Pour mes règles, m’a-t-elle dit bien plus tard, je me suis empalée en tombant d’un arbre. Ça a fait un trou. Le sang coulait. Je n’ai pas eu mal tout de suite. J’ai eu mes règles à ce moment-là. Peut-être que l’accident était après mes règles. J’ai toujours été mal réglée. »

29— Plus en amont encore dans le temps, ce souvenir se réfère certes à l’événement réel terrifiant survenu lorsque Maria allait avoir cinq ans. Mais on ne peut envisager les conséquences de ce trauma indépendamment de ce qui s’était passé avant, durant ce que Freud nomme en 1939 la « période de réceptivité » la plus importante aux traumatismes précoces, surtout de « deux à quatre ans », à « l’époque où l’enfant commence à savoir parler ».

30Cette notation de Freud sur la réceptivité montre combien son angle d’approche du traumatisme s’est modifié au moment où il rédige les pages testamentaires qu’il consacre à cette question dans Mo ïse. Alors que vingt-cinq ans plus tôt, dans son chapitre « Fixation au traumatisme. L’inconscient » de ses Leçons introductives, il définissait le traumatisme comme un « événement » [14] aux lourdes conséquences économiques, à la fin de sa vie Freud écrit que les traumatismes précoces sont des expériences qui touchent le corps du sujet, ou des perceptions sensorielles (la vue, l’ou ïe) et avec insistance il répète qu’ « il s’agit donc d’expériences ou d’impressions » [15].

31À leur propos, je voudrais insister sur un point : comme Freud l’indique ensuite, ces « expériences et impressions » traumatiques précoces ne sont pas à proprement parler remémorables. Leur existence « est établie par une théorie, un résultat du travail analytique, seul capable de donner une connaissance des expériences oubliées, ou encore, en termes plus abrupts mais moins corrects, de les ramener à la mémoire ». Certes le travail analytique est « capable d’en donner une connaissance », mais cela ne se fera plutôt par le biais de reconstructions, soutenues par un étayage théorique, que par une véritable levée de l’amnésie infantile.

32Enfin, dernière remarque à propos du souvenir-écran de Maria : coexistent en lui les différentes modalités traumatiques, telles que Freud les a spécifiées dans Mo ïse :

  • celle d’un trauma narcissique, de perte, de blessure au niveau du moi, qui va avoir plusieurs conséquences : l’expérience de la perte de sa mère à cinq ans réactive les pertes antérieures non élaborées ; l’idéalisation commémorative protège le moi de l’éprouvé haineux et de la culpabilité ; il se produit une identification narcissique mélancolique avec l’objet détruit, dont l’ombre est tombée sur le moi. Je me souviens de ce lapsus de Maria : « Ma mère est morte à cinq ans (pour quand j’avais cinq ans). » Elle avait ajouté « Je suis parfois un peu morte » et cité ce vers de Milosz « Les morts, les morts sont moins morts que moi » ;
  • celle aussi d’un traumatisme sexuel : ce souvenir-écran figure une scène primitive, que l’on s’en tienne aux contenus de l’obus qui pénètre, du trou dans le corps, puis de la césarienne, ou que l’on considère sa structure si caractéristique où, seule à être restée exclue de la protection maternelle, elle voit cette scène et entend sa mère appeler son père ;
  • il s’agit enfin d’un traumatisme agressif, spécialement violent où Maria avait été elle aussi en danger de mort, et où la perte de sa mère avait été irrévocable.

33La mort tragique de sa mère a conféré un statut de réalité irréversible au vœu meurtrier œdipien et préœdipien de Maria, la collusion de l’événement et du fantasme ayant entraîné ce que C. Janin a appelé « un collapsus topique » [16].

34La potentialité traumatique de cette conjoncture externe/interne à l’acmé de l’Œdipe a révélé, réactivé chez Maria ses failles traumatiques narcissiques précoces. Lors du bombardement, elle était restée seule « en arrière », incapable de gérer aussi bien sa détresse que sa rage, à l’encontre de sa mère et de ses trois sœurs conçues après/devant elle. J’avais noté sa formulation : « C’est comme dans les tragédies, on sait que c’est inévitable et en même temps c’est un enchaînement de hasards. »

Le jet de sang blanc

35J’en viens à cette étonnante figuration du jet de sang blanc, hallucination négative comparable à celle qu’avait eue l’Homme aux loups au même âge, dans son souvenir-écran du doigt coupé et/ou du sang qui sourd de l’arbre entaillé [17].

