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Article de revue

Cour constitutionnelle allemande et pouvoirs de la Banque centrale européenne : le premier renvoi préjudiciel à la Cour de Justice de l’Union européenne (décision du 14 janvier 2014)

Pages 145 à 163

Notes

  • [1]
    Voir D. Simon, EUROPE, mai 2013, p. 6.
  • [2]
    CC, décis. n° 2013-314 QPC du 4 avril 2013.
  • [3]
    Bundesverfassungsgericht.
  • [4]
    Référence n° 9/2014, 7 février 2014.
  • [5]
    Décision du 17 décembre 2013, décision au fond le 18 mars 2014, communiqué de presse n° 23/2014.
  • [6]
    Décision du 14 janvier 2014.
  • [7]
    Voir par exemple F. Lemaître, « Les juges constitutionnels allemands offrent un répit à la BCE », Le Monde, 8 février 2014 ; J.-P. Lacour, « Débat sur les OMT : Karlsruhe renvoie l’affaire devant la Cour de Justice européenne », Les Échos, 7 février 2014 ; J. Quatremer, dans son blog « Coulisses de Bruxelles », « La Cour constitutionnelle allemande renonce à faire exploser la zone euro », Libération, 11 février 2014.
  • [8]
    Voir Le Monde, article précité, note 7.
  • [9]
    Voir Les Échos, article précité, note 7.
  • [10]
    Grundgesetz, 23 mai 1949.
  • [11]
    Voir J. Quatremer, blog précité, note 7.
  • [12]
    Voir le § 30 de la décision, où il est fait référence sur ce point aux jurisprudences des Cous suprêmes au Danemark, en Estonie, en Irlande, en France (CC, décis. n° 2006-540 DC du 27 juillet 2006), en Lettonie, en Pologne etc.
  • [13]
    Voir A. Pliakos, « La fonction communautaire/européenne du juge national mise en question », Revue de l’Union européenne, n° 545, février 2011, p. 86.
  • [14]
    Ibid. p. 79.
  • [15]
    Recueil des décisions de la Cour constitutionnelle (Bundesverfassungsgerichtsentscheidungen, BVerfGE), BVerfGE 37, 271 « Internationale Handelsgesellschaft », 29 mai 1974 ; BVerfGE 73, 339 « Wünsche Handelsgesellshaft », 23 octobre 1986. Voir I. B) infra.
  • [16]
    Les décisions relatives au Traité de Maastricht et de Lisbonne étant particulièrement « directives » à l’égard de l’intégration et du droit de l’Union, nous y reviendrons.
  • [17]
    La Cour constitutionnelle l’a affirmé par exemple dès sa décision relative au Traité de Maastricht (12 octobre 1993, § 111 : « Deutschland ist einer der “Herren der Verträge” […] », « l’Allemagne est l’un des “maîtres des traités” […] »).
  • [18]
    Voir le début de l’article 23-1 LF : « Pour l’édification d’une Europe unie, la République fédérale d’Allemagne concourt au développement de l’Union européenne […] »
  • [19]
    Voir H. Labayle & R. Mehdi, « Le Conseil constitutionnel, le mandat d’arrêt européen et le renvoi préjudiciel à la Cour de Justice », RFDA, mai-juin 2013, p. 461.
  • [20]
    La Cour constitutionnelle, dans la décision relative au Traité de Lisbonne du 30 juin 2009, s’est elle-même reconnue le droit de conserver le dernier mot pour statuer sur des questions fondamentales relevant de l’identité constitutionnelle (voir le § 340).
  • [21]
    Voir le § 20 de la décision commentée. L’article 23-1 dispose : « Pour l’édification d’une Europe unie, la République fédérale d’Allemagne concourt au développement de l’Union européenne qui est attachée aux principes fédératifs, sociaux, d’État de droit et de démocratie ainsi qu’au principe de subsidiarité et qui garantit une protection des droits fondamentaux substantiellement comparable à celle de la présente Loi fondamentale. À cet effet, la Fédération peut transférer des droits de souveraineté par une loi approuvée par le Bundesrat. L’article 79, al. 2 et 3 est applicable à l’institution de l’Union européenne ainsi qu’aux modifications de ses bases conventionnelles et aux autres textes comparables qui modifient ou complètent la présente Loi fondamentale dans son contenu ou rendent possibles de tels modifications ou compléments » (texte en français sur le site du Bundestag : http://www.bundestag.de/blueprint/servlet/blob/189762/d2a059e856bfc6f2bf3f5fccdf190858/loi_fondamentale-data.pdf (site consulté en mai 2014)).
  • [22]
    CC, décis. n° 2004-505 DC du 19 novembre 2004 relative au Traité instituant une Constitution pour l’Europe.
  • [23]
    Article 88-1 : « La République participe aux Communautés européennes et à l’Union européenne, constituées d’États qui ont choisi librement, en vertu des traités qui les ont instituées, d’exercer en commun certaines de leurs compétences. »
  • [24]
    Considérant 11.
  • [25]
    Voir A. Levade, « Le Conseil constitutionnel aux prises avec la Constitution européenne », RDP, 2005, p. 29.
  • [26]
    CJCE, 15 juillet 1964, Costa c/ ENEL, aff. 6/64 : « Attendu qu’à la différence des traités internationaux ordinaires, le Traité de la CEE a institué un ordre juridique propre intégré au système juridique des États membres […] »
  • [27]
    2 BvR 2661/06, voir le § 53.
  • [28]
    Voir H. Labayle & J.-L. Sauron, « La Constitution française à l’épreuve de la Constitution pour l’Europe », RFDA, 2005, p. 6.
  • [29]
    Voir la décision relative au Traité de Lisbonne du 30 juin 2009 (§ 234 notamment) et la décision Honeywell évoquée (§ 53 : « Der Anwendungsvorrang entspricht auch der verfassungsrechtlichen Ermächtigung des Art. 23 Abs. 1 GG… », à savoir « la primauté correspond à l’habilitation constitutionnelle de l’article 23-1 de la Loi fondamentale »).
  • [30]
    Voir le § 24 de la décision : « D’après l’ordre juridique de la République fédérale d’Allemagne, la primauté d’application du droit de l’Union doit être reconnue et garantie, de façon que les compétences de contrôle réservées constitutionnellement à la Cour constitutionnelle soient exercées, mais seulement avec retenue et de façon ouverte à l’intégration européenne » (nous reviendrons ultérieurement sur ces dernières précisions, qui témoignent de l’évolution de la Cour constitutionnelle).
  • [31]
    Décision du 12 octobre 1993, BVerfGE 89,155.
  • [32]
    Décision du 30 juin 2009, BVerfGE 123, 267.
  • [33]
    La Cour constitutionnelle a critiqué plus particulièrement le mode d’élection du Parlement européen, considéré comme inéquitable, car il ne respecte pas le principe « un homme – une voix ».
  • [34]
    Voir A.L. Barrière & B. Roussel, « Le Traité de Lisbonne, étape ultime de l’intégration européenne ? - Le jugement du 30 juin 2009 de la Cour constitutionnelle allemande », Comité d’études des relations franco-allemandes (CERFA), note du CERFA 66, septembre 2009, pp. 11-12, http://www.ifri.org/index.php?page=detail-contribution&id=5446&id_provenance=103&provenance_context_ id=29 (site consulté en mai 2014. Nous reviendrons sur la question de la « compétence de la compétence »).
  • [35]
    Voir A. Pliakos, « La fonction communautaire/européenne du juge national mise en question », Revue de l’Union Européenne n° 545, février 2011, p. 86.
  • [36]
    Voir ci-dessus note 17.
  • [37]
    Voir H. Labayle & J.-L. Sauron, op. cit., p. 7.
  • [38]
    Voir R. Lecourt, L’Europe des juges, Bruylant 1976, réédité en 2008. Voir également Le Dialogue des juges : mélanges en l’honneur du président Bruno Genevois, Dalloz-Sirey, 2009.
  • [39]
    Voir le § 22 de la décision.
  • [40]
    Décision du 12 octobre 1993, BVerfGE 89, 155.
  • [41]
    Décision du 30 juin 2009, BVerfGE 123, 267.
  • [42]
    Voir le § 31.
  • [43]
    BVerfGE 37, 271, « Internationale Handelsgesellschaft », 29 mai 1974.
  • [44]
    Voir point B. I. 3. : « Art. 24 GG ermächtigt nicht eigentlich zur Übertragung von Hoheitsrechten ».
  • [45]
    Voir D. Hanf, « L’encadrement constitutionnel de l’appartenance de l’Allemagne à l’Union européenne. L’apport de l’arrêt ’Lisbonne’ de la Cour constitutionnelle fédérale », Cahiers de Droit européen 2009, p. 653.
  • [46]
    BVerfGE 73, 339, « Wünsche Handelsgesellshaft », 23 octobre 1986.
  • [47]
    Voir le point II. B. 1. b. de la décision.
  • [48]
    BVerfGE 75, 223, « Kloppenburg », 8 avril 1987.
  • [49]
    Loi d’approbation des Traités, adoptée sur la base de l’article 24 de la Loi fondamentale.
  • [50]
    Cité par D. Hanf, in CDE, 2009, précité, p. 660.
  • [51]
    Voir point B. 2. D. : « Zwar ist dem Gerichtshof keine Befugnis übertragen worden, auf diesem Wege Gemeinschaftskompetenzen beliebig zu erweitern. »
  • [52]
    Voir B. 2. d. bb) : « Die Gemeinschaft ist kein souveräner Staat im Sinne des Völkerrechts, dem eine Kompetenzkompetenz über innere Angelegenheiten zukäme. »
  • [53]
    BVerfGE 89, 155, décision du 12 octobre 1993.
  • [54]
