Notes
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Première version avril 2002, version révisée novembre 2002.
Ces travaux bénéficient du soutien financier de l’ADEME (Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie), du Conseil Régional de Bourgogne, du Conseil Scientifique de l’ENESAD et du PIREE (Programme Inter-institutionnel d’Études et de Recherches en Économie de l’Environnement).
Une version préliminaire de cet article a été présentée à la 7ème Conférence Biennale de la Société Internationale pour l’Économie Écologique, Sousse (Tunisie), 6-9 mars 2002. Sa réécriture a bénéficié des lectures attentives de Denis Barthélemy et des deux lecteurs anonymes de la RERU. Nous les en remercions avec une mention particulière pour le commentaire très détaillé de l’un d’entre eux. -
[**]
Les chiffres entre parenthèses renvoient aux notes en fin d’article.
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[1]
Effets externes à la décision de leurs émetteurs, sinon au marché.
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[2]
La différenciation environnementale valorisable peut provenir d’une production en parc naturel ou en montagne ; dans le cas de la montagne, la réputation de milieu préservé correspond à un handicap naturel qui augmente les coûts et réduit la rente.
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[3]
Mais l’effort ne porte pas sur leur processus central de production : l’embouteillage.
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[4]
LUPTON (2001) introduit une nouvelle catégorie : les caractéristiques controversées où tous les agents sont affectés par une incertitude radicale notamment du fait d’une connaissance scientifique non stabilisée.
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[5]
Bien que ces notions aient été évoquées depuis longtemps (loi de Gresham sur la fausse monnaie ; remarques d’Adam SMITH sur les risques liés à l’accomplissement de certaines tâches par un agent non propriétaire), la notion de sélection adverse a été notamment formalisée par AKERLOF à partir du marché des voitures d’occasion (1970) et celle de hasard moral par ARROW (1963) sur les services médicaux et par JENSEN et MECKLING (1976) sur les relations d’agence entre actionnaires et managers.
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[6]
Notons que cette théorie peut être invalidée, si certaines conditions ne sont pas réalisées, notamment au niveau de la concurrence. Par exemple, certaines firmes peuvent choisir de « taire » des caractéristiques positives de leurs produits (ex. des cigarettes à faible taux de nicotine), si cette différenciation risque de « cannibaliser" leur propre marché relatif à des produits similaires (ex : en concurrençant leurs propres cigarettes classiques).
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[7]
Le règlement communautaire permet à Danone l’utilisation du terme « bio » pour des produits non biologiques jusqu’en 2006 dans la mesure où la marque avait été enregistrée avant 1991, et à condition que l’étiquetage des produits mentionne que ces derniers ne sont pas issus de l’agriculture biologique et qu’en 2006 la marque soit supprimée ou que Danone se conforme à la réglementation communautaire.
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[8]
Outre les mécanismes endogènes à la relation vendeur-acheteur, d’autres mécanismes exogènes sont susceptibles d’améliorer l’efficacité de la relation marchande, comme l’imposition de normes minimales de qualité par les autorités publiques ou le recours à des tiers garantissant l’information fournie.
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[9]
La notion de confiance morale se rapporte à une situation d’accord sur les valeurs éthiques de l’autre, tandis que la confiance technique concerne les compétences nécessaires par rapport à la transaction. Par exemple, la confiance morale peut être très forte dans le cas d’un ami proche (absence de crainte d’opportunisme ou de malhonnêteté) et simultanément très faible dans sa composante technique, s’il s’agit en l’occurrence de réaliser une opération à cœur ouvert réclamant des compétences techniques très précises d’un chirurgien. De même, alors que la confiance technique dans les compétences d’un chirurgien pourrait être très bonne, la confiance morale dans ce dernier pourrait être très faible.
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[10]
Herbert SIMON, à l’origine du concept de rationalité limitée reconnaît ainsi : « Ce que consomme l’information est évident : elle consomme l’attention de ses destinataires. Ainsi, une profusion d’informations génère une pauvreté de l’attention et un besoin d’allouer cette attention efficacement parmi la surabondance des sources d’information qui pourraient la consommer ». (Traduction personnelle : « What information consumes is rather obvious : it consumes the attention of its recipients. Hence a wealth of information creates a poverty of attention, and a need to allocate that attention efficiently among the overabundance of information sources that might consume it ». Herbert SIMON, in Scientific American, September, 1995, p. 201).
I – Introduction
1De nombreux consommateurs expriment une préférence pour des produits différenciés selon des caractéristiques environnementales dont la plupart n’ont pas d’effets détectables sur le produit final. Du fait de cette indétectabilité par le consommateur, cette différenciation des produits relève généralement d’une différenciation informationnelle qui se concrétise sur le marché final à travers l’étiquetage. La littérature a étudié ce problème d’asymétrie en la considérant comme portant sur un objet uniforme et défini pour chacune des parties, en l’occurrence le producteur et le consommateur. Notre apport consiste à traiter de l’asymétrie d’information mais aussi de l’objet, du contenu de cette information. Nous réalisons notamment une distinction fondamentale entre les caractéristiques environnementales relatives à un processus de production respectueux de l’environnement et celles relatives à un milieu de production préservé. Si les caractéristiques environnementales des produits, encouragées par les pouvoirs, publics sont liées à un impact moindre du processus de production sur l’environnement, pour les consommateurs et les annonceurs, elles sont souvent éclipsées par la réputation environnementale du lieu de production, facteur de qualité privative du produit.
2Dans la partie 2, nous analysons à quoi se réfèrent les allégations environnementales présentes sur les produits agro-alimentaires et proposons, à partir d’exemples, une typologie de ces allégations en distinguant notamment les allégations relatives à un processus de production respectueux de l’environnement et les allégations relatives à un milieu de production préservé. Par ailleurs, étant donnés l’asymétrie informationnelle entre le producteur et le consommateur ainsi que le risque de confusion du consommateur sur le contenu de l’allégation, la partie 3 présente les risques de manipulations informationnelles de la part du producteur. Ensuite, nous déterminons les différents équilibres dans un modèle simple de relation bilatérale entre un producteur et un consommateur et montrons les défaillances auxquelles ils aboutissent sous ces diverses conditions. Enfin, dans la partie 4, nous proposons quelques mécanismes susceptibles d’atténuer les défaillances du marché provoquées par les problèmes précédents et de rétablir une certaine efficacité de la relation marchande.
II – Réputation environnementale : du producteur et/ou du lieu de production ?
3L’objet de cette partie est de proposer une typologie des allégations relatives aux produits agro-alimentaires en distinguant notamment ce qui relève des efforts d’agents privés visant à préserver l’environnement et ce qui relève d’une réputation du lieu de production en tant que milieu préservé. La figure 1 représente les origines possibles de la qualité et de la réputation d’un lieu. Elle peut résulter de différents mécanismes producteurs de qualité environnementale dont certains sont le fait de la firme, d’autres non et auxquels correspondent divers mécanismes de consommation.
