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Article de revue

Économie des conflits : histoire, méthodologie et enjeux de la recherche

Introduction

Pages 3 à 21

Notes

  • [1]
    La paternité du terme « arbitrage beurre-canon » en économie est attribuable à Samuelson [1948]. Voir Pietri [2017] pour une étude approfondie de ce mécanisme théorique.
  • [2]
    Pour un examen approfondi du modèle proposé par Haavelmo [1954], se référer à l’ouvrage de Vahabi [2004].
  • [3]
    Une jungle hobbesienne représente une situation dans laquelle des agents décident de l’allocation des biens en prenant en compte uniquement les relations de pouvoir qu’ils exercent les uns sur les autres.
  • [4]
    Les propriétés de cet équilibre sont intéressantes dans le sens où il s’agit d’un optimum de Pareto. Voir Crettez [2019] pour une analyse plus détaillée et plus générale d’un « jungle equilibrium ».
  • [5]
    Par exemple, le questionnement de Vahabi [2016] sur la valeur d’un bien approprié par la force (booty value) montre à quel point le conflit est dimensionnant pour la théorie de la valeur, et donc pour l’analyse économique en général.
  • [6]
    « Nous ne sommes ramenés au cas du pur conflit qu’à partir du moment où la guerre à outrance devient inévitable. En revanche, dès lors que la guerre peut être conduite de manière à minimiser les destructions, et s’il est possible de faire pression sur l’adversaire par une menace de recours aux armes non suivie d’exécution, la recherche d’un éventuel accord devient l’élément majeur du conflit. Les concepts de dissuasion, de guerre limitée, de désarmement et de négociation liés à l’existence d’intérêts communs aux adversaires reflètent leur dépendance mutuelle ».
    (Schelling [1960], pp. 17-18)

1Avant de s’imposer comme un champ d’investigation de l’analyse économique à part entière au début des années 1990, le conflit est longtemps resté un simple paramètre dans les modèles économiques. Cette introduction propose de revenir sur quelques travaux majeurs du 20ème siècle ayant permis l’émergence de l’analyse économique des conflits. Il convient d’emblée de préciser qu’il existe de nombreuses définitions d’un conflit. Par souci de clarté, nous utilisons celle proposée par Kimbrough et al. ([2017] p. 4) : un conflit est « une situation dans laquelle des agents choisissent des inputs i) qui sont coûteux en eux-mêmes, mais aussi d’un point de vue d’optimalité sociale, ii) dans la recherche d’intérêts privés décrits en termes de victoires et de défaites ».

L’émergence de l’économie des conflits

2La reconnaissance de l’importance du conflit dans l’histoire des idées s’est opérée de manière progressive. Au 19ème siècle, le conflit est compris comme un antagonisme entre individus ou groupes dans la société (ou entre sociétés), tel qu’une guerre armée, une grève, ou une révolution. Le plus souvent, la composition de ces groupes est supposée être exogène à l’économie. Pour la tradition marxiste, au contraire, l’appartenance au groupe provient de sa position dans le processus de production d’après la théorie de la lutte des classes. Chez Marx, il n’existe pas une théorie du conflit proprement dite, car elle s’insère dans une problématique plus générale appartenant au mode de production capitaliste. Au début du 20ème siècle, les auteurs se sont éloignés de cette tradition pour développer une vision « microéconomique » du conflit. Ainsi, Pareto [1909] estime que, d’un point de vue historique, « les efforts des hommes sont utilisés de deux manières différentes : ils sont dirigés vers la production ou la transformation de biens économiques, ou alors vers l’appropriation des biens produits par d’autres » (ibid., §17, p. 341).

