Notes
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[1]
Parmi tous les acteurs engagés dans le projet d’administration électronique et qui ont bien voulu nous aider dans le cadre de nos enquêtes, nous tenons à remercier tout particulièrement Jean-Paul Baquiast, Christian Scherer, Laurent Sorbier, Isabelle Roux-Trescases, Gilles Brégant, Philippe Moutié, Jean Pierre Dardayrol, Bernard Benhamou, Christophe Alviset, Yannick Durantin, Philippe Alviré et Martin Hogart... et tous ceux et celles qui ont bien voulu nous accorder un entretien ou répondre à un questionnaire dans le cadre de nos enquêtes.
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[2]
L’ADAE recensait sur son tableau de bord des sites publics, en avril 2004,7015 sites internet publics toutes administrations confondues. Pour les sites nationaux, elle dénombrait 956 sites. (http :// wwww. adae. gouv. fr/ article. php3 ? id_article= 16)
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[3]
Alcaud (David), Lakel (Amar), Groupe européen d’administration publique, « Reconciling Public Law and the Modernising State », Lisbonne, « E–Government and Modernising State in France », Communication sélectionnée pour publication in Information Polity : the International Journal of Government and Democracy in the Information Age, 2003.
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[4]
Délégation interministérielle à la réforme de l’État, Le développement des sites internet des services de l’État (évaluation au printemps 2000), Paris, DIRE.
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[5]
Délégation interministérielle à la réforme de l’État, Le développement des sites internet des services de l’État (évaluation 2001), Paris, DIRE.
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[6]
Pour une étude déjà publiée, nous renvoyons à une typologie comme celle de Livtak (David), « Une seconde génération de typologies pour mesurer la sophistication des services publiques électroniques », Téléscope, vol. 10, n° 5, novembre 2003, pp. 32-34.
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[7]
Cette étude repose sur une série d’enquêtes qualitatives auprès des responsables TIC des ministères, qui ont été conduites dans le cadre de la finalisation de la thèse de doctorat de Lakel (Amar), Analyse des fondements des politiques publiques des NTIC en France (1995-2004), et poursuivie dans le cadre d’une étude, menée par les auteurs, basée plus spécifiquement sur les catégories d’élaboration de la modernisation de l’État par les NTIC, présenté à la Conférence annuelle du GEAP (Voir : Alcaud (David), Lakel (Amar), Groupe européen d’administration publique, « Reconciling Public Law and the Modernising State », op. cit.).
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[8]
Alcaud (David), Lakel (Amar), « Premier Congrès de l’Association française de Sociologie », atelier : « Les recompositions de l’espace politique démocratique dans la société contemporaine » : « E–gouvernement et recomposition de l’espace public démocratique : théories et pratiques du pouvoir dans le processus contemporain de réforme de l’État », Villetaneuse, du 24 au 28 février 2004.
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[9]
La première circulaire incitant les ministères à être présents sur internet date de 1996 (circulaire n° 4.361/SG du 15 mai 1996 relative à la communication, à l’information et à la documentation des services de l’État sur les nouveaux réseaux de télécommunications).
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[10]
L’enjeu de la première partie de notre recherche vise ainsi à établir les bases d’un tableau de bord afin de dégager les traits saillant du « visage » de l’administration électronique du côté de l’usager. Nous menons parallèlement une série d’enquêtes qualitatives et semi-directives afin de mieux saisir les problématiques de développement des projets « administration électronique » (Voir Alcaud (David), Lakel (Amar), Groupe européen d’administration publique, « Reconciling Public Law and the Modernising State », op. cit.)
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[11]
Par exemple : « À l’été 1995, lorsque pour la première fois un gouvernement français a voulu prendre position sur le développement du réseau, la construction d’un discours politique et la définition d’une action publique dans le domaine de l’internet rencontraient un évident problème de légitimité », Sorbier (Laurent), « La construction de l’action publique dans le domaine de l’internet en France : un témoignage personnel », Les cahiers du numérique, vol. 3-2,2002, pp. 213-237.
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[12]
La norme internationale utilisée pour l’Echange de données informatisé (EDI) est la norme UN/EDIFACT, maintenue et coordonnée par le Centre pour la facilitation des procédures et pratiques dans l’administration, le commerce et les transports (CEFACT). La norme EDIFACT est utilisée de façon prédominante dans le monde entier. Aux États-Unis, elle est désormais préconisée pour les échanges avec l’administration. En France, une circulaire du Premier Ministre demande aux administrations de baser leurs échanges sur cette norme.
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[13]
Circulaire n° 4361/SG du 15 mai 1996 relative à la communication, à l’information et à la documentation des services de l’État sur les nouveaux réseaux de télécommunications.
-
[14]
L’Assemblée nationale, à la demande du Premier ministre, délègue au député Patrice Martin-Lalande une mission qui aboutira au rapport : Internet, un vrai défipour la France, Collection des rapports officiels, Paris : La Documentation française, 1998. Parallèlement les sénateurs Alain Joyandet, Pierre Herrisson et Alex Türk, présentent leurs conclusions de leur mission dans L’entrée dans la société de l’information, Rapport de la mission commune d’information sur l’entrée dans la société de l’information, septembre 1997. Comme le montre le rapport contemporain du sénateur René Trégouët, Des pyramides du pouvoir aux réseaux de savoirs, le temps est à « l’évangélisation » de la classe politique et à la mise en agenda de l’internet comme priorité nationale.
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[15]
Baquiast (Jean-Paul), « Les administrations et internet en 2001 », in Cahiers de la Fonction Publique, octobre 2001, n° 205, p. 3-6.
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[16]
Jospin (Lionel), « Préparer l’entrée de la France dans la société de l’information », Discours à l’Université de la Communication, Hourtin, lundi 25 août 1997.
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[17]
PAGSI, 1998.
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[18]
Le projet Gallica de la Bibliothèque Nationale de France, la bibliothèque des rapports publics, mais surtout le portail wwww. service-public. fr.
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[19]
« Il appartient à chaque ministre de prendre en charge les procédures qui relèvent de son département et d’élaborer les conditions, dans les conditions prévues par l’art. 1er du décret du 2 décembre 1998, d’un programme annuel de simplification des formalités et des procédures administratives, qui s’inscrira dans le cadre plus large de programmes pluriannuels de modernisation de son administration » (PAGSI, 1998).
-
[20]
Présenté au colloque « e-administration, e-gouvernement : au service de la société de demain » organisé par l’Institut de la gestion publique et du développement économique, le 10 décembre 2001.
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[21]
Le rapport « Hyper-République » (La Coste (Pierre de), L’Hyper-République : bâtir l’administration en réseau autour du citoyen, Paris, Ministère de la fonction publique, de la réforme de l’État et de l’aménagement du territoire, 2003) du gouvernement Raffarin, s’inscrit dans la continuité d’une réflexion menée depuis le rapport Carnenac au sein des ministères.
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[22]
ADELE (ADministration ÉLEctronique 2004/2007) mobilise de 1,8 milliards d’euros pour mettre la France au niveau de ses voisins européens dans l’énorme effort d’informatisation des administrations.
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[23]
« 3939. Allo, service public », le service unique de changement d’adresse, le service personnalisé mon.service-public.fr, la carte de vie quotidienne (CVQ), la dématérialisation de l’état civil, la carte nationale d’identité électronique (CNIE).
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[24]
« D’ici 2005, l’ensemble des services publics sera devenu des téléservices publics », Sapin (Michel), « La deuxième étape de l’administration électronique commence à Hourtin », Hourtin, Université d’été de la Communication, 21 août 2001.
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[25]
À cette fin, les co-marquages entre des sites de collectivités territoriales et wwwww. service-public. fr seront mis en ligne dès septembre 2001.
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[26]
Ancienne mission interministérielle de soutien technique pour le développement des technologies de l’information et de la communication dans l’administration, remplacée par l’ADAE.
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[27]
Voir supra.
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[28]
Un nom de domaine peut rassembler par ailleurs plusieurs adresses de sites web en sous-arborescence.
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[29]
Le site du ministère de la justice à reçu, au mois de janvier 1999,26 965 visiteurs ; ils étaient, en mai 2001,114 103 visiteurs (+ 423 %) et 306 491 au mois de décembre 2003 (soit, par rapport à mai 2001, + 268 %).