Déterminants de la qualité environnementale et de la réputation du lieu de production
Déterminants de la qualité environnementale et de la réputation du lieu de production
2.1 – La réputation environnementale basée sur les efforts du producteur ou d’autres agents
4Différents agents peuvent entreprendre des efforts de nature diverse, visant in fine à améliorer l’état de l’environnement. Ces efforts peuvent être réalisés directement par le producteur ou indirectement en ayant recours à d’autres agents que le producteur soutient financièrement ou autrement. Ces efforts peuvent aller du simple fait de ménager l’environnement jusqu’à l’engagement dans des démarches coûteuses de management environnemental visant l’amélioration continue des performances environnementales. Par exemple, la réputation environnementale de certaines firmes se construit autour d’actions spécifiques réalisées par la firme elle-même, sur son processus de production, comme l’adoption d’un système de management environnemental de type ISO 14001 ou la production d’écoproduits conformes aux exigences des écolabels gouvernementaux comme la marque NF-Environnement ou l’Écolabel européen. D’autres construisent leur réputation environnementale, non par une action directe visant à réduire les impacts environnementaux de leurs activités, mais plutôt en participant à des actions déconnectées de leur processus de production et réalisées par d’autres agents, souvent des associations environnementales bénéficiant d’une forte reconnaissance et crédibilité publiques. Ces actions peuvent être clairement spécifiées ou au contraire laissées à la discrétion de l’organisme réalisateur. Les formes courantes de soutien comprennent le mécénat, le parrainage et le financement d’opérations spéciales, comme la replantation d’arbres. Plusieurs marques agroalimentaires apposent le logo d’associations environnementales connues, comme le WWF, en contrepartie d’un soutien financier. Dans certains cas, le producteur peut bénéficier d’externalités positives engendrées par les efforts d’autres agents du même secteur ou de la même région, sans qu’elle soit réellement partie prenante de ces efforts. Certaines industries peuvent bénéficier d’une image environnementale positive et une firme peut profiter de cette perception sans pour autant contribuer à ce bien public, en adoptant un comportement de free rider. Les trois origines des efforts contribuant à la réputation environnementale de la firme – efforts propres de la firme, participation aux efforts d’autres agents, externalités positives engendrées par les efforts d’autres agents – ne sont pas mutuellement exclusives et peuvent coexister au sein de la construction de la réputation d’une firme donnée.
5L’exemple de l’agriculture biologique est intéressant, car il est source d’ambiguïtés dans l’esprit du consommateur parfois entretenues par les mercaticiens. En adoptant le mode de production de l’agriculture biologique, les efforts de l’agriculteur sont perçus comme une contribution permettant : 1/ de protéger l’environnement en s’abstenant de l’utilisation d’intrants de synthèse, susceptibles de constituer des sources de pollution, et 2/ de préserver le produit d’éventuelles contaminations par son milieu de production, susceptibles d’affecter sa qualité sanitaire. Cet exemple traduit le rapport ambigu entre les efforts du producteur pour protéger l’environnement et la qualité environnementale du milieu, relativement indépendante, sur le court terme, des choix individuels des agents, en l’occurrence de ceux de l’agriculteur adoptant le mode de production de l’agriculture biologique. Malgré les résultats contrastés des études scientifiques, les qualités sanitaires ou gustatives, espérées par le consommateur, sont perçues comme consécutives aux efforts de l’agriculteur et à la qualité du milieu.
2.2 – La production de la qualité environnementale
6La qualité environnementale d’un lieu, qu’il serve à la production de denrées agro-alimentaires ou à l’usage direct de l’environnement résulte de la combinaison de quatre mécanismes : la naturalité, l’externalité, la production publique et la production privée (figure 1). Les deux premiers sont des mécanismes non-intentionnels et les trois derniers, anthropiques. Seules les productions publique et privée, du fait de leur intentionnalité, peuvent être qualifiées de production au sens strict.
7La qualité naturelle du lieu, montagne, zones reculées, loin des pollutions, ne résulte pas d’efforts même si ce sont des handicaps naturels donc des coûts pour l’entreprise. L’entreprise qui y exerce est de facto dans une zone où l’état de l’environnement est bon. Mais parce qu’elle est donnée, cette qualité ne bénéficie pas d’une procédure de suivi, de contrôle. D’où la possibilité de poches de pollutions pouvant contaminer les denrées agricoles comme les pollutions industrielles des vallées de Maurienne, du Lannemezan, les pollutions autour d’incinérateurs.
8L’externalité des effets [1] [**] sur l’environnement, désignée comme le principal déterminant de la qualité de cet environnement, est à ce titre objet de suivi, de contrôle. La désignation de ce phénomène d’externalité est la première étape de sa correction. Peu à peu, cette internalisation intègre l’effet dans la décision et en fait l’objet d’une production.
9La construction d’un lieu de qualité environnementale, instituée et/ou reconnue (espace protégé comme un Parc Naturel), résulte de décisions, essentiellement publiques, dont la première est le choix initial (classement) d’un lieu remarquable donc a priori naturellement préservé. À l’état initialement bon de l’environnement, s’ajoute une baisse des pressions sur l’environnement et même des réponses en terme de réparation. Dans la décision, s’instaure une procédure de contrôle des pressions et de suivi (monitoring) de l’état de l’environnement, procédures qui font partie des réponses. Par ailleurs, le respect de l’environnement par le producteur peut parfois être encouragé par les pouvoirs publics. Cette limitation des externalités négatives, quand elle nécessite un effort, représente une production privée d’environnement. La qualité environnementale du lieu ainsi déterminée, est une composante de la réputation environnementale mais surtout globale, en particulier sanitaire, du produit.
2.3 – La consommation de la qualité environnementale
10Ainsi est produit l’environnement comme bien collectif. Qui en sont les bénéficiaires ? En plus des usagers habituels de l’environnement in situ, habitants ou touristes, profitant du bon air et du paysage, le consommateur de produits issus de ce milieu préservé en reçoit le bénéfice, physique ou en croyance. Contrairement à l’usager direct, il paye cette qualité., Les bénéficiaires économiques de l’environnement préservé sont donc l’usager qui y a accès gratuitement et le producteur qui en revend la réputation au consommateur. Dans ce dernier cas, on peut parler de rente [2]. Le comportement des producteurs peut être ramené à l’exploitation d’une rente différentielle, c’est-à-dire d’une différence entre le prix et le coût moyen de production du fait de l’hétérogénéité de la réputation environnementale attribuée par les consommateurs aux différentes localisations. Sans trop forcer l’analogie, la rente associée à la réputation du lieu de production peut être mise en parallèle avec la rente différentielle de RICARDO relative aux différences de fertilité entre les terres. Dans notre cas, ce ne sont pas les différences de fertilité qui engendrent la rente, mais les différences dans les réputations environnementales reconnues aux différentes localisations. À ce propos, les travaux de MOLLARD (2001) relatifs à la rente de qualité territoriale sont éclairants en combinant les approches ricardienne et marshallienne de la rente. Sans nous étendre, nous retiendrons que certaines localisations disposent « de ressources spécifiques dotées d’effets externes internalisables sous la forme d’une rente territoriale, se traduisant, à coût égal, par des prix plus élevés en comparaison avec une offre comparable localisée ailleurs » (MOLLARD, 2001, p. 31). Cette internalisation de la réputation du lieu de production peut aboutir à une différenciation informationnelle des produits. Cette différenciation se traduit par l’acceptation d’un surprix par les consommateurs, ce surprix alimentant la rente exploitée par les producteurs. D’autre part, dans la continuité de la tradition marshallienne, les produits différenciés procurent à certains consommateurs un surplus d’utilité, susceptible de constituer une rente de qualité pour les consommateurs.
11Nous opposons cette situation à celle de l’effort environnemental. Dans ce cas, la qualité du milieu ainsi ménagé, n’est pas destinée, principalement, ni au producteur, ni au consommateur de la denrée signalée : l’allégation suggère un bénéficiaire tiers ou collectif, en jouant sur l’altruisme du consommateur.
