Couverture de RFAS_084

Article de revue

Le système d'aide et les politiques de l'emploi en faveur des personnes handicapées aux États-Unis

Pages 111 à 136

Notes

  • [1]
    David Wittenburg, chercheur senior, Anu Rangarajan, vice-présidente et directrice de la division Human Services Research et Todd Honeycutt, analyste chercheur: Institut Mathematica Policy Research, Inc Princeton (États-Unis).
  • [2]
    Cet article s’inspire fortement d’un rapport de l’institut Mathematica Policy Research financé par le Department for Work and Pensions. Les auteurs tiennent à remercier plusieurs personnes pour leur contribution: Mike Daly, Maria Strudwick et Janet Allaker, du Department of Work and Pensions, Richard Dorsett, du Policy Studies Institute, Thomas Golden, de la Cornell University, ainsi que Craig Thornton et Bonnie O’ Dayde, de l’institut Mathematica Policy Research. Nous remercions également Ankur Sarin et Debra Brucker, qui nous ont apporté leur aide au début de notre travail.
  • [3]
    Certaines personnes handicapées peuvent également bénéficier du Workforce Development System, mis en place au niveau des États fédérés. Dans le cadre de ce dispositif, des guichets uniques (One-Stop Centers) ont été créés sur l’ensemble du territoire des États-Unis pour promouvoir l’éducation, la formation et l’aide à l’insertion professionnelle ainsi que l’emploi pour l’ensemble de la population, y compris les personnes handicapées. Toutefois, selon Golden, Zeitzer et Bruyère (à paraître), la fourniture de services aux personnes handicapées par les guichets uniques s’est révélée difficile et est, de ce fait, restée limitée.
  • [4]
    Les deux principaux programmes publics de couverture maladie en faveur des personnes handicapées sont Medicaid, qui s’adresse aux personnes à bas revenus, et Medicare, qui couvre les personnes âgées et les personnes handicapées. Dans la plupart des États fédérés, les allocataires du SSI font partie des catégories de personnes qui ont accès à Medicaid et les bénéficiaires du SSDI ont droit à Medicare après une période d’attente de deux ans. Bien qu’il existe des différences entre Medicaid et Medicare en termes de conditions d’accès aux droits et de couverture, ces deux programmes contribuent de manière importante à couvrir des dépenses de santé potentiellement élevées.
  • [5]
    En 1973, les pouvoirs publics ont adopté les premières dispositions législatives sur les droits civiques des personnes handicapées. L’article 504 de la loi de 1973 sur la réadaptation (Rehabilitation Act), rendait en effet illégal l’exercice, par les organismes fédéraux, les universités publiques, les entreprises travaillant pour le gouvernement fédéral et toute autre institution ou entité recevant des fonds fédéraux, d’une discrimination à l’embauche fondée sur le handicap. Au cours des vingt années qui ont suivi, plusieurs lois ont été adoptées pour améliorer encore la situation des personnes handicapées en matière d’éducation, d’autonomie dans la vie quotidienne, d’emploi et de logement. Figuraient notamment parmi ces lois l’Education for Handicapped Children Act (devenue l’Individuals with Disabilities Education Act), adoptée en 1975 pour garantir à tous les enfants handicapés l’accès gratuit à une éducation appropriée dans l’environnement le plus normal possible, et la Fair Housing Amendments Act, de 1988, qui rendait obligatoire la construction de logements accessibles dans tous les immeubles collectifs neufs de quatre logements au moins; cette obligation visait les immeubles publics comme privés, pas seulement ceux qui recevaient des fonds fédéraux.
  • [6]
    Sur l’ADA, voir l’article dans ce numéro de R. Jahiel: « Evaluation de l’Americans with disabilities Act ».
  • [7]
    Rangarajan et al. (2008) ont également examiné les mesures proposées par les dispositifs d’aide sociale qui ciblent les mères à faibles revenus. La seule évaluation analysée concernait des aides à l’emploi fournies à des mères à faibles revenus dans le cadre de dispositifs qui ciblaient des publics ayant des problèmes de santé plutôt qu’un handicap au sens large. C’est pourquoi elle a été exclue de l’analyse présentée ici.
  • [8]
    Peikes et al. (2005) ont tenté d’utiliser un modèle non expérimental, faisant appel à une méthode d’appariement basée sur le score de propension; ils ont apparié, à l’aide de données administratives, les membres du groupe de traitement aux bénéficiaires d’un groupe témoin sur la base de diverses caractéristiques administratives. Ils ont appliqué cette méthode aux quatre sites qui avaient utilisé la sélection aléatoire et ont comparé les résultats obtenus avec la méthode d’appariement basée sur le score de propension et ceux obtenus par sélection aléatoire. Ils ont constaté que les estimations réalisées avec la méthode basée sur le score de propension n’étaient pas cohérentes par rapport à celles réalisées dans le cadre d’un modèle expérimental (sur les quatre sites où la sélection aléatoire avait aussi été utilisée). Par conséquent, les auteurs ont renoncé à utiliser la méthode basée sur le score de propension pour les sites qui n’avaient pas utilisé la sélection aléatoire, estimant que les estimations seraient probablement faussées.
  • [9]
    L’influence des évaluations des dispositifs d’emploi accompagné s’explique en grande partie par l’efficacité démontrée de cette stratégie en termes d’emploi concurrentiel, efficacité qui la distingue des approches plus traditionnelles de la réadaptation utilisées jusqu’alors pour les personnes souffrant de troubles psychiatriques. La notion d’emploi concurrentiel a été définie très précisément, comme un emploi que n’importe qui peut solliciter, exercé dans un lieu de travail ordinaire et donnant lieu à une rémunération au moins égale au salaire minimum. L’emploi concurrentiel se distingue donc d’autres concepts, comme celui d’emploi rémunéré, susceptibles de couvrir aussi les emplois en milieu protégé et réservés aux personnes handicapées. Lorsque les évaluations scientifiquement rigoureuses des modèles d’emploi accompagné destinés à ce public ont été réalisées, il y avait longtemps que les pouvoirs publics testaient de nouvelles stratégies de réadaptation en faveur des personnes atteintes de troubles psychiatriques sévères, mais aucune n’avait autant contribué à améliorer les chances de ce public d’occuper un emploi concurrentiel (Bond, 1992).

Introduction

1Aux États-Unis, la définition de stratégies pour promouvoir l’emploi des personnes handicapées, en particulier celles qui perçoivent des prestations en espèces pour invalidité, suscite un intérêt croissant. Cette définition est rendue nécessaire par l’augmentation du nombre de bénéficiaires de telles prestations, par la baisse générale du taux d’emploi des personnes handicapées et par le changement de cap des politiques publiques, désormais orientées vers des mesures qui favorisent la pleine intégration des personnes handicapées à toutes les activités (Burkhauser, Houtenville et Wittenburg, 2003). Toutefois, le déploiement à grande échelle de mesures en faveur de l’emploi des personnes handicapées se heurte à un obstacle majeur: les conditions d’accès aux principaux régimes d’allocations en vigueur aux États-Unis dissuadent les personnes handicapées de travailler, parce que l’ouverture des droits repose en premier lieu sur l’inaptitude au travail. La place insuffisante de l’emploi dans le système d’aide aux personnes handicapées a retardé la définition d’une politique de l’emploi en faveur de ce public, même si davantage de mesures destinées à favoriser l’insertion professionnelle ont été prises ces dernières années.

2Dans cet article [2], nous décrivons la place qu’occupent les programmes d’aide à l’emploi au sein du système américain d’aide aux personnes handicapées et présentons une synthèse des résultats de plusieurs évaluations de bonnes pratiques dans le domaine des aides à la réinsertion professionnelle des personnes handicapées. Nos constatations offrent un éclairage précieux sur l’évolution des aides à l’emploi aux États-Unis et devraient par conséquent intéresser les responsables des politiques publiques, aux États-Unis et dans d’autres pays.
Après une présentation du fonctionnement des programmes d’aide à l’emploi dans le cadre plus large du système en faveur des personnes handicapées, nous décrivons brièvement l’évolution de la politique en faveur des personnes handicapées, qui a joué un rôle important dans la volonté des pouvoirs publics de tester de nouvelles stratégies d’aide à l’emploi, dans le cadre d’environnements plus intégrés. Nous présentons ensuite les constatations issues d’une évaluation scientifiquement rigoureuse des mesures testées ces dernières décennies et de quelques projets pilotes innovants en cours de mise en œuvre. Nous concluons par une présentation synthétique de l’expérience des États-Unis en matière de mesures d’aide à l’emploi et par une réflexion sur les enseignements que pourraient en tirer d’autres pays.

