Notes
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[*]
Cette prévision a été réalisée à l’aide du modèle trimestriel de l’économie française, e-mod.fr, par une équipe dirigée par Mathieu Plane, composée de Bruno Ducoudré, Pierre Madec, Hervé Péléraux et Raul Sampognaro. La prévision tient compte des informations disponibles à la fin mars 2018 et intègre les comptes nationaux trimestriels du quatrième trimestre 2017.
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[1]
Voir par exemple Heyer É., Péléraux H., « Reprise sous tension ? », Lettre de l’OFCE, n° 175, mai 1998.
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[2]
Bruno Ducoudré et Éric Heyer, « Baisse de l’euro et désinflation compétitive : quel pays en profitera le plus ? », Revue de l’OFCE, n° 136, octobre 2014.
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[3]
La croissance de long terme considérée ici n’est pas la croissance potentielle estimée par ses déterminants structurels au moyen d’une fonction de production, mais la moyenne du taux de croissance du PIB sur l’intervalle de temps considéré telle qu’elle ressort de l’estimation avec des régresseurs centrés-réduits. Des ruptures de cette croissance de long terme ont été introduites pour répliquer le ralentissement de la croissance potentielle mais en évidence par d’autres méthodes d’estimation.
-
[4]
Pour plus de détails, voir P. Madec, M. Plane et R. Sampognaro (2018) « Pas d’austérité mais des inégalités », Document de travail de l’OFCE, n° 2018-01.
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[5]
« Budget 2018 : pas d’austérité mais des inégalités », OFCE Policy brief n° 30, janvier 2018.
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[6]
Selon notre estimation, une hausse de 1 point de taux de profit conduit à une amélioration de la FBCF de 1,5 % à long terme (au bout de dix ans). À peine plus de 10 % de l’effet total se fait sentir la première année et la moitié de l’effet total est réalisé au bout de deux ans et demi.
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[7]
Voir notamment B. Ducoudré, « 2018 : baisse du chômage non garantie », Blog de l’OFCE, décembre 2017.
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[8]
Voir étude spéciale de la prévision d’octobre 2017 : « Quel nouveau sentier de croissance de la productivité du travail ? Une analyse pour six grands pays développés », Revue de l’OFCE, n° 152.
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[9]
Les politiques de baisse du coût du travail (le CICE, puis le premier volet du Pacte de responsabilité portant sur les « bas salaires »), qui enrichissent la croissance en emplois, ont abaissé temporairement la tendance de productivité, de l’ordre de 0,2 point en 2014, 0,4 point en 2015 et 2016 puis 0,5 point en 2017.
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[10]
La mesure, décidée par le gouvernement précédent dans le cadre du Plan d’urgence pour l’emploi, consistait en une prime temporaire à l’employeur pour les embauches de salariés dont les salaires sont compris entre 1 et 1,3 SMIC, là où l’élasticité du coût du travail à l’emploi est la plus forte. La prime à l’embauche concernait toute embauche de plus de 6 mois ayant lieu en 2016 et jusqu’au 30 juin 2017 dans les entreprises de moins de 250 salariés. Durant les deux premières années du contrat, l’embauche donne droit à une prime trimestrielle de 500 euros, soit 4 000 euros au maximum.
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[11]
Pour près de 30 000 emplois.
-
[12]
Le calcul de l’élasticité macroéconomique de la mesure s’appuie sur une élasticité moyenne de l’emploi au coût du travail de 0,3 (cf. Ducoudré et Plane, 2015, « Les demandes de facteurs de production en France. Estimation et analyse des effets de la crise », Revue de l’OFCE, n° 142) et intègre les effets d’assiette liés au profil d’allègement des mesures incluses dans le Pacte de responsabilité (cf. Bock Lissot et Ozil, 2015, « Matis : une maquette d’évaluation des effets sur l’emploi de variations du coût du travail », Documents de travail de la DG Trésor, n° 2015/02).
-
[13]
Voir Ducoudré, 2017, « Évaluation du remplacement du CICE par une baisse des cotisations sociales patronales », OFCE Policy brief, n° 20, 6 juillet.
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[14]
Pour rappel, l’État devra reverser aux entreprises 18,9 milliards d’euros par an en moyenne pour le CICE sur la période 2016-2017, 4,5 milliards par an pour les allègements sur les bas salaires sur la période 2016-2017 et 3,4 puis 4,5 milliards d’euros sur la période 2016-2017 pour l’allègement uniforme entre 1,6 et 3,5 SMIC. Ces transferts sont financés aux deux tiers par des économies sur la dépense publique et pour un tiers par une hausse des prélèvements fiscaux.
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[15]
Cf. circulaire N° DGEFP/SDPAE/MIP/MPP/2018/11 du 11 janvier 2018. Les PEC ciblent les « personnes sans emploi rencontrant des difficultés sociales et professionnelles particulières d’accès à l’emploi ». Ils doivent faire l’objet d’un accompagnement renforcé, de l’acquisition de compétences et d’expérience professionnelle avec un objectif d’insertion professionnelle.
-
[16]
Pour plus de détails, voir « Les contrats aidés : quels objectifs, quel bilan ? », Dares Analyses, n° 21, mars 2017.
-
[17]
Suivant le PLF 2018, l’exonération de cotisations sociales « Aide au chômeur créant ou reprenant une entreprise » (ACCRE) sera étendue dès 2019 à l’ensemble des travailleurs indépendants qui créent ou reprennent une activité, pour un coût de 200 millions d’euros et pourrait bénéficier à terme à 350 000 créateurs ou repreneurs d’entreprise supplémentaires.
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[18]
Les allègements supplémentaires rendraient ces dispositifs non incitatifs.
-
[19]
Cet effet pourrait toutefois être négligeable. Cf. Redor, D. « L’aide à la création d’entreprises a-t-elle un impact sur leur survie ? Une évaluation pour quatre cohortes d’entreprises créées par des chômeurs en France », Économie et Statistique, n° 493, 2017.
-
[20]
L’effet de la formation sur l’emploi est calculé en appliquant une élasticité de retour à l’emploi de 0,07 sur le différentiel d’entrées en formation par rapport aux entrées constatées en 2015 (660 000 entrées). Cf. Card, D., Kluve, J., & Weber, A. (2017), « What works? A meta analysis of recent active labor market program evaluations », Journal of the European Economic Association, jvx028. L’effet de la Garantie jeunes sur l’emploi est calculé en retenant un impact de 9 % sur le taux d’emploi durable (CDI et CDD de 6 mois et plus hors emplois aidés) sur le nombre de jeunes entrant dans le dispositif chaque année. Cf. tableau 2.2, p. 22 dans Dares, 2016 : « Premiers résultats d’évaluation statistique de l’impact de la Garantie jeunes – Annexe 5 », novembre.
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[21]
La population active potentielle est calculée à partir des projections de population active de l’Insee, auxquelles sont ajoutés les effets de flexion et les effets des formations sur les comportements d’activité.
-
[22]
Cf. Koubi, M., & Marrakchi, A. (2017), Projections de la population active à l’horizon 2070, Insee, Document de travail, n° F1702.
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[23]
Le défaut de bouclage provient de l’utilisation de sources différentes pour décomposer la population active entre emploi (source Comptabilité nationale) et chômage (source Enquête emploi). Ce défaut de bouclage est nul en moyenne sur la période 2002-2016.
-
[24]
Qui tablait sur un déficit nominal de 2,8 % du PIB.
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[25]
Deux mesures de l’orientation budgétaire sont traditionnellement utilisées : la variation du solde structurel (primaire) et l’effort structurel (primaire). La principale différence entre les deux mesures provient de la comptabilisation de l’effort budgétaire en recettes. Ainsi, l’effort structurel tient compte exclusivement de l’évaluation ex-ante des nouvelles mesures discrétionnaires tandis que la variation du solde structurel tient compte de l’évolution ex-post du taux de prélèvements obligatoires. Ainsi, cette mesure inclut dans la mesure des effets d’assiette ou les gains ou pertes fiscales liées à une élasticité des recettes à l’activité différente de l’unité. Dans certaines années, comme en 2017, ces deux mesures peuvent différer sensiblement.
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[26]
Les règles du volet préventif fixent des objectifs en termes d’évolution du solde structurel et non d’effort structurel. Toutefois, comme on a supposé une élasticité unitaire, ces deux mesures ne divergent pas en prévision. Le maintien d’une élasticité des recettes supérieure à l’unité pourrait diminuer l’écart vis-à-vis des règles européennes.
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[27]
Plus exactement les règles de la comptabilité nationale obligent à inclure les créances de CICE dont l’administration prend connaissance au cours de l’année 2019, lors de la déclaration d’impôt sur les sociétés correspondant à l’année 2018. L’essentiel des nouvelles créances déclarées correspondra à celles générées en 2018, mais un reliquat des années 2016 et 2017 peut rester.