12À l’éventuelle coproduction physique, objective de l’environnement par la firme, s’ajoute une production d’information, mercatique, destinée à rendre le consommateur plus réceptif. Dans ce schéma, le producteur peut être soit (co)producteur d’environnement, ce qui correspond à un effort environnemental avec coût, soit utilisateur du milieu préservé, et ainsi bénéficiaire de la rente correspondante, soit les deux à la fois, mais de façon indépendante puisque l’effort environnemental du producteur est en général de peu de poids sinon négligeable dans la qualité du milieu ; on trouve quelques exceptions autour d’entreprises d’eaux minérales [3] et de cosmétiques.
13En résumé, on peut ramener la distinction « efforts environnementaux / milieu préservé » à celle entre la production privée d’un bien collectif et l’utilisation privative d’un tel bien (tableau 1). C’est dans cette construction sociale complexe (notamment scientifique dans la connaissance des relations de causalité mais mercatique dans le signalement) que s’inscrit la construction des rentes réputationnelles.
Contributions à la réputation environnementale
Contributions à la réputation environnementale
III – Information environnementale : objet de manipulations
14Nous analysons deux types de problèmes en ce qui concerne la différenciation environnementale des produits agro-alimentaires : le risque de confusion du consommateur sur le contenu de l’allégation et l’asymétrie d’information entre le producteur et le consommateur ; ces deux phénomènes peuvent fournir des occasions de manipulation. Nous proposons ensuite un modèle simple de relation bilatérale entre un producteur et un consommateur. Nous déterminons les différents équilibres et montrons les défaillances auxquelles ils mènent sous diverses conditions.
3.1 – Les deux types de problèmes
15En référence à la nouvelle théorie du consommateur développée par LANCASTER (1979), chaque produit peut être décrit comme un ensemble de caractéristiques indépendantes qui peuvent être évaluées par le consommateur. En fonction de cette évaluation, le consommateur choisit le produit présentant la combinaison de caractéristiques lui procurant le maximum d’utilité en fonction de ses contraintes de budget. L’adjonction de caractéristiques environnementales au produit agro-alimentaire permet de différencier un produit agroalimentaire de ses concurrents. Dans une approche simplifiée, un produit agro-alimentaire peut être considéré comme la combinaison de caractéristiques classiques et de caractéristiques environnementales. Cette différenciation, généralement intangible au niveau du produit final pour le consommateur, nécessite une « différenciation informationnelle » du produit permettant de le distinguer (TIROLE, 1993).
16 Risques de confusion du consommateur sur le contenu de l’allégation environnementale
17L’un des problèmes est celui de la confusion du consommateur sur le contenu de l’allégation environnementale. Ainsi, le consommateur peut confondre le fait que la firme bénéficie d’un milieu de production préservé et la mise en œuvre par la firme de processus de production respectueux de l’environnement. La présence d’une caractéristique peut signifier pour lui la présence de l’autre.
18Nous distinguons le problème de confusion sur le contenu de l’écoétiquetage de celui de l’asymétrie d’information entre consommateur et producteur. En effet, même en cas de symétrie d’information entre le producteur et le consommateur, celui-ci ne donne pas forcément le même contenu que le producteur à l’énoncé de l’information.
19Ce problème de confusion du consommateur peut avoir plusieurs origines : 1/ être induit par l’écoétiquetage et/ou 2/ provenir des capacités cognitives limitées du consommateur.
201/ La firme peut avoir intérêt à manipuler la formulation de l’information afin de favoriser l’achat de ses produits différenciés. Le problème de confusion est en étroite relation avec la dimension privative ou collective de l’achat de produits respectueux de l’environnement. En effet, alors que les consommateurs expriment leurs préférences pour des produits moins nuisibles à l’environnement, dans la réalité, il existe un écart entre déclarations et pratiques d’achat. La dimension collective des bénéfices de préservation de l’environnement peut en partie expliquer cet écart, à travers des comportements de passagers clandestins. Les firmes sont alors incitées à insister sur la dimension privative de leur différenciation environnementale. De manière simplifiée, on peut dire que (a) l’achat de produits provenant d’un milieu préservé a essentiellement une dimension privative alors que (b) l’achat de produits issus d’un processus de production respectueux de l’environnement a, à la fois, une dimension collective et privative.
21(a) Pour le consommateur, le milieu préservé a essentiellement une dimension privative sous deux aspects. En effet, le milieu de production préservé dont est issu le produit est circonscrit et donc sujet à rivalité. Par ailleurs, le consommateur est sensible à l’effet de l’environnement sur la qualité intrinsèque des produits notamment sanitaire, à dimension privative. Ainsi, un environnement préservé par un certain éloignement d’une source de pollution (autoroute, décharge) contribue à préserver les produits d’une certaine contamination par l’environnement (plomb, dioxine).
22(b) Les efforts environnementaux de la firme ont eux une dimension collective et privative. À travers ses efforts environnementaux, la firme produit une qualité environnementale dont bénéficient d’autres individus comme les usagers de l’environnement par exemple. Cependant, les efforts environnementaux ont aussi une dimension privative pour le consommateur puisqu’ils contribuent à terme à l’amélioration de la qualité de l’environnement et éventuellement, mais de manière difficilement mesurable, à la qualité des produits. Comme nous l’avons vu dans la première partie, il est vrai qu’à terme les efforts environnementaux devraient améliorer la qualité du milieu de production. Mais, l’horizon temporel est lointain et la part des efforts environnementaux de la firme dans la qualité du milieu de production est souvent mineure. Le consommateur perçoit néanmoins un lien entre la mise en œuvre de processus de production respectueux de l’environnement et une meilleure qualité intrinsèque des biens.
232/ Par ailleurs, la confusion peut provenir des capacités cognitives limitées du consommateur. Celui-ci même en symétrie d’information est confronté à un flot d’informations provenant soit de la multiplication des écoétiquetages sur les produits, soit de la multiplication de l’information sur d’autres caractéristiques des produits tels que les signes de qualité privés ou publics. Le problème de confusion apparaît à cause des capacités limitées de traitement de l’information du consommateur. Cette surabondance d’information fait qu’il est parfois plus efficace de fournir au consommateur une information résumée, claire et utile capable de capter l’attention du consommateur plutôt qu’une information factuelle, correcte et détaillée (WYNNE, 1994).
24Ainsi, selon MENELL (1996), le consommateur a tendance à mettre en œuvre des procédures de simplification dans ses décisions d’achat lorsqu’une information complexe lui est fournie et à s’appuyer excessivement sur l’information disponible ainsi que sur ses perceptions initiales.
25Du fait des manipulations de l’écoétiquetage par les firmes ainsi que des capacités cognitives limitées du consommateur, celui-ci peut confondre le fait que la firme bénéficie d’un milieu de production préservé et la mise en œuvre par la firme de processus de production respectueux de l’environnement.
26 L’asymétrie informationnelle
27L’économie de l’information (NELSON, 1970 ; DARBY, KARNI, 1973) classe les attributs des biens en 3 catégories : les attributs de recherche dont la qualité est connue avant l’achat par simple observation comme la couleur ; les attributs d’expérience dont la qualité n’est connue qu’après l’achat comme le goût ; enfin, les attributs de croyance dont la qualité n’est connue ni avant, ni après l’achat [4] tel que le bien-être animal.