Panorama des programmes en faveur des personnes handicapées aux États-Unis

3Le système en place aux États-Unis en matière de handicap regroupe plusieurs programmes, publics ou privés, offrant des services et des aides à différentes catégories de personnes handicapées. Ces programmes ne forment pas un ensemble homogène de mesures: ils ont été élaborés à différents moments de l’histoire du pays pour offrir des aides, de nature financière ou autre, notamment des prestations en espèces, des aides à la réadaptation et autres services spécialisés (robotique d’assistance par exemple) et appliquent des règles différentes (parfois en contradiction les unes avec les autres) en matière d’accès aux droits, de prestations et de participation.

4Au sein de ce système, les programmes de transfert monétaire les plus importants sont le programme d’allocation supplémentaire de revenu (Supplemental Security Income, SSI) et le régime d’assurance-invalidité Social Security Disability Insurance (SSDI), gérés par l’administration américaine de la Sécurité sociale (Social Security Administration, SSA) (cf. tableau 1). Ces deux dispositifs sont les deux principaux régimes de prestations en espèces auxquels la population générale peut avoir accès. En 2006, on dénombrait 8,7 millions de bénéficiaires du SSDI et 6 millions d’allocataires du SSI souffrant de cécité ou d’un autre handicap (SSA, 2008a). Ces deux programmes ont d’importantes implications pour les stratégies d’aide à l’emploi en faveur des handicapés aux États-Unis, parce qu’une forte proportion de personnes handicapées en bénéficie et, partant, est influencée par le fait que les conditions d’ouverture des droits reposent en priorité sur l’inaptitude au travail. Il existe d’autres programmes, qui servent des prestations à des catégories spécifiques de handicapés, par exemple aux victimes d’accidents du travail ou aux anciens militaires, comme le Workers Compensation program (pour les victimes d’accidents du travail) et le Veterans Affairs program (pour les invalides de guerre).

Tableau 1

Principaux programmes en vigueur aux États-Unis en faveur des personnes handicapées

Tableau 1
Programme Description Population ciblée Nombre de participants Origine du financement Dispositifs servant des prestations d’invalidité Social Security Disability Insurance (SSDI) Assurance protégeant les travailleurs et leurs ayants droit contre les risques de pertes de revenus liées à l’invalidité. Le montant des droits dépend de la moyenne, calculée sur l’ensemble de la vie active, des revenus entrant dans l’assiette de la Sécurité sociale. Les prestations servies au conjoint et aux enfants sont soumises à un plafond de ressources pour l’ensemble du foyer. Adultes invalides justifiant d’une carrière d’assurance aux fins de SSDI suffisante ainsi que leurs ayants droit (conjoint, enfants). 6,8 millions de travailleurs, 0,2 million de conjoints, 1,7 millions d’enfants (2006) (SSA, 2008) Financement fédéral (cotisations prélevées sur les salaires) Supplemental Security Income (SSI) Programme soumis à conditions de ressources (concernant à la fois le revenu et le patrimoine) servant une allocation mensuelle aux personnes de moins de 65 ans qui souffrent de cécité ou d’invalidité*. Aveugles et invalides disposant d’un revenu et d’un patrimoine faibles, quel que soit leur âge. 6 millions de personnes, aveugles ou invalides au sens de la législation fédérale et de celle des États (déc. 2006) (SSA, 2008). Financement fédéral (fiscalité), financement complémentaire des États. Autres programmes d’aides aux personnes handicapées visant des publics spécifiques Workers’Compensation Prestations en espèces, services de réadaptation et prestations médicales fournis par les employeurs aux travailleurs victimes d’accidents du travail ou de maladies professionnelles et à leurs survivants (en cas de maladie ou accident mortel). Facultatif au Texas uniquement. Travailleurs victimes d’accidents du travail ou de maladies professionnelles et leurs survivants. Données non disponibles** Primes d’assurance versées par l’employeur. Certains employeurs assurent le financement sur leurs propres ressources. Programmes du Department of Veterans Affairs (VA) Programmes servant des prestations, notamment des prestations d’invalidité et des pensions militaires, aux personnes qui ont servi dans l’armée et sont âgées de plus de 65 ans ou de moins de 65 ans et sont invalides. Les prestations qui ne dépendent pas de la carrière accomplie sont soumises à conditions de ressources. Anciens militaires de plus de 65 ans ou invalides. 2,9 millions d’anciens militaires bénéficiaires de prestations d’invalidité (décembre 2007) (US VA, 2008) Financement fédéral
tableau im2
Programme Description Population ciblée Nombre de participants Origine du financement Programmes d’aide à la réinsertion dans l’emploi State Vocational Rehabilitation (VR) Programme visant à faciliter l’insertion professionnelle des personnes souffrant d’un handicap physique ou mental à travers des services médicaux et thérapeutiques, un accompagnement, des actions éducatives, des formations et des services de placement. Adultes souffrant d’un handicap physique ou mental susceptibles de tirer parti de services de réadaptation professionnelle. 1,4 million de bénéficiaires (2004) (US Department of Education, 2007) Financement mixte État fédéral/États fédérés (part des États fédérés:21,3% minimum) State Workforce Development Systems Programme institué par la loi Workforce Investment Act (WIA), de 1998, obligeant les États à instaurer des guichets uniques regroupant la formation professionnelle, les services de formation et d’alphabétisation des adultes et les services de réadaptation professionnelle. Tous les adultes et les jeunes remplissant les critères fixés par les États fédérés. 20000 adultes handicapés et 23800 jeunes handicapés sont sortis du dispositif instauré par la loi WIA (2005) (SPRA, 2007) Financement mixte État fédéral/États fédérés Source: d’après Wittenburg et Favreault (2003). *Le SSI sert également des prestations aux personnes de 65 ans et plus qui disposent de faibles revenus et aux enfants de moins de 18 ans qui satisfont certains critères d’invalidité et de revenu. **Il n’existe pas d’estimations nationales du nombre de bénéficiaires en raison du mode de gestion des données relatives à l’indemnisation des accidents du travail. Pour un aperçu général, voir Sengupta et al., 2007. En 2005, 128,1millions de travailleurs étaient couverts par un régime d’indemnisation des accidents du travail et des maladies professionnelles (SSA, 2008).

Principaux programmes en vigueur aux États-Unis en faveur des personnes handicapées

5Les aides à l’emploi en faveur des personnes handicapées sont financées par divers organismes dépendant de l’État fédéral ou des États fédérés et sont fournies par un vaste réseau de prestataires de services de réadaptation privés ou publics, ce qui entraîne une certaine fragmentation. Le programme de réadaptation professionnelle Vocational Rehabilitation est le principal dispositif d’aide à l’emploi qui s’adresse à la population handicapée en général. En 2004, 1,4 million de personnes en ont bénéficié (US DOE, 2007) [3].

6Bien que les prestataires de services de réadaptation, publics comme privés, tentent de cibler un public large, les dépenses consacrées à ce type de services restent relativement limitées comparativement aux budgets alloués aux aides en espèces. Selon le Government Accountability Office (2005), institution supérieure de contrôle des comptes aux États-Unis, 2% seulement de l’ensemble des dépenses en faveur des personnes handicapées sont affectés à des dispositifs d’aide à l’emploi, l’essentiel des dépenses concernant les aides au revenu (comme le SSDI).

7Nous décrivons ci-après les difficultés rencontrées pour améliorer les perspectives d’emploi des personnes handicapées compte tenu de la structure des principaux dispositifs d’aide en espèces et du manque de coordination entre les différents programmes d’aide à l’emploi en vigueur aux États-Unis. Ces caractéristiques distinguent le système d’aide aux personnes handicapées en place aux États-Unis de ceux qui existent dans d’autres pays, en particulier en Europe occidentale.