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[30]
Nous établissons ici une distinction entre, d’une part, le citoyen qui souhaite s’informer sur le ministère, la conduite des politiques publiques et la transparence des administrations afin de rendre effectif son droit démocratique de contrôle juridique et politique et, d’autre part, l’usager qui souhaite utiliser les services publics en ligne dans le cadre du « contrat » social attribuant respectivement aux parties des droits et des devoirs. Nous rejoignons ici la position de Pierre de La Coste, exprimée dans son rapport au Premier ministre et rappelée récemment au séminaire international « De l’administration au gouvernement électronique : États et citoyens à l’heure des réseaux numériques » du 24 mai 2004, organisé par le COMMINT, qui vise à voir dans le projet d’administration électronique, tout autant un projet de saine gestion publique qu’une avancée pour la réalisation des pouvoirs démocratiques du citoyen. Mais il nous faut toutefois prendre de la distance avec la tendance du New Management Public qui vise à réduire le citoyen à la pleine satisfaction de l’« usagerconsommateur ». (Voir Massit-Follea (Françoise), « De la régulation à la gouvernance de l’internet. Quel rôle pour les usagers-citoyens ? », Les cahiers du numérique, n° 2,2002, pages 239 à 263; Gingras (Anne-Marie), « La e-gouvernance aux États-Unis », in Jean Mouchon (dir.), Mutations de la démocratie : des textes fondateurs à l’émergence des nouvelles pratiques, Paris, Éd. des Riaux, parution prévue fin 2004).
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[31]
Il nous faut toutefois souligner le véritable effort du ministère des affaires étrangères.
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[32]
Notamment, circulaire n° 4385/SG du 11 juillet 1996 relative aux modalités pratiques de mise en œuvre des instructions sur la communication, l’information et la documentation des services de l’État sur les nouveaux réseaux de télécommunications ; la circulaire n° 4455/SG du 29 janvier 1997 relative aux conditions de fonctionnement des sites internet des ministères ; la circulaire n° 4597/SG du 9 avril 1998 relative à la création de sites internet par les services déconcentrés des administrations de l’État et les établissements ou organismes placés sous tutelle de l’État; circulaire du 7 octobre 1999 relative aux sites internet des services et des établissements publics de l’État; circulaire du 23 mai 2001 relative au choix des formats pour la réalisation de documents constitués de données numériques ; circulaire du 4 décembre 2002 relative à la mise en œuvre de la deuxième version du cadre commun d’interopérabilité des systèmes d’information publics.
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[33]
wwwww. ville. gouv. fr,wwww. logement. gouv. fr,wwwww. innovations-service-public. gouv. fr, wwwww. ecoresponsabilite. environnement. gouv. fr,wwww. effet-de-serre. gouv. fr,wwwww. internet. gouv. fr,etc.
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[34]
Le site wwwww. minefi. gouv. frse dote ainsi de wwwww. entreprises. minefi. gouv. fret de wwwww. colloc. minefi. gouv. frOn pourrait également classer dans cette catégorie wwwww. eduscol. education. fr,wwww. handicap. gouv. fr,wwwww. enviedagir. fr,etc., qui visent tous un public spécifique. Le ministère de la culture, qui fait sans aucun doute partie des sites les plus dynamiques, distingue, par exemple le site de l’expatriation (usages), wwww. mfe. org, du site du Conseil supérieur des Français de l’étranger (usagers), wwww. csfe. org. Ces sites visent en réalité à restreindre la variable cible pour pouvoir continuer à offrir un site global qui est à la fois institutionnel et portail.
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[35]
wwww. vie-associative. gouv. fr
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[36]
On voit régulièrement apparaître sur internet d’anciennes bases de données issues du plan télématique au gré du « relookage » de la façade (l’interface web) de l’application client-serveur. La base PACTE de conservation des traités internationaux du ministère des affaires étrangères (((www. doc. diplomatie. gouv. fr/ pacte),le site du service des nouvelles des marchés (((www. snm. agriculture. gouv. fr),Télémaque, site sur les concours administratifs et techniques du ministère de l’agriculture (((www. concours. agriculture. gouv. fr)sont des applications connues des professionnels, heureux de trouver une interface plus conviviale.
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[37]
Le ministère de l’intérieur propose, par exemple, de fournir, à partir de la plaque d’immatriculation du véhicule, le « certificat de situation administrative » (communément appelé « certificat de non-gage ») et non pas comme le label « Téléc@ rtegrise »tendrait à le faire penser, à obtenir ou renouveler sa carte grise). On peut sur le même modèle demander son extrait de casier judiciaire (bulletin n° 3) ou toute autre attestation d’un évènement (naissance, mariage, décès, divorce, reconnaissance...) survenu à l’étranger sur le site du service central d’état civil (SCEC) du ministère des affaires étrangères : ((https :// wwww. smae. diplomatie. gouv. fr/ Etatcivil).
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[38]
La syndication, comme souvent en matière de TIC, est tout autant un principe organisationnel que technologique. Il s’agit dans la logique de mise en réseau des acteurs et des informations, de permettre à un site internet de mettre à disposition, pour une communauté d’acteurs, les données qu’il produit et administre sans se soucier des conditions d’interopérabilité.
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[39]
S’agissant de la diffusion des données publiques, le ministère de la culture réorganise ses ressources autour d’un pôle TIC chargé de réorganiser l’ensemble des effectifs autour de la direction de l’information et de la communication. L’émergence de véritables directions projets au sein du Minefi(Copernic, Hélios, etc.) est un moteur puissant de réorganisation des services autour des nouveaux systèmes d’information informatisés.
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[40]
Alter (Norbert), L’innovation ordinaire, Paris, PUF, 2003; Flichy (Patrice), L’innovation technique : récents développements en sciences sociales, vers une nouvelle théorie de l’innovation, Paris, La Découverte, 2003.
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[41]
Baquiast (Jean-Paul), L’impact des nouvelles technologies de l’information et de la communication sur la modernisation de l’administration, op. cit.; internet et les administrations, la grande mutation, op. cit., Carcenac (Thierry), Pour une administration électronique citoyenne : contributions au débat, op. cit., La Coste (Pierre de), L’Hyper-République : bâtir l’administration en réseau autour du citoyen, op. cit.
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[42]
Maisl (Herbert), Le droit des données publiques, Paris, LGDJ, 1996; « Le citoyen “internaute”, entre liberté d’accès aux documents administratifs et protection des données personnelles », in RFAP, n° 81, janv.-mars 1997.
1Les services de l’État en ligne sont accessibles sur près de 1 000 sites nationaux [2]. L’objectif prioritaire de l’administration, continûment réaffirmé, est d’offrir, d’une part, un meilleur service à l’usager et, d’autre part, une meilleure information au citoyen. Ce discours de modernisation a caractérisé la montée en puissance des discours légitimant l’e-administration en France depuis 1997 et l’avènement du Programme d’action gouvernementale pour la société de l’information (PAGSI) [3]. Le principe d’une évaluation annuelle des sites internet de l’État a été affirmé par la circulaire du Premier ministre du 7 octobre 1999, qui en confie la responsabilité à la Délégation interministérielle à la réforme de l’État (DIRE). Avec la structuration d’une politique de développement de l’administration électronique, la DIRE avait mis en place un tableau de bord de suivi des projets au sein des administrations d’État. Deux rapports annuels sur les sites de l’État (2000 [4], 2001 [5] ) ont été établis s’appuyant sur des critères qualité communément admis dans le développement des sites internet, préservant la grille d’analyse d’une année sur l’autre.
2Notre enquête souhaite profiter des quatre années de recul pour offrir un nouveau « portrait » des sites ministériels de l’État. Comme tout portrait, cette représentation est le fruit de la rencontre entre une méthode d’analyse rigoureuse et l’appréciation des auteurs, qui ne peuvent réduire à néant la part de leur subjectivité. Ainsi, entre l’objectivation quantitative d’une grille d’analyse instituée et l’exploration subjective des usagers (certes expérimentés), il s’agit de retranscrire l’expérience des sites ministériels en France tels qu’ils s’offrent aux citoyens aujourd’hui [6].
3En effet, si les études précédentes, profitant de l’émergence des offres publiques sur internet, avaient pu constituer un large panel, s’étendant des sites du gouvernement aux services déconcentrés et locaux, en passant par les offres ministérielles, les établissements publics et les sites des politiques interministérielles, le nombre de sites étudiés ne s’élevait alors qu’à environ 160. Aujourd’hui, ce nombre a été multiplié par plus de cinq. Dans le cadre d’une étude quantitative en cours sur les sites publics d’État [7], nous n’avons voulu retenir, pour la cohérence de nos conclusions, qu’un échantillon réduit à l’offre ministérielle. Cette coupe apporte en effet de nombreux avantages car il existe une certaine hétérogénéité de « niveaux » entre les sites du gouvernement (qui visent avant tout à présenter la politique à l’échelle nationale), les sites des administrations déconcentrées (très hétérogènes et cherchant avant tout à assurer une information et un service de proximité) et les sites ministériels/interministériels lesquels jouissent d’une pérennité et d’une capacité qui en font l’objet d’étude privilégié de l’administration électronique.
4Dans le cadre de cet article, nous souhaitons insister en particulier sur la genèse du « modèle français » de gestion de l’information publique. Sans revenir ici sur l’ensemble du processus d’institutionnalisation d’une politique publique nationale des NTIC [8], nous voudrions montrer ce qui détermine, en partie, à la fois la mise en place de la « société de l’information » et les contraintes qui grèvent son établissement. À partir d’une enquête empirique sur les sites internet publics, « résultats » de huit ans de politique d’incitation à la présence des administrations sur le web [9], et d’entretiens auprès des responsables projets, nous voulons proposer une « coupe » dans la démarche de mutation de l’administration électronique, partie prenante de la « République numérique ».