28La notion de biens de croyance, credence goods, a été introduite par DARBY et KARNI (1973). Dans leur définition, elle désigne un processus de production dans lequel des inputs sont utilisés en combinaison avec d’autres aux propriétés incertaines pour produire un output qui, lui, est mesurable. Un niveau d’output donné est donc un faible indice du niveau de qualité des premiers inputs. Par exemple, lors de la fourniture d’un service de réparation de voiture, un consommateur non expert ne sait pas diagnostiquer les raisons de la panne. Les inputs du processus de réparation sont les efforts du garagiste (main-d’œuvre, installation de pièces, etc.) et la voiture, dont les propriétés ne sont pas connues par le consommateur. Celui-ci peut vérifier l’output (la voiture fonctionne) mais ne sait si le niveau d’effort facturé par le garagiste correspond bien à celui nécessité. Si le consommateur pouvait acheter le diagnostic et le service de réparation à deux sources différentes, le problème ne se poserait pas. Du fait du coût élevé d’achat séparé du diagnostic et du service de réparation, le service de réparation est ici un bien de croyance.
29La notion de bien de croyance peut aussi désigner un processus de production dans lequel l’output est, au moins de manière subjective, stochastique. Ainsi, pour un niveau d’output donné, il est difficile de connaître le niveau de qualité de l’input. C’est le cas dans le domaine de l’environnement. Une amélioration environnementale constatée peut être le fait de nombreux mécanismes dont des phénomènes naturels complexes. Il est ainsi difficile de l’attribuer aux efforts d’un agent donné.
30Pour les attributs de croyance, le consommateur, dans l’incapacité de vérifier le lien complexe entre inputs et outputs, doit croire ou non.
31Les attributs environnementaux peuvent être des attributs de recherche ou d’expérience. C’est le cas de la quantité d’emballage par exemple. Par observation ou après l’achat d’un produit, le consommateur est capable de déterminer quel produit possède le moins d’emballages. Cependant, les attributs environnementaux sont souvent des attributs de croyance. La mise en œuvre de processus de production respectueux de l’environnement par un producteur n’est pas détectable sur le produit ni avant ni après l’achat et la consommation. L’information au sujet des caractéristiques environnementales des produits est généralement inégalement répartie entre le producteur informé et le consommateur non-informé. En effet, le producteur connaît les caractéristiques environnementales de ses produits en termes de localisation de la production, de la nature respectueuse ou non du processus de production mis en œuvre alors que ces caractéristiques sont cachées et indétectables par le consommateur, au niveau de la transaction.
32Cette asymétrie de l’information, source de défaillances des marchés à assurer un optimum de Pareto se décline traditionnellement en risque moral et en sélection adverse. Les notions de risque moral et de sélection adverse ou d’antisélection ont été initialement développées dans des contextes spécifiques [5], avant que leur portée explicative ne soit étendue à une multitude de situations économiques. Le risque moral se réfère à une situation d’opportunisme ex post où l’agent non-informé ne peut observer le comportement ou le niveau d’effort caché de l’autre agent. Par exemple, dans le cadre d’un contrat d’assurance, l’agent assuré contre l’incendie peut avoir moins d’incitations à éviter les risques d’incendie et en cas de sinistre, être tenté de cacher son comportement négligent. Les attributs environnementaux des produits agro-alimentaires peuvent être assimilés à un contrat implicite où le producteur s’engage à fournir de manière permanente une certaine qualité environnementale. Il est couramment admis que le consommateur utilise des raccourcis mentaux en rachetant fréquemment une marque connue sans vérifier de nouveau l’ensemble de ses attributs, sans parler des attributs de croyance qui sont par définition invérifiables. Dans une perspective d’achats répétés, le consommateur s’attend au maintien des attributs environnementaux réalisés lors de la transaction initiale. Bénéficiant d’une réputation environnementale dans l’esprit du consommateur, le producteur peut être tenté de transformer la qualité environnementale du processus de production lors des transactions futures. Quant à la sélection adverse, elle concerne une forme d’opportunisme ex ante, c’est-à-dire la possibilité de manipulation d’une information cachée sur une caractéristique fixée et permanente, susceptible d’induire l’agent non-informé en erreur. Au moment de l’achat, certaines caractéristiques environnementales sont déjà réalisées et fixées, telles que la localisation du lieu de production ou la mise en œuvre d’un processus de production respectueux de l’environnement. Un producteur peut être tenté de mentir sur les véritables caractéristiques environnementales du produit, par exemple en annonçant la mise en œuvre d’un processus de production respectueux de l’environnement alors que le produit est issu d’un mode de production conventionnel.
33Malgré l’intérêt d’une étude simultanée des situations de risque moral et de sélection adverse dans une perspective de transactions répétées, nous excluons les situations de risque moral du champ de notre étude. Dans un souci de simplification, nous imitons l’hypothèse effectuée par ROGERSON (1983) dans un contexte similaire. Outre l’aspect pédagogique de ne traiter qu’un aspect à la fois, il semble réaliste de considérer que l’appropriation d’un mode de production respectueux de l’environnement est dans une certaine mesure un choix effectué une fois pour toutes. En effet, ce choix correspond essentiellement au choix d’une localisation, à un éventuel investissement matériel initial et surtout à l’acquisition et à la mise en œuvre de savoirs et de compétences par les ressources humaines de l’entreprise considérée, ces éléments étant difficilement modifiables d’une transaction à l’autre. De plus, outre la difficulté associée à une éventuelle modification de ces paramètres, leur acquisition peut également constituer une source de gains (stratégies « win-win-win », GROLLEAU, 2001) renforçant le caractère permanent de ces choix.
34Nous étudions quatre situations qui correspondent au croisement des deux problèmes évoqués précédemment (tableau 2).
Quatre situations d’étude
Quatre situations d’étude
35Le consommateur confond (Consommateur Novice) ou non (Consommateur Expert) les efforts environnementaux du producteur et le fait que celui-ci bénéficie d’un lieu de production préservé. L’information est symétrique ou non entre le producteur et le consommateur. En information symétrique, le consommateur possède la même information que le producteur concernant le lieu de production et les efforts environnementaux de la firme. Le jeu s’apparente alors à un jeu dynamique : le producteur prend d’abord sa décision puis le consommateur prend la sienne en fonction des décisions prises par la firme. En information asymétrique, le consommateur ne possède pas l’information que possède la firme concernant le lieu de production et les efforts environnementaux de la firme au moment où il prend sa propre décision. Le jeu s’apparente alors à un jeu statique où les décisions de la firme et du consommateur sont prises simultanément.
3.2 – Les différents équilibres et les choix de stratégies des firmes
36 Les hypothèses
37Nous considérons un producteur A dont les produits peuvent être différenciés selon deux caractéristiques : 1/ le milieu de production est préservé ou non, 2/ le producteur a mis en œuvre ou non un processus de production respectueux de l’environnement.
381/ Tout d’abord, le producteur bénéficie d’un milieu perçu ou non comme préservé par le consommateur. Si l’allégation des produits fabriqués par A indique que le produit provient d’un milieu perçu comme préservé, nous utiliserons l’expression « Milieu préservé » et sinon, nous utiliserons l’expression « Milieu non préservé ». Il peut sembler abusif de considérer cette caractéristique comme une variable de choix des agents. En effet, un producteur ne peut facilement changer de lieu de production pour passer d’un milieu préservé à un milieu non préservé. Cependant, nous considérons que cette caractéristique du lieu de production constitue bien un choix pour le producteur dans le sens où il pourra choisir ses fournisseurs en fonction de leur localisation dans un milieu perçu comme préservé ou non. Par exemple, un distributeur souhaitant communiquer sur le milieu préservé d’une région dont est issue une catégorie de produits va passer des contrats avec des agriculteurs de cette région. Nous considérons que le choix pour le producteur A du lieu de production ne représente aucun coût supplémentaire.