Les principaux régimes de prestations gérés par la Social security Administration reposent sur un critère d’inaptitude au travail

8La Social security Administration (SSA) gère le Social Security Disability Insurance (SSDI), régime d’assurance sociale destiné à compenser la perte de salaire subie par les travailleurs invalides, et le Supplemental Security Income (SSI), revenu minimum destiné aux personnes handicapées à faibles revenus. La procédure administrative d’évaluation de l’invalidité est la même pour les deux programmes et doit permettre de déterminer:

9

  • si le demandeur présente une invalidité constatée médicalement et considérée comme devant durer au moins 12 mois ou entraîner la mort;
  • est dans l’incapacité d’exercer une « activité substantiellement rémunératrice » (substantial gainful activity, SGA) définie, en 2007, comme procurant un revenu supérieur à 900 dollars pour tous les handicaps autres que la cécité et de 1 500 dollars par mois en cas de cécité.
La procédure d’établissement des droits influence lourdement la décision du demandeur vis-à-vis du travail, d’une part parce qu’elle met l’accent sur la nécessité de prouver l’inaptitude à exercer une activité substantiellement rémunératrice et, d’autre part, en raison de la longueur du délai d’instruction de la demande. Au cours de cette procédure, les demandeurs doivent produire de nombreuses pièces médicales et, parfois, professionnelles concernant leur déficience. Selon le conseil consultatif de la Sécurité sociale (Social Security Advisory Board, 2006), il faut en moyenne 120 jours pour statuer sur une première demande. Toutefois, la plupart des premières demandes sont rejetées et une forte proportion des rejets fait l’objet d’un recours, ce qui peut allonger encore la durée d’instruction. Par conséquent, le seul fait de solliciter des prestations peut avoir pour effet d’exclure le demandeur de la population active pendant une longue période, durant laquelle il tente de prouver qu’il est inapte au travail.
Malgré la longueur de l’instruction, de nombreuses personnes avec un handicap sont fortement incitées à déposer une demande parce que ces programmes donnent accès à une couverture maladie financée par des fonds publics. Cet aspect est d’autant plus important qu’il n’existe pas de couverture maladie universelle aux États-Unis et que la majeure partie de la population active est tributaire de l’assurance-maladie liée à l’emploi [4].
Par ailleurs, certaines règles appliquées par ces programmes en matière de maintien des droits constituent un obstacle supplémentaire à la promotion de l’emploi parmi leurs bénéficiaires et, selon Stapleton et al. (2006), créent une « trappe à pauvreté » au sein de laquelle les personnes handicapées continuent de percevoir des prestations et n’ont que peu d’espoir de recommencer à travailler. Ce manque de perspectives a pour effet, d’une part, de conduire les bénéficiaires à se sentir dépendants des prestations et, d’autre part, d’influencer les stratégies de fourniture de services des gestionnaires des programmes et prestataires de services de réadaptation, qui sont enclins à ne pas privilégier l’accès à l’emploi à plein temps. L’une de ces règles veut que les bénéficiaires conservent leurs droits tant qu’ils continuent à remplir les conditions d’inaptitude requises par la SSA (énoncées ci-dessus). Par ailleurs, si leurs gains sont trop élevés, les bénéficiaires du SSDI et du SSI risquent de perdre à la fois leurs prestations et leur couverture maladie. Bien que les deux dispositifs contiennent des mécanismes incitatifs qui autorisent les bénéficiaires à percevoir des salaires, le niveau de revenu cumulable avec les prestations reste insuffisant pour leur permettre de sortir de la pauvreté, ce qui les dissuade de travailler. La décision de retravailler est particulièrement difficile à prendre par les personnes qui bénéficient également d’autres programmes, par exemple de programmes d’aide alimentaire, qui appliquent leurs propres règles de cumul entre emploi et prestations (Berkowitz, 2003).
Ces règles d’accès aux droits sont pour beaucoup dans le fait que les bénéficiaires restent longtemps dans le dispositif et sont relativement peu nombreux à en sortir. Selon le Social Security Advisory Board (2006), une personne qui commence à bénéficier du SSDI ou du SSI à 20 ans perçoit des prestations pendant 20 ans en moyenne. Actuellement, le taux de sortie de ces dispositifs est inférieur à 0,5%.

Les aides à l’emploi sont globalement limitées par rapport à d’autres programmes

10L’amélioration de la situation des personnes handicapées en matière d’emploi se heurte en outre à l’absence de système universel pour la fourniture des aides à l’emploi. Bien souvent, ces aides sont proposées avec d’autres types de services, tels qu’une prise en charge en établissement, par des prestataires dont la priorité n’est pas l’emploi en milieu ordinaire. Les aides à l’emploi en faveur du public handicapé sont en effet fournies par un réseau complexe de prestataires de services de réadaptation privés et publics, qui offrent différents types de prestations (Wehman, Revell et Kregel, 1998). Le programme Vocational Rehabilitation constitue une importante source de financement pour beaucoup de ces prestataires, même si d’autres organismes dépendant des États, en particulier ceux qui s’adressent à des catégories de personnes handicapées spécifiques, par exemple les personnes handicapées mentales, fournissent d’autres types de services, comme des solutions institutionnelles (dans le domaine du logement par exemple), souvent couplés à des aides à l’emploi.

11Les dispositifs d’aide à l’emploi varient en termes de nature et d’ampleur des services offerts. Certains d’entre eux, comme les Freestanding Employment Providers, sont spécialisés dans l’offre de services d’aide à l’emploi, tandis que d’autres, comme les Community Rehabilitation Programs, proposent des interventions plus intensives dans le champ de l’aide à la vie quotidienne et à l’emploi, généralement dans des lieux réservés aux personnes handicapées, par exemple des programmes de jour ou un travail en milieu protégé.

12En général, ces dispositifs ciblent toute personne dont l’aptitude au travail présente une limitation et qui peut tirer profit de services de réadaptation professionnelle, même si, dans beaucoup d’États, des limites sont imposées par le financement que peut allouer le programme de réadaptation professionnelle. Les organismes chargés de la gestion de ce programme, qui dépendent des États fédérés, accordent la priorité aux personnes lourdement handicapées, notamment aux bénéficiaires du SSDI et du SSI. Lorsqu’un organisme ne dispose pas des fonds nécessaires au financement, il établit une liste d’attente, baptisée « ordre de sélection », sur laquelle les dossiers sont classés par ordre de priorité en fonction du degré de handicap. En 2004, ces organismes ont fourni des services à 1,4 million de personnes handicapées (US DOE, 2007).
Ces services de réadaptation professionnelle sont relativement peu sollicités comparativement aux dispositifs gérés par la SSA, ce qui peut s’expliquer par le fait que les fonds qui leur sont alloués sont limités et que la population est moins demandeuse de ce type d’aides que de prestations en espèces. Ainsi, en 2001, 4,8% seulement des personnes de 18 à 57 ans bénéficiant de prestations servies par la SSA ont suivi un programme de réadaptation professionnelle pendant un mois au moins (Thornton et al., 2007). Selon Hayward et Schmidt-Davis (2003), la majorité des bénéficiaires de services de réadaptation professionnelle ne perçoivent pas de prestations d’invalidité en espèces comme celles versées dans le cadre du SSDI, du SSI ou du régime d’indemnisation des accidents du travail et des maladies professionnelles.

Comparaison avec les programmes en vigueur dans les pays d’Europe occidentale

13Comparativement aux États-Unis, les pays d’Europe occidentale ont adopté une approche plus intégrée de la détermination des droits aux prestations, ce qui offre davantage de latitude pour mettre en œuvre des stratégies d’aide à l’emploi. Selon Golden, Zeitzer et Bruyère (à paraître), dans beaucoup de pays d’Europe occidentale, les pouvoirs publics ont jugé normal et nécessaire de créer des dispositifs publics en faveur des travailleurs dont les déficiences sont d’origine non professionnelle. Ainsi, la France, l’Allemagne, la Belgique, la Suède, les Pays-Bas, entre autres, ont mis en place des systèmes en faveur des personnes qui présentent une inaptitude partielle ou temporaire à l’exercice d’une activité à plein temps en raison d’une déficience d’origine non professionnelle. Ces dispositifs ont vocation à inciter les bénéficiaires à travailler dans la mesure de leurs possibilités et compensent la réduction de leurs capacités ou la perte de salaires à hauteur d’un certain plafond. La priorité est ainsi accordée aux capacités fonctionnelles résiduelles, dans le but de maximiser le taux d’activité des personnes handicapées et de promouvoir leur intégration sociale.
L’autre différence entre le système de protection sociale en vigueur aux États-Unis en faveur des personnes handicapées et celui qui existe dans d’autres pays réside dans l’absence de système d’assurance-maladie national universel. La question de la couverture maladie est importante à prendre en compte dans la définition des politiques en faveur de l’emploi des personnes handicapées, puisqu’aux États-Unis, l’accès aux systèmes publics d’assurance-maladie est généralement lié au droit aux prestations en espèces pour invalidité. Le lien entre couverture maladie et prestations en espèces incite fortement la population handicapée à solliciter des prestations d’invalidité et à en conserver le bénéfice. En revanche, dans les pays dotés d’un système d’assurance-maladie universel, comme la France et le Royaume-Uni, la nécessité de conserver le bénéfice de l’assurance-maladie n’intervient pas dans les décisions des personnes handicapées en termes de reprise d’un emploi, de demande de prestations ou de sortie du dispositif de prestations.

Évolution de la politique en faveur des personnes handicapées et des aides à l’emploi

14Aux États-Unis, le débat sur la meilleure stratégie à adopter pour favoriser l’insertion professionnelle des personnes handicapées existe depuis longtemps, puisqu’il s’est amorcé lors de la création du SSDI, en 1956 (le SSI n’a été instauré qu’en 1972) (Berkowitz, 2003). À l’époque, les responsables de l’action publique étaient divisés sur le point de savoir si le SSDI devait être un simple mécanisme de transfert monétaire ou s’il fallait souligner sa vocation à promouvoir la réinsertion professionnelle en créant un lien avec le programme de réadaptation professionnelle. Ils sont parvenus à une solution de compromis sur la question de la réadaptation, et ont établi un lien ténu entre les deux dispositifs.