5Nous avons établi une grille d’évaluation reposant sur 35 critères qualité répartis en cinq domaines correspondant aux cinq axes prioritaires développés par les politiques publiques : la mise à disposition des données publiques, la facilitation de l’accès aux données, la mise en place de téléprocédures, le développement d’une culture mettant l’usager au cœur des échanges et enfin l’objectif consistant à rendre l’administration communicante (voir l’annexe). Notre synthèse nous a amenés à construire des variables, agrégées sur la base de moyennes pondérées. Nous avons cherché à dégager la répartition des investissements entre l’ensemble des critères qualité, tout en les comparant à ces moyennes forcément agrégatives. Nous avons pu ainsi constituer l’identité de chaque site pour en déduire à la fois une typologie et approcher la figure du site interministériel moyen. Nous avons, dans un second temps, cherché à observer la répartition de cet échantillon, en prenant comme point de référence les ministères de tutelle. Parallèlement, nous avons envoyé un questionnaire aux responsables des sites, par le biais des moyens disponibles sur leurs propres sites [10]. Cette méthode nous a permis non seulement de pouvoir évaluer le temps de réponse à un problème (en matière d’accusé de réception puis de réception effective) mais aussi d’obtenir de leur part une auto-évaluation sur la qualité de leur site ministériel public.
6Notre analyse reposera donc à la fois sur la mise en perspective des caractéristiques de l’engagement de l’État et sur le dévoilement du véritable « visage » de ce qui est actuellement présenté comme la « seconde phase » de l’administration électronique. Cette démarche nous permettra en effet de saisir autrement la nature du processus à l’œuvre et d’évaluer les usages, recherchés et possibles, des sites ministériels.
L’INNOVATION ADMINISTRATIVE : L’INTERNET AU SERVICE DE LA MODERNISATION DE L’ÉTAT
7L’ensemble des témoignages associe à l’été 1995 l’émergence de la question de l’internet en France [11]. En 1995, l’internet était surtout une affaire d’infrastructures, de déploiement de nouveaux réseaux, une affaire de « tuyaux ». Pourtant « l’administration communicante », nom du rapport de la Commission pour la simplification des formalités (COSIFORM) daté d’octobre 1996, montre très tôt une prise en compte de l’internet dans les projets d’administration électronique. Mais pour l’heure, c’est la norme EDIFACT [12], qui semble au cœur de la réflexion. Toutefois, l’Institut international d’administration publique (IIAP) et l’École nationale d’administration publique du Québec organisent des rencontres à Québec les 20 février et 1er mars 1996, sur le thème de « la modernisation de l’administration publique et l’utilisation des technologies de l’information : pratiques françaises et pratiques québécoises ». L’attention est portée sur la question de savoir en quoi le web nécessite la refondation de la réflexion menée jusque-là par la prise en compte de l’usager dans l’échange électronique.
Soutenir l’économie numérique par l’offre d’information publique : priorité au « back office »
8À partir de la circulaire du 16 septembre 1996, relative aux schémas directeurs ministériels, les systèmes d’information et de télécommunications devaient viser à « l’amélioration de la qualité et de l’efficacité du service public, ainsi que la simplification des relations avec les usagers ». Alain Juppé, alors Premier ministre, prescrit à chaque administration d’être présente sur internet avant le 1er décembre 1997 [13] puis donne en janvier 1997 des instructions pour faciliter les téléprocédures entre les administrations et les entreprises. La « société de l’information » est alors un débat de premier plan au niveau européen, auquel contribuent plusieurs experts français [14]. Le Programme d’action gouvernemental pour la société de l’information (PAGSI) apparaît comme l’élément déclencheur d’une politique nationale : « Entre 1995 et 1997, l’administration découvrait internet avec beaucoup de réticences. Puis avec le PAGSI, le cadre consacré aux services publics a changé l’état d’esprit » [15]. Lionel Jospin reprend les préconisations européennes d’un engagement de l’État comme locomotive de l’innovation largement adoptée par le gouvernement précédent. « Un engagement affirmé et soutenu du gouvernement est nécessaire » [16]. L’État doit donc s’investir pour combler le retard français.
9« L’amélioration des relations entre l’administration et le citoyen devient un souci constant du gouvernement » [17]. Dans un premier temps, c’est une politique de l’offre, semblable à celle engagée par le ministère de la culture, qui sert de base au programme d’incitation. L’internet public semble permettre la transparence administrative à un moindre coût. Les NTIC sont avant tout pensées comme une « numérisation de l’information » qui accélère « l’informatisation des modes de production et d’échange » et offre à la France « la croissance de la part immatérielle de la richesse produite » qu’elle attend pour soutenir son économie. Ce projet connaîtra très tôt de remarquables réussites [18]. Un plan de numérisation par ministère, appuyé par la Documentation française, doit permettre d’offrir en ligne des ressources stratégiques à forte valeur ajoutée aux acteurs économiques. Une mobilisation des données publiques essentielles exige un plan de recensement et de diffusion de ressources gratuites pour rendre l’internet plus attractif.
La ré-ingénierie des processus administratifs au service d’une meilleure efficacité
10En matière de téléprocédures, les ministères ont l’initiative des simplifications administratives relevant de leur département [19]. En 2001, Thierry Carcenac dresse le bilan du PAGSI et parle d’une « formidable réussite » : « plus des deux tiers des formulaires de toutes les administrations françaises sont numérisés et téléchargeables ». Cependant, la même année, Jean Paul Baquiast constate que « tous ces projets se heurtent à de nombreuses résistances internes ne donnant que sur des ouvertures partielles, souvent en cours de développement ». Leurs analyses montrent une administration qui paraît avoir dans son ensemble fait le « gros dos » à l’arrivée des NTIC. Celles-ci semblent avoir été largement acceptées comme nouvel outil de communication et de présentation (« sites vitrines ») à condition qu’elles ne remettent pas en cause les habitudes de travail, les statuts et la culture administrative de chacun. Les administrations seraient, somme toute, encore dans ce que l’on appelle aujourd’hui la première période de la politique publique de l’administration électronique. Elles disposent pourtant depuis longtemps de systèmes informatiques qui ont permis des gains de productivité et d’efficacité importants, notamment par l’automatisation des actes de gestion interne. Si c’est au niveau des ministères que les programmes de modernisation de l’État se sont toujours transformés en projets opérationnels, il s’agissait jusque-là pour l’essentiel d’une informatique de production dans un espace clos et contrôlé.
11En août 2001, le discours à Hourtin du ministre de la réforme de l’État, Michel Sapin, annonce une nouvelle étape. Dans le même temps, Laurent Fabius nommé ministre de l’économie, des finances et de l’industrie en 2000, après un conflit social très dur lié à la réforme de ce dernier, engage une nouvelle stratégie de changement : les NTIC se retrouvent au cœur d’une nouvelle configuration qui aboutira au projet « E-Ministère » [20]. Au sein même du projet, sont associées une réforme organisationnelle, un développement technologique et une transformation culturelle. Pour la première fois dans la construction de la politique des NTIC, un ministre français affirme comme prioritaire cette synthèse entre innovation technologique, conduite du changement et éthique démocratique.
12L’alternance politique se caractérise en la matière par une grande continuité [21]. Il est proposé d’engager un plan d’action sur cinq ans dans le cadre de la nouvelle Agence pour l’administration électronique (ADAE). Il faut toutefois attendre le projet ADELE pour voir renaître un véritable programme pour l’administration électronique au niveau gouvernemental [22]. Il s’agit d’un « PAGSI II » qui est cette fois, entièrement, consacré à l’administration électronique et dont les objectifs sont, dans un premier temps entièrement recentrés sur le principe d’efficacité et de productivité. Les technologies de l’information et de la communication sont invoquées comme un levier puissant d’une transformation de l’organisation publique, suggérant un modèle nouveau d’administration publique.
La mise en réseau de l’administration au service de la simplification administrative
13Une des spécificités de ce programme est de redonner, au niveau le plus haut de l’État, la priorité au citoyen qui en est la cible privilégiée [23]. Si le PAGSI avait voulu très tôt favoriser les échanges en développant une interactivité nouvelle, le programme se limitait à la généralisation du courrier électronique principalement intra-administrations. La politique de points d’accueil permettant l’accès, par un public très large, aux services internet des serveurs d’information proposés par l’administration restait embryonnaire. L’idée même d’accès individualisés pour les intermédiaires du service public était avancée mais connaissait un développement dépendant des volontés locales. Quand Michel Sapin reprend le projet d’administration électronique, trois ans plus tard, l’idée d’un service personnalisé qui s’adapte à chaque citoyen (mon.service-public.fr) est le point ultime d’une réflexion sur la modernisation des administrations qui s’appuie sur les téléservices [24]. Le portail placé sous la direction du Service à l’information du gouvernement lancera parallèlement le programme de mutualisation et de normalisation des données publiques dit de co-marquage, « afin de faciliter l’accès personnalisé aux informations et aux services [25]. Dans la même logique de normalisation des critères techniques et logiques, est reprise la proposition du rapport Carcenac pour promouvoir le cadre commun d’interopérabilité des systèmes d’information. Une longue réflexion souterraine s’enclenche au sein des services tels que l’ATICA [26] puis de l’ADAE, de la Documentation française, du Service d’information du gouvernement pour concevoir le projet d’une interface unique personnalisée : « mon.service-public.fr ».
