Notes
-
[*]
Première version décembre 2005, version révisée mai 2006.
Le présent travail est issu de travaux réalisés à l’Institut de recherches économiques et régionales à l’Université de Neuchâtel. -
[1]
- Une ressource peut devenir obsolète ici mais ne pas l’être ailleurs. En effet, la délocalisation de certaines activités productives peut entraîner l’obsolescence d’un certain savoir-faire ici, la valorisation du même savoir-faire là-bas.
-
[2]
- Il faut parfois un certain temps avant qu’un objet, chargé d’une histoire passée (fermeture d’usine douloureuse, attachement à un lieu, etc.) puisse être réaffecter à un nouvel usage. Il faut, en effet, que l’objet change de sens aux yeux des acteurs pour qu’ils puissent imaginer et identifier de nouvelles combinaisons productives. Une mise à distance au sens de DUBET (1989) est souvent nécessaire.
-
[3]
- Les trois premières se basent sur les données récoltées dans le cadre de la sixième enquête du Groupe européen de recherche sur les milieux innovateurs (GREMI) (KEBIR et CREVOISIER in CAMAGNI et al., 2004). Plutôt que d’approfondir un cas particulier, il a été décidé de choisir plusieurs cas de ressources. Ils ont été choisis de manière à couvrir des ressources matérielles et immatérielles, des ressources mobilisées dans un cadre urbain ou plutôt rural (périphérique), dans des activités tertiaires différentes (tourisme, service, etc.). Certaines ressources existent et sont mobilisées depuis longtemps, d’autres ont émergé plus récemment.
-
[4]
- Pour une présentation plus détaillée des études de cas, voir KEBIR et CREVOISIER (2004). Pour le rapport complet, voir KEBIR (2004).
-
[5]
- Cette étude de cas s’est appuyée pour la partie historique sur les recherches de J. P. JELMINI (1987).
-
[6]
- À noter que cette ressource a connu des phases de transformation radicale (développement de la montre à quartz, puis de la montre bijou, etc.). Il s’agissait alors de mettre en valeur et d’absorber de nouvelles connaissances techniques, organisationnelles, managériales, etc. (CREVOISIER, 1994 ; KEBIR et CREVOISIER, 2004).
-
[7]
- Cette étude de cas s’est appuyée sur les publications de la FONDATION GENÈVE PLACE FINANCIÈRE (1998a et 1998b) ainsi que sur les travaux de recherches de CREVOISIER, CORPATAUX, THIERSTEIN (2000).
-
[8]
- Très tôt dans l’enquête il s’est avéré nécessaire, pour l’analyse, de distinguer ces deux aspects du savoir-faire bancaire genevois.
-
[9]
- Le terme de sous-ressource est proposé ici par analogie au terme « sous-produits » (by-product) utilisé en économie. Il suggère le fait que l’exploitation d’une ressource entraîne la création des ressources nécessaires à sa mise en œuvre. Ce qui n’exclut pas que ces sous-ressources fassent par ailleurs (ou ensuite) ressource dans le cadre d’autres activités.
-
[10]
- Savoir-faire en tant que ressource industrielle horlogère.
-
[11]
- Savoir-faire horloger en tant que ressource touristique.
Introduction
1Fondé sur les résultats d’une recherche à la fois empirique et conceptuelle, l’article proposé porte sur la relation entre ressource et développement à l’échelle régionale. Il s’agit de comprendre la manière dont les ressources évoluent, se coordonnent et s’inscrivent dans le territoire, ceci dans une perspective de politique de développement régional.
2La question des ressources renvoie à une multitude d’objets et de situations différentes. Que l’on pense aux ressources comme le pétrole, les forêts, les minerais ou encore les savoir-faire, les objets d’art, le paysage, le patrimoine ou les friches industrielles, apparaissent alors des problématiques d’apparences aussi diverses que la rareté, la surexploitation, le maintien, la mise en valeur, la conservation, la revalorisation, etc. Pourtant, et ce sera la proposition du présent article, on peut identifier dans toute cette diversité quatre grandes configurations à partir desquelles une analyse approfondie des dynamiques sous-tendant l’évolution des ressources est possible, révélant au passage des enjeux spécifiques pour les territoires concernés.
3Partant d’une approche de la ressource selon laquelle celle-ci ne préexiste pas et constitue avant toute chose une relation entre un objet (savoir-faire technique, minerai, bâtiments prestigieux, etc.) et un système de production (système de production industrielle, extractive, touristique, etc.), l’article analyse, sur la base de quatre études de cas de ressource, la manière dont cette relation s’inscrit dans le concret. À savoir la manière dont cette relation se construit techniquement (investissements de mise en forme, rénovation, etc.), se perpétue (ou non), se coordonne(type d’acteurs, modes de coordination) et se déroule dans le territoire (territoires mis en jeu, relations de proximité et de distance, etc.).
4Au moins deux raisons nous conduisent à nous interroger à ce propos. Tout d’abord l’abaissement croissant des frontières nationales et la transformation de la répartition des activités économiques et des hiérarchies spatiales (AYDALOT, 1986 ; PIORE et SABEL, 1984 ; STORPER, 1992 ; OCDE, 1993 ; OCDE, 1995 ; VELTZ, 1996 ; SCOTT, 1998 ; RALLET, 2000 ; CREVOISIER, 2001 ; SCOTT et STORPER, 2003) mettent en exergue la compétitivité interrégionale et avec elle le rôle des ressources en tant que facteur de compétitivité (COLLETIS et PECQUEUR, 1994, 2004). Ensuite, le développement des ressources ne concerne pas seulement les régions fortes de systèmes de production industriels constitués, mûrs, en quête de compétitivité internationale, mais également les régions en difficulté ou dans lesquelles des activités ou systèmes de production sont en émergence. La reconversion de régions industrielles en sites touristiques, le développement de nouvelles activités fondées sur les ressources naturelles et culturelles soulèvent également des questions (CAMAGNI et al., 2004 ; DAMIEN et SOBRY, 2001 ; VIRASSAMY, 2002). Comment se réinventent les objets laissés à l’abandon ? Comment se créent, à partir de ce qui est, de nouvelles activités porteuses de développement ? Qui sont les acteurs impliqués ? Comment s’organisent-ils ? À quelles échelles spatiales ? Qu’en est-il des échecs ? Pourquoi certaines ressources sont abandonnées ? Pourquoi certaines mises en valeur de ressources sont-elles plus difficiles que d’autres, etc. ?
5Dans un premier temps, le modèle conceptuel sur lequel s’appuie l’analyse ainsi que la démarche de l’étude empirique seront présentés. Puis, l’analyse nous conduit à identifier les modes de coordination privilégiés (typologie des modes de coordination des ressources) ainsi que des formes territoriales (typologie des territoires des ressources). Enfin, l’analyse permet de dégager quatre grandes configurations de ressources, chacune se caractérisant par des dynamiques, des coordinations, des territorialités et ainsi des enjeux en termes de développement régional.
- 1 - Dynamiques des ressources
1.1. Une approche institutionnelle et territoriale des ressources
6L’analyse proposée ci-après s’appuie sur une approche institutionnelle et territoriale des ressources (KEBIR, 2004a). Elle se fonde sur l’idée que les ressources constituent un processus relationnel entre un objet (connaissance, matière première, etc.) et un système de production (HUNKER, 1964 ; RAFFESTIN, 1980 ; OLLAGNON, 1984 ; DE GREGORI, 1987 ; DE MONTGOLFIER et NATALI, 1987 ; ZIMMERMANN, 1951). Elle se distancie ainsi des approches standards selon lesquelles la ressource est un donné (KEBIR et CREVOISIER, 2004a). La relation objet système de production s’établit dès lors qu’une intention de production est projetée sur un objet (connaissance, savoir-faire, minerai, bâtiment, etc.). Entité propre (un château est un château) l’objet devient ressource, c’est-à-dire un intrant mobilisable dans le cadre, parexemple, du système de production touristique (un château est un bâtiment remarquable). Dans ce contexte la ressource est relationnelle, elle ne préexiste pas. C’est un construit situé dans le temps et dans l’espace.
