Notes
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[1]
L’Espagne, la Finlande et la Slovaquie s’étaient également ralliées au ciblage d’inflation avant d’adopter l’euro.
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[2]
Cf. Ball [2010], Lin et Ye [2007], Mishkin et Schmidt-Hebbel [2007].
-
[3]
En effet, pourvu que l’engagement soit crédible et l’horizon de ciblage suffisamment lointain, Svensson [2010] rappelle qu’une stratégie de ciblage d’inflation offre une marge discrétionnaire aux autorités monétaires, tout en conservant le caractère coercitif d’une règle, dans la mesure où la banque centrale doit rendre des comptes publiquement sur la réalisation de l’objectif d’inflation qui lui est assigné. C’est en ce sens que Bernanke et Mishkin [1997] qualifient le ciblage d’inflation de « discrétion contrainte ».
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[4]
En extension à ce travail, il sera possible par la suite d’étudier le lien entre degré de conservatisme et performances macroéconomiques.
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[5]
Les articles faisant exception sont : Ozlale [2003], Cecchetti et Ehrmann [2002], Krause et Méndez [2005], Dennis [2006], Favero et Rovelli [2003], Castelnuovo et Surico [2003, 2004], Tachibana [2004], Levieuge et Penot [2009].
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[6]
On peut penser à la mise en place d’une politique de désinflation, l’adoption d’une stratégie de ciblage d’inflation, ou encore aux réformes visant à renforcer l’indépendance des banques centrales.
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[7]
En toute rigueur, il faudrait parler de degré d’aversion des autorités monétaires à l’inflation. Toutefois, Levieuge et Lucotte [2013] montrent qu’il est acceptable de considérer que le degré d’aversion des autorités monétaires à l’inflation est supérieur à celui de la société.
-
[8]
Il est également montré que l’indicateur CONS est fortement corrélé avec l’indicateur proposé par Krause et Méndez [2005], excepté pour la période 1980-1985, au cours de laquelle le modèle utilisé par ces derniers est inapproprié ; en effet, les régimes d’encadrement du crédit, d’ancrage de change, ou de ciblage monétaire prévalant à l’époque ne sauraient être correctement traduits par la règle de taux d’intérêt considérée par Krause et Méndez. A contrario, l’indicateur CONS est valide quels que soient le régime de politique monétaire et la structure implicite des économies ; il est toujours possible d’observer le couple à un moment, et d’en inférer les préférences relatives des autorités monétaires.
-
[9]
Comme nous le verrons dans la section suivante, plusieurs algorithmes d’appariement ont été développés par la littérature économétrique et certains d’entre eux suggèrent de retenir plusieurs observations contrefactuelles pour chaque observation traitée.
-
[10]
Voir notamment Brodaty et al. [2007], Caliendo et Kopeinig [2008], et Fougère [2010] pour une présentation détaillée de ces deux hypothèses.
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[11]
Le taux d’inflation est retardé d’une période afin de prendre en compte un possible biais d’endogénéité, lié au fait que l’adoption du ciblage d’inflation a certainement eu un impact sur les performances d’inflation des pays concernés.
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[12]
Voir notamment Caliendo et Kopeinig [2008] et Khandker et al. [2010] pour une présentation détaillée des étapes de l’estimation.
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[13]
A noter qu’il n’existe pas de justification théorique concernant le choix d’un modèle discret. D’après Caliendo et Kopeinig [2008], les modèles probit et logit produisent sensiblement les mêmes résultats, et jouent donc très peu sur l’appariement.
-
[14]
Voir notamment Caliendo et Kopeinig [2008] pour de plus amples détails sur les différents algorithmes d’appariement utilisés dans le cadre de cette étude.
-
[15]
Tous les détails figurent dans Levieuge et Lucotte [2013].
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[16]
A noter toutefois que les données sur le solde public structurel ne sont pas disponibles pour quatre économies de notre échantillon, à savoir le Chili, le Mexique, la Slovaquie et, la Turquie.
-
[17]
Notre étude ne permet toutefois pas de déterminer si c’est la stratégie de ciblage d’inflation qui oblige le banquier central à se montrer plus conservateur, ou bien si les autorités politiques ont tendance à nommer un banquier central particulièrement conservateur dès lors que le régime de politique monétaire répond au ciblage d’inflation.
1La stratégie de ciblage d’inflation suscite, depuis près de deux décennies, un intérêt à la fois pratique, puisque vingt-six pays l’ont adoptée à ce jour [1], et théorique, en ce qu’elle se présente comme une solution pour réconcilier règle et discrétion. En effet, en marge du pré-engagement de la banque centrale en termes de cible d’inflation, cette stratégie est censée offrir des marges de manœuvre à court terme pour réagir aux chocs. Concrètement, il s’agit selon Mishkin [2000] d’un régime de politique monétaire caractérisé par cinq éléments : (i) l’annonce publique d’une cible numérique d’inflation à moyen terme, (ii) l’engagement envers la stabilité des prix, considérée comme principal objectif de politique monétaire, auquel les autres objectifs sont subordonnés, (iii) le recours à de nombreux indicateurs pour décider de l’orientation à donner à la politique monétaire, (iv) une transparence accrue de la politique monétaire, et (v) la responsabilité accrue de la banque centrale en termes de respect de son (ses) objectif(s).
2Le ciblage d’inflation compte de nombreux partisans dans le milieu académique, et son adoption est fréquemment recommandée par le Fonds monétaire international. Pourtant, les études échouent à mettre en évidence un impact significatif de cette stratégie sur les performances macroéconomiques des pays industrialisés cibleurs d’inflation [2]. D’aucuns avancent que le contexte de grande modération, profitable à tous les régimes de politique monétaire, sans distinction, a rendu difficile la comparaison des performances entre pays cibleurs et non cibleurs. D’autres prétendent que, dans les économies développées, la conduite de la politique monétaire est somme toute assez proche d’un pays à l’autre, quel que soit le régime de politique monétaire. Cela expliquerait les difficultés à révéler les avantages comparatifs du ciblage d’inflation. Mais cela revient aussi à nier, outre ses bénéfices potentiels, ses spécificités en termes d’objectifs.
