Notes
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[1]
La fédération hospitalière publique de France (FHF) s’est notamment inquiétée de la suppression de la journée de carence par la publication en septembre 2012 d’une note estimant que cette journée permettait de réaliser une économie de 65 à 70 millions d’euros pour les établissements. Cependant, aucune étude n’a pour le moment permis d’établir clairement un lien de causalité entre les évolutions de l’absentéisme et la journée de carence, comme l’a soulevé la Cour des comptes [2014].
-
[2]
Il n’est cependant pas possible, à partir de ces données, de distinguer la fréquence des arrêts de leur durée.
-
[3]
La question des disparités entre établissements n’a pas été traitée car les informations concernant les établissements ne sont disponibles que pour 60 % des salariés.
-
[4]
Elle consiste à modéliser le log de la moyenne μ comme une fonction linéaire : log(μ) = β1Pi + β2Xʹi + ε. Le calcul de la variance intègre un paramètre de surdispersion α : Var(y | Pi, Xi) = μ + αμ2).
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[5]
Ce type de « Hurdle model » est particulièrement adapté à la modélisation des variables de comptage en économie de la santé lorsque les « zéros » résultent vraisemblablement d’un processus différent de celui conduisant aux valeurs positives (par exemple le fait d’avoir eu un arrêt maladie dépend de la décision de consulter un médecin, et la durée des arrêts dépend largement de l’appréciation du médecin). Notons qu’il ne nécessite pas pour autant de variables d’exclusion (Deb et al. [2013]).
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[6]
Les sources administratives font état de durées d’arrêt plus élevées que les durées recueillies par l’enquête Conditions de travail. Ceci pourrait s’expliquer par une sous-représentation des salariés en arrêts de très longue durée dans les enquêtes (les salariés en congé maladie depuis plus d’un an au moment de l’enquête ne sont pas interrogés, et les taux de non-réponse des salariés en arrêt de longue durée pouvant être plus élevés) et par des biais déclaratifs (biais de mémoire, biais de désirabilité sociale). Cependant, les écarts entre les deux secteurs sont faibles y compris sur les données administratives les plus comparables. Elles répertorient 15,7 jours d’arrêts maladie par an (congés maladie ordinaire et congés de longue durée) parmi les personnels des établissements de santé publics (bilans sociaux des établissements publics de santé à la fin 2012, ATIH [2014]). À titre de comparaison, les salariés du secteur des activités hospitalières privées ont 14 jours d’arrêt maladie ayant donné lieu à des indemnités journalières de l’assurance maladie en moyenne (hors arrêts de moins de 3 jours exposés au délai de carence) (échantillon ygie[2011], calculs Drees). Ces deux sources administratives ne sont cependant pas strictement comparables en termes de champ et de types d’arrêts répertoriés.
-
[7]
Ce résultat est robuste à d’autres modélisations (MCO, modèle binomial négatif à inflations de zéros). On n’observe pas non plus de différence significative de recours à des arrêts plus longs dans un secteur que dans un autre, que ce soit en statistiques descriptives ou en modélisant l’effet du secteur sur des tranches de durées d’arrêt.
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[8]
Sous la spécification alternative (Zinb) on obtient le même résultat, à l’exception des professions administratives, qui apparaissent à la fois plus susceptibles de présenter des excès de zéros (présentéisme) et d’avoir davantage d’arrêts maladie après prise en compte des différences de conditions de travail.
1L’absentéisme à l’hôpital fait régulièrement l’objet d’une forte attention dans les débats publics. Le secteur hospitalier apparaît en effet plus exposé aux absences pour raison de santé avec des taux d’absence plus importants dans la fonction publique hospitalière que dans la fonction publique d’État ou dans le secteur privé (DGAFP [2014]), principalement en raison d’arrêts de plus longue durée dans le secteur hospitalier (DGAFP [2015]). Au total, le secteur de la santé humaine et de l’action sociale semble le plus touché par les absences pour raison de santé (Inan [2013]).
2Or, l’absence temporaire du personnel hospitalier peut avoir un impact sur la continuité des soins, la charge et l’organisation du travail, surtout dans le contexte de recherche de gain de productivité. L’introduction d’une journée de carence pour les congés maladie ordinaires dans la fonction publique en 2012, supprimée par la loi de finances pour 2014, a donné lieu à un débat particulièrement vif dans le secteur hospitalier [1]. Dans ce contexte, une meilleure compréhension des comportements de recours aux arrêts maladie peut contribuer à identifier les marges de régulation possibles des arrêts de travail dans le secteur hospitalier : celles-ci relèvent-elles davantage des conditions de travail ou des conditions d’indemnisation ? Si de nombreux travaux, y compris spécifiques à des professions hospitalières (les infirmiers en particulier), ont établi que les conditions de travail sont un déterminant important du recours aux arrêts maladie, il reste difficile de savoir si elles suffisent à expliquer les importantes disparités d’absences au sein du personnel. Le secteur hospitalier est particulièrement intéressant à cet égard, non seulement du fait de sa sinistralité importante, mais également parce qu’il offre un exemple permettant de comparer le recours aux arrêts maladie entre secteurs public et privé pour des personnes exerçant des activités similaires.
3L’objet de cet article est d’analyser les disparités de recours aux arrêts de travail constatées à l’hôpital et de comprendre dans quelle mesure les conditions de travail contribuent à expliquer les différences constatées entre les secteurs public et privé, entre les professions et entre les hommes et les femmes. Il mobilise des données d’enquête permettant de rendre compte finement des contraintes auxquelles font face les personnels hospitaliers (enquête Conditions de travail 2013), et donc d’identifier les aspects de la pénibilité qui contribuent le plus aux différences d’arrêts maladie entre ces groupes. Les résultats indiquent l’absence de différence significative de sinistralité entre les secteurs public et privé, y compris à structure de main-d’œuvre et conditions de travail similaires. Les écarts importants d’arrêts maladie constatés entre professions semblent pouvoir s’expliquer intégralement par des différences de conditions de travail, en premier lieu par des différences d’exposition aux contraintes physiques. Les contraintes psycho-sociales, et les exigences émotionnelles en particulier, apparaissent comme des déterminants importants de recours aux arrêts maladie. Si les femmes ont davantage d’arrêts maladie que les hommes, ces différences ne sont plus observées en dehors de l’âge des grossesses.
Revue de littérature
4La littérature théorique standard en économie suppose que la propension à l’absentéisme dépend directement du coût d’opportunité des absences et du risque de sanctions (Allen [1981], Shapiro et Stiglitz [1984]). Ces modèles théoriques prédisent une réduction du taux d’absence lorsque le taux de remplacement de l’indemnisation diminue, ce qui peut justifier l’introduction d’incitations monétaires pour réduire l’absentéisme. Pour prendre en compte le fait que les arrêts de travail ne relèvent pas que d’un choix, le cadre de Shapiro et Stiglitz a été complété par l’introduction de l’état de santé dans la fonction d’utilité (Brown et Sessions [1996]). Il a par la suite été enrichi par l’introduction explicite des conditions de travail afin de mieux distinguer les absences volontaires et involontaires (Ose [2005]). Ceci conduit à prédire un absentéisme plus élevé lorsque les conditions de travail sont mauvaises ; et ce, d’autant plus qu’elles sont insuffisamment compensées par le salaire. D’autres travaux considèrent enfin que les conditions de travail participent d’un choix d’investissement en capital santé et qu’elles peuvent impacter l’absentéisme par le biais de leur effet sur l’état de santé, à l’instar du travail en horaire irréguliers (Afsa et Givord [2014]). Une très vaste littérature empirique sur les déterminants de l’absentéisme s’est ainsi attachée à mesurer l’effet de la générosité de l’indemnisation (De Paola et al. [2014]) ou encore des conditions de travail (Afsa et Givord [2014]), certains s’étant attachés à mesurer l’importance relative de ces deux facteurs (Grignon et Renaud [2007]).