7La ressource articule des processus, des rythmes et des logiques différentes, parfois complémentaires, souvent antagonistes. L’objet est mû par son cycle de vie à savoir les processus de création (apprentissage, construction, grands cycles naturels, etc. – construction et aménagement du château, entretien, etc.) et de destruction (érosion, oubli, dégradation – dégradation du toit, infiltrations, érosion des pierres, abandon du château, etc.). La logique prévalant est celle de la reproduction. Le système de production est animé par les processus d’identification (de ce château à l’abandon faisons un lieu de visite et un relais gastronomique) et de mise en œuvre (il faudra le rénover, l’équiper, l’inscrire sur les circuits touristiques, etc.). C’est, en effet, de ce système qu’émergent et se réalisent des idées et projets de production s’appuyant sur l’utilisation de ces ressources (logique de production, de compétitivité, etc.).
8Ce qui importe ici, c’est la manière dont cette relation s’enchaîne, s’organise et se coordonne dans le temps et dans l’espace. En tant que processus, la ressource met en jeu : une technique, à savoir comment concrètement objet et système de production s’articulent (travaux de rénovation du château, organisation de visites, mise en place de chambres d’hôte, d’un hôtel, démarche de qualité ou labellisation, inscription aux circuits touristiques, etc.) ; un collectif d’acteurs, qui renvoie aux acteurs et à la manière dont ils coordonnent la relation objet/système de production (association de sauvegarde du patrimoine ? Acteurs privés, publics ? Réseau d’innovation ? Etc.) ; un territoire, qui renvoie à la façon dont la ressource s’inscrit dans le temps et dans l’espace (échelles mises en jeu, provenance des acteurs impliqués, etc.).
9Selon la manière dont objet et système de production interagissent, la relation objet-système de production se renforce ou, au contraire, s’affaiblit. KEBIR et CREVOISIER (2004a) identifient quatre dynamiques d’évolution différente de la ressource selon que l’un ou l’autre de ces composants impulse la relation. En d’autres termes lequel est moteur ? Est-ce l’objet qui entraîne le développement (ou la régression) de la ressource (la présence d’un minerai permet le développement d’un système de production) ? Est-ce au contraire le système de production (la nécessité de rester compétitif entraîne la création de centres de formation ainsi que de recherche et développement et donc le renouvellement des savoir-faire) ? On distingue ainsi les dynamiques de croissance renouvelable, d’érosion et/ou d’épuisement, de mise en valeur et de pénurie.
1.1.1 Les dynamiques entraînées par le système de production : la croissance renouvelable et l’érosion/épuisement
10La ressource suit une dynamique de croissance renouvelable lorsque le système de production entraîne positivement l’objet. Organisant la création, le renouvellement et la reproduction de l’objet, le système de production permet le développement, le maintien et le renforcement de la ressource. Pour cela, le système doit avoir atteint une certaine taille, être stable ou en croissance. Les ressources qu’il mobilise sont clairement identifiées. La problématique consiste à en organiser la reproduction àplus large échelle de manière qu’il puisse continuer à croître. Il s’agira, par exemple, d’investir dans la mise en place de nouvelles filières de formation, la création d’un centre de recherche, l’élargissement du marché du travail, la rénovation, l’entretien et le réaménagement du patrimoine construit, etc.
11Lorsque le système de production exploite la ressource sans en assurer la reproduction, il affecte négativement l’objet : la ressource régresse. Elle entre dans unedynamique d’érosion et/ou d’épuisement. L’érosion et l’épuisement sont ici aussi bien physiques (destruction de l’objet) qu’économiques (phénomène d’obsolescence). Cette dynamique émerge, par exemple, dans le cas de systèmes de production qui surexploitent les ressources qu’ils utilisent au point d’en menacer le renouvellement. Elle émerge également dans le cas de systèmes de production peu apprenants où formation et renouvellement des savoirs sont rares. Les ressources mobilisées s’épuisant ou devenant obsolètes (épuisement économique), la relation objet/ système de production se délite voire disparaît à cet endroit et à ce moment [1].
12La dynamique d’érosion et/ou d’épuisement entraîne à terme une détérioration de la ressource et le déclin voire la faillite du système de production. Les objets restant (vestiges industriels, savoir-faire non mobilisés) peuvent être redéployés dans d’autres activités (écomusée, développement de nouvelles activités) ici ou ailleurs. Si tel n’est pas le cas, sortant de la sphère économique ils peuvent être porteurs de valeurs extra-économiques (culturelle, naturelle, sociale, etc.) et intégrer le patrimoine ou l’héritage culturel ou paysager d’un lieu. Ils peuvent aussi être tout simplement abandonnés et oubliés. Quoi qu’il en soit, s’ils restent sur place, ces objets, qu’ils aient une valeur ou non, sédimentent dans le territoire.
1.1.2 Les dynamiques entraînées par l’objet : la mise en valeur et la pénurie
13La dynamique de mise en valeur apparaît lorsque l’évolution de l’objet entraîne positivement celle du système de production (il suscite le développement de l’activité productive par exemple) et donc de la ressource. Présent et disponible (les processus de création et de destruction sont établis), il fonde le développement d’activités productives. Le système de production se structure autour de la valorisation de l’objet en question, en cela il est en émergence. L’identification de la ressource n’est pas encore stabilisée, le processus de mise en œuvre non plus. Les marchés sont à constituer de même que le processus de production du bien ou service qui est en phase de mise en place. La dynamique de mise en œuvre est typiquement celle de la valorisation ou de la requalification d’objets patrimoniaux. Sédiments préexistant dans le territoire, ces objets sont à un certain moment investis ou réinvestis [2]. Ceci, le plus souvent, dans le cadre de projets de petite envergure, peu monétarisés, s’appuyant sur du bénévolat dans la perspective d’un développement futur. Ces projets, souvent déçus, peuvent être le ferment d’innovations importantes. Par eux « se recréent de nouveaux cadres d’accumulation (produits ou services nouveaux qui connaissent un important développement par la suite). Pensons à toutes les “petites histoires” d’innovations nées dans les garages. Qui aurait pensé, il y a vingt ans, que le tourisme à la ferme ou le tourisme “industriel” connaîtrait un développement important ? » (KEBIR et CREVOISIER, 2004a, pp. 273-274). Ici, l’enjeu est de savoir qui va endosser l’investissement initial de mise en ressource nécessaireà tout projet de mise en valeur, sachant que celui-ci implique souvent des coûts irrécouvrables d’aménagement, rénovation, sécurisation, de marketing, etc.
14Si l’objet peut entraîner positivement la ressource, il peut également l’entraîner négativement. Lorsque l’objet vient à manquer au point de limiter ou empêcher la production alors la ressource entre dans une dynamique de pénurie. Cette dynamique peut être le résultat d’une phase d’érosion/épuisement (manque de main-d’œuvre qualifiée par manque de structure de formation, manque d’un minerai suite à l’épuisement d’une mine, etc.). Dans d’autres cas, elle trouve sa source dans des processus socio-économiques (désertion de certains métiers, désintérêt des institutions de financement pour certaines activités) ou environnementaux (manque de neige). Cette situation est instable en soi. Si elle n’est pas très rapidement dépassée (importation, constitution sur place) elle conduit à la dissolution de la ressource en question. Soit l’objet est remplacé, soit il y a abandon de l’activité.
1.2. Quatre études de cas
15La ressource, on l’a vu, peut suivre quatre types de dynamiques différentes selon la manière dont s’articulent objet et système de production. Dans la perspective d’identifier les différents enjeux de développement régional associés aux ressources, il s’agit à présent d’analyser à partir des cas des mines d’asphalte de la Presta, du savoir-faire horloger de l’Arc jurassien et son patrimoine, des savoir-faire bancaires genevois et du sol à Bienne [3] la manière dont celles-ci se traduisent dans le concret. Ceci notamment dans leurs dimensions technique (enchaînement et dynamique des processus de création, destruction, identification et mise en œuvre), socio-institutionnelle (modes de coordination de la ressource) et territoriale (inscription spatio-temporelle de la ressource).
