Introduction
1 Métropolisation et innovation sont, de plus en plus, les mots-clefs qui commandent les débats politiques, structurent les orientations du développement territorial et technologique, plus généralement ce qu’on peut appeler le nouveau développement régional (GLAESER et KOHLHASE 2004 ; SCOTT, 2001). Ces mots-clefs sont au cœur des organisations urbaines, en matière de formes, de centralité, de fonctions d’attraction et de diffusion. Ils marquent aussi les choix de localisation et des stratégies des groupes et plus généralement des activités. Il s’agit de comprendre, d’orienter les mécanismes de polarisation, de sélectivité des activités dans des lieux d’innovation, plus généralement des centres de décision.
2 On est aussi directement confronté aux fondements et aux modalités retenus et mis en œuvre pour les pôles de compétitivité, « combinaison, sur un espace géographique donné, d’entreprises, de centres de formation et d’unités de recherche publiques ou privées, engagées dans une démarche partenariale destinée à dégager des synergies autour de projets innovants » (DATAR, 2005, p. 2). On est en quête d’innovations, de partenariats sur un espace géographique donné, formule lapidaire et insuffisante : l’innovation et la métropolisation ne naissent pas, ne se développement pas n’importe où et il ne suffit pas non plus de redécouvrir les vertus que l’on critiquait hier des pôles et de la polarisation ni de vanter les clusters avant qu’on en découvre les limites ou les conditions (KARLSSON et al., 2005 ; BECCATINI, 2004).
3 Les enjeux liés à la métropolisation et à l’innovation sont avec leur modernité et leur actualité au cœur même de Cinquante ans de Science Régionale (FLORAX et PLANE, 2005) avec des déclinaisons et des accents variables suivant les périodes, des attentions portées plutôt à la localisation et aux fonctions métropolitaines ou plutôt à la géographie industrielle et à celle de l’innovation : on est au cœur des « global city regions » d’A. SCOTT (2001).
4 Les enjeux du débat métropolisation et innovation retrouvent ainsi ceux qui concernent de manière volontairement extrême l’Économie Urbaine et l’Économie de l’Innovation. Ils en sont des illustrations et tentent de proposer des rapprochements sur les analyses relatives aux externalités (pas seulement positives qui furent longtemps privilégiées) et aux économies d’agglomération et plus récemment aux clusters, forme rédemptrice des pôles, retrouvées par la nouvelle géographie industrielle, l’économie géographique, (MARTIN et SUNLEY, 1996 ; FUJITA et KRUGMAN, 2004 ; CHESHIRE et MALECKI, 2004). GLAESER et KOHLHASE résument : « les villes, en fin de compte, sont seulement de la proximité, .... l’absence d’espace physique entre les populations et les entreprises » (2004, p. 224).
5 On est ainsi confronté à deux types de paradigmes qui, partiellement nourris des mêmes pères fondateurs (ISARD, MARSHALL, PERROUX, AYDALOT, RICHARDSON...) se sont autour et au nom de la Science Régionale, développés légitimement et efficacement, se côtoyant plus que ne se rencontrant (BELLET et L’HARMET, 1999) : une lecture en termes d’Économie Urbaine par laquelle nous analysons la métropolisation, l’approche par l’Économie Industrielle et sa version déclinée d’Economie de la Proximité qui a mis en avant la géographie de l’innovation, les deux entrées se fondant sur le constat inéluctable d’une tendance forte, permanente et s’auto-renforçant à la concentration de lieux et de forces de centralité (FUJITA et KRUGMAN, 2004, pp. 140, 160-161).
6 Le premier paradigme porte attention aux processus de transformation, aux formes des agglomérations géographiques urbaines, il concerne leurs morphologies, leurs étalements, leurs fonctions et leurs quêtes d’urbanité. Il insiste sur la localisation des fonctions urbaines et métropolitaines et sur les facteurs d’attraction des villes, notamment les emplois métropolitains supérieurs (JULIEN, 1994 ; FNAU-DATAR, 2004). Si ces mécanismes constituent encore « une énigme » (BOURDEAU-LEPAGE et HURIOT, 2004), les analyses, qui cependant veulent souligner la mise à jour des processus, souffrent encore d’être trop marquées par des approches de critériologie positive ou de benchmarking : quels types d’activités et d’attributs faudrait-il disposer pour qu’une ville d’un certain type puisse bénéficier des mécanismes positifs liés à la métropolisation ? Les technologies, les activités de R & D, par exemple, seraient ainsi, dans cette lecture, évidemment ou naturellement localisées dans certains types d’agglomérations. Prolongeant la philosophie de la théorie de la base, ces activités nouvelles, comme celles liées à la culture et plus généralement aux talents (FLORIDA, 2002) permettent une caractérisation typologique indispensable mais insuffisamment explicative : hier l’industrie, aujourd’hui les services, la culture, demain les TIC ? Les villes ne sauraient être seulement perçues comme des « îles flottantes » (KRUGMAN, 2004, p. 161) dans un archipel technologique.
7 Le second paradigme, défini par la formule générale de la géographie de l’innovation (FELDMAN et MASSARD, 2002 ; FELDMAN et AUDRETSCH 2000 ; CHESHIRE et MALECKI, 2004) plus généralement dans des relectures des systèmes économiques au niveau mondial (FRIEDMAN, 2005 ; BOUBA-OLGA, 2005), s’inscrit dans les travaux d’économie industrielle et cherche à expliquer les conditions d’émergence, la détermination, le pilotage, la résilience de certaines fonctions technologiques ainsi que les liens que la R & D peut avoir avec le développement macro-économique régional et la constitution de clusters, de districts industriels ou de SPL. Chacun de ces paradigmes a développé ses propres instruments, affiné ses concepts spécifiques dérivés d’une philosophie originale souvent proche : externalités, économie d’agglomération, centralité et polycentrisme, partenariat et réseaux, concurrence mondialisée et ancrage territorial, coopération, coproduction, solidarité, confiance et loyauté, identité... On est confronté à ce constat que « tout espace géographique fait périodiquement l’objet d’une intégration par un nouvel organisateur, comme si la centralisation et la concentration des ressources et des richesses se faisaient nécessairement en faveur de certains lieux d’élection de l’accumulation » (CARLUER, 2004, p. 28). Mais quels sont ces nouveaux « organisateurs » qui favorisent ces lieux d’élection ? Les deux paradigmes se retrouveraient alors sur les thématiques des réseaux d’innovation, de la connaissance, de la finance, de pouvoir, en supposant implicitement ou non l’existence de la ville comme système productif, en même temps support et acteur.