    L’article 23-1 dispose : « Pour l’édification d’une Europe unie, la République fédérale d’Allemagne concourt au développement de l’Union européenne qui est attachée aux principes fédératifs, sociaux, d’État de droit et de démocratie ainsi qu’au principe de subsidiarité et qui garantit une protection des droits fondamentaux substantiellement comparable à celle de la présente Loi fondamentale. À cet effet, la Fédération peut transférer des droits de souveraineté par une loi approuvée par le Bundesrat. L’article 79, al. 2 et 3 est applicable à l’institution de l’Union européenne ainsi qu’aux modifications de ses bases conventionnelles et aux autres textes comparables qui modifient ou complètent la présente Loi fondamentale dans son contenu ou rendent possibles de tels modifications ou compléments. »
  • [55]
    Respect des principes fédératifs, sociaux, d’État de droit et de démocratie, de subsidiarité et protection des droits fondamentaux « substantiellement comparable » à celle de la Loi fondamentale.
  • [56]
    Voir par exemple D. Hanf, précité, p. 666.
  • [57]
    Voir le § 21 de la décision du 14 janvier 2014 étudiée.
  • [58]
    À cause de son mode d’élection d’une part (car le principe « un homme – une voix » n’est pas respecté), et surtout en l’absence de « peuple européen » d’autre part.
  • [59]
    Voir la décision Maastricht, BVerfGE 89, 155, § 102 (« Aus alledem folgt, daß dem Deutschen Bundestag Aufgaben und Befugnisse von substantiellem Gewicht verbleiben müssen »).
  • [60]
    BVerfGE 123, 267, décision du 30 juin 2009.
  • [61]
    Voir le § 31.
  • [62]
    CC, décis. n° 2006-540 DC du 27 juillet 2006, Loi relative aux droits d’auteur et droits voisins dans la société de l’information.
  • [63]
    Voir B. Mathieu, « Le droit communautaire fait son entrée au Conseil constitutionnel », Petites Affiches 22 août 2006, n° 167, p. 3.
  • [64]
    Basée, on l’a dit, sur l’article 88-1 de la Constitution française du 4 octobre 1958.
  • [65]
    Voir le considérant 19. Une deuxième condition précise que les dispositions de la directive doivent être « inconditionnelles et suffisamment précises », condition posée dans sa précédente CC, décis. n° 2004-496 DC du 10 juin 2004, Loi pour la confiance dans l’économie numérique. Force est de constater que le juge constitutionnel reprend ici à son compte la jurisprudence élaborée par le juge de Luxembourg s’agissant de l’« effet direct » des directives (voir par exemple CJCE Van Duyn, aff. 41-74, 4 décembre 1974).
  • [66]
    « Traité établissant une Constitution pour l’Europe » du 16 décembre 2004.
  • [67]
    Traité de Lisbonne modifiant le traité sur l’Union européenne et le traité instituant la Communauté européenne, signé à Lisbonne le 13 décembre 2007, JOUE, 17 décembre 2007, C 306-12.
  • [68]
    Voir J.-P. Lacour, « Débat sur les OMT : Karlsruhe renvoie l’affaire devant la Cour de Justice européenne », Les Échos, 7 février 2014.
  • [69]
    Ouverture au droit européen.
  • [70]
    Arrêt du 30 juin 2009. Voir le § 225.
  • [71]
    Opérations Monétaires sur Titres, en anglais dans le texte.
  • [72]
    Voir J. Valero, « OMT : les juges allemands interrogent la justice européenne », Europolitique, n° 4805, 10 février 2014, p. 11.
  • [73]
    Priorité, car tout contrôle de la Cour constitutionnelle n’en est pas pour autant exclu, nous y reviendrons (B) (ci-dessous).
  • [74]
    L’art. 24 LF ensuite, énonce en effet dans son 1er alinéa que la Fédération a le droit de « transférer des droits de souveraineté (compétences) à des institutions internationales par voie législative ».
  • [75]
    Voir D. Hanf, CDE, 2009 précité, p. 665.
  • [76]
    Rappelons encore une fois la lettre de l’article 23-1 : « Pour l’édification d’une Europe unie, la République fédérale d’Allemagne concourt au développement de l’Union européenne qui est attachée aux principes fédératifs, sociaux, d’État de droit et de démocratie ainsi qu’au principe de subsidiarité et qui garantit une protection des droits fondamentaux substantiellement comparable à celle de la présente Loi fondamentale. »
  • [77]
    § 225 de la décision du 30 juin 2009.
  • [78]
    Voir F.C. Mayer, « Rashomon à Karlsruhe », RTDE, 2010, p. 77 (Propos de « Justus Lipsius »).
  • [79]
    Article 267 TFUE.
  • [80]
    Décision du 2 mars 2010, BVerfGE 118,79, relative à la rétention des données de communication ordonnée par la directive 2006/24/CE du 15 mars 2006, JOUE L 105/54 du 13 avril 2006.
  • [81]
    CC, décis. n° 2004-496 DC du 10 juin 2004.
  • [82]
    Voir D. Hanf, « Vers une précision de la Europarechtsfreundlichkeit de la Loi Fondamentale », Cahiers de Droit Européen, 2010, p. 522. Le Conseil constitutionnel, dans une situation analogue avait estimé que « la transposition en droit interne d’une directive communautaire résulte d’une exigence constitutionnelle à laquelle il ne pourrait être fait obstacle qu’en raison d’une disposition expresse contraire de la Constitution ; qu’en l’absence d’une telle disposition, il n’appartient qu’au juge communautaire, saisi le cas échéant à titre préjudiciel, de contrôler le respect par une directive communautaire tant des compétences définies par les traités que des droits fondamentaux garantis par l’article 6 du Traité sur l’Union européenne » (c’est nous qui soulignons).
  • [83]
    Voir D. Hanf, « Vers une précision de la Europarechtsfreundlichkeit de la Loi Fondamentale », précité, p. 525.
  • [84]
    Voir CJUE, Irlande c/Conseil, aff. C-301/106, 10 février 2009.
  • [85]
    Conclusions de l’Avocat général Cruz Villalon, 12 décembre 2013, affaires jointes C-293/12, C-594/12. Voir la conclusion § 159, point 1, où l’incompatibilité avec la Charte des droits fondamentaux de l’Union est justement reconnue « du fait de l’obligation de conservation des données qu’elle impose, ne s’accompagnant pas des principes indispensables appelés à régir les garanties nécessaires à l’encadrement de l’accès auxdites données et de leur exploitation ».
  • [86]
    Décision du 6 juillet 2010, 2 BvR 2661/06.
  • [87]
    CJUE, 22 novembre 2005, aff. C-144/04.
  • [88]
    Afin de vérifier que l’Union s’est tenue dans les limites imposées à l’intégration par la LF.
  • [89]
    Voir D. Hanf, CDE 2010, p. 539.
  • [90]
    Voir le § 60 : « Vor der Annahme eines Ultra-vires-Akts der europäischen Organe und Einrichtungen ist deshalb dem Gerichtshof im Rahmen eines Vorabentscheidungsverfahrens nach Art. 267 AEUV die Gelegenheit zur Vertragsauslegung sowie zur Entscheidung über die Gültigkeit und die Auslegung der fraglichen Rechtsakte zu geben. Solange der Gerichtshof keine Gelegenheit hatte, über die aufgeworfenen unionsrechtlichen Fragen zu entscheiden, darf das Bundesverfassungsgericht für Deutschland keine Unanwendbarkeit des Unionsrechts feststellen. »
  • [91]
    Voir A. Pliakos, « La fonction communautaire/européenne du juge national mise en question », Revue de l’Union européenne, n° 545, février 2011, p. 95.
  • [92]
    Voir les déclarations en ce sens de M. Fratzscher, président de l’Institut allemand pour la recherche économique (DIW), in « Les juges constitutionnels allemands offrent un répit à la BCE », Le Monde, 8 février 2014.
  • [93]
    Voir le § 60 de la décision : « Solange der Gerichtshof keine Gelegenheit hatte, über die aufgeworfenen unionsrechtlichen Fragen zu entscheiden, darf das Bundesverfassungsgericht für Deutschland keine Unanwendbarkeit des Unionsrechts feststellen. »
  • [94]
    Rien ne garantit en effet l’abandon, par la Cour allemande, de sa jurisprudence Kloppenburg évoquée ci-dessus, affirmant son contrôle sur la jurisprudence de la CJUE elle-même non dotée de la « compétence de la compétence »…
  • [95]
    « Ersichtlich ».
  • [96]
    Voir le § 61 de la décision.
  • [97]
    Ibid.
  • [98]
    Voir D. Hanf, « Vers une précision de la Europarechtsfreundlichkeit de la Loi fondamentale », précité, p. 540.
  • [99]
    « nur zurückhaltend und europarechtsfreundlich », § 59.
  • [100]
    Ibid.
  • [101]
    Voir le § 66 de la décision.
  • [102]
    Voir J. Waltuch, « La guerre des juges n’aura pas lieu », RTDE, 2011, p. 360.
  • [103]
    Voir D. Hanf, « Vers une précision de la Europarechtsfreubdlichkeit… », précité, p. 548.
  • [104]
    Voir le § 99 de la décision.
  • [105]
    Décision du 18 mars 2014, voir le communiqué de presse n° 23/2014.
  • [106]
    CC, décis. n° 2013-314 QPC du 4 avril 2013 relative au mandat d’arrêt européen.
  • [107]
    Voir le commentaire de A. Levade, « Anatomie d’une première : renvoi préjudiciel du Conseil constitutionnel à la Cour de Justice ! », La Semaine Juridique, Edition générale, n° 23, 3 juin 2013, p. 1114.
  • [108]
    Voir H. Labayle & R. Mehdi, « Le droit au juge et le mandat d’arrêt européen : lectures convergentes de la Cour de Justice de l’Union européenne et du Conseil constitutionnel », RFDA, 2013, p. 701.
  • [109]
    Voir « Drifting into Politics: Is Germany’s High Court Anti-European? », http://www.spiegel.de/international/germany/the-eu-critical-course-of-the-german-high-court-a-958018.html (site consulté en mai 2014).