16Le tableau 1 récapitule les principaux résultats de la recherche empirique [4]relatifs aux dimensions techniques, socioculturelles et territoriales des ressources analysées. Ces résultats se fondent sur les données récoltées dans le cadre d’enquêtes qualitatives qui consistaient en des entretiens approfondis de type semi-directifs auprès d’acteurs clés impliqués dans la dynamique des ressources en question. Ces données ont été complétées et enrichies par des recherches bibliographiques.
17Les mines d’asphalte [5] de la Presta sont situées dans le canton de Neuchâtel. En tant qu’objet, les mines auront connu deux usages successifs. Le premier, l’exploitation industrielle du minerai sera intensive et menée par une multinationale anglaise qui exportera dans le monde entier l’asphalte de la Presta. La ressource sera sur/mal-exploitée jusqu’à épuisement économique. Abandonnée, elle sera ensuite sécurisée et ouverte au public : après une première phase d’industrie extractive vient une phase d’exploitation touristique des mines. Les galeries deviennent lieu de visite et non plus d’accès au minerai, le savoir-faire et les machines deviennent patrimoine culturel et non plus facteurs de production industriels. Les ressources sont réinventées, les objets sont réaffectés à des usages radicalement différents. On passe d’une dynamique d’érosion/épuisement à une dynamique de mise en valeur. Ce sont des acteurs locaux, organisés en réseau d’innovation, qui entreprendront la valorisation du site et son exploitation à des fins touristiques. En quelques années, les minesd’asphalte deviendront une attraction phare de la région attirant un public essentiellement régional et national. Ainsi, le passage de l’activité extractive à l’activité touristique entraînera trois ruptures. Une rupture dans le type d’activité, dans les formes d’organisation et de coordination de la ressource (coordination par hiérarchie puis par réseau d’innovation) et dans l’échelle territoriale de la ressource (mondiale puis locale/régionale). La dynamique des ressources sera celle de l’érosion/épuisement (avant la fermeture de la mine) puis celle de la mise en valeur. Les mines entraînent la dynamique actuelle. Elles conditionnent pour le moment la poursuite de l’exploitation touristique ainsi que le produit proposé. Les contraintes posées, notamment par la structure des galeries, ont été repoussées par la création d’un musée puis d’un restaurant. Le produit s’est étoffé et ne repose plus exclusivement sur la visite des mines. Cependant, les galeries constituent, et c’est le propre de ce type d’attraction, l’axe principal de celles-ci. Rien n’empêche d’imaginer qu’à terme l’offre du site s’étoffe de telle sorte qu’elle se libère du cadre imposé par la visite des mines. La ressource pourrait alors entrer en dynamique de croissance continue. Ce serait le cas, par exemple, si d’autres attractions/produits étaient développés, rendant la visite non plus essentielle mais secondaire.
Tableau récapitulatif des résultats d’enquête
Tableau récapitulatif des résultats d’enquête
18Vaste zone industrielle située au centre du quartier Nord de la ville de Bienne (Suisse), l’Aire Renfer a connu une évolution proche de celle des mines. Utilisée à des fins industrielles (industrie du bois) l’Aire Renfer a été transformée, après épuisement économique, en une zone résidentielle (promotion immobilière). D’un même objet (sol) deux ressources aux logiques et dynamiques différentes se sont succédées. Le passage de l’une à l’autre a nécessité du temps et des travaux d’aménagement conséquents (dépollution notamment). Il a entraîné des ruptures. Rupture d’usage de l’objet sol, de la coordination (coordination au sein de l’entreprise propriétaire puis au sein d’un réseau local en coopération entre l’entreprise et la Ville devenue propriétaire d’une grande partie de l’Aire). Du point de vue de l’échelle territoriale, on observe qu’elle se réduit quelque peu, ceci même si le cercle des acteurs coordonnant la ressource s’est agrandi (il comprend désormais les nouveaux propriétaires, etc.). Aussi, les dynamiques des ressources observées ont été celles de l’érosion/épuisement (avant la fin des activités industrielles) puis celles de la mise en valeur (création de la zone résidentielle).
19Le cas du savoir-faire horloger de l’Arc jurassien et de son patrimoine diffère des deux précédents. Depuis quelques années, se développe un usage touristique du savoir-faire (promotion régionale) et ceci alors que l’utilisation industrielle originelle continue (production de montres). Le savoir-faire suit donc deux dynamiques distinctes. La première s’appuie sur le système de production horloger qui est ancien et structuré. Cette dynamique est directement liée à l’exploitation industrielle du savoir-faire qui a généré la mise en place de structures de formation et de recherche ainsi que de musées privés et publics. Aujourd’hui le savoir-faire s’y renouvelle (institutions de formation ad hoc, innovation, etc.) sans évoluer de manière drastique [6]. Le savoir-faire horloger suit une dynamique de croissance renouvelable. La seconde dynamique, de mise en valeur cette fois, est relative à l’usage du savoir-faire horloger et de son patrimoine dans le cadre du projet promotion touristique régionale « Watch Valley ». Elle est orchestrée par les offices du tourisme de la région qui mobilisent ainsi des objets (savoir-faire et patrimoine) contrôlés plus ou moinscomplètement par un autre milieu, celui de l’horlogerie. Le développement de cet usage n’implique pas l’abandon de l’usage initial. Il s’agit d’une bifurcation. Le milieu touristique, en émergence dans la région, tente par le projet Watch Valley de structurer l’offre et par là le système de production touristique tout entier. Ici on ne crée pas d’objet, on crée une ressource. L’objet existe, le processus de production est à constituer (organisation de circuits, création de produits, etc.). Si le milieu touristique coordonne la ressource au travers d’un réseau d’innovation, le système de production horloger le fait au travers d’un milieu innovateur cyclique mû par les contraintes de compétitivité (CREVOISIER, 1994, KEBIR et CREVOISIER, 2004). Le territoire de la ressource s’agrandit avec l’arrivée des acteurs touristiques, les échelles spatio-temporelles restent stables, par contre de nouvelles mobilités de clients se développent vers la région. S’ensuivent des conflits d’identification (le savoir-faire peut-il faire ressource touristique ?) et d’usage. L’émergence du projet touristique pose, en effet, un certain nombre de problèmes, notamment de conflits d’usage avec les milieux horlogers qui ne voient pas d’un bon œil le développement du projet en question.
20Le cas de (s) savoir-faire bancaire (s) genevois [7] a consisté à analyser deux ressources, le savoir-faire en matière de financement du négoce international et le savoir-faire en matière de gestion de fortune privée [8]. Participant des ressources de la place financière genevoise depuis de nombreuses années, ces savoir-faire contribuent à la compétitivité de la Place. Ils suivent tous deux des dynamiques de croissance continue. Ces dynamiques bien que semblables, se déroulent cependant dans des configurations différentes. Constitués et stables, les processus de maintien et de renouvellement de ces savoir-faire sont établis, et plus ou moins institutionnalisés. Maîtrisés et organisés par le système de production, ces processus participent du maintien de la compétitivité du système. Le savoir-faire en matière de financement du négoce international se maintient plus qu’il ne se renouvelle. Le métier évolue peu. Il n’a pas encore été jugé nécessaire de constituer une filière de formation spécifique, celle-ci se faisant essentiellement sur le tas. Le système de circulation de la main-d’œuvre entre les différentes entreprises de la place et vers d’autres places internationales de négoce apparaît déterminant. Le savoir-faire en matière de gestion de fortune privée doit, par contre, constamment être renouvelé. Il s’agit essentiellement d’intégrer de nouvelles informations et de reproduire le savoir existant. La nécessité de parfaire la technique – toujours plus sophistiquée –, de se tenir à jour et d’anticiper sur les besoins de demain nécessite l’organisation et la mise sur pied de structures de formation. Ces dernières se développent sur place afin de coller à l’évolution des techniques financières survenant dans d’autres places internationales. Des sous-ressources [9] sont ainsi créées pour soutenir et renforcer le savoir-faire. Le système de production est suffisamment prospère pour renouveler les savoir-faire qu’il mobilise. Ceci pour autant que la question de l’innovation ne se pose pas de manière plus aiguë. Dans les deux cas, les liens de proximité de type réseau s’établissent et permettent les processus d’apprentissage nécessaires au renouvellement/maintien des savoir-faire. Cependant, certains aspects de la coordination s’effectuent au sein même des entreprises notamment pour ce qui est de la mise en œuvre des ressources. Depuis la fin de l’enquête, le système de production montre des signes de restructuration (fusions, licenciement) particulièrement pour ce qui est de la gestion de fortune. Aussi, on peut se demander si cette restructurationentraînera un changement de dynamique de la ressource ; de la croissance renouvelable à l’érosion/épuisement, par exemple.
