Couverture de RESG_127

Article de revue

La connaissance des coûts des établissements d’enseignement supérieur et de recherche français : retour d’une expérience de management public de projet

Pages 215 à 240

Notes

  • [1]
    Lorsque cet article a été écrit, Claude Jameux était conseiller de site et d’établissements auprès de la Direction générale de l’enseignement supérieur et de la recherche – Mission Expertise et Conseil.
  • [2]
    Universités : Blaise Pascal Clermont-Ferrand 2, Angers, Vincennes Saint-Denis, Paris-Diderot, Pierre et Marie Curie, Paris-Est-Créteil, Bordeaux Montaigne, Savoie Mont Blanc, Rennes 1, Claude Bernard Lyon 1, Orléans, Aix-Marseille, Rouen, Strasbourg, La Rochelle ; université de technologie de Troyes, INP Grenoble, INSA Rouen, INSA Rennes ; IUT : Bordeaux, Cergy-Pontoise ; organismes de recherche : CIRAD, INSERM.
  • [3]
    À titre d’illustration l’appui à la formation regroupe : l’insertion, l’orientation, la scolarité, les relations internationales (partie formation), les technologies de l’information et de la communication pour l’enseignement (TICE), la conception et la fabrication de ressources numériques (massive open online course MOOC), l’enseignement à distance (EAD), les observatoires de la vie étudiantes (OVE), les conseillers pédagogiques, l’accompagnement de la validation des acquis de l’expérience (VAE), les services de formation continue et alternance, l’ingénierie pédagogique et la production audiovisuelle.
  • [4]
    Calculé sur la base d’un salaire annuel chargé de 100 k€ (incluant les charges employeurs) répartis entre 50% pour la formation et 50% pour la recherche, et de 192 heures statutaires : 100 k€* 50% / 192 = 260,41 €.
  • [5]
    Les établissements signent avec le ministère en charge de l’ESR un contrat de site et d’établissements portant sur la stratégie pour les cinq années à venir.
  • [6]
    Universités d’Aix Marseille (AMU), d’Angers, de Bordeaux 3, de Montpellier 3 et de Rouen Normandie.

1La Direction générale de l’enseignement supérieur et de l’insertion professionnelle (DGESIP) du ministère en charge de l’enseignement supérieur et de la recherche a décidé de lancer début 2013 un projet « connaissance des coûts des activités des établissements d’enseignement supérieur et de recherche » (ESR), en concertation avec la conférence des présidents d’université (CPU) et la conférence des directeurs des écoles françaises d’ingénieurs (CDEFI).

2Ce projet fait écho aux propositions des assises de l’enseignement supérieur et de la recherche (2012) d’une transparence accrue des coûts de formation et de recherche (Berger, 2012), propositions relayées par différents rapports de parlementaires (Le Déaut, 2013 ; Gillot et Dupont, 2013). Il vise également à répondre aux attentes de la Cour des comptes portant sur le bon emploi des fonds publics en termes de suivi et d’évaluation.

3

« Cet impératif général d’afficher simplement la réalité de l’activité, de faire correspondre les comptes à l’activité - c’est cela que désigne la sincérité ici - traverse l’ensemble de nos propositions dans ce rapport : les personnels […], les laboratoires, les cursus, les établissements, les sites ou les régions. Bien que d’apparence technique, ces préconisations sont essentielles, parce qu’il n’y a pas de sincérité politique sans sincérité budgétaire ».
(Berger, 2012, pp. 41-42)

4Concevoir et élaborer un outil méthodologique pour connaître les coûts des activités des établissements ESR est porteur d’enjeux majeurs concernant les différents modes de formation et de recherche, notamment la formation professionnelle tout au long de la vie et la recherche partagée dans les unités mixtes de recherche, l’organisation des fonctions support et de soutien, en particulier dans le cas de fusion d’établissements, l’allocation des moyens, la réforme de l’accréditation des diplômes d’Etat et la soutenabilité de l’offre de formation, la tarification des prestations de service. Ces enjeux concernent le financement des universités et des écoles d’ingénieurs relevant du MESRI mais également le type d’outil susceptible de faciliter leur transformation et d’améliorer leur performance d’ensemble.

5À l’échelle des établissements, les difficultés récentes rencontrées par certaines universités montrent la nécessité de renforcer leur pilotage et d’accompagner leur montée en compétence dans l’exercice de leurs responsabilités et compétences élargies (RCE). De ce point de vue, le déploiement d’un outil commun de connaissance des coûts des activités est de nature à favoriser le benchmarking entre établissements et à objectiver l’identification des leviers de développement des ressources propres dans le contexte actuel d’augmentation du nombre d’étudiants et de stagnation des subventions pour charge de service public, sans mettre en péril leur stratégie, notamment en matière d’offre de formation, de recherche, de vie étudiante.

6Un tel projet va donc bien au-delà des questions techniques de méthode comptable de calcul de coûts et d’indicateurs. Animé par la Mission Expertise et Conseil (MEC) de la DGESIP, il a mobilisé de multiples acteurs institutionnels et de la communauté universitaire, aux niveaux national et infranational, avec le souci permanent de leur implication effective et l’objectif d’intégrer dès la phase de conception et tout au long du processus les conditions organisationnelles de son appropriation par les acteurs et de son déploiement opérationnel effectif.

7C’est ce volet organisationnel et managérial de la conduite d’un projet d’envergure, multi-acteurs et multi-niveaux, que cet article propose d’examiner. Il tend à rendre compte d’une expérience de management public d’un projet qui débouche aujourd’hui sur de nouvelles pratiques de gestion au sein des établissements ESR et sur un renouvellement de fond du dialogue contractuel entre les universités et le MESRI.

