Couverture de RFDC_118

Article de revue

Le statut juridique des territoires non incorporés et (non) organisés des États-Unis

Pages 409 à 431

Notes

  • [1]
    V. sur cette question en général : T. Fleury Graff, La question du territoire aux États-Unis de 1789 à 1914. Apports pour la construction du droit international, Pedone, 2013.
  • [2]
    A/RES/66 (1) du 14 décembre 1946.
  • [3]
    Pour des facilités de langage, sauf précisions contraires, nous utiliserons le gentilé « américain » pour désigner non pas les habitants des Amériques, mais ceux des États-Unis.
  • [4]
    « 1. De nouveaux États peuvent être admis par le Congrès dans l’Union ; mais aucun nouvel État ne sera formé ou érigé sur le territoire soumis à la juridiction d’un autre État, ni aucun État formé par la jonction de deux ou de plusieurs États, ou parties d’État, sans le consentement des législatures des États intéressés, aussi bien que du Congrès.
    2. Le Congrès aura le pouvoir de disposer du territoire ou de toute autre propriété appartenant aux États-Unis, et de faire à leur égard toutes lois et tous règlements nécessaires ; et aucune disposition de la présente Constitution ne sera interprétée de manière à porter préjudice aux revendications des États-Unis ou d’un État particulier ».
  • [5]
    O. Beaud a fait cependant remarquer que ces territoires d’outre-mer devaient être distingués de ceux qui sont prévus par la Constitution de 1787. Les seconds avaient vocation à être intégrés à la Fédération quand les premiers sont, destinés à demeurer des « dépendances » (Théorie de la Fédération, Puf, Léviathan, 2007, p. 253).
  • [6]
    M.-F. Toinet, Le système politique des États-Unis, Puf, 1987, p. 2.
  • [7]
    Les premières affaires portant sur cette question sont : De Lima v. Bidwell, 182 U.S. 1 (1901) ; Downes v. Bidwell, 182 U.S. 244 (1901) ; Dooley v. United States, 182 U.S. 222 (1901) et Armstrong v. United States, 182 U.S. 243 (1901). V. également sur l’établissement de la distinction territoires incorporés/territoires non incorporés : A. H. Leibowitz, Defining Status. A Comprehensive Analysis of United States Territorial Relations, Martinus Nijhiff Publishers, 1989, p. 185.
  • [8]
    A. Mérignhac, « La paix hispano-américaine », RDP, 1901, no 1, p. 329-363.
  • [9]
    United States General Accounting Office, U.S. Insular Areas. Applicability of U.S. Constitution, OGC-98-5, 7 november 1997, p. 7.
  • [10]
    Convention in Respect to the Samoan Group of Islands, dec. 2, 1899.
  • [11]
    48 U.S.C. § 1661.
  • [12]
    A/RES/66 (1), op. cit.
  • [13]
    Covenant to Establish a Commonwealth of Northern Mariana Islands in Political Union With the United States of America, Pub. L. 94-241, § 1, Mar. 24, 1976, 90 Stat. 263 ; United States General Accounting Office, U.S. Insular Areas. Applicability of Relevant Provisions of the U.S. Constitution, HRD-91-18, 20 june 1991, p. 62.
  • [14]
    48 U.S.C. ch. 8, § 1411-1419. Tous les territoires inhabités, à l’exception de l’Atoll Wake, ont été revendiqués et rattachés aux États-Unis en application de la loi sur le guano.
  • [15]
    Le guano est un amas de fiente de chauves-souris et d’oiseaux marins. Par sa grande concentration en composés organiques, il est souvent utilisé comme un engrais efficace, un fertilisant de sols. Au début du xxe siècle, cette substance a également été exploitée dans la possession française de l’île de Clipperton et a été à l’origine d’importantes fortunes.
  • [16]
    48 U.S.C. § 1419.
  • [17]
    Elle a été amenée à se prononcer sur certaines questions nouvelles comme celles de savoir si les habitants des nouveaux territoires devaient être considérés comme des citoyens américains à part entière, et partant subir les lois tarifaires des États-Unis (v. affaires : De Lima v. Bidwell ; Downes v. Bidwell ; Dooley v. United States et Armstrong v. United States, déjà citées). Elle a également dû se prononcer sur l’applicabilité de certaines dispositions constitutionnelles aux territoires non incorporés (Hawaii v. Manikichi, 190 U.S. 197 (1903) ; Dorr v. United States, 195 U.S. 138 (1904) ; Ocampo v. United States, 234 U.S. 91 (1914) ou Balzac v. Porto Rico, 258 U.S. 298 (1922)).
  • [18]
    Ils relèvent pleinement des États-Unis et sont régis par une loi organique. En cela, ils se distinguent des États fédérés bien que la plupart aient intégré l’Union après avoir été pendant longtemps des territoires incorporés et organisés. Un tel statut constitue donc l’antichambre de celui d’État fédéré.
  • [19]
    Ils ne font pas parties de l’Union mais en appliquent la Constitution. Rentrent dans cette catégorie : Guam, Porto Rico, le CNMI et les Îles Vierges des États-Unis.
  • [20]
    Ils ne font pas parties de l’Union dont ils n’en appliquent que très partiellement la Constitution. Rentrent dans cette catégorie : Samoa américaines, Îles Baker, Îles Jarvis, Atoll Johnston, Récif Kingman, Île Howland, Îles Midway, Île de la Navasse et Atoll Wake.
  • [21]
    Ils appliquent entièrement la Constitution des États-Unis bien qu’aucune loi du Congrès ne prévoie leur mode d’organisation. À l’exception de l’Atoll Palmyra, cette catégorie a disparu.
  • [22]
    L’Île Wake n’est habitée que par une centaine de personnes – essentiellement militaires – et est utilisée à des fins militaires par les États-Unis depuis 1941.
  • [23]
    J. W. Pratt, Expansionists of 1898, Baltimore, 1936 ; F. H. Harrington, « The Anti-Imperialist movement in the U.S. », Mississipi Valley Historical Review, vol. 22, 1935, p. 211-230 ; S. Lens, The Forging of the American Empire. From the Revolution to Vietnam : A History of US Imperialism (1971), Chicago, Haymarket Books, 2003.
  • [24]
    G. Fischer par exemple assimile d’abord les deux termes dans les cas de Porto Rico et du CNMI avant de montrer que juridiquement, les deux notions recouvrent des réalités différentes (« Le Commonwealth de Porto Rico et les États-Unis », Revue juridique et politique de l’Union française, 1954, p. 169-170).
  • [25]
    La Constitution de Porto Rico du 25 juillet 1952 parle d’« Estado libre asociado » quand celle du CNMI du 9 janvier 1978 et les États-Unis établit très officiellement un Commonwealth en union politique avec les États-Unis.
  • [26]
    G. Fischer, art. cit., p. 169.
  • [27]
    Ibid.
  • [28]
    Ch. Rousseau, Le Commonwealth dans les relations internationales, Fascicule I, Les cours de droit, 1963-1964, p. 5-6.
  • [29]
    Cela est d’autant plus vrai que le terme commonwealth est même utilisé dans les noms officiels de certains États américains (Kentucky, Massachusetts, Pennsylvanie et Virginie).
  • [30]
    G. Agniel, « Le Parlement et la Nouvelle-Calédonie : du droit à la bouderie »… à la délégation de souveraineté », RDP, 2012, p. 233.
  • [31]
    Ibid.
  • [32]
    Cette procédure ne doit pour autant pas être considérée comme un accord de volonté au sens du droit international dès lors que l’on n’est pas face à deux sujets de ce droit (le territoire concerné ne pouvant être considéré comme un État, faute d’en avoir tous les attributs). L’on est seulement, dans pareille situation, en face d’un accord régi par le droit américain et qui peut faire l’objet d’un contrôle de constitutionnalité. La Constitution portoricaine a été approuvée par le peuple le 4 juin 1951 par un instrument appelé « compact », quand celle du CNMI l’a été également été par le peuple le 17 juin 1975 à travers un « covenant » (G. Agniel, art. cit., p. 233).
  • [33]
    Sur ce concept en général : L. Havard, L’État associé : recherches sur une nouvelle forme de l’État dans le Pacifique Sud, PUAM, 2018, p. 49 sq.
  • [34]
    48 U.S.C. § 1801.
  • [35]
    Il s’agit des conséquences liées à la reconnaissance du statut d’État. Ces entités revendiquent le statut d’État libre associé alors même qu’elles n’ont pas obtenu, au préalable, tous les attributs juridiques d’un État puisqu’il leur manque, au moins, une autonomie gouvernementale.
  • [36]
    V. par exemple R. Emerson qui a soutenu que le statut d’État libre associé appliqué à Porto Rico n’avait qu’un effet symbolique si bien que, pour lui, Porto Rico continuera d’être un territoire non incorporé des États-Unis, appartenant à l’Union, mais sans en faire partie (« Puerto Rico and American Policy Toward Dependent Areas », The Annals of the American Academy of Political and Social Science, vol. 285, 1953, p. 10).
  • [37]
    Avec des fortunes diverses puisque le retrait de cette liste n’a eu lieu que pour Porto Rico (A/RES/748 (VIII) du 27 novembre 1953 qui parle de « D’État libre associé […] investi d’attributs de souveraineté politique qui indiquent clairement que le peuple portoricain s’administre lui-même en tant qu’entité politique autonome »), Guam y demeurant encore à ce jour.
  • [38]
    C. I. Keitner, M. W. Reisman, « Free Association : The United States Experience », Texas International Law Journal, vol. 39, no 1, p. 33.
  • [39]
    Dans une décision récente, la Cour suprême a été saisie afin de se prononcer sur le fait de savoir si des ressortissants portoricains accusés d’avoir commis des crimes, pouvaient faire l’objet d’une double poursuite pour le même comportement criminel à la fois à Porto Rico et aux États-Unis. La question qui se posait était celle de la souveraineté pénale de Porto Rico et partant, de sa souveraineté en général. Ainsi, le Commonwealth de Porto Rico et le gouvernement fédéral américain sont‑ils des souverains séparés aux fins de la double incrimination ? La Cour a répondu en suivant l’avis du Département d’État à la Justice intervenant en tant qu’amicus curiae en 2015 que, les territoires des États-Unis, y compris Porto Rico, ne sont pas des souverains distincts des États-Unis. Autrement dit, Porto Rico ne pourrait être souverain que s’il devenait un État ou une nation indépendante. Sur le fond, la Cour conclut qu’une personne ne peut être poursuivie à Porto Rico et aux États-Unis pour le même comportement en vertu de lois pénales équivalentes (Commonwealth of Puerto Rico v. Sanchez Valle et al., U.S. 579, no 15-108 (2016)).
  • [40]
    L. Havard, op. cit., p. 46, 322-323.
  • [41]
    L. Adam, « Le concept de micro-État : États lilliputiens ou parodies d’États ? », Revue internationale de politique comparée, vol. 2, no 3, 1995, p. 577-592.
  • [42]
    48 U.S.C. § 1662a prévoit que le Congrès seul peut apporter des amendements à la Constitution samoane, quand le paragraphe 1662 précise que le territoire est sous la souveraineté des États-Unis.
  • [43]
    48 U.S.C. § 1541a.
  • [44]
    United States v. Verdugo-Urquidez, 494 U.S. 259, 268-269 (1990).
  • [45]
    A. H. Leibowitz, op. cit., p. 185-186 ; D. K. Watson, « Acquisition and Government Of National Domain », Am. L. Rev., vol. 41, no 2, 1907, p. 253 précise que la Constitution américaine ne s’applique à ces territoires que par la seule volonté du Congrès.
  • [46]
    Voyons les définitions officielles données par le U.S. Office of Insular Affairs : « Incorporated territory : Equivalent to Territory, a United States insular area, of which only one territory exists currently, Palmyra Atoll, in which the United States Congress has applied the full corpus of the United States Constitution as it applies in the several States. Incorporation is interpreted as a perpetual state. Once incorporated, the Territory can no longer be de-incorporated » ; « Unincorporated territory : A United States insular area in which the United States Congress has determined that only selected parts of the United States Constitution apply » : https://www.doi.gov/oia/islands/politicatypes.
  • [47]
    Downes v. Bidwell, 182 U.S. 244, 290-291 (1901)
  • [48]
    Ibid.
  • [49]
    Ibid.
  • [50]
    A. H. Leibowitz, op. cit., p. 185.
  • [51]