- 2 - Dimension socioculturelle et territoriale des ressources, pour un enrichissement du modèle conceptuel
21Les différents cas analysés suggèrent l’existence de modes de coordination privilégiés ainsi que des rapports au territoire différents selon la manière dont s’articulent objet et système de production. Les deux typologies présentées ci-après proposent d’enrichir la typologie des dynamiques de ressources. Elles permettent d’y intégrer les dimensions socio-institutionnelle (typologie des modes de coordination des ressources) et territoriale (typologie des territoires des ressources).
2.1. Pour une typologie des modes de coordination des ressources
22Les acteurs engagés dans la dynamique des ressources analysées ont montré des formes d’organisation et de gestion de l’incertitude différenciées. Hiérarchie, réseau, marché, coordination mixte, participent tous de la dynamique des ressources. Cependant, l’analyse suggère l’existence d’un mode de coordination dominant selon que l’on se trouve dans telle ou telle dynamique. La figure 1 présente, de manière schématique les différentes formes de coordination en les associant avec les différents cas de dynamique ainsi qu’avec les cas observés.
Les modes de coordination des ressources observées
Les modes de coordination des ressources observées
23La colonne de gauche constitue l’entrée du tableau. Elle indique lequel du système de production ou de l’objet constitue le moteur de la coordination des acteurs. Dans le premier cas, il s’agit du système de production. L’incertitude à laquelle font face les acteurs relève essentiellement de l’évolution de l’objet. Il s’agit,par exemple, de la disponibilité future de celui-ci, son accessibilité, sa productivité, etc. Dans le deuxième cas, l’objet entraîne la dynamique de la ressource. L’incertitude est relative à l’évolution du système de production. Elle porte sur la force de l’organisation de ce dernier, sur sa capacité de réaction aux conditions du marché, sa compétitivité, etc.
24La première ligne du tableau constitue la sortie du tableau, elle indique la manière dont évolue la ressource, si elle se développe ou au contraire si elle régresse.
2.1.1 Coordination mixte hiérarchie/réseau (cas I)
25La coordination mixte hiérarchie/réseau a été observée dans le cas de la dynamique de croissance continue (savoir-faire bancaires, savoir-faire horloger [10]). Ce premier cas est marqué par l’incertitude relative à l’évolution de l’objet, à son renouvellement. Les formes de coordination privilégiées sont à la fois le réseau et la hiérarchie. Une partie des processus de la ressource (mise en œuvre de la ressource, identification, veille technologique, etc.) est coordonnée au sein même des entreprises qui sont bien structurées (hiérarchie), alors que certaines fonctions liées à la création ou au renouvellement de l’objet (recherche, formation) sont externalisées dans le cadre d’un réseau basé sur des relations de proximité. Ces relations permettent aux entreprises de bénéficier d’effets réseau favorables au renouvellement des ressources (apprentissage collectif, force, masse critique, etc.). La hiérarchie joue ici un rôle important. C’est, en effet, sur la structure des entreprises que s’appuient les relations de proximité productrices du renouvellement en question.
2.1.2 Coordination par la hiérarchie (cas II)
26La coordination par la hiérarchie s’est révélée dans le cas de la dynamique d’épuisement/obsolescence (mines d’asphalte, sol en milieu urbain avant leur réaffectation). L’incertitude porte principalement sur la disponibilité de l’objet plus que sur la qualité ou l’adéquation de celui-ci aux besoins du système de production. Ce dernier est alors en phase d’exploitation intensive d’une ressource précédemment identifiée et constituée. La forme de coordination de la ressource privilégiée est celle de la hiérarchie. Elle permet, en effet, aux entreprises de contrôler l’ensemble de la chaîne de valeur ajoutée (ressource comprise) et ainsi de rationaliser la production, de la standardiser et de limiter ainsi les coûts de production du bien produit. Le couplage objet/système de production s’affaiblit, car l’objet ne se renouvelle pas. La coordination par la hiérarchie permet alors de contrôler et exploiter au maximum la ressource avant qu’elle ne disparaisse.
2.1.3 Coordination par le réseau (cas III)
27La coordination par le réseau a été constatée dans les cas de dynamique de mise en valeur (mines d’asphalte, sol en milieu urbain au moment de leur réaffectation, savoir-faire horloger et son patrimoine). L’incertitude portant sur l’évolution du système de production, plus particulièrement sur sa capacité à structurer une offre à partir d’un objet existant. On se situe en phase d’innovation.
28Le réseau permet non seulement la réunion des forces nécessaires à la structuration de l’offre (et donc à la création de la ressource) mais surtout le partage du risque lié à l’innovation en question. Les relations de proximité sont structurantes. Dans cetroisième cas, le couplage objet/système de production est neuf. La ressource est en émergence. Ainsi la coordination par le réseau permet aux acteurs de réunir les forces nécessaires au développement et à l’exploitation de celles-ci.
2.1.4 Coordination mixte marché/hiérarchie (cas IV)
29Ce quatrième cas apparaît plus théorique qu’observé. Il est associé à celui, instable, de pénurie (mines d’asphalte dans la dernière période d’exploitation minière). Il est marqué, comme le précédent (IIIe cas), par une incertitude relative au système de production. Cette dernière porte sur la capacité du système de production à dépasser une situation de rupture d’approvisionnement de l’objet. Deux formes de coordination sont possibles. La première est la hiérarchie (internalisation de la création de l’objet, mise sur pied de formations spécifiques au sein de l’entreprise, exploitation d’une mine, etc.) ; mais cela implique que le système soit déjà très structuré. La deuxième forme de coordination possible est le marché, pour autant que l’objet soit mobile et transférable. L’origine de l’objet importe peu. L’espace dans lequel on se procure ce dernier n’a d’autre intérêt que celui d’en être le fournisseur.
2.2. Pour une typologie des dynamiques des territoires des ressources
30Les dynamiques des ressources analysées se déroulent différemment dans le temps et dans l’espace. Certaines fois, les processus qui les constituent se succèdent, d’autres fois ils se déroulent simultanément. L’échelle spatiale dans laquelle ils se déploient varie également. Les dynamiques observées révèlent ainsi l’existence de territoires – entendu ici comme l’espace/temps vécu par les acteurs de la coordination de la ressource – différant par la taille, la forme de l’espace/temps qu’ils définissent et surtout par leur rôle. La figure 2 présente schématiquement ces territoires.
Les territoires des ressources observées
Les territoires des ressources observées
31La colonne de gauche constitue à l’instar de la figure 1, l’entrée du tableau. Elle indique lequel de l’objet ou du système de production est le moteur de la dynamique territoriale de la ressource. Dans le premier cas, le système de productiondétermine le rôle et la forme du territoire de la ressource. Il entraîne la dynamique de la ressource. Il impose, pour le meilleur ou pour le pire, son rythme ainsi que son échelle d’action à l’objet. Le système de production développera l’objet (par la mise sur pied de formation continue, de programmes de recherche) ou le rendra obsolète plus vite qu’à son tour (effets de mode, surexploitation). Dans le deuxième cas l’objet entraîne la dynamique spatio-temporelle de la ressource servant, ou au contraire contraignant, le système de production. Un objet qui résiste aux assauts du temps et des systèmes de production, constitue un héritage, une ressource potentielle. Lorsque celui-ci par contre vient à manquer, parce que se reproduisant trop lentement, alors il peut limiter les perspectives du système de production qui développera, s’il le peut, les moyens ad hoc (importation, constitution sur place). La première ligne du tableau constitue la sortie du tableau. Elle indique, si la ressource se développe (renforcement de la relation objet/système de production), ou, au contraire, si elle régresse (affaiblissement de la relation). On distingue alors quatre cas de territoire.