3L’auteur esquisse donc un arbitrage « beurre-canons » dans lequel un agent économique dispose de ressources limitées pouvant être allouées soit à des activités productives (beurre), soit à des activités appropriatives (canons) [1]. Un demi-siècle plus tard, Haavelmo [1954] évoque à son tour l’importance d’intégrer les conflits dans l’analyse économique car « il y a d’autres moyens d’acquérir des biens et services que par la production et les échanges pacifiques. Il suffit de penser aux appropriations violentes et à l’exploitation » (ibid., p. 84) [2]. Négliger le rôle des conflits dans les transactions reviendrait alors à ne disposer que d’une image partielle de la réalité économique. On trouve chez Hardin [1968] une illustration de cette carence. Dans son article « The tragedy of the commons », l’auteur introduit l’existence de problèmes sans solutions techniques en considérant la recherche de la victoire au jeu du Morpion. S’il est impossible de gagner face à un joueur averti, Hardin propose une intrigante solution pour parvenir à la victoire : « Je peux frapper mon adversaire à la tête, ou le droguer » (ibid., p. 1243). Si cette stratégie est possible, elle peut avoir des conséquences importantes sur le long terme, comme l’impossibilité de trouver un partenaire de jeu. Malgré la légèreté de l’exemple choisi, Hardin souligne ici deux caractéristiques clés du conflit : il peut constituer une stratégie permettant d’atteindre ses objectifs, et peut avoir des conséquences importantes sur les relations (présentes et futures) entre deux individus. Il apparaît donc impératif de l’intégrer dans le champ de l’analyse économique.

4Pourtant, ce processus fut relativement long. Selon Carrier [1993], cela s’expliquerait par la domination des modèles d’équilibre général, dans lesquels des ajustements sans coûts entre les agents conduisent à des situations mutuellement avantageuses. Dans un tel monde, le recours au conflit est inutile. Le principal « coup de frein » à l’idée d’une analyse économique des conflits paraît donc venir du théorème de Coase [1960] : si les agents sont capables de résoudre tous leurs différends par des négociations pacifiques, le conflit semble ne pas être un objet d’étude économique. Paradoxalement, en supposant l’existence de droits de propriété parfaitement établis, Coase va ouvrir l’une des deux « brèches » nécessaires pour que le conflit soit étudié en tant que phénomène économique. Cette première « brèche » est thématique : l’article de Coase va inciter au développement de travaux nouveaux sur la nature des droits de propriété. Sous l’impulsion Demsetz [1964], Alchian [1965], ou encore Cheung [1969], les droits de propriété vont être définis comme la capacité, pour un individu, de profiter d’un actif. Le conflit, ou la menace du conflit, apparaissent dès lors comme un des moyens d’assurer l’exclusivité d’usage (Umbeck [1981]). Il est intéressant de noter que le conflit exerce un rôle crucial à tous les stades des droits de propriété : émergence, transfert et destruction. Tout d’abord, l’émergence des droits de propriété d’une jungle hobbesienne [3] passe nécessairement par l’interaction conflictuelle entre les individus (Barzel [1997], chap. 6). Par exemple, Piccione et Rubinstein [2007] étudient l’allocation initiale des biens entre des individus dans une jungle. Ils proposent le concept de « jungle equilibrium » défini comme une situation dans laquelle aucun individu ne souhaite s’emparer des actifs détenus par d’autres individus plus faibles [4]. En d’autres termes, en l’absence de toute autre institution, les interactions conflictuelles peuvent permettre l’apparition et l’allocation des droits de propriété. Ensuite, les conflits influencent fortement les droits de propriété (transactions involontaires). On peut ainsi évoquer l’utilisation de la menace (Boulding [1963]) ou du chantage (Coase [1988]) lors des transactions, les rackets mafieux (Gambetta [1993]) ou encore tous actes de prédation (Vahabi [2016]). Enfin, l’une des conséquences de l’utilisation effective de la force tient à son caractère destructif (extinction des droits de propriété). On pense bien entendu aux destructions directes résultant d’un conflit (Stiglitz et Bilmes [2008]), mais aussi aux destructions indirectes. En effet, Barzel [1997] estime que l’abolition de l’esclavage faisant suite à la fin de la guerre civile américaine a engendré une suppression des droits de propriété (incomplets) détenus par les propriétaires d’esclaves. Ainsi, le théorème de Coase, en suscitant un engouement intellectuel sur les droits de propriété a réintroduit le conflit comme un paramètre incontournable de l’analyse économique [5]. Mais le conflit ne demeure encore « qu’un » paramètre.