    La Cour suprême ne définit toutefois pas les parties de la constitution qui établissent ces droits fondamentaux. V. Reid v. Covert, 354 U.S. 1, 13 (1957).
  • [52]
    Dorr v. United States, 195 U.S. 138, 147 (1904) ; Downes v. Bidwell, 182 U.S. 244, 282-83 (1901).
  • [53]
    V. pour l’application du quatrième amendement au CNMI : Covenant to Establish a Commonwealth of the Northern Mariana Islands in Political Union with the United States of America, § 501(a), 48 U.S.C. § 1801 note ; aux Îles Vierges : 48 U.S.C. § 1561 ; aux Îles Samoa américaines : Revised Constitution of American Samoa, 1967, art. I, § 5 ; à Guam : 48 U.S.C. § 1421b(c), (u). V. pour l’application du cinquième amendement notamment à Porto Rico : Commonwealth of Puerto Rico v. Sanchez Valle et al., op. cit.
  • [54]
    Balzac v. United States, 258 U.S. 298 (1922).
  • [55]
    Puerto Rico v. Shell Oil Co., 302 U.S. 253 (1937).
  • [56]
    Feliciano v. Barcelo, 497 F. Supp. 14 (D. P.R. 1979).
  • [57]
    Eisentrager v. Forrestal, 174 F.2d 961 (D.C. Cir. 1949), rev’d, 339 U.S. 763 (1950).
  • [58]
    Fernandez v. Chardon, 681 F.2d 42 (1st Cir. 1982).
  • [59]
    Dorr v. United States, 195 U.S. 138, 147 (1904).
  • [60]
    Downes v. Bidwell, 182 U.S. 244, 282 (1901).
  • [61]
    To provide for the organization of a constitutional government by the people of Puerto Rico, July 3, 1950, ch. 446, 64 Stat. 319.
  • [62]
    Ces appellations restent curieuses car elles cachent les intentions des législateurs américains qui étaient de restreindre la possibilité théorique des peuples de manifester leur volonté. Dans ce sens : G. Fischer, art. cit., p. 179.
  • [63]
    Dans le même sens : D. Custos, « Relation d’adjonction. Comparaisons : Porto-Rico », in J.‑F. Faberon, V. Fayaud, J.‑M. Regnault, Destins des collectivités territoriales d’Océanie. Peuples, populations, nations, États, territoires, pays, patries, communautés, frontières, vol. 1 : Théories et pratiques, PUAM, 2011, p. 322.
  • [64]
    V. en ce sens, les cas de Guam et des Îles Vierges américaines. Le premier a connu plusieurs projets constitutionnels rejetés notamment en 1979 et 1982 et est actuellement régi par une loi organique du 1er août 1950. Sur ces questions : P. Lansing, P. Hipolito, « Guam’s Quest for Commonwealth Status », Asian Pac. Am. L.J., vol. 4, no 1, 1998, p. 122-148. Le second également a connu de nombreux échecs dans son projet d’adoption d’une constitution. Il est également régi par une loi organique du 28 juillet 1954.
  • [65]
    Ces territoires étant souvent des propriétés privées inhabitées et administrées par des Agences d’État américaines.
  • [66]
    Celle‑ci ne peut être modifiée que par un acte du Congrès : 48 U.S.C. § 1662a.
  • [67]
    Dans ces actes les États-Unis se sont engagés à promouvoir la paix, le bien-être et un gouvernement qui préserve les droits des autochtones : United States General Accounting Office, American Samoa. Issues Associated with Some Federal Court Options, GAO-08-1124T, sept. 18, 2008, 1997, p. 4-5.
  • [68]
    Ibid., p. 5.
  • [69]
    Sur ces questions historiques : A. H. Leibowitz, « American Samoa : Decline of a Culture », Cal. W. Int’l L.J., vol. 10, 1980, p. 251-256.
  • [70]
    Ce critère est capital car il permet de distinguer les petits territoires non incorporés et non organisés qui sont inhabités et qui dépendent juridiquement du droit américain, des Samoa américaines (qui sont peuplées). La définition traditionnelle des territoires non incorporés et non organisés, parce qu’elle va du principe que tous ces territoires sont habités, ne semblent pas être applicable à ces territoires lorsqu’ils sont inhabités.
  • [71]
    A. Hage, « Relation d’adjonction. Guam et les Mariannes du Nord : adjonctions divergentes », in J.‑F. Faberon, V. Fayaud, J.‑M. Regnault, op. cit., p. 299-308 ; D. Custos, art. cit., p. 319-328. V. également dans une moindre mesure : L. A. McKibben, « The political relationship between the United States and Pacific Islands Entities : The path to self-government in the Northern Mariana Islands, Palau, and Guam », Harvard International Law Journal, vol. 31, 1990, p. 257-293.
  • [72]
    Constitution du Commonwealth de Porto Rico, 25 juillet 1952, préambule. Voyons également dans le même sens, la section I de l’art. 101 du Pacte établissant un Commonwealth des Îles Mariannes du Nord qui parle d’« union politique avec les États-Unis d’Amérique et sous leur souveraineté ».
  • [73]
    Ibid., art. 1, sect. 1.
  • [74]
    Revised Constitution of American Samoa, 1967, art. 5, sect. 6.
  • [75]
    G. Fischer, art. cit., p. 186.
  • [76]
    Cité par G. Fischer, ibid., p. 186.
  • [77]
    L’île constitue l’une des plus importantes bases militaires américaines dans le monde et constitue par sa localisation (elle est située à moins de 4 000 kilomètres en face de la péninsule coréenne et à la fois entre la Corée du Nord et les États-Unis), un avant-poste stratégique dans la guerre d’influence qui oppose les États-Unis à la Corée du Nord.
  • [78]
    Ce fut le cas à Porto Rico jusqu’en 1948. Il est désormais élu par le peuple de ces territoires incorporés depuis 1968 à Guam, 1969 aux Îles Vierges américaines, 1976 aux Îles Mariannes du Nord et 1978 aux Samoa américaines.
  • [79]
    Article 1, sect. 8.
  • [80]
    48 U.S.C. § 845.
  • [81]
    United States General Accounting Office, U.S. Insular Areas. Applicability of Relevant Provisions of the U.S. Constitution, op. cit.
  • [82]
    Covenant to Establish a Commonwealth of Northern Mariana Islands in Political Union with the United States of America, op. cit.
  • [83]
    L’Accord de libre-échange nord-américain apporte une atténuation à l’idée d’une indifférence du droit international vis‑à-vis des zones insulaires qu’il définit selon une approche extensive. Le territoire américain y est décrit dans un sens exclusivement douanier comme comprenant « les cinquante États, le District de Columbia et Porto Rico. […] Les régions s’étendant au‑delà des eaux territoriales des États-Unis et qui, […], sont des régions à l’égard desquelles les États-Unis sont habilités à exercer des droits pour ce qui concerne les fonds marins et leur sous-sol ainsi que leurs ressources naturelles » (art. 201, annexe 201.1). On observe également qu’un territoire comme Porto Rico fait partie de nombreuses institutions et organisations internationales. Il est membre associé à la FAO, à l’OMS, à l’OMT (Organisation mondiale du tourisme), de l’UPU (Union postale universelle), de la CEPALC (Commission économique pour l’Amérique latine et la Caraïbe) ; observateur auprès de la Caricom ; participe au CIO (Comité international olympique).
  • [84]
    D. Custos, art. cit., p. 324.
  • [85]
    Ibid.
  • [86]
    Ibid., p. 323.
  • [87]
    Dorr v. United States, 195 U.S. 138 (1904). La Cour a soutenu dans cette décision que le Congrès n’est pas tenu d’accorder aux ressortissants d’un territoire certains droits tant que celui‑ci ne fait pas partie de l’Union.
  • [88]
    Pub.L. 56-191, § 7, ch. 191, 31 Stat. 77, 79 (1900) ; 48 U.S.C. § 733.
  • [89]
    Pub.L. 64-68, chap. 190 39 Stat. 951 (1917).
  • [90]
    HR no 1365, 81st Congress, 1st Sess. 8 (1849).
  • [91]
    D. Custos, art. cit., p. 323, a constaté que la citoyenneté territoriale a un fondement législatif quand la citoyenneté fédérale repose sur la Constitution. La conséquence directe est que pour modifier la seconde, il faut amender la constitution de l’Union tandis qu’une simple loi suffirait pour modifier la première.
  • [92]
    Selon l’art. 8 U.S.C. § 1101 (a) (22), « Le terme “ressortissant des États-Unis” désigne un citoyen des États-Unis ou une personne qui, sans être citoyen des États-Unis, doit une allégeance permanente aux États-Unis ». V. également dans le sens de l’assimilation des deux termes : Conseil de l’Europe, Rapport explicatif de la Convention européenne sur la nationalité, STE no 166, 1997, § 23.
  • [93]
    Pour M.‑P. Lanfranchi, « Les notions de nationalité et citoyenneté interrogées par le droit international public », in M.‑P. Lanfranchi, O. Lecucq, D. Nazet-Allouche (dir.), Nationalité et citoyenneté : Perspectives de droit comparé, droit européen et droit international, Bruxelles, Bruylant, 2012, p. 49, « Les droits internes associent pour leur part en principe les deux termes sans les confondre, la nationalité de l’État emportant la citoyenneté : l’appartenance et l’identification au groupe emportent le droit de participer à la vie de la Cité ». V. également : F. Atcho, « Nationalité, citoyenneté dans le cas des États non reconnus », in P. Kovacs, J.‑D. Mouton (eds), « Citizenship in International Law / La Citoyenneté en droit international », The Centre for Studies and Research in International Law and International Relations, 2018, p. 223-262.
  • [94]
    J. Salmon, Dictionnaire de droit international, Bruxelles, Bruylant, 2001, p. 723.
  • [95]
    CPJI, Décrets de nationalité promulgués en Tunisie et au Maroc, avis consultatif du 7 février 1923, Recueil 1923, Série B, no 4, p. 24.
  • [96]
    P. Lagarde, « Les compétences de l’État en matière d’octroi et de déchéance de la nationalité », in SFDI, Droit international et nationalité, Pedone 2012, p. 81.
  • [97]
    Pour E. Lagrange, « La nationalité dans les organisations internationales », in SFDI, Droit international et nationalité, ibid., p. 233 : « La nationalité semble prima facie hors de portée des organisations internationales. Même lorsque l’organisation exerce sur un territoire un pouvoir d’administration ou de tutelle exclusif de celui de tout État, la collation de la nationalité n’entre pas dans ses compétences ».
  • [98]
    La loi concernait à l’origine le seul territoire de Porto Rico. Ses effets ont été étendus de nos jours à tous les territoires non incorporés.
  • [99]
    U.S. Const. art. II, § 1, cl. 3.
  • [100]
    « Chaque État désigne, de la manière prescrite par sa législature, un nombre d’électeurs égal au nombre total de sénateurs et de représentants auquel il a droit au Congrès, mais aucun sénateur ou représentant, ni aucune personne tenant des États-Unis une charge de confiance ou de profit, ne pourra être nommé électeur ».
  • [101]
    Attorney Gen. of Guam v. United States, 738 F2d 1017, 1019 (9th Cir. 1984), cert. denied, 469 U.S. 1209 (1985).
  • [102]
    De la Rosa v. United States, 842 F. Supp. 607, 608-609 (D.P.R. 1994).
  • [103]
    « Le district où se trouve établi le siège du gouvernement des États-Unis, désignera selon telle procédure que pourra déterminer le Congrès un nombre d’électeurs du président et du vice-président équivalant au nombre total des sénateurs et représentants au Congrès auquel ce district aurait droit s’il était constitué en État […] ».
  • [104]
    De la Rosa v. United States, op. cit., 608-609.
  • [105]
    Ibid.
  • [106]
    En réalité, il ne peut voter qu’en commission parlementaire et exercer un droit de parole en assemblée.
  • [107]
    Guam Code, Title III, ch. 7, § 7107.
  • [108]
    J.‑D. Mouton « La citoyenneté en droit international : un concept en voie d’autonomie ? », in P. Kovacs, J.‑D. Mouton (eds), op. cit., p. 81-128.
  • [109]
    Article 72-3 de la Constitution française : « La loi détermine le régime législatif et l’organisation particulière des Terres australes et antarctiques françaises et de Clipperton. »

1 Paradoxale. C’est par ce terme que l’on peut décrire la relation que les États-Unis entretiennent avec la question territoriale [1]. Anciennes colonies britanniques, les États-Unis sont aujourd’hui l’une des dernières puissances à posséder encore des territoires, considérés par l’Organisation des Nations unies comme « sous tutelle et non autonomes [2] », et donc, devant être décolonisés.

