Notes
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[1]
Cet article est basé sur mon livre “Chi ha paura delle riforme. Illusioni, luoghi comuni e verità sulle pensioni”, Università Bocconi Editore, Milano, 2018. Je remercie beaucoup ma collègue Sylvie Pipari pour son assistance sur le texte français.
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[2]
OECD, 2013.
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[3]
Les exemples sont nombreux et témoignent de l’utilisation à des fins électorales du système de retraites : les retraites minimales à « un million de lires » (516,89 euros) du gouvernement Berlusconi (2002) ; l’abolition par le gouvernement Prodi du fort accroissement de l’âge de retraite décidé par le gouvernement Berlusconi (2008) ; l’élargissement des ayants droits au quatorzième mois du gouvernement Renzi (2017) et surtout « quota 100 » (somme de l’âge et de l’ancienneté) du premier gouvernement Conte.
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[4]
NDLR : Le metodo contributivo consiste à calculer la pension finale uniquement à partir des cotisations versées pendant l’activité. Un régime de retraite qui verse des pensions de ce type est un système à cotisations définies.
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[5]
NDLR : « esodato », dérivé du mot esodo (exode), est un néologisme journalistique employé pour la première fois le 21 mars 2012 par Michele Carugi dans un blog du journal Il Fatto Quotidiano (source : Treccani).
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[6]
Il s’agit essentiellement de la possibilité de financer une sortie anticipée du travail avec une allocation publique (Ape sociale) ou un prêt bancaire peu onéreux (Ape volontaire) ou encore une pension temporaire de retraite anticipée (Rita, Rendita Integrativa Temporanea Anticipata ou rente).
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[7]
NDLR : Le metodo retributivo consiste à calculer la pension à partir des (derniers) salaires (rétributions) et non du montant des cotisations. De telles pensions sont versées par des régimes dits à prestations définies.
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[8]
NDLR : Cette pensione di anzianità (littéralement pension d’ancienneté) permettait aux travailleurs ayant atteint une durée de 40 années d’ancienneté (ou 35) de cotisation de prendre leur retraite à tout âge (ou à partir de 62 ans). Elle a été modifié pour la première fois en 2004 par des exigences supplémentaires puis la réforme Monti-Fornero l’a remplacée dans la pratique par une pension de retraite anticipée (pensione anticipata).
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[9]
La formule reconnaissait un rendement de 2 %, par année d’ancienneté, de la moyenne des derniers salaires (de 3 à 10 ans) ; pour 40 années de travail (pas toutes effectives) la retraite se situait à 80 % du salaire.
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[10]
Castellino et Fornero, 2001.
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[11]
La réduction « d’équité actuarielle » correspondait presque à 3 % pour chaque année.
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[12]
Même si j’ai souvent pensé que si Onorato Castellino, mon maître à l’Université de Turin, avait été encore en vie, il en aurait été le premier candidat.
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[13]
i.e. cohérente avec le parcours déjà tracé.
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[14]
Bureau Parlementaire du Budget.
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[15]
Il suffit de citer le rapport sur l’Italie de la Commission Européenne (2015) et le rapport de la Ragioneria Generale dello Stato (littéralement, Comptabilité Générale de l’État) sur les tendances de la dépense des retraites et de la sécurité sociale (RGS, 2015), qui souligne les mérites du processus de réforme pour la stabilisation de la dépense publique pendant les décennies à venir.
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[16]
La mesure était déjà prévue, mais pour le futur, par un précédent décret du Gouvernement Berlusconi.
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[17]
Une voie suivie par le gouvernement Gentiloni, qui, succédant au gouvernement Monti, a eu la sagesse de ne pas suspendre le mécanisme, même s’il en a exempté certaines catégories.
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[18]
Une indépendance par ailleurs non seulement vaine, mais objectivement dangereuse, cause de la spirale perverse qui conduisait les augmentations salariales à des hausses de coûts de production et des prix, à la perte de compétitivité, aux dévaluations /dépréciations du taux de change pour la rétablir, puis à de nouvelles augmentations des prix et des salaires non accompagnées de gain de productivité.
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[19]
OECD (Pensions at a glance, 2019).
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[20]
Deux indicateurs suffisent. Le premier est le taux de participation dans la classe d’âge 55-64 ans : en 2010, c’était le plus bas (hormis Malte) parmi les 27 pays européens (37,8 contre une moyenne de 49,7, avec l’Allemagne à 62,5 et la Suède à 73,9). Et ce surtout à cause de la faible participation des femmes, légèrement au-dessus de 25 %, à cause aussi de l’âge inférieur de la retraite pour les femmes, aujourd’hui en voie de dépassement, lesquelles sont poussées à la retraite par la nécessité de s’occuper des petits-enfants ou des membres dépendants de la famille. Le second, qui constitue l’autre face de la même médaille, est l’âge effectif de départ à la retraite : en 2019, à 62 ans environ, il était encore inférieur de deux ans à la moyenne européenne.
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[21]
L’INPDAP est l’acronyme qui désigne l’Istituto nazionale di previdenza e assistenza per i dipendenti (littéralement, l’Institut national de prévoyance et d’assistance pour les personnes dépendantes).
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[22]
L’INPS est l’acronyme qui désigne l’Istituto nazionale della previdenza sociale (littéralement, l’Institut national de la sécurité sociale).
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[23]
« La Fornero al cimitero » (cf. La Repubblica, 23 mars 2012, https://www.repubblica.it/politica/2012/03/21/foto/fornero_al_cimitero_bufera_su_diliberto-31955275/1/).
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[24]
NDLR : Le gouvernement giallo-verde (littéralement jaune-vert) réunit deux couleurs politiques : le jaune du mouvement cinq étoiles (M5S) et le vert de la Ligue (Lega).
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[25]
Voir Barr et Diamond (2008) pour une vision plus critique du système NDC.
1 – La nature de la réforme des retraites : un investissement social au-delà de l’austérité
1La réforme des retraites du gouvernement Monti (Loi 214/2011, que j’ai signée) a vu le jour sous le signe de l’urgence. Mais, urgence mise à part, elle représente le point crucial d’un processus de restructuration qui a placé le système italien de retraite parmi les plus financièrement soutenables d’Europe, en conservant, avec l’allongement de la vie professionnelle, un niveau de prestations dans la moyenne européenne [2].
2Dans l’histoire italienne des retraites de ces dernières décennies, la réforme Amato de 1992 marque un tournant. Jusqu’à cette date, malgré l’aggravation des finances publiques et les alarmes internes et internationales croissantes, les promesses de réforme étaient restées sans suite et les mesures adoptées étaient encore extensives, c’est-à-dire visant à élargir l’ensemble des bénéficiaires et des bénéfices. A compter de 1992, en revanche, les réformes ont pris un caractère majoritairement restrictif, même si les mesures d’amélioration ou de contre-réforme n’ont pas manqué [3]. Non seulement les réformes ont été entamées tardivement, mais leur parcours semé d’obstacles, fait de « bonds en avant » et de reculs législatifs, présente des zones d’ombre et de lumière. Parmi les premières, on trouve la nouvelle architecture du système de retraite, axé sur un pilier public par répartition prééminent et à contributions définies (le système NDC, National Defined Contribution, selon l’appelation anglo-saxonne commune) (Holzmann 2017), uniforme, financièrement soutenable, plus transparent et moins perméable aux privilèges ; s’y ajoute une part privée par capitalisation financière, volontaire mais fiscalement avantageuse et à la forte dimension professionnelle car elle est gérée principalement par des fonds de retraite catégoriels. Parmi les zones d’ombre, ressortent – du moins à moyen terme et avant que l’on ne parvienne à la situation où toutes les nouvelles retraites seront à contributions définies – une rigidité peut-être excessive quant à l’âge de départ à la retraite, le maintien de privilèges et, également, une perspective de pension de retraite trop faible pour les générations les plus jeunes. Par ailleurs, sur le plan de la soutenabilité sociale et politique, soulignons une transparence encore insuffisante, une faible connaissance de base et la présence de lieux communs et de fausses croyances qui alimentent un ressentiment social et entravent la réalisation du dessein d’ensemble.
