Notes
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[1]
Traduit de l’anglais par François Bernard.
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[2]
Les opinions exprimées dans cet article n’engagent que leur auteur.
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[3]
Santiso (C.), Auditing for accountability ? Political economy of government auditing and budget oversight in emerging economies, Johns Hopkins University, doctoral dissertation, 2007; Idem, « Improving Fiscal Governance and Curbing Corruption : How Relevant are Autonomous Audit Agencies », International Public Management Review 7(2), 2006, p. 97-108.
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[4]
Ces organisations d’État autonomes, dont la mission était de contrôler les finances publiques de manière indépendante seront désignées sous le terme d’agence d’audit autonome afin de souligner leur caractère autonome au sein de l’appareil d’État. L’Organisation internationale des institutions supérieures de contrôle des finances publiques (INTOSAI) les désigne comme des institutions supérieures de contrôle des finances.
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[5]
Dye (K.) et Stapenhurst (R.), Pillars of Integrity : The Importance of Supreme Audit Institutions in Curbing Corruption, Washington, DC, WBI, 1998.
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[6]
À savoir « l’existence d’agences d’État légalement fondées et habilitées, disposant de pouvoirs, de la volonté et des moyens de mener des actions allant du contrôle routinier aux sanctions pénales ou à la mise en accusation, dans le cas d’agissements ou d’omissions d’autres agences étatiques pouvant être qualifiés d’illégaux »; O’Donnell (G.), « Horizontal Accountability : The Legal Institutionalization of Mistrust », in S. Mainwaring et C. Welna, Democratic Accountability, Oxford, Oxford University Press, 2003, p. 34-54; O’Donnell (G.), « Horizontal Accountability and New Polyarchies », in A. Schedler et al., eds., The Self-Restraining State, Lynne Rienner, 1999, p. 29-52, p. 38.
-
[7]
Santiso (C.), « Re-forming the State : Governance Institutions and the Credibility of Economic Policy », International Public Management Journal, 7(2), 2004, p. 271-298.
-
[8]
Barra (R.C.), « El papel de los institutos centrales de control en los ordenamientos jurídicos : el modelo argentino », Universidad Austral, Control de la administración pública, Buenos Aires, Ediciones RAP, 2002, p. 289-306.
-
[9]
Kettl (D.F.), « The Global Revolution : Reforming Government-Sector Management », in Bresser Pereira (L.C.) et Spink (P.), eds. Reforming the State : Managerial Public Administration in Latin America, Boulder : Lynne Rienner, 1999, p. 41-74; Przeworski (A.), « On the Design of the State : A Principal-Agent Perspective », in Bresser Pereira (L.C.) et Spink (P.), eds., Reforming the State, op. cit., 1999, p. 15-40.
-
[10]
McCubbins (M.) et Schwartz (T.), « Congressional Oversight Overlooked : Police Patrols versus Fire Alarms », American Journal of Political Science 28(1), 1984, p. 165-179.
-
[11]
Allen (R.) et Tommasi (D.), eds., Managing Public Expenditure, Paris, OECD, 2001; Stapenhurst (R.) et Titsworth (J.), Features and Functions of Supreme Audit Institutions, Washington, DC, World Bank PREM Note 59,2001.
-
[12]
Rodríguez (J.) et Bonvecchi (A.), El papel del poder legislativo en el control presupuestario : La experiencia argentina en perspectiva comparada, Santiago, CEPAL Working Paper 51,2006.
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[13]
Cette forme institutionnelle résulte d’un amendement à la Constitution de 1994 destiné à renforcer le contrôle externe des activités du gouvernement. Le Pacto de los Olivos de 1993, conclu entre le Parti Péroniste au pouvoir et le Parti Radical accepta la réélection du président voulue par Carlos Menem, en échange d’un plus grand contrôle sur le pouvoir exécutif et une moindre concentration des pouvoirs entre les mains du président. Cet arrangement rappelle celui des démocraties parlementaires de type « Westminster ».
-
[14]
Muruzabal Lerga (J.), « Los órganos de control externo ¿sirven para algo ? », Revista Auditoría Pública 19,1999, p. 6-10.
-
[15]
Makón (M.), El rol del Poder Legislativo ante el Proceso Presupuestario, unpublished mimeo, 1999. Makón (M.), « La reforma del sistema presupuestario nacional », Revista de la ASAP 29,1997, p. 51-64.
-
[16]
González de Rebella (L.C.), El control externo del sector público : la Auditoría General de la Nación, paper presented at CLAD VI International Congress, Buenos Aires, Argentina, 5-9 November, 2001. Les controverses qui ont entouré la désignation de Rodolfo Barra au poste de président de l’AGN entre 1999 et 2002 en sont l’illustration vivante. En 1999, C. Menem, alors dans l’opposition, décida de nommer Barra, ancien ministre de la justice de son gouvernement et ancien juge de la Cour suprême, à la tête de l’AGN. Cette décision fut interprétée comme une tentative de l’ancien président de neutraliser l’AGN, et s’assurer que l’agence n’enquêterait pas sur les allégations de corruption sous son gouvernement (1989-1999), dont R. Barra fit partie. Par exemple, Barra usa de ses pouvoirs discrétionnaires pour rendre public les conclusions d’un rapport d’audit qui impliquaient l’opposition ou tenta d’empêcher la publication de rapports qui compromettaient des alliés politiques.
-
[17]
Tsebelis (G.), Veto Players : How Political Institutions Work, Princeton, Princeton University Press, 2002.
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[18]
Fadel (M.), « La Auditoría General de la Nación », in L. Despouy et al., El control público en la Argentina, op. cit., 2002, p. 117-124.
-
[19]
Rodríguez (J.) et Bonvecchi (A.), El papel del poder legislativo en el control presupuestario : La experiencia argentina en perspectiva comparada, Santiago, CEPAL Working Paper 51,2006. Rodríguez (J.) et Bonvecchi (A.), El papel del poder legislativo en el proceso presupuestario : la experiencia argentina, Santiago, ECLAC Working Paper 32,2004. Il est important de souligner que les avis ou dictàmenes de l’AGN suivent le processus législatif. Les recommandations de l’AGN sont adressées au CPRMC. Cette commission n’a pas non plus de pouvoir de sanction, et n’a ni l’obligation ni la capacité de porter plainte. Elle peut cependant retarder la publication d’un rapport d’audit, où s’abstenir d’émettre une opinion sur certaines conclusions, ce qui a pour effet d’étouffer le rapport. Le devenir des travaux de l’AGN est par conséquent incertain, ce qui diminue d’autant leur impact.
-
[20]
Banque mondiale, Anti-corruption Diagnostic for Argentina, Washington, DC, World Bank Report N°.20133-AR, 2001.
-
[21]
Petrei (H.), Budget and Control : Reforming the Public Sector in Latin America, Washington, DC, IDB, 1998.
-
[22]
Baglini (R.), « La gestación parlamentaria de la Ley no.24156 », in L. Despouy et al., El control público en la Argentina, op. cit., 2002, p. 27-30.
-
[23]
Morgenstern (S.) et Manzetti (L.), « Legislative Oversight : Interests and Institutions in the United States and Argentina », in S. Mainwaring et C. Welna, eds., Democratic Accountability in Latin America, op. cit., 2003, p. 132-169.
-
[24]
Gutiérrez (R.), « Activos y pasivos de una cultura del presupuesto », in L. Despouy et al., El control público en la Argentina, op. cit., 2002, p. 89-97.
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[25]
Baglini (R.), « La Cuenta de Inversión », in O. Lamberto, dir., La Cuenta de Inversión, 2005, p. 53-62.
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[26]
L’étude des comptes publics s’étale sur une période de 16 mois, ce qui dépasse de huit mois la durée recommandée selon les normes internationales. Cependant, même ces délais plus que généreux ne sont pas respectés dans la pratique. Cet examen dure généralement trois à quatre ans, soit pratiquement la durée d’un mandat présidentiel.
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[27]
Rejtman (M.), « El Tratamiento de la Cuenta de Inversión : Una Obligación Constitucional », in O. Lamberto, dir., La Cuenta de Inversión, op. cit., 2005, p. 63-89.
-
[28]
AGN, Proyecto de informe de auditoria de gestión ambiental, PRODIA, Buenos Aires, AGN, rapport non publié, 1999.
