Notes
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[1]
Voir par exemple l’ouvrage collectif coordonné par J-C. Moisdon (1997).
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[2]
Latour (2006, p. 58) précise le sens qu’il donne au concept d’intermédiaire : « un intermédiaire désigne, dans mon vocabulaire, ce qui véhicule du sens ou de la force sans transformation : définir ses entrées, ses inputs suffit à définir ses sorties, ses outputs. A toutes fins utiles, on peut considérer un intermédiaire non seulement comme une boîte noire, mais comme une boîte noire qui compte pour un, même si elle se compose intérieurement de plusieurs parties ».
1Dans la continuité des travaux abordant les questions relatives à la place et aux rôles des outils de gestion dans les organisations (voir, par exemple, les travaux initiaux du Centre de Recherche en Gestion [1]), il est possible de distinguer, dans le cas des organisations publiques, deux principaux axes d’analyse : d’une part, l’étude des raisons de l’implantation de ces outils (Chatelain-Ponroy, S. 2010, Carassus et al. 2014) et, d’autre part, les conséquences de ces outils dans, et pour ces organisations (Rochet 2004, Guenoun et Rochet 2007, Carassus et Batac 2008, Dreveton 2013). Néanmoins, au-delà de ces questionnements, il est intéressant de constater que peu de recherches explorent le processus de création et d’implantation de ces outils. La présente étude répond à ce constat en étudiant le processus de déploiement des innovations managériales dans les organisations publiques.
2En accord avec Latour (1986, 1987, 1993), Akrich et al. (1988) ou encore Callon (1994), deux approches opposées peuvent être mobilisées pour expliquer l’introduction d’une innovation : une approche « déterministe » et une approche fondée sur l’analyse des réseaux sociotechniques.
3Selon la première approche, la diffusion d’une innovation s’expliquera soit par le contexte social dans lequel s’insère l’innovation, justifiant sa diffusion par la réponse qu’elle apporte à un ensemble de besoins sociaux déterminés ; soit par un déterminisme technique selon lequel l’innovation doit s’imposer au regard de sa supériorité technique, ou soit par la mobilisation simultanée de ces deux explications, sans pour autant les mélanger. En d’autres mots, les dimensions sociales et techniques sont considérées, d’une part, comme transcendantes, c’est-à-dire extérieures et supérieures, qu’il suffirait de solliciter pour expliquer l’existence et le besoin d’une innovation et, d’autre part, comme indépendantes l’une de l’autre.
4Selon la seconde approche, une innovation sera appréhendée comme un construit sociotechnique dont le succès repose sur sa capacité à fédérer un réseau d’acteurs humains et non-humains en agrégeant l’ensemble de leurs intérêts. De ce fait, elle ne s’impose plus du fait de forces extérieures et supérieures mais prend forme au gré des associations et des luttes jalonnant sa définition au contact des acteurs.
5La première approche renvoie à un phénomène de purification, c’est-à-dire la création de « deux zones ontologiques entièrement distinctes, celle des humains d’une part, celle des non-humains de l’autre » (Latour, 1991, p. 21), qu’il suffit de mobiliser pour justifier la diffusion d’une innovation. La seconde approche fait quant à elle référence au modèle de la traduction (Callon 1981, 1986; Latour 1987) selon lequel, d’une part, aucune séparation définitive ne peut être opérée entre les dimensions techniques et sociales et, d’autre part, l’innovation, point de rencontre de ces deux dimensions, va progressivement prendre forme et, simultanément, redéfinir celles-ci par l’intermédiaire des intérêts de quelques acteurs dont la capacité ou non de représenter les intérêts du plus grand nombre conduiront à l’adoption ou, au contraire, à l’abandon de l’innovation. Proposant de dépasser cette dichotomie fondée sur l’opposition entre purification et traduction, telles les deux faces de Janus, Latour (1991, p. 105) avance qu’il est nécessaire de les étudier conjointement pour comprendre la trajectoire d’une innovation.
