Notes
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[1]
L’auteur remercie le soutien financier apporté par le Labex « Entreprendre », programme de recherche A2P3 « Gouvernance, stratégies de marché et performance durable ».
-
[2]
Source : Coop de France (www.coopdefrance.coop/fr/index.html).
-
[3]
Dans son édition du 3 mai 2012 (n° 299), le magasine Challenges rapporte une opération de rapprochement entre la coopérative Alma et la SSII Missler. Cette opération financière illustre les problématiques actuelles des coopératives modernes qui, tout en conservant leurs principes coopératifs, utilisent les possibilités offertes par l’environnement de l’économie de marché.
-
[4]
L’Alliance coopérative internationale, association fondée en 1895, distingue sept principes coopératifs : adhésion volontaire et ouverte à tous, pouvoir démocratique exercé par les membres, participation économique des membres, autonomie et indépendance, éducation formation et information, coopération entre les coopératives, et engagement envers la communauté.
-
[5]
Selon Zattoni (2011), les droits de propriété doivent être alloués aux apporteurs de la ressource (ou contribution) critique. La ressource est qualifiée de critique lorsque la valeur apportée par cette ressource peut être significativement différente de sa rémunération à l’apporteur.
-
[6]
À titre d’illustration, Allen et al. (2014) montrent que les entreprises orientées vers les parties prenantes sont mieux valorisées que les autres.
-
[7]
La cession des parts sociales est soumise à l’approbation soit de l’assemblée générale, soit des administrateurs ou gérants, dans les conditions fixées par les statuts (article 11, loi de 1947, modifié par la loi du 13 juillet 1992).
-
[8]
L’originalité de ces formes de coopérative tient surtout à l’achat par leur membre de droit à livrer une marchandise que la coopérative s’engage à acquérir à un prix fixé d’avance. Par un processus d’intégration verticale de la filière, la coopérative garantit un débouché quasi certain de ces marchandises.
-
[9]
La loi de modernisation des coopératives du 13 juillet 1992 autorise les coopératives à émettre différentes catégories de part sociale (voir François Espagne : « Le statut légal des coopératives ouvrières de production (Scop) en France ») :
- des parts ordinaires, comportant ou non le droit à un intérêt ;
- des parts à avantages particuliers (intérêt plus élevé que les parts ordinaires, remboursement prioritaire, imputation réduite en cas de pertes). Elles sont librement négociables entre associés mais les restrictions sur leur cession interdisent de les qualifier de valeurs mobilières ;
- des parts à intérêt prioritaire (à droit de vote suspendu), dont la souscription est réservée aux associés non usagers ou même à des tiers non associés, garantissant un intérêt statutaire prioritaire.
-
[10]
Il faut dire que les textes français à la différence de nombreux pays européens, en ne prévoyant pas de lois auto-suffisantes sur les coopératives, introduisent un certain flou juridique. Par exemple, les Scop doivent se constituer sous la forme de SA ou de SARL relevant du droit des sociétés appliqué au cas particulier des coopératives.
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[11]
Dans cet exemple simple, nous considérons une absence totale d’endettement. La présence d’endettement ne modifie pas le raisonnement.
-
[12]
Notre réflexion partage plusieurs points communs avec l’étude de Charreaux et Desbrières (1998) sur la valeur partenariale. Notamment, la difficulté d’évaluer la position critique n’est pas sans rappeler celle d’identifier des coûts et des prix explicites/implicites.
1 Alors que nous traversons une crise économique et financière de grande ampleur, la création de coopératives semble connaître une croissance inédite. Ce phénomène a déjà été identifié dans les années 1960 (Helmberger, 1966). Les vagues de création et de faillites de coopératives suivent respectivement des phases de dépression et d’expansion de l’économie. D’après une étude préliminaire de Challita (2013), le mouvement coopératif en France retrouve un regain d’intérêt depuis 2009-2010 avec une forte croissance en 2011. Il faut dire que le poids économique des coopératives est loin d’être anecdotique. Avec plus de 84 milliards d’euros de chiffre d’affaires cumulés et 160000 emplois pour les seules coopératives dans l’agroalimentaire, elles représentent des marques bien connues telles que Beghin Say, Daucy, Régilait, Yoplait, Labeyrie, Banette… [2].