3Politiquement, le parcours de la réforme de 2011 a été caractérisé par la tendance politique à agir presque exclusivement dans des conditions d’urgence et, quoi qu’il en soit, avec une grande réticence, comme le montre la longueur exaspérante de la période d’entrée en vigueur du metodo contributivo [4] (littéralement « méthode contributive »), introduite en 1995 et qui n’est pas encore pleinement opérationnelle 25 ans plus tard. C’est peut-être justement à cause de ces aspects contradictoires du processus de réforme qu’ont vu le jour des oppositions politiques et sociales, avec des polémiques brûlantes, souvent de nature idéologique et souvent motivées par une information insuffisante, parfois déformée par une farouche défense de privilèges existants, dissimulés derrière la noble façade, en apparence, des « droits acquis ».
4Ces caractéristiques (l’excessive lenteur, l’insuffisante transparence, les avancées et les reculs) du processus italien de réforme ont contribué à un vague scepticisme des institutions européennes et des organisations économiques internationales, quant à la volonté réelle des gouvernants italiens de mettre en œuvre des réformes, et ont alimenté une inquiétude sur la soutenabilité de la situation financière de l’Italie qui a conduit le pays à la crise de la dette souveraine de 2011 (Fornero, 2013). De plus, elles ont empêché les Italiens de se faire une idée claire du parcours de la réforme, de ses motivations et de ses principes, et contribué à la méfiance diffuse ou à la conviction que la « générosité » politique peut systématiquement se substituer à la logique économique et à la rigueur des mathématiques.
5La réforme de 2011 – préparée en vingt jours, sous la menace d’une crise financière qui aurait bouleversé non seulement l’Italie, mais aussi l’euro, voire même la construction européenne – est l’achèvement, le renforcement et l’accélération des réformes précédentes ; elle a été fondamentale pour rétablir la fiabilité de nos finances publiques et placer notre système aux premiers rangs en Europe quant à sa soutenabilité. Toutefois, elle a inévitablement souffert de l’urgence du manque de consultation préalable des acteurs sociaux et de la rapidité avec laquelle elle a été écrite et approuvée. La rupture avec les syndicats (que le gouvernement a payée également au prix fort au moment de la réforme du travail), a été suivie de la déchirure avec les partis politiques qui, tout en l’ayant votée, en ont été « effarouchés » et, au lieu de l’améliorer, ont préféré en faire un usage politique cynique, critiquant durement ce qu’eux-mêmes (hormis la Ligue) avaient approuvé. La rapidité de la réforme, par ailleurs, est un contrepoids presque dramatique au gradualisme réticent du précédent parcours de réforme, certes non étranger à la crise. Les erreurs ont donc été inévitables, mais aucune réforme ne naît parfaite et « seuls ceux qui ne font rien ne se trompent pas ».
6L’erreur principale avait trait au nombre des « esodati » [5], terme utilisé par les médias pour désigner les travailleurs qui, ayant quitté leur emploi, sur la base d’accords formels ou informels et en vue d’un « prochain » départ à la retraite, ont été pris au dépourvu par la hausse de l’âge du départ. Le problème, qui n’a certainement pas été sous-estimé par le gouvernement, aurait toutefois pu être résolu plus rapidement et plus équitablement dans un climat moins tendu. Au contraire, l’instrumentalisation politique à court terme et la défense tout aussi instrumentale des privilèges, avalisée hélas par des jugements discutables de la Cour Constitutionnelle, l’ont emporté. D’autre part, comment les citoyens auraient-ils pu accepter de bon gré la réforme dès lors que les forces politiques qui l’avaient votée dans les séances parlementaires, avaient commencé à la critiquer férocement, dans les espaces médiatiques ?
7Privé de l’appui des forces politiques, le gouvernement des « techniciens » ne disposait pas des outils adéquats de communication avec l’opinion publique. C’est ainsi qu’ont été passés sous silence les côtés positifs, à moyen-long terme, de la réforme, qui ne répond certes pas uniquement à une logique financière, mais constitue un « investissement social » (Lindbeck et Persson, 2003 ; Morel, Palier et Palme, 2012) et un levier afin de rééquilibrer les rapports entre les générations qui trouvent justement dans le pilier public par répartition l’une de leurs expressions les plus importantes. Par conséquent, la réforme a été interprétée par l’opinion publique presque seulement en termes d’austérité, de sacrifice en soi (ou, pire encore, comme bénéficiant à la finance internationale !).
8Au sein d’un panorama de plus en plus accusateur, on a perdu, du moins auprès de l’opinion publique, la pars construens de la réforme, qui justifie sa raison d’être, quoique des corrections eussent été souhaitables, comme celles qui ont été plus tard introduites [6]. On a oublié que, pour que les réformes donnent des résultats positifs nets et deviennent socialement soutenables, il faut non seulement que les destinataires soient correctement informés (Fornero, Oggero et Puglisi, 2020) mais aussi qu’ils en comprennent, essentiellement, les caractéristiques et les mécanismes de base et en partagent dans quelque mesure les objectifs (Boeri et Tabellini 2012 ; Fornero et LoPrete, 2019).
2 – Un peu d’histoire pour ne pas oublier : du « labyrinthe des retraites » à la réforme Dini
9Au début des années 90, le système italien de sécurité sociale souffrait de trois handicaps :
- Un déséquilibre financier important et persistant, comme le montrent les vertigineux taux de cotisation d’équilibre nécessaires pour financer les prestations promises ; il est évident que lorsque le taux effectif est structurellement inférieur à celui d’équilibre, l’État fait face à un déficit qu’il doit financer d’une façon ou d’une autre, en soustrayant des ressources à d’autres emplois possibles ou en augmentant la taxation ou la dette ;
- Des disparités de traitement injustifiables, dérivant autant de la fragmentation du système en différents régimes, caractérisés par des normes distinctes souvent incohérentes et iniques, que de la formule dite rétributive [7] de calcul des retraites, accompagnée de généreux critères d’ancienneté plutôt que d’âge ;
- Un encouragement – sous forme d’un avantage économique – à l’abandon anticipé de l’activité professionnelle (ou un encouragement au travail « au noir » très fréquent, surtout à cette époque-là, chez les retraités).
10Entre 1992 et 1997, le système a enduré un renouvellement normatif radical, dont les effets ont néanmoins été très ralentis du fait de la longue transition mise en place. Dans la conception définitive de ces réformes, la forte corrélation entre pension effective et le dernier salaire a été éliminée par une référence plus appropriée aux salaires (Amato 1992) ou aux cotisations de toute la carrière professionnelle (Dini 1995). La pensione di anzianità [8], anomalie italienne qui fait l’objet de nombreuses critiques des institutions économiques internationales, a d’abord été reconduite, pour la fonction publique, selon la norme, moins généreuse, appliquée aux salariés du secteur privé, puis rendue obsolète – mais uniquement pour les départs à la retraite à venir entre 2035 et 40 – par la flexibilité intrinsèque à la pension « contributive » (dans une tranche d’âge comprise alors entre 57 et 62 ans, et maintenant, après la réforme de 2011, entre 63 et 70).