8 Deux séries de préoccupations peuvent marquer les enjeux du nouveau débat : les fondements de la relation ville-innovation via les externalités, les territoires de la relation ville-industries : les clusties.
- 1 - Les fondements de la relation ville-innovation : des externalités technologiques aux externalités métropolitaines
1.1. Un effet de myopie ?
9 L’impact des milieux métropolitains sur la production d’innovations fait l’objet d’une attention croissante, liée à une lecture privilégiant le rôle des externalités dynamiques de connaissance. La prise en compte du caractère tacite de la connaissance, qui en interdit le transfert entre des agents sans processus préalable de codification, est ainsi le plus souvent l’entrée privilégiée des analyses du rapport espace/innovation (LAPOINTE, 2003 ; NIJKAMP, 2004). Le caractère localisé de ces interactions permet alors soit de faire l’économie de la codification, soit d’en diminuer le coût (CARRINCAZEAUX, 2000). Sur ces bases, une importante littérature s’est développée pour valider l’hypothèse d’un impact significatif de la distance sur l’intensité des externalités technologiques, notamment en matière de recherche et développement (AUDRETSCH, 2002 ; JAFFE et al., 1993).
10 Si la proximité géographique favorise les externalités de connaissance, elles-mêmes à la base des processus endogènes de croissance économique, alors les villes sont le lieu par excellence de génération et éventuellement de diffusion de tels flux, et par conséquent de croissance.
« It seems to me that the « force » we need to postulate to account for the central role of cities in economic life is of exactly the same character as the « external human capital » I have postulated as a force to account for certain features of aggregate development » (LUCAS, 1988, pp. 38-39).
12 Si l’on doit se réjouir de l’intérêt croissant porté au rôle économique des villes-métropoles en matière d’innovation et de compétitivité, on doit également reconnaître que ce renouveau s’effectue principalement à travers la mobilisation des concepts et des schémas d’analyse du paradigme de « la géographie de l’innovation ». Le rôle central des flux locaux de connaissances, transitant par la médiation des interactions de face-à-face, dans la stimulation de la croissance et des capacités d’innovation locales est très largement admis, et s’appuie sur un ensemble croissant d’études empiriques convergentes (ACS, 2002 ; RAINES, 2002). Pourtant, en raison des difficultés persistantes à identifier et mesurer directement les flux locaux de connaissances, une part importante de cette littérature reste liée à une acception vague des effets de débordement technologique (BRESHI et LISSONI, 2001), renvoyant à « l’atmosphère industrielle » marshallienne : « the buzz of urban life » (STORPER et VENABLES, 2004), que l’on pourrait aussi entendre comme atmosphère urbaine. LAPOINTE (2003) souligne et explicite les liens et les modalités qui interagissent entre la croissance de certaines métropoles et ce qu’il appelle économie du savoir ou du haut savoir.
13 Au-delà de cette hypothèse générique, les vecteurs opérationnels par lesquels les interactions de face-à-face renforcent les capacités locales d’innovation sont rarement précisés et/ou explorés (MCCANN et SIMONEN, 2005). Le rôle respectif des effets d’intensification de la concurrence localisée (PORTER, 1990), des transferts de savoirs tacites entre firmes, et du développement des collaborations localisées (SCOTT, 1988) est, par exemple, rarement clarifié. De même, si les travaux d’économie urbaine privilégient l’hypothèse selon laquelle la concentration procure un potentiel d’interactions interindividuelles plus diversifié (STORPER et VENABLES, 2004), d’autres travaux soulignent le caractère plus stratégique du renforcement des interactions avec un nombre très limité de partenaires, notamment dans les collaborations en R & D (GORDON et MCCANN, 2005). L’échelle spatiale de déploiement de ces externalités est, en outre, appréciée de manière très variable dans la littérature : si l’échelle des aires urbaines est de plus en plus souvent retenue (ACS, 2002 ; FELDMAN et AUDRETSCH, 1999 ; GROSSETTI, 2004) de nombreux travaux postulent et/ou identifient des effets de débordements régionaux, voire nationaux, certes mais à partir de lieux centraux que l’on oublie même de citer géographiquement.
14 Plus généralement, les travaux conduits au sein de l’École de la Proximité tendent à relativiser largement l’importance de la contrainte de proximité géographique dans le transfert de connaissances complexes ou la gestion des collaborations scientifiques et technologiques (GROSSETI et BES, 2001 ; MCCANN et SHEFER, 2004 ; RALLET et TORRE, 2005). Ils privilégient de plus en plus les approches en termes d’encastrement ou de réseaux socio-économiques (GROSSETI, 2004). Le dépassement de l’économie a-spatiale pour souligner une « économie ancrée » s’arrête toutefois régulièrement à une vague référence territoriale (PECQUEUR, 2006, p. 29) ou spatiale (MCCANN et SHEFER, 2004).