5Au sein de la littérature internationale sur les comportements d’absentéisme, le secteur hospitalier est un de ceux qui ont le plus été étudiés isolément. La plupart de ces travaux se sont portés sur les groupes professionnels particulièrement exposés aux arrêts de travail, et en premier lieu celui des infirmiers. Les pénibilités auxquelles ils sont confrontés sembleraient jouer un rôle important dans leur recours aux arrêts de travail. Parmi les principaux déterminants possibles de l’absentéisme identifiés dans la littérature par Davey et al. [2009], les résultats empiriques appuient surtout l’effet des attitudes au travail (la satisfaction au travail, l’engagement), des facteurs de rétention, des situations de burn-out et de stress, sur l’absentéisme des infirmiers. Par ailleurs, ce ne sont pas seulement les conditions de travail propres au métier, mais également des pénibilités spécifiques au travail au milieu hospitalier qui contribueraient à ce niveau d’absentéisme plus élevé (Rajbhandary et Basu 2010]). D’autres études montrent que certaines conditions de travail moins répandues, mais touchant tous types de personnels hospitaliers - à l’instar du harcèlement - ont des conséquences fortes sur l’absentéisme (Kivimäkia et al. [2000]).
6En France, peu de travaux ont mis en lien l’absentéisme et les conditions de travail du personnel hospitalier, en dehors de quelques études qualitatives (par exemple Dumond [2009]). Un rapport récent de la DGAFP [2015] souligne qu’en prenant en compte que les agents de la fonction publique hospitalière sont fortement exposés à des conditions de travail difficiles, ils n’ont pas de probabilité plus élevée d’avoir une absence pour raison de santé que les salariés du privé. Les travaux français centrés sur le milieu hospitalier ont surtout mis en avant les conditions de travail difficiles dans les établissements de santé, à la fois par l’exposition à des contraintes physiques (exposition à des produits dangereux, charge de travail élevée, etc.) et aux contraintes psycho-sociales (tensions avec le public, confrontation à la souffrance des patients, etc.), (Loquet et Ricroch [2014]) par le travail de nuit et les horaires décalés (Cordier [2009]). Ces travaux ont également mis en évidence qu’il y a peu de différences de conditions de travail selon le statut public ou privé (à but lucratif ou non lucratif) des établissements (Loquet et Ricroch [2014]). Néanmoins l’hôpital public se caractérise par davantage de nuisances environnementales, d’exposition aux agressions verbales, et un sentiment de fierté du travail bien fait moins souvent partagé que dans les établissements privés ; a contrario, les agents du public déclarent plus fréquemment que leur travail permet de développer leurs compétences. Les principales différences de conditions de travail dans les établissements de santé se situent entre les familles professionnelles, avec des métiers particulièrement exposés aux risques psycho-sociaux, à l’instar des personnels de soins comme les infirmiers.
7La prise en charge des arrêts maladie varie également entre les établissements et selon le statut des personnels. Ainsi, les conventions collectives de branche des hôpitaux et cliniques privés prévoient le versement d’indemnités complémentaires garantissant un taux de remplacement complet du salaire net en cas d’arrêt maladie. Les personnels de la fonction publique bénéficient également du maintien de salaire en cas de congé maladie ordinaire. Cependant, cette garantie s’applique après des délais de carence différents selon les personnels : une journée pour l’ensemble de la fonction publique (en vigueur à partir du 1er janvier 2012 et supprimée par la loi de finances pour 2014), aucun délai de carence pour les salariés cadres du privé à but lucratif (convention collective nationale de l’hospitalisation privée du 18 avril 2002, article 84.1), délai de carence de l’assurance maladie (trois jours) pour les non-cadres du privé à but lucratif et les salariés du privé à but non lucratif (convention collective nationale des établissements privés d’hospitalisation du 31 octobre 1951, article 13.01.2) sauf disposition plus généreuse de l’établissement employeur. Plusieurs travaux suggèrent que l’exposition à un délai de carence augmente la durée totale des arrêts maladie (Petterson-Lidbom et Skogman Thoursie [2013], Pollak [2017]), mais on ne dispose pas encore d’évaluation de l’effet des délais de carence dans les secteurs public et/ ou hospitalier.
8Malgré le développement de la littérature sur ce sujet, l’absentéisme des personnels hospitaliers apparaît encore relativement mal appréhendé, y compris sur le seul champ des professions ayant été les plus étudiées. Si les travaux internationaux relèvent pour l’essentiel une corrélation entre conditions de travail et recours aux arrêts maladie, on manque encore d’éléments empiriques permettant de savoir dans quelle mesure les conditions de travail spécifiques au secteur hospitalier expliquent les comportements d’absence pour raison de santé de son personnel. Certains travaux suggèrent que l’absentéisme serait structurellement plus élevé dans le secteur public (Vandenheuvel [1994]), ce qui pourrait justifier des modes de régulation spécifiques. L’identification des raisons des disparités d’arrêts de travail est alors centrale ; sont-elles dues à des différences de conditions de travail, des différences de structure de la main-d’œuvre, ou des spécificités propres à chaque secteur (indemnisation, protection de l’emploi, motivations intrinsèques du personnel, culture et normes…) ? Il s’agit donc de comparer le recours aux arrêts de travail dans les hôpitaux publics et les cliniques privées à structure du personnel et conditions de travail identiques. D’autre part, les différences importantes d’arrêts maladie parmi les personnels hospitaliers, en particulier entre professions et entre hommes et femmes, appellent à en comprendre les causes afin d’identifier les leviers susceptibles d’agir sur leur absentéisme. S’il est établi que les conditions de travail ont un impact sur l’absentéisme, il s’agit de savoir si elles suffisent à expliquer les différences de comportement observées, et d’identifier lesquelles sont source d’un risque accru d’absences pour maladie.
Méthode
Données et échantillon
9L’analyse mobilise l’édition 2013 de l’enquête Conditions de travail. Cette enquête, réalisée tous les sept ans depuis 1978 par la Darès, constitue une source privilégiée pour étudier les arrêts de travail dans les établissements de santé pour plusieurs raisons.
10Le questionnaire contient des items sur les absences en distinguant les arrêts maladie d’autres arrêts pour raison de santé (maternité et accidents du travail) et des congés (droits et recours). Les arrêts maladie sont renseignés par les salariés enquêtés à partir des questions : « Au cours des douze derniers mois, combien avez-vous eu d’arrêts maladie (hors maternité) ? » puis, sauf en cas de réponse nulle : « A combien de jours d’absence ces arrêts maladie correspondent-ils ? ». Cette seconde question permet de disposer de la durée totale (en jours) des arrêts maladie pris au cours des douze derniers mois [2].
11En outre, l’enquête recueille des informations très détaillées sur les conditions de travail et les risques psychosociaux auprès des salariés. L’édition 2013 intègre pour la première fois une surreprésentation des trois versants de la fonction publique et du secteur hospitalier (public et privé). On dispose d’un échantillon de 4 189 salariés exerçant dans le secteur hospitalier, dont 2 779 dans des hôpitaux publics et 1 410 dans des établissements privés (à but lucratif ou non lucratif) (voir tableau n°1). Ce sur-échantillon permet de comparer les conditions de travail du personnel hospitalier privé et public à celles des autres secteurs d’activité [3]. Pour analyser les différences entre professionnels de santé, la décomposition par famille professionnelle élaborée par la Darès permet de former des sous-échantillons de taille assez importante pour exhiber des proportions significatives (Loquet et Ricroch [2014]).