6A partir de l’analyse de la trajectoire d’un outil de gestion, de l’idée originelle à sa formalisation définitive, cet article propose d’illustrer les apports issus de la combinaison des concepts de purification et de traduction. Si la mobilisation des travaux de Latour est importante dans les recherches menées en comptabilité, force est de constater que le concept de purification reste peu utilisé. Justesen et Mouritsen (2011) mettent en évidence qu’une vaste majorité des recherches mobilisent principalement « La Science en Action » (Latour, 1987), alors que des ouvrages comme « Nous n’avons jamais été modernes » (Latour, 1991) et « Politiques de la nature » (Latour, 1999) ne sont que peu utilisés. En outre, ces auteurs (2011, p. 193) établissent une liste des concepts clés empruntés à Bruno Latour et transposés dans les recherches en comptabilité. Il apparaît que le concept de purification, central dans l’ouvrage « Nous n’avons jamais été modernes », n’est pas présent dans cette liste. Pourtant, des phénomènes de purification apparaissent au cours du développement d’une innovation (Berglund et Werr, 2000, Christensen et Skaerbaek, 2010) : il s’agit de l’ensemble des postulats avancés par les acteurs relevant de leur conception de ce que doit être l’innovation et des objectifs qu’elle se doit d’embrasser, non plus au regard de leurs intérêts propres ou du groupe d’acteurs qu’ils représentent, mais bien en fonction de la Société ou de la Technique. Ce faisant, ils redonnent à ces deux dimensions leur caractère transcendant par l’entremise d’arguments d’autorité permettant de baliser et de canaliser le processus de traduction. En d’autres termes, il s’agit des actions de mobilisation des acteurs de « boites noires », c’est-à-dire de faits socialement acceptés qu’il n’est pas aisé de remettre en cause, tant la discussion de leurs imbrications nécessiterait de dépasser l’ambition du projet initial et de mobiliser un nombre d’acteurs et de ressources disproportionné par rapport à l’objectif visé originellement.
7La première partie présente le cadre d’analyse proposé par Latour (1991). La seconde partie expose la méthodologie de recherche. Le cas est présenté dans une troisième partie puis une analyse du cas est présentée dans la partie suivante avant de conclure sur les apports de l’association des concepts de purification et de traduction.
1 – Une lecture du modèle de Latour (1991)
8Selon Latour (1991), la purification conduit à considérer chaque objet comme un mélange de formes pures. A partir d’une séparation nette entre le pôle Nature (où l’acte politique n’existe pas) et le pôle Société (qui n’existe que par l’acte politique), l’explication de l’essence d’un objet s’appuie sur quelques intermédiaires [2], dont le rôle est de faire le lien entre ces deux pôles (schéma 1).
Le processus de purification
Le processus de purification
9Cependant, afin de comprendre l’existence de l’objet, c’est-à-dire la forme qui lui a été donnée, ses caractéristiques et les rôles qu’il revêt, les intérêts qu’ils agrègent mais aussi ceux qui ont été « écartés », il semble nécessaire d’inverser cette approche. En effet, en accord avec Latour (1991, p. 106), « le point de clivage et de rencontre devient le point de départ. Les explications ne vont plus des formes pures aux phénomènes, mais du centre vers les extrêmes. Ces derniers ne sont plus le point d’accroche de la réalité, mais autant de résultats provisoires et partiels. Le feuilletage des intermédiaires est remplacé par des chaînes de médiateurs » (schéma 2).
La purification comme médiation particulière
La purification comme médiation particulière
10En parallèle de la définition qu’il donne des intermédiaires, Latour (2006, p. 58) souligne que « les médiateurs transforment, traduisent, distordent, et modifient le sens ou les éléments qu’ils sont censés transporter ». Dès lors, selon cette approche, Nature et Société ne sont plus les sources de l’explication mais constituent, à l’inverse, ce qui doit être expliqué : l’objet redéfinit progressivement ce qu’est la Nature et la Société, et son essence dépend maintenant de l’ensemble des acteurs humains et non-humains qui constituent le collectif réuni par l’objet.
11Il apparaît donc que, selon le processus de purification, l’institution d’une innovation s’expliquerait par l’assimilation de ses attributs à sa substance, lui donnant ainsi un caractère durable et indiscutable. En partant de la dimension technique ou d’un contexte social, et en mobilisant des intermédiaires (tels que, pêle-mêle, le contexte économique, l’état des techniques actuelles, la matérialisation de besoins précédemment définis, l’attitude au changement des individus ou encore l’existence de caractéristiques organisationnelles internes ou externes adaptées), l’innovation se diffuse et s’impose. A l’inverse, selon l’approche de la médiation, l’innovation s’explique par un réseau d’acteurs humains et non-humains, dont l’identité et l’importance sont constamment rediscutées. Ce collectif définit alors ce qu’est l’innovation et, avec elle, les conséquences sur les dimensions technique et politique. De ce fait, si dans l’approche de la purification, l’innovation, déjà présente, est justifiée par des éléments transcendants dans l’approche de la médiation, c’est l’immanence de la technique et de la politique qui est mise en lumière. En d’autres termes, la première approche masque la phase de construction de l’objet alors que la seconde se focalise uniquement sur celle-ci.