392/ Les produits peuvent aussi être différenciés selon leur processus de production, respectueux ou non de l’environnement. Nous nommerons « Efforts environnementaux » la mise en œuvre de processus de production respectueux de l’environnement par le producteur. Ce choix est coûteux pour le producteur.
40Comme indiqué précédemment, nous considérons le choix du lieu de production ainsi que du processus de production comme un choix fait une fois pour toutes dans la transaction avec le consommateur.
41L’étude concerne la stratégie du producteur A consistant à faire ou non des efforts environnementaux selon qu’il bénéficie ou non de la réputation environnementale de son milieu de production. Quatre situations se présentent alors auxquelles sont associés différents profits pour le producteur A et différentes utilités pour le consommateur C. Le tableau 3 les représente et nous permet d’introduire notre notation.
Profits et utilités en fonction des différents cas
Profits et utilités en fonction des différents cas
42Le classement des préférences n’est pas le même selon que le consommateur est Novice ou Expert :
43Consommateur Novice : Il confond les efforts environnementaux du producteur avec le fait que celui-ci bénéficie d’un milieu préservé. Pour le consommateur novice, les situations (p, ne) et (np, e) correspondent alors à la situation (p, e). La présence d’un attribut signifie pour lui la présence de l’autre. Ainsi, pour lui,
45Consommateur Expert : Il ne confond pas les deux caractéristiques. Le classement de ses préférences peut revêtir diverses formes selon les hypothèses (soit Unp,e > Up,ne, soit Up,ne > Unp,e, soit Unp,e = Up,ne). On considère que le consommateur préfère toujours les deux caractéristiques plutôt qu’une seule.
47 Les équilibres dans les différentes situations
48 Situation ? Information Symétrique et Consommateur Expert
49Le consommateur possède la même information que le producteur concernant le lieu de production et les efforts environnementaux du producteur et distingue les 2 caractéristiques p et e (tableau 4).
Équilibre en information symétrique avec un consommateur Expert
Équilibre en information symétrique avec un consommateur Expert
50Le consommateur Expert a les préférences suivantes comme posé en hypothèse dans la partie précédente :
52En information symétrique, les profits du producteur se calquent alors sur les préférences du consommateur Expert :
54La situation d’équilibre est (p, e). Elle correspond à un équilibre de Nash. Dans ce cas, le marché fonctionne parfaitement. Les caractéristiques les plus valorisées sont fournies par le marché.
55 Situation ? Information Symétrique et Consommateur Novice
56Le consommateur possède la même information que le producteur concernant le lieu de production et les efforts environnementaux du producteur et confond les 2 attributs p et e (tableau 5).
Équilibre en information symétrique avec un consommateur Novice
Équilibre en information symétrique avec un consommateur Novice
57Pour le consommateur Novice : Up,e = Up,ne = Unp,e > Unp,ne
58Étant donné que le consommateur retire la même utilité de chacune des trois situations (p, e), (p, ne) et (np, e), le producteur aura donc intérêt à choisir la stratégie (p, ne), stratégie la moins coûteuse des trois. L’équilibre est sous optimal. La caractéristique e ne sera donc pas fournie sur le marché. Le producteur ne contribue pas à préserver l’environnement. Il exploite un milieu préservé par d’autres, qu’il peut éventuellement dégrader à terme.
59 Situation ? et ? Information Asymétrique et Consommateur Expert ou Novice
60Le consommateur ne possède pas l’information que possède le producteur concernant le lieu de production et les efforts environnementaux du producteur (tableau 6). Que le consommateur soit Novice ou Expert, l’équilibre est le même.
Équilibre en information asymétrique
Équilibre en information asymétrique
61Il y a asymétrie d’information sur la qualité des biens. Ne pouvant valoriser les produits de haute qualité sur le marché, le producteur choisira la stratégie (np, ne). Les produits de qualité supérieure concernant les caractéristiques p et e sont chassés du marché. Aucune des deux caractéristiques n’est fournie. C’est une situation de sélection adverse (AKERLOF, 1970).
3.3 – Les conséquences des manipulations informationnelles sur la réputation du producteur
62Les conséquences des risques de manipulation mettent en jeu la réputation du producteur, que cette réputation soit liée au lieu de production ou aux efforts. De manière complémentaire, nous proposons d’éclairer ce lien entre l’évolution de la réputation construite ou acquise, puis maintenue ou détruite, en faisant appel à la littérature économique relative à la réputation.
63Le concept de « réputation » est fréquemment utilisé dans la littérature économique relative aux attributs d’expérience. Les développements suivants s’inspirent notamment des modèles d’investissements en réputation (KLEIN, LEFFLER, 1981 ; SHAPIRO, 1983) et des synthèses de TIROLE (1993) et de BELLETI (2000), dans un article appliqué à l’origine des produits agroalimentaires. La réputation est une sorte d’actif immatériel permettant au consommateur d’extrapoler les caractéristiques des transactions futures à partir des transactions passées. Selon BELLETTI (2000), la réputation est la conséquence d’un jugement de valeur exprimé par un consommateur au sujet d’une firme ou d’un produit. Ce jugement de valeur se construit au cours du temps et l’identité de l’entité est reconnaissable grâce à un système qui résume l’information, c’est-à-dire une marque, un nom de firme ou un lieu de production spécifique.
64Les consentements à payer des consommateurs diffèrent en fonction du produit et de leur goût pour la qualité. Ils ne peuvent observer la qualité qu’après l’achat et au bout d’un certain temps n. Cette information est communiquée à tous les consommateurs potentiels. L’efficacité de ce mécanisme informationnel est imparfaite et les consommateurs peuvent être caractérisés par une probabilité ? décrivant le degré d’impossibilité pour les consommateurs d’observer la qualité après l’achat. Si ? =1, alors les consommateurs ne peuvent pas observer la qualité (caractéristique de croyance pure).
65Quant à la firme, elle choisit à chaque période, entre fournir des produits de qualité supérieure ou de qualité inférieure. La firme doit avoir de bonnes raisons de penser qu’elle réalise un gain supérieur en maintenant la qualité de son produit et sa réputation, plutôt qu’en cessant de fournir la qualité supérieure, liquidant ainsi sa réputation. La fourniture de la qualité inférieure se traduit, une fois la qualité découverte par les consommateurs, par la destruction de la réputation. Les consommateurs sanctionnent le producteur par un refus d’achat. Dans le cadre d’une répétition infinie de la transaction, pour que la firme continue de proposer la qualité supérieure, son profit actualisé doit être supérieur au profit actualisé avec fraude, c’est-à-dire (BELLETI, 2000) :
66Ph ? Ch + [rn/(1 - ?)] (Ch-Cl)
67r étant le taux d’intérêt d’une période
68Ph étant le prix de la qualité supérieure
69(dans notre exemple, de l’écoproduit)
70Ch étant le prix de la qualité inférieure
71(dans notre exemple du produit conventionnel)
72Ch étant le coût de la qualité supérieure
73Cl étant le coût de la qualité inférieure
74n étant le temps de détection de la qualité après l’achat
75? étant la probabilité de détecter la qualité.