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[28]
Au sens des règles de la comptabilité nationale, le CICE est comptabilisé comme une hausse de la dépense publique (sur la totalité de la créance déclarée) et non comme une baisse de la fiscalité sur les entreprises (sur le montant de la créance effectivement encaissée). Ceci brouille l’analyse économique du dispositif. Pour réconcilier l’analyse économique de l’analyse budgétaire il est nécessaire d’ajouter une clé de passage qui tient compte notamment de l’écart entre les créances déclarées (qui impactent le solde public au sens de Maastricht) et les créances dépensées par l’État (qui impactent le solde public au sens de la trésorerie publique). Ainsi, avec la montée en charge du dispositif et le décalage entre la déclaration des créances et leur encaissement, la clé de passage avait tendance à augmenter le solde public en points de PIB. Avec l’arrivée à maturité du dispositif, la clé de passage en diminuant contribue à la réduction du déficit public en points de PIB.
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[29]
Cela correspond principalement aux acquisitions nettes d’actif telles que les prises de participation ou les prêts à des entités hors du secteur des administrations publiques.
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[30]
L’impact serait de 4,3 milliards avec la baisse de cotisations des indépendants et de 3,5 milliards si l’on tient compte de la prime aux fonctionnaires pour compenser la hausse de CSG.
-
[31]
Cet effort est calculé par rapport à la croissance potentielle, évaluée à +1,2 %.
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[32]
Entre 2014 et 2017, l’effort moyen annuel d’économies en dépenses aurait été de 0,3 point de PIB.
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[33]
Le détail des mesures a été explicité dans Madec P., M. Plane et R. Sampognaro (2018), « Budget 2018 : pas d’austérité mais des inégalités », Sciences Po OFCE, Working paper, n° 2018/01/15 et dans OFCE (2017), « France : Croissance en héritage. Perspectives 2017-2019 pour l’économie française », Revue de l’OFCE, n° 152, octobre 2017.
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[34]
L’OMT français s’établirait à -0,4 point de déficit structurel et ne devrait pas être atteint avant 2023 selon le Programme de stabilité 2018-2022.
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[35]
Cf. encadré 1, in OFCE, 2017, « La nouvelle Grande Modération ? Perspectives économiques 2017-2019 pour l’économie mondiale et la zone euro », Revue de l’OFCE, n° 152.
-
[36]
Référence à l’étude spéciale.
-
[37]
Voir Creel, Heyer et Plane (2011), « Petit précis de politique budgétaire par tous les temps : les multiplicateurs budgétaires au cours du cycle », Revue de l’OFCE, n° 176, pages 61-88, janvier 2011.
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[38]
Bruno Ducoudré, 2017, « Évaluation du remplacement du CICE par une baisse des cotisations sociales patronales », OFCE, Policy brief n° 20, 6 juillet.
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[39]
Dans un premier temps on peut considérer cette élasticité de long terme comme étant unitaire. La DG Trésor l’évalue à 1,04.
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[40]
Princen S., G. Mourre, D. Paternoster et G-M Isbasoiu (2013), « Discretionary tax measures: pattern and impact on tax elasticities », European Economy – Economic Papers 2008 – 2015 499, Directorate General Economic and Financial Affairs (DG ECFIN), Commission européenne.
-
[41]
Lafféter Q. et M. Pak (2015), « Élasticités des recettes fiscales au cycle économique : étude de trois impôts sur la période 1979-2013 en France », Document de travail, INSEE, G. 2015/08.
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[42]
Notre évaluation de l’output gap a été utilisée dans ces estimations. Par souci de robustesse, l’output gap de l’OCDE a aussi été utilisée (Perspectives Économiques, n° 102 de novembre 2017). Les résultats donnent les mêmes résultats qualitatifs.
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[43]
Les estimations réalisées avec l’output gap de l’OCDE aboutissent à des conclusions qualitativement identiques mais avec une plus forte sensibilité de l’élasticité des recettes au cycle. Ainsi, dans la spécification (3), l’élasticité des recettes aurait été prévue à 1,4 et l’erreur de prévision des recettes aurait été de l’ordre de 0,1 point de PIB.
1Si l’écart de production (output gap) a continué à se réduire en 2017, il reste néanmoins négatif (-1,9 point de PIB selon notre évaluation). Avec une croissance attendue de 2 % en 2018 et 2,1 % 2019, l’économie française se rapprocherait de sa production potentielle (dont le taux de croissance est de 1,2 %) d’ici à la fin de l’année 2019.
2Le choix du gouvernement de conduire une politique de consolidation budgétaire modérée sur la première moitié du quinquennat ne remettrait pas en cause la reprise en marche, d’autant plus que l’activité bénéficie des mesures économiques passées (CICE, Pacte de responsabilité). En revanche, le profil trimestriel de la croissance du PIB de 2018 sera marqué par le calendrier des mesures fiscales qui va affecter le pouvoir d’achat (négativement en début d’année et positivement en fin d’année) et donc la trajectoire de la consommation des ménages.
3L’investissement resterait robuste en 2018 et en 2019, soutenu par celui des entreprises, et fait nouveau, par celui des administrations publiques qui bénéficieraient du déploiement progressif du Grand Plan d’Investissement. En revanche, l’investissement des ménages ralentirait comme l’indique le retournement des enquêtes. Et, à l’instar de 2017, le commerce extérieur ne serait plus un frein à la croissance en 2018 et en 2019.
4Dans un contexte de croissance, les créations d’emplois, portées par le secteur marchand, resteraient dynamiques (194 000 en 2018 et 254 000 en 2019 après 271 000 en 2017), ce qui permettrait au taux de chômage en France métropolitaine d’être réduit à 8,4 % fin 2018 et de terminer l’année 2019 à 7,9 %. La réduction du déficit public sera lente (2,4 % en 2018 et 2,5 % en 2019 après 2,6 % en 2017), mais cette relative stabilité masque une amélioration plus significative du solde public qui atteindrait 1,6 % en 2019 hors mesure ponctuelle liée à la transformation du CICE en baisses de cotisations sociales.
1 – Synthèse du scénario France
5Après cinq années de croissance atone (0,8 % en moyenne sur la période 2012-16), la reprise s’est enfin matérialisée en 2017 avec une hausse du PIB de 2 %. Certains facteurs négatifs qui ont marqué 2016 (chute de la production agricole, impact des attentats sur le tourisme, …), et qui ont participé à la mauvaise performance du commerce extérieur (contribution de -0,8 point de PIB), se sont estompés, permettant à l’économie française de profiter pleinement du redressement de sa demande intérieure.
6Si l’écart de production (output gap) a continué à se réduire en 2017, il reste néanmoins négatif (-1,9 point de PIB selon notre évaluation). Avec une croissance attendue de 2 % en 2018 et 2,1 % 2019, l’économie française se rapprocherait de sa production potentielle (dont le taux de croissance est de 1,2 %) d’ici à la fin de l’année 2019. Des tensions, signalées par les enquêtes de conjoncture, apparaissent mais ne se traduisent pas par une accélération des salaires au-delà de celle de la productivité, signe que l’économie française ne bute pas sur ses capacités de production. Si l’accélération de l’emploi a pu entraîner des difficultés de recrutement dans certains secteurs ou entreprises, l’absence de tensions inflationnistes révèle bien que le taux de chômage n’a pas atteint son niveau structurel.
7Le choix du gouvernement de conduire une politique de consolidation budgétaire modérée sur la première moitié du quinquennat (0,2 point de PIB d’effort structurel sur 2018-2019) ne remettrait pas en cause la reprise en marche, d’autant plus que l’activité bénéficie des mesures économiques passées (CICE, Pacte de responsabilité). Les décisions de politique économique contemporaines et passées, et dont les effets sont différés, auront un impact positif sur la croissance en 2018 et 2019 (respectivement +0,1 et +0,2 point de PIB).
8En revanche, le profil trimestriel de la croissance du PIB de 2018 sera marqué par le calendrier des mesures fiscales qui va affecter le pouvoir d’achat et donc la trajectoire de la consommation des ménages. Le premier trimestre sera marqué par une contraction du pouvoir d’achat des ménages (-0,2 %) en raison de la hausse de la fiscalité indirecte et de la CSG. En revanche, le pouvoir d’achat des ménages devrait s’accroître au cours des trimestres suivants avec une forte accélération en fin d’année sous l’impulsion de la baisse de la taxe d’habitation et de la seconde tranche de baisse de cotisations sociales. Ainsi, la dynamique de consommation, faible au premier semestre et forte au second, conduira à une accélération de la croissance tout au long de l’année, de 0,3 % au premier trimestre à 0,7 % en fin d’année. En 2019, sous l’effet de l’amélioration du marché du travail et de la montée en charge des mesures fiscales de soutien au pouvoir d’achat des ménages, dont notamment le deuxième tiers de baisse de la taxe d’habitation pour une partie des ménages, ce dernier augmenterait de 2,4 % (après 1,6 % en 2018) dynamisant la consommation sur l’ensemble de l’année (2,2 % en 2019 après 1,5 % en 2018), et ce malgré une nouvelle hausse de la fiscalité indirecte.