2.2.1 Territoire de maintenance et/ou d’intégration (cas I)
32Le territoire de maintenance et/ou d’intégration a été constaté dans le cas de croissance continue. Il s’étend du global au local. Du global pour ce qui est du marché, du local pour ce qui est de l’internalisation du changement, de la culture, de la spécificité et du maintien de la compétitivité du système de production. Ceci même si des objets d’ailleurs sont incorporés et intégrés dans la ressource (des connaissances développées à l’étranger peuvent venir enrichir le savoir-faire local au travers de l’immigration). Les formes de mobilité sont doubles, il y a à la fois ancrageet mobilité. Ancrage parce que les processus de création (régénération) des objets mis en place sont souvent organisés dans le cadre de relations de proximité soit au sein d’un système territorialisé de production et participent de logiques collectives animées dans le cadre de réseaux locaux. C’est le cas, par exemple, lorsque les banquiers privés genevois mettent sur pied un centre commun de formation.Mobilité parce que si nécessaire les acteurs du système n’hésiteront pas à importer des objets (compétences, inventions, matières premières, etc.), voire à exporter certains segments de la production. Ici création d’objets et mise en œuvre vont de pair. Ils sont simultanés. Les limites du territoire décrites ici, à savoir son étendue géographique et sa densité relationnelle, sont définies par le projet de maintien de la ressource et l’intégration de la nouveauté. Il s’inscrit dans une perspective de continuité de la relation objet/système de production.
2.2.2 Territoire d’exploitation (cas II)
33Le territoire d’exploitation est apparu dans les cas de dynamique d’érosion et/ou de l’épuisement (mines d’asphalte avant l’abandon des activités extractives). Le territoire de la ressource est celui de l’exploitation. Il n’est pas contraint par la nécessité de spécificité, la ressource est générique (au sens de COLLETIS et PECQUEUR, 1994 et 2004), le lieu de provenance de l’objet n’est pas déterminant. Ainsi, le territoire s’étend géographiquement autant que nécessaire et possible (en termes de coût). L’incorporation de la ressource dans le processus de production ne nécessite aucune adaptation ni configuration particulière. Cette phase se caractérise par des mouvements de mobilité : on va chercher ailleurs une ressource moins onéreuse, ondélocalise le processus de production, par exemple. Le territoire est défini par les nécessités de l’exploitation de la ressource sans perspective de continuité.
2.2.3 Territoire de réaffectation (cas III)
34Le territoire de réaffectation s’est révélé dans les cas de mise en valeur (mines d’asphalte, aire Renfer, savoir-faire horloger [11]). Les relations de proximité, caractéristiques du processus d’innovation (LUNDVALL, 1988 ; MAILLAT et al., 1991 ; DOLOREUX, 2002) sont prégnantes. Ainsi, le territoire de la ressource est celui dans lequel se structure le projet, se rassemblent les forces nécessaires à la réaffectation de l’objet et où les dynamiques d’acteurs chères à la création de ressources émergent. Il y aancrage de la ressource. L’objet est là, partiellement utilisé ou non, il est mobilisé et affecté à un nouvel usage (à noter que non utilisé, il pourrait, s’il est mobile, avoir migré s’il peut faire ressource ailleurs). Durant cette phase première, les relations de proximité sont importantes, elles permettent de structurer la ressource.
2.2.4 Territoire d’approvisionnement/constitution (cas IV)
35Le territoire d’approvisionnement et de constitution apparaît à nouveau comme plus théorique qu’observé si ce n’est dans le cas de la mine. Il correspond à la dynamique de pénurie. L’espace géographique dans lequel s’étend la ressource tend à s’élargir. Le système de production va devoir, en attendant éventuellement de constituer l’objet sur place (mise sur pied d’un centre de formation en cas de pénurie de main-d’œuvre qualifiée), se procurer l’objet ailleurs (immigration de savoir-faire). Le territoire de la ressource est dans ce cas de figure celui de l’approvisionnement. Les situations de pénurie peuvent donc entraîner les deux formes de mobilité. Il y a mobilité si l’objet est importé ou que le projet migre ; ancrage s’il est constitué sur place. Cela s’est produit notamment dans le cas des mines d’asphalte au moment ou l’on importait du minerai de Trinidad pour le mélanger à l’asphalte local dont la qualité n’était plus suffisante. Le territoire de la ressource est celui de l’approvisionnement ou de la constitution.
36Les problématiques posées par chaque situation entraînent des projections différentes sur l’espace géographique de la ressource. Ainsi le territoire d’exploitation est fonctionnel, technique, l’optimisation du processus de production prime sur le reste. Le territoire de maintenance et d’intégration est celui de la continuité, de la consolidation. Le territoire de réaffectation est celui de l’opportunité, du projet émergent, de l’innovation, enfin, le territoire d’approvisionnement/de constitution est celui de la dernière chance, plus que fonctionnel, c’est celui de l’urgence et de la nécessité, c’est un territoire tampon. Ces territoires ne sont pas figés dans le temps, ils se transforment, s’agrandissent, se rapetissent, se densifient ou non selon l’évolution de la dynamique de la ressource. Ils suivent l’évolution de celle-ci et réciproquement.
37Les quatre cas de territoire des ressources proposés sont en cohérence avec les formes de coordination présentées précédemment. Ce qui relie sans doute les formes territoriales et les formes de coordination proposées, ce sont les logiques qui sous-tendent les stratégies des acteurs et qui définissent le rapport au territoire. Territoriales ou fonctionnelles, celles-ci définissent, selon MAILLAT (1996), le rôle du territoire et les formes d’organisation spatiale de la production. Les cas étudiéssuggèrent que ces logiques émanent des contraintes et opportunités posées par la dynamique des ressources soit par la manière dont objet et système de production s’articulent. Aussi, la question qui se pose à ce stade et qui sera abordée au point suivant est celle des enjeux soulevés par ces différentes dynamiques.
- 3 - Dynamique des ressources et enjeux de développement régional
38La recherche présentée ici montre que les ressources suivent quatre formes de dynamiques des ressources différentes. Si l’on y associe les formes de coordination et les territoires présentés ci-dessus, apparaissent quatre grandes configurations. Quatre configurations qui, chacune, témoignent de situations particulières des ressources. Ces situations, décrites dans le tableau récapitulatif (tableau 2 ci-après), ne se succèdent pas forcément dans un ordre bien établi qui constituerait une sorte de « cycle de la ressource » : avec une phase de mise en valeur puis de croissance continue, d’érosion/épuisement et enfin de pénurie. Loin de là. On se rend compte, en effet, qu’à chaque moment de « progression de la ressource », le risque de basculer dans une dynamique régressive est présent. En phase émergente ou de mise en valeur, le développement de la ressource peut être bloqué si l’on ne trouve pas les finances nécessaires à la mise en forme de l’objet brut ou si à un certain moment l’objet pose des limites que le système de production peine à dépasser, soit par manque de moyens, soit par manque de structure. Elles mettent en valeur dans un premier temps les attractions présentes. Cependant au bout d’un certain temps, si le système de production ne génère pas les infrastructures d’accueil suffisantes, ni le développement des attractions anciennes et nouvelles, il se peut que le projet stagne voire disparaisse par manque d’ « objets ».
39Aussi, les dynamiques des ressources ne dépendent ni de la nature des objets (matériel, immatériels) ni de la nature des activités du système de production (industrie, service). Elles dépendent de la manière dont l’un et l’autre s’articulent. À ses tous débuts, la mine d’asphalte a suivi en tant que ressource minière une dynamique de mise en valeur. Il a fallu définir l’usage de l’asphalte (médical au départ), procéder au processus d’identification, organiser le processus d’extraction, etc. avant d’entrer dans une dynamique d’érosion/épuisement. Le savoir-faire horloger, en tant qu’objet immatériel et ressource horlogère, a connu avec la standardisation des produits et l’automatisation de la production dans les années 1960 une période d’érosion/épuisement durant laquelle le savoir-faire perdait de sa substance (abandon de la montre mécanique). C’est la crise des années 1980 qui a poussé les entreprises à retrouver et revaloriser ce savoir-faire à travers le développement de la montre bijou, support de distinction sociale et qui a fait entrer la ressource en phase de croissance continue (KEBIR et CREVOISIER, 2004b). On ne peut donc a prioriassocier une (des) dynamique (s) à un type d’objet/ressource.