15Le fait que les mesures en faveur de la population handicapée, en particulier celles mises en œuvre par la SSA et par les organismes en charge du programme de réadaptation professionnelle, poursuivent des objectifs différents est venu ajouter à la complexité du débat (Berkowitz et Dean, 1996). Alors que les responsables de la SSA travaillent au sein d’un cadre où l’invalidité est généralement analysée comme une cause de retraite anticipée, les responsables du programme de réadaptation professionnelle considèrent l’invalidité comme un état auquel il est possible de remédier.

16En dehors des régimes gérés par la SSA et du programme de réadaptation professionnelle, les premières mesures adoptées dans le champ du handicap visaient le plus souvent à apporter une assistance aux personnes handicapées en institution, dans les domaines de la santé et du logement ainsi que sur le plan social. Au sein de ce système, la plupart des stratégies traditionnelles de réadaptation privilégiaient les possibilités d’emploi dans des lieux réservés aux personnes handicapées, comme les ateliers protégés.

17Toutefois, ces dernières décennies ont été marquées par l’adoption d’un nombre croissant de lois, politiques et programmes qui cherchent à promouvoir l’intégration des personnes handicapées au milieu ordinaire, ce qui a également influencé les conceptions sur les formes de l’aide à l’emploi (Follette Story, Mueller et Mace, 1998). Les premières dispositions législatives en faveur des personnes handicapées, qui datent des années 1950 et 1960, étaient axées sur l’élimination des obstacles physiques à la participation aux activités de la vie quotidienne. Au cours des décennies suivantes, les politiques mises en œuvre ont continué de mettre l’accent sur l’importance de l’intégration des personnes handicapées à toutes les activités sociales [5]. L’Americans with Disabilities Act (ADA) [6], adoptée en 1990, représentait la loi la plus complète en matière de droits civiques puisqu’elle interdisait la discrimination dans les domaines de l’emploi, des télécommunications, de l’accès aux lieux recevant du public, de l’accès aux services, aux programmes et aux transports publics. L’ADA est la pièce maîtresse de la législation de non-discrimination; en outre, elle est emblématique des nombreuses politiques actuellement mises en place aux États-Unis pour favoriser la pleine intégration des personnes handicapées à la vie quotidienne. Au cours de la même période, un changement de cap s’est opéré, dans le sens d’un recul de la prise en charge des personnes handicapées en établissement au profit de la fourniture de services dans des milieux plus intégrés. Cette inflexion correspond en grande partie au mouvement de désinstitutionalisation, qui s’inscrivait sur un plus long terme et a entraîné une diminution du nombre de personnes séjournant dans des établissements publics, comme les hôpitaux psychiatriques.

18Les avancées technologiques ont également fait évoluer les stratégies de réadaptation, les innovations ayant créé de nouvelles voies d’intégration. Ainsi, l’avènement de la robotique d’assistance, notamment des assistants personnels, comme les lecteurs d’écran, pour aider les personnes atteintes de déficiences physiques et cognitives, constitue une évolution particulièrement importante.

19Les évolutions politiques, médicales et technologiques qui viennent d’être mentionnées ont eu une influence directe sur la définition, à titre expérimental, de solutions différentes des stratégies d’aide à l’emploi traditionnelles consistant à offrir aux personnes handicapées des services dans des lieux qui leur étaient réservés. Ainsi, la fin des années 1970 et le début des années 1980 ont été marqués par l’émergence du concept « d’emploi accompagné » (supported employment), solution alternative aux ateliers protégés, qui privilégiait l’emploi dit concurrentiel moyennant la mise en place de davantage d’aides sur le lieu de travail. De plus en plus, la priorité a été accordée à des stratégies de formation professionnelle visant à favoriser l’emploi concurrentiel, en particulier pour les adultes souffrant de déficiences mentales et de troubles du développement (Rusch et Mithaug, 1980; Wehman, 1981).
Malgré l’intérêt suscité par la définition de nouvelles approches, les informations sur leur efficacité sont relativement rares. Bien que certains modèles de stratégies d’aide à l’emploi aient des caractéristiques et des objectifs clairs, bon nombre d’approches actuelles n’ont pas été testées à plus grande échelle. Comme il est de ce fait difficile de parvenir à un consensus sur les bonnes pratiques ou sur la meilleure manière d’intervenir auprès des personnes handicapées, la politique publique ne s’élabore que lentement dans ce domaine.
Toutefois, selon Rangarajan et al. (2008), deux initiatives font exception à l’absence de données empiriques précises et se sont révélées riches d’enseignements pour l’élaboration de bonnes pratiques. La première, qui est la plus importante par son ampleur, est l’évaluation d’un projet ciblant des participants volontaires, bénéficiaires de prestations en espèces, en particulier servies par les dispositifs SSDI et SSI. La seconde est l’évaluation de programmes d’emploi accompagné proposés à titre expérimental en remplacement de programmes de réadaptation traditionnels à des personnes souffrant de troubles psychiatriques, volontaires pour participer au projet. Ces deux initiatives se caractérisent par le fait que l’on dispose de données sur leur mise en œuvre pour un large échantillon de participants et que leurs résultats ont été évalués à l’aide de méthodes rigoureuses.

Des évaluations rigoureuses de nouvelles formes d’aide à la réinsertion professionnelle ont été réalisées aux États-Unis

20Pour identifier les programmes efficaces, il est impératif d’élaborer des modèles fiables et de définir des objectifs clairs, susceptibles d’être évalués selon une démarche rigoureuse. Les objectifs clairs d’un programme sont ses effets attendus, à savoir les résultats qui peuvent être obtenus par un individu parce qu’il a participé au programme, par exemple l’exercice d’une activité en milieu ordinaire. Une évaluation rigoureuse est une évaluation réalisée au regard d’un scénario contrefactuel d’absence de services ou de fourniture des services habituels, en neutralisant, généralement par le recours à la sélection aléatoire, les facteurs qui pourraient influencer les effets attendus. Conjuguées, ces deux démarches peuvent indiquer si un programme est efficace ou non, même si elles ne permettent pas toujours de déterminer s’il le serait à plus grande échelle ou pour d’autres publics.
Le tableau 2 présente une synthèse des interventions et constatations issues d’études qui remplissaient les critères ci-dessus et ont été analysées par Rangarajan et al. (2008), dans le cadre d’un survey. [7] Les actions de réinsertion professionnelle analysées différaient en termes de nature des interventions et de publics ciblés, même si toutes avaient, parmi leurs objectifs, l’exercice d’une activité en milieu ordinaire. À une exception près, toutes les études sélectionnées pour le survey reposaient sur un modèle expérimental dans lequel les participants potentiels étaient répartis de manière aléatoire entre un groupe témoin et un groupe de traitement. La seule exception était une étude qui évaluait le principal programme de retour à l’emploi en faveur des personnes handicapées financé par des fonds fédéraux; elle a été incluse dans la revue en raison de l’envergure du programme. Le principal intérêt de ces études réside dans le fait qu’elles ont influencé les perceptions de ce qui constitue une bonne pratique en matière de prestation de services et ont, en ce qui concerne les mesures d’emploi accompagné, été classées parmi les pratiques reposant sur des données probantes (evidence-based practices).