2 De façon surprenante, le développement de cette gouvernance alternative semble susciter peu d’intérêt de la part des chercheurs en gestion. Pourtant, insérées dans un système économique à dominante capitaliste, les coopératives modernes exploitent des contradictions a priori inconciliables : prise de décisions collectives/réactivité, non-rémunération du capital/rentabilité, ancrage régional/compétition mondiale, pour ne citer que quelques-unes d’entre elles. Ces organisations investissent, se financent et se restructurent. Nombreuses sont les coopératives qui se sont regroupées ces dernières années pour atteindre une taille critique (Saïsset et Cheriet, 2011). En pareilles circonstances, le problème de la valorisation de la coopérative se pose. Peut-on évaluer ces formes d’organisation ? Et comment ? Cette question est essentielle dans le cadre de toute opération de financement ou de regroupement. Or, elle revêt une complexité particulière dans le cas des coopératives, organisations qui par essence sont incessibles, adoptent un principe de non-distribution et de non-partage des profits et relèvent d’une doctrine collectiviste. Ces caractéristiques pourraient amener à penser que les coopératives sortent du champ de la finance (prise en tant que discipline de gestion). Pourtant, au-delà de l’idéologie participative, l’intérêt économique contribue également à la création des coopératives. Par exemple, réunis en coopératives, les producteurs atteignent une taille critique pour négocier le prix de leur production mais aussi pour mutualiser des coûts de prospection et de commercialisation. Autrement dit, les coopératives créent de la valeur. Si tel est le cas, cette valeur doit pouvoir être mesurée. L’objet de cet article est de voir en quoi les outils de la finance permettent d’apporter une solution à la valorisation des coopératives.
3 L’étude de la question de la valorisation de la coopérative est intéressante à plusieurs égards. En premier lieu, elle vient partiellement combler le vide béant laissé par la littérature financière à l’égard de ces formes de gouvernance alternative. En adaptant les outils de la finance traditionnelle à une forme de gouvernance participative et éthique, cette question s’inscrit dans le champ de la finance durable. En second lieu, elle contribue à répondre aux préoccupations actuelles des coopératives dites modernes dans leurs opérations d’investissement, de regroupement et de financement [3]. Enfin, en dernier lieu, elle permet une certaine réconciliation entre l’esprit participatif du coopérateur et l’impératif économique de toute structure insérée dans un environnement concurrentiel.
4 L’étude de l’évaluation financière de la coopérative se fera en deux temps. Dans un premier temps, il est essentiel de revenir sur les caractéristiques intrinsèques de la coopérative moderne avant d’examiner, dans un second temps, les aspects techniques qu’impose une telle évaluation.
I – LES CARACTÉRISTIQUES DE LA COOPÉRATIVE MODERNE
5 L’étude des questions financières des coopératives peut s’insérer dans le champ de ce qu’il est convenu d’appeler la finance durable (Sentis, 2012). Ainsi, à la façon de Soppe (2004), on peut caractériser les coopératives modernes en fonction de leur objectif, du comportement attendu des acteurs, du statut de la propriété et du cadre éthique de ces organisations.
1. L’objectif de la coopérative moderne
6 Historiquement, le mouvement coopératif prend ses racines dans les dérives capitalistiques engendrées par la première révolution industrielle. C’est donc, à l’origine, une organisation créée en réaction à l’existence d’un système économique décrié (Nourse, 1922). L’idéologie, la politique et même le religieux alimentent l’idéal coopératif pendant plusieurs années. On retiendra, notamment, l’école de Nîmes, mouvement coopératif animé par des protestants et dont Charles Gide fut le porte-drapeau. Ce courant prônait « une coopération émancipatrice, structure d’apprentissage de la démocratie et de l’efficacité économique, permettant d’abolir le régime du profit sans tomber dans l’étatisme ».
7 Même si les structures coopératives adoptent des formes très variées, quelques principes fondateurs restent identiques [4] :
- le pouvoir de décision appartient à chacun des membres selon le principe « un homme, une voix » ;
- les réserves constituées sont impartageables et appartiennent à la coopérative pour être réinvesties ;
- les parts sont en règle générale inaliénables, elles ne peuvent être librement cédées même si la sortie d’un membre est possible dans des conditions que nous verrons par la suite.
9 La coopérative moderne, sans remettre en cause les principes fondamentaux du système coopératif, se distingue de sa forme ancestrale en adoptant résolument un objectif économique. Au lieu de se départir du marché et de réagir en contradiction, voire en opposition, au système économique dominant, la coopérative moderne permet à ses membres de se regrouper en une structure organisée, mutualisée afin de se protéger des déficiences de ce système tout en répondant à ses attentes. Selon le type de coopérative, l’objectif peut être de vendre une production à un meilleur prix ou bien d’obtenir des biens et services à un tarif avantageux, de mutualiser des coûts, de recevoir des rémunérations davantage en adéquation aux efforts fournis tout en optant pour un état d’esprit solidaire. Un autre trait de la coopérative moderne concerne la possibilité délibérée d’ouvrir son capital à une frange minoritaire d’actionnaires classiques. Puaha et Tilley (2003) soulignent cette caractéristique importante en évoquant les coopératives américaines dites de nouvelle génération.