76Le maintien de la réputation exige donc que la firme réalise un profit sur l’unité marginale vendue, c’est-à-dire en pratiquant un prix pour la haute qualité supérieur au coût marginal. Ce surprix ou « rente réputationnelle » permet en quelque sorte de rémunérer les investissements initiaux consentis pour acquérir cette réputation. Étant donné le caractère invérifiable des promesses des producteurs, qu’il s’agisse d’un certain lieu de production ou d’efforts environnementaux, ces derniers peuvent tenter d’exploiter cette asymétrie d’information à leur avantage. Afin de rendre cet opportunisme non rentable, l’acheteur peut fournir au producteur des incitations, qui constituent des rentes, puisqu’elles correspondent à un prix supérieur au coût de production (COUTON et al., 1996). Ce type de « rente d’information » ou de rente réputationnelle, de nature différente de celle évoquée précédemment, a notamment été mis en évidence dans les travaux de KLEIN et LEFFLER (1981) et SHAPIRO (1983). Selon MILGROM et ROBERTS (1992) cette « rente d’information » provient des « gains supérieurs aux coûts d’opportunité engendrés par le fait qu’un individu détient des informations privées pré-contractuelles. Elle signifie que l’individu doit être incité à ne pas tirer profit de l’asymétrie d’information. Recevoir ces incitations constitue une rente ». L’importance du surprix dépend de l’importance du problème informationnel entre producteurs et consommateurs. Ce surprix est d’autant plus élevé que : 1/ le temps n de détection de la qualité après l’achat est long, 2/ que la probabilité de détecter la qualité est faible, c’est-à-dire un ? proche de 1, et 3/ que la différence entre les coûts de production et de transaction de l’écoproduit et du produit conventionnel est élevée. La fréquence de la transaction peut également influer sur l’attitude des producteurs. En effet, plus celle-ci est élevée, plus les pertes liées à une liquidation de la réputation sont importantes. La nature informationnelle des attributs environnementaux et la différence substantielle entre les coûts de production et de transaction des écoproduits et des produits conventionnels se traduisent par le risque d’un surprix excessif, c’est-à-dire trop élevé par rapport aux bénéfices qu’en attendent les consommateurs. Néanmoins, un certain nombre de mécanismes endogènes et exogènes à la transaction peuvent permettre de : 1/ de diminuer le délai entre l’achat du produit et la découverte de sa qualité (n), 2/ de transformer au moins partiellement des attributs de croyance en attributs de recherche ou d’expérience (?), 3/ de diminuer les coûts de production et de transaction des écoproduits par rapport aux produits classiques (Ch). Les deux premières situations sont analysées dans la section suivante, tandis que la troisième est abordée dans GROLLEAU (2001).
IV – Mécanismes susceptibles d’atténuer les défaillances du marché liées aux risques de confusion et de manipulation opportuniste de l’information
77Nous avons identifié deux types de problèmes, l’un engendré par l’offre, la manipulation d’une information difficilement vérifiable, et l’autre par la demande, le risque de confusion. Ces deux situations ne sont pas mutuellement exclusives et sont généralement susceptibles de se renforcer mutuellement. Par exemple, certaines firmes peuvent avoir intérêt dans une logique de maximisation de leurs profits à entretenir la confusion des consommateurs par des allégations équivoques. Ce risque de confusion est potentiellement renforcé par les tentations opportunistes des producteurs, transmettant des informations non vérifiables par les consommateurs dans les conditions habituelles de la transaction.
78Sans les détailler, nous évoquons d’autres problèmes qui sont susceptibles d’interférer avec les situations précédentes, mais nous faisons le choix de ne pas les prendre en compte dans notre analyse. Il s’agit notamment : 1/ des capacités limitées du consommateur classique (limites physiques, mais aussi économiques dans la mesure où les coûts de recherche doivent rester inférieurs au bénéfice attendu d’une information supplémentaire (STIGLER, 1961), et 2/ des interférences souvent présentes dans les allégations associant la nature publique des caractéristiques environnementales promises à des bénéfices privés. Par exemple, en liant la qualité environnementale aux caractéristiques intrinsèques vérifiables ex ante ou ex post (aspect, goût), le message joue à la fois sur un mécanisme de crédibilisation de la caractéristique invérifiable (GROLLEAU, 2001) et de réduction du phénomène de passager clandestin par l’association de caractéristiques privées et collectives.
79Nous traitons de manière distincte les problèmes liés : 1/ à la confusion des consommateurs éventuellement entretenue et renforcée par certains mercaticiens, et 2/ aux risques de manipulation de l’information sur une caractéristique permanente du produit. Dans la partie suivante, sans prétendre à l’exhaustivité, nous décrivons quelques mécanismes susceptibles d’atténuer les situations précédemment décrites en distinguant les mécanismes endogènes à la transaction c’est-à-dire où les vendeurs et les acheteurs sont les seuls intervenants par opposition aux mécanismes exogènes, qui nécessitent l’intervention, sous des formes diverses, de tiers. Notons que la réalité se caractérise généralement par des stratégies mixtes combinant à des degrés divers plusieurs mécanismes et rarement par une stratégie mettant en œuvre un mécanisme unique.
4.1 – Le risque de confusion par le consommateur
80Un mécanisme endogène initié par les vendeurs et susceptible d’atténuer les risques de confusion est connu sous le nom de théorie du dévoilement ou unfolding theory (IPPOLITO, MATTHIOS, 1990 ; voir également GROSSMAN, 1981). Par exemple, un vendeur dont le produit a une teneur élevée en vitamine A voudra vraisemblablement le faire savoir via la publicité. Un vendeur de produits similaires, mais dont la teneur est élevé en vitamines A et B sera vraisemblablement incité à faire connaître ces deux qualités et à se distinguer de son rival. Le consommateur en déduit alors qu’une allégation partielle implique des propriétés inférieures. Cette révélation ou ce dévoilement engendré par la compétition entre les vendeurs se traduit par des allégations explicites concernant les propriétés positives des produits, le consommateur pouvant ainsi inférer la qualité des produits avec des allégations moindres. Ainsi une entreprise possédant des caractéristiques supérieures par rapport à ses rivales est incitée à le faire savoir et à se distinguer de ses rivales, contribuant ainsi parfois à l’éducation du consommateur. Par exemple, les entreprises bénéficiant d’un milieu préservé et contribuant à la préservation de l’environnement sont incitées à se différencier sur ces deux aspects et à faire valoir leur spécificité positive par rapport aux entreprises ne possédant qu’une seule de ces deux caractéristiques [6].
81Des mécanismes exogènes peuvent également être initiés par des tiers tels que les pouvoirs publics, les associations consuméristes ou écologistes qui peuvent inciter, voire contraindre, les entreprises à diminuer les risques de confusion dus aux consommateurs et/ou au marketing des produits d’une part et/ou à éduquer de manière plus directe les consommateurs d’autre part. L’intervention de ces tiers est souvent renforcée ou à l’inverse nuancée par leur crédibilité, au-delà des seuls aspects objectifs relatifs à leurs capacités d’expertise, de transparence et d’indépendance. Par exemple, GreenPeace publie régulièrement une liste noire de produits agro-alimentaires contenant ou susceptibles de contenir des organismes génétiquement modifiés, contribuant ainsi à révéler les véritables stratégies des firmes. Les associations consuméristes telles que l’Union Française des Consommateurs réalisent périodiquement des études sur l’usage abusif de certains termes relatifs à l’environnement ou des tests comparatifs entre les produits de l’agriculture conventionnelle et les produits issus de l’agriculture biologique sur leurs teneurs respectives en produits phytosanitaires. L’intervention des pouvoirs publics peut se traduire par l’élaboration de droits de propriété relatifs à l’usage de certains termes (définitions, modalités de vérification et de signalement) et par des formes de publicité institutionnelle visant à les rendre compréhensibles pour les acteurs cibles, en l’occurrence le consommateur et à éviter les utilisations propres à induire en erreur ou à engendrer la confusion (GRODSKY, 1993). Un exemple empirique est celui de l’expression « agriculture biologique » et de ses dérivés qui sont protégés par voie réglementaire. Danone s’est vu en effet contraint d’ajouter une mention explicative précisant que ses yaourts de la marque BIO [7] ne sont pas issus de l’agriculture biologique, afin d’éviter la confusion. D’autres tiers peuvent intervenir par des moyens divers, notamment par la production d’informations dans divers médias (presse consumériste avec de nombreux articles consacrés aux allégations présentes sur les produits agro-alimentaires), par la mise sur la scène publique et la dénonciation de techniques propres à engendrer la confusion.