36A. Green a donné de très amples développements à cette notion d’hallucination négative, mais pour l’instant je retiendrai surtout ce qu’il a écrit dans Le travail du négatif : « Que se passe-t-il lors d’une hallucination négative à l’égard d’une perception externe ?... Il s’agit d’éviter à tout prix la rencontre entre une représentation inconsciente et une perception, comme si la perception prenait alors la valeur d’une réalisation hallucinatoire de désir... Une telle réalisation a toujours pour conséquence un danger – direct ou indirect – d’atteinte à l’intégrité narcissique du sujet. » [18]

37En effet, ces lignes me paraissent s’appliquer exactement à ce qui s’est passé pour Maria, assistant à l’agonie de sa mère. Confronté à l’effraction imprévisible de son pare-excitation, son moi doit faire face à un danger à la fois « extérieur » et « libidinal dans le ça ». Menacé de « débordement » ou d’ « anéantissement » [19], il va mobiliser des défenses primaires, dans l’urgence et sur un double front.

38Sur le front interne, selon le mécanisme décrit dès 1894 par Freud, limité dans ce cas à l’affect, « le moi rejette (verwirft) la représentation insupportable en même temps que son affect et se conduit comme si la représentation n’était jamais parvenue au moi » [20].

39Sur le front externe, l’hallucination négative témoigne de ce que le moi a « aboli » [21] au moment même où il l’enregistrait, une partie de la perception intolérable, celle qui concernait la mise à mort sanglante de sa mère.

40Maria est parvenue à représenter, en tout cas partiellement, cette expérience dramatique. La présence de ce blanc vient néanmoins indiquer l’existence d’une lacune dans le tissu représentatif. Certains l’envisageront comme l’indice d’une zone de « non-symbolisation primaire » selon l’expression de R. Roussillon. D’autres soutiendront plutôt que c’est le produit d’un effacement transitoire de ses capacités de représentation, consécutif à la violence de ce qu’elle a éprouvé. Quoi qu’il en soit, l’effraction traumatique aura laissé une trace clivée, dont je me représente le fonctionnement paradoxal un peu à la manière dont Freud parle dans la Traumdeutung de l’expérience externe d’effroi, « contrepartie de l’expérience primaire de satisfaction », au décours de laquelle « l’appareil primaire conservera une tendance à abandonner cette image mnésique pénible » par « évitement du souvenir » (et) répétition de la fuite initiale devant la perception.

Le deuil de sa mère

41Je l’ai souligné, depuis l’époque où s’est déroulée cette analyse, je suis mieux à même de mesurer en quoi le drame vécu par Maria à cinq ans a pu réactiver ses blessures narcissiques mal représentées. Un élément biographique n’a attiré mon attention qu’à la relecture de mes notes, mais il appuierait l’hypothèse que pendant la toute petite enfance de Maria, sa mère était absorbée par un deuil, directement, et indirectement du fait du deuil que vivait sa propre mère. La tante de Maria, seule sœur de sa mère, était morte un an avant la naissance de Maria, en donnant le jour à une petite fille, qui était gravement handicapée. Sa grand-mère maternelle s’occupait de Gabrielle, mais également de Maria pendant toutes les « vacances ».

42Durant ses cinq premières années [22], où, comme elle disait, « ma mère était toujours enceinte », les défaillances et discontinuités de l’investissement reçu par Maria ont vraisemblablement eu des conséquences proches de celles qu’A. Green décrivait dans son article « La mère morte » : « Ici le désastre se limite à un noyau froid, qui laisse une marque indélébile sur les investissements érotiques des sujets en question. » [23]

43Mes tentatives pour mobiliser le travail psychique de Maria sur sa crainte d’avoir détruit sa mère resteront longtemps peu opérantes. Ce n’est qu’après sept ans d’analyse, qu’elle pourra me dire : « J’ai des idées et des émotions à l’intérieur de moi, alors que quand je suis venue vous voir, je ne pouvais pas être émue, je ne pouvais être touchée par rien. » Elle ajoute qu’elle a pleuré en relisant un poème de Prévert, où il est question des sept éclats d’un miroir brisé. Elle avait beaucoup lu à Solène la « Reine des neiges », dame en blanc maléfique, qui avait capturé un petit garçon. « Il voyait tout ce qui est méchant – m’explique Maria – il était devenu méchant. Lorsqu’il est parvenu à pleurer avec la petite fille qui était venue le rechercher, les larmes ont fait sortir de son œil l’éclat qui s’y trouvait. » J’ai dit alors à Maria qu’elle avait pensé être devenue aussi méchante que la Reine des neiges, quand l’éclat d’obus avait tué sa mère et la petite fille qu’elle portait, quand elle avait cru voir que le sang de sa mère était blanc comme la neige. Oui, m’avait-elle répondu, j’ai dû penser que j’étais responsable de sa mort.