10 Le mode de prise de décision démocratique couplé à un objectif à la fois économique et solidaire permet de qualifier la gouvernance des structures coopératives de « partenariale ». Cette dimension partenariale provient du fait que les membres de la coopérative sont non seulement des apporteurs de capitaux mais, aussi et surtout, les apporteurs de la ressource critique [5] qui donne à la coopérative sa raison d’être. Ainsi, en fonction du type de coopérative, c’est le fournisseur, le client, ou le salarié qui est preneur de décision en sa qualité de membre. La gouvernance partenariale participe significativement à la création de valeur de la coopérative [6].
2. Le comportement attendu des acteurs
11 Indéniablement, les membres de la coopérative poursuivent un objectif économique. Cependant, dans le cadre de cette structure, un comportement solidaire est revendiqué ce qui distingue le coopérateur d’un agent économique classique, simple « maximisateur » d’un profit.
Les trois principales formes de coopérative
Type de coopératives | Décideurs | Source de valeur |
Coopérative de fournisseurs (coopératives agricoles) | Les fournisseurs | Prix de vente de la marchandise supérieur au prix de marché, mutualisation de coût de prospection et de commercialisation |
Coopérative d’employés (Scop) | Les salariés | Rémunérations plus élevées, pérennisation des emplois, savoir-faire, qualifications, complémentarité |
Coopérative de clients (mutuelles) | Les clients | Prix de vente du bien ou du service préférentiel inférieur au prix de marché, clientélisme |
Les trois principales formes de coopérative
12 Cette nuance importante peut être symbolisée par le jeu bien connu de l’ultimatum dont la première version apparaît dans un article de Güth et al. (1982). Le jeu consiste à proposer à un premier joueur de partager une somme d’argent donnée avec un deuxième joueur. Ce dernier accepte ou rejette la proposition du premier. S’il accepte, les deux joueurs remportent la somme partagée selon la proposition du premier joueur. S’il refuse, la somme est perdue et les joueurs n’obtiennent rien. L’équilibre classique de Nash en sous-jeux amènerait le second joueur a accepté toute répartition qui lui accorderait une somme positive. En effet, il vaut mieux avoir une faible somme plutôt que rien du tout. Ce qui fait que le premier joueur devrait s’accaparer une très grande part de la somme et laisser quelques centimes pour le second joueur, ce dernier acceptant toute somme supérieure à zéro. En réalité, les expérimentations sur différentes populations montrent que le premier joueur choisit en moyenne une répartition 60 %/40 % avec une répartition modale 50/50. Cette répartition s’explique par le fait que le second joueur dispose d’une menace crédible avec la possibilité de refuser la répartition. Le second joueur peut considérer que la répartition n’est pas équitable et donc la rejeter, laissant le premier joueur sans rien. Cette « punition » vient en réaction d’un comportement purement économique du premier joueur. Elle n’a de sens que parce que le jeu s’insère dans un contexte socio-économique dans lequel des normes sociales existent. Ces dernières correspondent à des effets de réputation, à des pratiques culturelles, à des coutumes... À l’évidence, le comportement du coopérateur s’inscrit dans ce contexte. La répartition des revenus, de tous les revenus, doit être équitable (reciprocity, voir Mc Cain, 2008). Le concept de « punition » prend tout son sens dans un contexte coopératif dont le ciment ne tient que par l’esprit de collaborer.
13 Si la notion de partage des revenus participe intrinsèquement au comportement du coopérateur, qu’en est-il de son attitude vis-à-vis du risque ?
14 Le comportement du coopérateur en matière de prise de risque est fondamental pour comprendre la dynamique des coopératives. Le fait que les réserves ne soient pas partageables et que les résultats soient mis en réserve à hauteur au moins de 15 % (article 16 loi 1947, modifié par la loi du 13 juillet 1992) implique une politique d’investissement active. La façon dont les coopératives prennent leur décision d’investissement n’a fait quasiment l’objet d’aucune étude à l’exception notoire de celle de White (1997). Dans son article, l’auteur note que les méthodes de choix d’investissement des coopératives se distinguent de celles des entreprises traditionnelles dans la mesure où l’objectif de la coopérative n’est pas uniquement orienté sur la maximisation du profit. La prise en compte du risque dans ce type de décision est donc certainement limitée et/ ou retenue dans une dimension subjective. En conséquence, l’attitude du coopérateur face au risque peut se traduire par une plus faible aversion sans même qu’il en soit conscient.
3. Le statut de la propriété
15 Les coopératives disposent d’un capital social qui est apporté par ses membres fondateurs. Une fois investi dans la coopérative, ce capital devient inaliénable. Autrement dit, les parts sociales de la coopérative ne sont pas négociables et ne peuvent être cédées à un tiers [7]. Elles peuvent donner lieu à une rémunération mais n’excédant pas le taux de rendement des obligations privées fixé annuellement par l’État (2,62 % au deuxième trimestre 2013) et après mise en réserve obligatoire d’au moins 15 % du résultat. La sortie d’un membre est légalement possible mais celui-ci reçoit au plus la valeur d’apport de ses parts sociales, les réserves de la coopérative étant impartageables.