40Enfin ces situations constituent également des moments. Parler de « moment » est ici séduisant. Le terme traduit le caractère ténu parfois même évanescent des ressources. On pense, par exemple, au cas de jeunes formés qui migrent vers des centresplus attractifs, plutôt que de s’insérer dans la région comme espéré ; à la difficulté de construire une offre touristique lorsque les attractions sont dispersées et que l’on manque d’infrastructures d’accueil ; ou encore à ces savoir-faire qui deviennent obsolètes. La traduction dans l’espace de ces phénomènes n’est pas sans répercussions : elle conditionne les potentiels de développement des régions en question. Aussi, on peut associer à chaque configuration des enjeux spécifiques.
Dynamique des ressources et enjeux de développement régional
Dynamique des ressources et enjeux de développement régional
41La dynamique de croissance continue est une phase de croissance et de consolidation de la ressource. La coordination de la ressource privilégiée est mixte. Il s’agit de la hiérarchie, pour les fonctions de mise en œuvre notamment, et du réseau pour les fonctions relatives à la régénération des ressources. Le territoire de la ressource est celui de la maintenance des ressources locales et de l’intégration si nécessaire d’objets importés. Dans cette phase, on peut identifier deux enjeux. Le premier est celui du maintien de la ressource. Pour que celle-ci ne devienne pas obsolète, elle doit être constamment réadaptée, régénérée afin de soutenir la compétitivité dusystème de production. Les ressources mobilisées ici requièrent l’existence de structures de renouvellement de la ressource que seul le système de production doit pouvoir mettre en place. Le deuxième enjeu est que la croissance continue d’une ressource est tributaire des contraintes de l’évolution de la compétitivité et de la pertinence, en termes de marché, de l’activité associée.
42L’adaptation continuelle de la ressource, son maintien, dépend largement de la volonté et de la capacité des acteurs de se structurer afin de perpétuer la dynamique dans un environnement changeant. L’avenir de telle dynamique est très difficile à anticiper et peut aller dans des sens très différents. Si le renouvellement de la ressource n’est pas assuré, cela peut signifier que le système de production s’affaiblit et qu’on s’achemine vers une phase de mise en valeur (de l’objet existant) voire de pénurie. Cela peut aussi signifier que la ressource n’évolue plus (que la production se standardise, par exemple) et qu’à terme elle devienne obsolète.
43La dynamique des ressources est, dans le cas présent, soumise à la fois aux tensions liées à la structure du système de production (lui-même contraint par celle du marché) et à la capacité d’adaptation de la ressource. La dynamique de croissance continue s’appuie donc sur la structure du système de production et sur des dynamiques d’acteurs. L’enjeu réside dans le risque d’aboutir à des situations de blocage (lock-in) empêchant la mise en place des dynamiques d’acteurs favorables au renouvellement de l’objet (avec le risque de basculer dans une dynamique d’érosion/épuisement de la ressource).
44La dynamique d’érosion/épuisement correspond à une phase de déclin de la ressource. Elle devient de moins en moins « intéressante » pour le système de production (parce qu’elle devient trop chère et peut être remplacée par une autre ressource). Le processus d’identification s’affaiblit et avec lui c’est la relation objet/ système de production qui est remise en question. Dans cette phase d’exploitation simple (sans régénération ni adaptation de la ressource comme dans le cas de la croissance continue) les objets mobilisés sont issus des processus de création du passé. Ce qui signifie que si la mise en œuvre entraîne la destruction de l’objet, celle-ci n’est pas compensée par une création simultanée. L’objet est donc en danger. Le mode de coordination privilégié ici est celui de la hiérarchie. Le territoire est celui de l’exploitation.
45Un premier enjeu associé à ce type de dynamique est l’obsolescence ou l’épuisement économique de la ressource avec, à terme, le risque de crise économique à venir. Le cas typique est celui dans lequel l’objet étant mal entretenu ou exploité, la ressource finit par perdre de son intérêt économique. Le système de production, à la recherche de substitut, va être amené à se restructurer, à délocaliser en totalité ou en partie ses activités voire les abandonner complètement. Ce qui peut entraîner des vagues de licenciements non négligeables, voire la fin d’une activité. Les objets devenus obsolètes et laissés à l’abandon peuvent, s’ils sont mobiles, migrer vers les zones dans lesquelles ils sont valorisés. Pour la région ceci peut signifier un exode de ses ressources et à terme des dynamiques de pénurie difficiles à juguler. Il paraît difficile, en effet, de faire revenir des employés qualifiés qui, ayant perdu leurs emplois à un moment donné, se sont intégrés dans des systèmes de productionconcurrents. Un autre enjeu est celui de la destruction complète de l’objet. L’exploitation (voire sur-exploitation) sans renouvellement peut entraîner la destruction complète de l’objet et donc condamner toute utilisation par ailleurs (économique ou extra-économique).
46Dans le cas de la dynamique de mise en valeur, la ressource est en phase d’émergence. Une nouvelle activité se structure autour d’un objet existant, ici présent dans le territoire. Un nouveau lien objet/système de production se crée (c’est la ressource qui se crée, pas l’objet qui est préexistant ! ).
47Si l’objet est déjà constitué, le système de production, lui, ne l’est pas. Il se structure à mesure que la ressource prend forme, que se stabilise le processus d’identification et que s’organise la mise en œuvre. Souvent modeste au départ, le processus de production se construit en s’appuyant sur des modes de coordination de type réseau et sur le territoire de la réaffectation. La phase de mise en œuvre soulève trois enjeux. Le premier est lié à la capacité d’identification des acteurs. Sans identification, c’est-à-dire sans capacité de réinventer le territoire, de redonner aux objets un nouveau sens, la création de ressource ne peut se faire. Or, cette capacité ne va pas de soi. On l’a vu, par exemple, dans le cas du projet Watch Valley qui souffre précisément du manque d’adhésion des acteurs locaux à l’idée que le savoir-faire horloger et son patrimoine puissent constituer une réelle ressource touristique.
48L’autre enjeu majeur lors de cette phase concerne le nécessaire investissement de base ou de mise en ressource. Les cas ont montré que bien souvent une part de ces investissements engagés par le privé ou par le public l’est à fonds perdus. Les projets initiaux sont souvent embryonnaires. Ils se développent souvent à petite échelle. Les marchés n’étant pas encore constitués ces projets peuvent ne pas permettre la rentabilisation des investissements de base. Aussi, la relation objet/système de production dépend de l’objet, des contraintes qu’il impose et que l’entreprise, jeune, ne peut pas toujours contrecarrer.
49Le troisième enjeu est donc celui de la constitution du système de production. À savoir, de l’organisation, la formalisation des relations entre les acteurs de la production d’une part, de la constitution du produit et de la stabilisation du marché d’autre part. Pour qu’à terme la ressource puisse entrer dans une phase de consolidation dans lequel le système de production atteint un niveau de structuration tel qu’il est à même de générer les objets dont il a besoin (au contraire de la mise en valeur ou l’on utilise des objets existants).
50Enfin, la relation objet/système de production est en pleine émergence et, de ce fait, plutôt fragile. Elle repose souvent sur des acteurs individuels. Le système de production est encore peu structuré (tourisme). Dans le cas des mines, par exemple, le maintien du lien objet/intention dépend de la viabilité de l’entreprise exploitante. En effet, si celle-ci devait fermer (et ne pas être reprise), le lien pourrait ne plus être maintenu et ainsi la ressource disparaîtrait. Plus l’identification de la ressource est collective, plus un grand nombre de personnes reconnaît le potentiel ressource de l’objet et plus le risque de découplage se réduit.
51Le cas de la pénurie a été le moins documenté et observé dans l’étude empirique, ce qui constitue une limite certaine des résultats exposés ici. Il peut néanmoins, d’un point de vue analytique, être envisagé et décrit. Ce que l’on sait, c’est qu’un moment de pénurie signifie forcément la décroissance de la ressource. L’objet fait défaut. Insuffisant voire absent, il freine le développement du projet de production ce qui remet en question sa relation avec le système de production. Cette situation est, on l’a vu instable et ne peut se maintenir dans le temps. La forme de coordination privilégiée ici est mixte : il s’agit de la hiérarchie ou du marché. Le territoire est celui de l’approvisionnement ou de la constitution.