8Ce retour d’expérience est le fruit d’une collaboration au sein de la MEC entre le chef de projet et un professeur de sciences de gestion, alors conseiller de sites et d’établissements auprès de la DGESIP. Il procède d’une démarche réflexive exploratoire.

9Le projet « connaissance des coûts des activités des établissements d’enseignement supérieur et de recherche » a nécessité un travail collectif préalable de finalisation (1) sur lequel il est important de revenir pour comprendre la démarche de co-construction qui a présidé à l’élaboration de l’outil méthodologique de connaissance des coûts des activités (2). Une expérimentation auprès de dix-sept établissements (3) a permis de dresser un premier bilan du projet et de dessiner ses perspectives actuelles (4).

1 – La finalisation du projet

1.1 – Un projet initialement guidé par l’objectif de réforme du modèle d’allocation des moyens

10Un des premiers objectifs du projet connaissance des coûts des activités a été d’apporter un éclairage sur le coût des formations susceptible de contribuer à la réforme du modèle d’allocation des moyens qui venait d’être engagée par la DGESIP en concertation avec les deux conférences des présidents et directeurs d’établissements ESR (CPU et CDEFI).

11Chaque année la DGESIP alloue aux établissements (universités et écoles d’ingénieurs) une subvention pour charge de service public représentant l’essentiel de leurs ressources. La répartition s’effectuait alors selon un modèle d’allocation des moyens SYMPA (système de répartition des moyens à la performance et à l’activité) prenant en compte l’activité pour 80% et la performance pour 20%, avec une répartition entre formation et recherche. Pour la formation, le critère d’allocation de la subvention reposait à 60% sur l’activité mesurée par le nombre d’étudiants présents aux examens. Ce dernier était retraité par des coefficients de pondération différents selon les domaines disciplinaires, les filières de formation et les niveaux de formation. Ces coefficients de pondération étaient néanmoins contestés par une partie de la communauté universitaire qui demandait la « vérité des coûts de formation ». La réforme du modèle d’allocation des moyens SYMPA s’inscrit dans ce contexte de vérité des coûts. Elle n’a pu être mené à son terme pour les universités, mais elle a abouti pour les écoles d’ingénieur avec MODAL (modèle d’allocation des moyens).

12Dans la perspective d’apporter un éclairage sur ces coefficients de pondération, un premier état des lieux des coûts de formation a été dressé en 2013 par la DGESIP à partir des cartographies économiques des activités de quelques universités établies par l’inspection générale de l’administration de l’éducation nationale et de la recherche (IGAENR). Ces cartographies donnent une image de l’utilisation des moyens financiers et humains par composante de formation, par unité de recherche et par service assurant les fonctions de soutien-support :

13

« La cartographie permet d’identifier les moyens - charges et ressources directes - qui sont consacrés par chaque établissement au financement de ses activités de formation et de recherche par grands champs disciplinaires et par pôles scientifiques. Elle met en évidence les moyens qui restent disponibles, une fois le besoin de financement des activités de formation et de recherche couvert, et qui constituent la capacité d’autofinancement à partir de laquelle les établissements peuvent asseoir leur politique d’investissement. La cartographie illustre le caractère stratégique de la capacité d’autofinancement dans le mécanisme de construction budgétaire. Elle permet également de faire varier les différentes données économiques, de mesurer les effets de ces variations et de vérifier la soutenabilité économique de la politique de l’établissement ».
(IGAENR, 2013, p.2)

14Cet état des lieux a permis d’établir des échantillons de coûts de formation calculés à partir des charges directes des grands domaines disciplinaires (droit, économie, gestion ; sciences humaines et sociales ; sciences, technologie, santé), ainsi que par filières (instituts universitaires de technologie et écoles d’ingénieurs). Ces coûts ont été ramenés à l’étudiant et à l’heure d’enseignement pour favoriser les comparaisons. Il est apparu des écarts importants de coûts, dans un rapport de un à quatre selon les domaines disciplinaires, comme en témoigne le tableau suivant :

Domaines disciplinairesCoefficients de coût
de formation à l’étudiant
Droit, économie, gestion1,0
Sciences humaines et sociales1,2
Sciences, technologie, santé2,7
Institut universitaire de technologie2,8
Ecole d’ingénieurs3,9

15L’observation et l’analyse montrent que ces coûts de formation dépendent :

  • des volumes horaires de formation,
  • des tailles des groupes de formation,
  • de la qualité des intervenants dans la formation (enseignants chercheurs, vacataires),

16et que les facteurs déterminants des coefficients de coûts reposent sur des approches pédagogiques différentes selon les domaines disciplinaires : un nombre élevé d’heures d’enseignement ou un nombre moins élevé complété par un travail personnel de l’étudiant ; un modèle construit avec une part élevée de cours magistraux ou un modèle avec des formes pédagogiques variées (petits groupes, pédagogie par projet…) ; des taux de couverture sur poste forts (cours assurés par des enseignants chercheurs en service statutaire) par opposition à des enseignements pris en charge par des vacataires (ou des enseignants chercheurs en heures complémentaires). L’appui à la formation (« back-office) et les dépenses pédagogiques (infrastructures spécifiques, équipements et matériels utilisés pour la formation) sont également des facteurs discriminants dans la formation des coûts.