11Les réformes ont par ailleurs adopté le principe de l’harmonisation de la norme entre les différentes gestions. A toutes ces innovations importantes, quoique « à retardement », s’ajoute, dès 1992, une mesure immédiate qui a déterminé une grande partie des économies réalisées dans la dernière décennie : la réduction de l’indexation de la pension sur les salaires nominaux à celle sur le coût de la vie.
12Les « années d’abondance » (plus supposée que réelle, vu l’augmentation parallèle de la dette publique, tant explicite qu’implicite, c’est-à-dire représentée par des « promesses » de retraites largement indépendantes de la démographie et de l’économie) avaient cependant engendré des attentes difficiles à décevoir et fortement défendues par le syndicat au nom du principe de la défense des droits acquis. De là, le choix d’une très lente transition qui, en 1992, a permis de protéger pleinement les travailleurs avec 15 ans et plus d’ancienneté contributive et de reconfirmer cette protection en 1995, avec l’approbation de la réforme Dini.
13En ce qui concerne cette dernière, plus incisive, la transition segmente donc les travailleurs en trois groupes : pour les travailleurs embauchés à partir du premier janvier 1996, la méthode « contributive » s’applique totalement; pour les travailleurs ayant moins de 18 années d’ancienneté à cette date s’applique le prorata (mixte entre la formule « rétributive » pour les anciennetés avant 1995 et la formule « contributive » pour les anciennetés après) ; pour les travailleurs ayant au moins 18 années d’ancienneté, continue, en revanche, de s’appliquer la formule « rétributive » [9] bien plus généreuse. La lenteur d’application des réformes a représenté un manque de courage politique, non seulement du point de vue de la non réduction de la dépense mais, et c’est le plus important, du point de vue de la perte de fiabilité de toute la réforme. L’inadéquation d’une transition aussi longue à affronter tant les déséquilibres financiers, provoqués par le vieillissement rapide de la population, que les distorsions du système a bien vite été évidente.
14En ce qui concerne les premiers, une étude du CeRP (Centre for Research on Pensions and Welfare Policies) [10] estimait que, pour assurer l’équilibre des comptes de la Caisse de Retraite des Travailleurs Salariés (FPLD, Fondo Pensioni Lavoratori Dipendenti par ailleurs le plus important et le plus équilibré !), il aurait fallu un taux de cotisation autour de 45-48 % jusqu’en 2030. Ce n’est qu’à compter de cette date qu’il aurait commencé à baisser pour se situer un peu au-dessus du niveau effectif (33 %) vers 2050. Le refus d’affronter ce problème constitue un contre-sens évident sous de nombreux aspects : coût du travail, compétitivité des entreprises, épargne à consacrer au troisième âge. Pour le régime des fonctionnaires, bien plus déséquilibré, les taux se situaient entre 45 et 55 % ; il manquait aux artisans et commerçants plus de 10 points de pourcentage pour atteindre l’équilibre, tandis que dans la gestion des exploitants agricoles, la plus déséquilibrée de toutes, l’intégralité des salaires des actifs n’aurait pas suffi à financer les retraites ! Tout cela se traduisait par un déficit budgétaire de la sécurité sociale de l’ordre de 4-4,5 % du PIB, bien au-dessus du fameux plafond de 3 % exigé par l’Union Européenne. Il était clair que le changement trop graduel des règles n’aurait pas été en mesure de compenser l’augmentation du nombre de retraités. Combien de fois, dans les congrès internationaux, mais aussi dans la presse étrangère, a-t-on entendu des mots ironiques quant à la prédilection des Italiens pour des réformes si progressives au point d’en être imperceptibles !
15Outre les déséquilibres financiers, la lenteur de la transition maintenait des distorsions significatives, causées par la persistance de la formule « rétributive » de calcul de la retraite, cause de privilèges, d’un côté, et d’encouragements à des départs anticipés, de l’autre. L’étude du CeRP déjà citée mesurait les différences de traitement entre les travailleurs de générations différentes : en passant des plus anciennes aux plus jeunes, la lente disparition de la formule « rétributive » et le poids croissant de la nouvelle pension « contributive » aurait préservé les classes d’âge déjà à la retraite ou proches de l’être, laissant les jeunes exposés aux risques de la faible croissance et de la précarité croissante du marché du travail.
16L’étude analysait trois situations différentes, imaginant trois travailleurs égaux quant à leur carrière et leurs niveaux de salaire mais sujets aux différentes normes prévues et notamment au poids différent des proportions des formules « rétributives » et « contributives » dans la pension de retraite. A un travailleur né en 1943 et retraité à 57 ans avec 35 ans de cotisations (une combinaison d’âge/ancienneté encore assez fréquente il y a 10-15 ans), le système des retraites aurait connu un taux de rendement annuel moyen de 3,25 % réel, donc un excellent rendement, vu la longueur de la période, et en tout cas supérieur à celui compatible avec l’équilibre du système, supposé égal à 1,5 %. Pour un travailleur né en 1963 (une génération plus tard) avec des cotisations égales et le même âge de départ à la retraite mais au pro rata, le rendement estimé aurait été de 2,07 %, plus bas que le précédent, mais encore supérieur à celui d’équilibre. Enfin, pour un travailleur de 1983, avec la même carrière professionnelle mais exercée uniquement sous le régime de la méthode « contributive », le rendement d’équilibre aurait été de 1,5 %, c’est-à-dire le taux moyen supposé de croissance du PIB à long terme.
17Puisque nous parlons de travailleurs égaux, sauf en ce qui concerne leur appartenance à des générations différentes, nous comprenons bien la signification de la disparité de traitement : comme il n’est pas possible, au regard du critère de soutenabilité financière, d’attribuer systématiquement un rendement supérieur à celui d’équilibre (alors que, comme on l’a dit, des interventions de solidarité au profit des plus faibles sont possibles et nécessaires), ces « libéralités » sont certainement appréciées de ceux qui les reçoivent, mais bien « amères » pour ceux qui doivent en faire les frais.
18Le point crucial est que l’État ne peut garantir, à des générations entières, un rendement supérieur à celui de la source qui le génère (sauf pendant des crises systémiques, comme dans le cas de la Covid-19). Dans un système par répartition, cette source est constituée de la croissance du nombre des travailleurs et de leur revenu par tête. Si, comme dans l’exemple précédent, la croissance est de 1,5 %, toute attribution d’un surplus ne peut se faire qu’au détriment des contribuables actuels ou futurs. C’est pourquoi il n’est pas vraiment cohérent de se plaindre du traitement réservé aux jeunes générations sans comprendre qu’il s’agit de la conséquence directe de l’excès de générosité réservé aux moins jeunes. Et que les jeunes doivent être aidés avant tout en terme d’emploi et de rémunération.
19Enfin, pour comprendre les distorsions favorables au départ anticipé, on peut faire référence à la « taxation cachée » sur la poursuite de l’activité professionnelle dans la formule « rétributive » associée à la retraite d’ancienneté. Toujours dans cette étude du CeRP, il était montré que cette « taxe » atteignait, pour les générations encore protégées par la lente transition et donc avec des retraites abondamment calculées sur la base « rétributive », 60-70 % du salaire perçu. En d’autres termes : pour les travailleurs éligibles à la retraite mais continuant de travailler, supposons pendant un an, leur pension augmenterait, mais insuffisamment au regard des cotisations supplémentaires versées, d’une part, et de la moindre durée de la période de jouissance de la retraite, d’autre part. Cela équivaut à une « perte de la valeur patrimoniale de la pension » qui, rapportée au salaire du travailleur, pouvait aussi atteindre, comme on l’a dit ci-dessus, 60-70 %. Dans ces conditions, il ne fallait pas s’étonner de la forte chute des taux d’activité correspondant aux âges typiques de départ à la retraite d’ancienneté (56-58 ans). Et il n’est pas impropre d’appeler « taxe » cette perte : une « taxe » déraisonnable qui finissait par frapper la ressource dont le système a le plus besoin, c’est-à-dire le travail régulier.