1 « Il y a toujours une première fois [1] » : ce titre soulignant la portée historique de la première saisine de la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) par le Conseil constitutionnel [2] semble ici s’imposer. La Cour constitutionnelle fédérale allemande [3] (CC), moins d’un an après son homologue français, vient en effet de saisir la Cour de Luxembourg d’une série de questions préjudicielles. Le communiqué de presse de la Cour allemande du 7 février 2014 [4] relate deux décisions, la première relative aux recours constitutionnels dirigés contre le Mécanisme Européen de Stabilité (MES) [5] et la seconde à la saisine de la CJUE de questions préjudicielles concernant l’appréciation de validité du mécanisme d’Opérations Monétaires sur Titres (Outright Monetary Transactions, OMT) [6]. Cette dernière décision, en date du 14 janvier 2014, a été largement relayée par la presse [7], autant pour ses enjeux économiques que symboliques.

2 La question, technique, renvoie au programme OMT adopté par la Banque Centrale Européenne (BCE) le 6 septembre 2012, en pleine crise économique alors que « les fortes tensions sur les dettes publiques italienne, grecque et portugaise laissaient craindre une explosion de la zone euro [8] ». Ce programme lui permet d’acheter de la dette publique sur les marchés à vocation spéculative sous forme d’obligations émises par les États. Cette aide est cependant conditionnelle, puisque les États concernés sont contraints de se soumettre à un plan d’aide du MES, incluant la mise en œuvre de réformes structurelles et de mesures d’austérité.

3 La Cour constitutionnelle a été saisie d’un certain nombre de recours, mettant en cause la régularité juridique de ce mécanisme qui, selon les requérants, irait au-delà du mandat de la BCE, par la violation du principe d’interdiction d’un financement monétaire du budget et porterait ainsi atteinte aux compétences des États membres.

4 La question est importante d’un point de vue économique d’abord, car ce mécanisme est un signal fort de la BCE à l’égard des marchés, rassurés par les possibilités de rachat par celle-ci de dette souveraine, ce qui a contribué à la détente sur les taux d’emprunt des pays en difficulté financière [9]. Par conséquent, si la Cour constitutionnelle jugeait ce programme contraire à la Loi fondamentale [10] allemande (LF), « cela rev[iendrait] à désarmer la BCE et donc à relancer une crise qui risqu[erait] d’aboutir à l’explosion de la zone euro [11] ». Sans doute la Cour ne pouvait-elle pas ne pas tenir compte d’un tel enjeu en se prononçant unilatéralement sur ce problème. Sa décision de saisine de la CJUE peut donc apparaître comme tactique, permettant à la fois de démontrer sa bonne volonté européenne, et renvoyant à la CJUE le soin de déclarer le mécanisme régulier – ou non – au regard du droit de l’Union.

5 La question est importante d’un point de vue symbolique ensuite, car la Cour constitutionnelle allemande s’adresse pour la première fois à la CJUE, rompant ainsi avec une image d’antieuropéanisme, forgée au fil d’une jurisprudence plutôt hostile à l’intégration. Mais il ne saurait être reproché au juge constitutionnel de se faire le garant de la Loi fondamentale qui lui fournit son titre de juridiction. Quant à l’attitude de défiance, ou de retenue, du juge allemand à l’égard du droit de l’Union, elle n’est pas singulière. Ainsi par exemple, s’agissant de la défense de « l’identité constitutionnelle », la Cour allemande ne manque pas de s’appuyer sur les jurisprudences de ses consœurs de divers États membres [12], comme pour justifier sa position de retrait par un front du refus dont elle ne serait qu’une composante. L’analogie se poursuit s’agissant des raisonnements mis en œuvre afin de limiter les effets du droit de l’Union dans les ordres juridiques internes. Elle est patente entre le Conseil constitutionnel français et la Cour constitutionnelle allemande quant à la source où tous deux puisent la primauté du droit de l’UE, à savoir la Constitution. Ce ne serait là, par conséquent, qu’un exemple supplémentaire d’une « tendance générale […] qui consiste à interpréter l’ordre juridique de l’Union comme un ordre juridique dérivé, c’est-à-dire complémentaire des ordres juridiques nationaux [13] », « interprétation hérétique de l’ordre juridique de l’Union européenne [14] », mais assez largement partagée.

6 Il ne faut pas oublier cependant, afin de mettre la décision étudiée en perspective, que la Cour allemande a forgé son expérience et ses outils juridiques de longue date, et ce de façon complexe bien qu’évolutive. Les péripéties des célèbres jurisprudences « Solange[15] » en sont l’illustration. Ce qui frappe à l’analyse de la jurisprudence « européenne » de la Cour constitutionnelle, dont la saisine de la CJUE aujourd’hui marque une étape importante et symbolique, ce sont ses ajustements progressifs, et la situation plutôt paradoxale à laquelle elle conduit. La Cour a opéré en effet un encadrement strict de la marge de manœuvre de l’Union [16], tout en témoignant d’une ouverture assez large au droit de l’Union. Autrement dit, après avoir verrouillé soigneusement toute évolution de l’Union (à laquelle est déniée toute qualité « étatique »), dans la mesure où elle pourrait porter atteinte d’une façon ou d’une autre à la souveraineté allemande (les États restant « les maîtres des Traités [17] »), la Cour semble se résoudre à lâcher du lest comme gage de sa bonne volonté européenne, de son ouverture au droit européen (« Europarechtsfreundlichkeit »), malgré tout inscrite dans la Loi fondamentale [18].

7 L’engagement de la Cour constitutionnelle allemande « dans le processus institutionnalisé de coopération juridictionnelle mis en place par les Traités communautaires [19] » est historique, tout observateur europhile ne pourra que s’en réjouir. L’enthousiasme de rigueur doit cependant être tempéré, dans la mesure où le juge constitutionnel, dans son analyse extrêmement fouillée des mécanismes de l’OMT, ne manque pas de s’appuyer sur sa substantielle jurisprudence relative à la construction européenne. Il faut y lire un avertissement, même s’il est masqué par l’importance de l’avancée jurisprudentielle ici réalisée : la saisine de la CJUE d’un renvoi préjudiciel. Les juges de Karlsruhe laissent en effet toujours planer le doute d’un risque de conflit entre le droit de l’UE et la Loi fondamentale allemande, se réservant encore et toujours le droit de « dernier mot [20] ». Un double niveau de lecture s’impose donc à l’analyse de la décision. La Cour maintient en effet ses réserves habituelles potentiellement conflictuelles par rapport au droit de l’UE (I), tout en rendant, incontestablement, une décision historique conciliatrice (II).

I – Le maintien de réserves potentiellement conflictuelles

8 Le juge constitutionnel allemand balise soigneusement son argumentation des signaux habituels de réserve à l’égard de l’intégration européenne. Ainsi, la Loi fondamentale apparaît toujours comme la source et la limite de la primauté du droit de l’Union (A), et l’épée de Damoclès du contrôle juridictionnel de la Cour – par le biais de réserves constitutionnelles persistantes – continue à menacer l’application du droit de l’Union en Allemagne (B).

A – La loi fondamentale, source et limite de la primauté du droit de l’Union européenne

9 Très loin de toute rupture avec sa position traditionnelle, la Cour constitutionnelle, dans la décision étudiée, rappelle au contraire dès l’abord ses réserves structurelles fondamentales à l’égard du droit de l’UE, sa primauté, son applicabilité dans le droit interne. Elle considère en effet toujours l’ordre juridique de l’UE comme dérivé de la Constitution (1). Mais peut-il en être autrement puisqu’elle-même tire son titre de juridiction de la Constitution ? La règle qui lui a été donnée pour mesurer est celle-là même dont elle doit assurer le respect : la Loi fondamentale. Le droit de l’UE dès lors, comme il puise sa source dans la LF, y trouvera aussi ses limites (2).

1 – La LF, source de la primauté du droit de l’Union européenne

10 La Cour constitutionnelle, étayant sa décision sur sa propre juris­prudence, rappelle que l’activité des organes et institutions de l’Union européenne tire sa légitimation démocratique de la loi d’approbation du Traité sur l’Union européenne édictée sur la base de l’article 23 alinéa 1 de la Loi fondamentale (« Article Europe ») [21]. Cette affirmation illustre une approche commune à bien des juges constitutionnels de plusieurs États membres, qui consiste à concevoir l’ordre juridique de l’Union comme procédant de la Constitution nationale. Le Conseil constitutionnel en France par exemple, dans sa décision relative au TECE [22], s’est appuyé sur l’article 88-1 de la Constitution [23] pour estimer que le « constituant a consacré l’existence d’un ordre juridique communautaire intégré à l’ordre juridique interne et distinct de l’ordre juridique international [24] ». La « malice [25] » des juges constitutionnels à s’inspirer de la célèbre formule de la Cour de Justice dans l’arrêt Costa c/ ENEL[26], semble au demeurant partagée par leurs homologues allemands. Ces derniers y font aussi référence en effet par exemple dans leur décision du 6 juillet 2010, Honeywell[27], et, ici comme là, « tout procède effectivement de la Constitution [28] », puisque la Cour a clairement fondé le principe de la primauté du droit de l’Union sur l’article 23-1 de la Loi fondamentale [29]. Par ailleurs, si la primauté du droit de l’Union est reconnue sur l’ordre juridique interne allemand, c’est néanmoins à la condition que la Cour constitutionnelle ait exercé sa compétence de contrôle constitutionnellement prévue [30].