17Ainsi, les sciences expérimentales sont organisées sur des modes pédagogiques proposant à l’étudiant un nombre élevé d’heures d’enseignement et une structure pédagogique assez diversifiée, dont une part importante de travaux en laboratoire et en petit groupe. Les disciplines tertiaires offrent moins d’heures d’enseignement par étudiant et celles-ci sont dispensées avec des tailles de groupe plus élevées. Au sein des disciplines tertiaires, il y a une opposition entre les sciences humaines et sociales à taux de couverture sur poste assez élevé alors que les formations relevant du domaine « droit, économie, gestion » ont de faibles taux d’encadrement.

18Pour autant, si les différences de coefficients de coûts ont une part de justification pédagogique, elles reproduisent aussi pour partie les allocations « historiques » de moyens internes aux universités.

1.2 – L’élargissement des objectifs du projet

19Le travail de production et d’analyse des coûts de formation - réalisé sur un échantillon d’établissements à partir de leurs cartographies économiques des activités - a permis d’initier le dialogue entre la DGESIP et les deux conférences sur le sujet des coûts des établissements.

20Parallèlement à ce travail exploratoire, des échanges ont été menés avec les parties prenantes de l’enseignement supérieur et de la recherche : CPU, CDEFI, associations professionnelles (vice-présidents, directeurs généraux de services, contrôleurs de gestion, agents comptables) et services de l’administration centrale du ministère en charge de l’enseignement supérieur et de la recherche.

21Ont également été étudiés les dispositifs mis en place en Angleterre et en Suisse pour connaître les coûts de leurs établissements d’enseignement supérieur et de recherche, ainsi que la comptabilité analytique des hôpitaux français.

22Cet ensemble de travaux et d’échanges a contribué à mieux définir et orienter les objectifs poursuivis par le projet connaissance des coûts des activités, en distinguant le point de vue du ministère et celui des établissements dont il a la charge.

23Pour ce qui concerne le ministère, il ressort clairement qu’une amélioration de la connaissance des coûts des activités des établissements d’enseignement supérieur et de recherche lui permettra de :

  • mieux connaître le modèle économique des établissements :
    • étayer les discussions avec les établissements dans le cadre de la soutenabilité de leur projet de développement, notamment l’accréditation de l’offre de formation ;
    • maîtriser les coûts liés à la recherche environnée (particulièrement dans le cadre du programme d’investissements d’avenir) ;
    • mieux appréhender l’effort réalisé par les établissements en matière de financement de la formation continue ;
  • mieux réguler le système d’enseignement supérieur et de recherche en favorisant une meilleure adéquation entre stratégie, moyens et résultats :
    • éclairer les choix de paramétrage du système d’allocation des moyens à enveloppe budgétaire fixée, sans pour autant s’orienter vers une tarification à l’activité ;
  • rendre compte plus finement au Parlement des moyens engagés dans l’enseignement supérieur et la recherche :
    • enrichir le débat démocratique sur l’investissement de l’État dans l’enseignement supérieur et la recherche : évolution des moyens au regard des effectifs étudiants, financement de la recherche …

24S’agissant des établissements, dont la plupart ne dispose pas d’une comptabilité analytique, il ressort que mettre à leur disposition un outil méthodologique de connaissance des coûts et des revenus des activités concourt à :

  • améliorer leur capacité de pilotage, en accord avec leur stratégie :
    • objectiver le dialogue de gestion, en interne avec leurs composantes et leurs laboratoires, mais aussi en externe dans le cadre de la politique de site ;
    • envisager de nouvelles formes d’organisation plus efficientes, passant notamment par l’optimisation des fonctions de support et de soutien ;
    • sécuriser la soutenabilité de l’offre globale de formation en rapport avec la réforme de l’accréditation ;
  • leur permettre d’analyser les conditions d’équilibre des leviers de développement des ressources propres :
    • améliorer les conditions de tarification de la formation continue et des plates-formes technologiques, notamment en progressant dans l’identification des frais de structure des laboratoires de recherche ;
    • objectiver l’équilibre budgétaire des diplômes d’université ;
  • faciliter les comparaisons aux autres établissements sur la base de coûts constatés calculés selon une méthodologie uniforme.

2 – L’élaboration de l’outil méthodologique de connaissance des coûts des activités

25Une fois les attendus des parties prenantes précisés et les objectifs du projet définis, le processus d’élaboration de l’outil a pu être lancé. Il s’appuie sur une gouvernance multi-acteurs et à niveaux multiples (2.1.) et procède d’une démarche de co-construction d’un référentiel (2 .2.) et d’une méthodologie propices à favoriser à la fois la régulation du système ESR et l’amélioration de la qualité de fond du pilotage des établissements (2.3.). Un focus sur les coûts de personnel apportera quelques éclairages complémentaires (2.4).

2.1 – Gouvernance du projet et groupes de travail

26Le projet connaissance des coûts des activités des établissements ESR a démarré officiellement début 2014 avec la mise en place d’une gouvernance s’appuyant sur trois niveaux : une équipe projet et des groupes de travail, un comité de suivi et un comité de pilotage.

27L’équipe projet a été constituée autour du chef de projet MEC/DGESIP, avec un consultant interne du ministère et le directeur du pilotage et de l’évaluation de l’université d’Angers. L’équipe projet a composé, piloté et animé les différents groupes de travail avec des enseignants-chercheurs vice-présidents et des gestionnaires provenant d’établissements et de services ou directions centrales du ministère.