20Sur le plan des propositions, enfin, le CeRP suggérait une intervention directe sur les pensions d’ancienneté. L’année 2001 était encore loin de la crise financière de 2008 et de la Grande Récession qui en a découlé : dans le climat apparemment « tranquille » de l’époque (du moins jusqu’à l’attentat du 11 septembre 2001), la proposition visant ces pensions prévoyait, plutôt qu’une augmentation obligatoire de l’âge légal de départ à la retraite – vu les coûts et les distorsions inévitables qu’elles comportent –, une réduction du niveau des pensions pour les départs anticipés, selon une logique de « correction actuarielle ».
21La proposition consistait à appliquer (hormis pour certaines catégories) à la partie « rétributive » des nouvelles pensions un coefficient correcteur inférieur à l’unité, de sorte à tenir compte aussi bien de la perte de cotisations en raison du nombre inférieur d’années de travail, que du nombre supérieur d’années de retraite [11]. Pour les pensions déjà versées, la proposition souhaitait une contribution de solidarité sur les plus élevées d’entre elles, afin que les cohortes privilégiées par le système « rétributif » contribuent également au rééquilibrage financier. Les économies n’étaient pas considérables (autour de 0,1 point du PIB), mais elles étaient cependant suffisantes pour financer l’introduction d’une option très limitée de sortie (opting out) du système public pour les jeunes générations. Dans la pratique, l’objectif était de donner la possibilité, uniquement aux nouveaux travailleurs, de transférer 5 à 8 points du taux contributif (33 %) sur un fonds privé, de façon à leur donner la possibilité de se construire une pension complémentaire par capitalisation financière, laquelle étant supposée suffisante pour compenser la baisse anticipée de la pension par répartition.
22On n’en a rien fait, évidemment, et cela a exacerbé les déséquilibres financiers, tandis que la sévère restriction introduite plus tard aux pensions d’ancienneté par le gouvernement Berlusconi (loi 247 de 2007), et connue comme l’ « échelle Maroni », a été ensuite annulée par le gouvernement Prodi avant même son entrée en vigueur. Une autre erreur, certainement non étrangère à la précipitation de la situation en 2011 et, quoi qu’il en soit, une nouvelle preuve de l’allure « stop and go » du processus italien de réforme.
3 – Les retraites comme « variable indépendante » ?
23Je me suis arrêtée sur la description du diagnostic et de la proposition du CeRP, car il existe un fil idéal qui relie ce document de 2001 à la réforme réalisée dix ans plus tard, en 2011. Ce n’est certes pas un hasard si j’ai été appelée en 2011 pour occuper le poste de ministre du travail et des affaires sociales [12] (Fornero, 2013).
24Malgré toutes les reconstructions « complotistes » des événements qui ont conduit à la chute du gouvernement Berlusconi (12 novembre 2011), après un été à « cœur battant » sur le front financier, en qui ce qui me concerne, le souvenir de ces jours-là, n’est certainement pas lié à une idée d’« exercice du pouvoir », mais plutôt à celle d’accomplissement d’un « devoir » (Fornero 2013). Et c’est avec un sentiment de vertige que, depuis presque une décennie, je me rappelle, minute par minute, les vingt jours qui ont conduit à la réforme et les dix-sept autres qui ont mené à son approbation définitive par le Parlement.
25La voie était très clairement tracée, après la lettre du 5 août de la BCE qui promettait une aide financière mais demandait également des réformes, alors que l’urgence se mesurait à coups de spread et avec la perspective de la Troïka (Commission Européenne, FMI et BCE) pour dicter notre agenda économique et, partant, politique aussi. Au fur et à mesure que l’engagement sur la réforme des retraites devenait plus proche et plus crédible, on enregistrait une certaine tendance à la baisse du spread, qui avait atteint 575 points de base quelques jours avant l’inauguration du gouvernement (16 novembre 2011).
26En raison de l’urgence financière, la réforme devait être, contrairement à celles trop lentes du passé, immédiate, résolutoire et crédible [13]. Conformément aux diagnostics récurrents, on devait se concentrer sur les pensions d’ancienneté et sur la mise en œuvre immédiate de la méthode « contributive » pour réduire le manque de confiance politique qui s’exprimait souvent en scepticisme ouvert : « La formule est bonne, mais… », sous-entendant dans ce « mais » « …la politique peut faire mieux que les formules mathématiques ». Ce scepticisme est légitime s’il conduit à des actions transparentes de solidarité au profit des personnes les moins privilégiées et possiblement financées par une taxation progressive et non par des cotisations proportionnelles ; mais il coïncide en fait ici avec la vieille pratique visant à augmenter la « dette implicite » sans se préoccuper de la question cruciale de son financement.
27Les défis à affronter, par ailleurs, n’étaient pas uniquement financiers mais aussi démographiques, économiques et sociaux. Sous l’aspect financier, il fallait redonner confiance aux détenteurs de notre dette souveraine dans l’immédiat et rendre soutenable la dépense des retraites à long terme. L’efficacité des mesures et la rapidité de l’approbation (par la suite âprement critiquée mais à l’époque presque universellement invoquée pour éloigner le pays du gouffre), ont engendré une confiance renouvelée vis-à-vis de l’Italie de la part des milieux internationaux, presque étonnés par l’évolution du pays. L’estimation des économies réalisées grâce à la réforme, d’autre part, se chiffrait, selon le Ufficio Parlamentare di Bilancio [14], à 88 milliards d’euros pour la période 2012-2021 (dont 11 absorbés ensuite par les sauvegardes).
28Face à l’impossibilité d’augmenter les taux de cotisation à un niveau permettant d’équilibrer la dépense (à l’exclusion celle d’assistance, financée directement par le budget public), la mesure la plus efficace pour la stabiliser à court terme est inévitablement l’augmentation de l’âge de départ au moyen d’une restriction des conditions d’accès. Dans l’urgence financière, la flexibilité du départ à la retraite était un luxe que l’on ne pouvait pas se permettre (alors qu’il serait un des pivots du système « contributif » au régime) étant donné que la plupart des départs à la retraite avec la formule « rétributive » tendaient à se situer au niveau le plus bas possible. La réforme a donc dû hausser significativement l’âge du départ à la retraite, en intervenant de façon directe sur les pensions d’ancienneté.
29En ce qui concerne le moyen-long terme, différents documents officiels, internationaux et nationaux, ont plusieurs fois mis l’accent sur la contribution fondamentale de la réforme à la stabilisation financière du pays [15]. Une mesure très importante est l’indexation sur l’espérance de vie des conditions exigées pour un départ à la retraite, un automatisme tendant à éviter le conflit social qui surgit inévitablement chaque fois que des interventions sur les retraites sont proposées, dans un contexte d’impossibilité pratique d’augmentation générale des taux de cotisation (et faute d’une croissance suffisante de la productivité et des rémunérations). Cette indexation introduit dans le système un stabilisateur automatique de la dépense, mais représente aussi un outil pour garantir l’adéquation des pensions « contributives », à savoir éviter des cohortes de retraités « jeunes mais pauvres » [16]. Il ne s’agit pas d’un choix optimal, mais rien n’interdit au décideur politique d’exonérer, de façon discrétionnaire mais transparente et responsable, certaines catégories professionnelles plus physiquement et psychologiquement pénibles [17].