Tableau 2

Description des mesures et principales conclusions

Tableau 2
Projet pilote (Rapport d’évaluation) Modèle de l’étude Description du projet Échantillon ciblé Conclusions Projets d’aide à la réinsertion professionnelle, mis en œuvre à grande échelle et ciblant des bénéficiaires du SSDI et du SSI Structured Training and Employment Transitional Services (STETS) (Kerachsky et Thornton, 1987) Projet pilote reposant sur une évaluation par sélection aléatoire, mis en œuvre entre novembre 1981 et décembre 1982 dans cinq villes des États-Unis. Il comportait des mesures d’aide à l’emploi déployées en trois phases (1) un premier contact avec le travail (2) un emploi réel avec formation en cours d’emploi (ou emploi accompagné) et (3) un suivi post-insertion et des aides à l’emploi. 467 jeunes de 18 à 24 ans, avec un QI compris entre 40 et 80 (nombreux à être bénéficiaires du SSI ou du SSDI). Après 22 mois, les bénéficiaires affichaient un taux d’emploi supérieur de 63 % et des revenus supérieurs de 74 % à ceux du groupe témoin. STETS a permis une réduction limitée, mais significative, des prestations d’invalidité versées. Transitional Employment Training Demonstration (TETD) (Decker et Thornton, 1995) Projet pilote reposant sur une évaluation par sélection aléatoire, mis en œuvre entre 1985 et 1987 dans 13 communautés pilotes. Il comportait des services de placement dans l’emploi, de formation en cours d’emploi et de maintien dans l’emploi. Les participants pouvaient bénéficier de services de placement dans l’emploi ou de formation en cours d’emploi pendant une période limitée (un an). 745 allocataires du SSI âgés de 18 à 40 ans et souffrant d’un retard mental diagnostiqué. Après six ans : – les participants qui avaient bénéficié d’aides à la transition vers l’emploi affichaient des taux d’emploi supérieurs de 22 % et des revenus supérieurs de 56 % à ceux qui n’avaient pas bénéficié de ces services ; – le projet TETD avait eu un impact limité mais significatif sur le montant des prestations. Project NetWork (Rupp et al., 1994 ; Kornfeld et Rupp, 2000) Projet pilote reposant sur une évaluation par sélection aléatoire, mis en œuvre de 1992 à 1994 sur 8 sites répartis sur l’ensemble du territoire. Il comportait des services intensifs de case management axés sur l’emploi, afin de vérifier si le case management est efficace pour permettre aux personnes atteintes de handicaps sévères d’accéder à l’emploi à plein temps et de sortir du dispositif de prestations d’invalidité. Différents modèles de case management fournis par quatre entités (SSA, prestataire privé, conseiller en réadaptation professionnelle et prestataire désigné par la SSA) ont été testés. (Le groupe témoin a bénéficié des services d’aide à l’emploi existant sur leur lieu de résidence). 8 428 personnes percevant ou ayant sollicité le SSI ou bénéficiaires du SSDI, âgés de 15 à 65 ans, quelle que soit la nature de leur handicap. Dans un premier temps, l’emploi et les revenus ont connu une hausse dans le groupe de traitement par rapport au groupe témoin ; toutefois, cette amélioration a disparu au terme de la troisième année du projet. Project NetWork n’a pas eu d’impact sur les prestations d’invalidité versées.
tableau im4
Projet pilote (Rapport d’évaluation) Modèle de l’étude Description du projet Échantillon ciblé Conclusions State Partnership Initiative (SPI) (Peikes et al. 2005) Évaluation par sélection aléatoire, comportant quatre projets mis en œuvre dans trois États, de 1999 à 2004*. Les projets n’avaient pas tous la même portée mais fournissaient généralement des services selon une de ces 4 approches : améliorer l’information sur l’impact du travail sur les prestations perçues ; favoriser l’utilisation des incitations au travail existantes ; tester des modifications de règles du programme visant à autoriser les allocataires du SSI à cumuler leur allocation avec un revenu plus élevé et améliorer l’accès aux aides à la réinsertion professionnelle. Dans l’un des trois États, les effets de deux formes d’intervention (l’information éducative sur les prestations et l’information éducative sur les prestations associée aux aides à l’emploi) ont été testés. 3 366 bénéficiaires du SSDI ou du SSI pour quatre projets reposant sur une évaluation par sélection aléatoire. Seul un projet a eu un impact relativement important sur l’emploi, tandis que deux projets ont eu un impact nul et qu’un autre a eu un impact négatif. L’impact sur les revenus a été négligeable, voire négatif pour tous les projets. Les effets sur les prestations d’invalidité en espèces n’ont pas été évalués. Ticket to Work (TTW) (Thornton et al., 2007) Évaluation non expérimentale lancée en trois phases sur l’ensemble du territoire des États-Unis de 2002 à 2004 ; les chercheurs peuvent se fonder sur les différences liées au fait que le programme est déployé par phases pour évaluer son impact sur l’utilisation des services, les revenus et les prestations versées. Cet ambitieux programme d’aide à l’emploi lancé par la SSA vise à rendre les services de réadaptation et d’aide à l’emploi plus accessibles aux personnes handicapées et à améliorer la qualité, afin d’augmenter le nombre de bénéficiaires parvenant à l’autosuffisance économique. Il a introduit un nouveau mode de paiement, lié aux objectifs, des prestataires tant publics que privés. Les bénéficiaires du SSDI ou du SSI volontaires et qui ont reçu, de la part de la SSA, des « tickets » de réinsertion professionnelle peuvent choisir parmi les prestataires agréés par la SSA. Les prestataires sont libres d’accepter ou non et peuvent choisir le type de services qu’ils vont offrir. Des tickets ont été envoyés à la plupart des bénéficiaires du SSDI ou du SSI. Les estimations des effets du programme sur les salaires et les prestations, effectuées au début du déploiement, ont abouti à des chiffres trop faibles pour être distingués de variations historiques de ces grandeurs. * Le SPI comportait 18 projets, lancés dans 17 États de 1999 à 2004 pour offrir des aides à l’emploi aux personnes handicapées. La SSA a financé 12 de ces 18 projets et la Rehabilitation Services Administration a financé les 6 autres. Sur ces 18 projets, seuls les 4 pris en compte dans le tableau ont été évalués à l’aide d’une sélection aléatoire.
tableau im5
Projet pilote (Rapport d’évaluation) Modèle de l’étude Description du projet Échantillon ciblé Conclusions Projets d’emploi accompagné ciblant des personnes atteintes de troubles psychiques Supported Employment Model – synthèse d’études indépendantes (Bond, 2004 ; Bond et al., 2005) Synthèse, réalisée par Bond et al. (2005) d’évaluations par sélection aléatoire de 12 projets d’emploi accompagné, conduites par 9 équipes de recherche différentes dans diverses régions, tant rurales qu’urbaines. Parmi les 12 études analysées, le modèle d’« emploi accompagné » le plus souvent testé était le modèle Individual Placement and Support (IPS) (sur ce modèle voir Rangarajan et al., 2008) ; le groupe qui a bénéficié de ce modèle a été comparé a des groupes qui avaient habituellement accès à des formes d’aide traditionnelles. Le nombre de participants variait selon les études, mais toutes les études concernaient des personnes qui ont un handicap psychique, généralement recrutées par l’intermédiaire des services sociaux. Le taux moyen d’emploi en milieu ordinaire était plus de 250 % plus élevé parmi les bénéficiaires de l’emploi accompagné qu’au sein du groupe témoin. La synthèse ne comportait pas d’évaluation concernant les revenus et le bénéfice de prestations en espèces. Employment Intervention Demonstration Program (EIDP) (Cook, 2007) Évaluation par sélection aléatoire de l’efficacité de plusieurs programmes expérimentaux d’« emploi accompagné » ciblant des personnes atteintes de troubles psychiatriques, conduite sur huit sites répartis sur l’ensemble du territoire, de 1995 à 2003. Le groupe de l’étude expérimentale a bénéficié de services dispensés par des professionnels de la santé mentale et de la réadaptation, des organismes dépendant des autorités locales, du gouvernement des États et des groupes d’entraide, dans le cadre de différents modèles d’« emploi accompagné », spécifiquement conçus. D’autres sites expérimentaux ont complété leur modèle de services en ajoutant par exemple un mode de relation spécial avec les employeurs. Les modèles expérimentaux étaient différents les uns des autres. Plus de 1 600 participants qui ont un handicap psychique Les individus qui ont bénéficié de l’emploi accompagné avait 62 % plus de chances d’occuper un emploi concurrentiel que ceux qui n’en avaient pas bénéficié. Ils percevaient également un revenu d’activité mensuel supérieur de 23 % (Cook et al., 2005). Source : synthèse réalisée d’après Rangarajan et al. (2008).

Description des mesures et principales conclusions

Constatations issues de projets d’aide à la réinsertion professionnelle ciblant des béné?ciaires du SSDI ou du SSI et mis en œuvre à grande échelle

21Les évaluations à grande échelle des dispositifs d’aide à l’insertion professionnelle des personnes handicapées ont porté en priorité sur des stratégies plus intégrées, ciblant les bénéficiaires des programmes SSDI et/ou SSI. Ce public est une cible naturelle de ces stratégies parce que, comme souligné précédemment, il utilise traditionnellement assez peu les services de réadaptation professionnelle et parce que le SSDI et le SSI constituent les premiers dispositifs de transfert monétaire en direction des personnes handicapées aux États-Unis.

22Dans les années 1980, deux projets pilotes ciblant un large échantillon de bénéficiaires des programmes SSDI et SSI ont été lancés pour évaluer l’efficacité des aides à la transition vers l’emploi destinées aux personnes souffrant de handicap mental. En 1981, le ministère fédéral du Travail, chargé de la gestion de la population active et du marché du travail, a financé une grande étude par sélection aléatoire sur les mesures d’aide à la réinsertion professionnelle dans le cadre du projet pilote Structured Training and Employment Transitional Services (STETS). Les participants ont été recrutés par l’intermédiaire des services sociaux, même si la plupart d’entre eux bénéficiaient déjà du SSDI ou du SSI. En 1985, les résultats du STETS étant apparus positifs, la SSA a financé un autre projet pilote d’envergure, le Transitional Employment Training Demonstration (TETD), qui ciblait spécifiquement les jeunes adultes handicapés mentaux allocataires du SSI. Le TETD visait un échantillon beaucoup plus large de bénéficiaires que le STETS. Il a été mis en œuvre au sein de 13 communautés pilotes, ce qui a permis une évaluation plus rigoureuse de son impact. Le STETS avait déjà démontré que les aides à la transition vers l’emploi contribuaient à améliorer l’emploi des jeunes handicapés (Kerachsky et Thornton, 1987); le TETD a confirmé que ces services entraînaient une amélioration des taux d’emploi et des revenus (Decker et Thornton, 1995).