28Le comité de suivi regroupait les différentes parties prenantes représentatives de la diversité de la communauté universitaire (élus et administratifs) : la CPU, la CDEFI, les conférences des doyens disciplinaires (sciences, sciences humaines et sociales, médecine, sciences économiques, droit…), la conférence des recteurs, des organismes de recherche, l’agence de mutualisation des universités et établissements (AMUE), le haut conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (HCERES), les réseaux professionnels (vice-présidents conseil d’administration, conseil scientifique, conseil des études et de la vie universitaire, directeurs généraux de services, contrôleurs de gestion et agents comptables), l’association des directeurs d’IUT (ADIUT). Le rôle du comité de suivi était d’émettre des avis et recommandations sur les productions des groupes de travail. Chacun de ses membres devait également relayer la communication du projet dans sa structure respective.

29Le comité de pilotage - instance institutionnelle de décision associant les principaux décisionnaires du ministère et des établissements d’enseignement supérieur et de recherche : Cabinet, DGESIP, DGRI, DAF, CPU et CDEFI - a validé l’ensemble des travaux.

30Deux groupes de travail se sont succédés, le premier dédié à la construction du référentiel de connaissance des coûts des activités et le second à l’élaboration de la méthodologie de construction des coûts. Ces groupes se sont réunis à dix-sept reprises entre février 2014 et janvier 2015. Ils ont réuni une vingtaine de participants élus et administratifs, vice-présidents et gestionnaires d’établissements, d’organismes de recherche, de directions centrales et de services [2]. Leurs travaux ont été régulièrement présentés au comité de suivi qui a émis des avis et des recommandations et au comité de pilotage qui a validé les orientations à retenir.

2.2 – Le choix d’un référentiel de coût des activités commun à la formation et à la recherche

31La co-construction avec les participants du premier groupe de travail d’un référentiel partagé des coûts de formation et de recherche a pu être réalisée au premier semestre 2014. Celui-ci s’appuie sur les domaines disciplinaires du référentiel européen de recherche (ERC) et de celui du HCERES. Il est structuré par quatre regroupements de dix-sept domaines disciplinaires identiques entre formation et recherche :

  • sciences du vivant : biologie ; santé ; agronomie, écologie, environnement ; sciences et techniques des activités physiques et sportives ;
  • sciences de la matière, de la terre et de l’univers : sciences de la terre et de l’univers ; physique chimie ;
  • mathématiques, sciences et technologies de l’information et de la communication (STIC), ingénierie et systèmes : mathématiques ; ingénierie et système ; sciences et technologie de l’information et de la communication ;
  • sciences humaines et sociales : normes, institutions ; comportements sociaux ; marché et organisations ; sociétés dans le temps et dans l’espace ; esprit humain, langage, éducation ; lettres et langues ; textes ; arts et cultures.

32Des rattachements ou des éclatements de domaines disciplinaires ont parfois été effectués pour tenir compte des spécificités (présupposées) des coûts de formation et de recherche.

33Les domaines disciplinaires retenus sont les mêmes pour la formation et la recherche afin d’avoir une norme commune, de favoriser les analyses transversales de coûts et de faciliter la répartition de la masse salariale. Cela permet également d’avoir des coûts complets formation - recherche pour les différents domaines disciplinaires. Ne parle-t-on pas d’ailleurs du métier d’enseignant chercheur comme un tout indissociable ?

34Le premier groupe de travail a également déterminé quelles étaient les activités principales des universités et des écoles d’ingénieurs dont on voulait connaître les coûts. Il est apparu assez rapidement qu’il y avait quatre grandes familles d’activités : la formation, la recherche, le soutien et le support. Il y a eu de nombreux échanges au sein du groupe de travail pour décliner ces quatre grandes familles et trouver le niveau de maille approprié à une lecture correcte des activités des établissements. Un consensus a finalement été trouvé pour retenir les activités suivantes :

  • formation : formation accréditée ; formation hors champ de l’accréditation ;
  • recherche : formation doctorale ; activités de recherche ; création et exploitation de plateformes scientifiques et technologiques ;
  • soutien : documentation ; appui à la formation [3] ; valorisation et appui à la recherche ; vie étudiante ; hébergement et restauration des étudiants (hors CROUS) ;
  • support : gouvernance pilotage gestion ; patrimoine immobilier ; systèmes d’information et numérique.

35On voit par exemple que l’activité « formation doctorale » a été rattachée à la recherche, alors qu’il aurait été tout à fait possible de la faire figurer avec les activités de formation. L’activité « gouvernance pilotage gestion » aurait pu être détaillée davantage (en faisant ressortir la gouvernance et les différentes directions support). Il a fallu trouver des compromis en fonction des objectifs poursuivis.

36Le référentiel de connaissance des coûts de l’activité formation se prolonge jusqu’aux niveaux de formation (ou aux grands domaines médicaux) :

  • formation accréditée : DUT ; licence ; licence professionnelle ; master ; master « métiers de l’enseignement, de l’éducation et de la formation (MEEF) » ; diplôme d’ingénieur ; autres diplômes accrédités ;
  • formation hors champ de l’accréditation : diplôme d’université ; autres formations (non diplômantes) ;
  • domaine disciplinaire santé : première année commune aux études de santé (PACES) ; médecine ; maïeutique ; odontologie ; paramédical ; pharmacie.

2.3 – L’option méthodologique de recourir aux coûts complets

37Le deuxième groupe de travail a élaboré la méthodologie de calcul des coûts complets des activités de formation, de recherche, de soutien et de support au cours du second semestre 2014. Il a également défini les modalités d’expérimentation de cette méthodologie. Un guide connaissance des coûts des activités des établissements d’enseignement supérieur et de recherche a été rédigé avec l’ambition de présenter les objectifs, les grands principes directeurs et les choix méthodologiques qui ont été retenus. Ce document n’est pas un mode opératoire décrivant la mise en œuvre de la connaissance des coûts au sein des établissements, qui est propre à chacun de ceux-ci, à sa culture et à ses systèmes d’information.