-
[29]
Atchabahian (A.), « Comentarios », Revista ASAP, 29,2002, pp. 153-158, p. 155.
-
[30]
L’AGN, la SIGEN, le bureau anti-corruption du ministère de la justice, et le tribunal administratif national (FNIA).
-
[31]
Jones (M.), Saiegh (S.), Spiller (P.) et Tommasi (M.), Professional Politicians, Amateur Legislators ; The Argentine Congress in the 20th Century, Buenos Aires, CEDI Working Document 45,2000.
-
[32]
Abuelafia (E.), Berensztein (S.), Braun (M.) et Di Grescia (L.), Who Decides on Public Expenditures ? A Political Economy Analysis of the Budget Process : The Case of Argentina, Buenos Aires, CIPPEC, 2005, p. 7.
-
[33]
Braun (M.), Díaz Frers (L.) et Uña (G.), Hay que crear una Oficina de Presupuesto del Congreso, Buenos Aires, CIPPEC, Políticas Públicas Recomendación 26), 2006.
-
[34]
Uña et al., El Congreso y el Presupuesto Nacional : Desempeño y Condicionantes de su Rol en el Proceso Presupuestario, Buenos Aires : Fundación Konrad Adenauer, 2005.
-
[35]
Díaz Frers (L.), El debate sobre los superpoderes, Buenos Aires : CIPPEC Análisis 29,2006.
-
[36]
Santiso (C.), « Gobernabilidad democrática y política económica insular : Paradoja de las reformas de segunda generación en la Argentina de los 1990 », Revista Contribuciones 4/2001,2001, p. 109-136.; Bambaci (J.), Saront (T.) et Tommasi (M.), « The Political Economy of Economic Reforms in Argentina », Journal of Policy Reform 5(2), 2002, p. 75-88.; Carey (J.) et Shugart (M.S.), eds., Executive Decree Authority : Calling out the Tanks or Just Filling out the Forms, Cambridge, Cambridge University Press, 1998.
-
[37]
Op. cit.
-
[38]
Abuelafia et al. Who Decides on Public Expenditures ? Op. cit.
-
[39]
Uña et al., Delegación de facultades del Jefe de Gabinete de Ministros : evolución e impacto en el contexto fiscal actual, op. cit.
-
[40]
Zommer (L.), « Poder impune », La Nación, 12 mars 2007.
-
[41]
Rodríguez (H.), « Comentarios », Revista ASAP 29,2002, p. 159-167.
-
[42]
Ducoté (N.), Sistemas nacionales de integridad : Informe sobre Argentina para Transparency International, Buenos Aires, CIPPEC, 2001.
-
[43]
D’autres mesures plus techniques peuvent contribuer à une amélioration des performances comme, par exemple, le vote à la majorité qualifiée, un recrutement plus sélectif des candidats, l’exigence de qualifications professionnelles, et des audiences publiques pour la sélection des candidats aux postes d’auditeurs généraux. En 2003, le processus de renouvellement des juges de la Cour suprême a adopté un schéma privilégiant la transparence et la compétence.
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[44]
Malheureusement, en avril 2007, la majorité parlementaire a déposé une proposition d’amendement de la loi-cadre d’administration financière de 1992 allant dans le sens contraire. Même si cette proposition de loi introduit d’importantes avancées en matière de techniques de contrôle, elle risquerait, d’entamer davantage l’indépendance politique et l’autonomie fonctionnelle de l’AGN en renforçant sa dépendance vis-à-vis de la majorité parlementaire. Ce projet de réforme a cependant été repoussé jusqu’après les élections générales d’octobre 2007.
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[45]
Diamond (L.), Fostering Institutions to Contain Corruption, Washington, DC, World Bank PREM Note 24,2001, p. 1.
Quelques magistratures, et l’on pourrait peut-être dire toutes, maniant souvent les fonds publics, il faut nécessairement que celle qui reçoit et apure les comptes des autres, en soit totalement séparée, et n’ait exclusivement que ce soin.
Introduction : Audit des comptes publics, responsabilité financière et comptable et lutte contre la corruption
1Le renforcement du contrôle de la dépense publique et de la responsabilité budgétaire représente un enjeu majeur pour les économies émergeantes désireuses d’améliorer leur gouvernance et de prévenir la corruption dans leurs finances publiques [3].
2À ce titre, les agences d’audit autonomes [4] ont pour mission d’examiner les finances publiques et de contrôler l’administration publique. Ce sont des « piliers de l’intégrité », agissant au sein de l’État comme un contre pouvoir dans le cadre de la séparation des pouvoirs et des checks and balances [5]. Elles participent donc à la séparation, à l’équilibre et à la responsabilisation des pouvoirs, en permettant de renforcer la transparence des finances publiques et la reddition des comptes dans le processus budgétaire, traditionnellement dominé par le pouvoir exécutif. Généralement, elles aident le corps législatif à exiger des comptes du gouvernement sur sa gestion des finances publiques.
3Cependant, dans de nombreuses économies émergeantes, ces agences sont défaillantes, incapables de mener le rôle qui leur a été assigné dans le contrôle budgétaire; elles sont en outre critiquées pour leur incapacité à prévenir la corruption dans les finances publiques ; impuissance due, soit à des pouvoirs de contrôle limités, soit à un ancrage inadéquat dans l’architecture institutionnelle de l’État, soit encore à un contexte politique défavorable. Se fondant essentiellement sur l’expérience argentine, G. O’Donnell a mis en lumière la faiblesse des systèmes de contrôle dans les démocraties émergeantes d’Amérique latine, notamment les dysfonctionnements dans les systèmes de « responsabilisation horizontale » dont la mission au sein de l’État était de limiter le pouvoir discrétionnaire des administrations [6]. Les démocraties d’Amérique latine se caractérisent par l’existence de très larges délégations de pouvoir du parlement au gouvernement ainsi que par un mauvais fonctionnement du système des contrepouvoirs, ce qui affaiblit les mécanismes de contrôle, de responsabilisation et de reddition des comptes [7]. La concentration de pouvoirs budgétaires entre les mains de l’exécutif, le recours aux décrets d’urgence pour la gestion des finances publiques et la délégation des prérogatives budgétaires du corps législatif concourent à nuire à la transparence et la responsabilisation dans la gestion des comptes publics.
4Même si elles bénéficient aujourd’hui d’une plus grande attention, les agences d’audit autonomes restent des institutions méconnues, en dehors d’un cercle restreint de spécialistes des finances publiques ou du droit administratif. Dans cet article, nous évaluerons le rôle de l’agence d’audit autonome argentine, l’Auditoria General de la Nación (AGN), dans l’atténuation des deux risques principaux de la gouvernance financière dans les économies émergeantes, à savoir la délégation législative et le pouvoir discrétionnaire gouvernemental dans le processus budgétaire fédéral.
5Nous tenterons de démontrer que, même si les arrangements institutionnels permettant de contrôler les finances publiques jouent un rôle important, in fine ce sont des facteurs de gouvernance externe et le contexte politique qui expliquent l’inefficacité de l’AGN plutôt que des facteurs de gouvernance interne et de choix de modèle institutionnel. Les agences d’audit autonomes ne peuvent en effet avoir qu’un impact limité si le système dans lesquels elles s’insèrent sont minées par des pratiques informelles et un contexte politique défavorable. La nature même du système politique, marqué par la fusion des majorités législatives et exécutives, constitue un environnement particulièrement peu propice à toute forme de contrôle et de supervision externe. Nous montrerons que le cœur du problème réside dans la qualité de l’ancrage des agences d’audit autonomes au sein du système de contrôle et de gouvernance financière, et en particulier dans les liens fonctionnels que ces agences entretiennent avec leur « principal », à savoir le pouvoir législatif.
6Cet article se divise en trois parties : nous situerons tout d’abord l’AGN dans la typologie classique des différents systèmes de contrôle externe des finances publiques dans les États modernes. Dans une deuxième partie, nous évaluerons le cadre institutionnel du contrôle fiscal en Argentine et le rôle dévolu à l’AGN à cet égard. Dans la troisième partie, nous analyserons l’écart entre les institutions formelles et les pratiques informelles. En conclusion, nous tirerons les implications de cette étude en termes de définition des politiques publique et de réforme des institutions de contrôle des finances et de la gestion publiques.