3Economistes et praticiens sont justement divisés au sujet de la hiérarchisation des objectifs des banques centrales ayant adopté le ciblage d’inflation. Pour les uns, cette stratégie inviterait les banques centrales à excessivement se concentrer sur l’objectif de stabilité des prix, au détriment de la stabilisation de l’activité économique (King [1997]). Autrement dit, les cibleurs d’inflation seraient plus « conservateurs » que les autres au sens de Rogoff. Les partisans du ciblage d’inflation rétorquent que cette stratégie n’est pas réductible à une règle de politique monétaire, ni à une fonction de perte, avec l’inflation pour unique cible et unique objectif, respectivement. Cette stratégie est plutôt présentée comme un cadre d’exercice offrant suffisamment de souplesse pour répondre aux déviations temporaires de l’output à son potentiel, dans les limites autorisées par l’obligation de respecter la cible d’inflation annoncée (Bernanke et Mishkin [1997], Libich [2011]). De surcroît, l’adhésion de nombreux pays au ciblage d’inflation coïncide avec la croyance – devenue le leitmotiv des banques centrales dans les années 1990 et 2000 – selon laquelle la stabilité conjoncturelle découle de la stabilité des prix. Il est néanmoins entendu, depuis 2008, que cette « divine coïncidence » est fausse.
4De même, il était de bon ton de considérer que la stabilité financière était le corolaire de la stabilité monétaire. La crise financière invite à rompre avec ce consensus, et suggère qu’à trop se concentrer sur l’objectif d’inflation, les banques centrales en général, et les pays cibleurs d’inflation en particulier, auraient non seulement négligé la stabilité de l’activité économique, mais aussi la stabilité financière. Conformément à l’idée d’un arbitrage défavorable aux autres objectifs que l’inflation, Frappa et Mésonnier [2010] trouvent un lien positif, significatif et robuste, entre l’adoption du ciblage d’inflation et la croissance des cours immobiliers. De même, Lin [2010] montre que l’adoption du ciblage s’accompagne d’un accroissement de la volatilité du taux de change dans les pays en développement.
5Ainsi, la littérature existante est plutôt partagée sur les performances macroéconomiques et les externalités liées au ciblage d’inflation. On peut toujours arguer qu’il est difficile d’isoler les effets du régime de politique monétaire de ceux imputables au contexte structurel, institutionnel, fiscal et réglementaire. C’est la raison pour laquelle il nous semble plus pertinent de commencer par évaluer ce qu’implique en pratique le ciblage d’inflation en termes d’arbitrage entre les objectifs poursuivis par les autorités monétaires. En d’autres termes, le ciblage d’inflation implique-t-il un plus fort degré de conservatisme que les autres régimes de politique monétaire ?
6Pour répondre à cette question, nous proposons dans cet article une approche originale, qui consiste à mesurer l’inclination relative des cibleurs d’inflation pour l’objectif de stabilité des prix, et de la comparer avec celle des non-cibleurs. A notre connaissance, il n’existe pas de travaux sur le lien entre ciblage d’inflation et degré de conservatisme, ce que l’absence de mesure du degré de conservatisme des banques centrales explique sans doute. Levieuge et Lucotte [2013] ont développé un indicateur fondé sur l’arbitrage d’objectifs théorisé par Taylor [1979], qui permet justement d’identifier les préférences relatives des autorités monétaires en termes de stabilisation de l’inflation d’une part et de l’output d’autre part. Nous nous appuyons sur cette mesure pour déterminer, à l’aide de la méthode d’appariement par score de propension, si les cibleurs d’inflation ont une préférence relative pour l’objectif d’inflation significativement plus grande que les non-cibleurs.
7Les enjeux de cette recherche dépassent le cadre du débat sur la nature du régime de ciblage d’inflation et sur ses performances. Dans l’optique de confier aux banques centrales un objectif supplémentaire ayant trait à la stabilité financière, il est crucial de mesurer les préférences des banquiers centraux et de comprendre ce qui les détermine. Or, si le degré d’aversion des autorités monétaires à l’inflation est susceptible d’être expliqué par des facteurs institutionnels, politiques, et socio-économiques, il l’est aussi et sans doute en premier lieu par le régime de politique monétaire. Partant, un objectif supplémentaire aura d’autant plus de difficultés à trouver sa place que le régime en vigueur assigne un poids immodéré à l’objectif d’inflation. Nos estimations conduisent justement à accepter l’hypothèse selon laquelle les pays cibleurs sont plus conservateurs que les autres. Nous trouvons que le paramètre de préférence associé à la stabilisation de l’inflation dans une fonction de perte quadratique standard est d’environ 0.17 point de pourcentage plus élevé chez les cibleurs d’inflation, au détriment (dans les mêmes proportions) de l’objectif de stabilité de l’output. Ces conclusions apparaissent robustes aux différentes spécifications économétriques retenues.
8L’article s’organise de la façon suivante. La première section revient de manière détaillée sur le débat concernant le degré de conservatisme théoriquement attribué à une stratégie de ciblage d’inflation. La deuxième section présente l’indicateur du degré de conservatisme utilisé, dans le sillage de Levieuge et Lucotte [2013]. La troisième section présente la méthode économétrique retenue et les données. La quatrième section présente et discute les résultats obtenus, et évalue leur sensibilité à l’aide de divers tests de robustesse. Enfin, nous conclurons en ouvrant des perspectives de recherche future, portées sur les conséquences du ciblage l’inflation en termes d’instabilité financière.
Ciblage d’inflation et conservatisme de la banque centrale : revue des débats
9Tout d’abord considéré comme une solution alternative plausible et efficace aux stratégies déliquescentes de ciblage des agrégats monétaires et de change, le ciblage d’inflation a, dès son apparition, suscité des discussions au sujet de la hiérarchie des objectifs qu’il assigne aux autorités monétaires.
10Les opposants au ciblage d’inflation considèrent que cette stratégie incite les banques centrales à trop se concentrer sur l’objectif de stabilité des prix, au détriment de la stabilisation de l’activité économique (King [1997]). Au contraire, pour ses partisans, l’objectif explicite d’inflation n’implique pas qu’il faille se désintéresser de la croissance (Svensson [2010]). Premièrement, les banques centrales concernées ont la possibilité de suivre une stratégie de ciblage dite « flexible », suivant la terminologie proposée par Svensson [1999], qui assigne un poids relatif non nul à l’objectif de stabilisation conjoncturelle dans leur fonction de perte. Ensuite, quand bien même le banquier central opterait pour une stratégie de ciblage dite « stricte », qui revient à faire de la stabilisation de l’inflation le seul objectif de la politique monétaire, il serait sous-optimal de négliger l’activité économique (Svensson [1997], Penot et Pollin [1999] et Rudebusch et Svensson [1999]). En effet, l’output (gap) constitue une variable clé dans le mécanisme de transmission de la politique monétaire. De surcroît, les anticipations d’inflation, primordiales dans le cadre de cette stratégie de politique monétaire, dépendent fortement de l’évolution du PIB et de son potentiel. Enfin, les banques centrales auraient d’autant plus tort de négliger l’activité économique que, pour peu qu’elles soient crédibles, une stratégie de ciblage d’inflation leur offre la capacité de répondre à l’output gap sans compromettre leur objectif d’inflation à long terme [3]. C’est ce que démontre formellement Libich [2011].