14Mais ce sont les objectifs de réforme de l’administration tels qu’ils sont définis dans le projet ADELE qui seront clairement orientés vers la satisfaction de l’usager. L’objectif est la mise en place d’un « front off?ce » unique pour l’utilisateur, accessible par tous les moyens qu’il sera nécessaire de mettre à sa disposition pour rendre nul le coût de transaction. Le multi-accès a pour but de supprimer les nécessités d’apprentissage et d’adaptation des usagers, ce qui représente une mutation culturelle de près de sept ans. Dans le même temps, le portail personnalisé fait entrer une nouvelle incertitude dans les missions des directeurs administratifs et des responsables projets. C’est sur la base de cette incertitude que la relation citoyenne peut connaître aujourd’hui un certain rééquilibrage.
ÉVALUER LES SITES D’ÉTAT
15L’analyse des deux rapports de la DIRE [27] reposait sur un ensemble d’appréciations subjectives, prenant le parti de l’usager, et restant extérieures aux données connues des concepteurs du site. Il s’agissait d’une analyse qualitative, fondée sur l’appréciation d’experts et non sur un panel « moyen » d’internautes. Les critères retenus proposaient une lecture de ce que devrait être un « bon » site public, en passant en revue un ensemble d’indicateurs de qualité. Posant les jalons d’une véritable démarche qualité au sein de l’internet public français, l’étude identifiait un certain nombre de points factuels de « non-qualité », appelant une vigilance constante de la part des pilotes nationaux de l’internet public, au niveau des sites nationaux et des « têtes de réseaux » de différents ministères : non fonctionnement des moteurs de recherche, non réponse aux courriels, liens morts, actualités obsolètes ou impasses de navigation et d’ergonomie. En 2000, la DIRE, à travers la première étude, posait la question : « l’usager va-t-il trouver sur ce site l’information, le service, l’orientation qu’il cherche ? ». Leur réponse était assez laudative, soulignant que « bon nombre des caractéristiques des sites publics français sont réellement originales », que les sites publics français ont été bien notés dans le cadre de comparaisons internationales. Ils soulignaient également que les sites publics présentent : « un avantage qualitatif décisif : la crédibilité des données publiées. L’accès direct aux sources officielles n’est pas seulement une exigence de transparence démocratique : c’est aussi une demande de repères dans un océan d’informations de moins en moins certaines. Cette crédibilité est renforcée par l’appellation « gouv.fr », marque du caractère officiel des sites, ou par la notoriété des organismes ».
16Quel est le « visage » de l’internet public ministériel français en 2004 ?
Premiers résultats d’enquête : la maturation technique de l’offre de l’internet public
17La première caractéristique qu’il nous a été donné de constater au cours de nos recherches est l’extraordinaire explosion de l’offre publique sur internet. L’offre et la demande ont quintuplé en quatre ans. Entre septembre 1999 et juin 2004, l’AFNIC a enregistré une croissance des noms de domaines en « fr » de + 521 % (passant de 47 602 noms de domaines enregistrés à 248 041) [28]. Dans le même temps, la demande en services publics a connu une croissance vertigineuse [29]. Sur cette même période, le site portail de l’administration électronique, « service-public.fr », a connu une croissance semblable (+ 318 % entre mai 2001 et décembre 2003). Ainsi, force est de constater que l’effort massif des administrations à rattraper leur retard sur internet a rencontré un franc succès auprès des administrés. Pourtant si la croissance des sites reste soutenue, on observe un « plateau » qui semble augurer d’un changement dans le rythme de croissance.
18Force est de constater l’actuelle disparité de réalisation des projets lancés au cours de ce qui est communément appelé la « première phase » de l’administration électronique. L’évolution quantitative des catégories de sites est à ce titre pertinente. Si en 2001, l’étude de la DIRE relevait que 80 % des sites avaient une dimension institutionnelle, alors que 14 % seulement proposaient un portail et 22 % s’organisaient selon des thématiques, nous avons pu constater une stabilisation des premiers (à 80 %) et une explosion des seconds à hauteur de 64 % pour les portails, et 60 % pour les thématiques couplées au phénomène d’individuation déjà souligné. Les sites événementiels, qui n’étaient que 6 % en 2001 et les sites transactionnels (1,2 %) apparaissent comme les nouveaux entrants dans cette population, avec respectivement 33 % et 30 %. On peut constater que, sur la période 2001-2004, les sites, qui s’étaient jusque-là contentés d’investir dans la mise en place d’une vitrine promotionnelle sur internet, se sont engagés, pour les deux tiers d’entre eux, à apporter un véritable service d’information et de conseil au public, ainsi qu’un accès étendu aux données de l’État. Si les sites événementiels sont contemporains de la naissance du web public en France, leur développement dans le paysage électronique aux côtés des sites transactionnels rend tangible les projets de « seconde génération » des sites internet de l’État. L’analyse semble ainsi nettement souligner l’entrée dans une seconde phase dans laquelle les administrations les plus performantes s’engagent dans un véritable service public en ligne.
19Nous avons pu constater le recul significatif des sites impersonnels. En 2000, à peine 20 % des sites publics visaient une cible identifiable. Notre étude révélait que plus de 70 % des sites s’adressaient plus ou moins clairement à une ou plusieurs cibles. Le citoyen, l’usager [30] et le professionnel sont concernés par plus d’un tiers des sites. La presse est la seconde cible clairement identifiée. Si l’on exclut les sites promotionnels qui s’adressent à tous, 15 % des sites réservent une place équivalente à une conférence de presse continue aux fins de favoriser les échanges avec les médias traditionnels. La présence de cet espace peut être interprétée comme un signe d’avancée en matière de gestion de l’information. En effet, réserver un espace circonscrit à la communication politique évite de saturer le reste des informations pratiques et améliore la visibilité des données publiques. Les agents de l’État et les élus des collectivités territoriales ne représentent que 10 % des cibles visibles. Ce public est par sa nature plus concerné par les intranets et les extranets portés par les systèmes d’informations ministériels et interministériels en LAN (Local Area Network) ou en WAN (Wide Area Network). Mais il faut souligner que les étrangers (européens ou non européens) susceptibles d’entretenir des échanges avec l’administration française ne sont des cibles que dans 7 % des cas. Derrière les apparences de multilinguisme, seuls quelques sites, parmi les plus avancés, ont réservé un espace en langue anglaise ou espagnole. Ces espaces introductifs sont en général très faiblement convaincants dans leur rôle de service à l’usager [31].
20Pour conclure sur cette approche globale des sites internet ministériels, il nous faut souligner la quasi-disparition des défauts de jeunesse constatés par les rapports 2000 et 2001. Il ne reste que très peu de sites purement promotionnels se contentant de vanter tel ou tel membre du gouvernement, tel ou tel corps administratif ou encore la superbe architecture des locaux. La qualité technique est indiscutable sur la très grande majorité des sites avec l’usage de technologies dynamiques côté serveur. La présence de liens morts, de moteurs de recherche défaillants, ou de pages d’informations obsolètes a atteint un niveau quasiment irréductible en matière d’informatique. Enfin, réaffirmé par de nombreuses circulaires gouvernementales [32], l’usage des standards du web communément acceptés et diffusés est devenu la règle pour tous. Nous avons été surpris par l’usage d’un système de « sécurisation propriétaire » dans le cadre de la téléprocédure « téléc@ rtegrise » qui oblige à télécharger un logiciel propriétaire obscur, s’installant en écran de fond, sans interface interactive (et donc sans information et acceptation progressive pour l’usager) et sans possibilité de le désinstaller. Cette intrusion irrémédiable dans l’ordinateur de l’usager par le ministère de l’intérieur, sans offrir la moindre transparence, ne peut qu’inquiéter inutilement une part des usagers encore peu familiers avec les outils du web.
L’entrée dans l’administration électronique de la « seconde génération »
21L’approche qualitative a révélé une nette diversification de l’offre publique sur internet. Il est convenu de distinguer les sites internet institutionnels, les portails, thématiques ou à types d’usagers spécifiques, les sites événementiels et enfin transactionnels.