2 Qu’ils soient appelés Guam, Porto Rico, Îles Mariannes du Nord (CNMI), Îles Vierges des États-Unis, Samoa américaines [3], Îles Baker, Îles Jarvis, Atoll Johnston, Récif Kingman, Île Howland, Îles Midway, Île de la Navasse, Atoll Wake ou Atoll Palmyra, ces territoires ultramarins, constituent ce qu’il est désormais convenu d’appeler « (un) incorporates territories » (territoires (non) incorporés).

3 Prévue par les clauses de la section III de l’article IV de la Constitution américaine [4], la question territoriale est encore insuffisamment traitée par le texte de 1787 qui se contente de décrire les modalités d’adhésion à l’Union du nouvel État (fédéré) et de confier au Congrès l’autorité suprême sur ces territoires [5]. Certes – et c’est un truisme de le dire –, la Convention de Philadelphie n’avait pas vocation à adopter un texte prolixe, prévoyant tout et rigide à toute évolution [6]. Certes, également, la question territoriale est postérieure à l’adoption par les Pères fondateurs du texte constitutionnel, si bien que les « insular cases » n’apparurent que très tardivement dans la jurisprudence de la Cour suprême américaine [7]. Il a donc fallu attendre plus d’un siècle après l’indépendance des États-Unis pour que se posât la question territoriale avec Porto Rico et Guam – jadis sous domination espagnole – nouvellement cédés aux États-Unis avec le traité de Paris de 1898 [8]. C’est presque vingt ans après, en 1917, que les Îles Vierges, achetées par les États-Unis au Danemark, devinrent une « zone insulaire [9] ». Bien plus tard encore, c’est‑à-dire en 1929, les Samoa rentrèrent sous l’autorité américaine après que la Grande-Bretagne et l’Allemagne eurent renoncé à leurs prétentions territoriales sur cette zone [10] et les chefs culturels samoans cédé certaines de leurs terres [11]. Dans ce contexte, le cas des Îles Mariannes du Nord paraît presque trop contemporain. Mis sous tutelle américaine par les Nations unies depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale [12], l’archipel a conclu avec eux, en 1975, un accord établissant un Commonwealth [13].

4 Si la relation entre les États-Unis et ses « grandes zones » insulaires est essentiellement consensuelle car, basée sur l’existence d’un accord entre les deux parties, il n’en est pas de même pour les « petites zones » nées en application du Guano Islands Act du 18 août 1856 [14]. Cette loi permet aux citoyens américains de prendre possession des terrae nullius non réclamées contenant des dépôts de guano [15], indifféremment de leur situation géographique, à condition que ces îles ne soient pas occupées et ne relèvent pas déjà de la souveraineté d’un État. Ces territoires inhospitaliers ont ceci de particulier qu’ils appartiennent aux personnes privées qui les ont découverts ou leurs descendants, et ont avant tout un intérêt économique pour les États-Unis. Autrement dit, les États-Unis ne sont pas obligés de les conserver une fois que le guano qui s’y trouvait y est épuisé [16]. Cela explique, encore de nos jours, en grande partie, la disparité de statuts qui subsiste entre les grandes zones insulaires habitées et les petites dont l’intérêt reste souvent trop limité.

5 Bien que la Constitution américaine parle expressément de « territoires », rien n’est dit sur le statut de ceux‑ci ; pas plus que sur la nature de leurs relations avec la puissance sous la souveraineté de laquelle ils sont. Prenant acte de ce silence, la Cour suprême a, depuis le début du xxe siècle, développé, à travers des interprétations dynamiques, une importante jurisprudence visant à clarifier ces problèmes à la fois juridiques et politiques [17]. Elle a ainsi établi, dans l’affaire Downes v. Bidwell, une distinction entre les territoires incorporés et les territoires non incorporés et en a tiré une différence de régime selon que la constitution s’appliquera ou non à eux. La distinction est fondamentale car, elle permet de voir, d’une part, l’intensité de l’application de la Constitution américaine dans les zones qui ne sont pas toujours intégrées à son territoire (en tant qu’élément constitutif de l’État), et surtout, de déterminer, d’autre part, la nature des relations que les États-Unis entretiennent avec ces îles.

6 L’on peut ainsi distinguer quatre catégories de territoires, relevant à des degrés différents, de la souveraineté américaine : les territoires incorporés et organisés [18], les territoires non incorporés et organisés [19], les territoires non incorporés et non organisés [20] et les territoires incorporés non organisés [21]. La catégorie des territoires incorporés et organisés ne pose pas de difficultés particulières, ceux‑ci étant de manière inamovible, sous la souveraineté des États-Unis qu’ils ont intégrés en tant qu’États fédérés par un organic act. Il n’existe à ce jour aucun territoire incorporé et organisé depuis l’intégration à l’Union d’Alaska et Hawaï en 1959. Cette catégorie ne nous retiendra donc pas davantage. La catégorie des territoires incorporés et non organisés, parce qu’elle ne concerne qu’une zone géographique très restreinte, de surcroît, inhabitée, ne sera pas non plus traitée dans nos analyses. La catégorie des territoires non incorporés et non organisés est quant à elle, beaucoup plus hétéroclite. Si, sur le plan juridique, la Constitution américaine n’y est pas directement appliquée, il convient de constater que sur le plan démographique, la plupart de ces territoires – à l’exception des Samoa – ne sont pas habités [22].

7 Par conséquent, nos analyses ne porteront pas sur les territoires non incorporés et non organisés inhabités ou qui ne le sont que trop peu pour permettre de dégager un régime particulier propre. Seuls seront abordés dans cette étude, le statut juridique des territoires non incorporés et organisés (Guam, Porto Rico, CNMI et Îles Vierges des États-Unis) et celui du seul territoire non incorporé et non organisé habité (Samoa américaines). Réduite à ces zones insulaires, notre étude n’aura pour seul but que d’analyser l’ensemble, sinon l’essentiel, des règles applicables à la situation de ces territoires et à l’évaluation de leurs rapports respectifs avec les États-Unis, sous la souveraineté desquels ils demeurent.

8 Les enjeux ainsi exposés sont importants, car, si la question concerne la situation juridique de plus de quatre millions de personnes, elle permet également de constater que, depuis le début du xxe siècle, la conscience du peuple américain a souvent été déchirée par de nombreux sentiments souvent en contradiction. Ils oscillent à la fois entre la volonté d’expansion de son hégémonie, le rejet du colonialisme contre lequel le pays s’est lui-même formé, et l’impérialisme [23]. S’intéresser à la question territoriale aux États-Unis, c’est donc avant tout, tenter de comprendre la place de ces territoires dans le système politique américain. La difficulté est importante car la Constitution de 1787 est silencieuse sur ces questions. C’est seulement sur la base des « insular cases » de la Cour suprême et de la législation du Congrès que se sont précisés, progressivement, ces statuts qui demeurent, en l’état du droit positif américain, encore ambigus (I). Parler des statuts des territoires américains, c’est également tenter de pénétrer dans les rapports séculaires que ceux‑ci entretiennent avec la puissance américaine ; c’est surtout essayer de comprendre le système politique de ce pays, l’écart qui continue d’exister entre l’ambition américaine sur ces territoires et la volonté des habitants de ceux‑ci de bénéficier des mêmes droits que les citoyens des États fédérés des États-Unis (II).

I – L’ambiguïté des statuts

9 Les malentendus persistants autour des statuts des territoires non incorporés américains sont dus en grande partie à l’imprécision des termes officiels utilisés pour qualifier ces zones insulaires (A). Cette imprécision entraîne une inadéquation entre le statut réel ou juridique de ces territoires et leur statut politique ou officiel. De même, l’existence d’une disparité de droits ou même, plus généralement de situations entre les territoires qu’on classe traditionnellement dans la même catégorie, montre bien qu’il n’existe pas encore de régime juridique spécifique à chaque catégorie de territoire (B).

A – L’imprécision terminologique des statuts

10 Deux territoires non incorporés portent officiellement le titre de Commonwealth traduit approximativement par « État libre associé [24] » : Porto Rico et le CNMI. Il ne faut toutefois pas s’y tromper, car même s’ils revendiquent à l’envi ce statut [25], au demeurant plus libéral que celui de territoire (non) incorporé, il ne peut, en réalité, en être le cas lorsque l’on analyse ces différents statuts, non plus sur le terrain politique, mais sur celui du droit.

11 S’il est vrai qu’en la matière, la rigueur juridique et la terminologie politique ou plutôt les nécessités politiques peuvent être en contradiction évidente et traduire des réalités fort dissemblables [26], il paraît tout de même nécessaire de relever les terrains sur lesquels se situent les ambiguïtés. Elles sont, à bien voir les choses, la conséquence d’une approximation des distinctions et de confusions terminologiques constantes.

12 La première, sans doute aussi la plus insidieuse et la plus importante, consiste à considérer certains territoires non incorporés et organisés comme des commonwealth pour en tirer des conséquences erronées. Au sens britannique, le terme renvoie à une indépendance de droit et de fait des États (et non pas des territoires) qui, étant égaux, s’associent librement [27]. Dans ce sens, le « Commonwealth visait uniquement l’association formée par le Royaume-Uni et les Dominions, considérée comme des communautés autonomes et distinctes de l’ancienne métropole [28] ». Il est évident que, cette définition en contradiction avec la nature des relations davantage d’autorité que d’association, que les États-Unis entretiennent avec leurs territoires non incorporés, ne cadre pas pour décrire la situation des territoires comme le CNMI, Porto Rico ou même Guam.

13 Dans la conception américaine, le terme commonwealth revêt un sens différent et renvoie approximativement à la grande autonomie politique dont bénéficient ces territoires. Il ne décrit toutefois pas un statut juridique différent du statut constitutionnel de ces entités [29] en tant que territoires sous la souveraineté américaine en vertu de la clause territoriale de la Constitution, mais il renvoie seulement aux rapports politiques privilégiés que ceux‑ci entretiennent avec les États-Unis. L’idée de commonwealth dans le contexte américain renvoie à une double réalité. Elle renvoie à l’idée d’une maîtrise complète par lesdits territoires de leurs affaires intérieures et internationales [30] et invite également à s’intéresser à l’acte qui a institutionnalisé le statut. Aussi, la dimension « contractuelle [31] » du statut, le fait que celui‑ci ait été, non pas octroyé unilatéralement par la puissance tutélaire, mais consenti et accepté par la population concernée à travers un instrument juridique [32] font qu’il est difficile, de considérer les territoires précités comme des commonwealth. Même s’ils en ont souvent officiellement le titre, parler de commonwealth pour qualifier les statuts de Porto Rico, de Guam ou du CNMI, relève au mieux d’un abus de langage, d’un opportunisme politique, et au pire, d’une contradiction juridique manifeste.