11Ainsi, puisque la stabilisation de l’activité économique ne saurait être négligée, l’adoption du ciblage d’inflation ne devrait pas se traduire par un renforcement significatif du degré de conservatisme des banques centrales, c’est-à-dire par une plus forte préférence pour la stabilisation de l’inflation dans la fonction objectif des autorités monétaires.
12A notre connaissance, aucune étude ne s’est penchée sur cette question. Qui plus est, les travaux sur les performances macroéconomiques et sur les fonctions de réaction des pays cibleurs sont à cet égard peu concluants. En effet, si le ciblage d’inflation conduisait les banques centrales à exagérément se concentrer sur l’objectif de stabilisation des prix, les pays cibleurs devraient afficher de piètres performances conjoncturelles. Bien que reposant sur des approches méthodologiques différentes, les conclusions de Ball et Sheridan [2003], Mishkin et Schmidt-Hebbel [2007], Walsh [2009] et Ball [2010] sont, sur ce point, unanimes : l’adoption du ciblage d’inflation dans les pays développés n’aurait pas entraîné de hausse significative de la volatilité de la production. Mieux encore, Mishkin et Schmidt-Hebbel [2007] trouvent que l’adoption du ciblage d’inflation a permis, « divine coïncidence », de réduire à la fois la volatilité de l’inflation et de la production, conformément aux conclusions théoriques de Libich [2011]. Néanmoins, comme le reconnaissent d’ailleurs Mishkin et Schmidt-Hebbel [2007] et Walsh [2009], ces résultats doivent être interprétés avec précaution, étant donné le contexte de grande modération dans lequel ils s’inscrivent. Enfin, dans le prolongement de ces travaux, Gonçalves et Carvalho [2009] et Brito [2010], qui cherchent à mesurer l’impact du ciblage d’inflation en termes de ratio de sacrifice, parviennent à des conclusions radicalement opposées.
13Par ailleurs, un ensemble de travaux dans la lignée de Muscatelli et al. [2002] s’est intéressé au coefficient de réaction associé à la cible d’inflation dans la fonction de réaction des banques centrales. Typiquement, Bleich et al. [2012] estiment les règles monétaires de l’ensemble des pays cibleurs d’inflation, en distinguant les périodes pré et post-ciblage d’inflation. Ils trouvent que l’adoption du ciblage s’est effectivement accompagnée d’une hausse significative du coefficient associé à l’objectif d’inflation dans de nombreux pays. Mais ces conclusions sont remises en cause par les travaux récents de Creel et Hubert [2013] et Baxa et al. [2013]. Ces derniers démontrent, à l’aide d’estimations de règles monétaires à paramètres évolutifs, que l’adoption du ciblage d’inflation n’a pas induit une plus forte réactivité des banques centrales à leur cible d’inflation.
14Les enseignements de ces travaux, en termes d’évolution du degré de conservatisme des banques centrales dans la lignée de l’adoption du ciblage d’inflation, sont donc minces. Au fond, ce n’est guère étonnant. Tout d’abord, de nombreux facteurs structurels, institutionnels, réglementaires, conjoncturels et politiques influencent les résultats macroéconomiques. Il serait présomptueux de prétendre parvenir à isoler et identifier les effets imputables au seul régime de politique monétaire. Ensuite, il est fallacieux de déduire les préférences des autorités monétaires des coefficients estimés de leur fonction de réaction. En effet, théoriquement, on montre que les coefficients de réaction optimaux de la règle de Taylor dépendent i) des poids associés à chaque objectif dans la fonction de perte de la banque centrale, certes, mais ii) aussi de la structure de l’économie et de la variance des chocs d’offre et de demande. L’identification est donc loin d’être aussi directe que ce qui est présupposé dans cette littérature.
15C’est pourquoi nous pensons qu’il est plus prudent d’analyser l’effet de l’adoption du ciblage directement sur les préférences des banques centrales, plutôt que sur les performances macroéconomiques [4]. A cette fin, nous utilisons un indicateur simple et original du degré de conservatisme des banques centrales, qui ne provient pas de l’estimation de leur fonction de réaction. Cet indicateur est présenté dans la section suivante.
Une mesure originale du degré de conservatisme des banques centrales
16On trouve assez peu de tentatives de révélation des préférences des banques centrales dans la littérature [5]. Les travaux concernés s’appuient sur une fonction de perte quadratique, définie telle que :
18Cette fonction intègre les deux principaux objectifs supposés des banques centrales : le premier terme traduit l’écart du taux d’inflation à sa cible, tandis que le second représente l’output gap (l’écart entre l’output et son potentiel). ? représente ainsi le poids relatif que les autorités monétaires accordent à l’objectif de stabilisation des prix, autrement dit leur préférence relative pour la stabilité des prix. Plus le banquier central est averse à l’inflation et conservateur, plus ? est élevé. Les travaux susmentionnés reposent sur une méthode commune : sous l’hypothèse de comportement optimal des banques centrales, cette méthode consiste d’abord à estimer un modèle macroéconomique simple avec une règle de Taylor, puis à rechercher le paramètre ? qui va engendrer la règle de Taylor optimale la plus proche possible de la règle de taux par ailleurs estimée.
19Cependant, ces travaux présentent trois limites. Premièrement, ils ne portent que sur un nombre très restreint de pays. Ensuite, à l’exception de Krause et Méndez [2005], ils supposent constante la valeur de ? dans le temps. Certes, sauf circonstances exceptionnelles, les préférences des banquiers centraux ne sont pas censées varier subitement d’un trimestre à l’autre. Mais, à l’opposé, elles ne sont certainement pas définitivement figées dans le temps. Les changements institutionnels intervenus depuis les années 1980 [6] sont typiquement susceptibles d’avoir modifié les objectifs des autorités monétaires. Enfin, les résultats obtenus sont extrêmement différents d’une étude à une autre. Ils dépendent au final du modèle macroéconomique retenu pour révéler les préférences.