TRAUMATISME PSYCHIQUE/PHYSIQUE

44Au fil de l’évolution de son analyse, des progrès s’étaient manifestés dans la vie de Maria. Elle qui, pendant plusieurs années, s’était présentée comme démunie et manquante, avait trouvé grâce à l’appui de Gilles un travail intéressant, où rapidement elle va occuper un poste de pouvoir. Elle s’essaie à la sculpture, avec d’autres, dans un atelier. La charge de Solène est moins lourde depuis qu’elle a été admise dans un Hôpital de jour pour enfants psychotiques.

45Le lien avec Gilles vieillissant s’était peu à peu effiloché, et Maria avait fini par céder à l’insistance amoureuse de Pierre, un collègue plus jeune qui avait la réputation d’être très séducteur. « Comme une page tournée », cette liaison était plus paisible, mais aussi moins enivrante que la précédente. Maria sera d’autant plus déconcertée par la violence de ce qu’elle éprouve, lorsque Pierre deux ou trois ans plus tard, s’est épris d’une autre femme.

46Notons que la perte d’objet alors infligée à Maria présente des caractéristiques qui ont augmenté son impact traumatique : elle est subie dans l’impréparation ; alors que jusque-là, c’est Maria qui avait activement quitté son père, son mari et Gilles, elle en est réduite à une situation de passivation ; et enfin cette perte infligée est double, à la fois narcissique et érotique. Ainsi, le « coup » du traumatisme actuel va raviver chez Maria les « avant-coups » traumatiques, aussi bien celui de l’abandon par sa mère, lorsqu’elle s’est couchée seulement sur les deux petites sœurs puis est morte, que celui de l’abandon par le père, lors du bombardement et ensuite par son remariage.

47Maria ne parvient pas à élaborer cette situation, en témoigne l’accentuation de certaines de ses conduites jusque-là tempérées [24]. À la 9e année de sa cure, après l’interruption des vacances l’été, elle se met à ranger, repeindre et restaurer compulsivement son appartement. Elle doit aller à la piscine deux heures chaque jour, sinon elle ne parvient pas à s’endormir. Les kilomètres qu’elle « couvre » ainsi à la nage ne sont pas sans évoquer les « procédés autocalmants » décrits par Claude Smadja et Gérard Szwec.

48Maria fait des rêves angoissants : elle va à la piscine, quelqu’un nage sous l’eau. Il laisse un sillage effrayant, déplace une immense quantité d’eau. Puis elle veut se baigner, elle se dépêche parce qu’il est tard, mais quand elle arrive à l’eau, il est déjà trop tard, il n’y a presque plus d’eau, qu’un fond de vase. Dans un autre rêve, quelque chose comme un sous-marin explose sous l’eau, et des fragments fusent, qui brûlent. Elle a peur pour les gens qui sont là.

Scènes de nudité

49Début octobre, depuis la fenêtre de son bureau, au travail, Maria assiste à une scène traumatisante : une jeune fille nue cherchait à monter sur le toit de l’immeuble de l’autre côté de la rue. Elle appelait son père à l’aide pour pouvoir monter toujours plus haut. Le lendemain, alors que Maria était en train de crawler, elle heurte de plein fouet un homme qui nageait dans l’autre sens. Elle a été sonnée sur le coup, c’est tout.

50Trois semaines plus tard, pendant qu’elle est en train de sculpter en terre glaise un nu avec modèle, elle a tout d’un coup très envie de dormir, se sent mal, sort de l’atelier et a une syncope. Quand elle reprend connaissance, elle saigne de la bouche, s’est cassé une dent, et présente des troubles sensitifs, des avant-bras et des mains, de type hyperesthésies. Elle me dira : « Je ne comprends pas, pourtant juste avant j’éprouvais beaucoup de plaisir à sculpter, et d’habitude je ne m’évanouis que lorsque je vois du sang. »

51Les douleurs des membres supérieurs persistent, mais les spécialistes qu’elle consulte ne décèlent aucune lésion organique. Maria cesse d’aller à la piscine, car elle a peur de s’évanouir et de mourir noyée. Elle refait, comme au début de son analyse, des cauchemars où deux thèmes dominent. Dans le premier, elle est poursuivie par des gens qui la prennent pour un vampire et elle a peur d’être tuée d’un coup de pieu dans le cœur. Dans le second, elle est ensevelie vivante : écho nocturne de l’angoisse qu’elle a souvent exprimée pendant ses séances lorsqu’elle me parlait par exemple de l’effondrement d’un parking souterrain à Paris, ou des tremblements de terre. Écho plus lointain de cet enfermement ressenti à l’adolescence, qui l’avait amenée un jour à ingérer deux tubes d’Optalidon pour en finir, tentative de suicide qui avait eu comme conséquence une néphrite grave.