14 La seconde confusion n’est que la conséquence de la précédente. C’est celle qui consiste à dire que, puisque Porto Rico, Guam et le CNMI ont politiquement le statut de Commonwealth, leurs relations avec les États-Unis sont celles entre des États libres associés [33]. L’ambiguïté vient de ce que les territoires comme Porto Rico et le CNMI sont respectivement qualifiés d’« État libre associé » ou en « union politique avec les États-Unis » [34]. Alors même que ces statuts officiels renvoient à des considérations politiques, c’est sur le terrain juridique que les conséquences de ces statuts ont, à tort, entendu être tirées [35] ; créant ainsi une confusion fâcheuse entre les concepts d’État libre associé, de Commonwealth et de territoire non incorporé.

15 À bien y regarder cependant, toutes les parties ont intérêt à ce que subsistent ces confusions aussi longtemps qu’elles pourront instrumentaliser le sens et la portée de ces concepts encore flous. Les États-Unis d’abord, car cela leur permet de mettre l’accent sur l’autonomie de ces territoires (certes encore relatives) et d’échapper au statut d’État colonialiste [36]. Aussi l’adoption de la Constitution portoricaine en 1952 et l’adoption lors de la 105e session du Congrès américain en 1997 de la loi sur le Commonwealth de Guam n’ont‑elles pas été utilisées par les États-Unis comme des moyens de pression [37] pour revendiquer le retrait de ces territoires de la liste des territoires à décoloniser conformément à l’article 73 de la Charte des Nations unies.

16 Ensuite, les territoires non incorporés eux-mêmes ont intérêt à ce que ces ambiguïtés terminologiques soient entretenues car elles leur permettent de négocier avec la puissance américaine tutélaire, une autonomie plus grande que celle qu’elle prétend leur avoir déjà octroyée. De même, l’imprécision des termes permet à ces territoires, sur le plan international, de revendiquer plus facilement une place plus importante allant même jusqu’à la recherche d’une personnalité juridique internationale et une adhésion aux institutions transnationales sportives (FIFA, CIO, OMS…) [38].

17 Les statuts de ces territoires ne sauraient donc être assimilés à ceux de Commonwealth ou d’État libre associé faute de pouvoir au préalable, être considérés comme des États à part entière, au sens du droit positif [39]. Il faut dès lors, renoncer à comparer le statut des territoires non incorporés à ceux des États dits associés comme les Îles Cooks, Niue, les États fédérés de Micronésie, Palaos ou les Îles Marshall [40], qui sont, contrairement aux premiers, avant tout, des États souverains (quoique « lilliputiens [41] ») au sens traditionnel du droit.

18 Dans une logique bien différente, se trouve la situation des Samoa américaines. Rien, en effet dans la Constitution de ce territoire ne permet de déterminer avec précision, le statut juridique de la zone. Le texte reste assez silencieux et évasif puisqu’il ne fait aucune référence au statut du territoire. Tout au plus, son préambule fournit quelques rares éléments permettant de déduire que l’on n’est face ni à un système de Commonwealth avec les États-Unis ni à un État libre associé. En ce sens, bien qu’il s’agisse d’un territoire non organisé c’est‑à-dire, un territoire dans lequel le Congrès n’a pris aucune loi organique, il n’en demeure pas moins que les rapports entre cette zone et les États-Unis sont loin d’être des rapports égalitaires entre États souverains [42].

19 À l’inverse, le cas des Îles Vierges américaines fait presque office d’exception tant son statut paraît clairement déterminé par ses textes fondateurs et ne nécessite pas d’interprétation particulière. Après avoir tenté d’adopter cinq fois une constitution (en 1964, 1971, 1977, 1980 et 2007), le territoire est régi depuis le 12 juillet 1954 par un acte du Congrès américain, ce qui en fait très clairement un territoire organisé bien que non incorporé [43].

20 Les analyses qui précèdent permettent désormais de considérer que la dénomination officielle d’un territoire ne permet pas de révéler le statut réel ou juridique de celui‑ci. Les termes utilisés par les parties pour désigner les zones insulaires ne sont que les manifestations des prétentions qu’elles ont sur ces territoires. Nous avons établi plus haut que le seul critère de la dénomination officielle n’est pas toujours fiable pour déterminer le statut juridique d’un territoire. Pire, il est même trompeur si bien que, distinguer les territoires non incorporés organisés des territoires non incorporés non organisés devient une gageure malaisée, faute de critères suffisamment précis et incontestables.

B – La diversité des critères de distinction des statuts

21 Il faut désormais porter l’attention vers certains critères plus juridiques comme l’analyse des instruments qui établissent le statut desdits territoires. Il s’agira en principe d’une loi organique du Congrès ou d’une constitution selon qu’il s’agira d’un territoire organisé ou non organisé. Autrement dit, la Constitution américaine ne s’applique pas avec la même intensité dans tous les territoires non incorporés. De manière générale, elle ne s’appliquera donc pas systématiquement aux territoires ultramarins par le seul fait que ceux‑ci sont des possessions américaines. Il n’y a donc pas de corrélation entre l’exercice par les États-Unis de leur souveraineté sur un territoire et l’application par ce dernier du droit constitutionnel américain [44].

22 Le point commun entre tous les territoires étudiés est que la Constitution américaine s’y applique, au moins en partie [45]. C’est le sens même de l’incorporation [46]. L’enjeu est donc de savoir s’il existe une hétérogénéité dans l’application de la Constitution américaine par les territoires non incorporés et de voir de quels facteurs dépend le degré de pénétration différenciée du droit américain dans ces territoires. Deux éléments, à notre sens, favorisent l’hétérogénéité des statuts entre territoires non incorporés. Le premier concerne la question de savoir si le droit appliqué au territoire concerné est ou non, fondamental. Le second porte sur l’acte qui fixe les règles fondamentales au sein du territoire non incorporé. Autrement dit, c’est la question de savoir si le Congrès américain a pris ou non sur le territoire, une loi organique pour étendre sur lui, la Constitution.

23 Concernant la fondamentalité des droits, c’est au début du xxe siècle, avec l’expansion territoriale des États-Unis que la question de l’application des droits fondamentaux s’est posée dans les zones insulaires. La Cour suprême a développé l’idée que certains droits fondamentaux constitutionnels s’appliquaient aux territoires sans aucune action concrète du Congrès quand d’autres ne l’étaient que lorsqu’ils étaient étendus à ces domaines par une loi [47]. Mieux encore, certains droits fondamentaux, même non expressément énoncés par la constitution, s’appliquaient aux territoires [48]. Ce qui veut dire que la constitution considère qu’elle ne peut restreindre l’application des droits fondamentaux aux territoires [49]. Elle ne tient pas compte du fait que le territoire soit ou non organisé par une loi organique du Congrès. Cette position de la Cour tend à se justifier par le fait que, si les droits sont fondamentaux et partant, garantis par la Constitution de laquelle émane toute fonction gouvernementale [50], il n’est pas utile que ceux‑ci soient, pour être appliqués dans des territoires qui relèvent de la souveraineté américaine, transposés dans une loi organique. Ainsi, pour la Cour, si les droits sont fondamentaux dans l’Union, c’est qu’ils le sont également dans ses territoires. Dès lors, la fondamentalité d’un droit est donc, une qualité rattachée à la souveraineté et à la consécration constitutionnelle de ces droits [51] dans l’ordre juridique des États-Unis et non pas une qualité intrinsèquement liée au statut territorial du citoyen qui s’en prévaut [52].

24 Une question demeure tout de même intacte : c’est celle de l’identification de ces droits fondamentaux. Sans établir une liste exhaustive, ni même en proposer une définition claire, la Cour a, au fil de sa jurisprudence, dégagé certaines règles contenant des droits fondamentaux. En matière de procédure pénale par exemple, elle a considéré que le quatrième amendement – portant sur les perquisitions, saisies déraisonnables et mandats de recherche – et le cinquième amendement – énonçant les règles relatives à la mise en examen par le grand jury, l’expropriation, l’auto-criminalisation et à la double incrimination – devaient être considérés comme fondamentaux au point de s’appliquer directement dans les territoires mêmes non incorporés [53]. Il en est de même pour toutes les règles relatives au droit au procès équitable du sixième amendement [54], des garanties procédurales de droit commun du septième [55], des règles relatives aux amendes et peines cruelles et inhabituelles du huitième [56], du droit fondamental de ne pas être enfermé sans jugement (« writ of Habeas Corpus ») [57] et même du onzième amendement sur les immunités des États [58].

25 Les droits constitutionnels considérés comme fondamentaux sont donc déterminés au cas par cas. Ce sont des « principes inhérents, bien que non exprimés qui sont à la base de tout gouvernement [59] ». Ce sont notamment les droits que le juge Edward D. White a qualifié de « naturels » dans son opinion concordante, tels que la liberté d’expression, la liberté individuelle, le libre accès aux tribunaux, l’égale protection par la loi, l’interdiction des traitements cruels, l’encadrement des perquisitions, etc. [60].

26 Il apparaît désormais, sous le bénéfice de ces analyses, que le critère de la fondamentalité d’un droit n’est pas suffisamment décisif pour distinguer les territoires non incorporés et organisés des territoires non incorporés et non organisés, dès lors qu’il n’existe pas de frontières étanches et de critères objectifs permettant de dire qu’un droit s’applique dans un territoire et pas dans un autre. En réalité, comme nous l’avons déjà établi, les droits fondamentaux de la Constitution américaine s’appliquent indistinctement dans tous les territoires non incorporés qu’ils soient organisés ou non.

27 Concernant maintenant l’acte qui établit les territoires non incorporés, il peut être de formes diverses selon l’histoire du territoire concerné et la nature de ses relations avec les États-Unis. Sur cette question, il faut partir d’un principe bien établi selon lequel, en vertu de la clause territoriale de la Constitution américaine, le Congrès a le pouvoir de voter les règlements et lois nécessaires concernant les territoires ou d’autres biens. C’est sur ce fondement qu’elle a reconnu à Porto Rico, le droit à l’autonomie gouvernementale [61]. Le texte ainsi adopté était présenté comme un pacte, une convention, un contrat [62] et nécessitait pour être appliqué au territoire, que le peuple portoricain se prononçât sur son acceptation. C’est seulement après qu’il l’eut approuvé que le pouvoir local fût autorisé à convoquer une convention constituante. Le texte constitutionnel fut approuvé par référendum deux ans plus tard avant d’être transmis au Congrès qui le promulgua le 3 juillet 1952 après y avoir opéré quelques modifications. C’est le 25 du même mois que le gouverneur Luis Muñoz Marín fit promulguer la version définitive du texte induite des modifications opérées par le Congrès.

28 Ce rappel historique permet, nous semble-t‑il, de mieux fixer le contenu concret des notions dont nous avons à discuter car, elles restent encore confuses et mal définies. Dire d’un territoire insulaire américain qu’il est organisé, c’est reconnaître que celui‑ci est régi par une loi organique du Congrès. Sur ce point, le cas de Porto Rico nous paraît particulièrement démonstratif et montre, à bien des égards, que le Congrès est, en fait, le véritable constituant originaire de ce territoire [63].