2 – La LF, limite à la primauté du droit de l’UE

11 Les juges constitutionnels font ici l’économie du rappel de la nature juridique de l’Union européenne, qualifiée dans la décision Maastricht[31] ou Lisbonne[32] de « Staatenverbund », association d’États, chimère juridique entre Confédération (Staatenbund) et État fédéral (Bundestaat). Ce détour leur avait permis de constater que faute de véritable légitimation démocratique par un Parlement européen représentant un peuple européen [33], la qualité d’État, « l’étaticité » (Staatlichkeit) ne pourrait être reconnue à l’Union et serait le propre des États membres. Dès lors, l’article 23 de la Loi fondamentale « autorise la République fédérale d’Allemagne à transférer des compétences au niveau européen, mais de manière limitée et partielle (principe des compétences d’attribution, par opposition à la “compétence de la compétence”)  [34] ». Selon la Cour, « les États membres ont cédé des droits souverains à une Union qui exerce un pouvoir public, mais […] une union d’États qui restent souverains [35] », les États membres restent « maîtres des Traités [36] ». La participation de l’Allemagne à l’Union est donc dictée constitutionnellement par l’article 23-1 de la Loi fondamentale, mais doublement conditionnée par le respect de l’identité constitutionnelle et du principe de l’attribution de compétences à l’Union. Une analyse relative à la position du Conseil constitutionnel français s’agissant du TECE pourrait ainsi être reproduite ici à l’identique : « Quand bien même le Conseil reconnaîtrait l’autorité du droit de l’Union, la thèse qui demeure la sienne est celle de la primauté de la Constitution […], à la fois source et limite de la primauté du droit de l’Union, et sa conversion au droit communautaire est des plus relatives [37]. »

12 La conjonction de ces deux facteurs (source purement constitutionnelle de la primauté du droit de l’Union et nature juridique de l’UE) justifie pleinement la compétence de contrôle que la Cour de Karlsruhe s’est arrogée précédemment, et réaffirme présentement. Ce contrôle porte donc sur la compétence des organes et institutions de l’Union et sur l’atteinte à « l’identité constitutionnelle », concept désormais inscrit d’ailleurs dans le Traité de Lisbonne et mis en œuvre dans nombre de jurisprudences constitutionnelles à travers l’Europe.

B – La persistance du contrôle de la Cour constitutionnelle sur le droit de l’UE

13 Si le trait principal de la décision étudiée est le pas essentiel que franchit la Cour constitutionnelle pour participer au très commenté « dialogue des juges [38] », l’armature de l’argumentation reste néanmoins dans le droit fil de la jurisprudence antérieure. Le juge allemand persiste donc dans l’affirmation d’un certain nombre de réserves à l’égard du droit de l’Union, dont l’application dans l’ordre juridique interne reste subordonnée au respect de deux conditions essentielles : respect de la répartition des compétences (contrôle « ultra vires ») (1) et respect de « l’identité constitutionnelle » de la RFA [39] (2).

1 – Le contrôle « ultra vires »

14 Eu égard à la grille de lecture dualiste qui est celle du juge constitutionnel, qui conçoit les pouvoirs de l’Union comme dérivés de la Constitution, les compétences dont l’UE dispose ne peuvent être que des compétences d’attribution, la « compétence de la compétence » étant réservée aux États membres, seuls dotés de la souveraineté (« l’étaticité »). Ce constat, déjà formulé dans les décisions relatives au Traité de Maastricht [40] et à celui de Lisbonne [41] est ici réitéré : l’attribution limitative de compétences dont bénéficie l’UE n’autorise pas cette dernière à s’arroger la « Kompetenz-Kompetenz[42] ».

15 C’est la raison pour laquelle le juge constitutionnel s’est érigé en gardien de la répartition des compétences entre l’Allemagne et l’UE, procédant ainsi à un contrôle « ultra vires » lui permettant éventuellement d’écarter une disposition de droit dérivé, voire une interprétation délivrée par la CJUE. Cette démarche n’est pas nouvelle, même si elle a subi quelques tempéraments au fil du temps. La « guerre des juges » avait été déclarée par le juge constitutionnel allemand, rappelons-le, dès 1974 avec la célèbre décision « Solange I [43] ». La question abordée dans la décision étudiée, relative à l’OMT, ne touche pas aux droits fondamentaux, mais le fondement des jurisprudences « Solange » reste néanmoins pertinent. En effet, le juge y souligne que les dispositions de l’art. 24 § 1 LF n’autorisent pas à aliéner, par le biais de l’attribution de droits souverains à des institutions internationales, l’identité de l’ordre constitutionnel de la RFA, dont font partie, en particulier, les droits fondamentaux. Autrement dit, « aussi longtemps que » (« Solange ») la protection des droits fondamentaux ne sera pas assurée de façon satisfaisante dans l’ordre juridique communautaire (en l’absence de catalogue des droits fondamentaux dans les traités) la CC assurera elle-même cette protection. La conclusion qu’elle en tire est majeure puisque, on s’en souvient, une mesure communautaire contraire aux droits fondamentaux garantis par la LF allemande, pouvait être considérée comme inapplicable en Allemagne. Un point essentiel du raisonnement de la Cour, s’agissant de la question du transfert de compétences à la Communauté, se situe dans son affirmation selon laquelle « l’article 24 LF n’autorise pas à proprement parler le transfert de droits de souveraineté [44] ». Il ne s’agirait que d’une « ouverture de l’ordre juridique national » permettant « d’attribuer des compétences à la Communauté uniquement de manière conditionnelle et non nécessairement de manière définitive [45] ». La décision « Solange II [46] » en 1986, si elle a témoigné ensuite d’un geste de bonne volonté du juge allemand à l’égard du droit communautaire, ne change cependant en rien les prémisses du raisonnement. Il reconnaît certes qu’il existe désormais une protection satisfaisante des droits fondamentaux dans le cadre communautaire, et renonce dès lors à contrôler le droit communautaire dérivé au regard des droits fondamentaux de la LF, mais seulement « aussi longtemps que les Communautés Européennes, et notamment la jurisprudence de la CJCE, garantissent d’une manière générale une protection des droits fondamentaux [...] comparable pour l’essentiel à la protection des droits fondamentaux que la LF impose… ». Renversant ainsi la réserve de constitutionnalité formulée en 1974 (de façon plus favorable à la primauté du droit communautaire), il ne manque pas de rappeler néanmoins que « l’habilitation au titre de l’art. 24 § 1 LF n’est cependant pas sans limites constitutionnelles. Cette disposition n’autorise pas, dans le cadre du transfert de droits de souveraineté à des institutions internationales, à renoncer à l’identité de l’ordre constitutionnel en vigueur en RFA en portant atteinte à sa structure de base, aux structures qui en constituent le fondement [47] ». Ceci permet de souligner que les questions relatives à l’identité constitutionnelle de la RFA et au contrôle des compétences attribuées conditionnellement aux Communautés (à l’Union) étaient et demeurent le socle de la jurisprudence constitutionnelle.

16 La moins connue décision « Kloppenburg » de 1987 [48] se prononce de façon plus explicite encore sur la question des compétences. La Cour constitutionnelle y affirme que la Loi fondamentale n’autorise pas la Communauté à étendre ses compétences de manière illimitée, et pose ainsi le principe d’un contrôle « ultra vires » en affirmant que « les actes qui “s’évaderaient” (“ausbrechen”) des limites du programme d’intégration établi par la loi d’approbation [49] ne seraient plus couverts par cette dernière » [50]. Le juge allemand s’arroge même le pouvoir de contrôler la jurisprudence de la Cour de Justice, à laquelle il dénie la « compétence d’élargir les compétences communautaires à volonté [51] ». La Communauté n’est pas un État souverain au sens du droit international et ne dispose donc pas de la « Kompetenz-Kompetenz[52] ».

2 – Le respect de l’identité constitutionnelle de la RFA

17 Quant à la notion de « l’identité constitutionnelle » de la RFA, déjà présente dans les décisions « Solange » évoquées, elle prend un nouveau relief avec la décision « Maastricht[53] » dès lors que l’intégration européenne connaît une nouvelle base constitutionnelle, l’article 23 de la Loi fondamentale révisée, ou « Article Europe [54] ». Celui-ci, de manière très ambivalente, affirme certes l’ouverture de la RFA à l’intégration européenne mais, reprenant d’une main ce qu’elle a donné de l’autre, pose un certain nombre d’exigences relatives à la structure et au fonctionnement de l’UE [55]. Cette « clause de garantie structurelle [56] » a ainsi à la fois pour effet de codifier l’apport des jurisprudences « Solange » quant à la question des droits fondamentaux et de consacrer – symboliquement et juridiquement – l’intangibilité des principes inscrits à l’article 79-3 de la Loi fondamentale, ou « clause d’éternité ». C’est donc bien le respect de « l’identité constitutionnelle » de la RFA (dont font partie les droits fondamentaux) qui est désormais inscrit dans la Loi fondamentale, comme limite explicite à l’applicabilité en Allemagne de tout acte communautaire qui y porterait atteinte. Un élément important – et constant – ressort de l’argumentaire de la Cour ici rappelé : le principe démocratique, découlant du droit de vote inscrit à l’article 38 LF. La légitimation démocratique des actes des institutions et organes de l’Union trouverait son fondement dans la loi d’approbation du Traité sur l’Union européenne, adoptée sur la base de l’article 23-1 LF. Les citoyens électeurs allemands participeraient donc à la légitimation démocratique des institutions et organes de l’Union par le biais de l’élection des membres du Bundestag [57]. Le Parlement européen – selon le juge allemand – étant dépourvu d’une véritable légitimité démocratique [58], la légitimation démocratique de l’Union se trouverait en effet dans les parlements nationaux. Tout ceci justifie, pour le juge, que le Bundestag conserve « des attributions d’une importance substantielle [59] ».