15 Par souci de cohérence, notamment analytique, il convient donc de mieux articuler les caractéristiques les mieux établies de la géographie de l’innovation et les spécificités des environnements métropolitains. À cet égard, l’économie de la croissance urbaine et de la métropolisation offre une grille d’analyse privilégiée. La métropolisation s’identifie à l’ensemble des processus qui concentrent en quelques ensembles urbains les fonctions stratégiques classiques de commandement, de contrôle, de coordination, de création de valeurs et de codes (LACOUR et PUISSANT, 1999) auxquelles il faut ajouter celles de « connexion et de collaboration » (FRIEDMAN, 2005, p. 201). Ces fonctions stratégiques sont liées à la gestion d’activités économiques complexes, de portée mondiale ou globale (HURIOT et BOURDEAU-LEPAGE, 2005 ; SASSEN, 1991). Ces processus de concentration et de sélectivité métropolitaines sont portés par un ensemble d’externalités métropolitaines positives, renvoyant aux effets de masse critique liés aux infrastructures, au partage d’inputs et de services spécialisés, de même qu’à l’approfondissement de la division du travail et aux effets d’appariement sur le marché du travail (MAY, 1997 ; DURANTON et PUGA, 2004). L’ensemble de ces mécanismes permet d’analyser les facteurs spécifiques d’attractivité métropolitaine, et, en particulier, leur impact sur la production d’innovations.
16 Un certain nombre de travaux se sont ainsi orientés vers l’analyse de la géographie de la « créativité » (FLORIDA, 2001 ; ANDERSSON et al., 2005 ; FRIEDMAN, 2005 ; BOUBA-OLGA, 2005) ou de l’entrepreneuriat (ACS et ARMINGTON 2004). Ces approches s’attachent davantage aux spécificités des milieux locaux ou métropolitains permettant de stimuler la production d’innovations et la création d’entreprises innovantes. J. SIMMIE (2002 ; 2004) se livre à une critique systématique de la notion de cluster chez PORTER en soulignant l’importance des collaborations/interactions globales pour les firmes innovantes, les métropoles étant le lieu privilégié de gestion de ce type d’interactions. De même, le rôle important des transferts de connaissances induits par la mobilité des salariés est souligné par plusieurs études (ALMEIDA et KOGUT, 1999 ; MCCANN et SIMONEN, 2005). L’analyse du rôle des marchés du travail (notamment métropolitains) dans la diffusion localisée des connaissances et des compétences constitue ainsi une alternative crédible à la thèse des interactions interfirmes localisées.
17 Cette prépondérance de la référence aux effets de débordement technologique s’incarne dans deux ensembles d’analyses : l’un portant sur l’élucidation des rapports entre la croissance des villes et l’accumulation de capital humain (1.2.), l’autre sur « la préférence pour la diversité » des activités intensives en connaissances (1.3.). Dans chaque cas, on souhaite souligner les apports de cette lecture par les externalités dynamiques de connaissance, mais aussi la fragilité et le caractère partiel des démonstrations apportées, la référence aux « externalités métropolitaines » permettant à tout le moins de compléter l’argumentation. Il ne s’agit pas de contester – bien au contraire – l’importance de ces deux processus fondamentaux liés à l’accumulation de capital humain et à la diversité au sein des métropoles, mais de montrer que la référence à la métropolisation et aux externalités métropolitaines demeure indispensable pour en cerner pleinement les fondements.
1.2. Villes et accumulation de capital humain
18 L’hypothèse d’un lien entre concentration urbaine et accumulation de capital humain est fondée sur l’existence d’externalités dynamiques d’apprentissage sans oublier les fondements classiques de la ville créatrice et dispensatrice des richesses intellectuelles et scientifiques : il est peut-être moins nouveau qu’il y semble de parler de laboratoires de talents. Les individus acquièrent une partie de leurs compétences par le truchement des interactions localisées avec d’autres individus. Dès lors, une augmentation du niveau de capital humain dans une ville devrait conduire à une intensification des processus d’apprentissage, entraînant donc une augmentation générale de la productivité, des salaires et des revenus, dont on trouverait une confirmation dans la corrélation entre taille urbaine et niveau des salaires. L’accroissement de capital humain qu’un agent (firme ou salarié) est susceptible d’obtenir au cours d’une période dans une ville est donc une fonction croissante du stock total de capital humain de la ville considérée. Cette hypothèse est à la base des récents travaux s’efforçant de modéliser la croissance des villes. GLAESER (1997) propose ainsi un modèle où la probabilité pour un individu de voir son niveau de compétences s’accroître augmente avec le nombre d’interactions auxquelles il est susceptible de participer, ainsi qu’avec la proportion d’individus plus qualifiés que lui. De même, dans l’approche proposée par EATON et ECKSTEIN (1997), l’augmentation individuelle de capital humain est une fonction croissante du stock de capital humain de l’ensemble de la ville. Le modèle de BLACK et HENDERSON (1999) est fondé sur un mécanisme de nature similaire.
19 Ces travaux permettent d’énoncer quelques « conjectures convergentes ». En premier lieu, une intensification de la demande d’accumulation de capital humain a pour conséquence, dans le modèle de GLAESER, d’accroître la taille des villes. En second lieu, l’importance relative du capital humain étant une fonction croissante de la taille urbaine, l’efficacité des processus d’apprentissage y est plus grande. En dernier lieu, l’accroissement de la productivité du travail, et donc des salaires moyens, sera aussi une fonction croissante de la taille des villes.
20 L’existence d’externalités dynamiques d’apprentissage ne conduit pas nécessairement à une divergence des rythmes de croissance des différentes tailles de villes, c’est-à-dire d’une concentration de la croissance dans les plus grands ensembles urbains. EATON et ECKSTEIN (1997) montrent que l’existence d’un tel mécanisme conduit à une croissance parallèle des différentes tailles de villes. Les forces de rappel traditionnelles (congestion et augmentation des valeurs foncières) limitent, en effet, l’attractivité des grandes métropoles. L’existence d’un processus endogène d’accumulation du capital humain au sein des villes reste donc compatible avec la stabilité des distributions rang-taille. Par contre, et conformément à la conclusion de GLAESER, une modification des conditions d’accumulation du capital humain est susceptible de modifier, de façon structurelle, la taille relative des villes.