20Levieuge et Lucotte [2013] ont proposé une mesure simple et empirique du degré de conservatisme des banques centrales qui échappe à ces écueils. Cette mesure s’appuie sur la courbe de Taylor, représentée sur le graphique n° 1 (Taylor [1979]). Cette courbe traduit l’arbitrage entre variabilité de l’inflation et variabilité de l’output auquel les autorités monétaires sont confrontées. Théoriquement, tout point sur cette courbe est le résultat, en termes de variances de l’output et de l’inflation, d’une politique monétaire optimale, étant donnés le modèle structurel de l’économie et le poids relatif ? assigné à la stabilisation de l’inflation dans une fonction objectif assimilable à (1). La courbe de Taylor peut ainsi être vue comme une frontière d’efficience qui relie tous les couples générés par une politique monétaire optimale conditionnellement à ?.
21Partant de ce fondement théorique, Levieuge et Lucotte [2013] suggèrent que la position d’un pays sur cette courbe, à un moment donné, révèle les préférences relatives de la banque centrale correspondante. Alors que la première bissectrice correspond au cas où les autorités monétaires assignent une pondération équivalente à ses deux objectifs, une banque centrale peut être considérée comme plus averse à l’inflation lorsque le couple observé se situe au-dessus de la bissectrice. Le point A traduit ce cas où les autorités monétaires ont une nette préférence relative pour la stabilisation de l’inflation. Au contraire, le point B renvoie à une situation où la priorité est donnée à la stabilisation de l’output. Les autorités monétaires tolèrent en contrepartie une plus forte variabilité de l’inflation.
Courbe de Taylor et degré de conservatisme
Courbe de Taylor et degré de conservatisme
22La méthode d’identification proposée consiste ainsi à calculer la valeur de l’angle de la droite partant de l’origine et reliant le couple observé pour un pays, à une date donnée ou pour une période donnée. Soit, conformément à la définition trigonométrique usuelle : . Il suffit finalement d’opérer un changement d’échelle, en divisant par 90, pour obtenir un indicateur de ?, compris entre 0 et 1, nommé CONS, et qui peut être interprété comme le degré de conservatisme des autorités monétaires [7], soit :
24L’indicateur présente ainsi l’avantage d’être simple à calculer (seules les variances empiriques de l’inflation et de l’activité sont requises) et indépendant de tout modèle. Suivant cette procédure, Levieuge et Lucotte [2013] fournissent des indicateurs quinquennaux de degré de conservatisme des autorités monétaires des pays de l’OCDE entre 1980 et 1998, dont la pertinence est soutenue par plusieurs constats. Tout d’abord, conformément à ce que l’on sait de l’orientation désinflationniste de la plupart des pays de l’OCDE au cours de la seconde moitié des années 1980, il est effectivement vérifié que le degré de conservatisme mesuré par CONS a considérablement augmenté entre 1980 et 1990 [8]. Ensuite, on observe bien une corrélation négative entre CONS et le niveau moyen d’inflation. De plus, on trouve que la préférence relative pour la stabilisation de l’inflation a augmenté au cours de la décennie 1990 dans tous les pays candidats à l’Union économique et monétaire, conformément à leur convergence inhérente vers le modèle conservateur allemand. Enfin, le graphique n° 2 ci-après rapporte le degré de conservatisme avant l’adoption du ciblage d’inflation (axe des abscisses) et après l’adoption (axe des ordonnées), pour chaque pays de l’OCDE concerné. A l’exception de l’Australie et de la Suède, tous les pays sont au-dessus de la bissectrice (qui représente une situation inchangée entre avant et après l’adoption) : cela signifie que le degré de conservatisme, mesuré par CONS, a augmenté dans les pays qui ont adopté une stratégie de ciblage d’inflation. Cette première constatation va à présent faire l’objet d’examens économétriques approfondis.
Degré de conservatisme avant et après l’adoption du ciblage d’inflation
Degré de conservatisme avant et après l’adoption du ciblage d’inflation
Méthodologie et données
25Evaluer l’impact de l’adoption d’une politique publique ou d’une réforme sur l’évolution de variables économiques ou institutionnelles constitue une démarche empirique relativement délicate. En effet, cela suppose de savoir comment ces dernières auraient évolué en l’absence de l’adoption de la politique publique. Dans le cadre de notre étude, cela revient donc à se demander comment aurait évolué le degré de conservatisme des banques centrales au sein des pays cibleurs d’inflation si ces derniers n’avaient pas fait le choix d’adopter cette stratégie de politique monétaire. Or, cette évolution est par définition inobservable. Inversement, nous ne pouvons observer ce qu’aurait été le degré de conservatisme d’une autorité monétaire d’un pays non-cibleur d’inflation si ce dernier avait décidé d’adopter ce cadre de politique monétaire. A cela vient s’ajouter un possible biais de sélection, en ce sens que les banques centrales ayant fait le choix d’adopter le ciblage d’inflation sont certainement aussi celles qui affichaient un degré de conservatisme initialement plus élevé que les non-cibleurs.
26Ces difficultés justifient alors le choix fait par un grand nombre d’études empiriques récentes sur le ciblage d’inflation de recourir à la méthode d’appariement par score de propension, que ce soit pour évaluer l’impact de l’adoption de cette stratégie de politique monétaire sur les performances macroéconomiques (Vega et Winkelried [2005], Lin et Ye [2007, 2009, 2012], de Mendonça et de Guimarães e Souza [2012], Yamada [2013], Samarina et al. [2014]), sur la conduite de la politique budgétaire et fiscale (Lucotte [2012], Minea et Tapsoba [2014]), sur la volatilité du taux de change (Lin [2010]), ou encore sur l’évolution des prix de l’immobilier (Frappa et Mésonnier [2010]).
27Cette méthodologie, initialement proposée par Rubin [1977] et développée par la suite par Heckman et al. [1998], consiste dans le cadre de notre étude à apparier chaque pays cibleur d’inflation avec un pays « jumeau » non cibleur, c’est-à-dire ayant des caractéristiques économiques et institutionnelles proches, et à considérer la variable de résultat de ce dernier (ici, le degré de conservatisme de la banque centrale) comme le contrefactuel du résultat du pays cibleur. Ainsi, cet estimateur par appariement présente l’avantage de réduire le biais de sélectivité, en ce sens qu’il évite d’attribuer au ciblage d’inflation ce qui relève de caractéristiques intrinsèques aux deux populations, cibleurs et non-cibleurs. C’est principalement pour cette raison que nous avons fait le choix de retenir cette méthodologie pour évaluer l’impact de l’adoption du ciblage d’inflation sur le degré de conservatisme de l’autorité monétaire.