18 La décision étudiée du 14 janvier 2014 se réfère explicitement enfin, dans le cadre de ses rappels jurisprudentiels, à la décision relative au traité de Lisbonne [60]. Elle rappelle que l’intégration européenne repose sur le principe de l’attribution de compétence, et qu’il n’est pas permis à l’Union européenne de disposer de la « compétence de la compétence » (la CC l’a dit et le répète) ou de porter atteinte à l’identité constitutionnelle des États membres [61]. Cette référence à « l’identité constitutionnelle » comme limite à l’intégration est également utilisée en France par le Conseil constitutionnel on le sait. Dans sa décision du 27 juillet 2006 sur la loi relative aux droits d’auteur [62], le Conseil opère « un pas décisif dans la prise en compte des exigences du droit communautaire dans le cadre du contrôle de constitutionnalité [63] » puisqu’il va accepter de contrôler la compatibilité de la loi à la directive européenne qu’elle transpose ; la même ambivalence prévaut cependant dans son raisonnement que pour la Cour allemande, puisque le juge doit veiller au respect de l’exigence constitutionnelle de transposition des directives [64], mais seulement si aucune disposition inhérente à l’identité constitutionnelle de la France ne s’y oppose [65], à moins que le constituant n’y ait consenti. Il est intéressant de rappeler ici que le TECE [66] affirmait lui-même en son article I-5 le respect, par l’Union européenne, de « l’identité nationale des États inhérente à leurs structures fondamentales politiques et constitutionnelles », formule reprise in extenso par le Traité de Lisbonne [67] en son article 3 bis § 2.

19 Après avoir ainsi rappelé dans sa décision toutes les limites à l’intégration européenne résultant de sa jurisprudence, qui doivent être lues comme autant de menaces à l’encontre de l’application du droit de l’UE en Allemagne, la Cour constitutionnelle va néanmoins faire un pas historique, en acceptant de saisir la Cour de Justice d’un renvoi préjudiciel.

II – Une décision historique conciliatrice

20 La décision de la Cour constitutionnelle de saisir la Cour de Justice de l’Union européenne d’une question préjudicielle apparaît à juste titre comme « historique dans les annales de la Cour constitutionnelle [68] ». Elle manifeste ainsi la « Europarechtsfreundlichkeit[69] » de la Loi fondamentale (A), exprimée déjà (quoique de façon paradoxale) dans sa décision relative au Traité de Lisbonne [70]. Cette décision, pour historique qu’elle soit, ne désamorce pas pour autant tous les risques de conflit entre le droit de l’UE et le droit constitutionnel allemand même s’ils semblent aujourd’hui minimisés (B).

A – Une manifestation de la « europarechtsfreundlichkeit » de la Loi fondamentale (et du juge constitutionnel allemand)

21 La décision de la Cour constitutionnelle allemande de saisir la Cour de Justice de Luxembourg d’une question préjudicielle apparaît comme historique (1), dans un contexte a priori peu favorable à l’intégration européenne, malgré l’ouverture affichée de la Loi Fondamentale (Europarechtsfreundlichkeit). Une telle décision était pourtant prévisible (2), car annoncée dans sa jurisprudence récente.

1 – Une décision historique

22 L’objet principal de la question posée ici par la Cour constitutionnelle à la CJUE porte sur la validité de la décision de la Banque Centrale Européenne du 6 septembre 2012 relative aux caractéristiques techniques de l’OMT (Outright Monetary Transactions[71]). Le juge allemand interroge la Cour de Justice afin de savoir si la BCE a outrepassé sa compétence en adoptant ce mécanisme, qu’il estime contrevenir au principe inscrit dans le droit primaire de l’UE d’interdiction du financement monétaire du budget (article 123 TFUE). Il considère en réalité que le programme de rachat d’obligations d’État ainsi mis en œuvre par la BCE (selon des modalités qu’elle a elle-même fixées), est un instrument de politique économique, domaine relevant du seul champ de compétence des États.

23 Eu égard à la réserve traditionnelle du juge allemand à l’encontre du droit de l’Union aussi bien que de la jurisprudence de la CJUE, sa décision de faire usage du renvoi préjudiciel apparaît comme « révolutionnaire [72] ». Au lieu d’effectuer en effet un contrôle « ultra vires » au premier chef, il préfère renvoyer la balle dans le camp de la Cour de Justice, lui laissant la priorité [73] pour se prononcer sur la validité d’un outil économique ayant contribué, dans le droit fil du Mécanisme Européen de Stabilité (MES), au sauvetage de l’euro dans un contexte de grave crise économique.

24 La « Europarechtsfreundlichkeit », à savoir l’ouverture de l’Allemagne fédérale à l’intégration, est inscrite dans la Loi fondamentale depuis 1949, au travers de l’article 24-1 LF permettant l’ouverture à la coopération internationale [74]. L’article 23-1 (Article Europe), inséré dans la Loi fondamentale à la faveur de la ratification du Traité de Maastricht, et considéré comme « lex specialis à l’article 24-1 LF pour ce qui est de l’appartenance et de la participation de l’Allemagne à l’Union européenne […] confirme l’unification européenne comme objectif et directive d’ordre constitutionnel [75] », même s’il pose aussitôt un certain nombre de limites à cette intégration [76]. La Cour de Karlsruhe a elle-même consacré la « Europarechtsfreundlichkeit » de la LF dans sa décision Lisbonne. Elle y constate en effet que « la mission constitutionnelle de réaliser une Europe unie découlant de l’article 23-1 LF et du Préambule ne signifie pas […] pour les organes constitutionnels allemands qu’il soit laissé à leur choix politique de participer ou non à l’intégration européenne. La Loi fondamentale veut une intégration européenne [77] ». L’affirmation solennelle de cette ouverture de la Loi fondamentale allemande n’a cependant pas empêché la Cour constitutionnelle de formuler toutes les réserves que l’on sait à l’encontre de l’intégration européenne, le constat premier – à l’image de la jurisprudence du Conseil constitutionnel – étant celui du caractère dérivé de l’ordre juridique de l’Union, la Loi fondamentale demeurant la source et la limite de la primauté du droit de l’Union. De plus, dans la décision Lisbonne, « plein[e] de méfiance et d’hostilité », il n’est « plus du tout question de coopération entre la Cour constitutionnelle et la Cour de Justice, comme c’était encore le cas dans la décision Maastricht, et encore bien moins de l’obligation de saisir la CJUE pour répondre à des questions préjudicielles » [78].

2 – Une décision prévisible

25 Le contexte n’était donc guère favorable au « dialogue des juges » promu par le mécanisme du renvoi préjudiciel à la Cour de Justice [79]. Deux décisions récentes de la Cour constitutionnelle semblaient toutefois annoncer le geste historique accompli aujourd’hui à Karlsruhe. La première est relative à la directive « rétention des données [80] ». La Cour estime que la rétention des données de communication imposée par la directive aux opérateurs, empiète sur le secret des télécommunications garanti par l’article 10 LF. La loi de transposition est jugée inconstitutionnelle, faute de garanties suffisantes pour la protection des données. Le raisonnement du juge allemand, dans son contrôle de constitutionnalité de la loi de transposition de la directive (et donc, indirectement, de la directive transposée ?) est une fois encore identique à celui mené par son homologue français dans sa décision relative à la loi pour la confiance dans l’économie numérique [81]. Autrement dit, dans la mesure où le droit communautaire ne laisse pas de marge de transposition mais établit des prescriptions contraignantes, un recours d’inconstitutionnalité contre les mesures d’application nationale n’est pas recevable, à condition (c’est le point essentiel) que la validité de la directive soit établie, « le cas échéant » par la voie d’une procédure préjudicielle [82]. Le juge constitutionnel allemand a cependant décidé en l’espèce d’examiner la constitutionnalité de la rétention des données, inscrite dans la loi de transposition de la directive, alors même que le législateur ne disposait d’aucune marge en la matière, sans avoir pour autant posé au préalable à la CJUE la question de la validité de la directive 2006/24/CE. L’argumentation est pour le moins spécieuse, qui estime en somme que la saisine de la CJUE ne s’imposerait, pour apprécier la validité de la directive, que si la loi de transposition s’avérait contraire aux dispositions de la Loi fondamentale. La question de la constitutionnalité de la loi apparaît donc comme prioritaire (!), c’est-à-dire « comme un préalable indispensable pour déterminer si une question préjudicielle relative à la validité de la directive doit être adressée à la CJUE [83] ». La bonne volonté annoncée de saisir « le cas échéant » la Cour de Justice semble donc très apparente… La Cour constitutionnelle, estimant par conséquent que la rétention des données empiète sur le secret des télécommunications garanti par la Loi fondamentale, pose au législateur pour la transposition un certain nombre de conditions (notamment sur la durée maximale de rétention autorisée), de manière à garantir la conformité à la LF. Éludant la question préjudicielle, elle donne donc elle-même en quelque sorte sa propre lecture de la directive, de manière à ce que la transposition soit conforme à la LF. Dans la mesure où la question de la durée maximale de rétention des données touche aux droits fondamentaux, et donc à « l’identité constitutionnelle » de la RFA, elle formule ici un avertissement clair à la CJUE qui, dans un arrêt du 10 février 2009, n’avait pas abordé la question de la compatibilité de la directive 2006/24/CE avec les droits fondamentaux de l’Union [84]. Peut-être un ferment d’évolution se trouve-t-il dans l’arrêt annoncé de la Cour de Justice, Digital Rights Ireland, pour lequel l’Avocat général s’est prononcé en faveur de l’incompatibilité de cette même directive 2006/24/CE avec la Charte des droits fondamentaux de l’Union [85].