12La trajectoire d’un objet, tel un outil de gestion doit donc à la fois permettre de :
- comprendre l’avènement de controverses issues de la rencontre d’un ensemble d’acteurs rendus perplexes par les transformations techniques et politiques simultanées induites par l’introduction programmée de cet objet et, concomitamment, s’assurer de la représentativité des débats ;
- dévoiler la compatibilité de cet objet avec les ensembles dans lesquels il s’insère, en les transformant au travers de la hiérarchisation, par compromis et arrangements, des arguments avancés, afin de comprendre la phase de stabilisation finale qui clos la discussion, révélant alors un nouveau monde commun et rendant l’objet réel et incontournable.
13Il faut ainsi saisir simultanément les causes des controverses (la médiation) et les raisons de leur fermeture (la purification). La purification renvoie donc au processus par lequel des acteurs, sur la base d’arguments d’indépendance, d’expertise ou d’autorité, mobilisent des éléments « purifiés », c’est-à-dire considérés comme indiscutables du fait de leurs fondements scientifiques/techniques ou politiques, qu’il est impossible de rediscuter sans les déconstruire totalement et, avec eux, les éléments de la vie en société qu’ils supportent. Le contexte social ou le déterminisme technique ressurgissent alors : ils sont mobilisés pour susciter l’adhésion d’acteurs confrontés au changement. Christensen et Skaerbaek (2010) montrent ainsi que des consultants intervenant lors d’une phase de changements dans des organisations publiques s’appuient sur ce mode de fonctionnement pour aligner les intérêts de l’ensemble des acteurs impliqués dans le projet.
14Dès lors, en accord avec Latour (1991, p. 74), à la pratique de purification, il convient d’ajouter les pratiques de médiation. L’objectif est alors de mettre en perspective la variation continue de l’objet depuis son avènement jusqu’à son essence. Il passe ainsi par des phases éphémères de stabilité jusqu’à ce que celui-ci soit enfin accepté (schéma 3).
Associer purification et médiation
Associer purification et médiation
15La suite de cet article vise à illustrer l’intérêt d’appliquer ce modèle dans l’étude de la trajectoire d’un outil de gestion.
2 – La méthodologie de recherche
16Un Conseil régional s’engage dans un projet d’instrumentation : développer un outil d’évaluation d’une politique publique, celle relative à l’emploi. A l’origine du projet, le Président du Conseil régional confie au contrôleur de gestion la création d’un groupe de travail dévoué à la création et l’implantation de l’outil. Cependant, après la stabilisation d’un premier outil, le Président fait volte face, refusant sa mise en place et décidant d’arrêter le projet. Mais le contrôleur de gestion n’abandonne pas. Il propose, un an après, une nouvelle version de l’outil, qui est acceptée par le Président. Du fait de la trajectoire sinueuse de l’outil, les données du cas ont été recueillies en deux temps.
17De la genèse du projet à la création de la première version de l’outil, les données ont été collectées par le biais d’une recherche intervention (David, 2002, Jönsson et Lukka, 2007) engagée en collaboration avec les services de contrôle de gestion de la Région. Les données proviennent de 18 entretiens individuels, 6 réunions collectives et une étude de la documentation interne. Toutefois, la volonté du Président de stopper ce projet avant l’implantation de l’outil a conduit à l’arrêt de la recherche-intervention mise en place. Il a donc été nécessaire d’adapter la méthodologie de recherche afin de pouvoir reconstruire a posteriori les mécanismes qui ont conduit au renouveau de l’outil. Ainsi, de la proposition d’une seconde version de l’outil à son implantation définitive, les données sont issues d’une part, d’une analyse de documents internes (compte-rendu de réunion de la cellule contrôle de gestion, une présentation, réalisée par le contrôleur, du second projet et de ses avancées) et d’autre part, d’entretiens menés avec le contrôleur de gestion. Si d’autres acteurs de la Région ont été contactés pour comprendre ce rebondissement (directeur adjoint et élus), ces derniers n’ont pas souhaité évoquer ce sujet. L’ensemble des entretiens a été retranscrit et analysé selon la méthodologie proposée par Savall et Zardet (2004).