La méthode d’appariement par score de propension
28Comme introduit ci-dessus, la méthode d’appariement par score de propension consiste à apparier les pays cibleurs et non cibleurs d’inflation, et à comparer dans quelle mesure le degré de conservatisme des banques centrales au sein des pays cibleurs est statistiquement différent de celui observé au sein des non cibleurs. Cet appariement s’effectue sur la base d’un score de propension, qui apprécie la probabilité pour un pays à une période donnée d’être « traité » (cibleur d’inflation) ou « non traité » (non cibleur d’inflation), conditionnellement à un ensemble de caractéristiques observables. Ainsi, l’adoption du ciblage d’inflation est représentée par une variable binaire, également appelée variable de « traitement », qui prend la valeur 1 si un pays poursuit une stratégie de ciblage d’inflation et 0 autrement. La probabilité pour un pays d’être « traité » ou « non traité » peut donc être notée :
30Avec CI la variable binaire de ciblage d’inflation et X l’ensemble des covariables observables considérées, qui correspondent, entre autres, aux prérequis de ce cadre de politique monétaire. Le score de propension P(X) est estimé à l’aide d’un modèle à choix qualitatif binaire (probit ou logit) sur données « empilées » (pooled data), ce qui signifie qu’un même pays peut être considéré comme « traité » ou « non traité » sur la période d’étude, le passage du statut de « traité » au statut de « non traité » correspondant à l’adoption du ciblage d’inflation.
31Une fois estimés les scores de propension pour chaque observation de notre échantillon, l’effet du « traitement » peut être apprécié en appariant chacune des observations « traitées » avec une ou plusieurs observations « non traitées » affichant un score de propension semblable, et de considérer la variable de résultat de ces dernières comme le contrefactuel de l’observation « traitée ». C’est-à-dire, en d’autres termes, le résultat qui aurait été observé si le pays cibleur d’inflation en question avait fait le choix de ne pas adopter cette stratégie de politique monétaire. L’estimateur par appariement est alors égal à la moyenne des écarts entre les variables de résultat des observations « traitées » et de leur(s) contrefactuel(s) respectifs [9].
32Formellement, l’effet moyen du traitement sur les traités s’écrit comme suit :
34où YT|CI = 1 représente le degré de conservatisme de la banque centrale au sein d’un pays poursuivant une stratégie de ciblage de l’inflation, et YC|CI = 0 le degré observé au sein du ou des contrefactuel(s). Une différence positive et statistiquement significative indiquera alors que l’adoption du ciblage d’inflation a effectivement eu pour effet de renforcer le degré de conservatisme des banques centrales, comparativement au(x) contrefactuel(s), c’est-à-dire à la fois aux pays non cibleurs, mais également aux périodes précédant l’adoption du ciblage d’inflation.
35La validité empirique de l’appariement par score de propension repose toutefois sur deux hypothèses fondamentales qui sont l’hypothèse d’indépendance conditionnelle et la condition de support commun des scores de propension. En pratique, le respect de l’hypothèse d’indépendance conditionnelle implique de prendre en considération dans le modèle probit (ou logit) l’ensemble des variables affectant à la fois la variable de résultat et la variable de traitement. La seconde hypothèse implique, quant à elle, paradoxalement que le modèle probit servant à l’estimation des scores de propension ne soit pas trop « bon » (Brodaty et al. [2007]), sans quoi il serait impossible de trouver un contrefactuel pour les observations traitées [10].
Données
36La présente étude couvre la période 1980-1998 et porte sur l’ensemble des pays de l’OCDE. Le choix de cette période d’étude s’explique principalement par le fait qu’un grand nombre de pays de l’OCDE ont intégré la zone euro le 1er janvier 1999, confiant la conduite de leur politique monétaire à la Banque centrale européenne (BCE). Parmi les 34 pays de l’OCDE considérés, 12 avaient fait le choix d’adopter une stratégie de ciblage d’inflation avant 1999 (cf. tableau n° 1).
Liste des pays de l’échantillon et dates d’adoption du ciblage d’inflation
Liste des pays de l’échantillon et dates d’adoption du ciblage d’inflation
37Concernant la variable de résultat, ici le degré de conservatisme des banques centrales, l’approche économétrique retenue exige un nombre relativement conséquent d’observations. Pour cette raison, nous recalculons CONS en fréquence annuelle à partir des variances et calculées sur des fenêtres quinquennales glissantes. Ainsi, par exemple, la valeur affichée de CONS en 1992 est-elle calculée à partir des variances de l’inflation et de l’output sur la période 1988 :Q1 – 1992 :Q4. Retenir une période de 5 ans comme le font Levieuge et Lucotte [2013] a plusieurs justifications. D’abord, cela permet de lisser l’indicateur de conservatisme, qui n’est pas censé fluctuer de manière importante d’une année sur l’autre. De plus, cela permet d’amenuiser d’éventuels écarts temporaires à l’optimalité. En effet, quelles qu’en soient les raisons, une banque centrale peut être amenée à conduire temporairement une politique monétaire sous-optimale (c’est-à-dire ne plus être sur sa courbe de Taylor).
38Le graphique n° 3 conduit à deux types de comparaison. L’histogramme de gauche se concentre uniquement sur les pays cibleurs, en comparant le degré moyen de conservatisme des banques centrales au sein de ces pays cibleurs d’inflation entre la période pré-adoption et la période post-adoption. L’histogramme de droite compare, quant à lui, le degré moyen de conservatisme post-adoption entre les pays cibleurs et non cibleurs d’inflation. Pour cela, nous nous basons sur la suggestion de Ball et Sheridan [2003], qui consiste à définir pour les pays non cibleurs une date fictive d’adoption du ciblage d’inflation correspondant à la moyenne des dates d’adoption des pays cibleurs. Cette date correspond à l’année 1993 dans le cas des pays de l’OCDE. Ce graphique permet de mettre en évidence un impact relativement marqué de l’adoption du ciblage d’inflation sur les préférences des banques centrales des pays considérés, dont le degré de conservatisme augmente fortement au cours de la période suivant l’adoption de ce régime monétaire, et reste supérieur à celui des pays non cibleurs.