9La croissance de l’investissement des entreprises resterait robuste en 2018 et en 2019, soutenue par l’amélioration continue du taux de profit, un coût du capital toujours bas et une demande dynamique qui maintient le taux d’utilisation des capacités de production élevé. Après plusieurs années de contraction, l’investissement des administrations publiques repartirait à la hausse en 2018 et 2019, avec le déploiement progressif du Grand Plan d’Investissement et l’objectif de préserver l’investissement des collectivités locales. L’investissement des ménages ralentirait, comme l’indique le retournement des enquêtes sur les demandes de logement et des perspectives de mises en chantier, en lien probablement avec la réduction des moyens budgétaires alloués au logement et avec l’attentisme sur le marché de la construction à la suite des discussions à attendre autour du projet de loi ELAN.
10Après une année 2016 marquée par les mauvais résultats du commerce extérieur, en raison notamment d’événements exceptionnels, l’année 2017 a vu la reprise des exportations (de 1,1 % en glissement annuel en début d’année à 5,5 % en fin d’année, rythme qui n’avait plus été atteint depuis sept ans). Les parts de marché, soutenues par les niveaux records des marges des exportateurs et la vigueur de l’investissement productif, prolongeront le regain des exportations, comme le laisse penser l’orientation favorable des enquêtes. Au sein d’un environnement économique porteur en zone euro, avec une demande adressée à la France dynamique, le commerce extérieur ne serait plus un frein à la croissance en 2018 et en 2019.
11Avec une croissance robuste en 2018 et en 2019, les créations d’emplois, portées par le secteur marchand, resteraient dynamiques (194 000 en 2018 et 254 000 en 2019 après 271 000 en 2017), ce qui permettrait au taux de chômage en France métropolitaine d’être réduit à 8,4 % fin 2018 et de terminer l’année 2019 à 7,9 % (contre 8,6 % au quatrième trimestre 2017). En revanche, la réduction des effectifs dans le secteur non marchand associée à la forte baisse du nombre des nouveaux contrats aidés en 2018 (de 300 000 à 120 000) pèserait sur la vitesse de réduction du chômage malgré la montée en charge du Plan formation et de la Garantie jeunes.
12La réduction du déficit public sera lente (2,4 % en 2018 et 2,5 % en 2019 après 2,6 % en 2017), mais cette faible amélioration masque une amélioration plus significative du solde public, qui atteindrait 1,6 % en 2019 hors mesure ponctuelle liée à la transformation du CICE en baisses de cotisations sociales. La réduction du déficit serait suffisante pour assurer la sortie du bras correctif du Pacte de stabilité et la dette publique entamera sa décrue (de 97 % du PIB en 2017 à 95,4 % en 2019), facilitée par la reprise économique.
13En dehors des risques de retournement brutal des marchés financiers, notre prévision de court terme reste sujette à des aléas internes. Tout d’abord, une croissance plus dynamique de la consommation par rapport à notre scénario central n’est pas à écarter. En effet, une baisse du taux d’épargne non inscrite dans notre scénario pourrait survenir, tirée par la réduction de l’épargne de précaution liée à la baisse du chômage. Un autre aléa positif pourrait être un enrichissement supplémentaire de la croissance en emplois, les évolutions de la productivité que nous avons inscrites en prévision étant relativement dynamiques vis-à-vis de celles de la productivité tendancielle (pour plus de détails, voir la partie « marché du travail »). Enfin, nous ne pouvons pas écarter une nouvelle bonne surprise du côté des recettes fiscales, comme en 2017, avec une élasticité au PIB supérieure à l’unité, phénomène particulièrement visible en bas de cycle – i.e. output gap négatif – et en période de reprise – i.e. croissance effective supérieure à la croissance potentielle (pour plus de détails, voir la partie sur les finances publiques).
14Du côté des aléas baissiers, malgré le redressement récent du commerce extérieur, nous ne pouvons écarter un risque de nouvelle dégradation des parts de marché de la France, ce qui conduirait de nouveau à une contribution négative du commerce extérieur à la croissance malgré la hausse des marges des entreprises et la mise en place de réformes structurelles. Enfin, dans un climat social tendu, des grèves ou des blocages durables pourraient peser sur la trajectoire de croissance.
Résumé de la prévision pour l’économie française*,**
Résumé de la prévision pour l’économie française*,**
* Pour les trimestres, glissement annuel ; pour les années, moyenne annuelle.** Mesurée comme l’inverse de l’effort budgétaire structurel.
2 – L’économie française a redémarré en 2017…
15Après cinq années de croissance faible, au taux moyen de 0,8 % par an entre 2012 et 2016, l’économie française a renoué avec un rythme d’expansion plus soutenu en 2017 : 2 % en moyenne annuelle et 2,5 % en glissement annuel. Mais ce regain d’activité en 2017, comparable au dernier pic cyclique de 2010-11, est modeste si on le compare aux données historiques enregistrées depuis le début des années 1980 (graphique 1) : la reprise des années 1980 a culminé à 4,5 % de croissance annuelle, celle des années 1990 entre 3,5 et 4 %, et celle des années 2000 à 2,5 %. Finalement, l’année 2017, vue à juste titre comme un excellent cru au regard de la trajectoire chaotique de l’économie française depuis 10 ans, affiche un niveau de croissance qui n’est pas celui d’un pic si l’on s’inscrit sur un horizon de 20 ou 30 ans.
Taux de croissance du PIB de la France
Taux de croissance du PIB de la France
16Modeste pour une reprise, la croissance française a également été moindre que celle de la zone euro depuis 2014 (graphique 2). Mais symétriquement, la France avait enregistré auparavant des évolutions moins défavorables que celles de la zone euro hors-France, entrée en récession au tournant de 2011 et de 2012 pendant six trimestres consécutifs, récession à laquelle l’économie française avait échappé : sur la phase de croissance démarrée en 2014 en zone euro, l’écart des niveaux de PIB entre la France et ses partenaires s’élève à -2,7 points en défaveur de l’Hexagone à la fin 2017, mais il reste supérieur de 1,5 point depuis début 2008, ce qui témoigne d’un comportement cyclique de l’économie française moins marqué que celui des autres économies de la zone euro. Tout au long de l’année 2017, la France a toutefois progressivement rattrapé une partie de son retard de croissance vis-à-vis de ses partenaires et fait presque jeu égal avec la zone euro sur l’ensemble de l’année, affichant une croissance en glissement annuel de 2,5 % contre 2,7 % pour la zone.
Écart de croissance France/zone euro hors France
Écart de croissance France/zone euro hors France
… et les cicatrices de la crise s’effacent peu à peu
17Au quatrième trimestre 2017, le PIB par habitant a dépassé de 2,3 % le niveau qu’il avait atteint lors de son précédent pic au premier trimestre 2008. Ce résultat pourrait être vu comme l’effacement d’une décennie de crise. Pourtant, cet apparent retour à la normale implique une quasi-stagnation de la production par habitant durant 9 années, délai inhabituel pour rétablir le PIB par habitant à son niveau d’avant-crise (graphique 3). Et ce n’est que depuis le quatrième trimestre 2016, à la faveur du redémarrage de l’économie française, que le PIB par habitant a dépassé son précédent sommet.
PIB par habitant en France
PIB par habitant en France
18Les symptômes de la crise, qui ne se réduisent pas à l’analyse de la croissance agrégée seule, ont longtemps perduré mais ils montrent aussi des signes d’amélioration graduelle. L’investissement global qui, en proportion du PIB au quatrième trimestre 2017, se situe -1,4 point en dessous de son niveau de 2008, commence à combler son retard en ayant regagné 1 point depuis son point bas du deuxième trimestre 2015 (graphique 4). L’investissement des entreprises y a largement contribué, ce dernier ayant rattrapé son retard, stimulé à partir de la seconde moitié de 2015 par l’effet d’accélérateur, le suramortissement fiscal pour les investissements industriels, le bas niveau des taux d’intérêt et la nette amélioration des marges. Mais les chocs négatifs sur l’investissement des ménages et des administrations publiques n’ont pas été corrigés : le premier se situe encore -1,3 point de PIB sous son niveau de 2008 malgré son redressement, modeste, depuis le début de 2016, le second -1 point en dessous alors qu’aucun freinage de la baisse n’est encore visible.