30Quant aux aspects démographiques, il est paradoxal qu’on aborde souvent la question de la réforme des retraites le regard tourné vers le passé, c’est-à-dire vers la défense de positions et de droits acquis, et non pas vers le futur, négligeant ainsi presque complètement le grand bouleversement social que l’évolution démographique engendrera. Dans les critiques politiciennes des réformes, on a parfois le sentiment d’un retour en arrière, aux années 70, quand on parlait du salaire comme « variable indépendante » de l’économie [18]. Aujourd’hui la variable indépendante semble être la pension de retraite et la spirale négative prend d’autres formes – la soustraction de ressources publiques pour d’autres classes d’âge engendre de plus faibles probabilités d’emploi des classes actives, une plus grande précarité de leur revenu, un plus grand risque de pauvreté – mais le résultat est toujours une croissance moindre.
31L’Italie a une espérance de vie élevée et un taux de fécondité très bas (en 2019, respectivement : 80,8 hommes ; 85,2 femmes et 1,32). Elle doit donc faire face à l’une des plus fortes augmentations du « taux de dépendance des personnes âgées » [19] (rapport entre les personnes âgées de 65 et plus et les personnes d’un âge compris entre 20 et 64 ans) : de 39 seniors actuels pour 100 personnes en âge de travailler, on atteindra environ 74 pour cent en 2050 et 79 d’ici 2080. Avec une démographie aussi défavorable au système par répartition, il est difficile, et peu responsable à l’égard des générations jeunes et futures, de conserver des conditions généreuses d’accès à la retraite et des formules qui systématiquement reversent, sous forme de pensions, plus que ce que le système aura reçu comme cotisations.
32Plus inquiétant encore que le rapport de dépendance des personnes âgées, le « taux de dépendance économique », entendu comme rapport entre la somme des retraités (indépendamment de l’âge) et des personnes en âge de travailler qui ne travaillent pas et le total des personnes qui sont effectivement employées (comme salariés ou comme indépendants). Bien que les projections de cet indicateur (aujourd’hui autour de 1,30-1,40) soient très incertaines (vu qu’il est influencé non seulement par les tendances démographiques, mais aussi par diverses hypothèses comportementales, concernant aussi bien les choix des individus que les changements de la technologie et des marchés), l’écart existant entre les deux mesures représente pour l’Italie une formidable sonnette d’alarme, visant à nous rappeler que la cohérence des formules mathématiques donne un équilibre financier au système, mais la soutenabilité sociale dépend, en fin de compte, du travail et des rémunérations des individus et de la croissance de l’économie. Plus sont nombreuses les personnes en âge de travailler qui se trouvent sans emploi, plus la charge sur les actifs est pesante. Cet écart est créé non seulement par le chômage et la non-participation (notamment féminine et méridionale) mais aussi par les pré-retraites, choix largement utilisé par le passé et qui a engendré un grand nombre de retraités dans la tranche d’âge 54-64 ans, avec des retraites d’un montant relativement faible, qui ont conduit, avec le temps, à un appauvrissement réel de leurs bénéficiaires [20].
33On en déduit que la seule réforme des retraites, quoique nécessaire, ne suffit pas en présence de déséquilibres démographiques et/ou d’inefficiences dans le système. Le travail est la base de tout, qui, loin de se raréfier (comme le prophétisent certains) continuera à représenter le prérequis d’un bon système de retraite et, plus en général, de notre société. L’emploi, par conséquent, doit se situer au premier rang de l’agenda politique, non pas dans une logique de simple « remplacement » – moins de seniors et plus de jeunes au travail – dans une énième re-proposition du conflit intergénérationnel, mais dans une logique de développement. Seule une croissance soutenue peut en effet favoriser le travail inclusif – et non marginal – et éviter que la distribution des ressources soit toujours plus déséquilibrée, non seulement au détriment des jeunes mais aussi au détriment des classes les moins aisées, comme cela fut systématiquement le cas au cours des dernières décennies.
4 – La réforme de 2011 : le partage des sacrifices et la réduction des privilèges
34Dans cette optique, la réforme de 2011, avec les restrictions imposées aux retraites d’ancienneté a affronté l’inefficience d’un système qui, comme on l’a observé auparavant, en « taxant » la poursuite du travail lorsque les conditions minimales d’âge/ancienneté étaient atteintes, rendait le travail économiquement désavantageux par rapport à la retraite. D’autre part, l’immédiate entrée en vigueur – à partir du 1er janvier 2012, pour l’ancienneté encore à atteindre et pour tous les travailleurs, les fonctionnaires et même les membres du Parlement – de la pension « contributive », même si elle est apparemment non fondamentale sur le plan de la réduction de la dépense en raison du délai écoulé depuis la réforme de 1995, a été très importante pour apporter de la crédibilité au changement du système.
35Pour que les citoyens comprennent pleinement le fonctionnement de la formule, très différente des précédentes garanties politiques sur le taux de remplacement, il aurait été particulièrement souhaitable de mener une opération à vaste échelle d’information appropriée sur la méthode et ses implications pour la vie des individus ainsi que pour les comptes publics, opération que, malheureusement, notre gouvernement n’a pu accomplir faute de temps et qui, par la suite, n’a pas eu lieu non plus, laissant le champ libre aux querelles des talk-shows, contradictoires et souvent mal informées.
36En ce qui concerne les aspects les plus sociaux au cœur de la réforme, la question de la parité de genre dans les règles a une importance particulière. La réforme aligne, à compter de 2018, l’âge de la retraite des femmes sur celui des hommes (déjà aligné dans le secteur public, suite à la condamnation de l’Italie par la Cour Européenne de Justice). Dans ce cas aussi, la réforme a voulu combattre les lieux communs habituels et contre-productifs pour les femmes elles-mêmes et affirmer le principe de la parité des opportunités dans l’éducation, dans le monde du travail et dans la division des tâches domestiques plutôt que de seconder la pratique « machiste » des « compensations a posteriori », notamment caractérisée par un plus faible âge de départ à la retraite et par de généreuses pensions de réversion aux veuves (Fornero et Monticone, 2010). C’est peut-être justement en raison de ce défi lancé à ces lieux communs, que cette égalité a été âprement critiquée, surtout par le monde syndical qui a omis de souligner qu’une forme d’avantage est tout de même accordée aux travailleuses en raison de leur espérance de vie plus longue.
37D’autre part, le choix politique permettant aux travailleuses d’accéder à la retraite anticipée dès l’âge de 57 ans, à partir de 35 années de cotisation – « l’option femme » introduite en 2004 (loi 243) et toujours valable – s’inscrit non seulement dans les politiques « paternalistes » vis-à-vis des femmes, mais finit par légitimer la carence des services de soin, avec la justification que « de toute façon les femmes peuvent s’en occuper puisqu’elles ont la possibilité de quitter le marché du travail avant ». Et, pour les mêmes raisons, elle finit par légitimer la progression plus lente des carrières féminines, sur la base de leur durée inférieure.
38La question de l’équité dans la distribution des sacrifices, non seulement entre mais aussi au sein des générations, n’a pas moins compté dans la réforme malgré les contraintes financières. Pour les pensions déjà en cours de versement, vu l’impossibilité, au niveau politique, d’appliquer rétroactivement la formule « contributive » à la partie des droits à pension déjà acquis selon la plus généreuse formule « rétributive » (une restructuration qui n’aurait jamais franchi le sas de la Cour Constitutionnelle et qui, de toute façon, aurait été totalement inopportune pour les pensions de retraite relativement basses, quoi que supérieures au total des cotisations versées), l’extension de la « contribution de solidarité » déjà introduite par le précédent gouvernement est donc apparue comme répondant entièrement à des critères d’équité, même si elle allait évidemment se heurter à la notion des « droits acquis ». D’ailleurs, s’il n’est pas possible de réécrire l’histoire, certaines erreurs peuvent au moins être corrigées et la contribution de solidarité nous semblait un bon compromis entre le recalcul complet des bénéfices selon la formule « contributive » et la seule application aux anciennetés futures.