52Pendant toute cette période de l’analyse, nous reviendrons sur la scène traumatique de la jeune fille en détresse. Elle menaçait de se jeter dans le vide, et cherchait désespérément à monter plus haut, ceci avec une valence narcissique de quête de la toute-puissance, et une valence érotique de quête du père. Cette jeune fille était nue, et Maria s’était évanouie après avoir regardé un homme nu.

53Elle reprend à ce moment-là un souvenir déjà raconté, celui d’un trauma sexuel, survenu lorsqu’elle avait trois ou quatre ans. Un jeune homme, venu voir son père, s’était exhibé devant elle. Quand ses parents étaient arrivés, Maria avait dit à cet homme : « Montre-moi encore ce que tu m’as montré », et il lui avait répondu, « montre-moi toi ». Comme Maria n’avait rien à montrer, et qu’il lui semblait avoir vu une « baudruche », elle était remontée dans sa chambre, pour chercher une balle qu’elle avait mise devant elle sous sa robe. Elle revoit la scène, elle était restée un peu en arrière dans l’escalier, les trois adultes étaient devant elle, en contrebas. Elle s’était sentie paralysée, ses parents n’avaient rien compris, n’avaient rien dit. Jamais ils ne lui ont parlé de son corps, elle ne l’a découvert que très tard, avec Gilles.

54Un souvenir lui revient alors, précieux car il date d’avant la mort de sa mère : dans un vase, les tiges des roses avaient l’air de percer le vase. Quand elle voit un couteau, elle a peur d’être transpercée. Je suis intervenue en rattachant cette peur à ses douleurs actuelles, comme à ce qui s’était passé quand sa mère avait été transpercée par un éclat d’obus. Là aussi, elle se voyait restée en arrière, se tenant à la jambe de sa mère. J’ai ajouté qu’elle avait dû se cramponner de terreur, jusqu’à en avoir mal dans les mains, comme là. Le symptôme douloureux disparaîtra du jour au lendemain.

Temps et modalités traumatiques

55L’enchaînement dans cette séquence de différents temps et de différentes modalités traumatiques pose de nombreuses questions. Certes, c’est à la suite de l’abandon par Pierre, que Maria a dû recourir à des défenses comportementales et motrices. Mais c’est la scène avec la jeune fille nue qui paraît être à l’origine des conséquences désorganisatrices, puisque le lendemain, actualisant d’ailleurs ainsi le contenu de rêves d’angoisse récents, Maria provoque/subit un traumatisme physique dans la piscine. Ce n’est pourtant que trois semaines après cet accident, alors qu’elle a vu cette fois-ci un homme nu à son atelier de sculpture, que Maria a un malaise, s’évanouit, et présente des symptômes somatiques douloureux. Toute cette séquence a-t-elle constitué, selon les termes de Ferenczi, une répétition du traumatisme de ses cinq ans pour l’amener à la perception et à la décharge motrice ?

56Comment comprendre la survenue de ce symptôme douloureux après une latence post-traumatique ? S’agit-il d’un symptôme de conversion ou d’une somatisation au sens donné à ce terme par les psychosomaticiens, somatisation à laquelle mon interprétation n’aurait donné que secondairement un sens ?

57Et quel sens ? Trois souvenirs-écrans s’emboîtent alors : celui de l’exhibitionniste, celui de la mort de sa mère, et celui qu’elle vient de retrouver, qu’elle situe dans le temps entre les deux précédents, des roses dans le vase (à entendre peut-être comme le vase du rêve ?). Devant cette complexe imbrication, j’aurais pu en effet orienter mon interprétation autrement. Ce d’autant qu’avant cet épisode désorganisateur, le travail analytique avait porté principalement sur les relations de Maria avec son entourage professionnel. Elle y affirmait ses visées narcissiques phalliques, avec un mélange de triomphalisme et de culpabilité qui aboutissait à faire échouer ses ambitions de parvenir à une position clef.