TYPOLOGIE DU CONTRÔLE EXTERNE DES FINANCES PUBLIQUES
7La contribution des agences d’audit autonomes à la gouvernance du secteur public peut se définir à la fois en termes d’amélioration de la gestion financière et de lutte contre, au mieux, la mauvaise gestion et, au pire, contre la corruption [8].
8Le modèle « agent-principal », auquel on a fréquemment recours dans la littérature consacrée à la gouvernance du secteur public [9], fournit un cadre théorique utile dans l’analyse de la dynamique relationnelle entre les pouvoirs exécutif et législatif en matière budgétaire. Les agences d’audit autonomes jouent généralement le rôle d’institutions auxiliaires du pouvoir législatif, en aidant ce dernier à contrôler la gestion budgétaire. Elles effectuent un contrôle routinier des finances du gouvernement, ce que M. McCubbins et T. Schwartz appellent des « rondes de police » [10]. Cette forme de contrôle externe est différente de la supervision de type « signal d’alarme » mise en place par les commissions d’enquête parlementaires spéciales pour enquêter sur des allégations de corruption.
9La délégation des missions de contrôle du parlement vers des agences autonomes a pour but d’exercer plus efficacement une contrainte sur le gouvernement. Les agences d’audit autonomes peuvent donc être perçues comme des institutions auxiliaires qui permettent au parlement (le « principal ») de responsabiliser son « agent » (l’exécutif) à travers des contrôles. Cependant, la création de ces agences génère un nouveau type de dilemmes entre le parlement et son « agent, » l’agence d’audit autonome. Le parlement approuve les dotations budgétaires, l’exécutif les met en œuvre, et les agences d’audit autonomes examinent leur exécution afin de s’assurer que les ressources ont bien été utilisées aux fins qui leur étaient destinées par la loi de finances. Au travers de la loi de règlement, le parlement approuve ou désapprouve les comptes publics, sur la base de l’avis de l’agence d’audit autonome.
10Les caractéristiques et les modes de fonctionnement des agences d’audit autonomes varient selon les pays et évoluent dans le temps. Selon les typologies en vigueur, on peut les classer selon les modèles suivants : le modèle monocratique, le modèle juridictionnel et le modèle collégial [11].
11Le modèle monocratique consiste en une agence d’audit autonome uninominale, dirigée par un seul contrôleur-général et généralement rattachée au parlement, bien que disposant d’une grande autonomie de fonctionnement. Dans ce modèle, les agences d’audit autonomes ont tendance à se concentrer sur le contrôle ex-post des résultats davantage que sur le contrôle ex-ante, et mettent davantage l’accent sur le contrôle financier et de performance que sur les questions de contrôle de légalité et de conformité.
12Le modèle juridictionnel correspond à celui des cours des comptes dotées de pouvoirs quasi-judiciaires dans le domaine administratif, jouant souvent le rôle de tribunal administratif. Du fait de ses caractéristiques quasi-judiciaires, ce modèle privilégie la conformité légale et financière par rapport au contrôle d’efficacité et de performance. Si les liens qu’il entretient avec le parlement sont limités, ceux qui le lient au pouvoir judiciaire sont tout aussi ambigus.
13Le modèle collégial est un modèle hybride combinant une structure de prise de décision collégiale, similaires à celle des tribunaux, dirigées par un conseil d’auditeurs généraux, mais sans autorité juridictionnelle ou pouvoirs quasi-judiciaires. Dans ce modèle, adopté par l’Argentine, l’agence d’audit autonome émet une opinion sur la fiabilité et la probité des comptes du gouvernement, en général à destination du parlement. Ce modèle est celui qui entretient les liens les plus étroits avec le parlement.
ÉVALUATION DU CONTRÔLE EXTERNE DES FINANCES PUBLIQUES
Profil institutionnel
14Sur le papier, l’AGN est une organisation puissante, dotée de responsabilités clairement définies, intégrée dans un contexte clair de bonne gouvernance financière et de contrôle fiscal. Elle a été créée en 1992 dans le cadre de réformes destinées à moderniser le processus budgétaire argentin. Elle a obtenu un rang constitutionnel en 1994, en tant qu’agence rattachée au parlement. Cependant, elle ne dispose toujours pas de loi organique permettant de donner une cohérence à sa gouvernance interne et à ses règles de procédure. Selon le schéma constitutionnel, c’est sous la responsabilité de ce dernier que repose le contrôle des finances publiques du gouvernement, et l’AGN n’est là que pour l’assister dans cette tâche. Cette supervision s’exerce grâce à la commission mixte de contrôle des comptes publics des deux chambres (Comisión Parlamentaria Mixta Revisadora de Cuentas, CPMRC), qui comprend douze membres (six sénateurs et six députés), désignés sur une base proportionnelle à la durée du mandat parlementaire. Elle est présidée par un représentant de la majorité.
15L’AGN est une institution dotée d’une personnalité juridique fonctionnellement indépendante, autonome financièrement. Sa structure, ses fonctions et ses procédures internes sont approuvées par le parlement par résolution conjointe des commissions parlementaires des finances et du budget des deux chambres et de la commission mixte de contrôle des comptes publics [12]. Son budget est maintenu à un niveau relativement stable, bien qu’assez bas (0,05 % du budget fédéral). Le budget n’a pas été utilisé pour faire pression sur l’AGN; il ne l’a pas été non plus pour la renforcer. À titre indicatif, le budget de l’agence d’audit autonome chilienne est quatre fois supérieur en termes relatifs.
16L’AGN est une instance collégiale. Elle est gouvernée par une assemblée de sept auditeurs généraux nommés pour un mandat renouvelable de huit ans. Le Sénat et l’Assemblée nationale désignent chacun trois auditeurs généraux sur une base proportionnelle. Le septième membre du collège est nommé par décision conjointe des deux chambres et, depuis 1994, par le principal parti politique d’opposition [13]. Cela ne signifie nullement que la majorité des auditeurs généraux soient membres de l’opposition, bien au contraire. En fait, le président est généralement en minorité. Puisque les décisions sont prises soit par consensus, soit par vote à la majorité; l’opposition peut appliquer un véto aux décisions de contrôle auxquelles elle s’oppose. Par ailleurs, le parti au pouvoir peut aussi retarder des décisions en utilisant la commission mixte de contrôle des comptes publics du parlement, dont il a généralement la présidence.
17Les compétences de l’AGN sont le contrôle de la gestion économique, financière, légale et patrimoniale du gouvernement fédéral, y compris des projets financés par les institutions financières internationales, le financement de la dette publique et les dépenses sociales. Le contrôle externe est mené ex-post et de manière non contraignante. L’audit externe comprend aussi bien un contrôle de performance que de conformité. Le contrôle ex-ante de conformité avant exécution du budget a été abandonné en 1992 et dévolu au système de contrôle interne, qui a également été restructuré et sous la houlette d’une agence d’audit interne placée sous l’autorité du Président, la Sindicatura General de la Nación (SIGEN). L’AGN n’est pas dotée de pouvoirs directs de sanction.
18L’indépendance de l’AGN est entravée par le mode de désignation, partisan, de ses auditeurs généraux. Si, de manière générale, l’indépendance du contrôle des dépenses publiques s’apprécie sous trois angles : indépendance de sa direction, impartialité du personnel et capacité à mener les missions sans interférence politique [14], ces conditions ne sont pas réunies dans le cas de l’Argentine. Une politisation excessive a fini par jeter le doute sur la crédibilité de l’AGN en tant qu’organisme impartial de contrôle des finances du gouvernement et de la diligence requise en matière budgétaire [15]. À la politisation du collège des auditeurs généraux s’ajoute la politisation de l’agence elle-même. L’AGN est littéralement coupée en deux entre les deux principaux partis politiques, dans la mesure où chaque auditeur général exerce des responsabilités dans un domaine précis et que la nomination des directeurs et directeurs-adjoints des directorats internes correspondants est à sa discrétion.
19De plus, les partis politiques représentés au parlement peuvent intervenir au cours de plusieurs étapes du processus de contrôle : de la définition du cahier des charges de l’agence jusqu’au suivi des conclusions des rapports d’audit. Les conclusions des contrôles sont souvent négociées, plutôt qu’évaluées selon leur mérite. Par ailleurs, bien que les auditeurs généraux bénéficient d’un mandat relativement long – en réalité ils changent à chaque alternance de pouvoir puisque, depuis 1994 – c’est l’opposition qui doit désigner le président de l’AGN. Ainsi, même si l’AGN reste formellement indépendante du pouvoir exécutif, elle n’est donc pas à l’abri des ingérences politiques et partisanes [16].