5La seconde brèche est d’ordre méthodologique et correspond aux développements de la théorie des jeux suite aux travaux de von Neumann et Morgenstern [1944]. L’analyse des stratégies mises en place par des joueurs ayant des intérêts potentiellement divergents permet d’appréhender le conflit comme une action, dont on peut analyser les fondements et les conséquences. Selon Carrier ([1993], p. 113), « l’épistémologie originale de la théorie des jeux rapproche la théorie économique de la notion de conflit sur un […] point fondamental : la reconnaissance mathématique explicite de la diversité irréductible des logiques d’action, et la pluralité des objectifs au sein d’un système économique ». Cette approche stratégique des conflits a été développée par Schelling ([1960], [1966]) dans un contexte de bras de fer URSS/États-Unis. Le contexte international n’est pas neutre car il va amener l’auteur à conceptualiser une situation conflictuelle comme des joueurs qui sont à la fois adversaires et partenaires dans un processus de négociation [6]. Les concepts centraux en découlant sont donc les bluffs, les menaces (plus ou moins crédibles), les engagements ou encore la dissuasion. S’il est encore trop tôt pour parler d’analyse économique des conflits, on en voit cependant la genèse, avec l’utilisation de la théorie des jeux comme outil d’analyse. Toujours dans les années 1960, Boulding [1962] développe un modèle spatial de rivalité entre pays dans le but d’expliquer les dépenses militaires offensives et défensives. L’auteur propose également d’expliquer, par son modèle, les innovations militaires, le développement de bases militaires ou encore le déploiement de forces de maintien de la paix. Ces recherches marquent un tournant majeur et inspirent notamment les premiers travaux économiques relatifs au phénomène de course à l’armement (e.g. Intriligator [1975], Intriligator et Brito [1986]). Mais ces travaux se cantonnent encore à l’analyse d’objets militaires en utilisant des outils de l’analyse économique. Il manque la reconnaissance et l’étude systématique du lien circulaire entre sphère économique et sphère conflictuelle. C’est en 1993, lors de la réunion annuelle de la Western Economic Association, qu’Hirshleiffer exprima de manière claire cette lacune : « selon le théorème de Coase, les individus ne manqueront pas une occasion de coopérer par le moyen d’échanges mutuellement avantageux. Ce qui peut être appelé le théorème de Machiavel dit que personne ne manquera l’opportunité de détenir un avantage unilatéral en exploitant un autre individu. […] L’analyse économique a fait du bon travail avec la voie proposée par Ronald Coase ; ce dont nous avons besoin maintenant, c’est une analyse aussi subtile et structurée du côté obscur : la voie de Nicolas Machiavel » (Hirshleifer [1994], p.3 et p.9).