Description de l’échantillon
Description de l’échantillon
12Les structures de personnel diffèrent selon le statut juridique : il y a plus de femmes dans les établissements privés à but lucratif et plus de personnes âgées de 50 ans ou plus dans l’ensemble du secteur privé. On note également moins de médecins et assimilés dans les établissements privés à but lucratif, puisqu’une partie des médecins qui travaillent dans les établissements privés sont libéraux et ne font donc pas partie de l’échantillonnage sur les salariés des établissements de santé. Cette petite distorsion se répercute sur les proportions des autres familles professionnelles, notamment par la présence de plus d’infirmiers/sages-femmes dans l’échantillon des personnels hospitaliers du privé lucratif.
Construction d’indices de conditions de travail
13L’enquête Conditions de travail est extrêmement riche en questions permettant de décrire les conditions de travail et les risques psycho-sociaux. Par exemple, une trentaine de questions permettent d’appréhender les rapports sociaux (avoir l’impression de faire partie d’une équipe, avoir un supérieur qui aide à mener ses tâches à bien, être ridiculisé en public, etc.). La diversité des approches de conditions de travail et la multitude des variables disponibles ont amené à créer des indices synthétiques mesurant la dégradation d’un aspect de conditions de travail ou un risque psycho-social. Le choix des axes de conditions de travail s’est fait en reprenant les conclusions des experts de l’enquête Conditions de travail (Davie [2015]). Ils ont ainsi mis en avant neuf dimensions des conditions de travail ; intensité, exigences émotionnelles, manque d’autonomie, rapports sociaux, conflits de valeurs, insécurité, manque de reconnaissance, contraintes physiques, contraintes horaires. Pour chacune de ces dimensions, une liste de variables a été établie (cf en annexe). Il a donc été réalisé une analyse en correspondances multiples à partir de ces variables et il a été conservé le premier axe comme indicateur de la dimension étudiée. Le personnel hospitalier « moyen » étant au centre du repère, la moyenne de ces indicateurs pour chaque dimension de travail est nulle. Plus la valeur de l’indicateur est élevée, plus les conditions de travail sont dégradées. Lorsque la moyenne d’un regroupement de personnel hospitalier prend une valeur négative, ce sous-ensemble présente des conditions de travail moins dégradées que l’ensemble des personnels hospitaliers.
14Ces indicateurs permettent de retrouver les résultats de la littérature (Loquet et Ricroch [2014]) : les dimensions les plus clivantes au sein des familles professionnelles sont les exigences émotionnelles (qui opposent les métiers du soin aux autres métiers), les contraintes physiques (peu développées chez les professions administratives) et les contraintes horaires (qui opposent les professions soumises à la continuité des soins aux autres professions) (voir tableau n° 2). Les infirmiers et sages-femmes puis les aides-soignants sont les plus exposés dans l’ensemble à des conditions de travail dégradées, tandis que les professions administratives connaissent moins souvent des difficultés. Les indicateurs des risques psycho-sociaux diffèrent peu entre les établissements hospitaliers public et privé (tableau n°3). La différence de conditions de travail entre les deux catégories d’établissements hospitaliers porte sur les contraintes horaires, plus importantes dans les établissements publics (Cordier [2009]).
Conditions de travail par famille professionnelle
Conditions de travail par famille professionnelle
Note : les indicateurs synthétisent la position sur le premier axe de l’ACM de chaque famille de conditions de travail. Plus ils sont élevés, plus les conditions de travail sont dégradées.L’indicateur d’intensité varie dans l’intervalle [-2,9 ; 3,1], celui des exigences émotionnelles dans l’intervalle [-3 ; 2,1], celui du manque d’autonomie dans l’intervalle [-2,1 ; 4,8], celui des rapports sociaux dans l’intervalle [-1,3 ; 2,3], celui des conflits de valeurs dans l’intervalle [-1,8 ; 3,5], celui de l’insécurité dans l’intervalle [-1,3 ; 2,3], celui du manque de reconnaissance dans l’intervalle [-2,6 ; 3,2], celui des contraintes physiques dans l’intervalle [-2,1 ; 1,7] et celui des contraintes horaires dans l’intervalle [-1,9 ; 2,4].
Description des conditions de travail selon le statut juridique de l’établissement au sein de l’échantillon
Description des conditions de travail selon le statut juridique de l’établissement au sein de l’échantillon
Note : les indicateurs synthétisent la position sur le premier axe de l’ACM de chaque famille de conditions de travail. Plus ils sont élevés, plus les conditions de travail sont dégradées.L’indicateur d’intensité varie dans l’intervalle [-2,9 ; 3,1], celui des exigences émotionnelles dans l’intervalle [-3 ; 2,1], celui du manque d’autonomie dans l’intervalle [-2,1 ; 4,8], celui des rapports sociaux dans l’intervalle [-1,3 ; 2,3], celui des conflits de valeurs dans l’intervalle [-1,8 ; 3,5], celui de l’insécurité dans l’intervalle [-1,3 ; 2,3], celui du manque de reconnaissance dans l’intervalle [-2,6 ; 3,2], celui des contraintes physiques dans l’intervalle [-2,1 ; 1,7] et celui des contraintes horaires dans l’intervalle [-1,9 ; 2,4].
Stratégie empirique
15Dans la lignée de la littérature théorique des déterminants de l’absentéisme, qui conduit à distinguer les absences dues à l’état de santé (aussi dites justifiées) des absences dues à l’aléa moral (dites injustifiées), l’estimation vise à distinguer ces deux effets dans le recours aux arrêts maladie à l’hôpital. Nous nous intéressons plus particulièrement à l’effet des conditions de travail qui, dans la lignée d’Afsa et Givord [2014], peuvent impacter les arrêts maladie par le biais du manque de compensation salariale, de leur impact et du taux de détérioration de l’état de santé de la main-d’œuvre (ceux-ci étant eux-mêmes déterminés par un ensemble de facteurs tels que le sexe, le niveau d’éducation ou les comportements d’investissement en capital santé). Nous faisons par ailleurs l’hypothèse qu’en dehors des différences de conditions de travail et de structure de la main-d’œuvre, des différences de recours aux arrêts maladie entre secteurs public et privé relèveraient de comportements d’aléa moral (du fait de différences d’indemnisation, de normes, ou de motivations), qu’il s’agisse d’aléa moral ex ante (décision ou non de recourir à des arrêts maladie) ou ex post (durée des arrêts).
16Les déterminants des comportements d’absence sont ainsi estimés par le modèle suivant :
18où Y*i est la variable latente associée à l’absentéisme, avec Yi une variable de comptage reflétant la durée totale en nombre de jours des arrêts pour maladie (hors maternité) au cours des douze derniers mois [0-365]. Cette durée est modélisée par une fonction négative binomiale qui permet de proposer des estimations plus robustes que le modèle de Poisson étant donné la sur-dispersion de la variable expliquée (variance supérieure à la moyenne) [4].