20Par ailleurs, le processus de contrôle des finances publiques est entravé par des « votes de censure » et des « points de pression » qui sapent son efficacité [17]. En effet, la règle au sein du collège des auditeurs généraux est celle du vote à l’unanimité, une procédure qui permet aux représentants du parti au pouvoir d’opposer leur véto à la publication de certaines conclusions d’audit contraires à leurs intérêts. De plus, une fois qu’un rapport d’audit arrive au parlement, celui-ci peut encore en retarder l’adoption, si la commission mixte de contrôle des comptes publics demande un complément d’information et d’enquête. Par ailleurs, cette commission peut influencer, directement ou indirectement, le cahier des charges de l’AGN en demandant des études spéciales ou des enquêtes ad hoc, restreignant ainsi l’indépendance fonctionnelle et la marge de manœuvre de l’AGN.
21Des ambiguïtés légales et des faiblesses institutionnelles achèvent de compromettre la crédibilité du contrôles des finances. Les audits externes sont rares, souvent peu opportuns, et vont rarement au-delà d’un contrôle de conformité légale. Les rapports d’audit arrivent souvent trop tard pour peser sur le processus budgétaire. Par exemple, l’AGN a présenté son rapport sur les programmes sociaux des retraités de 1994 seulement en 1999 ! Les rapports des missions d’audit ne sont utilisés par le parlement, ni pour améliorer l’efficience du budget, ni pour punir d’éventuelles malversations. Les attentes de la société vis-à-vis du travail de l’AGN sont faibles et, jusqu’à présent, la presse ou le public ne prêtait qu’une maigre attention aux rapports d’audit. La crédibilité de l’AGN pâtit également d’un manque de mécanismes de contrôle efficaces a priori du budget avant son exécution. L’accent mis sur le respect des lois et des procédures financières ne tend à déceler que les aspects les plus insignifiants de la probité des administrations, tâche qui devrait normalement revenir aux contrôles administratifs internes.
22Cependant, la situation s’est améliorée ces dernières années. Le nouveau président de l’AGN, Leandro Despouy, a tenté de rendre plus efficaces et opportuns les contrôles de finances publiques. Éminent avocat des droits de l’Homme, très lié au principal parti d’opposition, les Radicaux, Despouy assure la présidence de l’AGN depuis 2001. À partir de 2002, les rapports d’audit ont commencé à être rendus publics dès leur approbation par collège des auditeurs généraux. Ce petit changement de procédure, en apparence anodin, est en réalité de première importance, dans la mesure où il met fin au pouvoir de véto informel de la commission mixte de contrôle des, comptes publics, et de sa propension à « ranger » les rapports considérés comme gênants. Les contrôles de finances publiques ont également gagné en pertinence politique, en ciblant des domaines sensibles comme les dépenses sociales, les fonds d’investissement, les concessions, les subventions de l’État et la dette extérieure. L’AGN a révélé des irrégularités chez des prestataires privés de services publics locaux, menant parfois à la suspension ou l’annulation de contrats publics.
23Cependant, la prise en compte des recommandations de l’AGN et l’imposition de sanctions en cas de non-respect des lois restent déficientes. Il est rare que la bureaucratie prenne volontairement en compte les avis de l’agence, et il n’existe de toute façon aucun mécanisme de suivi rigoureux des conclusions de ses rapports d’audit. En 2000 et 2001, par exemple, presque un quart des rapports d’audit furent redirigés vers le bureau du procureur de la République et vers des autorités judiciaires, suite à des soupçons de malversations [18]. Mais cela est resté sans effet, sauf dans les cas où la presse ou l’opposition ont relayè l’information.
24Il faut cependant souligner que la qualité technique de ces rapports est rarement remise en question. Ce qu’on leur reproche avant tout est leur manque d’impact en termes de législation corrective, de sanctions administratives ou judiciaires ou de responsabilisation politique [19]. L’information des rapports d’audit n’est pas utilisée pour demander des comptes au gouvernement, et elle est souvent court-circuitée au parlement, généralement dominé par le parti au pouvoir.
25Le suivi des recommandations des contrôles d’audit n’intervient qu’indirectement à travers la pression grandissante des associations de la société civile. Les médias se sont révélés des acteurs particulièrement efficaces pour la divulgation de ces rapports, forçant ainsi, indirectement, le pouvoir à prendre en compte les recommandations de l’AGN. Entre 1997 et 2001, plus de la moitié des affaires de corruption révélées par les deux principaux quotidiens, La Nación et El Clarín, ont résulté de fuites des rapports de l’AGN qui n’étaient pas encore approuvés formellement par le collège de l’AGN ou même bloqués. Des entretiens menés sur le terrain révélèrent que des auditeurs, ne supportant plus leur impuissance, avaient été à l’origine de certaines de ces fuites. Cependant, l’intérêt des médias pour le travail de l’AGN a tendance à se porter sur les scandales de corruption les plus visibles, et non sur les efforts quotidiens et minutieux pour améliorer l’efficience du secteur public.
Trajectoire institutionnelle
26L’AGN est née en 1992 dans le cadre d’une réforme profonde de l’administration financière argentine [20]. Sous la pression des institutions financières internationales, notamment la Banque mondiale et le Fonds monétaire international, la réforme de l’administration financière de 1992 visait à s’attaquer à l’incurie qui régnait dans les finances publiques argentines. À la fin des années 1980, le processus budgétaire s’était en effet sérieusement détérioré, à tel point qu’il était parfois abandonné [21] : aucun budget ne fut voté en 1990 et 1991.
27La proposition originale du gouvernement visait la création d’une nouvelle agence d’audit autonome au niveau fédéral. Elle fut radicalement modifiée lors du débat parlementaire, qui s’étala sur une année et demi, d’avril 1991 à septembre 1992 [22]. Les principaux points d’achoppement concernaient les caractéristiques et les fonctions de l’agence d’audit autonome. L’AGN vint remplacer la Cour nationale des comptes ou Tribunal de Cuentas de la Nación (TCN), créée en 1956, sur le modèle – emprunté aux modèles espagnols et français – d’une cour des comptes. Malgré ses multiples prérogatives, la performance du TCN était assez inégale. A la fin des années 1980, il existait un large consensus sur la nécessité d’une réforme de cette institution.
28Un fort soupçon pesa sur les motivations qui conduisirent à réformer de manière aussi radicale le système d’audit, plutôt que d’introduire quelques ajustements et modifications au modèle existant. Au cours des premiers mois de pouvoir de l’administration Menem, le TCN entra en conflit avec le président à cause de sa manière expéditive de mener les affaires du gouvernement, surtout dans les processus de privatisation et d’attribution des marchés, où flottait des soupçons de surfacturation et de favoritisme. Le TCN remit en question certains décrets présidentiels et révéla des malversations financières de la part de membres du gouvernement [23]. Jugé trop encombrant par le pouvoir, le TCN fut démantelé. En mars 1990, Menem évinça les membres du TCN et les remplaça par des alliés politiques, plaçant à leur tête son propre frère, Éduardo Menem, en flagrante violation de la règle qui disposait que les magistrats du TCN ne pouvaient être destitués que par le Sénat. Le TCN cessa, comme on pouvait s’y attendre, de créer le moindre problème au gouvernement. Après avoir neutralisé le TCN, Menem fit pression pour faire adopter par le Parlement la nouvelle loi-cadre d’administration financière et de contrôle financier et comptable, qui aboutit au remplacement du TCN par l’AGN. Entre 1990 et 1993, le contrôle externe des finances publiques fut ainsi de facto neutralisé.
29La proposition finale de loi-cadre d’administration financière retira à l’AGN de nombreuses prérogatives que possédait son prédécesseur, comme le contrôle a priori des actes administratifs et des décrets gouvernementaux, la faculté de suspendre ou annuler les actes illégaux de l’administration, le pouvoir de sanction dans le domaine administratif ou celui de poursuivre en justice en se portant partie civile. Au contrôle ex ante des principales opérations, on substitua un audit de performance ex post. Même si cette modification s’alignait sur les meilleures pratiques internationales, la faiblesse du contrôle interne dans la bureaucratie signifiait qu’en pratique, les contrôles de conformité a priori devenaient inopérants. L’amendement le plus important à la proposition de loi originale porta sur la nature collégiale de l’AGN, ainsi que sur le mode de désignation des auditeurs généraux selon des critères partisans et leur affiliation politique [24].