58À propos du traumatisme sexuel de ses trois ans, du modèle nu, des tiges des roses, j’aurais pu notamment intervenir sur son désir, ressenti comme dangereux, de saisir avec ses mains l’attribut pénien, la baudruche balle, ou la tige pleine d’épines. Somme toute, je suis plutôt allée dans le sens indiqué par Ferenczi, d’un abandon complet de toute relation au présent, et d’une immersion complète dans le passé traumatique. La sédation de la douleur qui s’en est suivie ne peut à elle seule justifier le bien-fondé de ma construction interprétative, mais elle témoigne de ce que j’ai fourni à Maria une issue représentative à ce qui était en souffrance dans ce symptôme. Il me semble que les conséquences favorables de mon intervention ne sont pas explicables par la seule levée d’un refoulement, mais qu’elles tiennent, je cite là R. Roussillon, à la réduction « d’un clivage lié à une zone traumatique insuffisamment symbolisée ». J’ai trouvé dans le récent livre qu’a publié cet auteur de quoi étayer théoriquement l’orientation interprétative qui avait été la mienne dans cette séquence. Voici notamment ce qu’il écrit : « Même s’il y a tout lieu de penser que la douleur correspond à une perception “actuelle”, il me semble nécessaire de faire l’hypothèse complémentaire qu’au sein de cette perception s’infiltre un processus hallucinatoire correspondant à l’activation d’une trace mnésique perceptive de certains contacts primaires avec la mère. » [25]

59Autre question : le traumatisme de l’abandon par Pierre a certainement entraîné la résurgence des traumatismes anciens datant de la petite enfance de Maria, mais quelle part faire à l’impact des traumatismes les plus précoces ?

60Pour ma part je dirais – reprenant là une réflexion récente d’A. Green – « qu’il ne me semble pas exact de tout ramener au traumatisme le plus ancien... Ce dont il faut tenir compte est le groupement de divers traumas s’évoquant les uns les autres et dont la réaction du sujet entraîne le déni de ce qu’ils peuvent mutuellement mettre en communication pour la psyché... parce que le tableau qui se formerait l’obligerait à accepter sa rage, son envie et, plus que tout, sa destructivité qui le contraindrait à se voir au fin fond de la détresse... Ces issues mettent en évidence le paradoxe d’une culpabilité qui appelle une réparation interminable... La culpabilité est la conséquence du meurtre primaire dont le but est de procéder à une excorporation de l’objet abandonnique » [26].

61Auparavant Maria avait déjà évoqué de façon allusive ce qu’elle appelait ses évanouissements à la vue du sang. Pour une large part ils évoquent une séméiologie névrotique, de type hystérique. Néanmoins ils n’avaient aucune dimension théâtrale, exhibitionniste, et je pourrais dire de ses brèves pertes de conscience, qu’elles étaient blanches, au sens qu’elles restaient invisibles aux yeux de son entourage. Dernière question : peut-on envisager que leur mécanisme soit comparable à celui de l’hallucination négative : une « abolition » de conscience [27] ?

62Lors de son dernier évanouissement, Maria s’était brisé une dent, et du sang avait coulé de sa bouche. Il m’apparaît aujourd’hui que je n’ai pas fait le lien avec ses cauchemars de vampire. Pourtant j’aurais pu tenter par ce biais de mettre à jour ce qu’il en était de son identification inconsciente sur le mode cannibalique avec sa mère morte, peut-être comme seul moyen de rétablir la réunion avec l’objet primaire. Ce n’est qu’en rédigeant ce texte que j’ai associé sur ce que Maria m’avait raconté au début de son analyse : sa grand-mère maternelle avait fait monter les dents de lait de ses deux filles en broche. Maria trouvait cela très joli, et elle avait voulu faire la même chose avec les dents de Solène, mais elle les avait perdues.

63Toujours dans l’après-coup, les évanouissements de Maria, comme le contenu de ses cauchemars – être tuée d’un coup de pieu, être enterrée vivante [28], m’ont également fait penser aux réflexions de Freud sur le sens des attaques que présentait Dosto ïevski. « Ces attaques ont le sens d’une identification avec le père comme punition mais elles sont devenues terribles, comme le fut la mort effrayante de son propre père. Quel contenu ont-elles reçu plus tard, et particulièrement quel contenu sexuel ? Il est impossible de le deviner. » [29]

MA MÈRE EN MOURANT M’A PRIVÉE D’UN DÛ

64Dans les mois qui ont suivi la disparition de son symptôme douloureux, Maria a pu reprendre son travail élaboratif :

65« Vous aviez raison, reconnaît-elle, je me suis toujours comportée avec Pierre comme une petite fille avec sa mère. Je ne supporte pas de ne pas avoir une maîtrise complète sur lui. Avec tout le monde, je suis très autoritaire... sauf avec vous, peut-être parce que je ne vous connais pas du tout. »

66Mais elle a continué de repousser avec la même détermination mes interventions portant sur l’agressivité sourde qu’elle exprimait à mon encontre, et celles qui portaient sur sa jalousie à l’égard de ses sœurs. Elle les avait toujours aimées, preuve selon elle ce mot d’enfant, retrouvé dans une lettre de sa mère à sa propre mère, où Maria âgée de trois ans et demi avait dit : « Si maman mourait, je saurais très bien m’occuper de mes petites sœurs. Je n’ai pas du tout besoin de papa, de maman ou de la bonne. »