19Par ailleurs, le choix du modèle nécessite de tenir compte de l’excès de zéros dans la distribution de la variable expliquée. Nous privilégions un modèle binomial négatif qui estime l’effet des variables explicatives sur la durée totale d’arrêt (zéros compris) au cours des douze derniers mois (M1), qui conduit à faire l’hypothèse que les valeurs nulles et positives ne résultent pas d’un processus différent. En d’autres termes, les déterminants entre n’avoir aucun arrêt et avoir un arrêt d’un jour sont les mêmes que ceux qui conduisent à avoir un ou deux jours d’arrêt (cette durée dépendant principalement du niveau de gravité de la pathologie). Afin de vérifier si les résultats sont sensibles à cette hypothèse, nous testons deux modèles alternatifs. L’un consiste à faire l’hypothèse que les valeurs nulles et les valeurs positives résultent de deux processus différents (Hurdle model), par exemple si le fait d’avoir un arrêt résulte surtout de la décision du salarié de consulter son médecin, alors que la durée de l’arrêt est principalement déterminée par la prescription du médecin. On estime la fonction binomiale négative uniquement pour les salariés ayant eu au moins un arrêt maladie dans l’année avec une densité de comptage tronquée (lorsque Yi > 0) (M3), après avoir estimé la probabilité d’avoir eu au moins un arrêt dans l’année par une fonction probit (M2) [5]. L’autre modèle consiste à faire l’hypothèse qu’il existe une sélection inobservée sur les valeurs nulles et à considérer que les zéros peuvent être générés par deux processus distincts : une partie étant ceux des salariés n’étant jamais malades et une autre ceux des salariés malades mais n’ayant jamais d’arrêt maladie. Cette seconde catégorie s’apparenterait à du présentéisme. Les données suggèrent néanmoins que le présentéisme n’est pas concentré au sein des valeurs nulles ; au contraire, les salariés déclarant être allés travailler tout en pensant qu’ils auraient dû rester à la maison car ils étaient malades sont beaucoup plus nombreux à avoir également eu des arrêts maladie dans l’année. Dans un premier temps, on s’intéresse à l’effet de travailler dans le secteur public ou privé (lucratif et non lucratif) (P) en contrôlant par un vecteur de variables X capturant les différences de composition de la main-d’œuvre : âge, sexe, et famille professionnelle ; et un vecteur H de variables d’état de santé : état de santé perçu (= 1 lorsque l’état de santé général est perçu comme n’étant ni bon ni très bon), limitations (= 1 lorsque le salarié est limité, depuis au moins six mois, à cause d’un problème de santé dans les activités que font les gens habituellement), maladie chronique (= 1 lorsque le salarié a une maladie ou un problème de santé chronique ou de caractère durable), reconnaissance d’un handicap (= 1 lorsque le salarié a une reconnaissance administrative d’un handicap ou de perte d’autonomie (ou reconnaissance en cours), score de bien-être de l’OMS qui augmente avec le bien-être psychologique du salarié (obtenu à partir de questions mesurant la fréquence à laquelle le salarié s’est senti bien et de bonne humeur, calme et tranquille, plein d’énergie et vigoureux, s’est réveillé en se sentant frais et dispo et a trouvé que sa vie quotidienne était emplie de choses intéressantes). La distribution des variables d’état de santé au sein de l’échantillon est présentée en annexe (tableau A). Le modèle est enrichi par l’introduction progressive des neuf dimensions de conditions de travail notées W (contraintes physiques et risques psycho-sociaux, cf. section précédente). Le type de contrat de travail (CDD, CDI) n’est pas intégré aux variables de contrôle car il ne constitue pas un bon indicateur de l’insécurité de l’emploi dans le secteur hospitalier (dans le secteur public, par exemple, plus de 40 % des médecins - les internes en particulier - sont en contrat court). On lui préfère donc les indicateurs subjectifs synthétisés par la dimension « insécurité ». Le salaire (en quintiles) est ajouté pour prendre en compte le fait que les conditions de travail peuvent être plus ou moins compensées par le salaire. Les différences d’indemnisation à l’hôpital sont, quant à elles, captées par les variables de secteur d’activité et de catégorie professionnelle. Les coefficients associés à l’appartenance à une famille professionnelle et au sexe permettent par la même occasion d’observer dans quelle mesure les différences de comportement d’arrêt entre familles professionnelles et entre hommes et femmes s’expliquent par les conditions de travail. De la même façon qu’entre les secteurs public et privé les différences d’absentéisme subsistant entre familles professionnelles relèveraient de différences d’indemnisation, de normes, ou de motivations. Les différences subsistant entre hommes et femmes pourraient relever, quant à elles, de différences inobservées d’état de santé (grossesse notamment), de préférences pour la santé, de double charge ou de réactions face aux pénibilités (Bekker et al. [2009]).
Résultats
Résultats descriptifs
20Les données confirment que les personnels du secteur hospitalier ont un recours aux arrêts plus élevé en moyenne que l’ensemble des salariés (voir tableau n°4). Les caractéristiques socio-démographiques les plus liées à la prise d’un arrêt maladie sont les mêmes pour les salariés du secteur hospitalier que pour la population générale : les hommes ont moins recours aux arrêts maladie, et les salariés âgés sont moins nombreux à avoir un arrêt mais leurs arrêts sont plus longs au total.
21Au sein des établissements de santé, on constate peu de différences entre les secteurs public et privé en termes de recours aux arrêts maladie : environ un tiers des salariés ont un arrêt dans l’année dans les deux secteurs (tableau n°4). Quand les salariés sont absents dans l’année, le total des absences est plus élevé parmi les personnels hospitaliers du privé que parmi ceux du public. Mais en moyenne, les salariés du public ont 10,2 jours d’arrêts maladie par an et ceux du privé 9,6 jours (ces durées sont respectivement 11,4 et 11,2 jours lorsque les données des échantillons ne sont pas pondérées, cf. tableau n°1). Si ces écarts ne sont pas statistiquement significatifs compte tenu de la taille des échantillons, la comparaison des arrêts maladie entre ces deux secteurs à partir de sources administratives aboutit à des conclusions concordantes [6]. Au sein du secteur privé, le niveau d’absence est légèrement plus élevé dans les établissements à but non lucratif (11 jours en moyenne).
22En revanche, les niveaux d’absence varient fortement selon le type de métier exercé à l’hôpital (tableau n°4). Les médecins ont moins recours aux arrêts maladie que les professions administratives (un médecin salarié sur dix déclare avoir eu au moins un arrêt maladie au cours des douze derniers mois contre un quart des personnels administratifs). Ils se distinguent des personnels soignants, plus nombreux à déclarer avoir eu un arrêt dans les douze derniers mois ; les personnels soignants ont également des arrêts plus longs que ceux des personnels administratifs ou paramédicaux. Les absences pour maladie sont plus élevées parmi les agents d’entretien.
23On observe certains écarts entre public et privé parmi quelques familles professionnelles : au sein des personnels non médicaux, le personnel soignant apparaît plus exposé aux arrêts maladie que le personnel non soignant dans le secteur public, conformément aux résultats des bilans sociaux des établissements publics (ATIH [2014]). Les professions administratives du secteur public semblent avoir des arrêts plus longs que celles du secteur privé, et on observe l’inverse parmi les agents d’entretien. Toutefois, les différences entre secteurs public et privé n’apparaissent pas statistiquement significatives, y compris au sein de ces catégories.