16 Au-delà de ces aspects limitatifs au transfert de la propriété de la coopérative, l’originalité de cette forme de propriété tient notamment au fait qu’elle appartient aux apporteurs de la ressource critique (« critical contribution ») selon les termes de Zattoni (2011). Ce dernier argumente que « la structure de propriété de la coopérative permet de sécuriser plus fortement les liens entre les parties prenantes (stakeholders) apportant les ressources critiques. Elle permet de sécuriser les ressources pour la survie de l’organisation et incite les parties prenantes à la création de valeur » (Zattoni, 2011, p. 267).
17 Toutefois, la législation prévoit la possibilité d’admettre en qualité d’associés des personnes physiques ou morales n’ayant pas vocation à recourir à leurs services ou dont elles n’utilisent pas le travail mais qui entendent contribuer par l’apport de capitaux à la réalisation des objectifs de la coopérative (article 3 bis, loi de 1947, modifié par la loi du 13 juillet 1992). Ces associés ne peuvent détenir ensemble plus de 35 % des droits de vote de la coopérative. Le nombre de voix peut être ici proportionnel au montant du capital détenu. Cette possibilité de faire intervenir des investisseurs « purs » marque l’un des traits saillants des coopératives modernes. Pour cette catégorie d’intervenants, la notion de valorisation des parts prend tout son sens.
18 Les coopératives de nouvelles générations apparues dans les années 1990 en Amérique du Nord (à la suite notamment de la loi de 1996 « Freedom to Farm » Act aux États-Unis) vont même plus loin en offrant la possibilité aux coopératives de faire entrer dans leur capital des investisseurs avec la possibilité de revendre leur part à un prix négocié différent de leur valeur faciale [8]. Ce prix négocié est naturellement fonction de la profitabilité de la coopérative. Ainsi, la coopérative de nouvelle génération apparaît comme une structure hybride entre la coopérative traditionnelle et l’entreprise capitalistique.
4. Le cadre éthique des coopératives
19 La coopérative s’insère dans un courant d’économie solidaire. En effet, sous-tendue par l’idée que les fruits du travail doivent revenir à ceux qui les produisent, la coopérative est dirigée démocratiquement selon le principe « un homme-une voix ». Elle n’est pas tournée exclusivement sur la constitution d’un profit résiduel vu que la rémunération des parts ne peut excéder le taux des obligations privées.
20 Ce cadre éthique présuppose une adhésion des membres au principe de partage équitable. Ce principe est de toute façon prévu dans les textes et les statuts de la coopérative. Les membres ne peuvent donc s’en départir qu’en renonçant à leur position.
21 Au-delà de cette notion de partage, le cadre éthique de la coopérative sous-entend également un certain degré d’altruisme de la part de ses membres. En effet, le caractère inaliénable des parts et leur rémunération limitée peuvent laisser entendre que la rentabilité de l’investissement des membres sera plus qu’incertaine. En cas de difficulté, les perspectives d’une « recapitalisation » de la coopérative par ses membres actuels apparaissent plus que compromises compte tenu des limitations conférées au capital. Plus grave, le faible caractère altruiste de certains individus pourrait les inciter à adopter un comportement de « free-rider » en participant peu au capital de la coopérative tout en bénéficiant de leur voix pour les votes aux assemblées. Un tel comportement généralisé peut amener à une sous-capitalisation de la coopérative lui offrant donc peu de marges de manœuvre et une faible probabilité de succès.
22 Une telle vision de la part de ses membres reviendrait à ignorer les avantages retirés de la coopérative qui correspondent à une création de valeur. Cette création de valeur peut se concrétiser au terme d’une évaluation financière qui en saisirait toutes les dimensions et permettrait de restaurer ainsi le cadre éthique de la coopérative.
II – LES ASPECTS TECHNIQUES DE L’ÉVALUATION FINANCIÈRE DE LA COOPÉRATIVE
23 Nous allons opter pour une évaluation financière selon les principes classiques de la finance d’entreprise. Autrement dit, la valeur de la coopérative sera égale à la somme des valeurs créées à chaque période pour ses parties prenantes actualisées au moment présent.
24 La loi consacre l’existence de plusieurs catégories d’investisseurs dans les coopératives [9]. Nous focalisons ici l’attention sur la position du porteur de part sociale nominative classique, membre disposant d’un droit de vote de la coopérative. De la même façon, nous considérons que la coopérative ne constitue pas de réserve de réévaluation des parts et qu’elle limite la rémunération de ces parts dans le cadre des dispositions originales de la loi de 1947. Ce parti pris se justifie par le fait que les nouvelles dispositions de la loi de 1992 sont rarement mises en œuvre dans les coopératives existantes de sorte que le système par défaut correspond au cas général [10].