67En réfléchissant dans un tardif après-coup à cette cure, j’ai été frappée par la ténacité des défenses de caractère de Maria. Elles avaient donné une tonalité bien particulière au transfert. Cette remarque qu’elle a faite un jour me paraît assez illustrative : « C’est une analyse très longue, vous n’avez pas de chance. C’est un peu comme si vous aviez acheté une maison en viager, et l’occupante met beaucoup de temps à mourir ; alors vous payez très longtemps et vous ne pouvez pas occuper votre propriété. »

68À la suite d’une discussion avec sa sœur Léna qui lui reproche aigrement de s’être débrouillée pour se faire payer son analyse par la Sécurité sociale, alors qu’elle-même est depuis plusieurs années en analyse dans le privé, Maria me dira qu’elle considérait « que c’était un juste retour des choses », « qu’elle avait assez payé ». « Depuis que ma mère est morte, j’attends tout avec condescendance, j’attends un miracle. Je ne consentirai jamais à être comme les autres. » Après avoir gardé longtemps le silence, Maria avait eu cette expression saisissante : « En mourant ma mère m’a privée d’un dû. »

69J’ai relu pour préparer ce travail « Quelques types de caractère » où Freud évoque à propos de Richard III, ce qu’il appelle la « position d’exception » [30], et pu constater alors avec surprise qu’il n’avait pas attendu 1939 – comme je le pensais jusque-là – pour évoquer les « atteintes précoces au moi (blessures narcissiques) ». Freud écrivait en effet dans ce texte qui date de 1916 que « nous exigeons tous un dédommagement pour les blessures précoces de notre narcissisme ». Cette formulation m’avait rappelé celle de Maria, restée en ma mémoire depuis toutes ces années.

70Alors que Maria entame sa 10e année d’analyse, sa sœur Léna attend enfin un bébé, au moment où après de longues années de stérilité, elle avait décidé de renoncer à tous les traitements médicaux. Maria compare leurs vies, se plaint de sa solitude, depuis que Pierre l’a abandonnée, et que Solène est loin d’elle dans un établissement spécialisé en province. Elle commence à me reprocher de l’avoir rendue plus vulnérable : « Avant j’étais très dure et indifférente, c’est ce qu’il faut pour réussir. Maintenant je mesure combien j’ai besoin d’être aimée. »

71L’analyste de Léna a souligné que l’enfant qu’elle attendait était le fruit de son analyse. Maria se plaint que son analyse à elle est trop longue, qu’elle est stérile. La nuit dernière, me dit-elle, j’ai pensé que j’étais en train de toucher la vérité, et que la vérité, c’était triste. Elle ne parvient pas à oublier Pierre, et de surcroît elle doit renoncer à un « projet » qui l’aurait imposée professionnellement à ses côtés. Cette situation s’apparente me semble-t-il aux « états traumatiques » décrits par M. Fain. Ils surviennent, selon cet auteur, au décours « d’un évènement qui a la particularité d’être interprété par le sujet comme actualisant la castration (et qui) interrompt en général le déroulement d’un projet fortement investi et à valeur narcissique. Ces états s’accompagnent assez souvent d’affections somatiques et de périodes transitoires de vie opératoire. (Leur) noyau est représenté par le complexe de castration et sa valence œdipienne, c’est-à-dire sa valeur fonctionnelle pour l’économie des représentations au sein du fonctionnement mental » [31].

La décision « d’en rester là »

72Quelques semaines plus tard, alors que sa sœur est sur le point d’accoucher, Maria a mis fin à son analyse d’une façon plutôt abrupte. Elle m’a annoncé le lundi qu’elle comptait finalement partir en vacances dès la semaine suivante – nous étions fin juin – qu’elle viendrait donc encore mercredi et vendredi, mais qu’elle en resterait là, puisque depuis un certain temps son traitement ne lui apportait plus rien.

73Mes interventions immédiates, à « chaud », ont porté sur la série récente de ses déceptions, à propos de Pierre, et aussi de Gilles qu’elle avait cherché à revoir, alors même qu’ici avec moi la longue séparation de l’été est toute proche. Elle ressent ainsi le besoin de me faire vivre ce qu’elle éprouve. Maria m’a répondu : « Je sais déjà tout cela, et cela ne change rien à ma décision d’arrêter. Je suis seule, vous ne changerez rien à cela, et même ici je me sens seule. »

74Je lui ai dit qu’elle m’imposait une séparation brutale qu’elle se représentait comme définitive, comme jadis sa mère la lui avait imposée en mourant. Maria s’est mise à pleurer : « La dépression ce n’est pas quand je pleure. Quand je pleure c’est vivant. » Je suis intervenue ainsi : « Vous pleurez là en ma présence, c’est vivant, alors pourquoi vous faudrait-il trancher ce lien ? » Maria me dira qu’elle ne sait pas, qu’elle pense qu’elle ne vient plus que par habitude.