Les arrêts maladie dans le secteur hospitalier par secteur et famille professionnelle
Les arrêts maladie dans le secteur hospitalier par secteur et famille professionnelle
Note : les durées médianes d’arrêt de travail ne sont pas calculées pour les médecins par statut d’établissement, les effectifs de médecins ayant pris un arrêt étant trop faibles (moins de 20 médecins).Pas de différence « public/privé » de recours aux arrêts maladie dans le secteur hospitalier
24Les résultats des estimations confirment l’absence de différence significative de recours aux arrêts maladie entre les secteurs hospitaliers public et privé, et entre établissements à but lucratif ou non lucratif (tableau n°5). L’introduction des variables de santé et de conditions de travail ne modifie pas ce constat, et à structure, conditions de travail et santé du personnel comparables, l’hôpital public ne se démarque des établissements privés ni par la probabilité pour ses agents d’avoir des arrêts maladie, ni par la durée totale des arrêts maladie sur l’année [7].
Déterminants du recours aux arrêts maladie*,**,***
Déterminants du recours aux arrêts maladie*,**,***
Lecture : les femmes travaillant dans les établissements de santé prennent 54 % d’arrêt maladie de plus que les hommes, à classe d’âge, secteur hospitalier et famille professionnelle fixés.Note : coefficients exprimés en incidence rate ratios, sauf pour le modèle probit (effets marginaux) (4). Ecarts-type entre parenthèses.
* p < 0.10,
** p < 0.05,
*** p < 0.01.
Les disparités entre familles professionnelles expliquées par les conditions de travail
25Le recours aux arrêts maladie est, en revanche, très hétérogène entre les différentes familles professionnelles. À âge, secteur, sexe et même état de santé donnés, les médecins et les professions administratives se distinguent par un recours aux arrêts significativement plus faible que les infirmiers, alors que les agents d’entretien, et dans une moindre mesure les aides-soignants, recourent davantage aux arrêts maladie (tableau n°5). Une fois l’ensemble des conditions de travail contrôlé, les coefficients associés aux familles professionnelles deviennent tous non significatifs, signe que les différences de conditions de travail entre ces métiers suffisent à expliquer ces différences de recours aux arrêts maladie [8]. L’introduction des conditions de travail les plus dégradées pour les infirmiers (intensité, exigences émotionnelles et conflits de valeur) exacerbe les différences avec les autres familles professionnelles (tableau n°6). En sens inverse, le contrôle par les conditions de travail qui sont les plus dégradées pour les agents d’entretien (manque d’autonomie et rapports sociaux) ou les aides-soignants (manque d’autonomie) annule ou diminue la significativité des coefficients de ces familles professionnelles. L’introduction des contraintes physiques, dont les médecins et assimilés et les professions administratives sont relativement protégés, permet pour ces professions de capter leur comportement différencié d’arrêt de travail. Parmi l’ensemble des variables de conditions de travail, ce sont les contraintes physiques qui expliquent le plus l’hétérogénéité des arrêts de travail. En détaillant, « rester longtemps debout » et « effectuer des mouvements douloureux ou fatigants » sont les facteurs les plus contributifs au premier axe de l’ACM, et captent particulièrement les différences de conditions de travail et d’arrêts de travail entre familles professionnelles. L’effet du salaire est indéterminé dans toutes les spécifications.
26Au total, l’introduction de toutes les conditions de travail permet de rassembler tous ces effets, ce qui explique la disparition des effets liés aux familles professionnelles. Seules les dimensions liées aux exigences émotionnelles et aux contraintes physiques sont alors significatives. Ces résultats confirment le rôle important des conditions de travail sur les arrêts maladie (Inan [2013], Afsa et Givord [2014]). Il faut toutefois préciser que ces estimations ne visent pas à quantifier l’ampleur des arrêts maladie attribuables à chaque condition de travail. En effet, le recours à des indices synthétiques, privilégié ici pour capter un éventail très large de conditions de travail, n’est pas adapté à une interprétation précise des effets des contraintes prises isolément. Par ailleurs, les préférences individuelles pour les récompenses intrinsèques ou extrinsèques peuvent à la fois affecter les conditions de travail déclarées et le choix du secteur d’activité (Lanfranchi et Narcy [2008], Georgellis et al. [2011]) : l’effet des différentes conditions de travail sur les arrêts maladie peut donc être hétérogène selon le secteur. En outre, les conditions de travail auraient probablement un effet encore plus important si les effets de sélection étaient pris en compte : les salariés pour lesquels les conditions de travail ont eu les conséquences les plus délétères peuvent être sortis de l’emploi ou avoir changé de poste (effet de travailleur sain) ou encore que les salariés peuvent se diriger vers des postes avec des conditions de travail qui leur sont supportables. Enfin, on peut imaginer que la déclaration des conditions de travail puisse être endogène : de longs arrêts maladie pourraient les dégrader (en aggravant par exemple le sentiment d’insécurité dans l’emploi ou la perception de la pénibilité au travail) ou les améliorer (en conduisant par exemple une adaptation du poste de travail). Notons que si de tels effets sont envisageables sur le long terme plus que sur une année, ils sont probablement largement captés par le contrôle de l’état de santé.
Effet des dimensions de conditions de travail sur le recours aux arrêts maladie*,**,***
Effet des dimensions de conditions de travail sur le recours aux arrêts maladie*,**,***
Note : coefficients exprimés en incidence rate ratios.* p < 0.10,
** p < 0.05,
*** p < 0.01.
Absence d’écart entre hommes et femmes en dehors de l’âge des grossesses
27Sur l’ensemble de l’échantillon, les écarts entre hommes et femmes se réduisent une fois les différences d’état de santé prises en compte, mais restent significatives. La littérature sur le sujet suggère que cinq hypothèses pourraient expliquer l’absentéisme plus élevé des femmes : les différences d’état de santé (grossesses en premier lieu), de double charge, de préférence pour la santé, de conditions de travail, de réactions face aux pénibilités.
28Des travaux récents ont montré que les grossesses expliquent près de 40 % des écarts de recours aux arrêts maladie des femmes et des hommes âgés de 21 à 45 ans (Marbot et Pollak [2015]). Comme les données de l’enquête ne permettent pas d’identifier les grossesses, et que ces différences de morbidité ne peuvent pas être neutralisées par les variables d’état de santé, les mêmes régressions sont menées sur les moins de 45 ans, pour lesquels on s’attend à ce que les femmes aient des arrêts maladie supérieurs aux hommes du fait des grossesses, et sur les plus de 45 ans, pour lesquels ce facteur ne joue plus. Les résultats sont conformes aux attentes sur l’échantillon des moins de 45 ans, parmi lesquels les femmes ont un recours significativement plus élevé aux arrêts maladie (tableau n°7). En revanche, parmi les plus de 45 ans, le fait d’être une femme n’a pas d’effet significatif sur le recours aux arrêts maladie. Avoir des enfants en bas âge a un effet faiblement significatif sur le recours aux arrêts maladie avant 45 ans, et ne semble pas peser davantage sur l’absentéisme des femmes (effet d’interaction). Ces éléments suggèrent que les différences de recours aux arrêts maladie entre hommes et femmes ne seraient pas dues à la double charge à laquelle elles font face du fait de leur implication plus importante dans les tâches domestiques, la garde des enfants et l’aide à des proches dépendants. Ceci ne signifie pas que ces facteurs ne jouent pas de rôle sur la sélection sur le marché du travail ; les effets de sélection n’étant pas pris en compte, il est possible que les femmes en emploi soient plus souvent celles dont l’état de santé permet cette conciliation entre vie privée et familiale. Mais parmi les salariés dont l’état de santé est comparable, les difficultés de conciliation n’augmentent pas le risque d’arrêt chez les femmes. Ces résultats vont dans le sens de ceux de la littérature internationale qui a souligné le faible appui empirique à l’hypothèse de la double charge (Bekker et al. [2009]). En outre, les comportements préventifs des femmes observés dans de nombreux domaines (Fourcade et al. [2013]) ne se manifestent pas de façon générale par un recours plus élevé aux arrêts. L’absence de différences de recours au-delà de 45 ans suggère ainsi que l’hypothèse de préférence pour la santé des femmes n’explique pas les écarts entre hommes et femmes puisqu’elle ne vaudrait que pour les femmes jeunes.