39Le gel de l’indexation des retraites sur les prix pendant deux ans (à l’exception des retraites inférieures à 1 400 euros mensuels) a été, en revanche, motivé par des raisons financières contingentes, c’est-à-dire par la nécessité de réduire rapidement la dépense (et en effet il ne faisait pas partie de ma proposition originelle de réforme), mais il n’est certes pas inique de penser que, à un moment où des sacrifices sont demandés aux travailleurs actifs, les retraités soient également sollicités, à partir d’un certain niveau de revenu et surtout en considérant la relative générosité de la formule avec laquelle leur pension de retraite a été déterminée.
40Ces deux mesures ont été cependant rejetées par la Cour constitutionnelle, mais proposées de nouveau par les pouvoirs exécutifs suivants. On en vient à se demander si notre Constitution protège vraiment les intérêts des générations jeunes et futures aussi, outre ceux des générations présentes : très simplement, si tel était le cas alors quand le pays perd en bien-être, ses citoyens âgés, qui par ailleurs ont une plus grande richesse accumulée, participeraient, eux aussi, aux sacrifices.
41Une autre inefficience qui, grâce à la réforme, peut être considérée comme résolue à travers l’intégration de l’INPDAP [21] dans l’INPS [22], était la séparation anachronique de la gestion des salariés du privé de celle des salariés secteur public, qui a conduit à un traitement plus favorable de ces derniers. Depuis l’unification de ces organismes, il est légitime d’espérer, à moyen terme, non seulement une baisse des dépenses, mais aussi et surtout une plus grande transparence du régime des retraites des fonctionnaires, traditionnellement beaucoup plus déséquilibré que celui des salariés du privé, et une poussée vers une uniformisation inévitable des traitements : c’est la pénibilité de l’activité exercée qui justifie des exceptions, pas le fait que l’employeur soit une entreprise privée ou une institution publique.
42L’absorption de ce qu’on appelle les « fenêtres mobiles » dans les conditions d’âge et de cotisation, une modalité qui avait été adoptée pour augmenter, un peu subrepticement, l’âge du départ à la retraite, répondait essentiellement à des critères de transparence. En ce qui concerne cette dernière mesure, permettez-moi une remarque sur le style de gouvernement des techniciens (le mien en tout cas) : alors que les « fenêtres » avaient été introduites dans le but de retarder le départ à la retraite sans le signifier clairement à l’opinion publique, leur élimination visait à rendre, dans cette volonté de transparence, explicite l’année supplémentaire demandée. Dans les faits, si cela ne correspondait pas à une augmentation de l’ancienneté, c’est ainsi que cette mesure a été interprétée, avec son cortège de polémiques. Une triste confirmation du fait qu’en politique la transparence ne paie pas ?
43Enfin, pour ce qui est de la complémentarité entre les piliers public et privé, la réforme de 2011 réaffirme la centralité de la sécurité sociale publique dans une optique de système mixte, mais n’intervient pas sur la retraite complémentaire, se limitant à considérer souhaitable, à l’avenir, une réaffectation (opting out) progressive et limitée d’une partie du taux obligatoire, à réserver aux nouveaux entrants en vue de la constitution d’un pilier complémentaire plus robuste. Aucune « privatisation » du système de retraite, donc, comme le laissent entendre certaines accusations, mais la construction d’un bon système « mixte », en partie public et par répartition, en partie privé et par capitalisation, pour permettre une meilleure répartition du risque total et la constitution d’une épargne plus adéquate pour le grand âge (Fornero, Lusardi et Monticone, 2010).
44La place de la retraite complémentaire reste cependant faible dans notre pays. D’un côté, comme on l’a souligné plusieurs fois, la transition vers un système mixte est toujours très difficile, en raison du problème de la double « taxation » (à la charge, encore une fois, des générations les plus jeunes qui doivent pourvoir au financement des retraites actuelles et de leurs futures retraites). Les difficultés sont évidemment bien supérieures dans une période de chômage et de revenus stagnants et tendanciellement précaires, comme pendant les deux dernières décennies. D’autre part, de récentes mesures de politique économique, tant sur le plan fiscal que sur celui des ressources, ont paru peu cohérentes avec l’objectif d’une expansion des fonds de pensions. Ces signaux négatifs doivent être lus avec un regard peut-être cynique mais réaliste : tant que l’emploi des jeunes conservera les caractéristiques actuelles d’incertitude et de précarité, il est difficile de penser que les jeunes eux-mêmes, qui devraient en être les principaux destinataires, soient attirés par la retraite complémentaire.
5 – La réforme à la barre : instrumentalisations, polémiques et mécontentement
45La réforme a affronté efficacement le problème de la soutenabilité financière du système de retraite italien et elle a été décisive pour convaincre la Commission Européenne de mettre fin, en mai 2012, quelques jours après la chute du gouvernement Monti, à la procédure d’infraction pour déficit excessif contre l’Italie en 2009. La décision de Bruxelles montrait bien que les sacrifices que le gouvernement avait dû imposer aux citoyens pour rétablir la confiance dans la dette souveraine du pays commençaient à porter leurs fruits. Ce message positif, qu’il aurait été important de faire parvenir aux citoyens, s’est toutefois égaré dans la vague de polémiques et de récriminations contre la réforme. C’est vrai : au-delà des critiques, parfois très âpres, et des attaques personnelles (avec des expressions du type « Fornero au cimetière » qui rime en italien [23]), aucune grève générale n’a été organisée. Le débat politique, cependant, s’est concentré uniquement sur les effets négatifs à court terme de la réforme, ignorant l’aspect de rééquilibrage, en faveur des plus jeunes, des rapports économiques entre générations.
46Les récriminations concernaient principalement l’absence d’une période de transition, ce qui a exacerbé la question des « esodati », née essentiellement faute de chiffres fiables (comme cela a été clair une fois la réforme approuvée, hélas) mais qui a enflé aussi en raison d’une instrumentalisation politique cynique. Il n’est pas utile ici de passer en revue le renvoi des responsabilités, que justement, en tant que ministre j’ai assumées, tout en dénonçant l’instrumentalisation d’estimations réalisées sur un public bien plus large ; estimations qui se sont avérées par la suite grandement surévaluées, mais qui sont parvenues directement à la presse. La combinaison de ces facteurs (absence de transition, manque de chiffres fiables et instrumentalisation politique) a suffi à créer, autour d’un problème sérieux mais soluble, un court-circuit politico-médiatique qui a dominé le débat sur la réforme et les talk-shows télévisés.
Encadré
47Le sujet, qui méritait sans aucun doute une considération sur le plan humain, a ainsi servi à perpétuer l’habitude de considérer comme irrécupérable au travail toute personne perdant son emploi entre 50 et 60 ans ou, si l’on veut, à fournir un alibi à des administrations mal outillés en ressources financières et professionnelles pour la mise en œuvre de politiques actives efficaces. L’affaire est emblématique des nombreux problèmes et caractéristiques de l’Italie d’aujourd’hui et l’on peut en tirer certaines leçons.