75À la seconde séance de la semaine, au moment où elle me tend la main pour me dire bonjour, elle me dit au revoir.

76À la dernière séance du préavis qu’elle m’a accordé, Maria me raconte le rêve suivant : « J’ai rêvé de la maison de ma grand-mère maternelle, qu’elle a dû vendre quand j’étais petite. Mais dans mon rêve, cette maison se trouvait au bord de l’Adriatique, dans une région où j’ai été avec mon père après la guerre, et dont ma belle-mère était originaire. J’étais seule, il n’y avait ni ma mère, ni mes sœurs. Le parc avait été divisé en lots. À l’intérieur, les propriétaires avaient restauré les grandes pièces. Ils avaient réparé un mobile sur le toit – un oiseau métallique bleuté – ce qui avait changé le prix de la maison. Mais cet oiseau était très mal rafistolé, sa queue, comme celle d’un paon, ne s’étendait pas, elle était comprimée par un fil de fer pour tenir. C’était quelque chose de très saugrenu sur le toit. En descendant l’escalier du perron, pieds nus, j’ai senti le caillou qui était incrusté dans l’une des marches. Il y avait réellement un caillou blanc à cet endroit, je l’avais remarqué quand j’étais chez ma grand-mère. »

77Je terminerai sur la saisissante mise en image que ce rêve nous donne des niveaux traumatiques en jeu :

78— Sur le toit [32], l’oiseau, le « mobile » qui fait tout le prix de la maison, a la queue mal rafistolée, et figure ainsi les séquelles de l’angoisse de castration de Maria, angoisse qualifiée par Freud dans l’Abrégé – il est vrai à propos du petit garçon – de « plus fort traumatisme de sa jeune existence » [33].

79— Sur le seuil, comme la marque commémorative de ce que Ferenczi avait appelé la cicatrice « traumatique maternelle-infantile, archi-originaire » [34], Maria « perçoit » au contact puis à la vue, un caillou inclus dans le passage entre dehors et dedans, au moment de la construction de la demeure. Il est enchâssé comme les dents de lait de sa mère, et sa couleur blanche vient rappeler que « la perte (a été) subie au niveau du narcissisme » [35].