25 Pour bien comprendre le schéma de création de valeur de la coopérative, il convient de rappeler que le coopérateur, membre de la coopérative, dispose d’un double statut : il est à la fois investisseur, propriétaire de part sociale, et à la fois client, fournisseur ou bien salarié de cette coopérative. La création de valeur pour le coopérateur peut donc provenir de deux sources : les bénéfices distribuables et les avantages consentis au titre du statut de coopérateur (surprix, ristourne…). Nous procédons à l’évaluation financière de la coopérative en deux temps.
26 Dans une première approche, nous analysons la part sociale correspondant à la position d’investisseur du coopérateur. Puis dans une seconde approche, nous procédons à l’étude de la position financière liée aux avantages de son statut de coopérateur. Ces avantages concernent la rémunération de la ressource critique apportée par le coopérateur. Nous qualifions cette position de « position critique ». En résumé, de part le double statut du coopérateur, l’évaluation financière de la coopérative est composée de la valeur de la part sociale augmentée de la valeur de la position critique.
27 Le tableau 2 ci-dessous illustre un processus de création de valeur pour différentes formes de coopératives par rapport à une entreprise traditionnelle.
28 Ce tableau présente un exemple de distribution du chiffre d’affaires en fonction de la nature de l’apporteur de la ressource critique. Dans l’entreprise traditionnelle de type capitalistique, l’investisseur s’accapare la totalité du profit résiduel. Dans une entreprise de forme coopérative, une partie de ce profit peut être captée en amont pour venir récompenser le coopérateur. Le partage du profit se fait donc différemment et bien entendu à l’avantage du membre de la coopérative.
Formation du résultat selon quatre types d’organisations
Coopérative orientée | Investisseurs | |||
Fournisseurs | Clients | Salariés | ||
Chiffre d’affaires | 100 | 80 | 100 | 100 |
Coût des matières | 60 | 40 | 40 | 40 |
Salaires et autres rémunérations | 30 | 30 | 50 | 30 |
Résultat | 10 | 10 | 10 | 30 |
Formation du résultat selon quatre types d’organisations
Dans cet exemple, les entreprises ne se distinguent que par leur centre décision. Le pouvoir de décision de l’entreprise capitaliste appartient aux investisseurs. Celui des coopératives orientées fournisseurs, employés et clients appartient respectivement aux fournisseurs, salariés et clients. L’exemple montre que le partage de la valeur dans l’organisation se fait de façon préférentielle auprès du détenteur de la ressource critique.29 De ce fait, l’évaluation de la coopérative va se faire à deux niveaux : la part sociale et la position critique.
30 Un premier niveau d’évaluation revient à ne valoriser que la partie « capitalistique » de la coopérative, autrement dit la part sociale. Compte tenu du fait que les parts ne sont pas revalorisées, la valeur terminale de la part sociale ne peut être au plus égale qu’à sa valeur nominale. Si l’on ne considère aucune distribution intermédiaire comme cela est souvent le cas dans ce type de structure (aucune rémunération de la part sociale), on obtient une première évaluation extrême qui peut être formalisée ainsi :
- VP désigne la valeur de la part sociale ;
- VN est la valeur nominale ;
- r correspond au taux d’actualisation ;
- n est la durée probable de détention de la part.
32 Quels que soient les paramètres introduits dans le modèle, la valorisation obtenue montre que l’investissement dans une telle part sociale se ferait à fonds perdus. Ces paramètres correspondent :
- à la détention prévisionnelle de la part sociale par le coopérateur ; plus cette détention est longue, plus la perte subie sera importante ;
- au taux d’actualisation retenu : le schéma de paiement s’assimile ici à une obligation zéro coupon dont la valeur de remboursement est soumise à un risque de défaillance ; dans ces conditions, le taux d’actualisation adéquat correspondrait à un taux sans risque augmenté d’une prime de défaillance propre à l’entreprise.
34 En prenant pour exemple un coopérateur qui aurait investi 600 à l’année 0 avec un horizon de 10 années et un taux sans risque constant de 2 % par an, augmenté d’une prime de défaillance de 0,5 %, sa perte se serait élevée à :
1,02510
35 Soit une perte de plus de 20 % de son capital initial.
36 Dans le cadre des hypothèses restrictives que nous avons prises, l’on pourrait concevoir que la part sociale obtienne à chaque période la rémunération maximale autorisée chaque fois que cela est possible. Le schéma de rémunération de la part sociale correspond au résultat distribuable au titre de cette part (ce résultat devant bien entendu être positif) sans pouvoir excéder la rémunération maximale possible de la part (correspondant au taux des obligations privées multiplié par la valeur nominale de la part). Le résultat distribuable sera noté 0,85R, du fait de la mise en réserve de 15 %, et le taux des obligations privées en vigueur sera désigné par k. Formellement, le profil de gain, noté G, à chaque période correspondra à :
- si R > 0 et R > kVN/0,85 alors G = kVN ;
- si R < 0 et R < kVN/0,85 alors G = 0,85R ;
- si R < 0 alors G = 0.