Degré de conservatisme des banques centrales : une comparaison pré versus post-ciblage d’inflation et pays cibleurs versus non cibleurs d’inflation
Degré de conservatisme des banques centrales : une comparaison pré versus post-ciblage d’inflation et pays cibleurs versus non cibleurs d’inflation
39Enfin, les autres variables du modèle sont les variables de conditionnement intervenant dans l’estimation du modèle de probabilité servant à estimer les scores de propension. Il s’agit donc ici de l’ensemble des variables économiques et institutionnelles susceptibles d’influencer l’adoption du ciblage d’inflation. Le choix de ces variables est orienté par des considérations théoriques, mais également par les résultats des différents travaux empiriques ayant cherché à étudier les déterminants de l’adoption du ciblage de l’inflation (voir, par exemple, Truman [2003] et Samarina et de Haan [2013]). Rappelons de plus que le choix des covariables pour l’estimation du modèle de probabilité n’a pas pour objectif de fournir une prédiction parfaite de l’adoption du ciblage d’inflation. Ce qui importe ici est de retenir un ensemble de variables de conditionnement permettant d’obtenir une fenêtre de support commun des observations « traitées » et « non traitées » suffisamment large et surtout de satisfaire l’hypothèse d’indépendance conditionnelle. Ainsi, s’il n’est pas essentiel d’introduire dans le modèle à estimer l’ensemble des variables pouvant théoriquement expliquer l’adoption d’une stratégie de ciblage de l’inflation, il est cependant primordial d’inclure les variables censées affecter à la fois l’indicateur de résultat (ici, le degré de conservatisme) et la variable de traitement (ici, le ciblage d’inflation).
40Partant de cela, nous avons fait le choix dans le cadre de cette étude de retenir six variables de conditionnement. Cinq de ces variables renvoient aux préconditions économiques et institutionnelles théoriquement requises pour l’adoption du ciblage d’inflation. Ces variables sont le taux d’inflation retardé d’une période [11], le degré de flexibilité de facto du régime de change, le degré d’indépendance de la banque centrale, le niveau de développement financier mesuré à l’aide du ratio crédit domestique au secteur privé sur PIB, ainsi que le niveau de dette publique en pourcentage du PIB (fourni par Abbas et al. [2010]). La flexibilité du régime de change est mesurée à l’aide de l’indicateur proposé par Reinhart et Rogoff [2004], tandis que l’indépendance de l’autorité monétaire est évaluée à l’aide des données fournies par Arnone et al. [2009], qui se basent sur l’indicateur d’indépendance développé par Grilli et al. [1991]. D’après les résultats de la littérature, nous escomptons un effet négatif de l’inflation et de la dette publique sur la probabilité d’adoption du ciblage d’inflation, tandis que les trois autres variables sont censées agir positivement sur cette probabilité.
41Enfin, dans la lignée des arguments avancés par Lin et Ye [2007, 2009], nous considérons également comme variable de conditionnement le degré d’ouverture commerciale, mesuré par la somme des exportations et des importations en pourcentage du PIB. D’après ces auteurs, cette variable vise à refléter la « peur du flottement » des pays émergents, et donc leur probable prudence à l’égard du régime de changes flottants que requiert théoriquement le cadre de ciblage d’inflation. En effet, plus une économie est ouverte sur l’extérieur, plus les fluctuations du taux de change risquent de se répercuter sur le niveau général des prix, ce qui implique une plus grande difficulté des autorités monétaires à atteindre la cible d’inflation annoncée. Nous pouvons donc théoriquement nous attendre à un effet négatif du degré d’ouverture commerciale sur la probabilité d’adoption du ciblage d’inflation. En outre, si le degré d’ouverture de l’économie est négativement corrélé à l’inflation (Romer [1993]), il devrait également l’être avec le degré de conservatisme, comme le montrent d’ailleurs théoriquement Eijffinger et al. [2000], d’où l’importance de le prendre en compte pour satisfaire l’hypothèse d’indépendance conditionnelle.
Résultats
Résultats des estimations
42Le processus d’estimation de l’effet moyen du traitement sur les traités comprend quatre étapes [12]. La première consiste à estimer les scores de propension en s’appuyant sur les variables de conditionnement considérées. Pour cela, nous avons fait le choix de retenir un modèle probit [13]. Les résultats des estimations de ce modèle sont reportés dans la colonne (1) du tableau n° 4 en annexe. Nous pouvons observer que l’inflation, la flexibilité du régime de change et l’indépendance de la banque centrale ont le signe attendu et sont significatives aux seuils de risque usuels.
43Une fois les scores de propension estimés, la deuxième étape consiste à déterminer la région de support commun des densités des scores de propension des deux groupes de pays (cibleurs et non cibleurs d’inflation) à l’intérieur de laquelle sera calculé l’effet moyen du traitement sur les traités. Bien qu’arbitraire, cette étape est importante car elle évite d’apparier des observations traitées et non traitées dont les scores de propension respectifs sont relativement éloignés. Différentes techniques permettant de choisir la zone de support commun ont été développées dans la littérature. Parmi celles-ci, nous avons fait le choix de nous appuyer sur la méthode « min-max » développée par Dehejia et Wahba [1999], et couramment employée dans la littérature. Cette méthode consiste à supprimer les observations non traitées dont le score de propension est inférieur au minimum du score des observations traitées, ainsi que les observations traitées dont le score de propension est supérieur au maximum du score des observations non traitées.
44La troisième étape est celle de l’estimation à proprement parler. L’effet moyen du traitement sur les traités, c’est-à-dire ici l’effet moyen de l’adoption du ciblage d’inflation sur le degré de conservatisme des banques centrales ayant adopté ce cadre de politique monétaire, peut être mesuré en mobilisant différentes méthodologies d’appariement. Le choix de l’une ou l’autre de ces méthodologies peut sensiblement modifier les résultats obtenus. Pour cette raison, les travaux s’appuient généralement sur différents algorithmes d’appariement pour estimer l’effet du traitement. Nous avons fait le choix d’en retenir quatre [14] : (i) l’estimateur du plus proche voisin, qui consiste à apparier chaque observation traitée avec l’observation non traitée qui présente le score de propension le plus proche ; (ii) l’estimateur des N plus proche(s) voisin(s), qui vise à élargir le nombre d’observations non traitées servant à construire le contrefactuel en considérant cette fois-ci non plus le plus proche voisin, mais les N observations non traitées les plus proches en termes de score de propension de l’observation traitée considérée, avec ici N = {3 ; 5} ; (iii) l’estimateur par la méthode du rayon (radius matching), qui consiste à apparier chaque observation traitée avec un ensemble d’observations non traitées comprises dans un rayon donné r, avec ici r = {0.01 ; 0.02 ; 0.04} ; et, (iv) l’estimateur à noyau (kernel matching) proposé par Heckman et al. [1998], qui consiste à retenir pour la construction du contrefactuel l’ensemble des observations non traitées appartenant au support commun, chaque observation non traitée étant pondérée de manière décroissante selon sa distance à l’observation traitée considérée.