Notes

  • [1]
    Ce titre s’inspire de celui d’une conférence que C. David avait faite à la SPP, Expérience(s) esthétique(s), expérience(s) analytique(s), qui a été publiée dans son livre La bisexualité psychique (1992), Paris, Payot.
  • [2]
    A. Green (1974), Introduction à l’article de S. Ferenczi (1929), Principe de relaxation et néocatharsis, NRP, no 10. Cet article a été publié dans S. Ferenczi (1932), Psychanalyse 4, Œuvres complètes, 1927-1933, Paris, Payot.
  • [3]
    S. Ferenczi (1932), Réflexions sur le traumatisme, op. cit.
  • [4]
    A. Green (2000), Le chiasme (partie II), Bulletin de la FEP, no 49, p. 32.
  • [5]
    S. Ferenczi (1932), op. cit. Pour de plus amples développements sur ce point particulier du trauma-clivage, mais aussi pour tout ce qui concerne l’intérêt d’une mise en correspondance des conceptions de Freud et de Ferenczi sur la question du traumatisme, je vous renvoie à ce qu’a écrit T. Bokanowski sur ce sujet.
  • [6]
    M. Neyraut (1997), Les raisons de l’irrationnel, Paris, PUF.
  • [7]
    J.-C. Rolland (2000), Guérir du mal d’aimer, Paris, Gallimard, p. 94.
  • [8]
    Titre d’un des chapitres du livre de C. Janin, Figures et destins du traumatisme, Paris, PUF, 1996.
  • [9]
    S. Freud (1931), Sur la sexualité féminine, La vie sexuelle, Paris, PUF, p. 149.
  • [10]
    S. Freud (1931), op. cit., p. 140.
  • [11]
    R. Roussillon (1999), Agonie, clivage et symbolisation, Paris, PUF, p. 14.
  • [12]
    C. et S. Botella (2001), Figurabilité et regrédience, RFP, 2001/4.
  • [13]
    C. et S. Botella (1983), Notes cliniques sur la figurabilité et l’interprétation, RFP, 1983/3.
  • [14]
    En 1916-1917 il écrit que le traumatisme est un « événement qui apporte à la vie psychique en un court laps de temps une augmentation d’excitation si puissante que l’élimination ou l’élaboration de celle-ci de la façon normale et habituelle échoue, d’où doivent résulter de durables perturbations de l’activité d’énergie (Energiebetrieb) ».
  • [15]
    Dans la suite de mes remarques introductives, je rappellerai à ce propos combien Ferenczi mettait l’accent sur ce qu’il appelait l’ « expérience vécue », l’ « Elerbnis ».
  • [16]
    C. Janin (1996), op. cit., p. 24.
  • [17]
    Chez Maria, l’hallucination négative et la compensation hallucinatoire positive – pour reprendre les termes de Ferenczi –, présentes toutes deux dans la figuration du jet blanc, seront décondensées par le travail analytique. Le blanc halluciné sera référé à deux séries de représentations : d’une part celle de la perte, de la disparition maternelle, et d’autre part celles de substances vitales, le lait et le sperme.
  • [18]
    A. Green (1993), Le travail du négatif, Paris, Éd. de Minuit, p. 260-261.
  • [19]
    S. Freud (1923), Le Moi et le Ça : « Ce que le moi redoute du danger extérieur et du danger libidinal dans le ça, on ne saurait le préciser ; nous savons que c’est le débordement ou l’anéantissement, mais on ne peut pas le concevoir analytiquement. »
  • [20]
    S. Freud (1894), Les Psychonévroses de défense, Névrose, psychose et perversion, Paris, PUF, 1973, p. 12.
  • [21]
    Selon la formulation de Freud dans ses Remarques sur un cas de parano ïa : « Il n’était pas exact de dire que la sensation réprimée à l’intérieur (innerlich unterdrückte) était projetée vers l’extérieur ; nous reconnaissons bien plutôt que ce qui a été aboli à l’intérieur (das innerlich Aufgehobene) revient de l’extérieur. »
  • [22]
    Maria découvrira en cours d’analyse, en lisant la correspondance abondante échangée entre sa mère et sa grand-mère, que sa mère se sentait complètement débordée, et que les trois dernières grossesses n’avaient pas été désirées.
  • [23]
    A. Green (1980), La mère morte, Narcissisme de vie, narcissisme de mort, Éd. de Minuit, 1983, p. 230.
    Les développements apportés par C. Janin à cette notion de « noyau froid du traumatisme », les réflexions de C. Smadja sur le « noyau traumatique narcissique du fonctionnement mental » constituent à mes yeux d’importantes avancées actuelles sur la question des traumatismes.
  • [24]
    Au système évolué activité-passivité se substitue le système « activité-épuisement » (M. Fain (1992), Vie opératoire et potentialités traumatiques, Revue française de psychosomatique, no 2, Paris, PUF, p. 18).
  • [25]
    R. Roussillon (1999), op. cit.
  • [26]
    A. Green, La position phobique centrale, RFP, no 2000/3, Paris, PUF ; souligné par moi.
  • [27]
    C’est me semble-t-il ce qu’envisageait A. Green, lorsqu’il écrivait que « le désinvestissement que constitue l’évanouissement ne se borne pas à revivre une expérience de fusion, mais réalise également une expérience de coupure, de vide... qui troue l’inconscient (...) L’hallucination négative en est le correspondant dans l’ordre de la représentation » (Narcissisme de vie, narcissisme de mort, op. cit., p. 154).
  • [28]
    Dosto ïevski « craignait de tomber, la nuit, dans un sommeil semblable à la mort, et demandait qu’on ne l’enterrât qu’après un délai de cinq jours ».
  • [29]
    S. Freud (1929), Dosto ïevski et le parricide, Résultats, idées, problèmes, Paris, PUF, 1985.
  • [30]
    Voir à ce sujet les développements proposés par R. Roussillon, dans le chapitre « Violence et culpabilité primaire » de son livre Agonie, clivage et symbolisation, op. cit.
  • [31]
    C. Smadja et G. Szwec (1992), États traumatiques, états somatiques, Revue française de psychosomatique, no 2, PUF.
  • [32]
    Ce toit que la jeune fille nue, qui appelait son père, avait désespérément cherché à atteindre.
  • [33]
    S. Freud (1939), L’Abrégé de psychanalyse, Paris, PUF, 1964.
  • [34]
    S. Ferenczi (1985), Journal clinique (janvier-octobre 1932), Paris, Payot, p. 137.
  • [35]
    A. Green (1980), La mère morte, Narcissisme de vie narcissisme de mort, op. cit., p. 226.
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