23Dans les années 1990, souhaitant mieux cerner l’efficacité des aides, sur la base d’un éventail plus large de bénéficiaires, la SSA a financé, dans le cadre des projets Project NetWork et State Partnership Initiatives (SPI), des évaluations de mesures visant des segments plus importants de la population bénéficiaire du SSDI ou du SSI et en âge de travailler. Comme le TETD, le Project NetWork reposait sur une étude par sélection aléatoire des bénéficiaires de prestations en espèces servies par la SSA (Decker et Thornton, 1995) et visait à tester de nouvelles formes d’aides à la réadaptation et à l’emploi pour un large éventail de participants bénéficiant ou sollicitant des prestations du SSDI ou du SSI. Le Project NetWork a représenté la première initiative de la SSA pour tenter d’évaluer la faisabilité et l’efficacité de l’accompagnement personnalisé (ou case management) pour améliorer le taux d’emploi des bénéficiaires de prestations en espèces. Quant au projet pilote SPI, il a été financé par la SSA et lancé dans plusieurs États fédérés pour identifier de nouveaux modèles d’aide à la réinsertion, en particulier des modèles associant réadaptation professionnelle, mécanismes d’incitation au travail et amélioration de l’information sur ces mécanismes (benefits counseling ou « information éducative sur les prestations »). Quatre des projets pilotes du SPI ont été évalués rigoureusement, au moyen d’une étude par sélection aléatoire; en revanche, les modèles non expérimentaux utilisés pour évaluer les autres projets se sont finalement révélés non concluants (Peikes et al., 2005) [8]. Les constatations issues de l’évaluation du Project NetWork et du SPI ont permis à la SSA de disposer d’informations sur les effets des différentes stratégies d’intervention visant à améliorer les taux d’emploi d’un échantillon plus large de bénéficiaires (Kornfeld et Rupp, 2000; Peikes et al., 2005).
En 1999, les pouvoirs publics ont lancé le programme Ticket to Work(TTW), qui constitue un projet d’une ampleur sans précédent en matière d’aide au retour à l’emploi des bénéficiaires de prestations servies par la SSA. La priorité a été accordée au développement des aides à la réinsertion professionnelle visant les bénéficiaires du SSDI ou du SSI, essentiellement fournies par les organismes chargés du programme de réadaptation professionnelle. Le programme Ticket to Work élargit le choix des bénéficiaires en ce qui concerne l’obtention des services et instaure des mécanismes d’incitation financière afin d’encourager les prestataires de services d’aide à l’emploi à améliorer les services rendus. L’évaluation de Ticket to Work comportait une évaluation d’impact, mais reposait sur un modèle non expérimental et, à ce jour, les seules données disponibles sont des constatations initiales portant sur les deux premières années d’application du dispositif (Thornton et al., 2007).
Les évaluations ont permis de disposer d’informations sur les effets de ces projets d’aide au retour à l’emploi au regard de plusieurs objectifs, notamment l’emploi, les salaires et le montant des prestations. Selon Rangarajan et al. (2008), les projets pilotes Structured Training and Employment Transitional Services (STETS) et Transitional Employment Training Demonstration(TETD) pour les jeunes adultes handicapés mentaux, sont les seuls à avoir eu un impact substantiel et durable dans ces domaines. L’évaluation du Project NetWork a montré que les effets constatés les deux premières années avaient disparu au terme de la troisième année. Quant à l’évaluation du State Partnership Initiatives (SPI), elle montre que seul un des projets pilotes a eu un impact relativement important sur l’emploi, tandis que deux ont eu un impact nul et un autre un impact négatif. Enfin, en ce qui concerne Ticket to Work, ses effets sur les revenus du travail et le montant des prestations au cours de l’année qui a suivi l’envoi des « tickets » étaient trop faibles pour être distingués de variations historiques des salaires et prestations. Rangarajan et al. soulignent que ce sont les projets qui affichaient le coût par participant le plus élevé (en l’occurrence STETS et TETD) qui ont eu les effets les plus importants sur les revenus du travail à long terme, ce qui porte à croire que des investissements plus élevés sont peut-être nécessaires pour parvenir à une réinsertion professionnelle durable des personnes handicapées aux États-Unis.
Bien que certains projets d’aide à la réinsertion professionnelle aient eu des résultats positifs dans le champ de l’emploi, aucun d’entre eux n’a entraîné de réduction substantielle du nombre de bénéficiaires de prestations d’invalidité servies par la SSA. Les trois projets qui ont été évalués sur le plus long terme (STETS, TETD et Project NetWork) ont fait l’objet d’une analyse coûts-bénéfices portant sur leurs effets sur les participants, sur l’organisme financeur (en l’occurrence la SSA), sur le gouvernement fédéral et sur la société dans son ensemble. Il en est ressorti qu’aucun d’entre eux ne constituait un bénéfice net pour la SSA, ce qui montre à quel point il est difficile de concevoir un projet pilote qui permette de réduire réellement le nombre de bénéficiaires de prestations. Toutefois, concernant les projets STETS et TETD, les évaluations ont révélé que la hausse des revenus du travail des participants et la moindre utilisation d’autres services avaient compensé la majeure partie du coût des projets pilotes dans les lieux où les autres services, par exemple les ateliers protégés, étaient coûteux.
Les résultats de ces évaluations permettent de disposer de données sur l’efficacité ou non des stratégies d’aide à l’emploi en faveur des bénéficiaires de prestations d’invalidité. Toutefois, hormis Ticket to Work, toujours en vigueur, aucun des projets pilotes évoqués ci-dessus n’a été étendu et pérennisé en tant que dispositif d’aide au retour à l’emploi des bénéficiaires de prestations d’invalidité de la SSA. Ces programmes ont néanmoins joué un rôle, dans la mesure où ils ont fourni aux pouvoirs publics des informations sur les aspects de leurs interventions qui fonctionnent – ou ne fonctionnent pas – pour cette population. Les évaluations du STETS et du TETD ont permis à la SSA et aux acteurs concernés par le handicap de disposer d’informations sur l’efficacité de l’offre d’aides à la transition vers l’emploi dans des lieux plus intégrés. À l’inverse, les évaluations du Project Network et du SPI ont démontré qu’il était probablement nécessaire d’opter pour un suivi plus intensif que le case management (dans le cas de Project Network) et l’information éducative sur les prestations (dans le cas du SPI) pour améliorer la situation des bénéficiaires en matière d’emploi. Enfin, l’évaluation de Ticket to Work fournit aux pouvoirs publics de précieuses informations sur les difficultés rencontrées pour recruter des participants et des prestataires et les a amenés à proposer de nouveaux mécanismes incitatifs pour y remédier.

Projets d’emploi accompagné pour les personnes qui souffrent de troubles psychiques

24Autre domaine dans lequel des projets expérimentaux ont été lancés: l’emploi accompagné (supported employement) en faveur des personnes atteintes de handicaps lourds, en particulier de troubles psychiques (troubles affectifs, anxieux et schizophrénie). Ces dispositifs reposent sur une participation volontaire et proposent à des publics recrutés par l’intermédiaire des services sociaux, généralement des aides à l’emploi en milieu ordinaire, associées à des mesures thérapeutiques.
Selon Wehman et Revell (2003), le financement de ces services se fait habituellement en deux phases:

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  • des services d’aide à l’emploi, tels que bilan professionnel, gestion de carrière, développement de compétences, formation en cours d’emploi, robotique d’assistance et services en matière de logement, sont financés, pendant une période limitée, par divers organismes dépendant du gouvernement fédéral ou de celui des États fédérés, notamment ceux en charge du programme de réadaptation professionnelle;
  • des services destinés à améliorer les performances professionnelles (par exemple des aides à l’emploi et des services de case management) sont ensuite financés sur le long terme. Il existe diverses variantes de l’emploi accompagné, y compris pour les personnes atteintes de troubles autres que psychiques, mais toutes s’attachent à offrir des aides personnalisées de longue durée pour permettre aux bénéficiaires d’intégrer le marché du travail ordinaire.
Le concept d’« emploi accompagné » a été classé parmi les pratiques fondées sur des données probantes pour les personnes atteintes de troubles psychiques, les évaluations par sélection aléatoire ayant systématiquement démontré ses effets positifs sur la situation de ce public en matière d’emploi [9]. Dans les années 1990, plusieurs évaluations indépendantes ont, en effet, révélé que l’emploi accompagné avait un impact significatif sur l’emploi des personnes souffrant de troubles psychiques (Bond, 2004). Chacune de ces évaluations a permis de mesurer selon une démarche rigoureuse l’impact de ces mesures sur l’emploi et comportait des informations complètes sur les services proposés pour que les initiatives évaluées puissent être reproduites dans d’autres lieux.