52L’enjeu pour les régions est que les situations de blocage générées par une dynamique de pénurie peuvent entraîner l’abandon de projets prometteurs voire leur délocalisation. La ressource, si elle est envisagée, identifiée par les acteurs, n’existe pas ou alors pas en suffisance. Elle reste à l’état de projet c’est-à-dire sans manifestation concrète.
53Ces situations peuvent également mettre en péril des activités importantes. On peut penser, par exemple, à ces objets dont les acteurs ne contrôlent pas directement le processus de reproduction : l’air, l’eau, la neige, l’ensoleillement, etc. et pour lesquels la substitution est difficile (trop coûteuse) voire impossible techniquement. C’est alors l’ensemble du système de production (tourisme, par exemple) qui est remis en question avec tout ce que cela implique en termes de perte d’emploi et de restructuration.
54Les dynamiques des ressources soulèvent on l’a vu un certain nombre d’enjeux. La croissance continue pose en particulier la problématique du renouvellement des objets-ressources ce qui renvoie par exemple aux politiques favorisant le développement des processus d’apprentissage régionaux (accompagner/favoriser l’émergence d’initiatives allant dans le sens du développement de structures de formation et de recherche, etc.). La mise en valeur appellera le soutien et la promotion de projets émergents (soutien à l’innovation sous toutes ses formes, etc.). Un aspect important à relever est celui de l’aspect collectif de l’identification qui est ici bien nécessaire. Si seul le porteur du projet de mise en valeur identifie la ressource, il y a peu de chances pour qu’il réussisse ne serait-ce qu’à lever les fonds nécessaires à son démarrage. Or le processus d’identification ne va pas de soi. Surtout lorsqu’il s’agit de réenvisager l’usage d’objets de l’environnement proche. Le passage par une mise à distance collective de la ressource peut s’avérer nécessaire (DAMIEN et SOBRY,2001). L’acteur public peut dans ce contexte être le porteur ou le coordonnateur des différentes logiques sous-tendant la mobilisation de ces objets. Il peut, par exemple, soutenir l’idée, aider au financement, etc. On a vu dans ces deux cas l’importance des relations de proximité ainsi que des dynamiques d’acteurs. Aussi les mesures d’animation locale favorisant les interactions entre acteurs apparaissent tout à fait souhaitables. En cas de pénurie, l’acteur public peut s’engager dans la création de l’objet manquant ou en faciliter l’accès (en cas de pénurie de main-d’œuvre, mettre sur pied des formations de base, favoriser la venue de personnes formées dans la région, etc.). Dans le cas de l’érosion/épuisement, il s’agira dans la mesure du possible de stimuler le renouvellement de l’objet (et donc le retour à une dynamique de croissance renouvelable) ou d’anticiper les crises structurelles à venir.
55La question du financement de l’investissement de renouvellement, ou de mise en ressource, se pose de manière redondante dans les dynamiques des ressources. Surtout lorsque les débouchés sont très incertains comme dans les cas de mise en valeur et de pénurie. On serait tenté de distinguer les investisseurs potentiels soit par leur caractère public ou privé, soit par leur forme d’organisation. En cas de croissance continue, par exemple, c’est le système de production, acteurs privés et publics inclus, qui se charge de ce type de financement. Pour ce qui est de la mise en valeur, on dirait alors qu’il s’agit indifféremment d’acteurs publics ou privés. On voit ainsi très vite les limites de la distinction public/privé. Ce qui apparaît déterminant c’est plus la nature de l’investissement, la nature du pari, l’objectif poursuivi et son contexte. Qu’il soit privé ou public, l’investissement en cas de pénurie ou de mise en valeur est un pari risqué, qui est parfois celui du pionnier ou du visionnaire. On crée en effet un objet, on met en forme une ressource, sans pour autant bénéficier de l’assise d’un système de production structuré et de marchés stabilisés. Aussi, la rentabilité économique ne suffit souvent pas à expliquer de tels investissements. La curiosité, l’attachement à un patrimoine sont importants dans la décision d’investissement et de la mise en ressource. D’autres justifications au sens de BOLTANSKI et THÉVENOT (1991), sont souvent sous-jacentes aux dynamiques des ressources et échappent à une logique strictement marchande. D’où la nécessité de relais de financement publics pour accompagner ce type de projets.
56Au-delà des mesures citées jusqu’ici ce qui apparaît important à la lumière de l’analyse par les dynamiques des ressources proposée ici, c’est la nécessité de suivre, dans une région, l’évolution de l’ensemble des ressources mobilisées par les systèmes de production de la région (des objets, des systèmes de production et de leur articulation). Ceci, de manière à anticiper les changements de dynamique (notamment les dynamiques d’érosion/épuisement) ainsi que les mouvements de ressources. Il serait ainsi possible de mieux cibler certaines politiques de développement, en général, ainsi que certaines politiques sectorielles (politique de l’éducation et de la science, par exemple).
57Aussi, le rapport au local de la ressource apparaît de manière différenciée dans l’analyse. Lorsque celle-ci se développe, c’est-à-dire lorsque la relation objet/système de production est en phase de création ou de renforcement (cas de mise en valeur et de croissance continue), l’analyse suggère en effet l’existence d’une forme d’ancrage ou de « passage par le local ». Lorsque la ressource régresse, elle semble au contraire s’ « émanciper » de son lieu de création et de mise en œuvre. Le rapport au local y est beaucoup moins structurant. Le développement d’une région s’appuie sur des ressources ayant des dynamiques et des rapports au local différents. L’enjeu est d’arriver à coordonner et à anticiper les différents lieux et temps dans lesquels se déroulent les processus de création et destruction, d’identification et de la mise en œuvre de la ressource. Il s’agit d’assurer le maintien de la relation objet/système de production ou de la mise en continuité de ces processus et d’anticiper les éventuels changements de territorialité inhérents à l’évolution des ressources.
Conclusion
58Partant d’une approche territoriale et institutionnelle des ressources et du modèle conceptuel des dynamiques des ressources, l’article proposait d’explorer les dimensions technique, socio-institutionnelle et territoriale des ressources, ceci au travers de l’analyse de quatre études de cas.
59L’analyse a permis d’enrichir le modèle conceptuel des typologies des modes de coordination et des territoires des ressources. Il a ainsi été montré que l’articulation des dimensions technique, socio-institutionnelle et territoriale s’effectue de manière différenciée selon la manière dont objet et système de production s’articulent. D’une dynamique à l’autre, la division spatiale des processus qui constituent la ressource (soit la création, la destruction, l’identification et la mise en œuvre), se manifeste et se coordonne de manière spécifique. Aussi le rapport au territoire n’apparaît ni unique, ni figé, ni irrévocable. Tout comme les dynamiques des ressources qui évoluent à travers le temps.
60Du point de vue du développement régional, différents enjeux sont apparus suggérant la nécessité, pour les régions, d’anticiper et d’accompagner si nécessaire les dynamiques des ressources sur lesquelles leur développement économique s’appuie, ceci en tenant compte de leurs particularités, qu’elles soient en croissance renouvelable, érosion/épuisement, mise en valeur ou pénurie.
Bibliographie
Bibliographie
- AYDALOT P., 1986, Milieux innovateurs en Europe, GREMI, Paris.
- BOLTANSKI L. et THEVENOT L., 1991, De la Justification, les économies de la grandeur, Gallimard, Paris.
- CAMAGNI R., MAILLAT D. et MATTEACCIOLI A. (eds), 2004, Ressources naturelles et culturelles, milieux et développement local, EDES-GREMI, Neuchâtel.
- COLLETIS G. et PECQUEUR B., 1994, « Les facteurs de la concurrence spatiale et la construction des territoires », in GAROFOLI G. et VAZQUEZ BARQUERO A. (eds),Organization of production and territory : local models of development, Gianni Iuculano Editore, Pavia, pp. 95-115.