30En résumé, ces réformes, bien que techniquement séduisantes, représentèrent un choix malheureux et mal adapté au contexte argentin [25]. Pour renforcer la probité administrative dans ce pays, il eut été nécessaire de renforcer le contrôle a priori, et non l’affaiblir comme cela fut le cas. Ces réformes modifièrent les institutions formelles du contrôle financier et comptable sans toutefois s’attaquer aux institutionnelles informelles et aux relations de pouvoir sous-jacentes dans lesquelles elles s’inscrivaient.
Liens institutionnels
31Dans le système argentin de contrôle des finances publiques, l’AGN fonctionne comme un corps auxiliaire du parlement dans le contrôle financier du gouvernement. Cependant, les liens qui lient l’AGN aux deux chambres souffrent d’importants dysfonctionnements. Cela est dû en partie à des arrangements institutionnels défaillants, mais surtout à la nature et au fonctionnement du système politique argentin caractérisé par une forte concentration et un large pouvoir discrétionnaire dans les mains du gouvernement.
32Le processus de certification des comptes publics illustre bien ces dysfonctionnements. L’un des principaux instruments utilisés par le Parlement pour exercer un contrôle politique sur le gouvernement est la supervision ex-post du budget. Après avoir étudié les comptes annuels du gouvernement, le gouvernement décide s’il donne ou non décharge à ces comptes par le biais de la loi de règlement. En théorie, ce processus est organisé de manière rationnelle [26]. Cependant, des pratiques informelles et des controverses légales empêchent le processus de certification et de décharge de fonctionner comme prévu, ce qui rend difficile l’évaluation rapide et ponctuelle des comptes du gouvernement.
33Entre 1994 et 2006, le parlement n’a pas été en mesure d’approuver (ou de désapprouver) les comptes du gouvernement. Les derniers comptes publics approuvés par le parlement furent ceux de 1993, approuvés par la commission mixte de contrôle des comptes publics en 1997 et par le Parlement 1998. Cependant, en mars 2006, la commission mixte de contrôle des comptes publics a approuvé les comptes du gouvernement de 1997 et de 1998, ultérieurement approuvés par le Parlement en mai 2006. Les règles en vigueur ne sont pas suffisamment claires sur ce qui devrait se passer au cas où le parlement n’approuverait pas la décharge du gouvernement : quel gouvernement serait responsable et devrait être sanctionné ? Quelles sont les sanctions prévues ? Un compromis politique est donc nécessaire pour résoudre ce dilemme.
34De tels retards rendent tout l’exercice obsolète, d’autant plus que les audits ont tendance à se limiter à une étude de conformité légale et procédurale, plutôt que de se livrer à une analyse en profondeur des performances du gouvernement et de l’impact des politiques publiques [27].
35Les processus de certification trouvent leur origine dans les étapes parlementaires plutôt qu’au moment de l’audit externe. En 2004, l’AGN a audité les comptes publics de 2002 et en 2006 ceux de 2003. Elle rattrape progressivement son retard, examinant en 2006 les comptes publics de 2005 et se saisissant de ceux de 2006. Ces données laissent penser que les dysfonctionnements du processus d’audit externe n’ont pas pour origine les faibles capacités techniques de l’AGN, mais davantage le filtrage politique des conclusions des rapports d’audit au parlement. Ces dysfonctionnements débouchent sur un manque de suivi et de mise en œuvre des recommandations de l’AGN et une publicité limitée de ceux-ci.
UN CONTRÔLE ILLUSOIRE ET L’ÉCHEC DE LA RÉFORME
L’affaire Alsogaray
36L’affaire « María Julia Alsogaray », ancienne ministre de l’environnement de 1995 à 1999 et figure emblématique du système Menem, fut un épisode symptomatique du profond enracinement de la corruption et de l’incapacité du système de contrôle à l’empêcher ou le dissuader. Asogaray fut impliquée dans une affaire d’attribution illégale de marchés publics pour un programme de protection de l’environnement d’un montant de 38 millions de dollars, subventionné par un prêt de la Banque interaméricaine de développement, qui remontait à 1996. Le scandale éclata lorsqu’un rapport provisoire d’audit parvint, à la suite d’une fuite, au journal Página 12, le 3 janvier 2000. Ce rapport faisait état de nombreuses irrégularités dans la gestion du budget discrétionnaire du ministère, en particulier l’utilisation suspecte d’un fonds d’investissement hors-budget pour un montant de 4,5 millions de dollars, ainsi que de nombreuses malversations lors d’attributions de marchés publics, de surfacturation et de création d’emplois fictifs [28]. L’investigation de l’AGN commença alors que le radical Enrique Paixão était président de celle-ci. Elle dura six mois. Les conclusions furent rendues en octobre 1999, à quelques jours des élections générales. Celles-ci débouchèrent sur une alternance au pouvoir entre les péronistes et les radicaux, et, par conséquent, un changement des autorités à la tête de l’AGN, selon la règle introduite en 1994. Alsogaray quitta le ministère de l’environnement et le rapport provisoire fut renvoyé, sans réponse, à l’AGN. Le péroniste Rodolfo Barra, ardent soutien de Menem, remplaça Paixão et renvoya le rapport au successeur d’Alsogaray, Oscar Massei, qui déploya peu de zèle à défendre les activités de son prédécesseur. Dans un communiqué de presse, Barra tenta de minimiser l’importance du rapport divulgué dans la presse, en expliquant que le collège des auditeurs généraux ne l’avait pas encore approuvé. Cependant, la fuite du rapport poussa le bureau anti-corruption du ministère de la justice, alors dominé par les radicaux, à se saisir du dossier dès sa parution dans la presse. En juin 2000, le bureau anti-corruption se porta partie civile contre Alsogaray. L’affaire prit vite de l’ampleur, et d’autres cas de corruptions furent révélés. En 2000, Asogaray, incapable d’expliquer comment sa fortune personnelle était passée de 300 000 dollars en 1989 à 2,5 millions de dollars dix ans plus tard, fut accusée d’enrichissement illicite. Fin 2000, elle fut mise en examen pour fraude et corruption sur un montant de 180 millions de dollars, impliquée dans douze affaires et mise en cause par douze rapports de contrôle pour prise illégale d’intérêts, détournement de fonds publics, prévarication, fraude fiscale, faute professionnelle grave, avec certains chefs d’accusation remontant à 1992. En 2001, elle fut également accusée d’avoir présenté un faux rapport sur l’état des actifs de la compagnie de téléphone d’État Entel lors de sa privatisation, et de mauvaise gestion de l’Instituto Nacional de Agua y del Ambiente, institut sous tutelle du ministère de l’environnement. En août 2003, un juge de la Cour fédéral déclara Alsogaray coupable de plusieurs accusations de corruption. Elle fut cependant relâchée sous caution en mai 2005 et revint en politique avec une soif de vengeance. Dans une lettre ouverte au journal La Nación, elle révéla le recours systématique à des primes illégales sur les salaires des ministres, des députés, des hauts fonctionnaires et des juges entre 1989 et 1999, sous l’administration Menem. En lâchant cette bombe politique, Alsogaray espérait troquer sa liberté contre son silence, dans la mesure où de nombreux politiciens incriminés dans l’affaire des primes politiques avaient intégré le gouvernement de Néstor Kirchner.
37Cette affaire illustre assez bien deux problèmes liés au contrôle des fonds publics en Argentine. Premièrement, elle montre que les dysfonctionnements du système de contrôle externe des dépenses publiques ne sont pas nécessairement liés à la qualité ou l’opportunité des rapports d’audit en soi, mais plutôt au contexte institutionnel et au fonctionnement même du système politique. Ainsi, les poursuites judiciaires à la suite des cas supposés de corruption révélés par les rapports d’audit ont été, dans les faits, neutralisés par le système de « majorité automatique » du gouvernement au sein de la Cour suprême instauré par Menem (jusqu’à la destitution des juges de la Cour suprême en 2002-2004) et de l’AGN, dominées par les péronistes entre 1999 et 2002. Deuxièmement, cette affaire a mis en lumière le manque de coordination entre les différents composants du système de contrôle des fonds publics. Ceux-ci adoptent donc, dans le meilleur des cas, une attitude réactive plutôt qu’une approche préventive pour empêcher des malversations ou une attitude pro-active pour améliorer la gestion publique.