29 Ces points d’analyse soulèvent quelques remarques plus générales. La première est que, dire d’un territoire non incorporé qu’il est organisé, n’implique pas nécessairement que celui‑ci soit régi par une constitution [64]. À l’inverse, lorsqu’il existe une constitution dans ce territoire, celle‑ci est systématiquement rédigée, ou du moins validée par le Congrès.

30 La seconde porte sur les territoires non incorporés mais non organisés. Elle consiste à affirmer que la rédaction d’une constitution – lorsqu’elle a lieu – n’est pas l’apanage des territoires non incorporés et organisés. Pas plus que tous les territoires non incorporés et organisés ne sont régis par une constitution ; les territoires non incorporés et non organisés n’en sont pas non plus systématiquement dépourvus. S’il est vrai que la plupart des territoires non incorporés et non organisés ne sont pas pourvus de constitution [65], le cas des Samoa américaines demeure en la matière, assez singulier dès lors que ceux‑ci sont régis par une constitution depuis 1960 [66]. En effet, les deux actes de cession conclus entre les chefs samoans et les États-Unis en 1900 et 1904 [67] placèrent le territoire sous l’autorité de la marine américaine avant de la transférer au Secrétaire à l’Intérieur en 1951 [68]. C’est ce dernier qui approuva et ratifia la Constitution proposée par le comité mené par le gouverneur samoan Richard B. Lowe, puis adoptée par le peuple samoan le 27 avril 1960 [69]. Ce contexte particulier justifie que, contrairement aux territoires non incorporés et organisés par le Législatif américain, les Îles Samoa ne sont pas régies par une loi organique, le territoire ayant toujours été sous la tutelle de l’Exécutif.

31 Difficile donc, au regard des remarques qui précèdent, de dégager des critères clairs et homogènes à tous les territoires appartenant – traditionnellement – à la même catégorie, permettant de distinguer les territoires non incorporés et organisés des territoires incorporés et non organisés. La frontière juridique entre ces deux types de territoires n’est pas toujours objective. Pire, elle apparaît même opaque si l’on s’en tient au seul critère de la fondamentalité des droits qui sont appliqués dans ceux‑ci.

32 Il convient de faire cesser certains malentendus et de clarifier l’approximation de ces distinctions en considérant les territoires non incorporés et non organisés comme des zones insulaires, sous la souveraineté des États-Unis et n’ayant pas le statut de membre de l’Union, dans lesquelles la Constitution américaine ne s’applique pas, à l’exception des droits fondamentaux. Ces territoires sont dits non organisés, parce qu’ils disposent – lorsqu’ils sont habités[70] – de leur propre système politique non régi par une loi organique du Congrès. À l’inverse, sont des territoires non incorporés et organisés, des zones insulaires, sous la souveraineté des États-Unis et n’ayant pas le statut de membre de l’Union, dans lesquelles la Constitution américaine s’applique – au moins en partie. Ces territoires sont dits organisés parce qu’ils sont régis par une loi organique du Congrès à l’égard duquel les institutions locales demeurent relativement indépendantes.

33 Ces deux définitions révèlent deux différences subtiles mais fondamentales. La première porte sur le degré d’application de la Constitution américaine, plus poussé dans les cas des territoires non incorporés et organisés que dans ceux qui sont non organisés. Les territoires non incorporés et organisés appliquent tous les aspects essentiels et principaux de la Constitution fédérale quand les seconds se limitent aux seuls droits fondamentaux. La seconde différence est relative aux règles qui régissent le système politique de ces territoires non incorporés. Lorsqu’ils sont organisés, ils sont régis par le Congrès ; tandis que, lorsqu’ils sont non organisés, ils ne le sont plus. Définir le statut de ces territoires est une étape indispensable pour la compréhension de leurs rapports avec la puissance américaine.

II – Le déséquilibre des relations avec les États-Unis

34 Après avoir tenté de (re)définir les statuts des territoires non incorporés, il nous faut désormais, préciser de façon plutôt compendieuse, et donc par endroits schématiques, les grands traits qui caractérisent les relations récentes entre les États-Unis et ces territoires. Les analyses montreront, en s’appuyant sur les textes principaux qui régissent les rapports entre ces entités, qu’il y a, à l’évidence, un déséquilibre dans leurs rapports (A). Celui‑ci apparaît essentiellement dans la précarité des statuts des habitants et des représentants des territoires non incorporés (B).

A – Des relations d’« adjonction »

35 Bien que le statut de territoire non incorporé soit juridiquement trop imprécis, il ne fait aucun doute que l’autonomie qu’il accorde à ces territoires est encore extrêmement réduite. L’intention du législateur, et même des parties, est à ce propos sans ambiguïté. Il est évident que les relations entre les États-Unis et les territoires non incorporés ne sont pas celles entre deux sujets égaux en droit et en fait. Elles sont même, de nature à traduire un déséquilibre entre une puissance tutélaire et un territoire sur lequel elle continue d’étendre sa souveraineté. Qu’on les appréhende en droit comme en fait, le constat demeure le même : les relations entre l’Union et ses zones insulaires doivent être qualifiées « d’adjonction [71] ». En droit, cette adjonction est souvent plus ou moins consentie.

36 L’on retrouve ainsi dans la Constitution portoricaine une « fidélité aux principes de la Constitution fédérale [72] » et une reconnaissance de la supériorité du Pacte de 1950 (convenu entre le peuple de Porto Rico et les États-Unis) à la constitution elle-même [73]. Il en est de même dans la constitution samoane qui multiplie les dispositions consacrant la supériorité du droit américain sur le droit local. Le préambule reconnaît d’emblée que les pouvoirs sont exercés de la manière prévue par le président des États-Unis. La section I de l’article 2 quant à elle, prévoit que les lois prises par le parlement samoan ne peuvent être incompatibles ni avec la Constitution ou les lois américaines, ni avec les accords ou les traités internationaux ratifiés par les États-Unis. Plus anecdotique presque, la Constitution samoane prévoit que les officiers samoans jurent de défendre la constitution américaine et de respecter fidèlement les lois américaines applicables dans ce territoire [74].

37 Il paraît désormais évident que l’intention du législateur américain n’a jamais été d’accorder une autonomie trop poussée – hors et dans l’Union – aux territoires non incorporés. Le but était seulement de laisser à la charge de ceux‑ci, les questions locales que les membres du Congrès n’avaient ni le temps ni l’envie de gérer [75]. Ainsi que le rappelait le sénateur O’Mahoney à propos de Porto Rico, la « préoccupation principale en approuvant la constitution [était] que le Congrès des États-Unis ne [renonçât] pas à des droits importants que par la suite il serait plus en mesure d’affirmer [76] ».

38 La situation de Guam n’échappe pas non plus à cette conclusion. Si plus du tiers de ce territoire est utilisé par les États-Unis à des fins militaires [77], le territoire ne dispose que de droits et pouvoirs qui lui sont octroyés par le Congrès. Autrement dit, les lois fédérales s’y appliqueront tant que le Congrès n’aura pas décidé qu’il en sera autrement. Traduit également ces relations asymétriques, le fait que, les gouverneurs des territoires incorporés – chefs de gouvernement – aient été choisis pendant longtemps par les présidents des États-Unis [78] alors même que tous ces territoires n’ont pas de représentants au Congrès.

39 Contrairement à Porto Rico, aux CNMI et aux Samoa qui disposent d’une constitution – négociée –, Guam et les Îles Vierges sont encore régis par des actes du Congrès, ce qui donne aux premiers, dans certains domaines, de ne pas appliquer les lois fédérales ; bénéficiant ainsi d’une autonomie plus large que les seconds. Si la Constitution américaine a investi le Congrès du pouvoir de poser et de percevoir les impôts [79] et soumet de ce fait, les habitants des territoires à la législation fiscale fédérale, il n’en demeure pas moins que celui‑ci avait autorisé Porto Rico à créer son propre système fiscal [80] et laisser les Samoa américaines adopter leurs propres dispositions sur l’impôt sur le revenu [81].

40 De même, cette relation d’adjonction se vérifie également par l’encadrement du contenu des constitutions des territoires. Une résolution du Congrès a par exemple exigé que la Constitution des Îles Mariannes du Nord soit républicaine et pourvue d’une déclaration des droits [82]. Cette Constitution ne serait adoptée qu’après qu’elle aura été approuvée par le Congrès. Mieux, les dispositions des articles 1 à 3 portant sur les droits fondamentaux ne pourront être modifiées sans l’accord de l’archipel mais surtout sans celui du Congrès. À l’inverse, la loi organique de Guam oblige le gouverneur à rendre compte de son action annuellement ou à tout autre moment requis par le Congrès ou le président des États-Unis.

41 Même s’il y a une part de simplification dans la conclusion qui suit, il faut reconnaître qu’à ce stade de l’analyse, les États-Unis continuent de disposer, dans leurs relations avec les territoires non incorporés, des pouvoirs régaliens comme les affaires étrangères, la monnaie, la justice, la défense, le commerce interétatique. Il est ainsi révélateur de constater qu’aucune constitution d’un territoire ne dispose d’une clause de répartition des compétences avec la puissance tutélaire. La tendance qui se dégage est de considérer que plus une affaire sera importante et sera susceptible de remettre en question le statut juridique du territoire concerné et sa relation avec les États-Unis, moins l’affaire sera susceptible d’être laissée (à l’exclusivité) à la compétence dudit territoire. Autant l’on considère souvent que le juge ne s’occupe pas des petites choses, autant il peut en être de même pour décrire la place des États-Unis dans ses relations avec les territoires non incorporés. Le gouvernement fédéral demeure ainsi compétent pour mener, sur le plan international, les affaires des territoires et des États fédérés : il en va de l’existence de l’Union elle-même qui ne peut reconnaître plus d’une souveraineté dans son territoire ou de ses zones territoriales. Or, la souveraineté est justement, cette qualité qui manque à ces entités et qui fait obstacle à leur reconnaissance sur le plan international [83]. En conséquence, parce que dépourvus de cette qualité essentielle, et sous l’autorité du pouvoir fédéral, les compétences internationales des territoires demeurent limitées à leurs portions congrues : activités sportives, manifestations culturelles, promotion d’activités économiques, etc. La clause territoriale de la Constitution américaine, constitue la limite (encore) indépassable de toute extension de compétences des territoires non incorporés. Elle montre le degré de la primauté que l’Union a sur ses zones insulaires à qui elle ne fait que de simples « délégations de souveraineté [84] » loin de constituer une véritable souveraineté qu’un État fédéral confère à ses États fédérés [85].

42 À bien y regarder cependant, ce n’est pas tant la primauté du droit américain sur celui des territoires non incorporés qui constitue le nœud gordien des relations entre ces entités. Celle‑ci apparaît même presque normale si on pense au fait que les rapports entre l’État fédéral et les États fédérés américains sont également caractérisés par le principe de suprématie du droit fédéral. Le problème vient plutôt de ce que, si cette primauté a pour pendant démocratique la participation des entités fédérées au système politique fédéral [86], il n’en est pas de même concernant les rapports avec les territoires comme le traduit la précarité des statuts de leurs habitants.

B – La précarité des statuts des habitants

43 La question du statut des habitants des territoires non incorporés est sans doute la plus difficile et la plus diversement appréciée par les analyses qui portent sur les « overseas possessions ». Loin de se limiter aux seules problématiques de répartition de compétences, ce sont aussi, au fond, des questions portant sur les statuts personnels des habitants de ces territoires et de leurs représentants qui sont posées par les cas insulaires.

44 Ce n’est pas la question de l’acquisition ou même de la perte du statut de ressortissant d’un territoire non incorporé qui est ici discutée, mais seulement les relations juridiques que la reconnaissance d’un tel statut fait naître vis‑à-vis des États-Unis. L’enjeu est de savoir si la constitution suit le drapeau, autrement dit si les droits constitutionnels des citoyens tels consacrés par la Constitution américaine traversent les océans et s’appliquent aux ressortissants des territoires non incorporés.