38 De nouveau, nous obtenons un schéma de paiement qui s’apparente à celui d’une obligation dont les flux de rémunérations sont risqués et plafonnés et dont la valeur de remboursement est égale à la valeur nominale. Cette obligation a une durée de vie au gré du porteur qui dispose d’une option de vente exerçable à tout moment (type américain). À des fins de simplification, nous ignorons la valeur de cette option et considérons une durée de vie donnée et fixe.
VN
VP = (1 +1r) + (1 +2r) 2 +… + (1
+r
)n
39 Le taux d’actualisation des flux de liquidité serait ici constitué du taux sans risque auquel on doit ajouter une prime de risque car les flux G sont variables.
40 La problématique du calcul du taux d’actualisation vient essentiellement de la difficulté à mobiliser un modèle rendant compte des spécificités de la coopérative. En effet, le risque systématique de la coopérative ne peut pas être calculé directement. L’application de la théorie traditionnelle du Medaf pour calculer le risque systématique de la coopérative achoppe sur le fait que le titre de la coopérative est incessible, réduisant son potentiel de liquidité et son aptitude à participer à la diversification du portefeuille. Une forte dose de risque spécifique devrait donc demeurer. En conséquence, l’imparfaite diversification du portefeuille du coopérateur couplée à l’illiquidité quasi totale du titre devrait accroître le risque de la coopérative et donc sa rentabilité exigée. Compte tenu de ces éléments, le taux d’actualisation utilisé devrait être supérieur au taux des obligations privées. On peut aisément déduire de ce raisonnement que la valeur résultant de cette actualisation demeurera inférieure à la valeur nominale de la part. Autrement dit, l’indemnisation reçue ne suffit pas à rémunérer convenablement le risque encouru. De ce fait, même en cas de rémunération systématique de la part sociale, le plafonnement de cette rémunération en fait un placement à perte. Il n’est donc jamais intéressant d’investir dans une part sociale de coopérative même si celle-ci fait l’objet d’une rémunération.
41 Fort de ce constat, on pourrait conclure à l’irrationalité financière complète du statut de coopérateur. En effet, comment justifier l’acte d’investir dans une coopérative au vu de la valorisation dérisoire de la part sociale qui en résulte ?
42 En réalité, limiter l’évaluation financière de la coopérative à la part sociale ne prenant en compte que sa seule rémunération directe ignore le double statut du coopérateur. Comme nous l’avons mentionné précédemment, la ressource critique apportée par le coopérateur est rémunérée à des conditions préférentielles par rapport à celle d’une entreprise traditionnelle.
43 Ce différentiel constitue la création de valeur principale de la coopérative et doit faire l’objet d’une évaluation adéquate.
44 En reprenant l’exemple du tableau 2, et en supposant que la coopérative rémunère la ressource critique apportée par les fournisseurs pour un montant constant à chaque période, on peut concevoir une évaluation de la position critique (PC) du coopérateur en actualisant ce différentiel obtenu chaque année sur la durée de vie anticipée de détention de la part sociale :
PC = (1 +1r) + (1 +2r) 2 +… + (1 +nr) n
- D 1, D2… Dn représentent le différentiel de prix garanti par la coopérative aux années respectivement 1, 2 , … n ;
- r correspond au taux sans risque auquel on peut adjoindre une prime de risque.
46 Cette prime de risque peut être de nature sectorielle pour tenir compte de la variabilité possible du différentiel soumis aux variations des prix de marché ; elle peut être également de nature financière pour tenir compte d’un éventuel risque de défaillance de la coopérative (auquel cas, elle intégrera également une dimension sectorielle).
47 Supposons que le différentiel obtenu à chaque période soit de 20 (exemple du tableau 2) et que le taux sans risque soit de 2 % augmenté d’une prime de défaillance de 0,5 %, cela porterait la valorisation de la position critique au bout de dix ans à :
20 . = 175,04
0,025
48 Cette valeur doit venir s’additionner à la valeur de la part (voir supra) dont le montant est :
1,02510
49 La valeur de la coopérative (Vcoop) correspondra à la somme entre la valeur de la part (VP) ainsi calculée et la valeur de la position critique (PC) [11] :
= 468,72 + 175,04
= 643,76
50 La valeur actuelle nette de l’investissement du coopérateur devient alors positive puisque nous aurons : -600 + 643,76 = 43,76. La prise en compte de la valeur de la position critique rend donc l’opération économique du coopérateur rentable.