L’illusion du contrôle
38L’un des traits caractéristiques du système argentin de contrôle des finances publiques n’est pas le manque de contrôle, mais plutôt l’illusion du contrôle, c’est-à-dire le mirage selon lequel il existerait un contrôle. Cela donne l’impression que « l’administration est effectivement contrôlée et qu’il est possible de la contrôler, alors qu’en réalité ceux qui sont censés exercer ce contrôle ont les mains liées par le système » [29]. D’un point de vue formel, les institutions sont en place, mais elles n’ont aucun effet, car désactivées ou courtcircuitées par les pratiques informelles du jeu politique. Par exemple, la renégociation – tant décriée – du contrat pour la compagnie nationale de transport aérien, Aerolineas Argentinas, en 2000, a été contestée par les quatre institutions de contrôle, mais en vain [30].
39Même si la loi est respectée dans les formes, reflétant le formalisme légal des techniques de contrôle, elle ne l’est pas dans l’esprit.
40Puisque ce processus est en déréliction depuis si longtemps, il importe de se demander pourquoi les décideurs politiques et les politiciens ont maintenu cette illusion de contrôle. On s’aperçoit en effet que les causes profondes des dysfonctions du système ne proviennent pas d’une incompétence technique, mais d’un manque de volonté politique d’utiliser les rapports d’audit pour demander des comptes au gouvernement, aussi bien sur le respect des lois que sur sa performance en matière de deniers publics. Dans l’architecture institutionnelle argentine, les relations entre l’AGN et le parlement, relayées par la Comisión Parlamentaria Mixta Revisadora de Cuentas, sont essentiellement de nature politique, entre, d’un côté, les représentants des partis politiques au Parlement et, de l’autre, des auditeurs généraux nommés sur des bases partisanes. La majorité au pouvoir tend à dominer la commission mixte de contrôle des comptes publics, ce qui ne l’incite guère à exercer un contrôle critique du gouvernement. Au final, l’AGN finit par dépendre hiérarchiquement des mêmes autorités qu’elle est censée contrôler.
41La faiblesse de la commission mixte de contrôle des comptes publics trouve également ses racines dans un cadre plus large d’un parlement aux faibles prérogatives et capacités en matière budgétaire. Au mode de désignation des auditeurs généraux selon leurs affiliations politiques, s’ajoute le taux élevé de rotation au sein de l’AGN, et le faible niveau d’expertise budgétaire des parlementaires qui sont, pour paraphraser M. Jones et al., « des politiciens professionnels, des législateurs amateurs » [31]. Par ailleurs, le taux de réélection des parlementaires argentins est relativement bas. Ceux-ci ont donc des horizons politiques de court terme et sont particulièrement dépendants des structures partisanes, en raison du système électoral fondé sur une représentation proportionnelle par liste fermée et la grande influence de la politique provinciale sur les carrières parlementaires.
42La carrière des parlementaires ne dépend donc pas de leur réputation au parlement, mais davantage de leur capacité à nouer des liens étroits avec la hiérarchie des partis politiques au niveau fédéral mais surtout au niveau provincial. Cela n’incite guère les parlementaires à se spécialiser, s’investir dans les fonctions de contrôle parlementaire ou s’efforcer de renforcer les structures parlementaires de contrôle des fonds publics. E. Abuelafia en tire le bilan suivant : « Le Congrès n’est pas le lieu où l’on mène la politique. Celle-ci est menée dans des arènes plus informelles par le Président, les gouverneurs de province et les groupes d’intérêts. Cependant, les accords qui sont conclus sont éphémères et instables, car il leur manque la force d’application que pourrait fournir un accord politique formel » [32]. Ces dernières années, certains parlementaires ont cependant développé un activisme plus marqué en matière budgétaire et ont proposé de renforcer les institutions de contrôle du budget avec la création d’un bureau parlementaire du budget [33].
43Par conséquent, les règles budgétaires formelles sont souvent contournées par les pratiques politiques informelles. Le parlement entretient lui aussi cette illusion de contrôle. Par exemple, même si la loi de 1992 permet au président de ne modifier le budget au cours de son exécution que dans des cas exceptionnels, les changements de dotations budgétaires au cours de l’année fiscale constituent davantage une règle qu’une exception depuis 1997 [34]. Le parlement n’a pas encore créé la commission parlementaire chargée de contrôler les décrets présidentiels, comme prévu par l’amendement à la Constitution de 1994. En août 2006, le parlement a commis un véritable hara-kiri budgétaire en entérinant la proposition du gouvernement de réforme de la loi-cadre des finances publiques et du contrôle fiscal de 1992. Cette réforme laisse les mains libres au gouvernement pour modifier à volonté les dotations budgétaires au cours de l’exercice fiscal [35]. Cette mesure s’est accompagnée de l’introduction d’une plus grande flexibilité des règles gouvernant l’approbation des décrets présidentiels, qui sont désormais approuvés automatiquement, sauf objection explicite du parlement [36]. Le recours compulsif aux décrets d’urgence pour modifier et gérer le budget a survécu à C. Menem, pour devenir une pratique commune sous Kirchner, au fur et à mesure que s’étendait son hégémonie politique. Selon Global Integrity, cette concentration de pouvoirs s’est construite en « échangeant des faveurs envers certains groupes de pression contre un soutien politique, tout en affaiblissant les contraintes institutionnelles formelles, soit en les méprisant purement et simplement, soit en appliquant les règles de manière biaisée » [37].
44On retrouve cette tendance du gouvernement à vouloir s’exempter des règles formelles de contrôle de l’utilisation des fonds publics dans la multiplication des fonds spéciaux hors-budget de ces dernières années [38]. Par exemple, en juin 2006, l’AGN contesta le bien-fondé de certaines subventions accordées aux compagnies privées de transport en commun. Ces fonds provenaient, non du budget fédéral, mais d’un fonds d’investissement financé par une taxe spéciale sur le pétrole, et par conséquent exemptée de tout contrôle budgétaire externe par l’AGN. Il existe environ vingt fonds spéciaux de ce type, qui administrent près de 20 milliards de dollars par an, soit 4 % du budget [39]. Les mécanismes de contrôle sont également déficients pour les cinq agences régulant les entreprises publiques privatisées [40].
45L’AGN a dénoncé à maintes reprises les risques d’arbitraire et la nature discrétionnaire des transferts fédéraux vers les provinces, surtout pour les fonds destinés à l’aide sociale et les programmes alimentaires. Dans quinze rapports déposés entre 2003 et 2006, l’AGN a averti du risque pour les finances publiques d’un usage de ces fonds à des fins politiques, en l’absence de toute règle claire de dotation ou de registre actualisé des bénéficiaires (comme par exemple dans les province de Corrientes et du Chaco). L’AGN pointe également du doigt le manque de contrôle et d’évaluation des prêts consentis aux provinces par les institutions financières internationales.
46La faiblesse de l’AGN est aussi due à l’absence d’une fonction publique professionnelle et d’un corps d’État spécialisé d’auditeurs publics au sein de l’AGN, ce qui a empêché l’émergence d’un esprit de corps au sein de cet organisme, à l’instar du Brésil ou du Chili [41]. En effet, plus de la moitié du personnel de l’AGN est sous contrat à durée déterminée.
Conclusions et leçons pour les politiques publiques
47On peut tirer de cette étude quatre grandes conclusions en terme de politique publique.
48La première conclusion est que la politique joue un rôle déterminant dans l’efficacité de l’audit externe. Le fait que le contrôle de l’utilisation des fonds publics soit devenu une fiction est avant tout un échec politique. Le travail de l’AGN est inhibé par le « filtrage politique » des conclusions de ses audits [42]. Pour redonner du sens à l’audit externe en Argentine, il est nécessaire de limiter l’ingérence du politique et de protéger l’AGN de toute influence partisane. Cela implique une refonte des procédures de nomination des auditeurs généraux, en particulier du président, et une recherche des candidats indépendants qui jouissent d’un soutien très large dans toute la classe politique [43]. Il faudrait également reconsidérer la nature collégiale de l’AGN, dans la mesure où un collège d’auditeurs généraux convient mieux à des agences d’audit autonomes de type juridictionnel. Surtout, la règle selon laquelle le directeur de cette agence est désigné par l’opposition devrait être revue, afin d’éviter l’enlisement de l’AGN dans de perpétuelles querelles politiciennes [44].