38La méthodologie retenue consiste à déterminer le coût complet des principales activités communes à tous les établissements. Avec le passage aux RCE, les établissements cherchent davantage à optimiser leur offre de formation et de prestations, en adaptant les coûts qu’ils engagent à la valeur que représente leur offre pour les étudiants et pour les apporteurs de ressources propres. Dans cette perspective, il est nécessaire d’identifier l’ensemble des coûts provoqués directement et indirectement par les activités et de mettre en évidence les facteurs qui les déterminent. L’enjeu est bien la meilleure connaissance possible de coûts complets des activités. Il en est de même concernant l’identification des revenus dégagés par les activités, qui sont à rapprocher de leurs coûts afin de mesurer des résultats d’activité. Le choix d’une identification des coûts par activité permet d’appliquer le dispositif à l’ensemble des établissements, indépendamment de leurs structures (composantes, laboratoires de recherche, services communs, etc.), et d’obtenir des données de coûts comparables entre établissements. La comptabilité générale de l’établissement, les fichiers de paie et les données physiques d’activité (nombre d’heures de formation, effectifs, surfaces, etc.) sont les principales sources de données mobilisées par la connaissance des coûts des activités.

39Ce choix d’une méthodologie en coûts complets provoqués directement et indirectement par les activités permet de se prémunir des « coûts faussement complets, intégrant des répartitions arbitraires de frais indirects [et s’en tenant] à un calcul portant sur les seules charges directes, calcul pourtant inapproprié lorsqu’il s’agit de décisions touchant à l’existence ou au mode de réalisation [d’une activité] » (Bouquin, 2004, p.145).

40Le coût complet est ainsi apparu comme étant le coût le plus adapté à la fois aux attentes du ministère pour :

  • accroître la transparence entre le ministère et les établissements, et aller vers davantage d’autonomie ;
  • éclairer l’allocation des moyens ;
  • rassurer l’État et les citoyens sur la bonne utilisation des deniers publics ;
  • mesurer l’atteinte des objectifs nationaux ;
    et à celles de la gouvernance des établissements pour :
  • aider à la prise de décisions stratégiques ;
  • objectiver l’allocation interne des moyens ;
  • rapprocher la tarification des prestations de services de leurs coûts ;
  • faciliter le benchmarking avec d’autres établissements.

2.4 – Focus sur les coûts de personnel, porteurs de la valeur allouée aux activités

41Les coûts salariaux représentent l’essentiel des coûts des établissements (de l’ordre de 80%). La valorisation du capital humain par le prisme des coûts de formation et de recherche est donc essentielle pour les établissements d’enseignement supérieur et de recherche. La construction des coûts en la matière va alors reposer sur des hypothèses simplificatrices et des acceptions communes.

42La première est de considérer que le temps d’un enseignant chercheur se répartit à parts égales entre la formation et la recherche, ce qui est assez illusoire tant sur la répartition que sur la méconnaissance d’autres activités administratives, d’encadrement, de participation à la vie de l’établissement (Ducrocq et Gervais, 2013, p. 23). Lorsque la méthodologie de connaissance des coûts des activités a été élaborée, la question du coût des enseignants-chercheurs dits « non produisants » (i.e. non rattachés à un laboratoire de recherche) a suscité de vifs échanges. Certains voulaient que les coûts salariaux de ces enseignants-chercheurs soient retraités et sortis des coûts respectifs des domaines disciplinaires de la recherche pour les identifier à part. Le comité de pilotage en a décidé autrement, considérant que les coûts de ces enseignants-chercheurs devaient être imputés aux domaines disciplinaires dont ils relevaient, conformément au principe selon lequel 50% des coûts de personnel des enseignements-chercheurs sont imputés en formation (100% pour les professeurs agrégés) et 50% en recherche.

43L’autre hypothèse est de considérer que le coût d’un enseignant-chercheur se mesure sur la base de sa rémunération, ce qui conduit à des écarts significatifs selon l’ancienneté (du simple au double) et selon l’importance des heures complémentaires effectuées. Ces dernières sont toutes celles effectuées au-delà des 192 heures équivalent travaux dirigés (HETD) annuelles. Comme on l’a vu précédemment, certains domaines disciplinaires sont moins encadrés que d’autres, avec des taux de couverture sur poste moins élevés. Pour compenser cela, ces domaines disciplinaires vont davantage avoir recours aux heures complémentaires. Comme ces heures sont rémunérées à un moindre taux horaire (42,96 €), elles contribuent à faire baisser significativement les coûts de formation des domaines disciplinaires qui les utilisent massivement.

44Pour permettre la comparaison entre disciplines, la méthodologie choisie prévoit une variante avec un retraitement des coûts de formation qui valorise les heures complémentaires aux mêmes taux horaires que les heures statutaires. Les coûts de formation sont alors calculés de deux manières : en appliquant aux heures de formation réalisées (peu importe qu’elles relèvent du service statutaire ou des heures complémentaire) un taux horaire moyen « avec » les heures complémentaires calculé pour chaque catégorie de corps (professeur des universités, maître de conférences, professeur agrégé, etc.) et un taux horaire moyen « sans » les heures complémentaires.

45L’exemple suivant permet d’illustrer le propos. En considérant 10 maîtres de conférences (MCF) sans décharge horaire, à 85 k€ de coût annuel hors heures complémentaires, et effectuant un total de 500 heures complémentaires, l’écart entre ces deux taux horaires, avec ou sans les heures complémentaires est de l’ordre de 20%. Il varie en fonction de la part des heures complémentaires dans le total des heures de formation.