Un point sur la recherche actuelle

6L’analyse économique des conflits comme sous-branche intégrale de l’économie a vu le jour début des années 1990 sous l’impulsion des très influents travaux de Grossman [1995], d’Hirshleifer [1995], ou encore de Skaperdas [1992], auteurs qui ont adopté et développé la fonction de répartition employée par Tullock [1980] dans ses travaux sur le « rent seeking », une fonction connue désormais sous le nom de « Tullock contest success function ». Dans la foulée de la contestation de l’école de Chicago défendant l’efficience des marchés et de l’essor des travaux sur les imperfections de marché dans les années 1980, l’économie des conflits est venue proposer une alternative à la vision répandue selon laquelle les droits de propriété sont parfaitement définis. Le modèle de base considère effectivement des agents économiques pouvant dévouer une partie de leur allocation à des fins conflictuelles, donc non productives, et ce dans un but de s’approprier la propriété d’autrui et/ou la propriété commune. À la lumière de ce nouveau paradigme, les chercheurs se sont attelés d’une part à mieux comprendre la technologie de conflit (e.g. Skaperdas [1995]), et d’autre part à étudier comment des théories jusque-là communément acceptées sont affectées par la dimension conflictuelle, à l’instar des théorèmes du bien-être (Piccione et Rubinstein [2007]), des gains d’efficacité du commerce international (Skaperdas et Syropoulos [2001]), ou encore des stratégies de coopération dans des jeux dynamiques (Sekeris [2014]).

7L’une des préoccupations premières fut de comprendre pourquoi des conflits coûteux ont lieu lorsque la même répartition des ressources pourrait être atteinte de manière pacifique, et donc sans endurer les coûts du conflit. Fearon [1995] proposa trois explications : l’asymétrie d’information, la non-divisibilité des ressources et les problèmes d’engagement. Dans un article fort influent, Powell [2006] développe un raisonnement convaincant pour conclure que toute cause des conflits peut au final être identifiée à un problème d’engagement. En effet, qu’il s’agisse d’un problème d’asymétrie d’information sur l’efficacité de combat de son adversaire, d’un problème de non-division d’un puits pétrolier, ou encore d’un problème d’engagement à ne pas s’armer en secret afin de surprendre son rival, des « contrats » permettant d’éviter les coûts du conflit sont envisageables. Ces « contrats » tenant compte de toutes les contingences souffrent néanmoins d’un problème d’engagement dans la mesure où leur non-respect n’implique aucune sanction d’un agent tiers assurant le respect des accords. Ainsi, le maintien de la paix peut être assuré, mais cela requiert l’existence d’une institution indépendante suffisamment puissante pour faire respecter ces contrats implicites.

8Les recherches empiriques se développent à la fin des années 1990, sous l’impulsion des travaux de Collier et Hoeffler [2004] qui développèrent les concepts de « greed and grievances » pour décrire les incitations des acteurs impliqués dans des conflits armés. Les conclusions de leurs études peuvent être résumées au fait que les incitations économiques jouent un rôle primordial au-delà des considérations non matérielles à l’instar des distinctions ethniques, religieuses ou idéologiques. Bien que les études de Collier et Hoeffler aient été fortement remises en cause (e.g. Bulte et Brunnschweiler [2009], Cotet et Tsui [2013]), elles constituent néanmoins l’impulsion d’une très riche littérature qui continue à être en plein essor à ce jour. Les enseignements des travaux empiriques sont principalement que deux facteurs clés influencent les incitations des agents économiques à participer à des activités violentes : l’effet de rapacité et le coût d’opportunité.

9Ces concepts sont théorisés par Dal Bo et Dal Bo [2004] qui suggèrent que si la valeur du bien appropriable augmente, ou bien si le coût d’opportunité du conflit (par exemple, des activités productives) diminue, les agents économiques seront plus incités à choisir une activité violente. La littérature empirique confirmant ces effets abonde réellement. Miguel et al. [2004] utilisent les précipitations pour instrumenter le revenu dans les pays d’Afrique sub-saharienne, et pour ainsi éviter les problèmes d’endogénéité des revenus et du conflit armé. Leurs résultats, confirmés par une pléthore de recherches postérieures (e.g. Hsiang et al. [2013], Harari et La Ferrara [2019]), confirment que des chocs négatifs sur l’activité génératrice de revenu (activités agricoles dans ce cas) augmentent la probabilité de conflit. Ces résultats s’inscrivent d’ailleurs dans la lignée des travaux démontrant un effet négatif du coût d’opportunité de l’activité violente sur le terrorisme (e.g. Krueger et Maleckova [2003]) ou la criminalité (Engelhardt et al. [2008]). L’effet de rapacité a également été établi de manière convaincante (Cotet et Tsui [2013]), avec des techniques économétriques avancées et des données micro de plus en plus fines (e.g. Berman et al. [2018]). Dans une étude portant sur la guerre civile colombienne, Dube et Vargas [2013] réussissent à établir ces deux effets avec une stratégie d’identification tenant compte des différences d’activité économique selon les différentes municipalités du pays.