49Deuxième conclusion : pour construire des agences autonomes d’audit efficaces, il est plus important de mobiliser la volonté politique que d’augmenter les capacités techniques. La réforme des organismes de contrôle des finances publiques exige de s’attaquer aux causes sous-jacentes de la mauvaise performance, plutôt que de se concentrer sur les symptômes. Le renforcement des compétences techniques en soi n’améliore pas automatiquement l’efficacité, et n’a pas, dans le passé, prémuni contre les ingérences extérieures. Les audits externes s’inscrivent par nature dans le contexte politique du processus budgétaire et la logique politique des relations entre les pouvoirs exécutif et législatif. En particulier, le suivi des conclusions et des recommandations des rapports d’audit par le Parlement pour exiger des comptes de la part du gouvernement dépend de la configuration et de l’équilibre des pouvoirs. Par ailleurs, le parlement devrait renforcer sa capacité technique en matière de contrôle des finances publiques si l’opposition est suffisamment forte et cohérente. Dans les situations de fusion des pouvoirs, lorsque les majorités législatives et exécutives coïncident, comme c’est le cas en Argentine, les parlements ont moins de motivations pour contrôler l’action du gouvernement et développer leurs compétences en matière de contrôle de la gestion financière du gouvernement, à la fois indirectement au travers de l’assistance que leur apportent les agences d’audit autonomes, et plus directement au travers des commissions parlementaires des finances, du budget et des comptes publics et, parfois, des bureaux parlementaires d’analyse budgétaire.
50Troisième conclusion : les agences d’audit autonomes ne peuvent être réformées ou renforcées de manière isolée. Trop souvent, les réformateurs conçoivent les institutions fiscales de manière isolée, comme si elles étaient autonomes et étanches, négligeant ainsi le contexte institutionnel dans lesquelles elles s’inscrivent et les liens qu’elles entretiennent avec cet environnement. Cette conception réductionniste des processus de réforme institutionnelle tend à en diminuer la portée et à ne pas exploiter les synergies entre les différents composants du système de contrôle fiscal. Pour L. Diamond « la corruption endémique est une maladie du système, ne peut être guérie qu’en s’attaquent au système : une seule institution – une commission anti-corruption, par exemple – sera incapable de résoudre le problème. Un contrôle efficace et durable de la corruption exige le travail de plusieurs institutions de responsabilisation du gouvernement, qui se renforcent mutuellement et dont les domaines d’activité se surimposent » [45]. En négligeant les liens qui lient les différentes organisations de contrôle des fonds publics, les réformateurs souvent peinent à améliorer le système et apporter des changements durables. Il existe donc un important potentiel – inexploré jusque là – d’amélioration de la responsabilisation du gouvernement en matière de gestion des finances publiques.
51Quatrième conclusion : les stratégies de réforme radicale se fondant sur des greffes institutionnelles de modèles exogènes sont vouées à l’échec. Ceci est particulièrement vrai si ces réformes ne prennent pas en compte les conditions intrinsèques et le contexte institutionnel qui détermine leur fonctionnement. Indéniablement, la réforme des organismes de contrôle et l’ajustement des techniques de contrôle sont possibles et même souhaitables. Mais ceux-ci doivent s’inscrire dans la trajectoire historique de la construction de l’État et des systèmes de contrôle. Les processus de réforme peuvent suivre divers chemins, mais le cas argentin démontre que certaines étapes du développement institutionnel ne peuvent être brûlées. Le passage brutal du modèle juridictionnel d’audit externe à celui de structure collégiale en 1992 a échoué dans la mesure où la réforme des institutions formelles ne s’est pas accompagnée ou ne s’est pas assise sur une réforme des pratiques informelles. Les réformes n’ont pas remis en cause les rapports de pouvoir sous-jacents dans lesquels s’inscrit tout système de responsabilisation du gouvernement.
52Des réformes graduelles au sein d’un système déjà existant ont, en règle générale, plus de chances d’aboutir qu’un bouleversement de fond en comble des systèmes de contrôle externe des finances publiques faisant table rase des avancées acquises jusqu’alors. Le défi majeur n’est pas la façon dont on peut changer le système, mais comment améliorer le fonctionnement des institutions existantes.
« Il faut souhaiter qu’un jour les finances de l’Union soit aussi claires et intelligibles qu’un livre de comptes de marchand, afin que chaque membre du Congrès, et que chaque homme de l’Union, quelque soit la force de son esprit, soit capable de les comprendre, afin d’enquêter sur les mauvais usages, et par conséquent de les contrôler » Le Président Thomas Jefferson dans une lettre au Secrétaire du Trésor en 1802.
Notes
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[1]
Traduit de l’anglais par François Bernard.
-
[2]
Les opinions exprimées dans cet article n’engagent que leur auteur.
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[3]
Santiso (C.), Auditing for accountability ? Political economy of government auditing and budget oversight in emerging economies, Johns Hopkins University, doctoral dissertation, 2007; Idem, « Improving Fiscal Governance and Curbing Corruption : How Relevant are Autonomous Audit Agencies », International Public Management Review 7(2), 2006, p. 97-108.
-
[4]
Ces organisations d’État autonomes, dont la mission était de contrôler les finances publiques de manière indépendante seront désignées sous le terme d’agence d’audit autonome afin de souligner leur caractère autonome au sein de l’appareil d’État. L’Organisation internationale des institutions supérieures de contrôle des finances publiques (INTOSAI) les désigne comme des institutions supérieures de contrôle des finances.
-
[5]
Dye (K.) et Stapenhurst (R.), Pillars of Integrity : The Importance of Supreme Audit Institutions in Curbing Corruption, Washington, DC, WBI, 1998.
-
[6]
À savoir « l’existence d’agences d’État légalement fondées et habilitées, disposant de pouvoirs, de la volonté et des moyens de mener des actions allant du contrôle routinier aux sanctions pénales ou à la mise en accusation, dans le cas d’agissements ou d’omissions d’autres agences étatiques pouvant être qualifiés d’illégaux »; O’Donnell (G.), « Horizontal Accountability : The Legal Institutionalization of Mistrust », in S. Mainwaring et C. Welna, Democratic Accountability, Oxford, Oxford University Press, 2003, p. 34-54; O’Donnell (G.), « Horizontal Accountability and New Polyarchies », in A. Schedler et al., eds., The Self-Restraining State, Lynne Rienner, 1999, p. 29-52, p. 38.
-
[7]
Santiso (C.), « Re-forming the State : Governance Institutions and the Credibility of Economic Policy », International Public Management Journal, 7(2), 2004, p. 271-298.
-
[8]
Barra (R.C.), « El papel de los institutos centrales de control en los ordenamientos jurídicos : el modelo argentino », Universidad Austral, Control de la administración pública, Buenos Aires, Ediciones RAP, 2002, p. 289-306.
-
[9]
Kettl (D.F.), « The Global Revolution : Reforming Government-Sector Management », in Bresser Pereira (L.C.) et Spink (P.), eds. Reforming the State : Managerial Public Administration in Latin America, Boulder : Lynne Rienner, 1999, p. 41-74; Przeworski (A.), « On the Design of the State : A Principal-Agent Perspective », in Bresser Pereira (L.C.) et Spink (P.), eds., Reforming the State, op. cit., 1999, p. 15-40.
-
[10]
McCubbins (M.) et Schwartz (T.), « Congressional Oversight Overlooked : Police Patrols versus Fire Alarms », American Journal of Political Science 28(1), 1984, p. 165-179.
-
[11]
Allen (R.) et Tommasi (D.), eds., Managing Public Expenditure, Paris, OECD, 2001; Stapenhurst (R.) et Titsworth (J.), Features and Functions of Supreme Audit Institutions, Washington, DC, World Bank PREM Note 59,2001.
-
[12]
Rodríguez (J.) et Bonvecchi (A.), El papel del poder legislativo en el control presupuestario : La experiencia argentina en perspectiva comparada, Santiago, CEPAL Working Paper 51,2006.