45 Soutenue par la Cour suprême dans ses premiers insular cases, la thèse du déni d’intégration a longtemps prévalu [87]. Se fondant sur les stipulations du traité de Paris de 1898 qui lui reconnaît le pouvoir de fixer les droits civiques et le statut politique des insulaires, le Congrès a voté en 1900 la loi dite Foraker qui établit que « les résidents de Porto Rico qui étaient citoyens espagnols et qui décidaient de rester à Porto Rico jusqu’au 11 avril 1899, ainsi que leurs enfants, seraient considérés comme des citoyens de Porto Rico et auraient droit à la protection des États-Unis [88] ». C’est une position contraire qui a été adoptée par la loi Jones-Shafroth qui dispose que tous les citoyens de Porto Rico sont réputés être des citoyens américains [89].

46 Il ne faut toutefois pas s’y méprendre car, si les territoires non incorporés continuent d’appartenir aux États-Unis sans en faire partie [90], la citoyenneté territoriale ne doit jamais être assimilée à la citoyenneté fédérale [91]. Tentons d’affiner ces analyses dans un souci de clarté et afin de mieux comprendre les conséquences qui s’ensuivent.

47 L’approche américaine assimile, voire confond, traditionnellement la nationalité et la citoyenneté [92] alors que le droit positif tend pourtant à les distinguer [93]. La nationalité est définie comme « le lien de droit qui unit à un État déterminé une personne physique ou morale [94] » tandis que la citoyenneté n’est qu’une conséquence de ce premier phénomène, c’est‑à-dire, un ensemble de droits et obligations sociaux et civils. Intrinsèquement liée à l’existence de l’État, la nationalité apparaît comme faisant partie de son domaine réservé [95] et demeure sa compétence exclusive [96]. Ces considérations emportent quelques conséquences. Pas plus qu’une entité supra-étatique ne peut revendiquer un lien de nationalité, une entité infra-étatique ne peut pas non plus s’en prévaloir [97]. Autrement dit, dans les cas étudiés, seuls les États-Unis sont susceptibles d’octroyer une nationalité aux habitants des territoires insulaires. C’est d’ailleurs ce que la logique d’un simple syllogisme tend à démontrer. Le point de départ serait de considérer (comme nous l’avons déjà établi) que la nationalité est une affaire d’État(s) et que, dans la conception américaine, elle se confond avec la citoyenneté. Or, il ne fait aucun doute que les territoires non incorporés ne peuvent être considérés comme des États et que, conformément à la loi Jones, les résidents des territoires non incorporés [98] sont des citoyens américains. Par conséquent, les résidents insulaires doivent être considérés à la fois comme des citoyens et des nationaux américains.

48 De là commencent les difficultés et la nécessité de clarifier le problème de précarité du statut des insulaires. Les habitants des territoires non incorporés sont face à plusieurs paradoxes. Alors même qu’ils sont considérés comme des citoyens américains, les résidents des territoires non incorporés ne peuvent pas voter lors des principales élections américaines (comme nous le montrerons par la suite). Une analyse plus approfondie de leurs relations avec l’Union permet de considérer, qu’en tout état de cause, le statut de citoyen, dans le droit constitutionnel américain, est davantage lié au statut du territoire dans lequel le citoyen qui s’en prévaut entend exercer sa citoyenneté, qu’au statut personnel de l’individu lui-même (c’est‑à-dire sa relation personnelle avec les États-Unis). Autrement dit, les ressortissants ultramarins sont face à un double degré de citoyenneté : lorsqu’ils sont sur leur île d’origine, ils ont la citoyenneté de ce territoire et peuvent, à ce titre, jouir de tous leurs droits civils et politiques et donc, participer à la vie politique locale. Cette citoyenneté locale ne doit toutefois pas être confondue avec la citoyenneté américaine (au sens strict) qui ne peut être exercée que sur le territoire d’un État américain. C’est parce que la citoyenneté suit le territoire et non la personne qui s’en prévaut que, d’une part, les ressortissants insulaires sont privés du droit de vote sur leurs îles et le retrouvent lorsqu’ils sont sur le territoire d’un État fédéré et d’autre part, les ressortissants d’un État fédéré perdent également dans les mêmes conditions, leurs droits de vote lorsqu’ils se retrouvent sur ces territoires non incorporés. En somme, un américain, qu’il soit ou non d’origine insulaire, n’aura le droit de vote qu’à condition qu’il entende l’exercer sur le territoire de l’Union, c’est‑à-dire, qu’il soit rattaché à un État fédéré puisque la Constitution prévoit que ce sont les États (et non les territoires) qui élisent le président [99].

49 Ainsi, puisque la citoyenneté américaine dépend du lieu d’exercice de celle‑ci et non du statut personnel de l’individu, l’on en déduit que l’incorporation concerne les États dans lesquels les individus exercent leurs droits et non les individus eux-mêmes. C’est à cette position constante que parviennent systématiquement les juges américains.

50 En 1894, le procureur général de Guam avait poursuivi les États-Unis en justice au nom de citoyens américains résidant à Guam et enregistrés pour voter aux élections présidentielles américaines. Les requérants avaient demandé – sans succès – au juge de faire interpréter la disposition de l’article II, sect. 1, cl. 2 [100] comme permettant à ses citoyens de voter aux élections présidentielles nationales. Cette interprétation n’emporta pas l’adhésion des juges, selon lesquels : « […] les citoyens ne votent pas pour le Président. […] Le droit de vote aux élections présidentielles en vertu de l’article II est inhérent non pas aux citoyens mais aux États [101]. » La même question avait été posée au juge américain, mais cette fois, à propos du droit de vote des ressortissants américains vivant à Porto Rico. Les demandeurs avaient opposé le statut de Porto Rico qui avait évolué depuis 1898 jusqu’à devenir un « État de facto » habilité à élire le président de l’Union, comme tous les autres États [102]. Pour le Tribunal, seuls les États et le District de Columbia (depuis le 23e amendement [103]) ont le droit de voter pour le chef de l’Exécutif américain [104], l’argument de l’État de fait, restant selon lui, une « question politique » que les juges ne peuvent trancher [105].

51 Si, en aval, les portes du droit de vote par les résidents des zones insulaires lors des élections présidentielles semblent aujourd’hui encore hermétiquement closes, il n’en est pas de même pour le choix en amont des candidats. En effet, quatre des cinq territoires non incorporés participent aux primaires américaines. Porto Rico organise les primaires et les caucus permettant de choisir les candidats à la présidence et envoie des délégués aux conventions nationales des deux grands partis politiques (Républicains et Démocrates). Les habitants peuvent élire à la Chambre des Représentants, un membre sans droit de vote [106] mais aucun au Sénat où seuls les États fédérés sont représentés. Si Porto Rico était un État fédéré, au regard de sa population, il aurait deux sénateurs et cinq représentants au Congrès. Guam envoie également des délégués aux conventions et choisit leurs candidats à la présidence et à la vice-présidence [107]. La représentation au Congrès des Guamiens obéit aux mêmes règles que celles des Portoricains. Les Îles Samoa et les Îles Vierges américaines envoient des délégués aux conventions nationales tandis que les partis politiques du CNMI, puisque non affiliés avec les deux grands partis américains, ne participent pas au processus de nomination du président.

52 Loin d’être une question exclusivement politique, les relations entre les territoires non incorporés et les États-Unis soulèvent également, et surtout des enjeux personnels car elles posent indubitablement la question de l’intégration des populations insulaires dans la nation américaine. Elle invite par conséquent à repenser le modèle traditionnel des États nations qui assimilent la citoyenneté à la nationalité au profit des modèles plus contemporains qui considèrent la citoyenneté comme un concept autonome de celui de nationalité [108]. Cette distinction serait, en réalité, l’une des clés de compréhension du statut juridique des habitants des territoires non incorporés.

53

*

54 La complexité de la question territoriale aux États-Unis tient sans doute à la disparité des aspects qui sont au centre de cette problématique : historiques, juridiques, (géo)politiques et même économiques et militaires.

55 Sur le plan historique, les insular cases invitent à comprendre la construction du modèle américain fondé sur un paradoxe : alors même que l’Union s’est constituée sur une base consensuelle, d’intégration, elle tend à être progressivement remplacée par une logique d’impérialisme et d’hégémonie.

56 Sur le plan juridique, la question est encore plus complexe, car les territoires non incorporés continuent d’appartenir aux États-Unis sans en être une partie. Cette subtile formule, conséquence de la clause territoriale telle que formulée par la Constitution américaine, signifie que la relation entre les territoires non incorporés et les États-Unis est une relation asymétrique dans laquelle seuls les seconds sont souverains. Pour autant, cette sujétion ne signifie pas que ces territoires appliquent in intenso la Constitution américaine sans aucune spécificité locale ou sont dépourvus de leurs propres systèmes politiques. Ainsi, l’idée de non-incorporation renvoie au degré plus ou moins poussé d’application de la Constitution de l’Union à laquelle ces territoires ne sont pas totalement intégrés tandis que celle d’organisation renvoie aux rapports de tutelle qui sont régis par le Congrès.

57 Sans être assimilée aux rapports entre États libres associés, les liens entre les États-Unis et les territoires non incorporés sont, sur le plan politique, des rapports d’adjonction, voire d’injonction. Ce sont des relations dont l’évolution dépend principalement des États-Unis. Ainsi, le rejet systématique par ceux‑ci des référendums portant sur l’évolution du statut de Porto Rico (1967, 1993, 1998, 2012 et 2017 même si ce dernier n’était pas contraignant) montre bien la nécessité pour la tutelle de préserver le statut quo. D’ailleurs les décisions de la Cour suprême, traduisent une volonté de ne pas faire évoluer le statut juridique des territoires non incorporés. Celle‑ci considère en effet qu’une évolution (vers l’intégration en tant qu’État fédéré ou vers une indépendance), parce qu’elle exigerait une modification de la Constitution, est davantage un problème politique que juridique.

58 Enfin, sur le plan économique et militaire, les relations entre les territoires insulaires et les États-Unis sont également évidentes, du moins en se limitant aux simples aspects du tourisme ou à l’implantation dans ces zones, des forces militaires américaines. Ces territoires deviennent alors pour les États-Unis, des vecteurs d’extension de son contrôle dans le Pacifique. Une telle relation n’est pas sans rappeler celle que la France entretient avec l’île de Clipperton, considérée comme un territoire spécial sous l’autorité directe du gouvernement [109].

59 Ni tout à fait dans les États-Unis, ni tout à fait en dehors, tel est encore, confusément, le statut réel des territoires non incorporés (organisés ou non organisés) et partant, le fil d’Ariane de leurs relations avec l’autorité de tutelle américaine.