26 La seconde décision ici rappelée par la Cour constitutionnelle, Honeywell[86], fait suite à l’arrêt Mangold [87] de la CJUE qui a consacré le principe de non-discrimination en fonction de l’âge, comme un principe général du droit de l’Union, s’imposant à toute situation relevant du droit de l’Union. La Cour constitutionnelle, appelée à se prononcer sur un recours constitutionnel dirigé contre un arrêt du Tribunal fédéral du travail (ayant mis en œuvre la jurisprudence « Mangold »), réaffirme dans un premier temps son obligation d’exercer le contrôle « ultra vires[88] ». Mais dans un second temps, elle « établit des conditions tant d’ordre procédural que matériel afin d’assurer que le contrôle dit “ultra vires” s’exerce dans le respect de la “Europarechtsfreundlichkeit” formellement reconnue dans l’arrêt Lisbonne[89] ». La Cour jugeant qu’elle doit respecter l’interprétation donnée au droit de l’Union par la CJUE, estime qu’un acte de droit dérivé ne peut être déclaré comme étant pris « ultra vires » sans avoir saisi la CJUE par voie préjudicielle, afin de lui donner l’occasion de statuer sur l’interprétation et la validité des dispositions considérées [90]. Cet indice du fait que la Cour constitutionnelle « commence à faire preuve de mesure [91] », est confirmé aujourd’hui par cette saisine historique de la Cour de Justice par la Cour constitutionnelle elle-même.

27 Ce gage de bonne volonté n’éloigne cependant pas pour autant tout risque de conflit, bien qu’il paraisse moindre aujourd’hui.

B – Des risques de conflit minimisés

28 C’est une solution très habile (1) qu’a trouvée la Cour constitutionnelle, dans un contexte économique difficile. Sa décision de renvoi préjudiciel à la CJUE lui permet en effet de prouver qu’elle joue le jeu de la coopération entre les juges, sans toutefois se lier complètement les mains : la décision montre en filigrane que son contrôle reste toujours possible (2), même si sa jurisprudence récente conduit nécessairement à une raréfaction du contrôle « ultra vires » (3).

1 – Un renvoi habile à la CJUE

29 Les questions renvoyées par la Cour constitutionnelle allemande à la Cour de Justice vont permettre à cette dernière de se prononcer sur les pouvoirs de la BCE. Une remise en cause de l’OMT paraît a priori peu probable de la part de la Cour de Justice, habituellement favorable par ses décisions à l’intégration européenne. Néanmoins, dans la mesure où la Cour de Justice doit se prononcer vraisemblablement au printemps 2015, la question est posée de savoir si la BCE serait susceptible, dans ce laps de temps, d’utiliser un mécanisme dont la validité est en cours d’examen [92]. Dans un contexte de crise économique, où l’intervention des institutions européennes semblait incontournable pour assurer le sauvetage de l’euro, l’adoption de tels mécanismes, dussent-ils déplaire à l’opinion allemande, semblait indispensable. La position de la Cour constitutionnelle allemande est donc habile, qui renvoie au juge européen le soin de trancher la question, tout en faisant montre de sa volonté d’ouverture européenne (« Europarechtsfreundlichkeit »).

2 – Un contrôle de la CC toujours possible a posteriori

30 Néanmoins, dans la mesure où six juges sur huit estiment que la BCE a dépassé le cadre de son mandat en adoptant la décision relative à l’OMT, la réponse aux questions préjudicielles posées ne constituera peut-être pas l’épilogue de ce contentieux. Certes la décision Honeywell évoquée, rendue à Karlsruhe, témoigne de la volonté de conciliation du juge allemand puisque désormais la Cour constitutionnelle ne saurait constater une inapplicabilité du droit de l’Union en Allemagne « aussi longtemps que la Cour de Justice n’a pas eu la possibilité de se prononcer sur un renvoi préjudiciel » [93]. Cette nouvelle décision « Solange », conciliatrice en apparence, entrouvre néanmoins la porte à un nouveau contrôle de la part du juge constitutionnel allemand, a posteriori. C’est en effet un contrôle à double détente qui est évoqué ici, celui, prioritaire désormais, de la Cour de Justice pour examiner la validité de l’acte au regard du droit de l’Union, puis celui, second (mais loin d’être secondaire) de la Cour constitutionnelle, qui disposera du dernier mot pour assurer la sauvegarde de la souveraineté nationale, au travers des instruments du contrôle « ultra vires » et du respect de « l’identité constitutionnelle » [94]. Il est possible par exemple que, au regard des exigences constitutionnelles (la politique économique étant du ressort des États membres), la Cour interdise à la Bundesbank de participer aux divers mécanismes de l’OMT. Ce scénario « catastrophe », s’il ne paraît ni tout à fait probable ni évidemment souhaitable reste néanmoins plausible.

3 – Une raréfaction du contrôle « ultra vires »

31 Cela étant, l’apport essentiel de la décision Honeywell précitée est ici déterminant. La Cour constitutionnelle y précise en effet les conditions d’exercice de son contrôle « ultra vires ». Un dépassement de compétence de la part des institutions de l’Union ne sera sanctionné que s’il « est évident [95] », c’est-à-dire que la violation doit être « suffisamment caractérisée [96] ». Autrement dit, seule une violation manifeste des règles d’attribution des compétences pourrait conduire la Cour à rendre inapplicable en Allemagne un acte de l’Union. Mais cette condition, pour être nécessaire, n’en est pas pour autant suffisante. Il faut en outre que l’acte considéré « affecte de manière significative la structure du système de répartition des compétences entre l’Union et les États membres [97] ». En résumé, un acte de l’Union ne sera rendu inapplicable en Allemagne par la Cour constitutionnelle, que si la violation des règles d’attribution des compétences est manifeste, et si « cette violation produi[t] une modification d’ordre structurel du système de répartition des compétences au détriment de celles des États membres [98] ». La Cour allemande fait donc ici preuve d’une incontestable retenue, d’ailleurs annoncée puisqu’elle affirme devoir exercer ses compétences de contrôle « de façon modérée et ouverte au droit européen [99] », prenant acte du fait que l’Union est une « communauté de droit, liée par le principe de compétences d’attribution et les droits fondamentaux et [qui] respecte l’identité constitutionnelle des États membres [100] ». Une semblable modération prévaut s’agissant ensuite de la jurisprudence de la CJUE. La Cour allemande énonce devoir respecter les « méthodes d’interprétation » de la Cour de Justice et va jusqu’à reconnaître au juge de Luxembourg un « droit à l’erreur » dans son interprétation [101], à condition de ne pas franchir la ligne rouge de la violation manifeste et grave du système de répartition des compétences. Cette nouvelle approche semble ainsi écarter « le spectre d’une “guerre des juges” qui plane sur l’ordre juridique de l’Union depuis que [la Cour constitutionnelle] s’est reconnue le pouvoir de “dernier mot” sur la légalité des actes du droit de l’Union [102] ». Les conditions posées par la Cour à la mise en œuvre de son contrôle ultra vires sont donc désormais si restrictives, qu’il est loisible de « s’interroger sur la question de savoir si la décision Honeywell n’a pas de facto aboli le contrôle “ultra vires” [103] ».

32 Nonobstant, le « dialogue des juges », entendu d’ordinaire comme une coopération des juges nationaux avec le juge européen afin d’assurer une interprétation uniforme du droit de l’Union, semble revêtir une signification singulière dans l’esprit du juge allemand. Il n’écarte pas en effet la possibilité d’opérer une interprétation des mécanismes de l’OMT conforme au droit de l’Union, mais à condition que les exigences posées par lui soient pour l’essentiel prises en considération [104]. Ne suggère-t-il pas ainsi au juge européen d’opérer une interprétation conforme… aux exigences du droit constitutionnel allemand telles qu’interprétées par la Cour constitutionnelle ? Dialogue des juges…

33 La Cour constitutionnelle allemande a fait preuve au fil du temps d’une certaine ambivalence à l’égard de l’intégration européenne, tantôt docteur Jekyll témoignant d’une « Europarechtsfreundlichkeit » affirmée, tantôt Mister Hyde, conditionnant et contrôlant l’ouverture de l’ordre juridique interne au droit de l’Union, la Loi fondamentale se révélant tour à tour instrument de la conciliation ou rempart contre l’intrusion. Sa position semble néanmoins peu à peu évoluer vers une plus grande tolérance à l’égard du droit de l’Union, ce que confirme de manière éclatante aujourd’hui sa décision de saisir la Cour de Luxembourg d’une série de questions préjudicielles. La décision très attendue relative au Mécanisme Européen de Stabilité, qui juge les recours irrecevables ou infondés [105], vient à point nommer compléter l’impression que la Cour allemande est en train d’opérer un tournant dans sa jurisprudence. Cet effort de conciliation, qui s’est manifesté aussi en France [106], on le sait, serait toutefois plus « une nouveauté qu’une révolution [107] », tant la Cour constitutionnelle a progressivement édulcoré sa jurisprudence. Mais si conciliation il y a, c’est celle de « l’exigence de la primauté indiscutable du droit de l’Union et [de] la conviction rassurante que la Constitution est la norme suprême de l’ordre interne [108] ». Quant à la question de savoir qui aura le « dernier mot », le Président de la Cour constitutionnelle, M. Andreas Vosskuhle, y a apporté la réponse suivante : « That’s a question that should be asked as infrequently about the European Court of Justice and the Federal Constitutional Court as it should of one’s spouse [109] »… En tout état de cause, comment ne pas lire un signe de maturité de l’ordre juridique de l’Union européenne dans ces concessions successives des juges constitutionnels ? Et sans doute l’insertion de la Charte des droits fondamentaux de l’Union au rang « constitutionnel » européen ne pourra que contribuer à ce que les juges internes renoncent peu à peu à briser des lances avec leurs homologues européens.