-
[13]
Cette forme institutionnelle résulte d’un amendement à la Constitution de 1994 destiné à renforcer le contrôle externe des activités du gouvernement. Le Pacto de los Olivos de 1993, conclu entre le Parti Péroniste au pouvoir et le Parti Radical accepta la réélection du président voulue par Carlos Menem, en échange d’un plus grand contrôle sur le pouvoir exécutif et une moindre concentration des pouvoirs entre les mains du président. Cet arrangement rappelle celui des démocraties parlementaires de type « Westminster ».
-
[14]
Muruzabal Lerga (J.), « Los órganos de control externo ¿sirven para algo ? », Revista Auditoría Pública 19,1999, p. 6-10.
-
[15]
Makón (M.), El rol del Poder Legislativo ante el Proceso Presupuestario, unpublished mimeo, 1999. Makón (M.), « La reforma del sistema presupuestario nacional », Revista de la ASAP 29,1997, p. 51-64.
-
[16]
González de Rebella (L.C.), El control externo del sector público : la Auditoría General de la Nación, paper presented at CLAD VI International Congress, Buenos Aires, Argentina, 5-9 November, 2001. Les controverses qui ont entouré la désignation de Rodolfo Barra au poste de président de l’AGN entre 1999 et 2002 en sont l’illustration vivante. En 1999, C. Menem, alors dans l’opposition, décida de nommer Barra, ancien ministre de la justice de son gouvernement et ancien juge de la Cour suprême, à la tête de l’AGN. Cette décision fut interprétée comme une tentative de l’ancien président de neutraliser l’AGN, et s’assurer que l’agence n’enquêterait pas sur les allégations de corruption sous son gouvernement (1989-1999), dont R. Barra fit partie. Par exemple, Barra usa de ses pouvoirs discrétionnaires pour rendre public les conclusions d’un rapport d’audit qui impliquaient l’opposition ou tenta d’empêcher la publication de rapports qui compromettaient des alliés politiques.
-
[17]
Tsebelis (G.), Veto Players : How Political Institutions Work, Princeton, Princeton University Press, 2002.
-
[18]
Fadel (M.), « La Auditoría General de la Nación », in L. Despouy et al., El control público en la Argentina, op. cit., 2002, p. 117-124.
-
[19]
Rodríguez (J.) et Bonvecchi (A.), El papel del poder legislativo en el control presupuestario : La experiencia argentina en perspectiva comparada, Santiago, CEPAL Working Paper 51,2006. Rodríguez (J.) et Bonvecchi (A.), El papel del poder legislativo en el proceso presupuestario : la experiencia argentina, Santiago, ECLAC Working Paper 32,2004. Il est important de souligner que les avis ou dictàmenes de l’AGN suivent le processus législatif. Les recommandations de l’AGN sont adressées au CPRMC. Cette commission n’a pas non plus de pouvoir de sanction, et n’a ni l’obligation ni la capacité de porter plainte. Elle peut cependant retarder la publication d’un rapport d’audit, où s’abstenir d’émettre une opinion sur certaines conclusions, ce qui a pour effet d’étouffer le rapport. Le devenir des travaux de l’AGN est par conséquent incertain, ce qui diminue d’autant leur impact.
-
[20]
Banque mondiale, Anti-corruption Diagnostic for Argentina, Washington, DC, World Bank Report N°.20133-AR, 2001.
-
[21]
Petrei (H.), Budget and Control : Reforming the Public Sector in Latin America, Washington, DC, IDB, 1998.
-
[22]
Baglini (R.), « La gestación parlamentaria de la Ley no.24156 », in L. Despouy et al., El control público en la Argentina, op. cit., 2002, p. 27-30.
-
[23]
Morgenstern (S.) et Manzetti (L.), « Legislative Oversight : Interests and Institutions in the United States and Argentina », in S. Mainwaring et C. Welna, eds., Democratic Accountability in Latin America, op. cit., 2003, p. 132-169.
-
[24]
Gutiérrez (R.), « Activos y pasivos de una cultura del presupuesto », in L. Despouy et al., El control público en la Argentina, op. cit., 2002, p. 89-97.
-
[25]
Baglini (R.), « La Cuenta de Inversión », in O. Lamberto, dir., La Cuenta de Inversión, 2005, p. 53-62.
-
[26]
L’étude des comptes publics s’étale sur une période de 16 mois, ce qui dépasse de huit mois la durée recommandée selon les normes internationales. Cependant, même ces délais plus que généreux ne sont pas respectés dans la pratique. Cet examen dure généralement trois à quatre ans, soit pratiquement la durée d’un mandat présidentiel.
-
[27]
Rejtman (M.), « El Tratamiento de la Cuenta de Inversión : Una Obligación Constitucional », in O. Lamberto, dir., La Cuenta de Inversión, op. cit., 2005, p. 63-89.
-
[28]
AGN, Proyecto de informe de auditoria de gestión ambiental, PRODIA, Buenos Aires, AGN, rapport non publié, 1999.
-
[29]
Atchabahian (A.), « Comentarios », Revista ASAP, 29,2002, pp. 153-158, p. 155.
-
[30]
L’AGN, la SIGEN, le bureau anti-corruption du ministère de la justice, et le tribunal administratif national (FNIA).
-
[31]
Jones (M.), Saiegh (S.), Spiller (P.) et Tommasi (M.), Professional Politicians, Amateur Legislators ; The Argentine Congress in the 20th Century, Buenos Aires, CEDI Working Document 45,2000.
-
[32]
Abuelafia (E.), Berensztein (S.), Braun (M.) et Di Grescia (L.), Who Decides on Public Expenditures ? A Political Economy Analysis of the Budget Process : The Case of Argentina, Buenos Aires, CIPPEC, 2005, p. 7.
-
[33]
Braun (M.), Díaz Frers (L.) et Uña (G.), Hay que crear una Oficina de Presupuesto del Congreso, Buenos Aires, CIPPEC, Políticas Públicas Recomendación 26), 2006.
-
[34]
Uña et al., El Congreso y el Presupuesto Nacional : Desempeño y Condicionantes de su Rol en el Proceso Presupuestario, Buenos Aires : Fundación Konrad Adenauer, 2005.
-
[35]
Díaz Frers (L.), El debate sobre los superpoderes, Buenos Aires : CIPPEC Análisis 29,2006.
-
[36]
Santiso (C.), « Gobernabilidad democrática y política económica insular : Paradoja de las reformas de segunda generación en la Argentina de los 1990 », Revista Contribuciones 4/2001,2001, p. 109-136.; Bambaci (J.), Saront (T.) et Tommasi (M.), « The Political Economy of Economic Reforms in Argentina », Journal of Policy Reform 5(2), 2002, p. 75-88.; Carey (J.) et Shugart (M.S.), eds., Executive Decree Authority : Calling out the Tanks or Just Filling out the Forms, Cambridge, Cambridge University Press, 1998.
-
[37]
Op. cit.
-
[38]
Abuelafia et al. Who Decides on Public Expenditures ? Op. cit.
-
[39]
Uña et al., Delegación de facultades del Jefe de Gabinete de Ministros : evolución e impacto en el contexto fiscal actual, op. cit.
-
[40]
Zommer (L.), « Poder impune », La Nación, 12 mars 2007.
-
[41]
Rodríguez (H.), « Comentarios », Revista ASAP 29,2002, p. 159-167.
-
[42]
Ducoté (N.), Sistemas nacionales de integridad : Informe sobre Argentina para Transparency International, Buenos Aires, CIPPEC, 2001.
-
[43]
D’autres mesures plus techniques peuvent contribuer à une amélioration des performances comme, par exemple, le vote à la majorité qualifiée, un recrutement plus sélectif des candidats, l’exigence de qualifications professionnelles, et des audiences publiques pour la sélection des candidats aux postes d’auditeurs généraux. En 2003, le processus de renouvellement des juges de la Cour suprême a adopté un schéma privilégiant la transparence et la compétence.
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[44]
Malheureusement, en avril 2007, la majorité parlementaire a déposé une proposition d’amendement de la loi-cadre d’administration financière de 1992 allant dans le sens contraire. Même si cette proposition de loi introduit d’importantes avancées en matière de techniques de contrôle, elle risquerait, d’entamer davantage l’indépendance politique et l’autonomie fonctionnelle de l’AGN en renforçant sa dépendance vis-à-vis de la majorité parlementaire. Ce projet de réforme a cependant été repoussé jusqu’après les élections générales d’octobre 2007.
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[45]
Diamond (L.), Fostering Institutions to Contain Corruption, Washington, DC, World Bank PREM Note 24,2001, p. 1.