45Enfin, la dernière étape consiste à calculer l’écart-type permettant d’apprécier la significativité statistique de l’effet moyen du traitement sur les traités. Lechner [2002] propose d’utiliser la technique du bootstrap. Cette dernière consiste à répliquer l’ensemble de la procédure d’estimation (estimation des scores de propension, détermination du support commun, et appariement) sur un échantillon tiré aléatoirement avec remise dans l’échantillon initial, et à déterminer l’écart-type de la distribution de l’ensemble des estimateurs ainsi obtenus. Le nombre de réplications retenu ici est de 1000. Les résultats de nos estimations pour les différentes méthodes d’appariement sont reportés dans le tableau n° 2.
46Comme nous pouvons le constater, les résultats obtenus viennent corroborer les statistiques descriptives du graphique n° 3, puisqu’il ressort des estimations que la conduite d’une politique de ciblage d’inflation a un impact positif et significatif sur le degré de conservatisme des banques centrales. En moyenne, cet impact est de l’ordre de 0.17 point de pourcentage. En d’autres termes, si on considère une fonction de perte quadratique standard (équation (1)), dans laquelle le poids de l’objectif de stabilisation de l’inflation est compris entre 0 et 1, on trouve que ce poids est en moyenne 0.17 point plus élevé pour les banques centrales poursuivant une stratégie de ciblage de l’inflation. Nos résultats apparaissent en outre peu sensibles à l’algorithme d’appariement retenu.
Impact moyen de l’adoption du ciblage d’inflation sur le degré de conservatisme des banques centrales
Impact moyen de l’adoption du ciblage d’inflation sur le degré de conservatisme des banques centrales
Note : les écarts-types bootstrappés sur la base de 1000 réplications apparaissent entre parenthèses. ***, **, * représentent respectivement la significativité au seuil de 1%, 5% et 10%.47Bien entendu, les résultats obtenus ne permettent en aucun cas de soutenir l’argument des opposants au ciblage d’inflation selon lequel les cibleurs d’inflation délaisseraient totalement l’objectif de stabilisation de l’activité économique. Ils permettent toutefois, dans une certaine mesure, d’éclaircir le débat idéologique entre opposants et partisans du ciblage d’inflation, en montrant que l’adoption de cette stratégie de politique monétaire n’a sans doute pas été sans conséquence sur l’évolution des préférences des banques centrales, les cibleurs d’inflation apparaissant comme relativement plus conservateurs que les non-cibleurs.
Tests de robustesse
48Comme pour toute méthodologie en plusieurs étapes, l’estimation de l’effet moyen du traitement sur les traités est fortement conditionnée par la spécification du modèle probit. Nous conduisons par conséquent plusieurs tests de robustesse visant à analyser la sensibilité de nos résultats à la spécification du modèle probit. Dans un premier temps, nous incluons dans le modèle probit initial le taux de croissance du PIB comme variable de conditionnement additionnelle. En effet, cette variable est généralement retenue par les études empiriques ayant cherché à identifier les déterminants de l’adoption du ciblage d’inflation. Par exemple, pour Truman [2003], la probabilité qu’un pays abandonne sa stratégie de politique monétaire au profit du ciblage d’inflation est d’autant plus forte que ses performances macroéconomiques sont moroses.
49Puis, nous testons la sensibilité de nos résultats à l’indicateur d’indépendance de la banque centrale employé. Pour cela, nous remplaçons l’indicateur d’indépendance précédemment utilisé par l’indicateur d’indépendance de jure développé par Cukierman et al. [1992], et actualisé pour un grand nombre de pays par Crowe et Meade [2007]. Comme pour l’indicateur GMT (Grilli et al. [1991]), l’indicateur CWN est basé sur l’analyse des statuts des banques centrales. Il est compris entre 0 et 1, une valeur faible indiquant une faible indépendance statutaire de l’autorité monétaire.
50Enfin, dans le but de satisfaire l’hypothèse d’indépendance conditionnelle, nous incluons dans le modèle probit initial des variables de conditionnement additionnelles pouvant théoriquement affecter à la fois la variable de résultat (degré de conservatisme des banques centrales) et la variable de traitement (poursuite d’une stratégie de ciblage d’inflation). Les variables considérées ici sont la variance des chocs d’offre et de demande, ainsi que le solde public structurel, censé traduire les préférences du gouvernement. Ces variables constituent des déterminants potentiels de l’adoption du ciblage d’inflation, mais, surtout, elles peuvent influencer notre indicateur de conservatisme en jouant sur la position d’un pays dans le plan , au-delà de la seule volonté des autorités monétaires. Les chocs conjoncturels sont identifiés suivant la procédure proposée par Blanchard et Quah [1999] à partir de modèles VAR bivariés [15]. Le solde public structurel (en % du PIB) est, quant à lui, extrait des statistiques fournies par l’OCDE [16].
51Les résultats des estimations probit, dont le caractère est purement informatif, sont reportés dans le tableau n° 4 en annexe (colonnes 2 à 5). Parmi les variables de conditionnement additionnelles retenues, seules la variance des chocs de demande et le solde budgétaire structurel ne sont pas statistiquement significatifs. Plus important, les modifications dans la spécification du modèle probit n’ont globalement pas impacté les résultats de l’effet moyen du traitement sur les traités. Comme nous pouvons l’observer dans le tableau n° 3, nous retrouvons en effet un impact positif et significatif de l’adoption du ciblage d’inflation sur le degré de conservatisme des banques centrales.
Impact moyen de l’adoption du ciblage d’inflation sur le degré de conservatisme des banques centrales – Tests de robustesse
Impact moyen de l’adoption du ciblage d’inflation sur le degré de conservatisme des banques centrales – Tests de robustesse
Note : les écarts-types bootstrappés sur la base de 1000 réplications apparaissent entre parenthèses. ***, **, * représentent respectivement la significativité au seuil de 1%, 5% et 10%.52Cet article s’inscrit dans le débat qui anime économistes et praticiens depuis une vingtaine d’années au sujet de la hiérarchisation des objectifs des banques centrales ayant adopté le ciblage d’inflation. Un tel régime de politique monétaire conduit-il les banques centrales à se concentrer davantage que les non-cibleurs sur l’objectif de stabilité des prix ?