Date de mise en ligne : 02/07/2019

https://doi.org/10.3917/rfdc.118.0409

Notes

  • [1]
    V. sur cette question en général : T. Fleury Graff, La question du territoire aux États-Unis de 1789 à 1914. Apports pour la construction du droit international, Pedone, 2013.
  • [2]
    A/RES/66 (1) du 14 décembre 1946.
  • [3]
    Pour des facilités de langage, sauf précisions contraires, nous utiliserons le gentilé « américain » pour désigner non pas les habitants des Amériques, mais ceux des États-Unis.
  • [4]
    « 1. De nouveaux États peuvent être admis par le Congrès dans l’Union ; mais aucun nouvel État ne sera formé ou érigé sur le territoire soumis à la juridiction d’un autre État, ni aucun État formé par la jonction de deux ou de plusieurs États, ou parties d’État, sans le consentement des législatures des États intéressés, aussi bien que du Congrès.
    2. Le Congrès aura le pouvoir de disposer du territoire ou de toute autre propriété appartenant aux États-Unis, et de faire à leur égard toutes lois et tous règlements nécessaires ; et aucune disposition de la présente Constitution ne sera interprétée de manière à porter préjudice aux revendications des États-Unis ou d’un État particulier ».
  • [5]
    O. Beaud a fait cependant remarquer que ces territoires d’outre-mer devaient être distingués de ceux qui sont prévus par la Constitution de 1787. Les seconds avaient vocation à être intégrés à la Fédération quand les premiers sont, destinés à demeurer des « dépendances » (Théorie de la Fédération, Puf, Léviathan, 2007, p. 253).
  • [6]
    M.-F. Toinet, Le système politique des États-Unis, Puf, 1987, p. 2.
  • [7]
    Les premières affaires portant sur cette question sont : De Lima v. Bidwell, 182 U.S. 1 (1901) ; Downes v. Bidwell, 182 U.S. 244 (1901) ; Dooley v. United States, 182 U.S. 222 (1901) et Armstrong v. United States, 182 U.S. 243 (1901). V. également sur l’établissement de la distinction territoires incorporés/territoires non incorporés : A. H. Leibowitz, Defining Status. A Comprehensive Analysis of United States Territorial Relations, Martinus Nijhiff Publishers, 1989, p. 185.
  • [8]
    A. Mérignhac, « La paix hispano-américaine », RDP, 1901, no 1, p. 329-363.
  • [9]
    United States General Accounting Office, U.S. Insular Areas. Applicability of U.S. Constitution, OGC-98-5, 7 november 1997, p. 7.
  • [10]
    Convention in Respect to the Samoan Group of Islands, dec. 2, 1899.
  • [11]
    48 U.S.C. § 1661.
  • [12]
    A/RES/66 (1), op. cit.
  • [13]
    Covenant to Establish a Commonwealth of Northern Mariana Islands in Political Union With the United States of America, Pub. L. 94-241, § 1, Mar. 24, 1976, 90 Stat. 263 ; United States General Accounting Office, U.S. Insular Areas. Applicability of Relevant Provisions of the U.S. Constitution, HRD-91-18, 20 june 1991, p. 62.
  • [14]
    48 U.S.C. ch. 8, § 1411-1419. Tous les territoires inhabités, à l’exception de l’Atoll Wake, ont été revendiqués et rattachés aux États-Unis en application de la loi sur le guano.
  • [15]
    Le guano est un amas de fiente de chauves-souris et d’oiseaux marins. Par sa grande concentration en composés organiques, il est souvent utilisé comme un engrais efficace, un fertilisant de sols. Au début du xxe siècle, cette substance a également été exploitée dans la possession française de l’île de Clipperton et a été à l’origine d’importantes fortunes.
  • [16]
    48 U.S.C. § 1419.
  • [17]
    Elle a été amenée à se prononcer sur certaines questions nouvelles comme celles de savoir si les habitants des nouveaux territoires devaient être considérés comme des citoyens américains à part entière, et partant subir les lois tarifaires des États-Unis (v. affaires : De Lima v. Bidwell ; Downes v. Bidwell ; Dooley v. United States et Armstrong v. United States, déjà citées). Elle a également dû se prononcer sur l’applicabilité de certaines dispositions constitutionnelles aux territoires non incorporés (Hawaii v. Manikichi, 190 U.S. 197 (1903) ; Dorr v. United States, 195 U.S. 138 (1904) ; Ocampo v. United States, 234 U.S. 91 (1914) ou Balzac v. Porto Rico, 258 U.S. 298 (1922)).
  • [18]
    Ils relèvent pleinement des États-Unis et sont régis par une loi organique. En cela, ils se distinguent des États fédérés bien que la plupart aient intégré l’Union après avoir été pendant longtemps des territoires incorporés et organisés. Un tel statut constitue donc l’antichambre de celui d’État fédéré.
  • [19]
    Ils ne font pas parties de l’Union mais en appliquent la Constitution. Rentrent dans cette catégorie : Guam, Porto Rico, le CNMI et les Îles Vierges des États-Unis.
  • [20]
    Ils ne font pas parties de l’Union dont ils n’en appliquent que très partiellement la Constitution. Rentrent dans cette catégorie : Samoa américaines, Îles Baker, Îles Jarvis, Atoll Johnston, Récif Kingman, Île Howland, Îles Midway, Île de la Navasse et Atoll Wake.
  • [21]
    Ils appliquent entièrement la Constitution des États-Unis bien qu’aucune loi du Congrès ne prévoie leur mode d’organisation. À l’exception de l’Atoll Palmyra, cette catégorie a disparu.
  • [22]
    L’Île Wake n’est habitée que par une centaine de personnes – essentiellement militaires – et est utilisée à des fins militaires par les États-Unis depuis 1941.
  • [23]
    J. W. Pratt, Expansionists of 1898, Baltimore, 1936 ; F. H. Harrington, « The Anti-Imperialist movement in the U.S. », Mississipi Valley Historical Review, vol. 22, 1935, p. 211-230 ; S. Lens, The Forging of the American Empire. From the Revolution to Vietnam : A History of US Imperialism (1971), Chicago, Haymarket Books, 2003.
  • [24]
    G. Fischer par exemple assimile d’abord les deux termes dans les cas de Porto Rico et du CNMI avant de montrer que juridiquement, les deux notions recouvrent des réalités différentes (« Le Commonwealth de Porto Rico et les États-Unis », Revue juridique et politique de l’Union française, 1954, p. 169-170).
  • [25]
    La Constitution de Porto Rico du 25 juillet 1952 parle d’« Estado libre asociado » quand celle du CNMI du 9 janvier 1978 et les États-Unis établit très officiellement un Commonwealth en union politique avec les États-Unis.
  • [26]
    G. Fischer, art. cit., p. 169.
  • [27]
    Ibid.
  • [28]
    Ch. Rousseau, Le Commonwealth dans les relations internationales, Fascicule I, Les cours de droit, 1963-1964, p. 5-6.
  • [29]
    Cela est d’autant plus vrai que le terme commonwealth est même utilisé dans les noms officiels de certains États américains (Kentucky, Massachusetts, Pennsylvanie et Virginie).
  • [30]
    G. Agniel, « Le Parlement et la Nouvelle-Calédonie : du droit à la bouderie »… à la délégation de souveraineté », RDP, 2012, p. 233.
  • [31]
    Ibid.
  • [32]
    Cette procédure ne doit pour autant pas être considérée comme un accord de volonté au sens du droit international dès lors que l’on n’est pas face à deux sujets de ce droit (le territoire concerné ne pouvant être considéré comme un État, faute d’en avoir tous les attributs). L’on est seulement, dans pareille situation, en face d’un accord régi par le droit américain et qui peut faire l’objet d’un contrôle de constitutionnalité. La Constitution portoricaine a été approuvée par le peuple le 4 juin 1951 par un instrument appelé « compact », quand celle du CNMI l’a été également été par le peuple le 17 juin 1975 à travers un « covenant » (G. Agniel, art. cit., p. 233).
  • [33]
    Sur ce concept en général : L. Havard, L’État associé : recherches sur une nouvelle forme de l’État dans le Pacifique Sud, PUAM, 2018, p. 49 sq.
  • [34]
    48 U.S.C. § 1801.
  • [35]
    Il s’agit des conséquences liées à la reconnaissance du statut d’État. Ces entités revendiquent le statut d’État libre associé alors même qu’elles n’ont pas obtenu, au préalable, tous les attributs juridiques d’un État puisqu’il leur manque, au moins, une autonomie gouvernementale.
  • [36]
    V. par exemple R. Emerson qui a soutenu que le statut d’État libre associé appliqué à Porto Rico n’avait qu’un effet symbolique si bien que, pour lui, Porto Rico continuera d’être un territoire non incorporé des États-Unis, appartenant à l’Union, mais sans en faire partie (« Puerto Rico and American Policy Toward Dependent Areas », The Annals of the American Academy of Political and Social Science, vol. 285, 1953, p. 10).
  • [37]
    Avec des fortunes diverses puisque le retrait de cette liste n’a eu lieu que pour Porto Rico (A/RES/748 (VIII) du 27 novembre 1953 qui parle de « D’État libre associé […] investi d’attributs de souveraineté politique qui indiquent clairement que le peuple portoricain s’administre lui-même en tant qu’entité politique autonome »), Guam y demeurant encore à ce jour.
  • [38]
    C. I. Keitner, M. W. Reisman, « Free Association : The United States Experience », Texas International Law Journal, vol. 39, no 1, p. 33.
  • [39]
    Dans une décision récente, la Cour suprême a été saisie afin de se prononcer sur le fait de savoir si des ressortissants portoricains accusés d’avoir commis des crimes, pouvaient faire l’objet d’une double poursuite pour le même comportement criminel à la fois à Porto Rico et aux États-Unis. La question qui se posait était celle de la souveraineté pénale de Porto Rico et partant, de sa souveraineté en général. Ainsi, le Commonwealth de Porto Rico et le gouvernement fédéral américain sont‑ils des souverains séparés aux fins de la double incrimination ? La Cour a répondu en suivant l’avis du Département d’État à la Justice intervenant en tant qu’amicus curiae en 2015 que, les territoires des États-Unis, y compris Porto Rico, ne sont pas des souverains distincts des États-Unis. Autrement dit, Porto Rico ne pourrait être souverain que s’il devenait un État ou une nation indépendante. Sur le fond, la Cour conclut qu’une personne ne peut être poursuivie à Porto Rico et aux États-Unis pour le même comportement en vertu de lois pénales équivalentes (Commonwealth of Puerto Rico v. Sanchez Valle et al., U.S. 579, no 15-108 (2016)).
  • [40]
    L. Havard, op. cit., p. 46, 322-323.
  • [41]
    L. Adam, « Le concept de micro-État : États lilliputiens ou parodies d’États ? », Revue internationale de politique comparée, vol. 2, no 3, 1995, p. 577-592.
  • [42]
    48 U.S.C. § 1662a prévoit que le Congrès seul peut apporter des amendements à la Constitution samoane, quand le paragraphe 1662 précise que le territoire est sous la souveraineté des États-Unis.
  • [43]
    48 U.S.C. § 1541a.
  • [44]
    United States v. Verdugo-Urquidez, 494 U.S. 259, 268-269 (1990).
  • [45]
    A. H. Leibowitz, op. cit., p. 185-186 ; D. K. Watson, « Acquisition and Government Of National Domain », Am. L. Rev., vol. 41, no 2, 1907, p. 253 précise que la Constitution américaine ne s’applique à ces territoires que par la seule volonté du Congrès.
  • [46]
    Voyons les définitions officielles données par le U.S. Office of Insular Affairs : « Incorporated territory : Equivalent to Territory, a United States insular area, of which only one territory exists currently, Palmyra Atoll, in which the United States Congress has applied the full corpus of the United States Constitution as it applies in the several States. Incorporation is interpreted as a perpetual state. Once incorporated, the Territory can no longer be de-incorporated » ; « Unincorporated territory : A United States insular area in which the United States Congress has determined that only selected parts of the United States Constitution apply » : https://www.doi.gov/oia/islands/politicatypes.
  • [47]