Date de mise en ligne : 11/04/2015.

https://doi.org/10.3917/rfdc.101.0145

Notes

  • [1]
    Voir D. Simon, EUROPE, mai 2013, p. 6.
  • [2]
    CC, décis. n° 2013-314 QPC du 4 avril 2013.
  • [3]
    Bundesverfassungsgericht.
  • [4]
    Référence n° 9/2014, 7 février 2014.
  • [5]
    Décision du 17 décembre 2013, décision au fond le 18 mars 2014, communiqué de presse n° 23/2014.
  • [6]
    Décision du 14 janvier 2014.
  • [7]
    Voir par exemple F. Lemaître, « Les juges constitutionnels allemands offrent un répit à la BCE », Le Monde, 8 février 2014 ; J.-P. Lacour, « Débat sur les OMT : Karlsruhe renvoie l’affaire devant la Cour de Justice européenne », Les Échos, 7 février 2014 ; J. Quatremer, dans son blog « Coulisses de Bruxelles », « La Cour constitutionnelle allemande renonce à faire exploser la zone euro », Libération, 11 février 2014.
  • [8]
    Voir Le Monde, article précité, note 7.
  • [9]
    Voir Les Échos, article précité, note 7.
  • [10]
    Grundgesetz, 23 mai 1949.
  • [11]
    Voir J. Quatremer, blog précité, note 7.
  • [12]
    Voir le § 30 de la décision, où il est fait référence sur ce point aux jurisprudences des Cous suprêmes au Danemark, en Estonie, en Irlande, en France (CC, décis. n° 2006-540 DC du 27 juillet 2006), en Lettonie, en Pologne etc.
  • [13]
    Voir A. Pliakos, « La fonction communautaire/européenne du juge national mise en question », Revue de l’Union européenne, n° 545, février 2011, p. 86.
  • [14]
    Ibid. p. 79.
  • [15]
    Recueil des décisions de la Cour constitutionnelle (Bundesverfassungsgerichtsentscheidungen, BVerfGE), BVerfGE 37, 271 « Internationale Handelsgesellschaft », 29 mai 1974 ; BVerfGE 73, 339 « Wünsche Handelsgesellshaft », 23 octobre 1986. Voir I. B) infra.
  • [16]
    Les décisions relatives au Traité de Maastricht et de Lisbonne étant particulièrement « directives » à l’égard de l’intégration et du droit de l’Union, nous y reviendrons.
  • [17]
    La Cour constitutionnelle l’a affirmé par exemple dès sa décision relative au Traité de Maastricht (12 octobre 1993, § 111 : « Deutschland ist einer der “Herren der Verträge” […] », « l’Allemagne est l’un des “maîtres des traités” […] »).
  • [18]
    Voir le début de l’article 23-1 LF : « Pour l’édification d’une Europe unie, la République fédérale d’Allemagne concourt au développement de l’Union européenne […] »
  • [19]
    Voir H. Labayle & R. Mehdi, « Le Conseil constitutionnel, le mandat d’arrêt européen et le renvoi préjudiciel à la Cour de Justice », RFDA, mai-juin 2013, p. 461.
  • [20]
    La Cour constitutionnelle, dans la décision relative au Traité de Lisbonne du 30 juin 2009, s’est elle-même reconnue le droit de conserver le dernier mot pour statuer sur des questions fondamentales relevant de l’identité constitutionnelle (voir le § 340).
  • [21]
    Voir le § 20 de la décision commentée. L’article 23-1 dispose : « Pour l’édification d’une Europe unie, la République fédérale d’Allemagne concourt au développement de l’Union européenne qui est attachée aux principes fédératifs, sociaux, d’État de droit et de démocratie ainsi qu’au principe de subsidiarité et qui garantit une protection des droits fondamentaux substantiellement comparable à celle de la présente Loi fondamentale. À cet effet, la Fédération peut transférer des droits de souveraineté par une loi approuvée par le Bundesrat. L’article 79, al. 2 et 3 est applicable à l’institution de l’Union européenne ainsi qu’aux modifications de ses bases conventionnelles et aux autres textes comparables qui modifient ou complètent la présente Loi fondamentale dans son contenu ou rendent possibles de tels modifications ou compléments » (texte en français sur le site du Bundestag : http://www.bundestag.de/blueprint/servlet/blob/189762/d2a059e856bfc6f2bf3f5fccdf190858/loi_fondamentale-data.pdf (site consulté en mai 2014)).
  • [22]
    CC, décis. n° 2004-505 DC du 19 novembre 2004 relative au Traité instituant une Constitution pour l’Europe.
  • [23]
    Article 88-1 : « La République participe aux Communautés européennes et à l’Union européenne, constituées d’États qui ont choisi librement, en vertu des traités qui les ont instituées, d’exercer en commun certaines de leurs compétences. »
  • [24]
    Considérant 11.
  • [25]
    Voir A. Levade, « Le Conseil constitutionnel aux prises avec la Constitution européenne », RDP, 2005, p. 29.
  • [26]
    CJCE, 15 juillet 1964, Costa c/ ENEL, aff. 6/64 : « Attendu qu’à la différence des traités internationaux ordinaires, le Traité de la CEE a institué un ordre juridique propre intégré au système juridique des États membres […] »
  • [27]
    2 BvR 2661/06, voir le § 53.
  • [28]
    Voir H. Labayle & J.-L. Sauron, « La Constitution française à l’épreuve de la Constitution pour l’Europe », RFDA, 2005, p. 6.
  • [29]
    Voir la décision relative au Traité de Lisbonne du 30 juin 2009 (§ 234 notamment) et la décision Honeywell évoquée (§ 53 : « Der Anwendungsvorrang entspricht auch der verfassungsrechtlichen Ermächtigung des Art. 23 Abs. 1 GG… », à savoir « la primauté correspond à l’habilitation constitutionnelle de l’article 23-1 de la Loi fondamentale »).
  • [30]
    Voir le § 24 de la décision : « D’après l’ordre juridique de la République fédérale d’Allemagne, la primauté d’application du droit de l’Union doit être reconnue et garantie, de façon que les compétences de contrôle réservées constitutionnellement à la Cour constitutionnelle soient exercées, mais seulement avec retenue et de façon ouverte à l’intégration européenne » (nous reviendrons ultérieurement sur ces dernières précisions, qui témoignent de l’évolution de la Cour constitutionnelle).
  • [31]
    Décision du 12 octobre 1993, BVerfGE 89,155.
  • [32]
    Décision du 30 juin 2009, BVerfGE 123, 267.
  • [33]
    La Cour constitutionnelle a critiqué plus particulièrement le mode d’élection du Parlement européen, considéré comme inéquitable, car il ne respecte pas le principe « un homme – une voix ».
  • [34]
    Voir A.L. Barrière & B. Roussel, « Le Traité de Lisbonne, étape ultime de l’intégration européenne ? - Le jugement du 30 juin 2009 de la Cour constitutionnelle allemande », Comité d’études des relations franco-allemandes (CERFA), note du CERFA 66, septembre 2009, pp. 11-12, http://www.ifri.org/index.php?page=detail-contribution&id=5446&id_provenance=103&provenance_context_ id=29 (site consulté en mai 2014. Nous reviendrons sur la question de la « compétence de la compétence »).
  • [35]
    Voir A. Pliakos, « La fonction communautaire/européenne du juge national mise en question », Revue de l’Union Européenne n° 545, février 2011, p. 86.
  • [36]
    Voir ci-dessus note 17.
  • [37]
    Voir H. Labayle & J.-L. Sauron, op. cit., p. 7.
  • [38]
    Voir R. Lecourt, L’Europe des juges, Bruylant 1976, réédité en 2008. Voir également Le Dialogue des juges : mélanges en l’honneur du président Bruno Genevois, Dalloz-Sirey, 2009.
  • [39]
    Voir le § 22 de la décision.
  • [40]
    Décision du 12 octobre 1993, BVerfGE 89, 155.
  • [41]
    Décision du 30 juin 2009, BVerfGE 123, 267.
  • [42]
    Voir le § 31.
  • [43]
    BVerfGE 37, 271, « Internationale Handelsgesellschaft », 29 mai 1974.
  • [44]
    Voir point B. I. 3. : « Art. 24 GG ermächtigt nicht eigentlich zur Übertragung von Hoheitsrechten ».
  • [45]
    Voir D. Hanf, « L’encadrement constitutionnel de l’appartenance de l’Allemagne à l’Union européenne. L’apport de l’arrêt ’Lisbonne’ de la Cour constitutionnelle fédérale », Cahiers de Droit européen 2009, p. 653.
  • [46]
    BVerfGE 73, 339, « Wünsche Handelsgesellshaft », 23 octobre 1986.
  • [47]
    Voir le point II. B. 1. b. de la décision.
  • [48]
    BVerfGE 75, 223, « Kloppenburg », 8 avril 1987.
  • [49]
    Loi d’approbation des Traités, adoptée sur la base de l’article 24 de la Loi fondamentale.
  • [50]
    Cité par D. Hanf, in CDE, 2009, précité, p. 660.
  • [51]
    Voir point B. 2. D. : « Zwar ist dem Gerichtshof keine Befugnis übertragen worden, auf diesem Wege Gemeinschaftskompetenzen beliebig zu erweitern. »
  • [52]
    Voir B. 2. d. bb) : « Die Gemeinschaft ist kein souveräner Staat im Sinne des Völkerrechts, dem eine Kompetenzkompetenz über innere Angelegenheiten zukäme. »
  • [53]
    BVerfGE 89, 155, décision du 12 octobre 1993.
  • [54]
    L’article 23-1 dispose : « Pour l’édification d’une Europe unie, la République fédérale d’Allemagne concourt au développement de l’Union européenne qui est attachée aux principes fédératifs, sociaux, d’État de droit et de démocratie ainsi qu’au principe de subsidiarité et qui garantit une protection des droits fondamentaux substantiellement comparable à celle de la présente Loi fondamentale. À cet effet, la Fédération peut transférer des droits de souveraineté par une loi approuvée par le Bundesrat. L’article 79, al. 2 et 3 est applicable à l’institution de l’Union européenne ainsi qu’aux modifications de ses bases conventionnelles et aux autres textes comparables qui modifient ou complètent la présente Loi fondamentale dans son contenu ou rendent possibles de tels modifications ou compléments. »