22Les sites institutionnels sont sans aucun doute les sites élémentaires de l’offre publique. Sites de présentation et parfois de promotion d’une institution publique, ils se limitaient au début à une « plaquette » en ligne manifestant les talents marketing des directions de la communication des ministères avant de devenir progressivement des outils d’information des citoyens et des usagers. Pour ceux qui surent limiter leurs tendances « narcissiques », qui rencontraient difficilement un public intéressé, ils devinrent une source d’information riche et complète avant de connaître ces deux dernières années les limites dues à leur « âge ». Ainsi, depuis 2000, on a vu ces sites se scinder en deux entités, l’une se recentrant sur la fonction de représentation institutionnelle, et l’autre, qualifiée de « site portail » à l’aide d’un nom de domaine globalisant, fédérant les données publiques autour d’une plate-forme commune et rassemblant un annuaire qualifié et commenté de liens web. Ainsi education.gouv.fr se dédouble pour faire émerger education.fr, culture.gouv.fr en culture.fr, etc.
23C’est une autre logique qui a vu se multiplier les sites thématiques ou à catégories d’usagers (qu’il est d’ailleurs parfois difficile de distinguer, ex. drogues.gouv.fr). Devant la multiplication des politiques publiques et des agences interministérielles autour d’un objet ou d’une catégorie d’usagers spécifiques, des sites se sont développés autour d’un thème particulier. Parfois ceux-ci sont associés à une politique publique instituée sous la tutelle d’un ministère ou d’une mission interministérielle [33], et parfois ils se justifient par la présence de publics/usages particuliers pour légitimer leur existence autonome [34].
24Certains de ces sites peuvent avoir une vie limitée, liée à l’attention des gouvernements. Ainsi la pérennité de ces sites connaît un destin lié à la mise sur agenda médiatique; c’est particulièrement le cas pour des sites événementiels dont l’existence est précaire par essence. Le site sur le « bug de l’an 2000 » n’est plus que dans les mémoires des internautes, le site sur l’Euro est une maison/musée où l’on peut relire le discours du 18 février 2002 de M. Laurent Fabius, ministre de l’économie, des finances et de l’industrie d’alors. Parfois l’on croise un site fantôme [35].
25Une dernière catégorie de sites a vu le jour avec l’émergence des téléprocédures sur internet. Les sites transactionnels visent à offrir un véritable service en ligne. Internet doit bouleverser le rapport entre l’administration et l’usager, nous a-t-on annoncé depuis plus de 10 ans. Cette révolution reposerait sur le développement des autoroutes de l’information et l’interconnexion des réseaux sous protocole IP. L’analyse des sites de l’État nous a amenés à nuancer cette vision.
26D’une part, le travail du Secrétariat général du gouvernement qui pilote, avec la Documentation française et la direction des Journaux officiels, le projet du portail service-public.fr, appuyé par le Comité interministériel des renseignements administratifs (CIRA), la Délégation aux usagers et aux simplifications administratives (DUSA) et la très récente Agence pour le développement de l’administration électronique (ADAE) pilotent les grands projets Journal-officiel.gouv.fr, ladocumentationfrancaise.fr et legifrance.gouv.fr qui forment un bouquet d’offres de publications en ligne, exploitant toute la capacité d’internet pour diffuser des informations numériques. Véritable portail de l’information d’État, ces sites sont un modèle d’innovation pour l’offre documentaire en ligne à l’ère du numérique. D’autre part, on a vu une offre qui s’est appuyée sur les fruits d’une migration réussie de l’offre télématique, qui s’était développée à la fin des années quatre-vingt [36].
27Pourtant force est de constater qu’à ce jour, les téléprocédures ne sont qu’un projet inabouti de l’administration électronique, qui peine à se réaliser dans des mesures concrètes vis-à-vis des usagers. Quelques exemples phares se sont développés en priorité à partir des deux piliers de la puissance régalienne que sont la force publique et la levée de l’impôt, au risque de réduire l’« État cybernétique » à un « État Cash Machine ». L’analyse des téléprocédures, présentées par le portail service-public.fr, en réduit de fait fortement la portée.
28Les premiers pas d’une téléprocédure consistent à obtenir par internet des certificats administratifs. Il s’agit ici de l’adaptation web des services que fournissait jusqu’alors le minitel [37]. Il s’agit en fait de procédures qui font reposer leurs contrôles sur les fichiers d’état civil, qui identifient le requérant par son adresse postale, à laquelle est adressé le document qui ne peut être dans ce cas que papier. La procédure est simple et ancienne. On relève que ce type de procédure ne s’est pas généralisé à l’ensemble des attestations délivrées par les services de l’État au cours de ces dix dernières années.
29Le second service, appuyé par les promoteurs de l’administration électronique, consistait à assurer la transparence des processus administratifs, qu’ils soient initiés en ligne ou pas. La connaissance des étapes des processus, le suivi de son dossier en temps réel avec la possibilité de correspondre avec le responsable auraient permis d’éviter « l’effet tunnel » si néfaste à l’image de marque de l’administration. En réalité, très peu d’administrations ont initié ce projet et le « suivi de l’élaboration de la carte d’identité », proposé par le ministère de l’intérieur, semble se résumer à des « alertes » de mise à disposition de la carte à la sortie du « tunnel ». Le système de paiement électronique aux administrations est quant à lui plus avancé. Il y a, bien sûr, le paiement des amendes, livré avec le nouveau système de contrôle automatisé de la sécurité routière, mais il y a surtout le système de télé-déclaration fiscale.
30Fruit de l’ambitieux programme Copernic, qui regroupe plus de 70 projets, et qui mobilisera, à son terme, près de 1,5 milliards d’euros (sur dix ans), les téléprocédures du ministère des finances se veulent un laboratoire de la future administration électronique. Vitrine émergeante, qui masque en réalité un immense chantier de réingénierie organisationnelle et des systèmes d’information de la direction générale de la comptabilité publique (DGCP) et de la direction générale des impôts (DGI), « http ://impot.gouv.fr » est sans aucun doute le meilleur exemple de site transactionnel à ce jour. Il vise non seulement les particuliers mais aussi les professionnels et les collectivités locales. Dans le cadre de notre évaluation, il a obtenu de très loin la meilleure évaluation (qui n’est toutefois pas la note maximale) et représente, sur de nombreux points, le prototype (et donc l’unique modèle) de l’administration en ligne de demain. Veille et actualité pertinente au service de l’usager sans aucun but autopromotionnel, organisation de l’information en plusieurs niveaux, croissant en complexité, guichet intelligent de contacts et de correspondance électronique permettant immédiatement de trouver l’interlocuteur pertinent avec ses coordonnées complètes, liste des questions les plus fréquentes, assistée d’un filtre ergonomique, transparence des activités de la DGI et de la DGCP, simulation, effectuation, paiement en ligne, consultation du dossier personnel complet, assistant de vos droits (non-intelligent toutefois), font de la fiscalité française un modèle salué au niveau européen pour son innovation dans la gestion publique.
Une offre de données publiques généreuse ... mais des sites sans véritable écoute
31Le site ministériel type est encore prioritairement un site institutionnel qui vise à mieux faire connaître les services administratifs de l’État. À ce titre, en faisant chuter les coûts de publication et surtout de diffusion des données, internet a joué un rôle qualitatif unique. Que ce soit pour l’explication du fonctionnement des institutions, la mise en ligne de l’immense littérature grise produite par les services d’analyse de l’État et l’interconnexion de la masse de ces données par l’hypertexte, l’offre en ligne a permis d’accéder à une excellente information avec toute la facilité de la navigation web. Ces données sont gratuites dans 50 % des cas. Reposant sur l’activité de l’équipe de webmestres, le site internet ministériel remplit largement son rôle de nouveau vecteur électronique de la communication administrative.
32L’accès aux données publiques, ressources que possédaient presque exclusivement les agents et qu’il était jusque-là très coûteux d’obtenir (que ce soit en temps ou en argent), a connu une nette démocratisation. Une série de données, jusque-là réservée aux experts, s’affiche aujourd’hui en permanence sur l’écran de la cyber-adminsitration. Actualité et agenda permettent de se tenir au courant en permanence de l’activité des administrations. Ces informations ponctuelles sont recoupées avec la mise en ligne des comptes-rendus annuels d’activité. La transparence administrative a nettement progressé avec le web. Non seulement la totalité des lois et règlements sont accessibles en ligne, mais les administrations n’hésitent plus à rappeler les textes qui commandent leur activité. La plupart des administrations font œuvre de pédagogie en matière de procédures administratives, très souvent communiquées en un langage clair et accessible. De plus les arbres et annuaires d’accès, les plans complets offrent des entrées multiples largement usitées sur les sites publics, qui permettent de s’adapter à la diversité cognitive des usagers. Il faut toutefois regretter la quasi-absence des thésaurus et index, qui viendraient compléter les portes d’accès à l’information et permettraient de renvoyer l’ensemble des acronymes à un lien explicatif.