Sans les heures complémentairesAvec les heures complémentaires
Masse salariale de l’activité formation425 k€
(85 000*10*50%)
446,5 k€
(85 000*10*50%)
+ (42,96*500)
Nombre d’heures1 920
(192*10)
2 420
(192*10 + 500)
Taux horaire (HETD) moyen221,4 €
(425 000 / 1 20)
184,5 €
(446 480 / 2 420)
Coût salarial de l’activité formation535,7 k€
(2 420*221,4)
446,5 k€
(2 420*184,5)

46Pour les coûts de recherche, l’exercice consiste à recenser puis à rattacher les effectifs d’enseignants chercheurs des laboratoires de recherche aux domaines disciplinaires du référentiel des coûts. La pluridisciplinarité de certains laboratoires peut conduire à privilégier un rattachement à un domaine disciplinaire plutôt qu’à un autre. Les coûts sont calculés en multipliant les effectifs par la quote-part (50%) des salaires annuels moyens des différentes catégories de corps d’enseignants chercheurs. Les chercheurs provenant des organismes de recherche mis à disposition au sein des unités mixtes de recherche sont également pris en compte dans les coûts de la recherche. Leurs coûts sont évalués sur la base des grilles de rémunérations moyennes de leur organisme (ou équivalent).

47Les coûts des personnels non enseignants sont affectés de la même manière aux différentes activités (formation, recherche, soutien et support). C’est la nature de la mission principale exercée par la personne qui va déterminer l’affectation de ses charges salariales à l’activité, et non son positionnement au sein de l’établissement (en composante, en laboratoire de recherche, en service central ou commun) ou son statut catégoriel.

48Les charges de fonctionnement et d’amortissement sont imputées aux activités, soit directement dans le système d’information financier, soit par retraitement. On obtient un coût des différentes activités qui s’apparente à une photographie des ressources mobilisées par l’établissement pour assurer ses missions. C’est en quelque sorte la valeur du capital humain qui est allouée aux domaines disciplinaires de formation et de recherche, et aux fonctions de soutien et de support qui contribuent à leur essor. Certains établissements s’appuient sur une recherche plus développée que la formation, alors que d’autres consacrent davantage de ressources à la pédagogie des étudiants.

49Une fois cette première photographie établie, les coûts des fonctions de soutien et de support sont imputés à la formation et à la recherche pour en obtenir les coûts complets. Ces imputations sont réalisées à partir d’une traçabilité effective des coûts de soutien et de support ou par des clés de répartition. Après imputation, les coûts complets de formation et de recherche peuvent être consolidés pour produire des coûts totaux par étudiant selon les domaines disciplinaires.

3 – Première expérimentation

3.1 – Une expérimentation par dix-sept établissements

50L’outil méthodologique de connaissances des coûts des activités a été expérimenté au cours des années 2015 et 2016. L’expérimentation est d’ampleur puisque douze universités et cinq écoles d’ingénieurs se sont portées volontaires (notamment les universités de Strasbourg, d’Aix-Marseille et Pierre et Marie Curie Paris 6), ce qui représente environ 20% du budget total de l’enseignement supérieur français.

51Onze d’entre eux ont conduit la démarche à son terme. Les personnes chargées de l’expérimentation étaient principalement des responsables du contrôle de gestion.

52Un troisième groupe de travail (huit réunions) a organisé des retours d’expérience entre les représentants des dix-sept établissements pour partager :

  • le cadencement du déploiement de la méthodologie ;
  • les bonnes pratiques ;
  • les difficultés rencontrées ;
  • les solutions de contournement ;
  • la construction des outils de reporting.

3.2 – Focus sur la formation tout au long de la vie : comment les coûts devraient permettre une croissance des revenus

53Un sous-groupe de travail dédié aux coûts de la formation tout au long de la vie (FTLV) a été conduit avec cinq établissements, la cheffe de projet pour le développement de la FTLV dans le supérieur et la conférence des directeurs des services universitaires de formation continue (CDSUFC). Il s’est réuni à cinq reprises.

54L’approche en coûts complets permet d’aller à l’encontre de la « culture low-cost » que l’on rencontre souvent dans les établissements : « It (the implementation of full costing) can inform pricing decisions of different activities. Thus it helps to move away from a ‘low-cost culture’ and has the potential to strengthen the position of universities in relations with contract partner » (Claeys-Kulik et Estermann, 2013, p.9).

55Les missions de service public portées par les universités ne font pas toujours bon ménage avec le new public management. La formation continue illustre bien la difficulté à laquelle sont confrontées les universités de proposer des prestations dont les coûts complets soient couverts par les recettes induites, dans un contexte fortement concurrentiel. Le marché de la formation continue et de l’apprentissage, évalué à 32 milliards d’euros (DARES, Ministère du travail, 2015, p.1), est quasi-totalement occupé par des acteurs privés, puisque les universités ne représentent qu’un chiffre d’affaires de 455 millions d’euros (DEPP, MENESR, 2016, p.1). Pour porter l’essor de la formation tout au long de la vie (FTLV), enjeu national, les universités ont un rôle à jouer dont elles doivent d’autant plus se saisir qu’il leur permettra de développer leurs ressources propres. Encore faut-il que l’augmentation des recettes de la formation continue des universités s’accompagne de marges bénéficiaires. La connaissance des coûts des activités de FTLV permet alors pour les établissements :

  • de dégager des marges de manœuvre ;
  • de disposer d’éléments pour éclairer la tarification et les arbitrages ;
  • de respecter les dispositions légales de justification en coût complet des formations ;
  • d’avoir des éléments de négociation avec les financeurs des formations (Opca, Fongecif …).