26En 1995, la Substance Abuse and Mental Health Services Administration – organisme chargé d’aider les États fédérés à améliorer la qualité et l’éven-tail des mesures thérapeutiques, de réadaptation et de soutien proposées aux personnes qui rencontrent des problèmes de santé mentale – a financé, dans huit villes, un programme pilote intitulé Employment Intervention Demonstration Program (EIDP) afin de disposer d’une évaluation plus complète de nouveaux modèles d’emploi accompagné. Tirant les enseignements d’expériences antérieures, recensées par Bond (2004), le programme EIDP a comparé de manière plus systématique les projets mis en œuvre dans différents lieux en utilisant des échantillons plus larges. Cette étude (Cook et al., 2005) a confirmé les constatations antérieures, à savoir que les modèles d’emploi accompagné, testés dans des environnements différents, contribuaient à améliorer la situation de l’emploi de la population atteinte de troubles psychiques. Ces constatations encourageantes, issues de plusieurs évaluations indépendantes, conduisent les organismes publics à souhaiter, voire à exiger, de plus en plus souvent que des services d’emploi accompagné soient proposés aux personnes souffrant de troubles psychiques (Drake et al., 2001).
Il faut noter que le manque de données fiables sur les modèles d’emploi accompagné ciblant d’autres populations, en particulier les personnes souffrant de déficiences mentales, a limité leur utilisation en faveur d’autres publics handicapés. Par exemple, les premières évaluations des dispositifs d’emploi accompagné, qui, pour la plupart, s’adressaient aux person-nes atteintes de déficiences mentales, n’ont pas eu beaucoup d’influence du fait qu’elles portaient sur des échantillons limités et ne reposaient pas sur des données probantes (Decker et Thornton, 1995). L’absence de bonnes pratiques universellement reconnues explique en partie que beaucoup de prestataires de service continuent de s’appuyer sur des stratégies traditionnelles, axées sur le travail en milieu protégé ou dans des lieux réservés aux personnes handicapées, pour offrir des services d’aide à l’emploi aux publics qui présentent une déficience mentale ou autre handicap grave (Kregel et Dean, 2002; Wehman et al. 2003).

Les États-Unis mettent en place des programmes innovants pour orienter davantage vers l’emploi la politique en faveur des personnes handicapées

27Malgré ces évaluations, la politique actuelle en faveur des personnes handicapées continue d’être critiquée pour la place insuffisante qu’elle accorde à l’amélioration de la situation professionnelle du public qu’elle concerne. Le General Accounting Office (GAO), institution de contrôle des organismes fédéraux, a relevé la portée insuffisante des mesures en place pour favoriser le retour à l’emploi des bénéficiaires du SSDI et du SSI et a recommandé de les développer de manière significative (US GAO, 2004). Le GAO a souligné que la SSA n’avait pas encore proposé, ni évalué de solutions susceptibles de lui permettre de réaliser des économies. Il a relevé des lacunes dans les projets pilotes antérieurs, en particulier l’absence de procédure formelle pour définir, en sollicitant la contribution de parties prenantes extérieures, un programme de recherche à long terme qui permettrait d’inscrire les buts de la SSA dans le cadre de grands objectifs stratégiques. Le GAO a également reproché à la SSA d’avoir lancé ses projets pilotes sur le terrain de manière précipitée, sans les avoir correctement testés. Il affirme par exemple, que si la SSA avait testé certaines composantes du dispositif Ticket to Work avant de le lancer sur l’ensemble du territoire, elle aurait pu en repérer les faiblesses et rechercher des solutions avant de l’appliquer.
La SSA est à l’origine de plusieurs nouveaux projets pilotes d’aide au retour à l’emploi, qui devraient permettre de disposer d’informations précieuses sur les bonnes pratiques (voir SSA (2008b) pour des informations actualisées régulièrement sur les projets lancés par la SSA). Dans son rapport, le GAO a reconnu que les projets actuellement testés par la SSA devraient être plus riches d’enseignements, à la fois pour la SSA elle-même et pour le Congrès, parce qu’ils ont été conçus de manière à permettre d’examiner davantage d’aspects des politiques et programmes et ont été planifiés de façon plus rigoureuse. Ces projets sont notamment les suivants:

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  • Le projet Accelerated Benefits (AB), qui permettra à certains nouveaux bénéficiaires du SSDI d’accéder immédiatement à une couverture maladie (au lieu d’attendre deux ans) et, si besoin, à des aides à l’emploi. Les participants au projet seront répartis de manière aléatoire entre les trois groupes suivants: un groupe qui bénéficiera d’une couverture maladie; un groupe qui bénéficiera d’une couverture maladie et de services complémentaires comprenant des services de gestion intégrée des soins (care management), une intervention comportementale pour accroître la motivation à travailler et des aides à l’emploi; un groupe témoin qui servira de base de comparaison pour évaluer l’efficacité des mesures en termes de santé et d’emploi. La population cible est composée de nouveaux bénéficiaires du SSDI âgés de moins de 55 ans, dépourvus d’assurance-maladie et ne pouvant pas espérer accéder à Medicare avant au moins 18 mois. La répartition des participants entre les groupes a commencé à l’automne 2007.
  • Le projet Benefit Offset National Demonstration (BOND), qui devrait permettre d’apprécier l’impact sur les prestations et l’emploi, notamment sur les salaires, le nombre d’heures travaillées et le maintien dans l’emploi, de différentes mesures, associées à un mécanisme de réduction progressive du montant des prestations. La SSA va tester un modèle dans lequel les prestations seront réduites de 1 dollar pour 2 dollars de revenu et seront associées à diverses aides à l’emploi, afin d’aider les bénéficiaires handicapés à reprendre une activité professionnelle. Dans le cadre de ce projet, la diminution du montant des prestations sera progressive pour les bénéficiaires, qui ne perdront donc plus brutalement leurs droits au SSDI s’ils trouvent un emploi et perçoivent des revenus supérieurs à un certain plafond. Les participants conserveront le bénéfice de leur couverture maladie et des autres aides liées au droit au SSDI. La population ciblée est composée de bénéficiaires du SSDI résidant dans des lieux qui restent à déterminer. Ce projet n’a pas encore été lancé sur le terrain.
  • L’étude Mental Health Treatment Study (MHTS), qui vise à fournir aux participants à l’étude des traitements psychiatriques (médicaments et psychothérapie) et/ou des aides à l’emploi non couverts par une assurance. La population ciblée est composée de bénéficiaires du SSDI qui souffrent principalement de schizophrénie ou d’un trouble affectif. Le recrutement des participants a commencé en septembre 2006. La phase de terrain durera trois ans et un rapport final devrait être établi dans le courant de l’hiver 2010.
  • Le projet Youth Transition Demonstration (YTD), qui vise à améliorer le taux d’emploi des jeunes et jeunes adultes handicapés à travers une aide à l’emploi intensive et une information éducative sur les prestations (benefits counseling). L’expérience a commencé en 2003 par le lancement de sept projets pilotes dans six États; trois de ces projets ont été sélectionnés pour une évaluation par sélection aléatoire. En 2007, la SSA a lancé de nouveaux projets dans cinq États et a finalement choisi trois nouveaux sites pour la réalisation d’évaluations par sélection aléatoire. La population ciblée est composée d’allocataires du SSI et d’autres jeunes à risques, âgés de 14 à 24 ans. La constitution des groupes par sélection aléatoire a commencé à l’automne 2006.
Outre la SSA, les Centers for Medicare and Medicaid Services (CMS), en charge de la gestion des dispositifs d’assurance-maladie (notamment Medicare et Medicaid), financent des projets d’aide à l’emploi qui reposent sur une intervention précoce associée à la fourniture d’une assurance-maladie. Le projet Medicaid Buy-In program, qui permet à des adultes handicapés de bénéficier de Medicaid même s’ils perçoivent des revenus supérieurs au plafond normalement appliqué est l’un des plus remarquables de ces projets. Les participants doivent, en contrepartie de cet avantage, payer leur adhésion à Medicaid, en principe en versant des primes calculées en fonction de leur revenu. Par ailleurs, les CMS financent le projet Demonstration to Maintain Independence Evaluation (DMIE), étude multicentrique qui vise à évaluer les effets des interventions thérapeutiques comportementales, du case management, des aides à la réinsertion professionnelle et autres services, sur la situation financière et l’état de santé de travailleurs présentant des troubles comportementaux potentiellement invalidants, même s’ils ne bénéficient pas encore du SSI ou du SSDI.
Les résultats des évaluations financées par la SSA et les CMS devraient permettre aux pouvoirs publics de disposer d’informations précieuses sur l’efficacité de diverses stratégies d’aide à l’emploi en faveur des personnes handicapées. Plusieurs de ces projets, en particulier le projet Acceleration of Benefits, de la SSA, et les projets DMIE et Medicaid Buy-in, des CMS, fourniront des informations sur le rôle que joue la couverture maladie dans la promotion de l’emploi. Les autres évaluations financées par la SSA apporteront un éclairage sur les effets des mécanismes incitatifs au travail sur l’emploi (projet BOND), sur l’impact des services spécialisés destinés aux personnes qui ont un handicap psychique (MHTS) et de l’aide à l’emploi intensive en direction des jeunes adultes (YTD).