51 On pourrait aboutir à un résultat équivalent en repartant du résultat disponible pour le pourvoyeur de fond et en le corrigeant du différentiel, rémunération revenant au coopérateur. Ce résultat économique corrigé serait alors actualisé classiquement au coût du capital (coût moyen pondéré du capital en présence d’endettement). La valorisation ainsi obtenue devrait être équivalente à celle trouvée en additionnant la part sociale et la valeur de la position critique. Tout comme dans la théorie financière traditionnelle (Modigliani et Miller, 1958 et Miller et Modigliani, 1961), où les politiques de dividende et d’endettement n’influencent pas la valeur de l’entreprise dans le cadre de marchés parfaits, on note que la valeur de la coopérative est invariante au mode de partage de la valeur parmi les parties prenantes. En revanche, l’identification de la position critique permet de corriger une évaluation qui serait exclusivement fondée sur l’identification du résultat net ou du résultat économique classique.
52 Notre exemple chiffré montre que l’investissement initial dans une coopérative peut être viable économiquement parlant. En réalité, la rémunération directe perçue sur la part sociale apparaît comme accessoire. Détenir la part sociale d’une coopérative n’est certainement pas un acte financier au sens conventionnel du terme. Cela reste néanmoins un acte économique dont la valorisation financière de la position critique révèle la viabilité.
53 En pratique, l’évaluateur sera confronté à plusieurs difficultés qui constituent autant de défis à relever sur un plan théorique :
- la mesure du différentiel de rémunération obtenu par rapport à une situation compétitive est une étape fondamentale de l’évaluation [12]. Elle consiste à identifier la position critique du coopérateur par la ressource principale qu’il apporte ; c’est cette ressource qui obtient rémunération par ce différentiel. Cela suppose également la possibilité d’identifier les prix compétitifs et de les comparer aux prix de transfert internes ;
- la définition d’un taux d’actualisation adéquat : l’absence de liquidité de la part sociale et son mode limité de rémunération limitent sa portée financière ; en effet, la théorie classique du Medaf pour définir un taux de rentabilité exigé devient peu opérationnel pour ce type de structure ;
- la détermination de la durée de vie des flux peut poser un problème dans le cas où la coopérative change de statut (regroupement, transformation en société, etc.) ; dans ce dernier cas, le changement de statut implique une modification de la nature des flux de trésorerie consécutive à la disparition du double rôle du coopérateur ;
- l’impact du mode de gouvernance spécifique de la coopérative sur sa valeur : comme nous l’avons vu, le mode d’affectation de la richesse aux parties prenantes ne devrait pas influencer la valeur de la coopérative ; en revanche, cette gouvernance spécifique, de nature partenariale, peut aboutir à des décisions d’investissement et de financement dont la performance est à estimer au regard de l’environnement compétitif dans lequel évolue la coopérative. À cet égard, Charreaux et Desbrières (1998) élargissent la création de valeur de l’entreprise à l’ensemble des parties prenantes et concluent à la vision réductrice d’une création de valeur pour les seuls actionnaires, apporteurs du capital. Ils montrent également l’impact de différents modes de gouvernance sur la répartition de cette valeur parmi les parties prenantes. Dans le cas des coopératives, la problématique est davantage délimitée dans la mesure où le conflit d’agence trouve une résolution dans la prise du pouvoir par le détenteur de la ressource critique (le coopérateur). Dans ces conditions, le mode de gouvernance de la coopérative devrait être favorable à la création de valeur.
CONCLUSION
55 L’article présente une réflexion sur l’évaluation financière des coopératives. Ces organisations qui ont investi tous les secteurs de la vie économique sont soumises aux mêmes préoccupations que les entreprises traditionnelles de forme capitalistique. En effet, elles doivent investir, se financer, distribuer des revenus… Il est intéressant de voir que peu d’études en finance s’intéressent à ces formes d’organisation et encore moins à leur valorisation. L’argument de l’inaliénabilité des parts ne permet pas de justifier à lui tout seul ce désintérêt. L’article montre que ce prétexte n’interdit pas de procéder à une évaluation financière de la coopérative. Cette évaluation permet notamment d’identifier et de réconcilier sur un plan économique le double rôle du coopérateur à savoir celui d’investisseur et de membre apporteur de la ressource critique. Notre réflexion ouvre des perspectives à la fois sur les plans managérial et académique. D’un point de vue managérial, l’évaluation d’une coopérative permet d’envisager différemment les opérations financières auxquelles elle est confrontée. Par exemple, dans le cadre de regroupement (fusion-acquisition), les valeurs d’échange pourront être mieux définies par l’identification de la position critique de chacun, insuffisamment retranscrites par la seule prise en compte des valeurs comptables nettes. De la même façon, les ratios de structure financière s’en trouveront améliorés par rapport à une mesure exclusivement comptable des capitaux propres de la coopérative. La décision d’investissement devra être également appréciée eu égard à son impact sur la position critique des coopérateurs. La cession, la transmission, le changement de statut de la coopérative seront au total reconsidérés par cette vision élargie de sa valeur. Enfin, la position même de coopérateur se retrouve appréciée à sa juste valeur et retrouve un caractère attractif que la simple idéologie partenariale ne peut traduire.