33Mais ce tableau synthétique doit être nuancé par l’analyse de la répartition des sites, qui met en évidence un différentiel qualitatif notable. Si, en ce qui concerne l’autopromotion institutionnelle, la quasi-totalité des sites mobilise d’excellentes qualités techniques internes ou externes, l’accès aux ressources publiques, quant à lui, se diffuse lentement. Après cinq ans de politique volontariste, nos graphiques montrent une répartition équivalente des sites sur les quatre niveaux de notation. En somme, l’engagement en faveur de l’accessibilité des données publiques, dans une totale transparence, est désormais pleinement réalisé par la moitié des sites, l’autre moitié se limitant à une information sommaire ou à une absence claire d’informations. Ce constat est confirmé par la lente diffusion de certaines propriétés des sites, devenues aujourd’hui les éléments de base de la moindre offre de service en ligne. Nous parlons ici des moteurs de recherche et du téléchargement de formulaires en ligne. La maturité technique des systèmes d’indexation automatique de contenu appuyés sur des moteurs de recherche intelligents à un prix modique, eu égard aux sommes engagées d’une part, et à l’énorme travail de syndication [38] de contenu et de co-marquage des formulaires en ligne par la DUSA et le portail service-public.fr d’autre part, rendent l’argument du prix ou de la complexité technique inopérant. Cette explication, à l’aune des réussites brillantes observables dans une majorité des cas, nous amène à mettre en doute la volonté d’engagement et la sensibilisation globale des agents administratifs bien au-delà du cercle des directions de la communication et des responsables de la modernisation. En effet, l’indexation des contenus, même automatisés, demande un engagement de chaque agent émetteur dans le « workflow » instauré par la gestion électronique d’un document (GED). En outre, la syndication exige un décloisonnement des administrations et une intégration à la politique interministérielle, pilotée par la DUSA et l’ADAE, sous la tutelle du ministère de la réforme de l’État.
34Trois aspects marquent l’étendue du chantier de l’administration électronique, que peu de ministères ont lancé à ce jour. Le bilan peut être surprenant mais l’analyse des sites ministériels a révélé que 75 à 80 % des sites étudiés ne proposent pas de téléprocédures disponibles. Nous avons recherché l’accès à des formulaires en ligne ou préformatés, usant du traitement automatisé pour assister l’usager, des systèmes de simulation et d’aide dans les échanges administratifs, la possibilité du suivi des dossiers en ligne et en temps réel ou encore, l’automatisation partielle et totale des procédures administratives... en somme, tout ce que l’on retrouve offert en un bouquet de services cohérent sur le site impot.gouv.fr. Il nous faut constater que moins de 20 % des sites offrent au moins l’un de ces services, et aucun ne propose un ensemble cohérent sur le modèle du site susmentionné. En appuyant 180 projets d’administration électronique dans le cadre du projet ADELE, le Premier ministre, Jean-Pierre Raffarin, relance un chantier soutenu depuis près de cinq ans, mais qui n’a donné naissance qu’à moins d’une dizaine de solutions, dont seules deux ou trois peuvent être qualifiées de réussites.
35Le second axe prioritaire, qui vise à transformer la culture administrative en plaçant l’usager au cœur du service public n’a, à ce jour, que très peu d’impact sur les sites internet. En effet, si cette préoccupation recoupe l’innovation technique dans l’ergonomisation dynamique des sites et l’établissement de profils des usagers, très peu de sites s’adaptent à l’usager, préférant lui proposer l’organisation de l’information telle qu’elle est disponible dans l’administration à l’usage des fonctionnaires. Le passage de relais à l’administré, dans la gestion des données publiques, ne pourra pas faire l’économie d’une réorganisation de l’accès aux savoirs administratifs. La mise en place de FAQ (Frequently Asked Questions) adaptatives et dynamiques, rassemblant non pas les questions préformatées du pédagogue, mais les questions effectivement les plus posées, des raccourcis dynamiques qui mettent en avant les accès aux espaces les plus demandés par les internautes, une organisation du site selon les catégories d’usagers opérant des filtres successifs dès la page d’accueil, la gestion totale d’un compte personnel mémorisant le profil de l’usager afin de mieux favoriser la mise à disposition des services et des informations selon une logique « push », voilà ce qui rythme le quotidien de l’internaute mis au cœur de la prestation de services marchands. Aujourd’hui, le commerce électronique a fait preuve d’une innovation sans précédent, habituant les internautes à une qualité de service inédite : non seulement le service privé, mais aussi les administrations les plus innovantes, creusent l’écart et rendent les différences de traitement difficilement compréhensibles par l’usager. Notre étude sur le panel retenu a donc révélé la profonde hétérogénéité de l’échantillon étudié. Cette hétérogénéité, déjà soulignée dans les études précédentes, semble s’être aggravée.
36Enfin, notre étude nous a permis d’observer que le progrès technique était loin d’être une histoire linéaire et cumulative car force est de constater la régression généralisée, voire l’abandon des moyens de communication électroniques. En ce qui concerne la gestion des contacts mails, moins de 7 % des sites ont un système de gestion dynamique des contacts permettant l’accès aux coordonnées complètes des personnes adéquates et 20 % ont mis en place un annuaire sommaire de mails. Le second tiers propose une adresse générique ou un formulaire élémentaire et le dernier tiers n’a mis aucun contact, voire même pour certains sites, affirme ne pas vouloir correspondre par courrier électronique. Nous avons testé les forums, qui ne sont présents que dans 25 % des cas, avec un usage rencontrant plus ou moins de fortune. Les sondages et livres d’or, communs sur le moindre des sites privés, ne sont présents que sur 10 % des sites étudiés sans que l’on connaisse clairement le destin des réponses enregistrées ou du moins sans en avoir aucune publicité.
37De nouveaux usages sont toutefois possibles. Le « chat » (interieur.gouv.fr, colloc. minefi.gouv.fr) permet une communication en ligne avec des responsables administratifs chargés de rencontrer les usagers et de donner une image moins austère des agents de l’État en mission. La communication comprend également l’accès à des extranets professionnels, apportant un bouquet de services aux usagers, qu’ils soient des collectivités locales (colloc.minefi.gouv.fr et le projet « Hélios ») ou des professionnels (entreprises.minefi.gouv.fr). C’est aussi la syndication de contenu, qui dépasse la simple offre institutionnelle pour former des canaux d’information ascendants et descendants, pour s’étendre aux services des prestataires professionnels (projet du portail culture.fr « seconde génération »). Si les innovations technologiques n’ont aucune existence sans une actualisation par des usages sociaux, les opportunités offertes entraînent des inégalités qui aujourd’hui donnent une vision très hétérogène de l’internet ministériel en France.
38Il faut donc constater l’inégalité croissante entre les différents ministères du gouvernement. Les ministères les plus innovants, nous pensons en particulier aux ministères « régaliens » comme le ministère des finances et le ministère de l’intérieur, et ceux qui s’étaient engagés très tôt dans l’aventure du Web (ministère de la culture), connaissent une professionnalisation de leurs directions qui se réorganisent en véritable « task forces » de compétences, que ce soit pour la publication en ligne ou la réingénierie des procédures par les TIC [39]. Comme le dépouillement des questionnaires et les entretiens l’ont clairement montré, l’engagement d’une part d’acteurs à la frontière entre administration privée et organisation publique et, d’autre part, l’engagement de plus en plus affirmé des responsables des directions auprès de leurs collègues les plus réformateurs, témoignent clairement d’une prise de conscience au sein de ces ministères de l’émergence du système d’information informatisé ouvert sur l’usager. Les sociologues de l’innovation [40] y reconnaîtraient l’amorce d’une seconde étape de la diffusion d’une innovation. Par cette acquisition de compétences et par cette « industrialisation » de la production, les sites des ministères que l’on peut classer en tête semblent connaître des résultats, certes aujourd’hui encore ponctuels, mais de très haut niveau en terme de « valeur ajoutée » de service public. La qualité technique des sites, que l’on pourrait qualifier de « modèles de l’administration électronique », n’a rien à envier aux sites de commerce électronique. En revanche, de nombreux ministères ne semblent pas avoir dépassé la commande d’un site vitrine « représentant » la politique ministérielle. Une inégalité dans la qualité des sites révèle aujourd’hui non seulement une différence dans les capacités et les ressources des ministères mais aussi un profond retard de certaines administrations, dans la prise en compte des NTIC comme modalité nouvelle des rapports entre données publiques et usagers.
39Notre enquête a souligné la prégnance d’une temporalité spécifique au processus de diffusion de l’innovation. Si plusieurs rapports [41] ont joué un rôle crucial dans la construction ambitieuse d’une « hyper-République », force est de constater que le programme est loin d’être réalisé : toutes les administrations, même celles qui ont déjà terminé la première phase d’intégration de l’innovation technique et organisationnelle, traitent les TIC comme des objets de médiatisation spécifique sous la responsabilité d’un service ou d’une direction spécialisée. Rien n’exclut encore une interprétation purement instrumentale faisant des systèmes ouverts intranet-internet-extranet, de simples outils ajoutés au dispositif de communication, absorbant la possibilité de changement sans véritable transformation du rapport entre agent et usager dans les échanges d’information.