48La première concerne la culture des chiffres : les informations en possession de l’appareil statistique public (avec de sensibles disparités entre les chiffres INPS, RGS et Ministère du Travail) se sont avérées insuffisantes, sans que cette insuffisance puisse être clairement perçue. Par conséquent, des données trompeuses ont été extrapolées, qui ont vite conduit à des conclusions déformées dans un sens alarmiste, parfois en toute bonne foi, parfois non. A l’avenir, il faudra améliorer autant la connaissance du phénomène (le Ministère a immédiatement institué un registre des accords pour les sorties anticipées) que la transparence sur ses limites de fiabilité : la mesure de phénomènes complexes n’est presque jamais précise et les marges d’erreur des estimations doivent être connues.
49La deuxième leçon concerne la limite incertaine entre l’individuel et le collectif. Il y a un paradoxe dans la possibilité de stipuler des accords, concernant des groupes de travailleurs ou des travailleurs individuels, en pariant sur l‘immutabilité des règles, par ailleurs à un moment où la soutenabilité est fortement remise en question. Par l’absurde, si tous les travailleurs relativement proches de la retraite avaient conclu un accord avec leur employeur, la prérogative parlementaire de modifier les règles en vigueur aurait été vaine : le « privé » aurait battu le « public ». Ces accords ne peuvent sembler qu’encore plus fragiles voire « téméraires », en présence d’un cadre normatif notoirement instable, comme celui des retraites, soumis pendant des années à des modifications continuelles.
50La troisième leçon concerne la persistance de choix peu clairvoyants. Sur le plan administratif, l’absence d’un registre obligatoire des accords souligne une fois de plus la faible clairvoyance des appareils publics centraux et régionaux, ainsi que des acteurs sociaux. Il y a une sorte d’ « inertie » qui rend très difficile de sortir des sentiers battus, même en présence de phénomènes radicalement nouveaux. Un aspect particulier de cette culture est représenté par l’enracinement des « droits acquis », considérés comme tels même quand ils ne sont que présumés : le droit acquis à la retraite l’emporte sur l’attention donnée au travail des seniors et au vieillissement actif.
51La quatrième leçon concerne les principes auxquels un ministre technique ferait bien de se conformer. Un éventuel futur ministre technique ne devra pas s’étonner, encore moins se scandaliser, si les composantes de l’administration ne conservent pas toutes une attitude rigoureusement institutionnelle, cohérente avec la notion de bien commun et ne collaborent pas pour le réaliser. Il devra également se souvenir que, dans le fracas des polémiques, quand concepts et notions cessent d’être des réalités univoques et largement partagées, la voix du bon sens a du mal à trouver un espace adapté dans l’univers médiatique et, si cela arrive, ne trouve souvent qu’un maigre auditoire.
6 – Plus de « réformes » (et plus de « contre-réformes ») mais maintenance, transparence et solidarité
52L’avenir du système de retraite italien ne devrait pas faire l’objet de nouvelles grandes réformes ni, il faut le souhaiter, de contre-réformes. A la suite de la réforme de 2011, par rapport au PIB, la dépense - quoi qu’en légère augmentation (« la bosse ») dans les vingt-trente prochaines années en raison surtout de l’impact du changement démographique – est sous contrôle : selon les projections à long terme de l’OECD (Pensions at a Glance, 2013, p. 175) et de la Commission Européenne (Ageing Report 2015, p. 94; Ageing Report 2018, p. 67), l’Italie est l’un des pays européens où elle n’augmentera pas par rapport au début des années 2010 ou bien tendra à une légère diminution. La soutenabilité sociale (adéquation des niveaux) est – comme de juste – confiée surtout au travail : avec l’allongement de la vie professionnelle, les retraites seront adaptées si les carrières et les niveaux de rétribution le sont et si la Sécurité sociale couvre l’intégralité du cycle de vie (Franco et Tommasino 2020). Mais cela demande un grand plan d’investissements en « capital humain » et en technologie. On pourrait dire, sans paradoxe, que la meilleure réforme des retraites restant à concevoir est de parvenir à un meilleur fonctionnement du marché du travail et d’augmenter le taux de croissance de la productivité (qui a été structurellement plus bas que la moyenne européenne pendant les 20-25 dernières années).
53Cela ne signifie pas que des ajustements ne soient pas possibles et opportuns. Bien au contraire, à y regarder de près, ils font partie intégrante d’un système de retraite, ils en représentent une « maintenance » nécessaire qui doit être apportée à toute forme de capital, physique ou même social, et le système des retraites fait partie de notre « capital social ». Il faut, en revanche, une consolidation et une mise au point du régime « contributif » dans le pilier public et un renforcement du pilier privé, objectifs qui ne sont pas incompatibles avec des interventions ciblées dans le parcours de transition, notamment avec l’introduction d’éléments de flexibilité dans l’âge de la retraite. On doit avant tout considérer qu’une véritable flexibilité ne pourra être réalisée que lorsque le système « contributif » tournera à plein régime (autour de 2035 pour les flux des nouvelles retraites et, après 2050, pour tous les retraités). Il s’agira alors d’une liberté de choix responsable, envisageable entre 63 et 70 ans, avec une correction du montant de la retraite tenant compte des cotisations supérieures versées et de la durée inférieure de la période de retraite et donc sans l’avantage implicite donné à la sortie au titre de la retraite d’ancienneté.
54Une certaine flexibilité a déjà été expérimentalement introduite dès 2017 par le gouvernement Renzi avec l’APE sociale, pour les catégories défavorisées, qui met le coût de l’avance des retraites à la charge de la collectivité et donc dans la dépense d’assistance et non pas dans celle de la retraite. L’APE volontaire, destinée à tous les travailleurs qui répondent à certaines conditions (être âgé d’au moins 63 ans ainsi que justifier d’au moins 20 années de cotisations et d’une distance maximum du départ à la retraite de 3 ans et 7 mois) établit par contre que l’avance soit rendue en 20 ans à compter du départ à la retraite, à l’âge normal (67 ans). Il s’agit de mesures innovantes qui pourront aussi conduire à de véritables ajustements de la réforme, en mesure de la consolider.
55Totalement différente est la disposition qui a été introduite par le gouvernement giallo-verde [24] (Conte 1). Elle constitue une véritable attaque de la réforme, bien qu’il s’agisse d’une mesure temporaire (trois ans) : c’est-à-dire « quota 100 », qui permet une retraite anticipée, sans aucune pénalisation, à tous les travailleurs pour lesquels la somme de l’âge – avec un minimum de 62 ans – et de l’ancienneté correspond à 100. Une mesure clairement « politique », très populaire, qui a été présentée comme le « premier coup de hache porté à la réforme Fornero » et qui a contribué au large consensus politique en faveur de la Ligue de Matteo Salvini. Cette mesure, qui bénéficie surtout aux travailleurs (hommes) du Nord et aux fonctionnaires, a bien alourdi les finances publiques (mesure estimée à environ 20 milliards d’euros pour les trois ans) et n’a pas favorisé le renouvellement des générations qui avait été promis (dans la première année, la substitution a été seulement d’un jeune pour trois retraités « quota 100 »).
56En ce moment, avec la crise sanitaire et économique de la Covid-19 à combattre, on est en droit de douter que ce retour à la retraite anticipée constitue une priorité pour le pays. D’autre part, on peut souhaiter que cette crise fasse comprendre à la politique et à l’opinion publique que le retour de la croissance économique doit avoir comme priorité l’emploi et non pas les retraites, pour lesquelles l’objectif doit être la consolidation du parcours de réforme et non pas un retour au passé.