Taux d’investissement par agent
Taux d’investissement par agent
19Le marché du travail reste dégradé mais montre des signes d’amélioration. Le taux de chômage au sens du BIT se situe encore 1,7 point au-dessus de son point bas d’avant-crise (8,9 % au deuxième trimestre 2017, contre 7,2 % au premier trimestre 2008 pour la France entière), mais son repli (-1,1 point) s’est accéléré en 2017 par rapport à 2016 (-0,2 point. Et après avoir atteint un point historiquement bas fin 2016, le taux d’emploi en CDI s’est redressé en 2017.
20Les situations d’activité à temps partiel contraint ou de chômage partiel, que l’on peut assimiler à une forme de sous-emploi, reculent également (de -0,4 point en 2017 après -0,3 en 2016). En effet, l’accroissement des besoins en main-d’œuvre durant les phases de reprise est satisfait à la fois par les recrutements, mais aussi par l’allongement de la durée du travail des personnels en place. En revanche, la situation des actifs à la marge de l’emploi et composant le « halo du chômage », c’est-à-dire les personnes qui selon la définition stricte du chômage ne sont pas disponibles sous deux semaines pour reprendre un emploi ou qui, découragées, n’en recherchent pas activement, ne s’améliore guère avec une simple stabilisation des effectifs dans cette catégorie en 2017 (pour plus de détails, voire partie « marché du travail »). Au total, en intégrant l’ensemble de ces personnes fragilisées vis-à-vis de l’emploi, le taux de chômage au sens élargi s’élève à 17,1 % fin 2017, soit près de 2,4 points de plus qu’avant-crise, mais le recul de cette part en 2017 montre une amélioration avec le retour de la croissance (graphique 5).
Chômage, halo et sous-emploi*
Chômage, halo et sous-emploi*
* : population active + halo du chômage21Enfin, la situation des finances publiques, qui s’était profondément dégradée durant la crise avec des déficits de 7,2 % du PIB en 2009, s’est aussi améliorée : à grands renforts de consolidation budgétaire entre 2011 et 2015, puis grâce au retour de la croissance en 2017, pour finalement ramener en 7 ans le déficit public à 2,6 % du PIB, sous le seuil de 3 % imposé par la partie corrective du Pacte de stabilité européen. Mais en atteignant 97 % du PIB la dette publique est plus élevée, en 2017, de 32,5 points par rapport à son niveau de 2007 (64,5 % du PIB), contraignant pour longtemps encore les marges de manœuvre de la politique budgétaire.
Offre ou demande, quelles limites à la croissance ?
22Deux thèses s’opposent pour rendre compte de la situation dégradée de l’économie française depuis près d’une décennie. Elles conditionnent la définition du sentier de croissance à l’horizon de la prévision – et même au-delà – après une année de reprise. Selon la première thèse, l’interruption de la trajectoire de croissance depuis 2008 proviendrait d’une insuffisance chronique de la demande, à la suite de l’excès d’endettement des agents privés ayant conduit à la crise des subprime, et publics pendant la crise de 2008/2009, qui empêcherait l’activité de rejoindre son potentiel : le gonflement des passifs privés contraint les agents à freiner leurs dépenses pour assainir leur situation patrimoniale. À ce processus, qui peut s’inscrire dans la durée, est venu s’ajouter l’effet des politiques budgétaires restrictives mises en place à partir de 2011 dans la zone euro pour ramener les déficits publics dans des normes qui ne menaçaient plus la solvabilité des États ou pour être conforme aux règles européennes contraignant la politique budgétaire. Le regain de croissance dans la zone euro à partir de 2014 a d’ailleurs coïncidé avec un relâchement progressif de l’austérité budgétaire.
23La seconde thèse conduit à penser que la cassure du sentier de croissance depuis 2008 pourrait aussi s’expliquer par l’affaiblissement du PIB potentiel, contrainte sur laquelle le PIB effectif viendrait dès lors buter plus rapidement que par le passé. Cet affaissement résulterait de l’ampleur et de la durée de la crise elle-même qui auraient affecté le niveau et/ou la croissance potentielle de l’économie sous l’effet des destructions de capacité de production (faillites d’entreprises et dépréciation accélérée du capital), du ralentissement de la diffusion du progrès technique pesant sur la productivité (faiblesse de l’investissement) et de la déqualification des chômeurs de longue durée (pour plus de détails, voir « un sentier de croissance de faible ampleur », partie internationale, ce numéro).
24Probablement, la cassure de la trajectoire du PIB français entre 2008 et 2016 est-elle le résultat d’une combinaison de ces deux aspects. Le rôle de l’insuffisance de la demande est illustré par l’écart de production, ou output gap, mesurant l’écart entre le PIB effectif et le PIB potentiel, ce dernier représentant la production au plein emploi des facteurs de production sans tensions inflationnistes. Cet écart témoigne de l’ampleur de la sous-utilisation des ressources productives par rapport à une situation où les capacités de production seraient pleinement utilisées sans donner lieu à une accélération non soutenable des salaires. L’estimation du niveau et de la croissance du PIB potentiel, qui ne sont pas des grandeurs économiques observables, ne fait pas consensus parmi les économistes, certains penchant pour un ralentissement prononcé du potentiel, d’autres pour une rupture à la baisse de son niveau, d’autres encore, dans le cas le plus défavorable, pour une combinaison des deux. Malgré ces divergences, toutes les grandes institutions (FMI, OCDE, Commission européenne, Direction du Trésor, OFCE), sont unanimes pour considérer que l’output gap, est encore négatif fin 2017, ce qui étaye l’idée que l’insuffisance de la demande est bien un des éléments d’explication de la faible croissance observée depuis près de 10 ans (graphique 6). Nos estimations de l’écart de production pour 2017 sont voisines de celles du FMI, celles de la Commission européennes les plus resserrées, avec un output gap de 0,7 point de PIB potentiel après l’OCDE et la DG Trésor. Par contre, les estimations du taux de croissance potentiel divergent moins entre les instituts, comprises entre 1,1 et 1,3 % (1,2 % pour l’OFCE).
Écart de production et croissance potentielle en 2017
Écart de production et croissance potentielle en 2017
25De ces évaluations découle une partie de la quantification du scénario de croissance pour 2018 et 2019. Si l’écart de production était comblé en deux ans, une moitié en 2018, l’autre moitié en 2019, la croissance annuelle serait, en dehors de tout choc, égale à la moitié du rattrapage augmenté de la croissance potentielle, soit un intervalle de prévision compris entre 2,2 % pour l’OFCE et 1,6 % pour la Commission européenne.
26Cependant la trajectoire cyclique de l’économie ne fait pas du PIB potentiel une barrière infranchissable puisqu’il peut être franchi périodiquement dans le cycle à la baisse (situation depuis 2009) comme à la hausse (situation de 2007-2008 avant crise). D’ailleurs, si l’on prend comme référence, pour évaluer les marges de croissance, non plus le PIB potentiel évalué par les différents instituts, mais l’écart de production estimé en 2007 avant le déclenchement de la crise, les marges de croissance apparaissent alors beaucoup plus élevées.
27De fait, les évaluations de l’écart de production selon les différents instituts étaient largement positives en 2007, l’écart estimé étant le plus important pour la Commission européenne à près de 3 % du PIB potentiel, le plus faible à 1,1 % pour l’OFCE (graphique 7). En comparant l’écart de production d’aujourd’hui à celui de 2007, les marges de manœuvre apparaissent alors bien plus élevées et plus homogènes, toutes approchant ou dépassant 3 %.
Écart de production depuis 2007
Écart de production depuis 2007
28La réalisation de ces perspectives, beaucoup plus favorables, suppose d’identifier les conditions dans lesquelles elles pourraient apparaître. La formation d’un écart de production positif impliquerait que des chocs positifs poussent au dépassement de la frontière du PIB potentiel, qui devrait se traduire par des tensions inflationnistes non soutenables. La composante spontanée de la croissance ne peut amener, à elle seule, le PIB au-dessus du PIB potentiel, son rôle étant celui d’une force de rappel conduisant à la fermeture de l’écart de production.
29Notre scénario de croissance pour 2018 et 2019 est donc celui d’une annulation progressive de l’écart de production négatif en deux ans poussée en partie par la croissance spontanée de l’économie en bas de cycle à hauteur d’un demi-point de PIB par année. Une fois le PIB effectif revenu à son niveau potentiel fin 2019, ou du moins très proche (-0,2 point de PIB) conformément à notre scénario, l’économie ne pourra croître plus vite que son potentiel sans chocs positifs. Or, pour l’instant, de tels chocs ne sont pas identifiés à cet horizon. La croissance devrait donc ralentir pour s’établir à son rythme potentiel, qui se redresserait progressivement, de 1,2 % en 2018/2019 à 1,3/1,4 % en 2020/2022, sous l’effet des politiques de formation et de la hausse marquée de l’investissement productif.
Des tensions insoutenables ?