56 Sur un plan académique, cette première tentative d’appréciation du prix d’une coopérative reste amplement préliminaire et ouvre des perspectives pour de futurs travaux plus approfondis. Ces travaux pourront notamment se concentrer sur trois aspects importants de l’évaluation à savoir la mesure des risques économique et financier afférent à la position de coopérateur, la mesure du taux de rentabilité requis par le coopérateur et l’identification de la position critique. On l’aura compris, au-delà de l’évaluation financière de la coopérative, c’est toute la finance de la coopérative qui est à créer.
Bibliographie
BIBLIOGRAPHIE
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Date de mise en ligne : 09/10/2014.
Notes
-
[1]
L’auteur remercie le soutien financier apporté par le Labex « Entreprendre », programme de recherche A2P3 « Gouvernance, stratégies de marché et performance durable ».
-
[2]
Source : Coop de France (www.coopdefrance.coop/fr/index.html).
-
[3]
Dans son édition du 3 mai 2012 (n° 299), le magasine Challenges rapporte une opération de rapprochement entre la coopérative Alma et la SSII Missler. Cette opération financière illustre les problématiques actuelles des coopératives modernes qui, tout en conservant leurs principes coopératifs, utilisent les possibilités offertes par l’environnement de l’économie de marché.
-
[4]
L’Alliance coopérative internationale, association fondée en 1895, distingue sept principes coopératifs : adhésion volontaire et ouverte à tous, pouvoir démocratique exercé par les membres, participation économique des membres, autonomie et indépendance, éducation formation et information, coopération entre les coopératives, et engagement envers la communauté.
-
[5]
Selon Zattoni (2011), les droits de propriété doivent être alloués aux apporteurs de la ressource (ou contribution) critique. La ressource est qualifiée de critique lorsque la valeur apportée par cette ressource peut être significativement différente de sa rémunération à l’apporteur.
-
[6]
À titre d’illustration, Allen et al. (2014) montrent que les entreprises orientées vers les parties prenantes sont mieux valorisées que les autres.
-
[7]
La cession des parts sociales est soumise à l’approbation soit de l’assemblée générale, soit des administrateurs ou gérants, dans les conditions fixées par les statuts (article 11, loi de 1947, modifié par la loi du 13 juillet 1992).
-
[8]
L’originalité de ces formes de coopérative tient surtout à l’achat par leur membre de droit à livrer une marchandise que la coopérative s’engage à acquérir à un prix fixé d’avance. Par un processus d’intégration verticale de la filière, la coopérative garantit un débouché quasi certain de ces marchandises.
-
[9]
La loi de modernisation des coopératives du 13 juillet 1992 autorise les coopératives à émettre différentes catégories de part sociale (voir François Espagne : « Le statut légal des coopératives ouvrières de production (Scop) en France ») :
- des parts ordinaires, comportant ou non le droit à un intérêt ;
- des parts à avantages particuliers (intérêt plus élevé que les parts ordinaires, remboursement prioritaire, imputation réduite en cas de pertes). Elles sont librement négociables entre associés mais les restrictions sur leur cession interdisent de les qualifier de valeurs mobilières ;
- des parts à intérêt prioritaire (à droit de vote suspendu), dont la souscription est réservée aux associés non usagers ou même à des tiers non associés, garantissant un intérêt statutaire prioritaire.
-
[10]
Il faut dire que les textes français à la différence de nombreux pays européens, en ne prévoyant pas de lois auto-suffisantes sur les coopératives, introduisent un certain flou juridique. Par exemple, les Scop doivent se constituer sous la forme de SA ou de SARL relevant du droit des sociétés appliqué au cas particulier des coopératives.
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[11]
Dans cet exemple simple, nous considérons une absence totale d’endettement. La présence d’endettement ne modifie pas le raisonnement.
-
[12]
Notre réflexion partage plusieurs points communs avec l’étude de Charreaux et Desbrières (1998) sur la valeur partenariale. Notamment, la difficulté d’évaluer la position critique n’est pas sans rappeler celle d’identifier des coûts et des prix explicites/implicites.