10Une autre dimension importante concerne les inégalités. Bien qu’intuitivement un lien entre inégalité de revenu et conflit devrait être présent dans les données, les études empiriques régressant les coefficients de Gini sur le conflit ne sont pas unanimes. D’ailleurs, en utilisant une mesure appropriée de variance dans des caractéristiques non quantifiables telles la religion ou l’ethnicité (la mesure de fractionnalisation), Montalvo et Reynal-Querol [2005] confirment les résultats antérieurs de Collier et Hoeffler [2004] : ces concepts sembleraient ne pas être corrélés avec le conflit. Une grande avancée théorique en la matière est à imputer à Esteban et Ray [1994] qui développent le concept de polarisation. Les études empiriques vont démontrer l’importance de la polarisation ethnique et religieuse comme source de conflit (voir, par exemple, Montalvo et Reynal-Querol [2005]), et le concept de polarisation permettra à Esteban et al. [2012] de démontrer que différentes mesures de diversité ethnique expliquent le conflit armé selon le contexte étudié. Mais si les différences de revenus d’une part, et la diversité culturelle et ethnique, d’autre part, sont jusqu’alors étudiées séparément, Cederman et al. [2011] réalisent une étude superposant les divers groupes ethniques et leurs revenus, développant une mesure d’inégalité horizontale. Ces auteurs démontrent le rôle central occupé par l’inégalité horizontale dans le déclenchement des conflits.

11Les travaux récents de l’analyse économique des conflits proposent d’analyser des données de plus en plus « micro », en se concentrant de manière croissante sur le traitement de données géolocalisées. Avec les moyens technologiques disponibles, il est désormais possible d’exploiter des données satellitaires à des niveaux d’observation très fins (régions de 0,5° de latitude fois 0,5° de longitude) et de croiser ainsi toute sorte de données avec des incidents armés géolocalisés (e.g. bases de données Acled, UCDP, Speed). La stratégie d’identification étant désormais le point focal de l’écrasante majorité de travaux sur les conflits, les chercheurs conçoivent des stratégies poussées exploitant, par exemple, la constitution arbitraire des frontières sur le continent africain (Michalopoulos et Papaioannou [2016]). Ces études mettent par ailleurs en exergue le rôle central qu’occupent les institutions et la gouvernance locale dans la compréhension des conflits.

12En résumé, si l’analyse économique des conflits a initialement été portée par des travaux théoriques, elle a graduellement vu apparaître le développement massif d’une littérature empirique. Nous sommes désormais entrés dans l’ère de la Big Data en économie des conflits, où la capacité computationnelle de nos outils, en combinaison avec des données de plus en plus abondantes permettent d’identifier des effets très pointus et détaillés. Ces impressionnantes avancées tendent cependant à être dénuées dans une grande mesure de fondements théoriques, générant un risque de produire des résultats auxquels on attribuerait potentiellement une explication erronée. Un des grands enjeux de la discipline sera dès lors de réussir à renforcer les ponts entre les avancées empiriques et les explications théoriques sous-jacentes. Le rôle des institutions, par exemple, est souligné depuis les travaux de Hobbes [1651]. Notre compréhension en la matière à fort évolué, notamment grâce aux travaux d’Acemoglu [2003] ou de Besley et Persson [2010]. Néanmoins, ces avancées théoriques se concentrent principalement au niveau des institutions nationales, à l’heure où les travaux empiriques adoptent une approche plus microéconomique, souvent dépourvue de fondements théoriques. Il en est de même pour les questions de culture et de gouvernance, concepts insuffisamment étudiés à un niveau micro-économique. Ces questions demeurent donc un enjeu essentiel, questions auxquelles les économistes seront appelés à amener des réponses afin d’accompagner les percées empiriques.