30La réanimation de l’activité depuis la fin 2016 a fait réapparaître des tensions dans l’économie française qui transparaissent à l’analyse des données d’enquêtes dans les branches de production.
31L’indicateur phare des tensions, le taux d’utilisation des capacités de production dans l’industrie, s’est vivement redressé depuis la première moitié de 2015. Cependant, le diagnostic posé par l’examen de cet indicateur sur la situation des tensions diffère selon la source (graphique 8). D’après la mesure de l’INSEE, le taux d’utilisation se situe nettement au-dessus de sa moyenne de longue période et a presque rejoint ses plus hauts historiques, témoignant d’une situation où les marges de manœuvre pour accroître la production industrielle avec les ressources en facteurs disponibles au sein des entreprises sont très faibles. D’un autre côté, le taux d’utilisation mesuré par la Banque de France a juste rejoint sa moyenne de longue période et se situe encore nettement en dessous de ses pics conjoncturels précédents, laissant penser que le niveau de tensions est nettement moindre que celui mesuré par l’INSEE. Face à l’incertitude de la mesure, on se gardera donc de conclure hâtivement à l’insuffisance de capacité de production dans l’industrie.
Taux d’utilisation des capacités de production dans l’industrie
Taux d’utilisation des capacités de production dans l’industrie
32D’autant que face à l’amenuisement des marges de production inutilisées dans l’industrie, les entreprises disposent de modes d’ajustement des services du capital pour répondre à la croissance de la production :
- à la marge extensive en premier lieu, par le recours à l’investissement d’extension des capacités de production qui accroît le stock de capital disponible pour répondre à la demande. Nos prévisions de croissance de l’investissement, voisines en 2018 de celle de 2017, avec des hausses supérieures à 4 %, vont dans ce sens ;
- à la marge intensive en second lieu, par l’accentuation du degré d’utilisation du capital, en particulier par l’augmentation de la durée d’utilisation des équipements (DUE) qui permet, à stock d’équipements donné, d’accroître la production [1].
33Selon l’enquête réalisée par la Banque de France en septembre de chaque année sur ce thème, la DUE s’est accrue de 3,7 % en 2017 et les industriels interrogés prévoient une nouvelle hausse en 2018, 2,7 % (graphique 9). De fait, au-delà de son évolution tendancielle, la DUE suit une trajectoire cyclique qui s’inscrit dans celle de l’activité avec un recul lors de la récession de 1993, une élévation continue pendant 4 années entre 1997 et 2000 lors de la grande phase de croissance des années 2000, puis un repli pendant la crise de la première moitié des années 2000 suivi d’une remontée lors de la période de croissance antérieure à la grande récession. La récession de 2008/2009 a fait plonger la DUE de près de 7 % et la reprise de 2010/2011 l’a ramenée sur sa tendance de long terme. Enfin, conformément à sa trajectoire cyclique, la durée d’utilisation a brusquement accéléré en 2017 par rapport à sa hausse ralentie durant la période de croissance atone entre 2012 et 2016. Et la hausse prévue par les entreprises pour 2018 montre que ce mode d’ajustement de la capacité de production n’est pas encore épuisé face à la saturation progressive du capital en place.
Durée d’utilisation des équipements dans l’industrie
Durée d’utilisation des équipements dans l’industrie
34Les modalités d’obtention de la hausse de la DUE durant la reprise s’appuient sur deux leviers, la hausse de la durée du travail et le changement des modes d’organisation de la production. Les réorganisations de la production consistent à intensifier le recours au travail posté en ajoutant des équipes successives supplémentaires sur les équipements existant. Selon l’enquête de la Banque de France, la hausse de la durée d’utilisation des équipements a été obtenue en 2017 en recourant à ces deux leviers.
35Ainsi, durant les phases de reprise de l’activité, la hausse des tensions va de pair avec celle de l’investissement et du degré d’utilisation du capital, ces derniers étant une réponse à l’accentuation des premières.
36Les autres indicateurs de tension dans l’industrie, mesurés par l’INSEE, confirment les signaux envoyés par le taux d’utilisation. Les goulots de production, c’est-à-dire le pourcentage d’entreprises déclarant ne pouvant produire davantage, ont rejoint leurs pics historiques à la fin 2017. En outre, le pourcentage d’entreprises dans l’industrie déclarant des difficultés d’offre a dépassé celui des entreprises déclarant des difficultés de demande, ce qui n’est arrivé qu’à trois reprises depuis 1991, au moment des pics cycliques de 2000 et de 2007 (graphique 10). On ne saurait toutefois voir dans ce type de configuration la cause des retournements conjoncturels : que davantage d’entreprises industrielles ressentent des difficultés d’offre avec la croissance et la montée des tensions qu’elle induit montre la cohérence de l’information statistique, mais les retournements à la baisse de l’économie française observés alors sont dus à l’éclatement de la bulle internet en 2000 et à la crise financière de 2007/2008, pas à l’existence de tensions en elles-mêmes auxquelles les entreprises peuvent faire face à court terme.
Entreprises déclarant des difficultés d’offre et celles déclarant des difficultés de demande dans l’industrie
Entreprises déclarant des difficultés d’offre et celles déclarant des difficultés de demande dans l’industrie
37Pour des raisons conceptuelles, l’information statistique sur l’utilisation de l’appareil productif est plus développée pour l’industrie, la notion de capacité de production étant plus facilement appréhendée pour ce secteur que pour celui des services où elle est plus diffuse. Or, l’industrie ne représente plus qu’une part minoritaire de la valeur ajoutée marchande (18 %), celle des services marchands étant prépondérante (près des ¾ du total). Appréhender les tensions par le prisme de leur mesure dans l’industrie peut ainsi conduire à transposer à l’ensemble de l’économie des difficultés qui ne seraient que sectorielles.
38De fait, la mesure large de la productivité du capital de l’ensemble des entreprises du secteur marchand fournit l’image de tensions plus atténuées dans l’ensemble de l’économie que pour le seul secteur industriel. Exprimée en écart à sa tendance, la productivité du capital fixe des entreprises non financières, mesurée à partir des comptes nationaux comme la valeur ajoutée marchande rapportée aux actifs fixes des entreprises, demeure à des niveaux bien inférieurs à ceux de ses pics cycliques antérieurs, ce qui montre que l’économie française ne souffre pas à l’heure actuelle d’une insuffisance de capacités de production au regard de la valeur ajoutée (graphique 11). Si le ratio valeur ajoutée / capital (par rapport à sa moyenne de long terme) se redresse depuis début 2014, après une lourde chute durant la crise de 2008-2009, il n’est pas encore revenu à sa tendance de long terme. Selon notre évaluation il serait encore 2,2 % en-dessous de son niveau de long terme, montrant l’absence de tensions sur l’appareil productif et l’existence de capacités de production sous-employées dans les entreprises non financières (ENF). Une dépréciation accélérée du capital depuis 2008, avec les nombreuses faillites d’entreprises durant la crise, pourrait modifier ce diagnostic. Elle n’est cependant pas inscrite dans les comptes de patrimoine publiés par l’Insee.
Productivité du capital des entreprises non financières*
Productivité du capital des entreprises non financières*
* Rapport entre la valeur ajoutée marchande en valeur et le stock de capital des entreprises du secteur marchand en valeur.39Avec notre prévision de croissance de l’investissement des ENF pour 2018 et 2019 (4,3 % en 2018 et 3,5 % en 2019), la productivité du capital reviendrait au voisinage de son niveau d’équilibre à la fin 2019, ce qui annulerait les marges de capital productif sous-utilisées. Des marges d’intensification de l’utilisation du capital disponible dans l’économie semblent donc mobilisables pour permettre une poursuite de la reprise en cours.
Des recrutements plus difficiles
40Un autre indicateur témoigne de l’apparition de tensions depuis plusieurs trimestres. Les difficultés de recrutement progressent et ont retrouvé leur niveau d’avant-crise dans l’industrie, ce qui produit à nouveau « un effet loupe » sur des problèmes sectoriels (graphique 12). Elles restent en-deçà de leur niveau de 2008 dans les services et la construction et encore très en-dessous de ceux de 2001, comme l’industrie d’ailleurs. Les difficultés de recrutement ne semblent donc pas avoir atteint un niveau tel qu’elles constitueraient un frein majeur à la poursuite des créations d’emploi.