18En synthèse, en adéquation avec les fondements du modèle de Latour (1991) présenté supra, la méthodologie mobilisée visait à explorer la compréhension du développement d’un outil en étudiant ses évolutions au travers de ses interactions avec les acteurs. Il s’agissait donc de mettre en évidence les controverses ayant émergé lors du processus de construction de l’outil (médiation) et, dans le même temps, de saisir leurs voies de résolution (purification).
3 – La construction d’un outil de gestion : entre ruptures et renaissance
19La trajectoire de l’outil est présentée dans cette partie, de son émergence à son abandon dans un premier temps, puis à son renouveau dans un second temps.
3.1 – L’engagement de la Région dans un nouveau projet : construire un outil d’évaluation de la politique publique
20Suite aux élections régionales de 2004, un nouveau président est élu. Parmi les grandes priorités qu’il définit, il souhaite développer des actions nouvelles en matière d’emploi. Celles-ci comprennent un dispositif qui s’adresse aux jeunes de 16 à 25 ans, prenant la forme de bourses attribuées pour l’aide à la création d’entreprises, aux actions de tutorat dans les entreprises de la région et aux développements des conventions pour l’éclosion de projets dans les secteurs de l’environnement et de l’éco-industrie. L’objectif affiché par la Région est de créer 5 000 emplois pendant la durée du mandat. En parallèle, le président souhaite un suivi au plus près des réalisations de cette politique. Pour atteindre cet objectif, il confie à la cellule de contrôle de gestion un nouveau projet : instrumentaliser le suivi et le rendu des réalisations en matière d’emplois.
3.2 – Une proposition du contrôleur de gestion : créer un système de tableaux de bord
21Les membres du service contrôle de gestion sont chargés de la mise en place opérationnelle du projet. Ils trouvent dans ce projet un moyen de développer et de compléter les outils de suivi existants. De plus, ils souhaitent que leur implication contribue au développement et au renforcement de la place de ce service au sein de la Région. Comme le souligne le chef du service, « l’outil peut permettre de positionner et d’ancrer le service de contrôle de gestion dans l’organigramme de la collectivité ». Outre les services de contrôle de gestion, de nombreux autres membres des services de la Région sont impliqués dans le processus de construction de l’outil.
22Les techniciens des services administratifs ont exprimé, après avoir eu connaissance du projet, un fort intérêt. Ils trouvent dans ce projet un moyen de s’assurer que les procédures appliquées sont en adéquation avec le dispositif mis en place par la Région : « actuellement, il nous manque un suivi plus précis du dossier » ; « Ici l’instruction consiste surtout à regarder si la forme est conforme, un outil qui irait dans ce sens serait satisfaisant » ; « l’enjeu pour nous serait de vérifier que le dossier reçu est bien éligible et qu’il peut s’insérer dans ce dispositif ».
23Si les responsables des services partagent cette vision, ils voient également l’outil comme un moyen de piloter le dispositif afin de réagir face à des possibilités de déviances vis-à-vis des objectifs fixés par le président : « notre objectif est l’évaluation du dispositif dans un an. Il nous faudra donc déterminer des indicateurs. L’objectif serait de rassurer la direction sur l’emploi des crédits » ; « l’intérêt du dispositif est de comprendre ses conséquences pour le citoyen et de nous adapter » ; « l’outil doit devenir un moyen de juger de l’équité territoriale du dispositif mais aussi son impact sur l’emploi en matière d’éco-industrie ».
24Enfin, le Directeur Général Adjoint (DGA) du fait de sa position d’intermédiaire entre les élus (qui définissent des orientations politiques) et les services administratifs (en charge de la mise en place des politiques publiques), a besoin d’outils de synthèse à destination des élus, lui permettant d’assurer la jonction entre les attentes exprimées et les réalisations concrètes. Il est donc fortement intéressé par le projet. De plus, il associe ce projet à un moyen d’innover et de montrer aux nouveaux élus son dynamisme et sa sensibilité en matière de gestion publique.
25Lors de la première réunion de travail, le contrôleur de gestion propose de formaliser un outil d’évaluation de la politique de l’emploi, qu’il associe à un « tableau de bord ». Pour lui, le terme de « tableau de bord » renvoie à une vision positive. Cet outil est un moyen de prendre en compte les différents besoins des acteurs et autorise une évaluation de la politique publique avec l’utilisation d’indicateurs riches et variés. Il est perçu comme le moyen idéal d’introduire de la réactivité dans les futures décisions concernant l’emploi. L’idée séduit aussi le DGA car il y trouve la formalisation d’un dispositif novateur, prisé dans le secteur privé, gage selon lui de la modernisation de la gestion de la Région. Egalement attirés par cette idée, les autres membres du groupe de travail s’accordent sur la pertinence de l’outil pour répondre à la demande du président : selon eux, le tableau de bord devient un moyen de mettre à disposition des élus de la Région des indicateurs synthétiques offrant une certaine réactivité.