4.2 – Les risques de manipulation d’une information fixée et cachée
82Dans le pire des cas décrit par AKERLOF (1970), la sélection adverse se traduit par le retrait des produits de bonne qualité du marché. Trois mécanismes exogènes [8], souvent combinés et étroitement associés au capital de réputation du vendeur, permettent de restaurer au moins partiellement l’efficacité de la relation marchande : 1/ En cas d’entrée séquentielle des consommateurs sur le marché, les premiers consommateurs acquièrent l’information sur les attributs d’expérience et peuvent la partager avec les consommateurs non informés. L’efficacité de ce mécanisme de partage de l’information suppose une homogénéité des préférences entre les individus informés et les non-informés. 2/ Le mécanisme des achats répétés permet aux consommateurs de conserver les produits agro-alimentaires qu’ils jugent satisfaisants et de sanctionner un vendeur malhonnête sur des attributs d’expérience par la détérioration de sa réputation et par le choix d’un autre vendeur. Selon NELSON (1974), « le principal moyen de contrôle des consommateurs sur le marché [des attributs d’expérience] (…) correspond à leur probabilité de répéter l’achat d’une certaine marque ou non ». Il convient de rappeler que dans certains cas, ce mécanisme peut-être inefficace, si la probabilité de transactions futures est relativement faible et/ou si le gain du vendeur engendré lors de l’achat initial est suffisamment attractif de telle sorte que la perte éventuelle des futures transactions ne soit pas dissuasive. Comme indiqué précédemment, dans ces modèles, l’équilibre sur le marché exige un prix de la haute qualité qui soit nécessairement supérieur au coût marginal (KLEIN, LEFFLER, 1981 ; SHAPIRO, 1983). 3/ Les mécanismes de signalement de la qualité et d’investissement en réputation (marques commerciales, labels de qualité, garanties, signes officiels, etc.) permettent au producteur de surmonter la sélection adverse associée aux attributs d’expérience. L’efficacité de ce signalement mis en place par les producteurs à l’intention des consommateurs dépend fortement du caractère incitatif du préjudice encouru en cas de fraude, notamment en terme d’effets sur la réputation. De manière formelle, l’existence d’un équilibre séparateur exige la satisfaction des trois conditions suivantes (a) les agents proposant la bonne qualité peuvent acquérir le signal à un coût moindre que les agents proposant une mauvaise qualité (b) le profit espéré du signal est plus élevé que le coût d’acquisition du signal pour les agents proposant une bonne qualité (c) le profit espéré du signal est plus faible que le coût d’acquisition du signal pour les agents proposant une mauvaise qualité (MACHO-STADLER, PEREZ-CASTRILLO, 2001). L’efficacité des mécanismes précédents est sérieusement remise en question dans le cas des attributs de croyance (GROLLEAU, BENABID, 2001), leur pertinence pouvant notamment être rétablie par l’intervention explicite d’une tierce partie capable de produire une information crédible, comme un écolabel certifié par un laboratoire indépendant (CASWELL, MODJUSZKA, 1996).
83Face au risque de manipulation de l’information portant sur la qualité du milieu et/ou sur la qualité environnementale du processus de production (déjà réalisée au moment de la transaction portant sur des produits agro-alimentaires), le consommateur peut avoir recours à des mécanismes d’inférence qui peuvent servir d’indicateurs imparfaits afin de crédibiliser ou non les attributs de croyance contenus dans les allégations. La qualité environnementale du milieu et/ou du processus de production peut être inférée à partir d’autres attributs perçus comme corrélés et vérifiables ex ante (attributs de recherche : aspect, label obligatoire, caractéristiques de l’emballage) ou ex post (attributs d’expérience : goût). Nous insistons sur le fait que les perceptions du consommateur qui guident ses choix ne correspondent pas nécessairement à la vision experte des spécialistes (pour une discussion, voir GROLLEAU, 2000). CASWELL et MODJUSZKA (1996), GROLLEAU (2001) ont montré que les attributs peuvent changer de catégorie informationnelle en fonction des conditions de la transaction. Ainsi, un label (sans OGM) relatif à un attribut de croyance, du fait de son caractère obligatoire et s’il est perçu comme véridique par le consommateur, contribue à transformer un attribut a priori de croyance en attribut de recherche. En effet, le consommateur ne cherche pas à vérifier le label, mais recherche plutôt sa présence ou son absence. Ces phénomènes d’inférence de la qualité environnementale peuvent également résulter d’attributs intangibles, telle la réputation générale attachée au produit, à l’entreprise (par le biais de la marque) ou le degré de confiance morale et/ou technique préexistante [9] (BIDAULT, JARILLO, 1995).
84Certains auteurs (notamment issus de la littérature mercatique) ont souligné l’existence d’effets de renforcement, c’est-à-dire la possibilité de rendre tangible pour les consommateurs les effets réalisés ou potentiels de leurs achats (GRUNERT, 2001). Ces mécanismes tentent de « montrer » ex ante ou ex post aux consommateurs les effets de leurs achats, au niveau individuel et/ou collectif, en fournissant des données éventuellement validées par un tiers sur la réalisation des objectifs promis. Des exemples concrets d’effets de renforcement sont relativement courants sur certaines étiquettes agro-alimentaires. Par exemple, certaines étiquettes associent l’achat d’un certain produit à la plantation d’arbres et clament parallèlement le nombre d’arbres déjà plantés grâce aux efforts des consommateurs et proposent aux acheteurs potentiels de suivre l’évolution de leur contribution globale sur un site contrôlé par l’Office National des Forêts. Ces techniques de marketing correspondent à notre sens à des tentatives plus ou moins réussies de transformation ou d’évolution d’attributs de croyance vers des attributs de recherche ou d’expérience. Ces transformations s’adressent aux consommateurs, d’où une validité souvent remise en question du point de vue des experts.
85Les mécanismes exogènes à la relation vendeurs-acheteurs font intervenir des tiers comme les consommateurs, les salariés travaillant dans l’entreprise considérée pouvant partager l’information qu’ils détiennent, les pouvoirs publics, les associations environnementales et consuméristes (GRUNERT-BECKMANN et al., 1997), les services d’expert. Ces tiers présentent des caractéristiques très diverses comme leurs motivations, leurs capacités d’expertise, leur crédibilité, leurs moyens, leur représentativité. Ces mécanismes peuvent se manifester sous des modalités très diverses, « bouche à oreille », certification, dénonciation, boycott, etc. Conceptuellement, ces mécanismes correspondent généralement à une forme de délégation à des tiers des phases de définition, et/ou de vérification et/ou de signalement (BENABID, GROLLEAU, 2001).