Développements récents des modèles et études empiriques

13Compte tenu des enjeux actuels auxquels fait face l’économie des conflits, il semblait nécessaire de lui consacrer un numéro spécial de la Revue française d’économie. Les contributions réunies ici sont des versions remaniées d’une sélection d’articles présentés lors d’une journée d’étude en économie de la défense et économie des conflits tenue au Laboratoire d’économie d’Orléans en mars 2018.

14Le premier article de ce numéro est consacré à la résolution des conflits et, en particulier, au célèbre problème d’inconséquence temporelle. Une situation de conflit peut en effet naître de l’échec de négociations de paix lié à des problèmes d’engagement (commitment), tels que le développe Powell [2006]. L’intuition est la suivante. Si une nation A anticipe qu’elle disposera d’une plus grande force militaire demain, elle sera réticente à négocier un accord de paix aujourd’hui avec son adversaire B. Cet opposant, anticipant la stratégie de A, ne souhaitera pas, à son tour, s’investir dans une négociation, et préfèrera même mener une attaque préventive. Le résultat est alors un équilibre de guerre.

15Dans ce contexte, Antonis Adam et Petros G. Sekeris, dans « Guerre et paix : les vertus d’une séparation des pouvoirs décisionnels » proposent une idée nouvelle afin de faire émerger une situation de paix dans un problème d’engagement. Ils supposent que chaque belligérant est composé de deux décideurs : l’un chargé des investissements en armes (le Général), et l’autre des décisions relatives à l’utilisation des armements (le Roi). Le cas intéressant est celui d’une information imparfaite entre le Général, qui connaît la stratégie d’armement du pays, et le Roi, qui ne l’observe qu’avec une probabilité non nulle. Ainsi, le Roi, au moment de décider de la posture de sa nation face à une nation ennemie, ne connaît pas avec certitude la capacité militaire de son propre pays. Les auteurs démontrent une multiplicité d’équilibres : un équilibre de guerre coexiste avec un équilibre de paix dans lequel aucun Général n’investit en armement. Ce résultat est éclairant pour deux raisons. D’une part, d’un point de vue théorique, il est possible de restaurer la paix dans un cadre qui semblait, jusqu’à présent, ne générer que des équilibres conflictuels. D’autre part, d’un point de vue empirique, l’article montre que les chefs d’État ayant eu ou possédant toujours un rôle actif dans l’armée nationale tendent à être plus agressifs sur la scène internationale.

16Le principal message de cet article est que le degré d’information au sein des sphères politiques (entre chefs de l’exécutif, et responsables militaires) influence le maintien de la paix. Ainsi, l’analyse des problèmes de politique interne est une voie fructueuse dans la compréhension des conflits modernes. Dans les démocraties représentatives, une autre source de conflit est liée aux enjeux électoraux. Le célèbre syndrome du « ralliement sous le drapeau » (Mueller [1970]) en est un parfait exemple : en période électorale, les gouvernements peuvent être incités à déclencher des conflits armés pour souder la nation autour d’un ennemi commun, et ainsi obtenir des gains de popularité.