21 On doit à RAUCH (1993) l’une des premières études approfondies sur le sujet. En supposant exogène le niveau moyen de formation, il identifie, sur un échantillon de 237 villes américaines, un effet significatif des externalités d’apprentissage sur le niveau des salaires en 1980. En utilisant la même méthode, PERI (1998) aboutit à des résultats similaires. GLAESER et MARE (1994) montrent notamment que les salariés arrivant dans une ville ne connaissent pas d’augmentation immédiate de leurs rémunérations, contrairement à ce que prévoient les analyses en termes d’externalités statiques. Par contre, ils connaissent une augmentation de leur salaire dans les cinq années suivantes d’autant plus rapide que la ville est de taille importante.
22 CICCONE et PERI (2002) montrent, toutefois, que les tests fondés sur la mise en relation du niveau de capital humain des villes avec la prime de salaires qu’on y observe sont, en vérité, fondés sur une hypothèse simplificatrice : le test n’est valide que si l’on suppose que les salariés de différents niveaux de formation sont parfaitement substituables au sein des processus productifs. Dans le cas contraire, la catégorie de tests précédente devient doublement déficiente : elle peut conduire à détecter des externalités dynamiques positives aussi bien que négatives ; elle peut surtout conduire à identifier une source d’externalités même si les salaires reflètent parfaitement le produit social marginal, c’est-à-dire en l’absence d’externalités.
23 Plusieurs études proposent, par ailleurs, des principes explicatifs alternatifs pour rendre compte du rôle croissant des villes dans l’accumulation de capital humain. En s’appuyant sur le modèle d’ACEMOGLU (1996), PERI (1998) soutient que l’effet significatif, identifié dans les tests précédents, du niveau de formation moyen sur la productivité et les salaires urbains, peut être le résultat d’externalités sans rapport avec les processus d’apprentissage et d’acquisition de connaissances. Si la forte qualification de la main-d’œuvre et l’accumulation de capital physique sont complémentaires, l’augmentation du niveau de formation moyen dans une ville, peut inciter les firmes à investir davantage en capital, ce qui aura pour effet d’augmenter la productivité du travail dans son ensemble. Les investigations conduites sur 236 villes américaines sur la période 1980-1990 le conduisent à rejeter le postulat des externalités d’apprentissage au bénéfice de cette dernière hypothèse.
24 La corrélation entre niveau initial de formation et rythme d’accumulation du capital humain est confirmée, sur un échantillon de plus de 300 aires métropolitaines américaines, par l’étude de BERRY et GLAESER (2005). Si ces derniers mettent en évidence une très nette augmentation de cette corrélation durant les années 1990, ils proposent une interprétation originale de ce phénomène de concentration cumulative du capital humain. Deux hypothèses fondent leur argumentation. La première tient à ce qu’une partie importante des créations d’emplois dans une ville est le fait d’entrepreneurs créant leur entreprise dans leur ville de résidence. La seconde hypothèse est relative aux caractéristiques des créateurs d’entreprises et de la demande de travail qu’ils induisent : l’intensification du caractère cumulatif de l’accumulation du capital humain au sein de certaines villes tiendrait à ce que les créateurs de nouvelles firmes sont de plus en plus détenteurs d’une formation élevée, et recrutent majoritairement des salariés ayant un niveau de formation similaire. Dans cette configuration, un niveau moyen de formation initiale élevé engendre, par la création de nouvelles firmes, une intensification de la demande de travail qualifié, elle-même génératrice d’une augmentation des créations d’entreprises...
25 Les données proposées par BERRY et GLAESER valident, en partie, cette hypothèse : la corrélation entre le niveau de formation des « managers » et des salariés au sein de chaque secteur d’activités a significativement augmenté aux États-Unis, durant ces trente dernières années. Le modèle proposé par BERRY et GLAESER pour traduire ce jeu d’hypothèses prévoit, dans la configuration décrite, une augmentation des salaires des individus fortement qualifiés d’autant plus rapide que le niveau moyen de formation est élevé, sans qu’aucune externalité d’apprentissage liée aux interactions de face-à-face ne soit introduite. De manière générale, « density and education go together » (GLAESER et KOHLHASE, 2004, p. 223).
26 L’étude de CHARLOT et DURANTON (2004) est une des rares contributions permettant d’apprécier directement la participation des externalités de communication entre salariés aux économies d’agglomération liées au capital humain. Leurs résultats, obtenus sur un échantillon d’aires urbaines françaises, permettent d’attribuer environ 22 % de l’impact de la taille urbaine et du niveau de capital humain sur le niveau des salaires à ce type d’externalités. Les facteurs liés aux externalités métropolitaines conservant par conséquent un large pouvoir explicatif.
27 De cette revue rapide de quelques contributions récentes, il ressort que si la relation entre la taille des villes et le niveau de capital humain ne fait guère débat, les logiques sous-jacentes restent encore mal explicitées. La littérature privilégie une lecture de la relation entre ville et capital humain fondée sur les externalités d’apprentissage, ignorant d’autres vecteurs de rendements croissants du capital humain liés aux externalités « métropolitaines » : appariement sur le marché du travail, approfondissement de la division du travail, augmentation de l’offre de services spécialisés aux entreprises, etc. (HELSLEY et STRANGE, 1990 ; MAY, 1997).
1.3. Les externalités dynamiques liées à la diversité métropolitaine
28 Au-delà des travaux visant à établir la sensibilité à la distance des externalités technologiques, il s’agit de savoir, dans le contexte urbain, si les firmes tirent plutôt avantage de la spécialisation de la ville dans leur industrie ou de la diversité économique de cette dernière. Ce débat réactive évidemment l’opposition plus ancienne entre économies de localisation et d’urbanisation, et plus généralement l’opposition entre diversité et spécialisation (LACOUR, 1999 ; QUIGLEY, 1998). L’analyse reste ici toutefois limitée aux seules externalités dynamiques transitant par les flux locaux d’information.