26Toutefois, les techniciens souhaitent que l’outil garde une logique de contrôle : « l’idée serait de développer une base de données où le suivi financier serait intégré pour suivre l’évolution des versements » ; « dans la base de données que nous souhaitons créer, nous souhaiterions répertorier les informations essentielles sur les dossiers ». De même pour les responsables de service, l’outil doit également autoriser un « auto-contrôle » et une réactivité suffisante de l’action régionale : « l’outil devrait introduire un suivi plus régulier » ; « le développement d’un tableau de bord permettrait de maîtriser l’évolution de ce nouveau dispositif » ; « en ce qui me concerne, l’outil devrait me permettre de modifier mes actions afin d’atteindre les objectifs fixés par les élus ».
27Afin de concilier ces trois orientations, émerge alors un consensus, au sein du groupe de travail, autour d’un système de trois tableaux synthétiques permettant de répondre à ces différentes attentes.
3.3 – De la création à l’abandon de l’outil
28A la suite de ce consensus, le contrôleur de gestion définit le contenu des trois tableaux de bord. Lorsqu’il présente la version finalisée de l’outil aux membres du groupe de travail, le contrôleur de gestion met en exergue les liens existants entre les indicateurs et les besoins identifiés. L’outil est composé de trois niveaux de tableaux, comprenant chacun des indicateurs sous forme de chiffres, graphiques ou clignotants. Cette version emporte l’adhésion des membres du groupe de travail. A cet instant, l’aval politique concernant l’implantation de cet outil dans les différents services ne semble faire aucun doute.
29Pourtant, deux mois après cette première formalisation de l’outil, le DGA annonce aux membres du groupe de travail que ce projet n’a plus le soutien du président et qu’il est abandonné, à la demande de ce dernier. Officiellement, l’évolution des priorités politiques du président conduit à une réorientation des missions de la cellule contrôle de gestion : « notre président est toujours très intéressé par les outils de contrôle de gestion ; toutefois, il a été décidé que ces derniers devraient davantage s’intéresser à la maîtrise du coût des activités administratives ». Mais en aparté, le DGA rend compte également de craintes politiques face à d’éventuelles conséquences négatives en cas d’utilisation détournée d’un outil d’évaluation des politiques publiques. En effet, la mise en place d’un tel outil pourrait intéresser des acteurs externes, bien qu’ils ne soient pas directement impliqués dans la décision de le mettre en place, à l’instar des citoyens et de la Chambre Régionale des Comptes (CRC). Pour les citoyens, l’outil offrirait la possibilité de s’assurer de l’efficacité et de l’efficience de l’utilisation des deniers publics et d’apprécier la transparence de la gestion publique. Quant à la CRC, elle pourrait utiliser les données issues de l’outil dans sa mission d’examen de la qualité de la gestion de la Région.
30Si, un an plus tôt, le Président avait initié la démarche, il devient celui qui l’interrompt, remettant ainsi en cause le consensus trouvé autour de l’outil par les membres du groupe de travail.
3.4 – La renaissance de l’outil
31Malgré ce revers, qui marque l’arrêt « brutal » du projet et la dissolution du groupe de travail, le contrôleur de gestion n’abandonne pas. Un an plus tard, il propose une nouvelle version de l’outil. Cette nouvelle proposition prend la forme d’un seul et unique tableau. Le nouvel outil subit une double évolution :
- D’une part, la logique de pilotage de la politique publique est abandonnée. Plusieurs modifications majeures l’indiquent. Dans un premier temps, la diversité des indicateurs retenus pour favoriser un suivi et une évaluation plus pertinents du dispositif et ce, pour chaque niveau hiérarchique, est abandonnée au profit d’une information plus ciblée. Seuls deux indicateurs sont évalués : le nombre de personnes ayant bénéficié de l’aide de la Région et, parmi elles, le pourcentage de femmes. Ainsi, les indicateurs techniques tels que la répartition de l’aide par départements, les informations relatives au budget ou encore au public concerné par le dispositif, aspects politiques sensibles, n’apparaissent plus. Dans un second temps, il est décidé de ne pas fixer d’objectif aux indicateurs présents sur le tableau de bord. L’absence de ces objectifs dénature la fonction de pilotage initialement convoitée par les porteurs du projet.