56Pour les responsables pédagogiques de formation continue, les coûts complets permettent une prise de conscience de la valeur intrinsèque des formations : quelle valeur doit-on donner à l’heure d’enseignement (le prix payé à l’intervenant, le prix de revient calculé de l’heure selon le corps statutaire, le prix moyen de l’heure…) ? Quelle est la part des charges indirectes des fonctions de soutien (scolarité, appui à la formation, documentation, etc.) et de support (services administratifs, immobilier, etc.) qui concourent à la formation continue ? La valeur de l’activité de recherche universitaire est-elle à prendre en compte (et si oui comment) ?

57Une grille de simulation a été élaborée pour prévoir les coûts complets d’une action de formation continue. Cette grille permet de faire varier les principaux paramètres (tarif, nombre de stagiaires, nombre d’heures de formation par catégorie d’enseignants chercheurs, quote-part des charges indirectes, etc.) qui influent sur les coûts. Elle donne une lecture de la marge sur coûts directs, qui contribue à la couverture des coûts communs de l’établissement, ainsi qu’un résultat prévisionnel. Certains établissements éprouvent des difficultés à concevoir leur politique tarifaire de l’offre de formation continue sur la base des coûts complets, au motif que cela conduirait à des tarifs de vente trop élevés leur interdisant des marchés. Il n’est donc pas rare de voir des heures de formation continue assurées par des professeurs d’université valorisés au coût de l’heure complémentaire (42,96 euros), ce qui est assez éloigné du coût de l’heure statutaire (260 euros [4]).

4 – Bilan et perspectives

58Au-delà de la production extrêmement riche de données de coûts et de revenus utiles pour le pilotage, l’expérimentation a permis aux établissements d’approfondir le fonctionnement interne de leurs organisations et d’améliorer leurs processus métiers. Il y a eu un exercice introspectif de connaissance des activités avant même d’envisager la connaissance des coûts : quelles sont les heures de formation et par qui sont-elles assurées, quels sont les enseignants chercheurs et les chercheurs dans les laboratoires, quelles sont les missions assurées par les personnels non enseignants, comment les bâtiments sont-ils utilisés par les différentes activités ? Cet exercice a permis de rentrer davantage dans la complexité des activités des établissements pour chercher à y voir un peu plus clair. Il a également permis un travail de décloisonnement entre les différents services (composantes, laboratoires de recherche, services administratifs), durant lequel les acteurs ont été amenés à collaborer ensemble. Des dysfonctionnements se sont révélés, lesquels induisent des coûts cachés : sous-services statutaires et/ou décharges d’enseignement compensés par des heures complémentaires, sous-tarification d’actions de formation continue équilibrée par les ressources de la formation initiale, hébergement de projets de recherche plus coûteux que les ressources apportées, enseignants-chercheurs non produisants, consommations non optimisées de fluides (eau, gaz, fioul), d’équipements (photocopieuses, imprimantes…), etc.

59Ce constat fait par les acteurs de dysfonctionnements qui induisent des coûts ou performances (coûts d’opportunité) cachés montre les limites d’une approche par les seuls coûts complets. Il invite à élargir l’analyse par la méthode des coûts-performances cachés (Savall et Zardet, 1987/2010, 2008) qui permet d’évaluer le coût intégral des activités, c’est-à-dire leur coût complet visible et les coûts cachés ou manques à gagner que les dysfonctionnements induisent. Il s’agit là d’une piste de recherche prometteuse qui n’entache toutefois pas le bilan du projet « connaissance des coûts des activités des établissements ESR ».

60Après trois années, ce bilan permet de dégager les enseignements suivants :

  • il a été judicieux de co-construire (ministère et établissements) une méthodologie commune en partant d’une feuille blanche, mais avec des objectifs déjà bien identifiés. Ce pragmatisme initial a permis de légitimer les options méthodologiques choisies, et à l’ensemble de la communauté universitaire de s’approprier l’outil ;
  • les résultats positifs de l’expérimentation ont montré la pertinence et la faisabilité du projet de connaissance des coûts des activités ;
  • Le rapport entre charges directes et charges indirectes est de l’ordre de deux tiers / un tiers. La part des coûts directs est donc largement prépondérante, ce qui contribue à l’obtention de coûts complets pertinents dans lesquels l’allocation (toujours contestable) des coûts indirects reste minoritaire ;
  • la maille du référentiel de connaissance des coûts des activités est restée suffisamment « lâche » pour éviter de tomber dans des comptes d’apothicaires peu utiles à la prise de décision ;
  • la valorisation du capital humain repose sur des hypothèses simplificatrices car il est difficile, voire impossible, de modéliser le temps de travail des enseignants chercheurs, tel qu’on peut le faire pour d’autres métiers dans des entreprises industrielles ;
  • la connaissance des coûts des activités oblige à mieux connaître celles-ci, qui sont composées de processus et de tâches. Elle peut être l’occasion de les ré-envisager pour plus d’efficience, d’aborder plus objectivement les questions de mutualisation ;
  • le travail d’identification des coûts des activités a fait écho aux pratiques professionnelles habituelles des responsables de contrôle de gestion (comptabilité analytique, tableaux de bord, suivi de la masse salariale).