57Alors que l’objectif de la retraite complémentaire s’est terni principalement en raison de la Grande Récession et de la faiblesse des ressources, la méthode « contributive » est loin d’être parfaite mais, dans son uniformité, sa transparence et son objectivité, elle est toujours préférable, dans une optique de bien-être social des générations présentes et futures, à la tendance intrinsèque à la dette, aux distorsions et à la fragmentation opaque du labyrinthe normatif du passé. De plus, la méthode est compatible avec la solidarité, qui devient même plus transparente et efficace, notamment avec l’instrument des contributions notionnelles à la charge des finances publiques, alors que se réduit la tolérance envers les privilèges et les abus (Holzmann et al. 2020 [25]).
58Sur ce front, beaucoup reste à faire tant en ce qui concerne la collecte et l’analyse des données (par exemple, en termes de différenciations socio-économiques des mortalités) qu’en ce qui concerne le contrôle fin du mécanisme, pour éviter des effets régressifs. Il y a beaucoup à faire, notamment en termes de responsabilisation des individus pour leur bonne implication dans les grandes transformations sociales que sont les réformes, qui doivent s’accompagner de campagnes d’information complètes et relayées ainsi que de programmes d’éducation économico-financière.
59En conclusion, le manque de conscience des mécanismes opérationnels dans le système de retraite, public comme privé, peut sérieusement compromettre la réalisation des objectifs et nous revenons ainsi à la carence d’une culture économico-financière de base. Aujourd’hui, avec le pays écrasé par un nouveau « cygne noir », les choix risquent d’être dictés davantage par des considérations à court terme, par des craintes et des peurs, plutôt que par une information correcte et par une préparation adéquate. Alors qu’il est du devoir de la politique de réaffirmer la clairvoyance des choix et de défaire les « nouveaux populismes », l’éducation économico-financière constitue un instrument essentiel pour améliorer les choix sur le plan individuel et sur le plan collectif.
Bibliographie
Références
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- RGS-Ragioneria Generale dello Stato, 2015, « Le Tendenze di medio-lungo periodo del sistema pensionistico e socio-sanitario », RGS Rapporto, n° 16, Roma.
Notes
-
[1]
Cet article est basé sur mon livre “Chi ha paura delle riforme. Illusioni, luoghi comuni e verità sulle pensioni”, Università Bocconi Editore, Milano, 2018. Je remercie beaucoup ma collègue Sylvie Pipari pour son assistance sur le texte français.
-
[2]
OECD, 2013.
-
[3]
Les exemples sont nombreux et témoignent de l’utilisation à des fins électorales du système de retraites : les retraites minimales à « un million de lires » (516,89 euros) du gouvernement Berlusconi (2002) ; l’abolition par le gouvernement Prodi du fort accroissement de l’âge de retraite décidé par le gouvernement Berlusconi (2008) ; l’élargissement des ayants droits au quatorzième mois du gouvernement Renzi (2017) et surtout « quota 100 » (somme de l’âge et de l’ancienneté) du premier gouvernement Conte.
-
[4]
NDLR : Le metodo contributivo consiste à calculer la pension finale uniquement à partir des cotisations versées pendant l’activité. Un régime de retraite qui verse des pensions de ce type est un système à cotisations définies.
-
[5]
NDLR : « esodato », dérivé du mot esodo (exode), est un néologisme journalistique employé pour la première fois le 21 mars 2012 par Michele Carugi dans un blog du journal Il Fatto Quotidiano (source : Treccani).
-
[6]
Il s’agit essentiellement de la possibilité de financer une sortie anticipée du travail avec une allocation publique (Ape sociale) ou un prêt bancaire peu onéreux (Ape volontaire) ou encore une pension temporaire de retraite anticipée (Rita, Rendita Integrativa Temporanea Anticipata ou rente).
-
[7]
NDLR : Le metodo retributivo consiste à calculer la pension à partir des (derniers) salaires (rétributions) et non du montant des cotisations. De telles pensions sont versées par des régimes dits à prestations définies.
-
[8]
NDLR : Cette pensione di anzianità (littéralement pension d’ancienneté) permettait aux travailleurs ayant atteint une durée de 40 années d’ancienneté (ou 35) de cotisation de prendre leur retraite à tout âge (ou à partir de 62 ans). Elle a été modifié pour la première fois en 2004 par des exigences supplémentaires puis la réforme Monti-Fornero l’a remplacée dans la pratique par une pension de retraite anticipée (pensione anticipata).
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[9]
La formule reconnaissait un rendement de 2 %, par année d’ancienneté, de la moyenne des derniers salaires (de 3 à 10 ans) ; pour 40 années de travail (pas toutes effectives) la retraite se situait à 80 % du salaire.
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[10]
Castellino et Fornero, 2001.
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[11]
La réduction « d’équité actuarielle » correspondait presque à 3 % pour chaque année.
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[12]
Même si j’ai souvent pensé que si Onorato Castellino, mon maître à l’Université de Turin, avait été encore en vie, il en aurait été le premier candidat.
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[13]
i.e. cohérente avec le parcours déjà tracé.
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[14]
Bureau Parlementaire du Budget.
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[15]
Il suffit de citer le rapport sur l’Italie de la Commission Européenne (2015) et le rapport de la Ragioneria Generale dello Stato (littéralement, Comptabilité Générale de l’État) sur les tendances de la dépense des retraites et de la sécurité sociale (RGS, 2015), qui souligne les mérites du processus de réforme pour la stabilisation de la dépense publique pendant les décennies à venir.
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[16]
La mesure était déjà prévue, mais pour le futur, par un précédent décret du Gouvernement Berlusconi.
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[17]
Une voie suivie par le gouvernement Gentiloni, qui, succédant au gouvernement Monti, a eu la sagesse de ne pas suspendre le mécanisme, même s’il en a exempté certaines catégories.
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[18]
Une indépendance par ailleurs non seulement vaine, mais objectivement dangereuse, cause de la spirale perverse qui conduisait les augmentations salariales à des hausses de coûts de production et des prix, à la perte de compétitivité, aux dévaluations /dépréciations du taux de change pour la rétablir, puis à de nouvelles augmentations des prix et des salaires non accompagnées de gain de productivité.
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[19]
OECD (Pensions at a glance, 2019).
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[20]
Deux indicateurs suffisent. Le premier est le taux de participation dans la classe d’âge 55-64 ans : en 2010, c’était le plus bas (hormis Malte) parmi les 27 pays européens (37,8 contre une moyenne de 49,7, avec l’Allemagne à 62,5 et la Suède à 73,9). Et ce surtout à cause de la faible participation des femmes, légèrement au-dessus de 25 %, à cause aussi de l’âge inférieur de la retraite pour les femmes, aujourd’hui en voie de dépassement, lesquelles sont poussées à la retraite par la nécessité de s’occuper des petits-enfants ou des membres dépendants de la famille. Le second, qui constitue l’autre face de la même médaille, est l’âge effectif de départ à la retraite : en 2019, à 62 ans environ, il était encore inférieur de deux ans à la moyenne européenne.
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[21]
L’INPDAP est l’acronyme qui désigne l’Istituto nazionale di previdenza e assistenza per i dipendenti (littéralement, l’Institut national de prévoyance et d’assistance pour les personnes dépendantes).
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[22]
L’INPS est l’acronyme qui désigne l’Istituto nazionale della previdenza sociale (littéralement, l’Institut national de la sécurité sociale).
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[23]
« La Fornero al cimitero » (cf. La Repubblica, 23 mars 2012, https://www.repubblica.it/politica/2012/03/21/foto/fornero_al_cimitero_bufera_su_diliberto-31955275/1/).
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[24]
NDLR : Le gouvernement giallo-verde (littéralement jaune-vert) réunit deux couleurs politiques : le jaune du mouvement cinq étoiles (M5S) et le vert de la Ligue (Lega).
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[25]
Voir Barr et Diamond (2008) pour une vision plus critique du système NDC.