- D’autre part, les modifications apportées sur le tableau de bord révèlent la volonté d’évaluer des indicateurs mis à disposition des parties prenantes de l’organisation. Ainsi, le tableau de bord est diffusé sur le site internet du Conseil régional dans un onglet intitulé : « transparence ». De plus, l’analyse des éléments de rhétorique mobilisés par le Président montre que ce dernier mobilise ces deux indicateurs pour illustrer les efforts qu’il mène sur cette politique publique.
32Comme l’indiquent les entretiens menés avec le contrôleur de gestion, la renaissance de l’outil s’explique par une simplification de l’outil et par une modification de ses finalités. Les indicateurs répondent aux besoins premiers des élus, en facilitant la communication des réalisations sur le thème de l’emploi et, dans le même temps, en favorisant la transparence des actions de la Région sur cette thématique, bien que celle-ci reste superficielle (du fait de la suppression d’objectifs chiffrés, il n’est plus possible d’évaluer la performance de la Région). Ce nouveau tableau de bord se positionne donc avant tout comme un instrument de communication pour les élus, à destination externe. Cet outil a successivement convaincu le DGA puis le président qui a choisi d’étendre ce tableau aux autres politiques régionales. En parallèle, les administratifs (techniciens et responsables de service) laissent de côté les attentes qu’ils avaient placées dans ce projet. S’ils ont conscience que la nouvelle version de l’outil ne recouvre plus les mêmes finalités que la première (réactivité, actualisation des indicateurs, court terme, vision d’une performance globale, etc.), celle-ci permet toutefois, selon eux, de sensibiliser les élus à la gestion.
Discussion
33En appliquant le modèle d’analyse exposée dans la partie théorique, le schéma 4 retrace la trajectoire de la première version de l’outil.
La trajectoire de la première version de l’outil
La trajectoire de la première version de l’outil
34Le point (A’) est le point de départ. Il fait référence au souhait du président de créer un outil d’évaluation des politiques publiques. Ce projet s’enfonce alors dans les méandres de la collectivité et se transforme en une nouvelle mission pour le contrôleur de gestion qui mobilise un groupe d’acteurs intéressés par la construction de cet outil (A).
35Une première controverse émerge (B) : quel type d’outil privilégier ? Pour le contrôleur de gestion, un tableau de bord, sur le modèle des pratiques du secteur privé, doit être créé. Ses arguments sont doubles : le succès de cette méthode dans les entreprises et le caractère novateur de cet outil pour l’organisation publique. Apparait ici un premier phénomène de purification : afin de résoudre cette controverse, le contrôleur de gestion en appelle à la fois à la transcendance de la technique (issue du succès de cette technique dans le secteur privé) et du social (sous couvert d’une quête de modernisme dans les collectivités locales), qui s’impose aux membres du groupe. Il est en effet impossible pour ces derniers de rouvrir facilement les « boîtes noires » mobilisées par le contrôleur de gestion sans un investissement important (sommes-nous sûrs que cet outil est réellement performant dans le secteur privé ? la quête de modernisme est-elle la seule alternative ? etc.). Le point B’ est la projection du point B. La proposition du contrôleur de gestion renforce le consensus des acteurs mobilisés : le tableau de bord doit permettre d’engager un pilotage actif de la politique régionale en matière d’emploi. En parallèle, une nouvelle collectivité locale apparaît où les tableaux de bord existent, sont nécessaires et deviennent des acteurs à part entière, maintenant incontournables (B’’).
36Une seconde controverse surgit relative à la finalité de l’outil (C). Deux visions de l’outil s’affrontent : un outil de pilotage centré uniquement sur l’évaluation versus un outil qui intègre des finalités de contrôle. Là encore, la résolution de cette controverse passe par un phénomène de purification (C’’) : les membres des services administratifs mobilisent l’argument de la bureaucratie. Ainsi, ils imposent leur vision au contrôleur de gestion en recourant au fonctionnement de leur organisation qui repose, avant tout, sur le respect des règles et des procédures.
37Après la nature et les finalités de l’outil, une troisième controverse apparait sur la forme du tableau de bord (D). Afin d’y répondre, le tableau de bord devient modulable entre les mains du contrôleur de gestion. Ses caractéristiques intrinsèques permettent de l’imaginer en fonction des besoins, tel est l’argument du contrôleur de gestion. Deux organisations n’appliqueront pas le même outil, même si elles appelleront cet outil un tableau de bord. A nouveau, on observe un phénomène de purification (D’’) : l’argument de la liberté conférée par l’outil s’impose aux membres du groupe de travail, incapables de le déconstruire facilement.