  • [55]
    Respect des principes fédératifs, sociaux, d’État de droit et de démocratie, de subsidiarité et protection des droits fondamentaux « substantiellement comparable » à celle de la Loi fondamentale.
  • [56]
    Voir par exemple D. Hanf, précité, p. 666.
  • [57]
    Voir le § 21 de la décision du 14 janvier 2014 étudiée.
  • [58]
    À cause de son mode d’élection d’une part (car le principe « un homme – une voix » n’est pas respecté), et surtout en l’absence de « peuple européen » d’autre part.
  • [59]
    Voir la décision Maastricht, BVerfGE 89, 155, § 102 (« Aus alledem folgt, daß dem Deutschen Bundestag Aufgaben und Befugnisse von substantiellem Gewicht verbleiben müssen »).
  • [60]
    BVerfGE 123, 267, décision du 30 juin 2009.
  • [61]
    Voir le § 31.
  • [62]
    CC, décis. n° 2006-540 DC du 27 juillet 2006, Loi relative aux droits d’auteur et droits voisins dans la société de l’information.
  • [63]
    Voir B. Mathieu, « Le droit communautaire fait son entrée au Conseil constitutionnel », Petites Affiches 22 août 2006, n° 167, p. 3.
  • [64]
    Basée, on l’a dit, sur l’article 88-1 de la Constitution française du 4 octobre 1958.
  • [65]
    Voir le considérant 19. Une deuxième condition précise que les dispositions de la directive doivent être « inconditionnelles et suffisamment précises », condition posée dans sa précédente CC, décis. n° 2004-496 DC du 10 juin 2004, Loi pour la confiance dans l’économie numérique. Force est de constater que le juge constitutionnel reprend ici à son compte la jurisprudence élaborée par le juge de Luxembourg s’agissant de l’« effet direct » des directives (voir par exemple CJCE Van Duyn, aff. 41-74, 4 décembre 1974).
  • [66]
    « Traité établissant une Constitution pour l’Europe » du 16 décembre 2004.
  • [67]
    Traité de Lisbonne modifiant le traité sur l’Union européenne et le traité instituant la Communauté européenne, signé à Lisbonne le 13 décembre 2007, JOUE, 17 décembre 2007, C 306-12.
  • [68]
    Voir J.-P. Lacour, « Débat sur les OMT : Karlsruhe renvoie l’affaire devant la Cour de Justice européenne », Les Échos, 7 février 2014.
  • [69]
    Ouverture au droit européen.
  • [70]
    Arrêt du 30 juin 2009. Voir le § 225.
  • [71]
    Opérations Monétaires sur Titres, en anglais dans le texte.
  • [72]
    Voir J. Valero, « OMT : les juges allemands interrogent la justice européenne », Europolitique, n° 4805, 10 février 2014, p. 11.
  • [73]
    Priorité, car tout contrôle de la Cour constitutionnelle n’en est pas pour autant exclu, nous y reviendrons (B) (ci-dessous).
  • [74]
    L’art. 24 LF ensuite, énonce en effet dans son 1er alinéa que la Fédération a le droit de « transférer des droits de souveraineté (compétences) à des institutions internationales par voie législative ».
  • [75]
    Voir D. Hanf, CDE, 2009 précité, p. 665.
  • [76]
    Rappelons encore une fois la lettre de l’article 23-1 : « Pour l’édification d’une Europe unie, la République fédérale d’Allemagne concourt au développement de l’Union européenne qui est attachée aux principes fédératifs, sociaux, d’État de droit et de démocratie ainsi qu’au principe de subsidiarité et qui garantit une protection des droits fondamentaux substantiellement comparable à celle de la présente Loi fondamentale. »
  • [77]
    § 225 de la décision du 30 juin 2009.
  • [78]
    Voir F.C. Mayer, « Rashomon à Karlsruhe », RTDE, 2010, p. 77 (Propos de « Justus Lipsius »).
  • [79]
    Article 267 TFUE.
  • [80]
    Décision du 2 mars 2010, BVerfGE 118,79, relative à la rétention des données de communication ordonnée par la directive 2006/24/CE du 15 mars 2006, JOUE L 105/54 du 13 avril 2006.
  • [81]
    CC, décis. n° 2004-496 DC du 10 juin 2004.
  • [82]
    Voir D. Hanf, « Vers une précision de la Europarechtsfreundlichkeit de la Loi Fondamentale », Cahiers de Droit Européen, 2010, p. 522. Le Conseil constitutionnel, dans une situation analogue avait estimé que « la transposition en droit interne d’une directive communautaire résulte d’une exigence constitutionnelle à laquelle il ne pourrait être fait obstacle qu’en raison d’une disposition expresse contraire de la Constitution ; qu’en l’absence d’une telle disposition, il n’appartient qu’au juge communautaire, saisi le cas échéant à titre préjudiciel, de contrôler le respect par une directive communautaire tant des compétences définies par les traités que des droits fondamentaux garantis par l’article 6 du Traité sur l’Union européenne » (c’est nous qui soulignons).
  • [83]
    Voir D. Hanf, « Vers une précision de la Europarechtsfreundlichkeit de la Loi Fondamentale », précité, p. 525.
  • [84]
    Voir CJUE, Irlande c/Conseil, aff. C-301/106, 10 février 2009.
  • [85]
    Conclusions de l’Avocat général Cruz Villalon, 12 décembre 2013, affaires jointes C-293/12, C-594/12. Voir la conclusion § 159, point 1, où l’incompatibilité avec la Charte des droits fondamentaux de l’Union est justement reconnue « du fait de l’obligation de conservation des données qu’elle impose, ne s’accompagnant pas des principes indispensables appelés à régir les garanties nécessaires à l’encadrement de l’accès auxdites données et de leur exploitation ».
  • [86]
    Décision du 6 juillet 2010, 2 BvR 2661/06.
  • [87]
    CJUE, 22 novembre 2005, aff. C-144/04.
  • [88]
    Afin de vérifier que l’Union s’est tenue dans les limites imposées à l’intégration par la LF.
  • [89]
    Voir D. Hanf, CDE 2010, p. 539.
  • [90]
    Voir le § 60 : « Vor der Annahme eines Ultra-vires-Akts der europäischen Organe und Einrichtungen ist deshalb dem Gerichtshof im Rahmen eines Vorabentscheidungsverfahrens nach Art. 267 AEUV die Gelegenheit zur Vertragsauslegung sowie zur Entscheidung über die Gültigkeit und die Auslegung der fraglichen Rechtsakte zu geben. Solange der Gerichtshof keine Gelegenheit hatte, über die aufgeworfenen unionsrechtlichen Fragen zu entscheiden, darf das Bundesverfassungsgericht für Deutschland keine Unanwendbarkeit des Unionsrechts feststellen. »
  • [91]
    Voir A. Pliakos, « La fonction communautaire/européenne du juge national mise en question », Revue de l’Union européenne, n° 545, février 2011, p. 95.
  • [92]
    Voir les déclarations en ce sens de M. Fratzscher, président de l’Institut allemand pour la recherche économique (DIW), in « Les juges constitutionnels allemands offrent un répit à la BCE », Le Monde, 8 février 2014.
  • [93]
    Voir le § 60 de la décision : « Solange der Gerichtshof keine Gelegenheit hatte, über die aufgeworfenen unionsrechtlichen Fragen zu entscheiden, darf das Bundesverfassungsgericht für Deutschland keine Unanwendbarkeit des Unionsrechts feststellen. »
  • [94]
    Rien ne garantit en effet l’abandon, par la Cour allemande, de sa jurisprudence Kloppenburg évoquée ci-dessus, affirmant son contrôle sur la jurisprudence de la CJUE elle-même non dotée de la « compétence de la compétence »…
  • [95]
    « Ersichtlich ».
  • [96]
    Voir le § 61 de la décision.
  • [97]
    Ibid.
  • [98]
    Voir D. Hanf, « Vers une précision de la Europarechtsfreundlichkeit de la Loi fondamentale », précité, p. 540.
  • [99]
    « nur zurückhaltend und europarechtsfreundlich », § 59.
  • [100]
    Ibid.
  • [101]
    Voir le § 66 de la décision.
  • [102]
    Voir J. Waltuch, « La guerre des juges n’aura pas lieu », RTDE, 2011, p. 360.
  • [103]
    Voir D. Hanf, « Vers une précision de la Europarechtsfreubdlichkeit… », précité, p. 548.
  • [104]
    Voir le § 99 de la décision.
  • [105]
    Décision du 18 mars 2014, voir le communiqué de presse n° 23/2014.
  • [106]
    CC, décis. n° 2013-314 QPC du 4 avril 2013 relative au mandat d’arrêt européen.
  • [107]
    Voir le commentaire de A. Levade, « Anatomie d’une première : renvoi préjudiciel du Conseil constitutionnel à la Cour de Justice ! », La Semaine Juridique, Edition générale, n° 23, 3 juin 2013, p. 1114.
  • [108]
    Voir H. Labayle & R. Mehdi, « Le droit au juge et le mandat d’arrêt européen : lectures convergentes de la Cour de Justice de l’Union européenne et du Conseil constitutionnel », RFDA, 2013, p. 701.
  • [109]
    Voir « Drifting into Politics: Is Germany’s High Court Anti-European? », http://www.spiegel.de/international/germany/the-eu-critical-course-of-the-german-high-court-a-958018.html (site consulté en mai 2014).
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