29 GLAESER et al. (1992) ainsi que HENDERSON et al. (1995) opposent deux types d’externalités dynamiques, bien connues aujourd’hui : les externalités de type M. A. R. (MARSHALL-ARROW-ROMER), qui désignent des effets de débordement technologique entre firmes d’une même industrie et les externalités de type JACOBS (1969) qui font des externalités interindustrielles liées à la diversité des industries localisées dans les grandes aires urbaines la source principale de l’innovation et de la croissance.
30 Dans chacune de ces études, les auteurs se sont efforcés de déterminer si la croissance de l’emploi de différents secteurs industriels était davantage liée à la concentration de cette industrie dans la ville ou, au contraire, à la diversité économique urbaine.
31 GLAESER et al. concluent que la dynamique de l’emploi sectoriel est surtout due aux externalités de type JACOBS. HENDERSON et al. identifient deux cas de figure : la croissance de l’emploi dans les industries « mûres » n’est sensible qu’aux externalités type MAR ; pour les industries high tech, la croissance de l’emploi apparaît sensible aux deux types d’externalités dynamiques.
32 De manière indirecte, la spécificité des industries high tech, davantage sensibles au niveau de diversité des milieux métropolitains, renvoie à la capacité de ces milieux à favoriser les processus innovateurs. S’inspirant d’une logique semblable, mais explicitement centrée sur la production d’innovations, FELDMAN et AUDRETSCH (1999) analysent l’influence de trois caractéristiques des régions métropolitaines US sur la production d’innovations : le degré de spécialisation de la ville ; le nombre d’industries partageant une même base de connaissances ; le degré de concurrence locale. Leurs résultats indiquent une supériorité très nette des structures diversifiées dans la production d’innovations. Des conclusions similaires sont obtenues par ACS (2002), MASSARD et RIOU (2002) et ANDERSSON, QUIGLEY et WILHELMSSON (2005) respectivement aux États-Unis, en France et en Suède. CARLINO et al. (2001) établissent une relation significative entre le niveau de densité de l’emploi au sein des zones métropolitaines et la production de brevets, relation qu’ils interprètent dans le sens d’une prime à la diversité des milieux métropolitains les plus denses.
33 Ces résultats sont assez conformes à l’idée d’un cycle de vie spatial des industries (VERNON, 1960) : les industries naissent au cœur des plus grandes villes, « nursery cities » (DURANTON et PUGA, 2001), en bénéficiant des externalités de type JACOBS mais peuvent par la suite bénéficier des externalités de type MAR dans des villes spécialisées de taille plus réduite.
34 AUDRETSCH et FELDMAN (1996), en proposant une classification de 210 secteurs selon quatre phases du cycle de vie des industries, mettent en évidence une propension à la concentration spatiale plus forte en phase d’émergence. Le degré de nouveauté des connaissances (encastrées) impliquées demeure toutefois un déterminant essentiel de la propension au regroupement spatial, quelle que soit la phase du cycle de vie. D’autres sources de connaissances externes, telle que la recherche universitaire, permettent également d’expliquer la propension à la concentration dans les phases d’émergence.
35 De ces travaux se dégage une présomption nette de supériorité des milieux métropolitains diversifiés dans la production d’innovations. Les externalités de diversité dynamiques liées aux effets de débordement technologique seraient ainsi l’instrument privilégié d’une caractérisation des métropoles comme « incubateurs d’innovation ». Toutefois, on doit reconnaître que, sur la base de ce concept tout au moins, cette démonstration reste fragile et incomplète, avec un risque de confusion difficile à lever entre externalités statiques et dynamiques.
36 Les résultats obtenus par GLAESER et al. (1992) ainsi que HENDERSON et al. (1995) peuvent être interprétés comme la persistance au cours du temps d’externalités statiques ou plus largement de l’ensemble des attributs de localisation spécifiques à une ville. C’est aussi l’argumentation de QUIGLEY (1998) qui note qu’à l’exception des économies d’échelle, l’ensemble des facteurs de croissance économique associés à la taille urbaine (partage d’inputs spécialisés, réduction des coûts de transaction et économies associées à l’application de la loi des grands nombres) augmente aussi avec le niveau de diversité économique des villes.
37 Plusieurs études récentes suggèrent d’ailleurs que la présence de services aux entreprises et plus généralement des externalités statiques liées à la concentration d’entreprises technologiques seraient largement responsables des performances observées des entreprises innovatrices (FELDMAN, 1994 ; VARGA, 2000). On retrouve d’ailleurs, au moins partiellement, les conclusions de SAXENIAN (1994) concernant le rôle du milieu entrepreneurial et des services à la production dans la réussite de la Silicon Valley, par comparaison avec la Route 128.
38 Si l’impact de la diversité des milieux métropolitains sur la localisation des activités productrices d’innovation semble bien établi, l’interprétation dominante en termes d’externalités de connaissance dynamiques reste contestable, du moins à ce niveau de généralité. La concentration des fonctions supérieures de commandement, de contrôle et d’intermédiation propre à la dynamique de métropolisation (LACOUR et PUISSANT, 1999), de même que les dotations en infrastructures permettant d’assurer la connexion aux grands réseaux métropolitains sont tout autant susceptibles de rendre compte de l’impact de la diversité urbaine sur la production d’innovations.
- 2 - Les territoires de la relation ville-industrie : les clusties
39 La ville trop souvent est évoquée de manière allusive dans les travaux liés à l’économie géographique, à l’économie industrielle ou encore à l’économie de l’innovation ou de la finance : au pire comme seulement lieu de référence ou d’attribution de données (brevets, sièges sociaux...), au mieux ( ?) comme espace géo-institutionnel ou politique aujourd’hui évoqué par la thématique de la gouvernance métropolitaine. Mais on ignore alors, on occulte en partie, « l’atmosphère urbaine », la capacité de la ville à révéler, cristalliser les facteurs de développement, ceux aussi de la ségrégation : comment certaines villes constituent des chaînes de valeurs qu’évoquent indirectement POLENSKE et EWINGS (2004, pp. 280-281).