38L’analyse des arguments mobilisés par les acteurs pour résoudre les controverses sont uniquement de nature technique. Le volet politique semble « oublié », comme inexistant. Ainsi, les membres du groupe de travail redéfinissent le pôle technique, le rendent immanent, mais s’appuient, dans le même temps, sur la transcendance du pôle politique. Certes, cette séparation trouve son origine dans la dichotomie organisationnelle entre la dimension politique et la dimension technique qui prévaut dans les organisations publiques. Si cette séparation se justifie aussi bien du point de vue du partage des tâches que des responsabilités, elle renvoie toutefois la technique et la politique à des dimensions transcendantes, complémentaires mais qui ne se mélangent pas. Cette situation crée une césure entre :
- d’une part, la décision de développer un outil d’évaluation des politiques publiques : « Le politicien décide, le technicien dispose » ;
- et, d’autre part, la définition de ce qui est souhaitable du point de vue technique et non de ce qui est possible au regard des contraintes politiques : « Le technicien propose, le politicien décide ».
39Cette séparation laisse le pouvoir d’une sanction aux politiques, dont ils n’ont pas à se justifier, du fait même de l’allégeance déjà acceptée du technicien. Pourtant, le politique est dépassé par les controverses techniques. Elles le dominent, il ne les saisit pas, il ne les connaît pas (puisqu’elles sont cachées par la première version stabilisée qui lui est présentée). Il fait donc appel à des valeurs et des principes universels et généraux (l’autorité politique, le choix du décideur dont la légitimité est issu des citoyens qu’il représente et par lesquels il a été démocratiquement choisi), sans prise directe avec les faits. Ainsi, le Président recours à son tour à un phénomène de purification : « il faut connaître le coût des services pour bien les gérer », « l’évaluation des politiques publiques doit être maîtrisée ». Là encore, les techniciens ne peuvent facilement rejeter ses arguments : est-ce vrai qu’une bonne gestion publique nécessite une connaissance des coûts ? Les attentes des citoyens n’incluent-elles pas des besoins d’informations sur la performance de la collectivité ? Rouvrir les « boîtes noires » qu’il mobilise leur demanderait un investissement trop important, trop long, trop lourd.
40Dès lors, le refus d’un outil stabilisé et répondant aux objectifs initiaux, à savoir fournir une évaluation d’une politique publique, n’est pas surprenant : si les intérêts des techniciens sont représentés (par l’intermédiaire de leurs porte-parole représentés dans le groupe de travail), les élus sont « oubliés ». Seule la commande initiale est conservée et les intérêts politiques sont écartés.
41Mû par un besoin de légitimité, le contrôleur de gestion souhaite poursuivre le projet (E) : il transforme la première version afin de la mettre en correspondance avec « les attentes » des élus ou, tout du moins, afin de gommer les craintes qu’ils ont associées à cet outil. Le schéma 5 synthétise la trajectoire de la seconde version de l’outil.
La trajectoire de la seconde version de l’outil
La trajectoire de la seconde version de l’outil
42Pour ce faire, le contrôleur de gestion apporte trois réponses :
- l’outil doit être uniquement à destination des élus. Les administratifs assureront le reporting nécessaire mais ne trouveront plus dans l’outil les objectifs de suivi et de contrôle précédemment imaginés (F) ;
- il n’est pas possible d’offrir à d’éventuels acteurs externes une vision trop précise des réalisations au travers de cet outil. Une seule solution : les objectifs à atteindre sont supprimés (G) ;
- il faut simplifier l’outil (une purification, au sens premier du terme). Il opte pour des indicateurs moins techniques, plus synthétiques (H).
43En quelques clics, il supprime les avancées du groupe de travail et revient à l’approche initiale du pôle technique. Il n’est plus question de tableau de bord de suivi ou de contrôle, mais plutôt d’un outil de rendu des réalisations, sans comparaison avec des objectifs chiffrés clairement définis à priori. Mais le terme « tableau de bord » perdure. L’enjeu politique de modernisation est bien présent, comme l’argumente le contrôleur de gestion en s’appuyant sur une étude comparative menée par ces services sur les outils de pilotage utilisés dans les régions françaises. Ce faisant, il transforme le pôle politique : les élus disposent d’outils de communication des réalisations des politiques publiques qu’ils définissent. La nouvelle version de l’outil, relative à la politique de l’emploi est présentée au Président. Séduit, celui-ci souhaite étendre l’outil à d’autres politiques publiques.