53Pour répondre à cette question, nous adoptons une approche originale qui consiste à utiliser l’indicateur de conservatisme proposé par Levieuge et Lucotte [2013], théoriquement fondé sur la courbe de Taylor. Nous nous appuyons sur cette mesure pour déterminer, à l’aide de la méthode d’appariement par score de propension, si les cibleurs d’inflation ont une préférence relative pour l’objectif d’inflation significativement plus élevée que les non-cibleurs.
54Si l’on considère une fonction de perte quadratique standard, dans laquelle le poids de l’objectif de stabilisation de l’inflation est compris entre 0 et 1 (le complémentaire à l’unité étant affecté à l’objectif de stabilisation de l’output), on trouve que ce poids est de 0.11 à 0.21 point plus élevé chez les cibleurs d’inflation. La différence est économétriquement significative et robuste. Nos estimations conduisent donc à accepter l’hypothèse selon laquelle les cibleurs d’inflation sont plus conservateurs que les autres [17].
55Ce résultat appelle au moins deux commentaires. D’une part, le contexte conjoncturel depuis 2007 montre clairement que, contrairement à une croyance jusqu’alors largement répandue, la stabilité des prix ne garantit pas la stabilité de l’activité économique. Un plus fort degré de conservatisme en l’absence de cette « divine coïncidence » devrait avoir un coût sur l’activité économique. Nos résultats appellent à cet égard un réexamen des performances du ciblage d’inflation en termes d’activité économique et de chômage, par le biais de l’étude du lien entre degré de conservatisme et stabilité macroéconomique.
56D’autre part, nos résultats amènent à conclure que le régime de politique monétaire, et le ciblage d’inflation en particulier, ne sont pas neutres sur l’arbitrage entre les objectifs poursuivis par les banques centrales. C’est un point important à retenir dans la perspective de confier aux banques centrales un objectif supplémentaire ayant trait à la stabilité financière. Les banques centrales cibleuses d’inflation pourraient être moins que les autres enclines à ménager la stabilité financière en cas de conflit avec l’objectif de stabilité des prix. L’étude de la relation entre degré de conservatisme et (in)stabilité financière constitue dans cette optique un prolongement évident de cette recherche. La crise financière offre à cet égard un cadre d’étude opportun.
Estimations probit des scores de propension
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Notes
-
[1]
L’Espagne, la Finlande et la Slovaquie s’étaient également ralliées au ciblage d’inflation avant d’adopter l’euro.
-
[2]
Cf. Ball [2010], Lin et Ye [2007], Mishkin et Schmidt-Hebbel [2007].
-
[3]
En effet, pourvu que l’engagement soit crédible et l’horizon de ciblage suffisamment lointain, Svensson [2010] rappelle qu’une stratégie de ciblage d’inflation offre une marge discrétionnaire aux autorités monétaires, tout en conservant le caractère coercitif d’une règle, dans la mesure où la banque centrale doit rendre des comptes publiquement sur la réalisation de l’objectif d’inflation qui lui est assigné. C’est en ce sens que Bernanke et Mishkin [1997] qualifient le ciblage d’inflation de « discrétion contrainte ».
-
[4]
En extension à ce travail, il sera possible par la suite d’étudier le lien entre degré de conservatisme et performances macroéconomiques.
-
[5]
Les articles faisant exception sont : Ozlale [2003], Cecchetti et Ehrmann [2002], Krause et Méndez [2005], Dennis [2006], Favero et Rovelli [2003], Castelnuovo et Surico [2003, 2004], Tachibana [2004], Levieuge et Penot [2009].
-
[6]
On peut penser à la mise en place d’une politique de désinflation, l’adoption d’une stratégie de ciblage d’inflation, ou encore aux réformes visant à renforcer l’indépendance des banques centrales.
-
[7]
En toute rigueur, il faudrait parler de degré d’aversion des autorités monétaires à l’inflation. Toutefois, Levieuge et Lucotte [2013] montrent qu’il est acceptable de considérer que le degré d’aversion des autorités monétaires à l’inflation est supérieur à celui de la société.
-
[8]
Il est également montré que l’indicateur CONS est fortement corrélé avec l’indicateur proposé par Krause et Méndez [2005], excepté pour la période 1980-1985, au cours de laquelle le modèle utilisé par ces derniers est inapproprié ; en effet, les régimes d’encadrement du crédit, d’ancrage de change, ou de ciblage monétaire prévalant à l’époque ne sauraient être correctement traduits par la règle de taux d’intérêt considérée par Krause et Méndez. A contrario, l’indicateur CONS est valide quels que soient le régime de politique monétaire et la structure implicite des économies ; il est toujours possible d’observer le couple à un moment, et d’en inférer les préférences relatives des autorités monétaires.
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[9]
Comme nous le verrons dans la section suivante, plusieurs algorithmes d’appariement ont été développés par la littérature économétrique et certains d’entre eux suggèrent de retenir plusieurs observations contrefactuelles pour chaque observation traitée.
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[10]
Voir notamment Brodaty et al. [2007], Caliendo et Kopeinig [2008], et Fougère [2010] pour une présentation détaillée de ces deux hypothèses.
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[11]
Le taux d’inflation est retardé d’une période afin de prendre en compte un possible biais d’endogénéité, lié au fait que l’adoption du ciblage d’inflation a certainement eu un impact sur les performances d’inflation des pays concernés.
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[12]
Voir notamment Caliendo et Kopeinig [2008] et Khandker et al. [2010] pour une présentation détaillée des étapes de l’estimation.
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[13]
A noter qu’il n’existe pas de justification théorique concernant le choix d’un modèle discret. D’après Caliendo et Kopeinig [2008], les modèles probit et logit produisent sensiblement les mêmes résultats, et jouent donc très peu sur l’appariement.
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[14]
Voir notamment Caliendo et Kopeinig [2008] pour de plus amples détails sur les différents algorithmes d’appariement utilisés dans le cadre de cette étude.
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[15]
Tous les détails figurent dans Levieuge et Lucotte [2013].
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[16]
A noter toutefois que les données sur le solde public structurel ne sont pas disponibles pour quatre économies de notre échantillon, à savoir le Chili, le Mexique, la Slovaquie et, la Turquie.
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[17]
Notre étude ne permet toutefois pas de déterminer si c’est la stratégie de ciblage d’inflation qui oblige le banquier central à se montrer plus conservateur, ou bien si les autorités politiques ont tendance à nommer un banquier central particulièrement conservateur dès lors que le régime de politique monétaire répond au ciblage d’inflation.