Pourcentage d’entreprises déclarant des difficultés de recrutement
Pourcentage d’entreprises déclarant des difficultés de recrutement
SMNA : Secteur marchand non agricole. L’indice moyen des difficultés de recrutement dans le secteur marchand non agricole est calculé en pondérant les pourcentages sectoriels d’entreprises signalant des difficultés de recrutement par leur poids dans l’emploi salarié marchand non agricole.41Avec un niveau de chômage encore élevé, ces difficultés de recrutement déclarées semblent provenir de la vitesse de progression de l’emploi, qui dans l’industrie notamment a surpris les entreprises au moment où les carnets de commande se regarnissent après des années de contraction des effectifs. Les causes de ces difficultés de recrutement sont donc plus à chercher du côté de l’accélération des besoins d’emplois que des contraintes imposées par un manque de main-d’œuvre disponible ou qualifiée malgré un taux de chômage encore élevé. D’ailleurs, selon l’enquête Besoin en main-d’œuvre (BMO) de Pôle Emploi réalisée à l’été 2017 sur les emplois vacants et les difficultés de recrutement, les abandons de recrutement faute de candidat sont d’abord motivés par le manque d’attractivité du poste. Le manque de diplôme ou de formation des candidats est cité en dernier (graphique 13). Un des moyens pour diminuer les échecs de recrutement serait donc de rendre les postes plus attractifs, soit en offrant de meilleurs contrats, soit en proposant une rémunération plus élevée. Logiquement, dans un contexte de raréfaction progressive de la main-d’œuvre, les entreprises devraient augmenter les salaires et privilégier les recrutements en contrats durables au détriment des contrats temporaires pour attirer des candidats vers les postes proposés.
Raisons des difficultés dans les cas d’abandons de recrutement faute de candidats
Raisons des difficultés dans les cas d’abandons de recrutement faute de candidats
Champ : offres sur les contrats de plus d’un mois.42Quoi qu’il en soit, si ces difficultés de recrutement étaient le symptôme d’un franchissement à la baisse du taux de chômage structurel, les salaires réagiraient à la hausse. Or les évolutions récentes des salaires ne témoignent pas de l’apparition de tensions inquiétantes sur le marché du travail pour le moment. En effet, le salaire moyen par tête (SMPT), qui correspond aux masses salariales brutes versées par l’ensemble des entreprises divisées par le nombre de salariés, a crû, en glissement annuel, de 2,1 % (1 % en réel) à la fin 2017, et a très peu accéléré au cours de l’année 2017 (1,8 % en début 2017). De plus, il reste à des rythmes encore éloignés de ceux de la période 2004-2007 (3,2 % en moyenne en nominal et 1,5 % en réel). Le salaire mensuel de base, qui contrairement au SMPT ne comprend ni les primes ni les heures supplémentaires, affiche quant à lui une croissance très faible, de 1,3 % en glissement annuel fin 2017, proche de son plus bas historique de 2016 (1,2 %). Plus étonnant encore, dans l’industrie, secteur qui affiche le plus de difficultés de recrutement au travers des enquêtes (graphique 12), aucun signe de tensions salariales n’apparaît. D’une part, le taux de croissance du salaire moyen par tête dans l’industrie était de 1,7 % en glissement annuel à la fin 2017, soit un rythme deux fois inférieur à celui d’avant-crise, début 2008 (graphique 14).
Salaires et difficultés de recrutement dans l’industrie
Salaires et difficultés de recrutement dans l’industrie
43D’autre part, dans l’industrie, le nombre d’heures travaillées effectives par emploi salarié était, fin 2017, équivalent à celui de la mi-2012, en pleine crise de la zone euro. Et ce nombre d’heures travaillées est actuellement encore près de 1 % en-dessous de son niveau observé fin 2007, montrant qu’une augmentation des heures supplémentaires sans nouvelles embauches est possible pour accroître la production. Plus étonnant encore, le taux de marge dans l’industrie atteint des niveaux records sans que les tensions exprimées dans les enquêtes modifient la répartition de la valeur ajoutée dans ce secteur au profit des salaires (graphique 15). À 41 %, fin 2017, le taux de marge dans l’industrie est supérieur à son niveau d’avant-crise début 2008 mais aussi à son pic de début 2001.
Taux de marge par branche
Taux de marge par branche
La reprise manquée de 2015 et 2016
44L’accélération de l’activité en France s’est manifestée de manière durable à partir du quatrième trimestre 2016. Pourtant dès 2015, les conditions semblaient réunies pour une véritable reprise. En effet, la baisse du prix du pétrole et la dépréciation de l’euro, en soutenant l’activité à hauteur de 1,4 point de PIB sur la période 2015-2016, auraient pu se traduire par une accélération nette de la croissance (tableau 3). Par ailleurs, la politique budgétaire qui a continué à peser négativement sur la croissance française en 2015 (-1 point de PIB après -0,8 point en moyenne sur la période 2011-2014) n’a plus eu d’effet négatif en 2016. Malgré ce contexte plus favorable, la croissance n’a pas connu d’accélération notable en 2015 et en 2016, avec respectivement 1 % et 1,1 % (après 1 % en 2014). Pourtant des éléments tangibles de reprise sont apparus dès 2015. Les facteurs de production tout d’abord ont connu une croissance dynamique. Le marché du travail a renoué en 2015 avec des créations nettes d’emplois dans le secteur marchand, après trois années consécutives de destructions. Au total, de la deuxième moitié de 2015 à la fin 2017, l’économie marchande a créé près de 580 000 emplois. Parallèlement, l’investissement des entreprises s’est raffermi alors qu’il avait stagné depuis 2012, le taux d’investissement s’est redressé de près de 1 point de PIB depuis la fin 2014 (graphique 16).
Emploi et investissement des entreprises
Emploi et investissement des entreprises
45Cette accélération de la croissance des facteurs de production depuis 2015 fait écho au dynamisme de la demande intérieure (hors stocks). En effet, celle-ci a crû de 1,4 % en 2015 et de 2 % en 2016, atteignant même un pic à 2,3 % en glissement annuel au deuxième trimestre 2016. La croissance du PIB quant à elle plafonnait à 1,2 % au premier et au deuxième trimestre 2016 (graphique 17).
PIB et demande intérieure hors stocks (en volume)
PIB et demande intérieure hors stocks (en volume)
46Ainsi, la reprise a bien eu lieu dès 2015 mais s’est limitée à la seule demande intérieure. Cette contre-performance de la croissance du PIB au cours des dernières années s’explique principalement par les mauvais résultats du commerce extérieur. En effet, celui-ci a pesé à hauteur de -1,3 point de PIB sur la période 2015-2016 (-1,8 point en incluant 2014).
47Or, depuis 2014, la France a enregistré une croissance moins dynamique que ses partenaires de la zone euro, la France accumulant un retard de croissance de -2,7 points de PIB au cours des quatre dernières années. Si le moindre dynamisme de la consommation privée en France (relativement à celui de la zone euro) explique un peu moins de un quart de l’écart de croissance sur cette période, l’écart sur les contributions de la consommation publique et de la formation brute de capital (investissement total y compris variations de stocks) est marginal et de signe inverse (graphique 18). La presque totalité de la différence de croissance entre la France et la zone euro depuis le début de 2014 s’explique donc par la mauvaise performance du commerce extérieur français relativement à celui de la zone euro. Et au sein du commerce extérieur, ce ne sont pas les importations mais les exportations qui expliquent ces mauvais résultats. En effet, avec une croissance de la demande intérieure relativement similaire en France et en zone euro sur la période considérée, la contribution négative des importations à la croissance du PIB a été nettement plus faible en France que dans la zone euro (écart de +3,1 points de PIB). En revanche, la faiblesse des exportations françaises (+15 % de fin 2014 à la fin 2017) par rapport à celles de la zone euro (+22 % sur la même période) est la source du décrochage de la France vis-à-vis des partenaires européens. Sur la période analysée, elles ont contribué à la croissance à hauteur de seulement 4,2 points de PIB contre 9,8 points dans la zone euro.
Contribution au PIB par composante en France et dans la zone euro
Contribution au PIB par composante en France et dans la zone euro
48Cette faiblesse des exportations françaises est d’autant plus surprenante qu’elle correspond à la période de baisse des prix du pétrole et de dépréciation de l’euro, dont les effets sont communs aux pays de la zone euro. Notre équation économétrique modélisant les exportations montre que ces dernières ont fortement décroché à partir de 2016 par rapport à leurs déterminants habituels et n’ont rattrapé leur niveau attendu qu’à la fin 2017 (graphique 19, encadré 1).
Les exportations françaises en biens et services
Les exportations françaises en biens et services
Encadré 1. Modélisation des exportations en biens et services marchands
L’équation s’écrit de la manière suivante :
X : | Exportations en biens et services, en volume |
DMond : | Demande mondiale adressée à la France, en volume |
Px : | Prix des exportations en biens et services |
PEx : | Prix des exportations des concurrents en dollars |
Estimation des paramètres de long terme de l’équation d’exportations en volume (1980-2016)
Estimation des paramètres de long terme de l’équation d’exportations en volume (1980-2016)
Note : Entre parenthèses les T de Student des coefficients estimés, corrigés de l’autocorrélation et de l’hétéroscedasticité des résidus par la méthode de Newey-West. Entre crochets, la p-value des tests sur les résidus du MCE.* (**, ***) : significatif au seuil de 10% (resp. 5 %, 1 %). Les seuils de test pour la significativité de la force de rappel des modèles à correction d’erreur sont issus de Ericsson et MacKinnon (2002).