Effet du sexe sur la durée totale des arrêts maladie selon l’âge*,**,***
Effet du sexe sur la durée totale des arrêts maladie selon l’âge*,**,***
Note : coefficients exprimés en incidence rate ratios. Ecarts-types entre parenthèses.* p < 0.10,
** p < 0.05,
*** p < 0.01.
29Prises isolément, certaines conditions de travail auxquelles sont exposées les femmes, et en particulier les contraintes horaires, neutralisent une partie de la sur-sinistralité féminine (tableau n°6). La prise en compte des autres conditions de travail prises dans leur ensemble a, en revanche, tendance à accroître les écarts entre hommes et femmes. Ces effets pourraient indiquer l’existence de réactions « genrées » face à la pénibilité et contribuer à expliquer le moindre recours aux arrêts maladie des hommes à conditions de travail équivalentes à celles des femmes. La littérature sociologique suggère en effet que face à la pénibilité, les hommes, se conformant à l’idéal masculin de virilité, rejetteraient les signes de faiblesse dont la maladie fait partie (Gollac et Volkoff [2002]). Il faut toutefois souligner que cette interprétation reposerait sur l’hypothèse (forte) que les indices utilisés suffisent à capter l’ensemble de la ségrégation liée aux conditions de travail. Certaines pénibilités ont par nature des conséquences différentes chez les hommes et les femmes : les contraintes physiques, comme le port de charges lourdes auxquelles sont exposés les infirmiers et les infirmières ont par exemple un impact plus fort sur la santé des femmes. La prise en compte des contraintes physiques est d’ailleurs ce qui accroît le plus les écarts d’arrêts entre hommes et femmes : ceci peut justement être le signe que certaines contraintes ont, à niveau équivalent, des conséquences objectives plus délétères sur les femmes qui ne peuvent pas entièrement être captées par des variables générales d’état de santé. En outre, sur l’échantillon des plus de 45 ans, les différences d’arrêt maladie entre hommes et femmes restent non significatives, y compris après la prise en compte des conditions de travail. Il semble donc peu vraisemblable que l’hypothèse de réactions « genrées » face aux pénibilités joue un rôle important dans l’explication du plus fort recours aux arrêts maladie des femmes.
30Ces résultats suggèrent, qu’outre les grossesses, les différences de réactions face aux pénibilités, de préférence pour la santé, et de double charge ne constituent probablement pas des facteurs explicatifs importants. Restent les différences de conditions de travail. Contrairement à ce qui est constaté chez les salariés du privé, on n’observe pas de recours plus élevé aux arrêts des femmes après 45 ans dans le secteur hospitalier. Ceci pourrait s’expliquer par la relative homogénéité des conditions de travail (tableau B, en annexe) : malgré certaines différences de conditions de travail entre hommes et femmes y compris au sein de ce secteur, les risques psycho-sociaux y sont relativement homogènes, à l’exception de la pression ressentie (Loquet et Ricroch [2014]). Étant donné que les conditions de travail impactent fortement le recours aux arrêts maladie, il est probable que les différences de conditions de travail auxquelles sont exposés les hommes et les femmes sur le marché du travail pris dans son ensemble constituent un facteur explicatif important des différences de recours aux arrêts maladie.
31Cet article s’est attaché à mettre en évidence le rôle des conditions de travail sur les disparités de recours aux arrêts maladie des personnels hospitaliers. Si des travaux récents ont montré que les agents de la fonction publique hospitalière ont davantage d’arrêts que ceux de la fonction publique d’État, l’absence de différences significatives de recours dans les secteurs hospitaliers public et privé indique que l’enjeu de régulation des arrêts maladie dans les établissements de santé n’est pas propre au secteur public. Du fait de conditions de travail relativement semblables dans les établissements de santé public et privé, ce résultat n’est pas contre-intuitif. Les secteurs privé et public se distinguent toutefois par leurs régimes d’indemnisation des arrêts maladie. Ce constat réalisé durant une année pendant laquelle les agents de l’hôpital public étaient exposés à une journée de carence, et les salariés du privé soumis à des régimes différents selon leur secteur d’appartenance (lucratif ou non lucratif) et leur statut (cadre et non-cadre), suggère que les différences d’indemnisation entre secteurs ne contribuent pas à expliquer les écarts entre professions et secteurs. Néanmoins, cette analyse ne permet pas de conclure que les spécificités propres aux secteurs public et privé (l’indemnisation, la protection de l’emploi, les motivations intrinsèques ou encore la culture et les normes) n’ont pas d’effet causal sur le recours aux arrêts maladie. Des travaux complémentaires devraient notamment être menés pour évaluer les effets causaux de changements d’indemnisation sur le recours aux arrêts maladie dans ce secteur d’activité.
32Les résultats indiquent également que la régulation des arrêts maladie dans les établissements de santé nécessite de prendre en compte la particularité des conditions de travail auxquelles sont exposés leurs personnels. Ceux-ci se distinguent en effet par des conditions de travail difficiles, à la fois en termes de contraintes physiques et psycho-sociales, avec des disparités importantes entre familles professionnelles. Ces conditions de travail se reflètent sur leurs comportements de recours aux arrêts maladie : nos résultats indiquent que les écarts importants d’absentéisme selon le métier exercé dans les établissements de santé sont dus aux différences de conditions de travail. Un prolongement pourrait consister à identifier d’éventuelles particularités propres à ce secteur, en raison par exemple de l’accès rapide à des conseils médicaux, ou encore de la responsabilité et des motivations propres à un exercice au contact de personnes en difficulté. Par ailleurs, des travaux complémentaires seraient nécessaires pour estimer l’ampleur des arrêts maladie attribuable à chaque type de condition de travail. Mesurer leurs effets causaux nécessiterait de traiter des biais de sélection (effet de travailleur sain, endogénéité du choix du statut d’activité).
33Enfin, cet article contribue à la littérature sur les différences d’arrêts de travail entre hommes et femmes, selon laquelle cinq hypothèses pourraient expliquer l’absentéisme plus élevé des femmes : les différences d’état de santé (grossesses en premier lieu), de préférence pour les comportements préventifs, de conditions de travail, de réactions face aux pénibilités, et de double charge. Les résultats mettent en évidence l’absence de différences significatives de recours en dehors de l’âge des grossesses. Ceci semble confirmer que l’absentéisme féminin ne serait pas dû à la double charge ni à des comportements plus préventifs et que les grossesses jouent un rôle important. La prise en compte des conditions de travail accroît légèrement l’ampleur des écarts : l’hypothèse de différences de réactions face à des contraintes similaires n’est donc pas à exclure. Cependant, cet effet est de faible ampleur et les indicateurs de conditions de travail utilisés ici ne peuvent pas rendre compte de l’impact différencié de certaines pénibilités, notamment physiques, sur la santé des femmes et des hommes. Il est donc peu probable que ce facteur joue un rôle majeur. Restent les conditions de travail, dont les résultats confirment qu’elles constituent un facteur central de recours aux arrêts de travail. L’absence de différences significatives de recours aux arrêts de travail entre hommes et femmes après 45 ans, qui se distingue des écarts observés en population générale, pourrait s’expliquer par des conditions de travail relativement homogènes entre hommes et femmes dans le secteur hospitalier. Une analyse élargie à d’autres secteurs serait ainsi bénéfique pour mesurer l’ampleur de l’écart d’arrêts maladie entre hommes et femmes qui, en dehors des grossesses, peut être attribuée aux différences de conditions de travail.