61Le projet « connaissance des coûts des activités » est désormais entré dans une phase de déploiement du dispositif à l’ensemble des établissements ESR, selon le rythme du calendrier des quatre vagues contractuelles de sites [5]. Un accompagnement de la MEC avec le chef de projet et une nouvelle équipe projet - constituée de cinq responsables du contrôle de gestion d’établissements [6] et d’un représentant de l’Agence de mutualisation des universités et établissements (Amue) - a débuté en septembre 2017. Ce sont, à chaque vague, plus d’une trentaine d’établissements qui sont accompagnés dans la mise en œuvre du dispositif, notamment pour répondre dans un premier temps à l’analyse de la soutenabilité de l’offre de formation demandée dans le cadre du contrat de site et d’établissements.

62En revanche, l’identification des revenus des activités s’est révélée être beaucoup plus problématique que prévue, puisque seulement deux établissements ont réussi à rapprocher les revenus des coûts des activités. On voit bien que si la culture des coûts et de leur maîtrise est désormais présente dans les universités, celle des ressources propres ne retient encore guère l’attention. Il existe pourtant des gisements de développement de ces dernières qui mériteraient qu’on y consacre au moins autant d’efforts qu’à ceux portés sur les coûts des établissements.

63C’est dans cette direction qu’il conviendrait désormais d’aller pour que le déploiement de l’outil dans les établissements libère tout son potentiel.

Bibliographie

Références bibliographiques

  • Berger V. (2012), Assises de l’enseignement supérieur et de la recherche,
  • Rapport au Président de la République.
  • http://www.ladocumentationfrancaise.fr/var/storage/rapports-publics/124000671.pdf
  • Bouquin H. (2004), Comptabilité de gestion, Paris, Economica (3ème éd.).
  • Claeys-Kulik A.-L. et Estermann T., European University Association (2013), Financially Sustainable Universities, Full Costing : Progress and Practice ?
  • http://www.eua.be/Libraries/publications-homepage-list/Full_Costing_Progress_and_Practice_web.pdf?sfvrsn=2
  • Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (Ministère du travail), La dépense nationale pour la formation professionnelle continue et l’apprentissage en 2012, note n°014, février 2015. http://travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/2015-014.pdf
  • Direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance (MENESR), La formation continue universitaire forme toujours plus de salariés, note d’information n° 27, octobre 2016.
  • http://cache.media.education.gouv.fr/file/2016/47/8/depp-ni-2016-27-FCU-2014_650478.pdf
  • Ducrocq C. et Gervais M. (2013), « Le coût complet par diplôme à l’université : quel apport vu les problèmes de mesure ? », Finance Contrôle Stratégie, n°16-4.
  • Gillot D. et Dupont A. (2012), L’autonomie des universités depuis la loi LRU : le big bang à l’heure du bilan, Rapport d’information du Sénat sur la mise en œuvre de la loi relative aux libertés et responsabilités des universités, n°446.
  • https://www.senat.fr/rap/r12-446/r12-446.html
  • IGAENR, Inspection générale de l’administration de l’éducation nationale et de la recherche (2013), Guide méthodologique en vue de la réalisation d’une cartographie économique et d’une analyse stratégique des activités des universités, rapport n°2013-079.
  • Le Déaut J.-Y. (2013), Refonder l’université, dynamiser la recherche, mieux coopérer pour réussir, rapport au Premier ministre.
  • http://www.ladocumentationfrancaise.fr/var/storage/rapports-publics/134000040.pdf
  • Savall H. et Zardet V. (1987), Maîtriser les coûts et les performances cachés, Paris, Economica (5ème éd. 2010).
  • Savall H. et Zardet V. (2008), « Le concept de coût-valeur des activités. Contribution de la théorie socio-économique des organisations », Sciences de gestion, n°64, p. 61-89.

Mots-clés éditeurs : formation, universités, écoles d’ingénieurs, coûts des activités, recherche

Mise en ligne 13/02/2019

https://doi.org/10.3917/resg.127.0215

Notes

  • [1]
    Lorsque cet article a été écrit, Claude Jameux était conseiller de site et d’établissements auprès de la Direction générale de l’enseignement supérieur et de la recherche – Mission Expertise et Conseil.
  • [2]
    Universités : Blaise Pascal Clermont-Ferrand 2, Angers, Vincennes Saint-Denis, Paris-Diderot, Pierre et Marie Curie, Paris-Est-Créteil, Bordeaux Montaigne, Savoie Mont Blanc, Rennes 1, Claude Bernard Lyon 1, Orléans, Aix-Marseille, Rouen, Strasbourg, La Rochelle ; université de technologie de Troyes, INP Grenoble, INSA Rouen, INSA Rennes ; IUT : Bordeaux, Cergy-Pontoise ; organismes de recherche : CIRAD, INSERM.
  • [3]
    À titre d’illustration l’appui à la formation regroupe : l’insertion, l’orientation, la scolarité, les relations internationales (partie formation), les technologies de l’information et de la communication pour l’enseignement (TICE), la conception et la fabrication de ressources numériques (massive open online course MOOC), l’enseignement à distance (EAD), les observatoires de la vie étudiantes (OVE), les conseillers pédagogiques, l’accompagnement de la validation des acquis de l’expérience (VAE), les services de formation continue et alternance, l’ingénierie pédagogique et la production audiovisuelle.
  • [4]
    Calculé sur la base d’un salaire annuel chargé de 100 k€ (incluant les charges employeurs) répartis entre 50% pour la formation et 50% pour la recherche, et de 192 heures statutaires : 100 k€* 50% / 192 = 260,41 €.
  • [5]
    Les établissements signent avec le ministère en charge de l’ESR un contrat de site et d’établissements portant sur la stratégie pour les cinq années à venir.
  • [6]
    Universités d’Aix Marseille (AMU), d’Angers, de Bordeaux 3, de Montpellier 3 et de Rouen Normandie.
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