La simulation dynamique de l’équation est présentée graphique 19. Celle-ci indique un décrochage des exportations à partir du deuxième trimestre 2016, jusqu’au premier trimestre 2017, sous le coup entre autres d’exportations de produits agricoles atones à la suite des mauvaises récoltes de l’année 2016 et de la répercussion des attentats sur le tourisme étranger en France. Ces facteurs temporaires se sont estompés ensuite progressivement en 2017 et les exportations effectives rattrapent la simulation dynamique en fin d’année.
49Cette part d’inexpliqué peut trouver son origine dans les facteurs exceptionnels qui ont marqué l’année 2016, avec d’un côté la très mauvaise récolte agricole qui a fait plonger la valeur ajoutée de l’agriculture de près de 10 % amputant du même coup les exportations agricoles et de produits alimentaires et de l’autre les attaques terroristes qui ont fait chuter la fréquentation touristique. La balance des voyages affichait un recul de 3,2 milliards d’euros en 2016, équivalant à 0,5 point d’exportations.
50La faiblesse des exportations est aussi surprenante car elle correspond à la période de montée en charge des politiques d’offre mises en place sous le quinquennat de François Hollande. Avec pour objectif d’améliorer la compétitivité des entreprises, les décisions de politique économique ont entraîné une réduction de la fiscalité des entreprises d’environ 40 milliards d’euros sur la période 2014-2017 (CICE, Pacte de responsabilité, suramortissement fiscal pour l’investissement industriel, prime à l’embauche, …). Si la politique d’offre ne semble pas avoir dynamisé les exportations françaises depuis 2014, elle a en revanche contribué à l’amélioration des marges des entreprises, en particulier dans le secteur exportateur. En effet, le taux de marge moyen du secteur exportateur s’est redressé de façon spectaculaire depuis 2014 (près de 6 points de VA entre le troisième trimestre 2013 et le premier trimestre 2016, graphique 20). Après plusieurs années de compression des marges, il semblerait que les exportateurs français aient fait le choix, à partir de 2014, de redresser leurs marges plutôt que de réduire les prix à l’exportation, limitant alors les exportations. Si le rétablissement des marges ne semble pas encore avoir porté ses fruits, l’amélioration de la situation financière des exportateurs hexagonaux s’avère un atout pour l’avenir, qu’ils fassent le choix de réinvestir leurs marges dans la compétitivité hors-coût visant une montée en gamme des produits fabriqués en France, ou de les redéployer dans une baisse des prix afin de leur assurer des gains immédiats de compétitivité-prix et de parts de marché à l’exportation.
Taux de marge du secteur exportateur
Taux de marge du secteur exportateur
Les fondements de la croissance intacts ?
51En ce début d’année 2018, les conditions semblent réunies pour une poursuite du mouvement de reprise en France. Tout d’abord, les conditions extérieures devraient rester favorables : les taux d’intérêt demeurent bas et leur remontée attendue d’ici à 2019 restera contenue, l’austérité généralisée a pris fin en zone euro et le prix du pétrole exprimé en euros devrait se stabiliser. La demande adressée aux exportateurs français devrait donc être dynamique. La réappréciation de l’euro, de 1,22 dollar pour 1 euro au premier trimestre 2018 vers 1,30 à la fin 2019 selon notre prévision (soit une hausse de 6,6 %), pourrait toutefois entamer les bénéfices attendus du redressement de la demande adressée, mais d’un autre côté, elle contrebalancera la remontée du prix du brent en dollars. Selon nos estimations, l’effet négatif de la dégradation de la compétitivité-prix sur la croissance resterait modéré en 2018, -0,1 point, mais sera un peu plus sensible en 2019, -0,2 point. D’un autre côté, la remontée du prix du brent en 2017 pèsera encore en 2018, quoique modérément, avec un effet sur la croissance limité à -0,2 point (tableau 3).
Les freins et leviers de la croissance en France depuis 2015
En points de % de PIB | |||||
---|---|---|---|---|---|
2015 | 2016 | 2017 | 2018 | 2019 | |
PIB | 1,0 | 1,1 | 2,0 | 2,0 | 2,1 |
Impact sur le PIB dû… | |||||
… aux évolutions du pétrole | 0,5 | 0,3 | -0,1 | -0,2 | 0,0 |
… à la compétitivité-prix | 0,4 | 0,2 | 0,1 | -0,1 | -0,2 |
Effet intra zone euro | 0,2 | 0,0 | 0,0 | 0,0 | 0,0 |
Effet hors zone euro | 0,3 | 0,2 | 0,1 | -0,1 | -0,2 |
… aux conditions financières | 0,1 | 0,0 | 0,0 | 0,0 | 0,1 |
… aux politiques budgétaires | -1,0 | 0,1 | 0,0 | 0,1 | 0,2 |
Effet direct sur l’économie nationale | -1,3 | -0,5 | -0,5 | -0,2 | 0,1 |
Effet mesures offre passées | 0,3 | 0,6 | 0,5 | 0,3 | 0,1 |
… au cycle mondial | 0,2 | 0,1 | 0,3 | 0,2 | 0,2 |
Acquis (profit trimestriel) | -0,2 | 0,0 | 0,0 | 0,2 | 0,2 |
Chocs internes | -0,3 | -0,4 | 0,3 | 0,0 | 0,0 |
Total des chocs | -0,3 | 0,3 | 0,6 | 0,3 | 0,4 |
part non expliquée | -0,3 | -0,7 | -0,3 | 0,0 | 0,0 |
Rythme de croissance spontanée hors chocs | 1,6 | 1,6 | 1,7 | 1,7 | 1,7 |
Croissance potentielle | 1,3 | 1,3 | 1,2 | 1,2 | 1,2 |
Output gap | -2,5 | -2,7 | -1,9 | -1,1 | -0,2 |
Les freins et leviers de la croissance en France depuis 2015
52Les conditions internes sont aussi propices à la poursuite du sentier d’expansion engagé en 2017. Grâce au contre-choc pétrolier survenu dans la seconde moitié de 2014 et aux mesures en faveur des entreprises instituées au cours de la présidence Hollande, la situation financière des entreprises s’est sensiblement améliorée. Ce redressement laisse à penser que cette manne n’a pas été utilisée dans un premier temps pour regagner de la compétitivité sur les marchés extérieurs par des baisses de prix à l’exportation. Néanmoins, ce processus pourrait être arrivé à son terme dans la mesure où si les politiques d’offre développent leurs effets avec des délais longs, elles n’en finissent pas moins par aboutir à leur objectif initial, renforcer la position concurrentielle des producteurs nationaux. Les prémices de ce résultat peuvent être décelées dans l’amélioration récente du commerce extérieur, visible à travers l’accélération des exportations de 2,2 % en 2016 à 5,1 % en 2017 en glissement annuel. Les échanges extérieurs n’ont ainsi plus pesé sur la croissance en 2017, le solde extérieur ayant contribué à hauteur de +0,3 point au glissement annuel du PIB (contre -0,3 point en 2016).
53La politique budgétaire devrait contribuer positivement à la croissance au cours de la période 2018-2019, respectivement +0,1 et +0,2 point de croissance en 2018 et 2019. Cette contribution positive est la résultante d’effets contraires en 2018. D’un côté, les mesures décidées par le gouvernement Philippe en faveur de l’offre, visant en priorité à réduire la fiscalité du capital, auront peu d’effets positifs à court terme tandis que les mesures de financement (baisse des dépenses publiques, hausse de la fiscalité écologique et des taxes sur le tabac) auront des effets récessifs à brève échéance. L’effet consolidé de ces deux volets sera négatif, respectivement -0,2 point de croissance en 2018 (pour plus de détails, voir partie sur les finances publiques). En revanche, les mesures économiques passées continueront à développer leurs effets positifs, +0,3 point en 2018, surcompensant l’effet négatif initial des mesures Macron. En revanche, en 2019, l’impact positif des mesures passées va s’atténuer alors que la politique fiscale mise en place par le gouvernement actuel va développer ses effets positifs sur la croissance.
Hoquets trimestriels
54Les indicateurs conjoncturels ont donné le ton de la prévision en 2017. Les enquêtes de conjoncture, qui fournissent une information qualitative sur la perception qu’ont les chefs d’entreprise et les ménages de leur propre situation et des décisions qu’elle sous-tend, se sont améliorées à la fin de 2016, préfigurant le redressement du sentier de croissance de l’économie en 2017 (graphique 21). En revanche, même si les climats des affaires restent au voisinage de leurs pics précédents (2007 et 2011), en ce début d’année 2018 plus aucune branche n’affiche de progression depuis décembre de l’année dernière. La confiance des ménages, quant à elle, est en net recul depuis son sommet de juin 2017.