État de santé selon le statut juridique de l’établissement au sein de l’échantillon
État de santé selon le statut juridique de l’établissement au sein de l’échantillon
Note : le score de bien-être de l’OMS varie de 1 à 25.Conditions de travail par sexe et famille professionnelle
Conditions de travail par sexe et famille professionnelle
Note : les indicateurs synthétisent la position sur le premier axe de l’ACM de chaque famille de conditions de travail. Plus ils sont élevés, plus les conditions de travail sont dégradées.L’indicateur d’intensité varie dans l’intervalle [-2,9 ; 3,1], celui des exigences émotionnelles dans l’intervalle [-3 ; 2,1], celui du manque d’autonomie dans l’intervalle [-2,1 ; 4,8], celui des rapports sociaux dans l’intervalle [-1,3 ; 2,3], celui des conflits de valeurs dans l’intervalle [-1,8 ; 3,5], celui de l’insécurité dans l’intervalle [-1,3 ; 2,3], celui du manque de reconnaissance dans l’intervalle [-2,6 ; 3,2], celui des contraintes physiques dans l’intervalle [-2,1 ; 1,7] et celui des contraintes horaires dans l’intervalle [-1,9 ; 2,4].
Les indicateurs de conditions de travail
34L’aspect multidimensionnel des risques psycho-sociaux est régulièrement mis en avant dans les rapports et études portant sur les conditions de travail. À la suite du rapport Nasse-Légeron sur la détermination, la mesure et le suivi des risques psycho-sociaux au travail, des propositions d’indicateurs reflétant les différentes dimensions de ces risques ont été faites par un collège d’expertise [2009]. Ils ont ainsi défini six dimensions pour les risques psycho- sociaux : les exigences du travail, les exigences émotionnelles, l’autonomie et les marges de manœuvre, les rapports sociaux et relations de travail, les conflits de valeur, l’insécurité socio-économique. Cette classification s’accompagnait d’une description des questions qui pouvaient être utilisées pour les décrire. Le travail réalisé ici, reprend largement leurs prescriptions, dans la mesure où les six dimensions mises en avant sont détaillées. En revanche, il a été ajouté une dimension supplémentaire, autour de la reconnaissance, la rémunération et l’évaluation, qui est habituellement traitée sous l’angle des rapports sociaux (Davie [2015]). D’une part l’enquête Conditions de travail couvre cette dimension avec plusieurs questions et d’autre part, les questions sur la fierté au travail sont particulièrement discriminantes parmi les professions de santé (Loquet et Ricroch [2014]).
35Ensuite, deux dimensions en dehors des risques psychosociaux ont été ajoutées : les contraintes physiques (pour prendre en compte les difficultés comme le port de charges lourdes ou le risque d’accident infectieux) et les contraintes temporelles (comme le travail de nuit ou de week-end).
36Les variables qui participent à l’élaboration des indicateurs sont celles définies par Davie [2015]. Elles sont rappelées ci-dessous.
371. L’intensité du travail
38• Être soumis à au moins trois contraintes de rythme
39• Travailler à la chaîne
40• Répéter continuellement une même série de gestes ou d’opérations
41• Chaque série dure moins d’une minute
42• Changer de poste en fonction des besoins de l’entreprise
43• Devoir atteindre des objectifs chiffrés précis
44• Avoir la possibilité de modifier ces objectifs
45• Avoir du mal à atteindre les objectifs fixés
46• Devoir suivre des procédures de qualité strictes
47• Devoir fréquemment abandonner une tâche pour une autre non prévue
48• Une erreur dans votre travail pourrait entraîner :
- des conséquences graves pour la qualité du service ou du produit
- des coûts financiers importants pour votre entreprise/votre administration
- des sanctions à votre égard
49• Recevoir des ordres ou des indications contradictoires
50• Avoir au moins une contrainte d’attention ou de vigilance
51• Devoir faire une quantité de travail excessive
52• Devoir se dépêcher pour faire son travail
53• Travailler sous pression
54• Penser à trop de choses à la fois / à son travail même en n’y étant pas.
552. Les exigences émotionnelles
56• Être en contact avec des personnes en situation de détresse
57• Devoir calmer des gens
58• Vivre des tensions dans ses rapports avec le public
59• Être en contact avec le public
60• Cacher ses émotions
61• Éviter de donner son avis
62• Avoir peur pendant son travail pour sa sécurité ou celle des autres
63• Être victime d’une agression (verbale physique ou sexuelle) de la part du public
643. L’autonomie
65• Indications données par les supérieurs hiérarchiques qui vous disent également comment faire
66• Appliquer strictement des consignes
67• Faire généralement appel à d’autres en cas d’incident
68• Pouvoir faire varier les délais fixés
69• Pouvoir interrompre momentanément son travail quand on le souhaite
70• Pouvoir organiser son travail de la manière qui convient le mieux
71• Avoir des tâches monotones
72• S’ennuyer
73• Faire des choses qui me plaisent
74• Pouvoir apprendre des choses nouvelles
75• Pouvoir développer ses compétences
76• Manquer de compétences
77• Compétences inutilisées
784. Les rapports sociaux
79• En cas de travail délicat, être aidé :
- par ses supérieurs hiérarchiques
- par les collègues
- par d’autres personnes de l’établissement
- par des personnes extérieures à l’établissement d’autres personnes
80• Travailler seul (toujours, souvent)
81• Depuis 1 an, la plupart des personnes avec qui je travaille ont changé
82• Avoir l’occasion d’aborder collectivement des questions d’organisation du travail
83• Être en désaccord avec ses (supérieurs) (collègues) sur la façon de bien faire son travail (toujours, souvent)
84• Vivre des situations de tension :
- dans ses rapports avec vos supérieurs hiérarchiques
- dans ses rapports avec ses collègues
- dans ses rapports avec les personnes encadrées
85• Il vous arrive de superviser le travail d’autres salariés
86• Votre supérieur (prête attention à ce que vous dites) (vous aide à mener des tâches à bien)
87• Vos collègues (vous aident à mener vos tâches à bien) (sont amicaux)
88• Au cours des douze derniers mois, une ou plusieurs personnes se comportent systématiquement avec vous de la façon suivante :
- vous ignore, fait comme si vous n’étiez pas là
- vous empêche de vous exprimer
- vous ridiculise en public
- critique injustement votre travail
- vous charge de tâches inutiles ou dégradantes
- sabote votre travail, vous empêche de travailler correctement
- laisse entendre que vous êtes mentalement dérangé
- vous dit des choses obscènes ou dégradantes
- vous fait des propositions à caractère sexuel de façon insistante
- vous fait des blagues blessantes ou de mauvais goût, se moque de vous
89• Avoir subi une agression (verbale) (physique ou sexuelle) de la part des collègues ou des supérieurs
90• Avoir l’impression de faire partie d’une équipe
915. Les conflits de valeur
92• Faire trop vite une opération qui demanderait davantage de soin
93• Faire des choses que vous désapprouvez
94• Avoir la fierté du travail bien fait
95• Avoir le sentiment d’être inutile
96• Avoir l’impression d’être exploité
97• Pour effectuer correctement son travail :
- avoir assez de temps
- avoir des informations claires et suffisantes
- avoir la possibilité de coopérer
- avoir des collaborateurs ou des collègues en nombre suffisant
- avoir des logiciels et des programmes informatiques bien adaptés
- avoir un matériel suffisant et adapté
- avoir une formation continue suffisante et adaptée