40 En bref, on a tendance à raisonner toutes choses spatiales étant égales, ici toutes les villes, sur un espace géographique donné, alors qu’il faut fermement s’interroger sur « la concentration de populations hétérogènes... dans une ville ou dans un district industriel » (FUJITA, 2004, pp. 161-62).
2.1. Le système territorial urbain : le clusty
41 Il est proposé de faire le lien entre les villes et l’innovation à travers le néologisme de clusties, clusters in the city, clusters by the city, à partir de deux lectures.
42 La première peut être généralisée ou illustrée à partir de la “question toulousaine” :
« une grande agglomération urbaine dont l’économie est principalement organisée autour des activités de R et D peut-elle être analysée comme un système productif local ou un ensemble juxtaposée de SPL ? »
(ZULIANI et al., 2005, p. 55).
44 La deuxième est encore plus ambitieuse puisqu’il s’agit de considérer la ville comme le lieu, le territoire particulier sur lequel ou à partir duquel s’organisent des relations entre activités et réseaux, comme espace-milieu qui favorise la création de potentialités de « chaînes de valeurs métropolitaines », pas seulement une agglomération au sens physico-institutionnel qui offre des économies d’agglomération, mais davantage un ensemble urbain qui les favorisent ou... les créent. Ces clusties dépendent-ils de la taille, de la nature institutionnelle, de leurs places dans une hiérarchie urbaine ou des trajectoires technologiques qui permettent ou non des adaptations, des filiations, des ruptures ? Sont-ils mécaniquement monocentriques, liés à un domaine spécifique ou peuvent-ils être polycentriques et polyfonctionnels ? L’hypothèse centrale que nous posons est qu’il existe des liens fondamentaux entre les organisations urbaines, les innovations, les TIC, les centralités et il est indispensable alors de mieux chercher à comprendre comment ces éléments peuvent s’articuler, être attirés ou construits dans des lieux privilégiés.
45 On propose la définition suivante :
« Le clusty est un système territorial urbain concernant généralement de grandes agglomérations, qui crée, capte, accumule, diffuse, des économies de diversité, des pouvoirs d’organisation et des réseaux, afin de développer sa compétitivité sur le plan international ».
47 Le second aspect de la définition est celui qui vise à favoriser des coopérations sur des ensembles urbains (agglomérés ou disjoints) et qui repose la question des réseaux, des modes d’organisation et de coordination : la métropolisation, décidément, ne saurait être « un processus univoque » (JOUVE et BOOTH, 2004, p. 12). Ainsi, de manière générale, on rappelle que la métropolisation « est l’ensemble de processus qui concentrent en quelques ensembles urbains les fonctions stratégiques et qui produisent des recompositions territoriales ». Ces fonctions stratégiques peuvent être évoquées par celles de « commandement, de contrôle, de coordination, de création de valeurs et de codes ». Elles concernent des processus qui renforcent des centralités avec éventuellement la disjonction géographique des « fonctions centrales » et la volonté de reconquête des centres. C’est encore « un processus de potentialisation de compétences et de connaissances ». J.-M. HURIOT et L. BOURDEAU-LEPAGE (2004) proposent que la métropolisation « désigne le processus par lequel une ville, très grande le plus souvent mais pas nécessairement, acquière les fonctions majeures de coordination d’activités économiques complexes de portées mondiales ou globales ». Il reste à discuter si ce sont les fonctions stratégiques qui ont changé : différences de nature, de degré, d’implications technologiques, de modes... En particulier, ce débat se retrouve et se focalise tout particulièrement sur l’économie de la connaissance et sur les « Knowledge Laboratories » (COOKE et PICCALUGA, 2005). Il est nécessaire de suivre les trajectoires des activités qui, au cours du temps, se déplacent.
48 On reconnaît tout autant qu’il ne suffit pas de s’autoproclamer métropole mondiale ou internationale, même si le marketing urbain et le benchmarking peuvent faire rage et ravage. Il est indispensable de disposer de concentration de certaines activités et la métropolisation produit une « scène vibrante, une atmosphère vibrante » (BELL et JAYNE, 2004). Le benchmarking doit être perçu à un moment donné comme une cristallisation de mécanismes longs, diffus, peu apparents, qui se concrétisent par un classement, le repérage de fonctions ou d’attributs forts, le pointage de manques ou d’insuffisances.
2.2. Clusters versus cities
49 Les ambiguïtés liées à l’interprétation dominante de l’impact des milieux métropolitains sur la production d’innovation peuvent être illustrées à partir de contributions récentes à l’analyse des clusters en milieu urbain/métropolitain. La plus grande partie des clusters européens est, en effet, localisée dans les zones métropolitaines, la plupart du temps les capitales nationales (MUTEIS, 2001), cette sélectivité métropolitaine étant particulièrement marquée dans le cas des clusters TIC (CHANTELOT, 2005). Cette « évidence » conduit trop souvent à retenir les clusters comme totalité cohérente, sur un territoire géographique donné alors que c’est souvent ce territoire qui explique l’histoire, les réussites ou les échecs des clusters.
50 Les fondements de l’émergence de clusters au sein des espaces métropolitains peuvent se rattacher à trois types de logiques (GORDON et MCCANN, 2000) :
- (1) Une logique d’intégration productive, liée à l’intensité et à la stabilité des relations productives et marchandes locales entre les firmes,
- (2) Une logique de réseaux et de milieu, caractérisée par l’importance des externalités technologiques générées par la stabilisation de réseaux de collaboration entre les firmes et les institutions locales.
- (3) Une logique d’externalités métropolitaines : à la différence des deux logiques précédentes, les facteurs de localisation ne sont pas tant liés à l’importance de ces interactions locales qu’à l’accès à une main-d’œuvre hautement qualifiée, à des services et des fonctions fortement spécialisées ainsi qu’à l’accès à une forte densité d’infrastructures garantissant une connectivité satisfaisante aux réseaux transnationaux. Cette logique relève aussi du paradigme de la geography of cool, dans la lignée des travaux de FLORIDA (2001) sur les facteurs typiquement métropolitains d’attraction de la creative class.