40Il ressort des entretiens que certains responsables TIC craignent de devenir un sous-service de la direction de la communication, du service informatique ou de la direction des ressources humaines. Tout porte à croire que ce ne sont pas les TIC qui ont transformé la culture administrative mais bien cette dernière qui a réussi à les traduire dans ses catégories d’action. Professionnalisation du service et cloisonnement des tâches et des responsabilités, conservation de l’expertise dans des projets de plus en plus complexes, réduction à l’échelle ministérielle des responsables projets, faible travail en réseau ouvert à l’échelon interministériel, l’histoire des TIC pourrait peut-être ressembler à celle de l’informatisation des administrations dans les années quatre-vingt, à la suite du rapport Nora-Minc.
41La réforme vient d’en haut et c’est peut être dans cette hiérarchie préservée que l’on peut trouver aussi un début d’interprétation de la difficulté de mettre l’usager au cœur des processus de changement. Certes, la démocratisation et la massification de l’usage du courrier électronique semblent, d’après les témoignages unanimes de nos interlocuteurs, avoir profondément transformé les circuits internes de communication. Les projets de workflow, assistés d’une gestion électronique de documents, initiés à titre d’exemple par l’équipe responsable du portail « Mininfo au service des entreprises » ou par la direction de l’information et de la communication du ministère de la culture, insistent sur l’intégration de tous les agents producteurs d’information aux systèmes de publication en ligne des données publiques. Sans aucun doute, c’est par la possibilité réelle d’une communication, décloisonnée par des systèmes d’information globaux, que les agents souhaitant participer à l’échange d’informations, pourront réellement être invités à expérimenter la communication électronique. Le temps des sites vitrines ou portails, fruits d’une équipe spécialisée dans la communication en ligne, correspond sans aucun doute au passage nécessaire de l’acquisition des compétences et des ressources humaines et techniques. Ceux qui ont terminé cette acquisition semblent prêts à s’engager dans l’élaboration de véritables circuits de communication ouverts. La syndication de contenu, la démocratisation de la publication par des systèmes de gestion électronique de documents (comme ZOPE dans le logiciel libre), la mise en place de téléprocédures totalement intégrées (de 4ème génération) sont aujourd’hui sur l’agenda des plus novateurs. Mais ces projets n’engagent plus seulement des « techniciens » au service d’une hiérarchie. C’est autour d’une nouvelle culture commune où il est question de processus, de systèmes et de pilotages évaluatifs que ces projets pourront avoir du sens : « c’est par la construction du sens, souligne Norbert Alter, qu’une invention technique devient une innovation sociale ». Mais cette innovation maintient ouverte la possibilité de l’expérimentation administrative. La question de la protection des données personnelles [42] pèse sans aucun doute sur certains développements potentiels. Au même titre que la nécessité de gérer les acteurs privés, qui offrent des services à valeur ajoutée et qui se sentent de plus en plus concurrencés dans les faits par l’offre gratuite de données publiques mises en ligne dans le cadre du service public, les mobilisations non négligeables qu’ils suscitent orienteraient-elles peut-être déjà en partie l’évolution des services potentiels offerts par les sites publics nouvelle génération ?
Notes
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[1]
Parmi tous les acteurs engagés dans le projet d’administration électronique et qui ont bien voulu nous aider dans le cadre de nos enquêtes, nous tenons à remercier tout particulièrement Jean-Paul Baquiast, Christian Scherer, Laurent Sorbier, Isabelle Roux-Trescases, Gilles Brégant, Philippe Moutié, Jean Pierre Dardayrol, Bernard Benhamou, Christophe Alviset, Yannick Durantin, Philippe Alviré et Martin Hogart... et tous ceux et celles qui ont bien voulu nous accorder un entretien ou répondre à un questionnaire dans le cadre de nos enquêtes.
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[2]
L’ADAE recensait sur son tableau de bord des sites publics, en avril 2004,7015 sites internet publics toutes administrations confondues. Pour les sites nationaux, elle dénombrait 956 sites. (http :// wwww. adae. gouv. fr/ article. php3 ? id_article= 16)
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[3]
Alcaud (David), Lakel (Amar), Groupe européen d’administration publique, « Reconciling Public Law and the Modernising State », Lisbonne, « E–Government and Modernising State in France », Communication sélectionnée pour publication in Information Polity : the International Journal of Government and Democracy in the Information Age, 2003.
-
[4]
Délégation interministérielle à la réforme de l’État, Le développement des sites internet des services de l’État (évaluation au printemps 2000), Paris, DIRE.
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[5]
Délégation interministérielle à la réforme de l’État, Le développement des sites internet des services de l’État (évaluation 2001), Paris, DIRE.
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[6]
Pour une étude déjà publiée, nous renvoyons à une typologie comme celle de Livtak (David), « Une seconde génération de typologies pour mesurer la sophistication des services publiques électroniques », Téléscope, vol. 10, n° 5, novembre 2003, pp. 32-34.
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[7]
Cette étude repose sur une série d’enquêtes qualitatives auprès des responsables TIC des ministères, qui ont été conduites dans le cadre de la finalisation de la thèse de doctorat de Lakel (Amar), Analyse des fondements des politiques publiques des NTIC en France (1995-2004), et poursuivie dans le cadre d’une étude, menée par les auteurs, basée plus spécifiquement sur les catégories d’élaboration de la modernisation de l’État par les NTIC, présenté à la Conférence annuelle du GEAP (Voir : Alcaud (David), Lakel (Amar), Groupe européen d’administration publique, « Reconciling Public Law and the Modernising State », op. cit.).
-
[8]
Alcaud (David), Lakel (Amar), « Premier Congrès de l’Association française de Sociologie », atelier : « Les recompositions de l’espace politique démocratique dans la société contemporaine » : « E–gouvernement et recomposition de l’espace public démocratique : théories et pratiques du pouvoir dans le processus contemporain de réforme de l’État », Villetaneuse, du 24 au 28 février 2004.
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[9]
La première circulaire incitant les ministères à être présents sur internet date de 1996 (circulaire n° 4.361/SG du 15 mai 1996 relative à la communication, à l’information et à la documentation des services de l’État sur les nouveaux réseaux de télécommunications).
-
[10]
L’enjeu de la première partie de notre recherche vise ainsi à établir les bases d’un tableau de bord afin de dégager les traits saillant du « visage » de l’administration électronique du côté de l’usager. Nous menons parallèlement une série d’enquêtes qualitatives et semi-directives afin de mieux saisir les problématiques de développement des projets « administration électronique » (Voir Alcaud (David), Lakel (Amar), Groupe européen d’administration publique, « Reconciling Public Law and the Modernising State », op. cit.)
-
[11]
Par exemple : « À l’été 1995, lorsque pour la première fois un gouvernement français a voulu prendre position sur le développement du réseau, la construction d’un discours politique et la définition d’une action publique dans le domaine de l’internet rencontraient un évident problème de légitimité », Sorbier (Laurent), « La construction de l’action publique dans le domaine de l’internet en France : un témoignage personnel », Les cahiers du numérique, vol. 3-2,2002, pp. 213-237.
-
[12]
La norme internationale utilisée pour l’Echange de données informatisé (EDI) est la norme UN/EDIFACT, maintenue et coordonnée par le Centre pour la facilitation des procédures et pratiques dans l’administration, le commerce et les transports (CEFACT). La norme EDIFACT est utilisée de façon prédominante dans le monde entier. Aux États-Unis, elle est désormais préconisée pour les échanges avec l’administration. En France, une circulaire du Premier Ministre demande aux administrations de baser leurs échanges sur cette norme.
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[13]
Circulaire n° 4361/SG du 15 mai 1996 relative à la communication, à l’information et à la documentation des services de l’État sur les nouveaux réseaux de télécommunications.
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[14]
L’Assemblée nationale, à la demande du Premier ministre, délègue au député Patrice Martin-Lalande une mission qui aboutira au rapport : Internet, un vrai défipour la France, Collection des rapports officiels, Paris : La Documentation française, 1998. Parallèlement les sénateurs Alain Joyandet, Pierre Herrisson et Alex Türk, présentent leurs conclusions de leur mission dans L’entrée dans la société de l’information, Rapport de la mission commune d’information sur l’entrée dans la société de l’information, septembre 1997. Comme le montre le rapport contemporain du sénateur René Trégouët, Des pyramides du pouvoir aux réseaux de savoirs, le temps est à « l’évangélisation » de la classe politique et à la mise en agenda de l’internet comme priorité nationale.
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[15]
Baquiast (Jean-Paul), « Les administrations et internet en 2001 », in Cahiers de la Fonction Publique, octobre 2001, n° 205, p. 3-6.
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[16]
Jospin (Lionel), « Préparer l’entrée de la France dans la société de l’information », Discours à l’Université de la Communication, Hourtin, lundi 25 août 1997.
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[17]
PAGSI, 1998.