    Downes v. Bidwell, 182 U.S. 244, 290-291 (1901)
  • [48]
    Ibid.
  • [49]
    Ibid.
  • [50]
    A. H. Leibowitz, op. cit., p. 185.
  • [51]
    La Cour suprême ne définit toutefois pas les parties de la constitution qui établissent ces droits fondamentaux. V. Reid v. Covert, 354 U.S. 1, 13 (1957).
  • [52]
    Dorr v. United States, 195 U.S. 138, 147 (1904) ; Downes v. Bidwell, 182 U.S. 244, 282-83 (1901).
  • [53]
    V. pour l’application du quatrième amendement au CNMI : Covenant to Establish a Commonwealth of the Northern Mariana Islands in Political Union with the United States of America, § 501(a), 48 U.S.C. § 1801 note ; aux Îles Vierges : 48 U.S.C. § 1561 ; aux Îles Samoa américaines : Revised Constitution of American Samoa, 1967, art. I, § 5 ; à Guam : 48 U.S.C. § 1421b(c), (u). V. pour l’application du cinquième amendement notamment à Porto Rico : Commonwealth of Puerto Rico v. Sanchez Valle et al., op. cit.
  • [54]
    Balzac v. United States, 258 U.S. 298 (1922).
  • [55]
    Puerto Rico v. Shell Oil Co., 302 U.S. 253 (1937).
  • [56]
    Feliciano v. Barcelo, 497 F. Supp. 14 (D. P.R. 1979).
  • [57]
    Eisentrager v. Forrestal, 174 F.2d 961 (D.C. Cir. 1949), rev’d, 339 U.S. 763 (1950).
  • [58]
    Fernandez v. Chardon, 681 F.2d 42 (1st Cir. 1982).
  • [59]
    Dorr v. United States, 195 U.S. 138, 147 (1904).
  • [60]
    Downes v. Bidwell, 182 U.S. 244, 282 (1901).
  • [61]
    To provide for the organization of a constitutional government by the people of Puerto Rico, July 3, 1950, ch. 446, 64 Stat. 319.
  • [62]
    Ces appellations restent curieuses car elles cachent les intentions des législateurs américains qui étaient de restreindre la possibilité théorique des peuples de manifester leur volonté. Dans ce sens : G. Fischer, art. cit., p. 179.
  • [63]
    Dans le même sens : D. Custos, « Relation d’adjonction. Comparaisons : Porto-Rico », in J.‑F. Faberon, V. Fayaud, J.‑M. Regnault, Destins des collectivités territoriales d’Océanie. Peuples, populations, nations, États, territoires, pays, patries, communautés, frontières, vol. 1 : Théories et pratiques, PUAM, 2011, p. 322.
  • [64]
    V. en ce sens, les cas de Guam et des Îles Vierges américaines. Le premier a connu plusieurs projets constitutionnels rejetés notamment en 1979 et 1982 et est actuellement régi par une loi organique du 1er août 1950. Sur ces questions : P. Lansing, P. Hipolito, « Guam’s Quest for Commonwealth Status », Asian Pac. Am. L.J., vol. 4, no 1, 1998, p. 122-148. Le second également a connu de nombreux échecs dans son projet d’adoption d’une constitution. Il est également régi par une loi organique du 28 juillet 1954.
  • [65]
    Ces territoires étant souvent des propriétés privées inhabitées et administrées par des Agences d’État américaines.
  • [66]
    Celle‑ci ne peut être modifiée que par un acte du Congrès : 48 U.S.C. § 1662a.
  • [67]
    Dans ces actes les États-Unis se sont engagés à promouvoir la paix, le bien-être et un gouvernement qui préserve les droits des autochtones : United States General Accounting Office, American Samoa. Issues Associated with Some Federal Court Options, GAO-08-1124T, sept. 18, 2008, 1997, p. 4-5.
  • [68]
    Ibid., p. 5.
  • [69]
    Sur ces questions historiques : A. H. Leibowitz, « American Samoa : Decline of a Culture », Cal. W. Int’l L.J., vol. 10, 1980, p. 251-256.
  • [70]
    Ce critère est capital car il permet de distinguer les petits territoires non incorporés et non organisés qui sont inhabités et qui dépendent juridiquement du droit américain, des Samoa américaines (qui sont peuplées). La définition traditionnelle des territoires non incorporés et non organisés, parce qu’elle va du principe que tous ces territoires sont habités, ne semblent pas être applicable à ces territoires lorsqu’ils sont inhabités.
  • [71]
    A. Hage, « Relation d’adjonction. Guam et les Mariannes du Nord : adjonctions divergentes », in J.‑F. Faberon, V. Fayaud, J.‑M. Regnault, op. cit., p. 299-308 ; D. Custos, art. cit., p. 319-328. V. également dans une moindre mesure : L. A. McKibben, « The political relationship between the United States and Pacific Islands Entities : The path to self-government in the Northern Mariana Islands, Palau, and Guam », Harvard International Law Journal, vol. 31, 1990, p. 257-293.
  • [72]
    Constitution du Commonwealth de Porto Rico, 25 juillet 1952, préambule. Voyons également dans le même sens, la section I de l’art. 101 du Pacte établissant un Commonwealth des Îles Mariannes du Nord qui parle d’« union politique avec les États-Unis d’Amérique et sous leur souveraineté ».
  • [73]
    Ibid., art. 1, sect. 1.
  • [74]
    Revised Constitution of American Samoa, 1967, art. 5, sect. 6.
  • [75]
    G. Fischer, art. cit., p. 186.
  • [76]
    Cité par G. Fischer, ibid., p. 186.
  • [77]
    L’île constitue l’une des plus importantes bases militaires américaines dans le monde et constitue par sa localisation (elle est située à moins de 4 000 kilomètres en face de la péninsule coréenne et à la fois entre la Corée du Nord et les États-Unis), un avant-poste stratégique dans la guerre d’influence qui oppose les États-Unis à la Corée du Nord.
  • [78]
    Ce fut le cas à Porto Rico jusqu’en 1948. Il est désormais élu par le peuple de ces territoires incorporés depuis 1968 à Guam, 1969 aux Îles Vierges américaines, 1976 aux Îles Mariannes du Nord et 1978 aux Samoa américaines.
  • [79]
    Article 1, sect. 8.
  • [80]
    48 U.S.C. § 845.
  • [81]
    United States General Accounting Office, U.S. Insular Areas. Applicability of Relevant Provisions of the U.S. Constitution, op. cit.
  • [82]
    Covenant to Establish a Commonwealth of Northern Mariana Islands in Political Union with the United States of America, op. cit.
  • [83]
    L’Accord de libre-échange nord-américain apporte une atténuation à l’idée d’une indifférence du droit international vis‑à-vis des zones insulaires qu’il définit selon une approche extensive. Le territoire américain y est décrit dans un sens exclusivement douanier comme comprenant « les cinquante États, le District de Columbia et Porto Rico. […] Les régions s’étendant au‑delà des eaux territoriales des États-Unis et qui, […], sont des régions à l’égard desquelles les États-Unis sont habilités à exercer des droits pour ce qui concerne les fonds marins et leur sous-sol ainsi que leurs ressources naturelles » (art. 201, annexe 201.1). On observe également qu’un territoire comme Porto Rico fait partie de nombreuses institutions et organisations internationales. Il est membre associé à la FAO, à l’OMS, à l’OMT (Organisation mondiale du tourisme), de l’UPU (Union postale universelle), de la CEPALC (Commission économique pour l’Amérique latine et la Caraïbe) ; observateur auprès de la Caricom ; participe au CIO (Comité international olympique).
  • [84]
    D. Custos, art. cit., p. 324.
  • [85]
    Ibid.
  • [86]
    Ibid., p. 323.
  • [87]
    Dorr v. United States, 195 U.S. 138 (1904). La Cour a soutenu dans cette décision que le Congrès n’est pas tenu d’accorder aux ressortissants d’un territoire certains droits tant que celui‑ci ne fait pas partie de l’Union.
  • [88]
    Pub.L. 56-191, § 7, ch. 191, 31 Stat. 77, 79 (1900) ; 48 U.S.C. § 733.
  • [89]
    Pub.L. 64-68, chap. 190 39 Stat. 951 (1917).
  • [90]
    HR no 1365, 81st Congress, 1st Sess. 8 (1849).
  • [91]
    D. Custos, art. cit., p. 323, a constaté que la citoyenneté territoriale a un fondement législatif quand la citoyenneté fédérale repose sur la Constitution. La conséquence directe est que pour modifier la seconde, il faut amender la constitution de l’Union tandis qu’une simple loi suffirait pour modifier la première.
  • [92]
    Selon l’art. 8 U.S.C. § 1101 (a) (22), « Le terme “ressortissant des États-Unis” désigne un citoyen des États-Unis ou une personne qui, sans être citoyen des États-Unis, doit une allégeance permanente aux États-Unis ». V. également dans le sens de l’assimilation des deux termes : Conseil de l’Europe, Rapport explicatif de la Convention européenne sur la nationalité, STE no 166, 1997, § 23.
  • [93]
    Pour M.‑P. Lanfranchi, « Les notions de nationalité et citoyenneté interrogées par le droit international public », in M.‑P. Lanfranchi, O. Lecucq, D. Nazet-Allouche (dir.), Nationalité et citoyenneté : Perspectives de droit comparé, droit européen et droit international, Bruxelles, Bruylant, 2012, p. 49, « Les droits internes associent pour leur part en principe les deux termes sans les confondre, la nationalité de l’État emportant la citoyenneté : l’appartenance et l’identification au groupe emportent le droit de participer à la vie de la Cité ». V. également : F. Atcho, « Nationalité, citoyenneté dans le cas des États non reconnus », in P. Kovacs, J.‑D. Mouton (eds), « Citizenship in International Law / La Citoyenneté en droit international », The Centre for Studies and Research in International Law and International Relations, 2018, p. 223-262.
  • [94]
    J. Salmon, Dictionnaire de droit international, Bruxelles, Bruylant, 2001, p. 723.
  • [95]
    CPJI, Décrets de nationalité promulgués en Tunisie et au Maroc, avis consultatif du 7 février 1923, Recueil 1923, Série B, no 4, p. 24.
  • [96]
    P. Lagarde, « Les compétences de l’État en matière d’octroi et de déchéance de la nationalité », in SFDI, Droit international et nationalité, Pedone 2012, p. 81.
  • [97]
    Pour E. Lagrange, « La nationalité dans les organisations internationales », in SFDI, Droit international et nationalité, ibid., p. 233 : « La nationalité semble prima facie hors de portée des organisations internationales. Même lorsque l’organisation exerce sur un territoire un pouvoir d’administration ou de tutelle exclusif de celui de tout État, la collation de la nationalité n’entre pas dans ses compétences ».
  • [98]
    La loi concernait à l’origine le seul territoire de Porto Rico. Ses effets ont été étendus de nos jours à tous les territoires non incorporés.
  • [99]
    U.S. Const. art. II, § 1, cl. 3.
  • [100]
    « Chaque État désigne, de la manière prescrite par sa législature, un nombre d’électeurs égal au nombre total de sénateurs et de représentants auquel il a droit au Congrès, mais aucun sénateur ou représentant, ni aucune personne tenant des États-Unis une charge de confiance ou de profit, ne pourra être nommé électeur ».
  • [101]
    Attorney Gen. of Guam v. United States, 738 F2d 1017, 1019 (9th Cir. 1984), cert. denied, 469 U.S. 1209 (1985).
  • [102]
    De la Rosa v. United States, 842 F. Supp. 607, 608-609 (D.P.R. 1994).
  • [103]
    « Le district où se trouve établi le siège du gouvernement des États-Unis, désignera selon telle procédure que pourra déterminer le Congrès un nombre d’électeurs du président et du vice-président équivalant au nombre total des sénateurs et représentants au Congrès auquel ce district aurait droit s’il était constitué en État […] ».
  • [104]
    De la Rosa v. United States, op. cit., 608-609.
  • [105]
    Ibid.
  • [106]
    En réalité, il ne peut voter qu’en commission parlementaire et exercer un droit de parole en assemblée.
  • [107]
    Guam Code, Title III, ch. 7, § 7107.
  • [108]
    J.‑D. Mouton « La citoyenneté en droit international : un concept en voie d’autonomie ? », in P. Kovacs, J.‑D. Mouton (eds), op. cit., p. 81-128.
  • [109]
    Article 72-3 de la Constitution française : « La loi détermine le régime législatif et l’organisation particulière des Terres australes et antarctiques françaises et de Clipperton. »

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