986. L’insécurité économique et les changements
99Craindre pour son emploi dans l’année
100• Devoir changer de qualification ou de métier dans les 3 prochaines années
101• Si vous deviez perdre/quitter votre emploi, facilité de trouver un emploi avec une rémunération similaire
102• Se sentir capable de faire le même travail qu’actuellement jusqu’à la retraite
103• Le souhaiter
104• Au cours des 12 derniers mois, votre environnement de travail a été modifié par :
- un changement de votre poste
- un changement dans les techniques utilisées
- une restructuration, un déménagement
- un changement dans l’organisation du travail au sein de l’établissement
- un plan de licenciements
- un rachat ou changement dans l’équipe de direction
- une autre raison
105• Ces changements sont plutôt négatifs pour votre travail
106• Avoir reçu une information suffisante ou adaptée au moment de ces changements
107• Avoir été consulté
108• Avoir eu l’impression d’avoir une influence sur la mise en œuvre de ces changements
109• Savoir à l’avance les tâches à faire le mois suivant
110• Vivre des changements imprévisibles ou mal préparés
111• Avoir le sentiment d’être dépassé par les changements trop rapides
1127. La reconnaissance, la rémunération et l’évaluation
113• Recevoir l’estime et le respect que mérite votre travail
114• Avoir des perspectives de promotion satisfaisantes
115• Être plutôt mal payé ou très mal payé
116• Avoir une position professionnelle correspondant à votre formation
117• Les personnes qui évaluent votre travail le connaissent bien
118• Mon supérieur traite équitablement les personnes qui travaillent sous ses ordres
119• Fierté de travailler dans son organisation
120• Avoir au moins un entretien d’évaluation par an
121• L’entretien porte sur des critères précis et mesurables
1228. Les contraintes physiques
123• Rester longtemps (debout) (dans une autre posture pénible fatigante à la longue)
124• Porter ou déplacer des charges lourdes
125• Effectuer des (déplacements à pied longs ou fréquents) (mouvements douloureux ou fatigants)
126• Subir des secousses ou vibrations
127• Avoir au moins 3 contraintes liées à l’environnement de travail ou l’hygiène (parmi 9)
128• Ne pas entendre une personne à 2 ou 3 mètres sans qu’elle élève la voix
129• Respirer des fumées ou des poussières
130• Être en contact avec des produits dangereux
131• Être exposé à un risque infectieux
132• Risquer d’être blessé ou accidenté
133• Risquer des accidents de circulation
1349. Les contraintes horaires et d’organisation du temps de travail
135• Plus de 40 heures par semaine
136• Disposer d’au moins 48 heures consécutives de repos au cours d’une semaine
137• Travailler, même occasionnellement, le samedi // le dimanche
138• En cas d’imprévu, pouvoir modifier ses horaires en s’arrangeant avec ses collègues
139• Ne pas connaitre ses horaires
140• Avoir des horaires de travail quotidiens alternants
141• Habituellement votre journée de travail est morcelée en 2 périodes séparées par 3h ou plus
142• Travailler, même occasionnellement entre (5h et 7h du matin) (20h et minuit) (minuit et 5h du matin)
143• Travailler tous les jours ou souvent au-delà de l’horaire prévu
144• Être soumis à des astreintes
145• Travailler plus de 5 jours par semaine
146• Être soumis à un contrôle des horaires
147• Avoir été joint au cours des 12 derniers mois en dehors de vos horaires de travail pour les besoins du travail
148• Emporter tous les jours ou souvent du travail à faire chez soi
149• Devoir dormir en dehors de chez soi pour le travail
150• Ne pas pouvoir prendre ses congés quand on le veut
151• Ne pas avoir pris tous les congés auxquels vous aviez droit au cours de l’année écoulée
152• Ne pas pouvoir s’absenter de votre travail, même quelques heures en cas d’imprévu personnel ou familial
153• Vos horaires de travail ne s’accordent pas bien avec vos engagements sociaux et familiaux en dehors du travail
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Notes
-
[1]
La fédération hospitalière publique de France (FHF) s’est notamment inquiétée de la suppression de la journée de carence par la publication en septembre 2012 d’une note estimant que cette journée permettait de réaliser une économie de 65 à 70 millions d’euros pour les établissements. Cependant, aucune étude n’a pour le moment permis d’établir clairement un lien de causalité entre les évolutions de l’absentéisme et la journée de carence, comme l’a soulevé la Cour des comptes [2014].
-
[2]
Il n’est cependant pas possible, à partir de ces données, de distinguer la fréquence des arrêts de leur durée.
-
[3]
La question des disparités entre établissements n’a pas été traitée car les informations concernant les établissements ne sont disponibles que pour 60 % des salariés.
-
[4]
Elle consiste à modéliser le log de la moyenne μ comme une fonction linéaire : log(μ) = β1Pi + β2Xʹi + ε. Le calcul de la variance intègre un paramètre de surdispersion α : Var(y | Pi, Xi) = μ + αμ2).
-
[5]
Ce type de « Hurdle model » est particulièrement adapté à la modélisation des variables de comptage en économie de la santé lorsque les « zéros » résultent vraisemblablement d’un processus différent de celui conduisant aux valeurs positives (par exemple le fait d’avoir eu un arrêt maladie dépend de la décision de consulter un médecin, et la durée des arrêts dépend largement de l’appréciation du médecin). Notons qu’il ne nécessite pas pour autant de variables d’exclusion (Deb et al. [2013]).
-
[6]
Les sources administratives font état de durées d’arrêt plus élevées que les durées recueillies par l’enquête Conditions de travail. Ceci pourrait s’expliquer par une sous-représentation des salariés en arrêts de très longue durée dans les enquêtes (les salariés en congé maladie depuis plus d’un an au moment de l’enquête ne sont pas interrogés, et les taux de non-réponse des salariés en arrêt de longue durée pouvant être plus élevés) et par des biais déclaratifs (biais de mémoire, biais de désirabilité sociale). Cependant, les écarts entre les deux secteurs sont faibles y compris sur les données administratives les plus comparables. Elles répertorient 15,7 jours d’arrêts maladie par an (congés maladie ordinaire et congés de longue durée) parmi les personnels des établissements de santé publics (bilans sociaux des établissements publics de santé à la fin 2012, ATIH [2014]). À titre de comparaison, les salariés du secteur des activités hospitalières privées ont 14 jours d’arrêt maladie ayant donné lieu à des indemnités journalières de l’assurance maladie en moyenne (hors arrêts de moins de 3 jours exposés au délai de carence) (échantillon ygie[2011], calculs Drees). Ces deux sources administratives ne sont cependant pas strictement comparables en termes de champ et de types d’arrêts répertoriés.
-
[7]
Ce résultat est robuste à d’autres modélisations (MCO, modèle binomial négatif à inflations de zéros). On n’observe pas non plus de différence significative de recours à des arrêts plus longs dans un secteur que dans un autre, que ce soit en statistiques descriptives ou en modélisant l’effet du secteur sur des tranches de durées d’arrêt.
-
[8]
Sous la spécification alternative (Zinb) on obtient le même résultat, à l’exception des professions administratives, qui apparaissent à la fois plus susceptibles de présenter des excès de zéros (présentéisme) et d’avoir davantage d’arrêts maladie après prise en compte des différences de conditions de travail.