52 Cette typologie rejoint la distinction établie par COROLLEUR et al. (2000) entre deux modes de production des fonctions urbaines liées à l’innovation : un mode « métropolitain » et un mode « milieu innovateur ». Dans les deux cas, il s’agit essentiellement de mieux appréhender le rôle réel des interactions locales dans le processus d’émergence et de développement de ces concentrations d’activités. « City as cluster » précise R. CAMAGNI (2001, p 103) qui, dans sa taxonomie générale, retient aussi la ville comme « milieu », comme « interconnexion » et comme « symbole » : c’est une autre manière d’affirmer le clusty.
53 À cet égard, des contributions récentes viennent largement relativiser le rôle des effets de débordements locaux, et soulignent, au contraire, la prévalence des externalités métropolitaines. Quelques exemples permettent d’illustrer les orientations à prendre en considération et à développer.
54 Deux études récentes de clusters écossais, respectivement dans les biotechnologies (LEIBOVITZ, 2004) et la production audio-visuelle (TUROK, 2003), conduisent à des conclusions similaires : d’une part, la faiblesse des réseaux sociaux locaux, de même que des relations marchandes et productives internes ; d’autre part, le rôle essentiel joué par l’accès aux ressources humaines (dont la localisation relève elle-même des capacités d’attraction des « talents »), aux services spécialisés, ainsi qu’aux infrastructures.
55 FENKEL (2001) tire d’une analyse plus systématique des facteurs de localisation des firmes de haute technologie en milieu métropolitain une hiérarchisation similaire des différentes logiques évoquées. De même GORDON et MCCANN (2000) se livrent à une étude systématique des facteurs de localisation des firmes liées aux secteurs de forte spécialisation de Londres, et concluent à une large prédominance des économies d’agglomération métropolitaines. Même dans le cas emblématique de la finance au sein de la City, l’analyse des facteurs de localisation évoqués par les firmes interrogées révèle une sensibilité à des économies de localisation intra-sectorielles fondées sur le partage de ressources spécifiques communes plus que sur l’intensité des flux locaux de connaissances. Des conclusions similaires sont avancées par CHANTELOT (2005) concernant l’émergence des clusters liés aux TIC. RUTHERFORD (2004) montre bien que dans les grands combats concernant les télécommunications, notamment en matière de choix techniques et politiques, ce sont des considérations d’abord métropolitaines qui ont concerné Londres et Paris.
56 Le cluster formé par les consultants en informatique dans la région urbaine d’Oslo semble se conformer davantage aux logiques de réseaux et d’intégration productive (ISAKEN, 2004) de même que les clusters de biotechnologies de Montréal et Toronto (NIOSI et BAS, 2003). Dans ce cas, toutefois, le diagnostic est plus nuancé : si les relations entre les firmes de biotechnologies et les différentes institutions locales (universités, sociétés de capital-risque...) paraissent ancrées dans des régulations locales, les interrelations localisées entre ce sous-système et celui formé autour des grands laboratoires pharmaceutiques apparaissent beaucoup plus faibles, les collaborations entre ces deux ensembles d’acteurs étant davantage gérées à une échelle internationale.
57 Les logiques d’émergence des clusters en milieu métropolitain, notamment dans les secteurs mobilisant de façon intensive des connaissances complexes et/ou nouvelles, sont par conséquent loin d’être univoques. L’étude comparative menée sur les systèmes d’innovation de cinq métropoles européennes par SIMMIE et al. (2002) oppose, d’ailleurs, la situation de Milan et Stuttgart, dont les modes de production des innovations sont marqués par l’importance des interactions locales institutionnalisées, à la situation de Paris, Londres et Amsterdam, davantage marquées par une logique d’attractivité métropolitaine, liée à la disponibilité de ressources humaines et productives.
58 Les logiques de structuration des clusties soulignent l’étroite complémentarité entre interactions locales et globales, les métropoles apparaissant comme le lieu privilégié d’articulation de réseaux déployés à différentes échelles (SIMMIE et SENNET, 1999). Cette thématique rejoint ainsi les critiques adressées à l’approche localiste des systèmes d’innovation, et le besoin de théoriser davantage l’articulation locale/ globale (ASHEIM et ISAKSEN, 2002 ; BATHELT et al., 2004).
2.3. Les systèmes productifs urbains
59 Sans vouloir mécaniquement copier les SPL ni les clusters, on peut cependant souligner que les espaces métropolitains, les clusties, quels que soient leur composition, leur forme, leurs modes de coopération et de conflit sur les plans interne et externe peuvent être retenus ou redécouverts comme « Systèmes Productifs Urbains ». Deux séries d’arguments plaident pour cette attention.
2.3.1. La concentration de la centralité urbaine et technologique
60 Le clusty est ainsi un « lieu » qui combine et souvent structure la concentration d’attributs de la centralité urbaine et technologique et des principes et mécanismes afférents. Mais il n’est pas seulement une somme de fonctions, d’activités, de compétences, une densité élevée de facteurs dans un environnement donné à un moment particulier. Il est plus qu’une addition de caractères, même s’il vaut mieux avoir beaucoup de fonctions supérieures à hauts coefficients. La référence au clusty implique évidemment que l’on connaisse les localisations des activités, qui mesurent et expliquent la concentration en un espace singulier de talents, de compétences et de pouvoirs : le clusty permet, en certains lieux, l’existence et l’exercice des formes ultimes et extrêmes de la centralité – ce qui fonde le centre et plus généralement la ville –, et de la technologie : ce qui permet l’innovation et plus généralement l’industrie. Il faut expliquer l’articulation efficace des proximités, l’expression et la valorisation des potentialités, la gestion des confrontations et des décisions stratégiques : « There are games from people being able to interact » (GLAESER et KOHLHASE, 2004, p. 226). La centralité urbaine permet d’assurer ces fonctions par la présence réelle ou potentielle d’acteurs qui ont collectivement intérêt à proposer et à décider eux-mêmes des solutions satisfaisant majoritairement leurs attentes. Les capacités à combiner et à articuler des décisions supposent l’existence préalable d’acteurs et d’activités, une culture partagée de l’avantage à gérer localement des choix qui peuvent concerner la mondialisation. C’est bien l’originalité et le génie des pôles de compétitivité que d’avoir su mettre en évidence cette nécessité de coopérer. Pour se faire, cependant, des conditions sont nécessaires : la référence à une technologie, à des industries au sens large, à un territoire de prédilection, généralement métropolitain, qui offre des opportunités de rencontres, de coopérations à des acteurs : chefs d’entreprises, élus, administrations, banques, laboratoires... C’est moins le pôle qui doit être mécaniquement situé dans un espace métropolitain que des acteurs qui se connaissent, décident de mettre en œuvre en synergie leurs compétences, leurs pouvoirs, leurs réseaux, au service d’une stratégie territorialement spécifique et maîtrisée.