17À cet égard, Maxime Menuet et Patrick Villieu, dans « Faut-il détruire les ennemis de nos adversaires ? Besoin d’ennemis et réputation dans un conflit électoral » proposent un cadre théorique, basé sur un modèle de « préoccupations de carrière » (Holmström [1999]), où le décideur public peut avoir intérêt à maintenir une situation conflictuelle à des fins de réélection. L’idée est que la réputation de compétence d’un homme politique pour la résolution d’un problème (comme la destruction d’un ennemi) n’est utile que si le problème persiste. S’il détruit l’ennemi aujourd’hui, l’homme politique détruit le support sur lequel il pourra justifier de sa réputation demain. Il existe alors deux incitations contradictoires : une incitation à détruire l’ennemi pour être perçu comme plus compétent (c’est la réputation), et une autre à laisser vivre le problème (c’est le besoin d’ennemi). De cet arbitrage découle un équilibre politique dans lequel le problème persiste. Dans un cadre à plusieurs ennemis, les auteurs montrent que le gouvernement en place (le titulaire) résoudra les problèmes dans lesquels son opposant politique est perçu comme relativement le plus compétent. Autrement dit, le titulaire conserve ses propres ennemis et détruit ceux de son opposant.

18Ainsi, le cadre institutionnel dans lequel les décisions politiques sont prises peut-être à la source de situations de conflit (à cause de considérations électorales) ou de paix (grâce à l’asymétrie d’information au sommet du pouvoir). L’enjeu en termes de résolution de conflit est alors celui de la gouvernance intra-étatique, à travers notamment la création d’une « alliance militaire » entre nations. En Europe, la question se pose avec acuité depuis les dernières attaques terroristes : la menace est collective alors que la réponse militaire est le plus souvent individuelle. Josselin Droff et Julien Malizard, dans « Qui porte le fardeau ? Les coûts de la production de défense dans l’Union européenne » se demandent si l’Union européenne (UE) forme une alliance militaire optimale, dans le sens où le fardeau de la sécurité serait équitablement partagé entre ses membres.

19En s’appuyant sur une base de données de l’Agence européenne de défense pour la période 2005-2014, les auteurs montrent que l’UE se comporte comme une alliance pour les dimensions « opérationnelles » (le personnel mobilisable ou les troupes déployées), mais pas sur les dimensions « capacitaires » (le budget militaire, la R&D, ou l’équipement). Plus précisément, l’UE est caractérisée par une forte hétérogénéité : certains pays contribuent de manière excessive (par rapport à une situation optimale) à l’effort collectif de sécurité, comme l’Allemagne, la Belgique, la France, la Grèce, l’Italie, les Pays-Bas et le Royaume-Uni, alors que d’autres apparaissent comme des passagers clandestins (la Suède, la Finlande ou l’Espagne, entre autres). Enfin, les auteurs montrent que la crise économique de 2009, à travers les choix budgétaires des différents pays, a eu pour effet d’éloigner l’UE d’une zone d’alliance optimale (le fardeau est davantage supporté par un nombre plus petit de pays).

20Au-delà d’une gouvernance intra-étatique, des modes de désignation des dirigeants ou des problèmes informationnels, le rôle des institutions dans l’émergence et la gestion des conflits s’illustre également dans les guerres civiles, qui touchent principalement les pays en développement. Les chiffres sont édifiants : 80 % des pays les moins avancés ont connu un conflit armé au cours des quinze dernières années (Collier et Hoeffler [2002]). La Banque mondiale estimait même, en 2011, qu’une personne sur quatre (soit 1,5 milliard d’individus) vivait dans un pays affecté par des violences armées. D’un point de vue empirique, la recherche actuelle s’oriente vers l’utilisation de données désagrégées afin d’étudier les conflits à l’échelle des régions, des villes ou des cellules géographiques. Camille Laville, dans « Les causes des conflits civils : avancées récentes à l’aide de données désagrégées » propose une revue de cette littérature. L’intérêt des données désagrégées est de permettre d’affiner les études économétriques : les variables omises et l’hétérogénéité inobservée peuvent être désormais prises en compte. Dans cette contribution, l’auteure montre combien les guerres civiles ont des origines complexes - les ressources naturelles, la pauvreté, le commerce, la cohésion sociale… sont autant de facteurs susceptibles d’affecter les risques de conflit. De nombreuses idées reçues peuvent être également battues en brèche. Par exemple, ce n’est pas la présence de ressources naturelles (comme des gisements de diamants), mais leur exploitation qui influence l’apparition de guerres civiles ; ou encore, la relation entre cohésion sociale et risque de conflit est non monotone. Finalement, en affinant l’échelle de l’analyse, il est possible de distinguer les mécanismes compétiteurs et de s’approcher de la réalité locale. Cette évolution dessine des perspectives de recherche prometteuses sur les conflits dans les zones en développement.