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[18]
Le projet Gallica de la Bibliothèque Nationale de France, la bibliothèque des rapports publics, mais surtout le portail wwww. service-public. fr.
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[19]
« Il appartient à chaque ministre de prendre en charge les procédures qui relèvent de son département et d’élaborer les conditions, dans les conditions prévues par l’art. 1er du décret du 2 décembre 1998, d’un programme annuel de simplification des formalités et des procédures administratives, qui s’inscrira dans le cadre plus large de programmes pluriannuels de modernisation de son administration » (PAGSI, 1998).
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[20]
Présenté au colloque « e-administration, e-gouvernement : au service de la société de demain » organisé par l’Institut de la gestion publique et du développement économique, le 10 décembre 2001.
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[21]
Le rapport « Hyper-République » (La Coste (Pierre de), L’Hyper-République : bâtir l’administration en réseau autour du citoyen, Paris, Ministère de la fonction publique, de la réforme de l’État et de l’aménagement du territoire, 2003) du gouvernement Raffarin, s’inscrit dans la continuité d’une réflexion menée depuis le rapport Carnenac au sein des ministères.
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[22]
ADELE (ADministration ÉLEctronique 2004/2007) mobilise de 1,8 milliards d’euros pour mettre la France au niveau de ses voisins européens dans l’énorme effort d’informatisation des administrations.
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[23]
« 3939. Allo, service public », le service unique de changement d’adresse, le service personnalisé mon.service-public.fr, la carte de vie quotidienne (CVQ), la dématérialisation de l’état civil, la carte nationale d’identité électronique (CNIE).
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[24]
« D’ici 2005, l’ensemble des services publics sera devenu des téléservices publics », Sapin (Michel), « La deuxième étape de l’administration électronique commence à Hourtin », Hourtin, Université d’été de la Communication, 21 août 2001.
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[25]
À cette fin, les co-marquages entre des sites de collectivités territoriales et wwwww. service-public. fr seront mis en ligne dès septembre 2001.
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[26]
Ancienne mission interministérielle de soutien technique pour le développement des technologies de l’information et de la communication dans l’administration, remplacée par l’ADAE.
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[27]
Voir supra.
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[28]
Un nom de domaine peut rassembler par ailleurs plusieurs adresses de sites web en sous-arborescence.
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[29]
Le site du ministère de la justice à reçu, au mois de janvier 1999,26 965 visiteurs ; ils étaient, en mai 2001,114 103 visiteurs (+ 423 %) et 306 491 au mois de décembre 2003 (soit, par rapport à mai 2001, + 268 %).
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[30]
Nous établissons ici une distinction entre, d’une part, le citoyen qui souhaite s’informer sur le ministère, la conduite des politiques publiques et la transparence des administrations afin de rendre effectif son droit démocratique de contrôle juridique et politique et, d’autre part, l’usager qui souhaite utiliser les services publics en ligne dans le cadre du « contrat » social attribuant respectivement aux parties des droits et des devoirs. Nous rejoignons ici la position de Pierre de La Coste, exprimée dans son rapport au Premier ministre et rappelée récemment au séminaire international « De l’administration au gouvernement électronique : États et citoyens à l’heure des réseaux numériques » du 24 mai 2004, organisé par le COMMINT, qui vise à voir dans le projet d’administration électronique, tout autant un projet de saine gestion publique qu’une avancée pour la réalisation des pouvoirs démocratiques du citoyen. Mais il nous faut toutefois prendre de la distance avec la tendance du New Management Public qui vise à réduire le citoyen à la pleine satisfaction de l’« usagerconsommateur ». (Voir Massit-Follea (Françoise), « De la régulation à la gouvernance de l’internet. Quel rôle pour les usagers-citoyens ? », Les cahiers du numérique, n° 2,2002, pages 239 à 263; Gingras (Anne-Marie), « La e-gouvernance aux États-Unis », in Jean Mouchon (dir.), Mutations de la démocratie : des textes fondateurs à l’émergence des nouvelles pratiques, Paris, Éd. des Riaux, parution prévue fin 2004).
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[31]
Il nous faut toutefois souligner le véritable effort du ministère des affaires étrangères.
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[32]
Notamment, circulaire n° 4385/SG du 11 juillet 1996 relative aux modalités pratiques de mise en œuvre des instructions sur la communication, l’information et la documentation des services de l’État sur les nouveaux réseaux de télécommunications ; la circulaire n° 4455/SG du 29 janvier 1997 relative aux conditions de fonctionnement des sites internet des ministères ; la circulaire n° 4597/SG du 9 avril 1998 relative à la création de sites internet par les services déconcentrés des administrations de l’État et les établissements ou organismes placés sous tutelle de l’État; circulaire du 7 octobre 1999 relative aux sites internet des services et des établissements publics de l’État; circulaire du 23 mai 2001 relative au choix des formats pour la réalisation de documents constitués de données numériques ; circulaire du 4 décembre 2002 relative à la mise en œuvre de la deuxième version du cadre commun d’interopérabilité des systèmes d’information publics.
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[33]
wwwww. ville. gouv. fr,wwww. logement. gouv. fr,wwwww. innovations-service-public. gouv. fr, wwwww. ecoresponsabilite. environnement. gouv. fr,wwww. effet-de-serre. gouv. fr,wwwww. internet. gouv. fr,etc.
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[34]
Le site wwwww. minefi. gouv. frse dote ainsi de wwwww. entreprises. minefi. gouv. fret de wwwww. colloc. minefi. gouv. frOn pourrait également classer dans cette catégorie wwwww. eduscol. education. fr,wwww. handicap. gouv. fr,wwwww. enviedagir. fr,etc., qui visent tous un public spécifique. Le ministère de la culture, qui fait sans aucun doute partie des sites les plus dynamiques, distingue, par exemple le site de l’expatriation (usages), wwww. mfe. org, du site du Conseil supérieur des Français de l’étranger (usagers), wwww. csfe. org. Ces sites visent en réalité à restreindre la variable cible pour pouvoir continuer à offrir un site global qui est à la fois institutionnel et portail.
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[35]
wwww. vie-associative. gouv. fr
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[36]
On voit régulièrement apparaître sur internet d’anciennes bases de données issues du plan télématique au gré du « relookage » de la façade (l’interface web) de l’application client-serveur. La base PACTE de conservation des traités internationaux du ministère des affaires étrangères (((www. doc. diplomatie. gouv. fr/ pacte),le site du service des nouvelles des marchés (((www. snm. agriculture. gouv. fr),Télémaque, site sur les concours administratifs et techniques du ministère de l’agriculture (((www. concours. agriculture. gouv. fr)sont des applications connues des professionnels, heureux de trouver une interface plus conviviale.
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[37]
Le ministère de l’intérieur propose, par exemple, de fournir, à partir de la plaque d’immatriculation du véhicule, le « certificat de situation administrative » (communément appelé « certificat de non-gage ») et non pas comme le label « Téléc@ rtegrise »tendrait à le faire penser, à obtenir ou renouveler sa carte grise). On peut sur le même modèle demander son extrait de casier judiciaire (bulletin n° 3) ou toute autre attestation d’un évènement (naissance, mariage, décès, divorce, reconnaissance...) survenu à l’étranger sur le site du service central d’état civil (SCEC) du ministère des affaires étrangères : ((https :// wwww. smae. diplomatie. gouv. fr/ Etatcivil).
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[38]
La syndication, comme souvent en matière de TIC, est tout autant un principe organisationnel que technologique. Il s’agit dans la logique de mise en réseau des acteurs et des informations, de permettre à un site internet de mettre à disposition, pour une communauté d’acteurs, les données qu’il produit et administre sans se soucier des conditions d’interopérabilité.
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[39]
S’agissant de la diffusion des données publiques, le ministère de la culture réorganise ses ressources autour d’un pôle TIC chargé de réorganiser l’ensemble des effectifs autour de la direction de l’information et de la communication. L’émergence de véritables directions projets au sein du Minefi(Copernic, Hélios, etc.) est un moteur puissant de réorganisation des services autour des nouveaux systèmes d’information informatisés.
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[40]
Alter (Norbert), L’innovation ordinaire, Paris, PUF, 2003; Flichy (Patrice), L’innovation technique : récents développements en sciences sociales, vers une nouvelle théorie de l’innovation, Paris, La Découverte, 2003.
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[41]
Baquiast (Jean-Paul), L’impact des nouvelles technologies de l’information et de la communication sur la modernisation de l’administration, op. cit.; internet et les administrations, la grande mutation, op. cit., Carcenac (Thierry), Pour une administration électronique citoyenne : contributions au débat, op. cit., La Coste (Pierre de), L’Hyper-République : bâtir l’administration en réseau autour du citoyen, op. cit.
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[42]
Maisl (Herbert), Le droit des données publiques, Paris, LGDJ, 1996; « Le citoyen “internaute”, entre liberté d’accès aux documents administratifs et protection des données personnelles », in RFAP, n° 81, janv.-mars 1997.