86Les mécanismes précédemment formulés se réfèrent souvent aux marchés, généralement imparfaits, de l’information (STIGLITZ, 2000). Ces marchés peuvent notamment se caractériser par leur capacité à intégrer les capacités cognitives limitées de l’individu (capacités attentionnelles [10]) et par la quantité et la qualité de l’information disponible, son coût d’acquisition par rapport aux bénéfices qu’elle est susceptible d’engendrer. Du fait du développement des nouvelles technologies et de la mondialisation des échanges, ces marchés informationnels subissent de profondes mutations susceptibles d’accroître les capacités d’intervention des tiers, mais aussi d’engendrer des obstacles à l’appropriation réelle de l’information en tant que déterminant de l’action.
87Ce survol rapide de quelques mécanismes susceptibles d’atténuer les défaillances du marché dues aux asymétries informationnelles et aux confusions du consommateur (tableau 7) ne doit pas occulter les effets négatifs de ces mécanismes. Par exemple, SCARPA (1999) argue que l’instauration de normes minimales – relatives à la qualité environnementale par exemple – peut contribuer à réduire la qualité moyenne et à faciliter la collusion, l’érection de barrières à l’entrée et les stratégies prédatrices.
Défaillances et mécanismes atténuateurs
Défaillances et mécanismes atténuateurs
V – Remarques finales
88Le contenu des allégations environnementales est assez divers et recouvre différents champs n’ayant pas les mêmes implications. En effet, selon que le producteur capte une réputation environnementale construite par d’autres ou qu’il met en œuvre des processus de production respectueux de l’environnement, les coûts qu’il supporte sont différents. En fonction du contexte de la transaction – droits de propriété, caractéristiques des parties (autres producteurs, consommateurs), etc. – le coût d’acquisition d’une forme de réputation environnementale semble variable, chaque firme ayant tendance à choisir la stratégie qui maximise ses profits. La quasi-impossibilité du consommateur de vérifier l’information ainsi que ses capacités limitées de traitement de l’information accroissent la probabilité d’opportunisme des firmes et rendent parfois difficile la fourniture d’une qualité supérieure.
89L’un des risques des mécanismes analysés d’atténuation des défaillances du marché consisterait à détourner les consentements à payer pour la réalisation de caractéristiques environnementales au profit de la mise en place de stratégies plus fiables, mais caractérisées par des coûts de transaction excessifs par rapport aux bénéfices attendus. D’où la nécessité de recherches supplémentaires prenant en compte à la fois l’efficacité respective de ces mécanismes et de leurs diverses combinaisons dans un contexte proche de la réalité, mais aussi leur efficience.
90Face aux risques de défaillances du marché, la nature et l’étendue d’une éventuelle intervention des pouvoirs publics est une question complexe, mettant en contraste certaines valeurs (paternalisme versus souveraineté du consommateur), cette intervention étant elle-même soumise, dans une logique strictement économique, à une analyse de son efficacité et de son efficience.
Bibliographie
Bibliographie
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Notes
-
[*]
Première version avril 2002, version révisée novembre 2002.
Ces travaux bénéficient du soutien financier de l’ADEME (Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie), du Conseil Régional de Bourgogne, du Conseil Scientifique de l’ENESAD et du PIREE (Programme Inter-institutionnel d’Études et de Recherches en Économie de l’Environnement).
Une version préliminaire de cet article a été présentée à la 7ème Conférence Biennale de la Société Internationale pour l’Économie Écologique, Sousse (Tunisie), 6-9 mars 2002. Sa réécriture a bénéficié des lectures attentives de Denis Barthélemy et des deux lecteurs anonymes de la RERU. Nous les en remercions avec une mention particulière pour le commentaire très détaillé de l’un d’entre eux. -
[**]
Les chiffres entre parenthèses renvoient aux notes en fin d’article.
-
[1]
Effets externes à la décision de leurs émetteurs, sinon au marché.
-
[2]
La différenciation environnementale valorisable peut provenir d’une production en parc naturel ou en montagne ; dans le cas de la montagne, la réputation de milieu préservé correspond à un handicap naturel qui augmente les coûts et réduit la rente.
-
[3]
Mais l’effort ne porte pas sur leur processus central de production : l’embouteillage.
-
[4]
LUPTON (2001) introduit une nouvelle catégorie : les caractéristiques controversées où tous les agents sont affectés par une incertitude radicale notamment du fait d’une connaissance scientifique non stabilisée.
-
[5]
Bien que ces notions aient été évoquées depuis longtemps (loi de Gresham sur la fausse monnaie ; remarques d’Adam SMITH sur les risques liés à l’accomplissement de certaines tâches par un agent non propriétaire), la notion de sélection adverse a été notamment formalisée par AKERLOF à partir du marché des voitures d’occasion (1970) et celle de hasard moral par ARROW (1963) sur les services médicaux et par JENSEN et MECKLING (1976) sur les relations d’agence entre actionnaires et managers.
-
[6]
Notons que cette théorie peut être invalidée, si certaines conditions ne sont pas réalisées, notamment au niveau de la concurrence. Par exemple, certaines firmes peuvent choisir de « taire » des caractéristiques positives de leurs produits (ex. des cigarettes à faible taux de nicotine), si cette différenciation risque de « cannibaliser" leur propre marché relatif à des produits similaires (ex : en concurrençant leurs propres cigarettes classiques).
-
[7]
Le règlement communautaire permet à Danone l’utilisation du terme « bio » pour des produits non biologiques jusqu’en 2006 dans la mesure où la marque avait été enregistrée avant 1991, et à condition que l’étiquetage des produits mentionne que ces derniers ne sont pas issus de l’agriculture biologique et qu’en 2006 la marque soit supprimée ou que Danone se conforme à la réglementation communautaire.
-
[8]
Outre les mécanismes endogènes à la relation vendeur-acheteur, d’autres mécanismes exogènes sont susceptibles d’améliorer l’efficacité de la relation marchande, comme l’imposition de normes minimales de qualité par les autorités publiques ou le recours à des tiers garantissant l’information fournie.
-
[9]
La notion de confiance morale se rapporte à une situation d’accord sur les valeurs éthiques de l’autre, tandis que la confiance technique concerne les compétences nécessaires par rapport à la transaction. Par exemple, la confiance morale peut être très forte dans le cas d’un ami proche (absence de crainte d’opportunisme ou de malhonnêteté) et simultanément très faible dans sa composante technique, s’il s’agit en l’occurrence de réaliser une opération à cœur ouvert réclamant des compétences techniques très précises d’un chirurgien. De même, alors que la confiance technique dans les compétences d’un chirurgien pourrait être très bonne, la confiance morale dans ce dernier pourrait être très faible.
-
[10]
Herbert SIMON, à l’origine du concept de rationalité limitée reconnaît ainsi : « Ce que consomme l’information est évident : elle consomme l’attention de ses destinataires. Ainsi, une profusion d’informations génère une pauvreté de l’attention et un besoin d’allouer cette attention efficacement parmi la surabondance des sources d’information qui pourraient la consommer ». (Traduction personnelle : « What information consumes is rather obvious : it consumes the attention of its recipients. Hence a wealth of information creates a poverty of attention, and a need to allocate that attention efficiently among the overabundance of information sources that might consume it ». Herbert SIMON, in Scientific American, September, 1995, p. 201).