21À ce titre, dans le dernier article de ce numéro spécial intitulé « La piraterie maritime : faits stylisés et mécanismes économiques », José De Sousa et Marion Mercier abordent une dimension importante des conflits dans les pays en développement, la piraterie maritime. La contribution propose un diaporama très large du phénomène (entre 1995 et 2017). Sur le plan descriptif, les zones les plus sensibles à la piraterie sont les eaux bordant l’Indonésie, la Malaisie et les Philippines d’une part, et celles bordant le Nigéria d’autre part. Sur le plan macroéconomique, deux causes majeures semblent affecter le niveau de piraterie : la faiblesse de l’État, et la géographie côtière, alors que l’augmentation du coût de transport et la baisse du commerce international représentent les principales conséquences. Ainsi, les pertes pour l’industrie du transport maritime dues à la piraterie en 2010 sont évaluées entre 0,9 et 3,3 milliards de dollars. Sur le plan microéconomique, la principale explication à la piraterie réside dans le manque d’opportunité de revenu sur les marchés locaux du travail (en particulier, de la pêche). Ainsi, la piraterie, loin d’être un phénomène confiné à quelques zones côtières des pays en développement, semble être une situation de conflit très répandue, dont la compréhension nécessite de mobiliser l’ensemble des outils de l’analyse économique.

22Les articles présentés ici n’ont pas la prétention de fournir un panorama complet des développements récents en économie des conflits. Nous souhaitons simplement que ce numéro spécial puisse persuader le lecteur que ce champ de l’analyse constitue une contribution importante à la théorie économique à la fois microéconomique et macroéconomique, et qu’elle offre des perspectives intéressantes pour l’avenir en matière d’économie appliquée.

Bibliographie

Références

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Notes

  • [1]
    La paternité du terme « arbitrage beurre-canon » en économie est attribuable à Samuelson [1948]. Voir Pietri [2017] pour une étude approfondie de ce mécanisme théorique.
  • [2]
    Pour un examen approfondi du modèle proposé par Haavelmo [1954], se référer à l’ouvrage de Vahabi [2004].
  • [3]
    Une jungle hobbesienne représente une situation dans laquelle des agents décident de l’allocation des biens en prenant en compte uniquement les relations de pouvoir qu’ils exercent les uns sur les autres.
  • [4]
    Les propriétés de cet équilibre sont intéressantes dans le sens où il s’agit d’un optimum de Pareto. Voir Crettez [2019] pour une analyse plus détaillée et plus générale d’un « jungle equilibrium ».
  • [5]
    Par exemple, le questionnement de Vahabi [2016] sur la valeur d’un bien approprié par la force (booty value) montre à quel point le conflit est dimensionnant pour la théorie de la valeur, et donc pour l’analyse économique en général.
  • [6]
    « Nous ne sommes ramenés au cas du pur conflit qu’à partir du moment où la guerre à outrance devient inévitable. En revanche, dès lors que la guerre peut être conduite de manière à minimiser les destructions, et s’il est possible de faire pression sur l’adversaire par une menace de recours aux armes non suivie d’exécution, la recherche d’un éventuel accord devient l’élément majeur du conflit. Les concepts de dissuasion, de guerre limitée, de désarmement et de négociation liés à l’existence d’intérêts communs aux adversaires reflètent leur dépendance mutuelle ».
    (Schelling [1960], pp. 17-18)
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