61 Il ne faut pas seulement analyser « l’impact des changements technologiques sur la taille urbaine » (POLESE et SHEARMUR, 2005, p.88) ni constater seulement que les technologies et la recherche se développent plutôt dans des zones urbaines (CORONA et al., 2006 ; PORTER, 2001). Mais comprendre que la métropolisation est une combinaison efficace de principes qui expliquent, en partie, la naissance, le développement, l’auto-entraînement, la fragilité aussi des systèmes technologiques et d’innovation. Il y a des coûts à payer, des aspects négatifs à intégrer, ce que l’analyse urbaine et technologique a plutôt oublié, notamment les polarisations socio-spatiales et les ségrégations. Trop souvent, la littérature considère comme acquises les préoccupations relevant de la logistique, du respect des règles et des protections à mettre en œuvre : c’est bien le clusty qui favorise ou pénalise les bons ou mauvais fonctionnements, qui permet d’intégrer espace technologique et espace métropolitain.
2.3.2. Les chaînes de valeurs urbaines et technologiques
62 Une seconde série de réflexions concerne l’attention apportée aux chaînes de valeurs urbaines et technologiques qui ne peuvent s’exprimer que dans certaines agglomérations spécifiques justifiant que la métropolisation s’appuie sur un certain nombre de caractéristiques fondamentales. La métropolisation favorise des villes qui disposent d’un stock de capital de valeurs, ce qu’on pourrait appeler des prérequis ; d’où l’intérêt des analyses multi-critères s’efforçant de déterminer les fonctions métropolitaines de référence, de détecter celles qui manqueraient à l’aune du benchmarking : faut-il un musée, peut-on créer un système régional d’innovation, sous réserve que l’on prenne l’approche comparative et commerciale du benchmarking pour ce qu’il doit être : un révélateur à un moment donné de hiérarchies fondées sur des classements eux-mêmes définis par des pondérations et des valeurs. C’est de cette manière, par exemple, qu’il faut lire l’offre métropolitaine française vue par les emplois métropolitains supérieurs (FNAU-DATAR, 2004). Ces EMS traduisent des processus, des temporalités, des territorialités métropolitaines bien plus que des classements. On peut faire les mêmes commentaires pour les villes Alpha, Beta et Gamma du GeWC (BEAVERSTOCK et al., 1999).
63 Les villes en question permettent le renforcement de multiples réseaux d’interrelations institutionnelles formalisées ou lâches, implicites ou cachées ; elles doivent aussi être les lieux privilégiés de création, de captation d’idées, de diffusion de normes et de technologies. Elles permettent la naissance et l’accompagnement de fonctions stratégiques : chaque élément de la chaîne de valeurs métropolitaines est dépendant des autres, lui donne du sens et de l’efficacité, plus qu’il ne comble une lacune.
64 Les travaux en termes de métropolisation soulignent notamment que les quelques villes au monde qui, de plus en plus, concentrent toutes les formes de pouvoir, disposent d’un stock de « capital de valeurs » et de chaînes de valeurs urbaines que l’on peut comprendre partiellement, comme du « capital public » (JOHANSSON et QUIGLEY, 2004). On retrouve alors bien souvent les capitales politiques, les capitales financières et boursières ou encore ce que The Economist a pu appeler « the capitales of capital ». Cette existence nécessaire d’un stock de capital de valeurs souligne fortement la nécessité d’une accumulation préalable, permanente, mais des inversions, des changements de trajectoire peuvent intervenir, certains qui confortent le pouvoir et l’attractivité des grandes métropoles, d’autres qui en redessinent les contours et remettent en cause leurs avantages (PORTER, 1995). Il est indispensable, certes, d’avoir des activités supérieures, sans oublier tous les autres facteurs indispensables : la réapparition d’un capital nécessaire d’infrastructures, l’existence de tout ce qui est évoqué souvent de manière encore incertaine et discutée par le terme de capital social, les infrastructures du haut débit (RUTHERFORD, 2004) et toutes les activités liées à la demande en matière culturelle et muséale : aussi bien la volonté de construire des urban villages (BELL et JAYNE, 2004) que des technoparcs. Les chaînes de valeurs soulignent les enjeux des infrastructures, les espérances dans la collaboration scientifique, et conduisent à penser stratégiquement l’efficacité, la compétitivité, les conditions de vie et la qualité urbaine.
Conclusion
65 Si « les villes ne sont de manière ultime rien d’autre que de la proximité », et notamment les métropoles (GLAESER et KOHLHASE, 2004, p 225), le clusty n’est pas seulement un centre urbain qui accueille un système d’activités, il en est lui-même le cœur au sein d’un environnement urbain qui le créé, le conditionne et lui permet de se développer.
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Mots-clés éditeurs : centralité, Externalités d'agglomération, métropolisation, innovation, Cluster
Mise en ligne 01/01/2010
https://doi.org/10.3917/reru.074.0707