Conclusion

29Les États-Unis ont réalisé certaines avancées en matière d’aide à l’emploi des personnes handicapées, mais les responsables des politiques publiques manquent encore de données susceptibles de les éclairer sur la voie à suivre pour réformer de manière plus radicale le système actuel. Les études conduites pour évaluer les mesures en direction des personnes qui souffrent de troubles psychiques présentent un intérêt particulier parce que leurs conclusions ont permis aux professionnels d’ériger ces mesures au rang de bonnes pratiques. Plusieurs autres évaluations de projets pilotes ont également apporté des informations sur d’autres stratégies d’aide à l’emploi possibles, en particulier pour les bénéficiaires de prestations en espèces. En règle générale, il ressort de ces évaluations qu’une aide plus intensive et des moyens personnalisés peuvent avoir un impact plus important sur l’emploi et sur les revenus que les interventions moins intensives (et moins coûteuses) qui ont déjà été expérimentées. Toutefois, aucune des interventions testées n’a entraîné une baisse substantielle du nombre de bénéficiaires de prestations d’invalidité.

30Pour améliorer la qualité des mesures qui seront adoptées à l’avenir, il faut impérativement élaborer des programmes bien conçus, susceptibles d’être évalués selon une démarche scientifiquement rigoureuse et, partant, de convaincre un large éventail d’acteurs intervenant dans la définition des politiques publiques. Les projets de la SSA et des CMS actuellement en cours de mise en œuvre devraient permettre de tirer des enseignements complémentaires qui faciliteront l’élaboration des politiques publiques en matière d’aide à l’emploi et favoriseront de nouvelles formes d’intervention, en particulier en faveur des jeunes adultes, des personnes dépourvues d’assurance et des bénéficiaires de prestations en espèces.

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Date de mise en ligne : 01/01/2010

https://doi.org/10.3917/rfas.084.0111

Notes

  • [1]
    David Wittenburg, chercheur senior, Anu Rangarajan, vice-présidente et directrice de la division Human Services Research et Todd Honeycutt, analyste chercheur: Institut Mathematica Policy Research, Inc Princeton (États-Unis).
  • [2]
    Cet article s’inspire fortement d’un rapport de l’institut Mathematica Policy Research financé par le Department for Work and Pensions. Les auteurs tiennent à remercier plusieurs personnes pour leur contribution: Mike Daly, Maria Strudwick et Janet Allaker, du Department of Work and Pensions, Richard Dorsett, du Policy Studies Institute, Thomas Golden, de la Cornell University, ainsi que Craig Thornton et Bonnie O’ Dayde, de l’institut Mathematica Policy Research. Nous remercions également Ankur Sarin et Debra Brucker, qui nous ont apporté leur aide au début de notre travail.
  • [3]
    Certaines personnes handicapées peuvent également bénéficier du Workforce Development System, mis en place au niveau des États fédérés. Dans le cadre de ce dispositif, des guichets uniques (One-Stop Centers) ont été créés sur l’ensemble du territoire des États-Unis pour promouvoir l’éducation, la formation et l’aide à l’insertion professionnelle ainsi que l’emploi pour l’ensemble de la population, y compris les personnes handicapées. Toutefois, selon Golden, Zeitzer et Bruyère (à paraître), la fourniture de services aux personnes handicapées par les guichets uniques s’est révélée difficile et est, de ce fait, restée limitée.
  • [4]
    Les deux principaux programmes publics de couverture maladie en faveur des personnes handicapées sont Medicaid, qui s’adresse aux personnes à bas revenus, et Medicare, qui couvre les personnes âgées et les personnes handicapées. Dans la plupart des États fédérés, les allocataires du SSI font partie des catégories de personnes qui ont accès à Medicaid et les bénéficiaires du SSDI ont droit à Medicare après une période d’attente de deux ans. Bien qu’il existe des différences entre Medicaid et Medicare en termes de conditions d’accès aux droits et de couverture, ces deux programmes contribuent de manière importante à couvrir des dépenses de santé potentiellement élevées.
  • [5]
    En 1973, les pouvoirs publics ont adopté les premières dispositions législatives sur les droits civiques des personnes handicapées. L’article 504 de la loi de 1973 sur la réadaptation (Rehabilitation Act), rendait en effet illégal l’exercice, par les organismes fédéraux, les universités publiques, les entreprises travaillant pour le gouvernement fédéral et toute autre institution ou entité recevant des fonds fédéraux, d’une discrimination à l’embauche fondée sur le handicap. Au cours des vingt années qui ont suivi, plusieurs lois ont été adoptées pour améliorer encore la situation des personnes handicapées en matière d’éducation, d’autonomie dans la vie quotidienne, d’emploi et de logement. Figuraient notamment parmi ces lois l’Education for Handicapped Children Act (devenue l’Individuals with Disabilities Education Act), adoptée en 1975 pour garantir à tous les enfants handicapés l’accès gratuit à une éducation appropriée dans l’environnement le plus normal possible, et la Fair Housing Amendments Act, de 1988, qui rendait obligatoire la construction de logements accessibles dans tous les immeubles collectifs neufs de quatre logements au moins; cette obligation visait les immeubles publics comme privés, pas seulement ceux qui recevaient des fonds fédéraux.
  • [6]
    Sur l’ADA, voir l’article dans ce numéro de R. Jahiel: « Evaluation de l’Americans with disabilities Act ».
  • [7]
    Rangarajan et al. (2008) ont également examiné les mesures proposées par les dispositifs d’aide sociale qui ciblent les mères à faibles revenus. La seule évaluation analysée concernait des aides à l’emploi fournies à des mères à faibles revenus dans le cadre de dispositifs qui ciblaient des publics ayant des problèmes de santé plutôt qu’un handicap au sens large. C’est pourquoi elle a été exclue de l’analyse présentée ici.
  • [8]
    Peikes et al. (2005) ont tenté d’utiliser un modèle non expérimental, faisant appel à une méthode d’appariement basée sur le score de propension; ils ont apparié, à l’aide de données administratives, les membres du groupe de traitement aux bénéficiaires d’un groupe témoin sur la base de diverses caractéristiques administratives. Ils ont appliqué cette méthode aux quatre sites qui avaient utilisé la sélection aléatoire et ont comparé les résultats obtenus avec la méthode d’appariement basée sur le score de propension et ceux obtenus par sélection aléatoire. Ils ont constaté que les estimations réalisées avec la méthode basée sur le score de propension n’étaient pas cohérentes par rapport à celles réalisées dans le cadre d’un modèle expérimental (sur les quatre sites où la sélection aléatoire avait aussi été utilisée). Par conséquent, les auteurs ont renoncé à utiliser la méthode basée sur le score de propension pour les sites qui n’avaient pas utilisé la sélection aléatoire, estimant que les estimations seraient probablement faussées.
  • [9]
    L’influence des évaluations des dispositifs d’emploi accompagné s’explique en grande partie par l’efficacité démontrée de cette stratégie en termes d’emploi concurrentiel, efficacité qui la distingue des approches plus traditionnelles de la réadaptation utilisées jusqu’alors pour les personnes souffrant de troubles psychiatriques. La notion d’emploi concurrentiel a été définie très précisément, comme un emploi que n’importe qui peut solliciter, exercé dans un lieu de travail ordinaire et donnant lieu à une rémunération au moins égale au salaire minimum. L’emploi concurrentiel se distingue donc d’autres concepts, comme celui d’emploi rémunéré, susceptibles de couvrir aussi les emplois en milieu protégé et réservés aux personnes handicapées. Lorsque les évaluations scientifiquement rigoureuses des modèles d’emploi accompagné destinés à ce public ont été réalisées, il y avait longtemps que les pouvoirs publics testaient de nouvelles stratégies de réadaptation en faveur des personnes atteintes de troubles psychiatriques sévères, mais aucune n’avait autant contribué à améliorer les chances de ce public d’occuper un emploi concurrentiel (Bond, 1992).

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