- COLLETIS G. et PECQUEUR B., 2004, « Révélation de ressources spécifiques et coordination située », présenté dans le cadre des Quatrièmes journées de la proximité « Proximité, Réseaux et Coordination », Marseille, 17 et 18 juin 2004.
- CREVOISIER O., 1994, « Dynamique industrielle et dynamique régionale : l’articulation par les milieux innovateurs », Revue d’économie industrielle, no 70, pp. 33-48.
- CREVOISIER O., 2001, « L’approche par les milieux innovateurs : état des lieux et perspectives », Revue d’Économie Régionale et Urbaine, vol. 1, pp. 153-165.
- CREVOISIER O., CORPATAUX J. et THIERSTEIN A., 2000, Des gagnants et des perdants, intégration monétaire et région, L’Harmattan, Paris.
- DAMIEN M. A. et SOBRY C., 2001, Le tourisme industriel : le tourisme du savoir-faire ?, L’Harmattan, Paris, Montréal, Budapest, Turin.
- DE GREGORI T., 1987, « Resources Are Not, They Become : An Institutional Theory »,Journal of economic issues, vol. XXI, no 3, pp. 1241-1263.
- DE MONTGOLFIER J. et NATALI J.-M., 1987, Le patrimoine du futur, Economica, Paris.
- DOLOREUX D., 2002, « Regional Innovation Systems Compared : an Exploratory Study of two Regions in Canada », ISRN LiU-TEMA-T-WP-250-SE, Linköping University, Linköping.
- DUBET F., 1989, Immigration : qu’en savons-nous ?, La Documentation Française, Paris.
- GENÈVE PLACE FINANCIÈRE, 1998a, Le négoce international à Genève, Fondation Genève Place Financière, Genève.
- GENÈVE PLACE FINANCIÈRE, 1998b, Tout savoir sur la place financière de Genève, Fondation Genève place financière, Genève.
- HUNKER H. L. (ed.), 1964, Erich W. Zimmermann’s Introduction to world resources, Harper & Row, New York, Evanston, London.
- JELMINI J.-P., 1987, « Les mines d’asphalte du Val-de-Travers », Nouvelle revue neuchâteloise, no 14.
- KEBIR L., 2004, Ressources et développement, une approche institutionnelle et territoriale, Thèse de doctorat, Université de Neuchâtel, Neuchâtel.
- KEBIR L. et CREVOISIER O., 2004a, « Dynamique des ressources et milieux innovateurs », in MAILLAT D., CAMAGNI R. et MATTÉACCIOLI A. (eds), Ressources naturelles et culturelles, milieux et développement local, EDES-GREMI, Neuchâtel, pp. 261-290.
- KEBIR L. et CREVOISIER O., 2004b, « Ressources culturelles et développement régional : le cas du patrimoine culturel horloger », présenté dans le cadre des Quatrièmes journées de la proximité « Proximité, Réseaux et Coordination », Marseille, 17 et 18 juin 2004.
- LUNDVALL B. A., 1988, Innovation as an Interactive Process – from User-producer Interaction to the National System of Innovation, in DOSI G. et al. (eds), Technical Change and Economic Theory, Pinter Publisher, Londres, pp. 349-369.
- MAILLAT D., 1996, « Du district industriel au milieu innovateur : contribution à une analyse des organisations productives territorialisées », Working Paper no 9606, Neuchâtel.
- MAILLAT D., CREVOISIER O. et LECOQ B., 1991, « Réseau d’innovation et dynamique territoriale. Un essai de typologie », Revue d’Économie Régionale et Urbaine, no 3-4, pp. 407-432.
- OCDE, 1993, Développement territorial et changement structurel, Paris.
- OCDE, 1995, Économies locales et globalisation, Paris.
- OLLAGNON H., 1984, « Acteurs et patrimoine dans la qualité des milieux naturels »,Aménagement et nature, no 74, pp. 1-4.
- RAFFESTIN C., 1980, Géographie économique du pouvoir, Librairies techniques (LITEC), Paris.
- PIORE M. et SABEL C., 1984, The Second Industrial Divide, Basic Books, New York.
- RALLET A., 2000, « De la globalisation à la proximité géographique : pour un programme de recherches », in GILLY J.-P. et TORRE A. (eds), Dynamiques de proximité, L’Harmattan, Paris, pp. 37-57.
- SCOTT A. J., 1998, Regions and the world economy, Oxford University Press, Oxford.
- SCOTT A. J. et STORPER M., 2003, « Regions, globalization, development », Regional studies, vol. 37, no 6-7, pp. 579-593.
- STORPER M., 1992, « The Limits to Globalization : Technology Districts and International Trade », Economic Geography, vol. 68, no 1, pp. 60-92.
- VELTZ P., 1996, Mondialisation villes et territoires : l’économie d’archipel, Presses Universitaires de France, Paris.
- VIRASSAMY C., 2002, « Les pôles d’économie du patrimoine », Territoires 2020, Revue d’étude et de prospective, no 4, pp. 79-89.
- ZIMMERMANN E. W., 1951, World resources and Industries, Harper & Bros., New York.
Notes
-
[*]
Première version décembre 2005, version révisée mai 2006.
Le présent travail est issu de travaux réalisés à l’Institut de recherches économiques et régionales à l’Université de Neuchâtel. -
[1]
- Une ressource peut devenir obsolète ici mais ne pas l’être ailleurs. En effet, la délocalisation de certaines activités productives peut entraîner l’obsolescence d’un certain savoir-faire ici, la valorisation du même savoir-faire là-bas.
-
[2]
- Il faut parfois un certain temps avant qu’un objet, chargé d’une histoire passée (fermeture d’usine douloureuse, attachement à un lieu, etc.) puisse être réaffecter à un nouvel usage. Il faut, en effet, que l’objet change de sens aux yeux des acteurs pour qu’ils puissent imaginer et identifier de nouvelles combinaisons productives. Une mise à distance au sens de DUBET (1989) est souvent nécessaire.
-
[3]
- Les trois premières se basent sur les données récoltées dans le cadre de la sixième enquête du Groupe européen de recherche sur les milieux innovateurs (GREMI) (KEBIR et CREVOISIER in CAMAGNI et al., 2004). Plutôt que d’approfondir un cas particulier, il a été décidé de choisir plusieurs cas de ressources. Ils ont été choisis de manière à couvrir des ressources matérielles et immatérielles, des ressources mobilisées dans un cadre urbain ou plutôt rural (périphérique), dans des activités tertiaires différentes (tourisme, service, etc.). Certaines ressources existent et sont mobilisées depuis longtemps, d’autres ont émergé plus récemment.
-
[4]
- Pour une présentation plus détaillée des études de cas, voir KEBIR et CREVOISIER (2004). Pour le rapport complet, voir KEBIR (2004).
-
[5]
- Cette étude de cas s’est appuyée pour la partie historique sur les recherches de J. P. JELMINI (1987).
-
[6]
- À noter que cette ressource a connu des phases de transformation radicale (développement de la montre à quartz, puis de la montre bijou, etc.). Il s’agissait alors de mettre en valeur et d’absorber de nouvelles connaissances techniques, organisationnelles, managériales, etc. (CREVOISIER, 1994 ; KEBIR et CREVOISIER, 2004).
-
[7]
- Cette étude de cas s’est appuyée sur les publications de la FONDATION GENÈVE PLACE FINANCIÈRE (1998a et 1998b) ainsi que sur les travaux de recherches de CREVOISIER, CORPATAUX, THIERSTEIN (2000).
-
[8]
- Très tôt dans l’enquête il s’est avéré nécessaire, pour l’analyse, de distinguer ces deux aspects du savoir-faire bancaire genevois.
-
[9]
- Le terme de sous-ressource est proposé ici par analogie au terme « sous-produits » (by-product) utilisé en économie. Il suggère le fait que l’exploitation d’une ressource entraîne la création des ressources nécessaires à sa mise en œuvre. Ce qui n’exclut pas que ces sous-ressources fassent par ailleurs (ou ensuite) ressource dans le cadre d’autres activités.
-
[10]
- Savoir-faire en tant que ressource industrielle horlogère.
-
[11]
- Savoir-faire horloger en tant que ressource touristique.