44La trajectoire de la seconde version de l’outil montre que les aspects techniques ne sont plus prépondérants : seule la redéfinition du pôle politique est visée, aux dépends du pôle technique. Il apparaît ainsi, au regard des schémas 4 et 5, que la trajectoire de l’outil a suivi une médiation symétrique. Néanmoins, cette dernière n’est pas simultanée. Il n’y a pas de prise en compte du politique dans la première version de l’outil et, de la même façon, les objectifs techniques de l’outil sont perdus de vue dans la seconde version. Ce constat s’explique par la nature des phases de purification engagées : uniquement techniques dans le premier cas, uniquement politiques dans le second cas. Dès lors, le succès de la seconde version, en considérant uniquement son acceptation politique, peut aussi être vu comme son échec en prenant en compte la transformation radicale nécessaire des objectifs initiaux et la perte de vue de toute logique évaluative. Au regard de cette étude, pour qu’un outil soit techniquement et politiquement viable, le processus de médiation doit être symétrique et simultané.
Conclusion
45En cherchant à mettre en évidence la nécessité de ne plus traiter uniquement les phénomènes de traduction, mais de les associer au processus de purification, cet article visait deux objectifs :
- proposer une approche alternative de l’étude de la trajectoire d’un outil de gestion, à partir d’un modèle d’analyse s’appuyant simultanément sur une approche processuelle (l’innovation en train de se faire) et une approche statique fondée sur l’analyse des phénomènes de purification qui ont permis la résolution des controverses qui jalonnent « l’itinéraire » d’un outil, de l’idée initiale à sa formalisation. L’étude se focalise ainsi sur la nature des arguments mobilisés par les acteurs et leur recours à des phénomènes d’autorité, à des formes « pures » qui emportent l’adhésion des acteurs mobilisés ;
- comprendre la trajectoire d’un outil d’évaluation des politiques publiques dans une région française et, ce faisant, proposer un regard sur les difficultés auxquelles se heurte cette problématique dans une collectivité locale française.
46Quatre apports se dégagent de cette étude. Tout d’abord, la combinaison des concepts de purification et de traduction, en accord avec Latour (1991), constitue un modèle unificateur d’approches opposées qu’il est possible d’appliquer à l’étude de la trajectoire des outils de gestion. Ensuite, ce cas met en évidence, au travers de l’étude des controverses qui ont marqué le développement de l’outil ainsi que de l’analyse des mécanismes de purification qui ont permis de les dépasser, qu’un outil de gestion est modelé par l’environnement dans lequel il s’insère, au travers des arguments avancés par les acteurs qui façonnent l’outil (par le biais des mécanismes de purification), mais qu’il contribue aussi à la définition de « ce même » environnement. Par ailleurs, cette étude s’insère dans la continuité des travaux de Berglund et Werr (2000) et Christensen et Skaerbaek (2010) qui mettent en évidence le rôle de « purificateur » des consultants lors du processus de diffusion des innovations. Mais lorsqu’aucun consultant n’est présent, la question se pose de l’identité de celui ou ceux qui assurent ce rôle de purification. L’article montre que les techniciens mais aussi les élus endossent ce rôle. Enfin, sur le plan managérial, cette étude insiste sur la nécessité d’associer les élus au développement d’outils techniques, déterminant essentiel d’une médiation symétrique simultanée et, avec elle, du succès politico-technique d’un outil de gestion.
47Le recours à l’approche proposée par Latour en 1991 met en lumière l’intérêt de ce modèle pour étudier la trajectoire des outils de gestion et, plus largement, pour prolonger et renouveler l’analyse de la trajectoire des outils de gestion en explorant des travaux de Latour moins utilisés.
Bibliographie
Références bibliographiques
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Notes
-
[1]
Voir par exemple l’ouvrage collectif coordonné par J-C. Moisdon (1997).
-
[2]
Latour (2006, p. 58) précise le sens qu’il donne au concept d’intermédiaire : « un intermédiaire désigne, dans mon vocabulaire, ce qui véhicule du sens ou de la force sans transformation : définir ses entrées, ses inputs suffit à définir ses sorties, ses outputs. A toutes fins utiles, on peut considérer un intermédiaire non seulement comme une boîte noire, mais comme une boîte noire qui compte pour un, même si elle se compose intérieurement de plusieurs parties ».