Climats des affaires
Climats des affaires
55Il convient d’être prudent quant à l’interprétation de ces signaux. D’abord, les séries d’enquêtes ne sont pas exemptes de volatilité à l’échelon mensuel et cette volatilité se manifeste aussi sur les hauts de cycle, comme on l’a vu en 2007 ou avant, avec des mouvements ponctuels contraires à l’orientation générale des données. Ensuite, la confiance reste largement supérieure à sa moyenne de longue période dans toutes les branches, laissant entendre que l’activité reste supérieure à sa croissance de moyen terme. Par conséquent, même si la croissance devait ralentir au début de l’année 2018, ce passage à vide ne serait pas le signal d’une inversion du cycle en l’état actuel de l’information sur les enquêtes. C’est ce que confirme l’indicateur avancé qui table sur un tassement de l’activité au premier semestre 2018, avec des hausses trimestrielles du PIB de +0,5 et +0,4 % respectivement au premier et au deuxième trimestre, après +0,6 % au quatrième trimestre 2017 (encadré 2). Les taux de croissance anticipés restant supérieurs au taux de croissance potentiel à court terme, ces prévisions ne peuvent être interprétées comme le signal d’un retournement du cycle en cours.
Encadré 2. L’indicateur avancé
L’indicateur, qui présente un profil nettement plus lissé que le taux de croissance du PIB ne parvient pas à décrire pleinement la volatilité de l’activité et de ce fait ne doit pas être considéré comme un prédicteur au sens strict de la croissance (graphique 22). En revanche, d’un point de vue plus qualitatif, il parvient à délimiter assez correctement les phases durant lesquelles la croissance est supérieure ou inférieure à la croissance moyenne ou de long terme (la constante de régression), proche du concept de croissance potentielle [3]. Dès lors, l’indicateur peut être vu comme un indicateur de retournement du cycle économique.
Le taux de croissance du PIB observé et estimé
Le taux de croissance du PIB observé et estimé
56Le hoquet actuel des enquêtes de conjoncture peut être mis en rapport avec la politique fiscale du gouvernement qui pèsera, au premier trimestre 2018, sur le pouvoir d’achat des ménages. L’alourdissement transitoire de la fiscalité lié à la bascule cotisations sociales / CSG, à la hausse du tabac et à la fiscalité écologique devrait retentir négativement sur la consommation des ménages (pour plus de détails, voir la partie sur la croissance trimestrielle et le calendrier fiscal). Selon les données quantitatives disponibles jusqu’en janvier, l’indice de production industrielle et la consommation des ménages en biens, confirment ces inquiétudes pour le premier trimestre, avec un acquis de croissance très négatif pour le premier, -1 %, et faiblement négatif pour la seconde, -0,2 %, après des épisodes de forte volatilité au tournant de 2017 et de 2018 (graphique 23). En revanche, l’indice de production dans les services a renoué avec sa trajectoire haussière en janvier, +1,6 % sur le mois, portant son acquis de croissance pour le premier trimestre 2018 à 1,8 %. Dès lors que la reprise engagée au quatrième trimestre 2016 s’est appuyée sur la formation d’un puissant trend de croissance dans les services, non démenti à ce jour, les inquiétudes portant sur le premier semestre 2018 ne doivent pas être exagérées au regard de cette information. D’autant plus que la production manufacturière reste encore supérieure à 3 % en glissement annuel malgré les mauvais chiffres du début d’année.
Séries conjoncturelles quantitatives
Séries conjoncturelles quantitatives
3 – Un scénario de croissance trimestrielle assujetti au calendrier fiscal
57L’année 2018 va être marquée par la mise en place des mesures fiscales issues de la Loi de finances. En particulier, le calendrier des mesures va affecter différemment le pouvoir d’achat des ménages en début et fin d’année 2018 [4], les mesures négatives arrivant dès le premier trimestre et celles qui le soutiennent plus tardivement, avec une forte accélération au dernier trimestre. De ce fait, la consommation des ménages devrait connaître un premier semestre bien moins dynamique que le second, ce qui va naturellement marquer le scénario de croissance du PIB trimestriel. Ainsi le net ralentissement du début de l’année 2018 doit être rapproché du calendrier des mesures fiscales et ne doit pas être interprété comme la première manifestation de la fin de la reprise. En effet, en raison du transfert partiel cotisations salariés / CSG et de la hausse de la fiscalité écologique et des prix du tabac, le pouvoir d’achat des ménages sera affecté négativement au premier trimestre 2018 (-0,2 %) (graphique 24). En revanche, au deuxième et au troisième trimestre, les baisses de la fiscalité directe soutiendront le pouvoir d’achat, à travers notamment la réforme de l’ISF et l’élargissement du crédit d’impôt relatif aux emplois à domicile acté fin 2016 dans le cadre de la Loi de finances pour 2017. Au quatrième trimestre, la baisse de la taxe d’habitation et la seconde tranche de baisse de cotisations salariés contribueront très positivement à l’évolution du pouvoir d’achat des ménages qui progressera de 1,5 %.
Évolution trimestrielle du pouvoir d’achat du RDB des ménages
Évolution trimestrielle du pouvoir d’achat du RDB des ménages
58En 2019, la montée en charge de certaines mesures (nouvelle tranche de baisse de taxe d’habitation et Prélèvement forfaitaire unique sur les revenus du capital) et les nouvelles revalorisations de l’Allocation Adulte Handicapé, du minimum vieillesse et de la Prime d’activité permettront, en plus de la poursuite de l’amélioration de l’emploi, de soutenir le pouvoir d’achat des ménages. Les nouvelles hausses programmées de la fiscalité écologique et des prix du tabac, quant à elles, pèseront sur le pouvoir d’achat au premier trimestre 2019 (graphique 25). Comme en 2018, l’évolution du pouvoir d’achat des ménages devrait être fortement marquée par le calendrier des mesures fiscales. Peu dynamique au premier trimestre (+0,1 %), le pouvoir d’achat devrait croître de 0,4 % et 0,5 % au deuxième et au troisième trimestre 2019 sous l’effet des revalorisations de prestations. Au quatrième trimestre 2019, la nouvelle baisse de la taxe d’habitation générera une nouvelle accélération du pouvoir d’achat qui croîtrait de 0,9 %.
Variation trimestrielle du pouvoir d’achat
Variation trimestrielle du pouvoir d’achat
59L’inflation, mesurée par le déflateur de la consommation, devrait atteindre 1,4 % en 2018 en moyenne annuelle. Sans les hausses programmées de la fiscalité indirecte, celle-ci n’aurait été que de 1 %, rythme comparable à celui de 2017 (graphique 26). En 2019, le taux de croissance du déflateur s’établirait en moyenne à 1,6 % (1,8 % en glissement annuel), d’abord par l’accélération des salaires sous l’effet de la reprise, ensuite par les hausses supplémentaires de fiscalité indirecte en début d’année mais aussi en fin d’année. Sans cet effet fiscal, il aurait atteint 1,3 % en 2019 en moyenne annuelle (1,5 % en glissement annuel).
Déflateur de la consommation des ménages
Déflateur de la consommation des ménages
60Selon notre prévision, le salaire moyen par tête (hors effet bascule CSG/cotisations) augmenterait de 1,9 % en 2018 (après 1,8 % en 2017), avec une accélération à 2,7 % en 2019, sous l’effet de la baisse du taux de chômage et de la hausse de l’inflation (graphique 27). Le salaire réel (hors bascule) serait affecté négativement en 2018 par la hausse des prix, pour partie liée à l’augmentation de la fiscalité indirecte. Il augmenterait en moyenne de 0,5 % en 2018 puis de 1,1 % en 2019 contre 1,2 % en 2017.
Évolution des salaires et des prix
Évolution des salaires et des prix
61Les fortes variations trimestrielles du pouvoir d’achat vont impacter un taux de croissance de la consommation des ménages faible en début d’année (0,2 %), suivi une accélération tout au long de 2018 jusqu’à 0,8 % en fin d’année (tableau 1), en dépit des effets d’amortisseurs traditionnels du taux d’épargne à court terme. Ce dernier devrait baisser au premier trimestre 2018, permettant de maintenir une croissance positive de la consommation, avant de se redresser progressivement jusqu’à un pic en fin d’année (graphique 28). Un scénario semblable se produirait sur le taux d’épargne en 2019 (baisse en début d’année et hausse en fin) en cohérence avec les mouvements sur la fiscalité. En moyenne, le taux d’épargne passerait de 14,2 % en 2017 à 14,4 % en 2019, cette hausse de 0,2 point étant attribuable à la répartition des mesures fiscales selon les niveaux de vie (encadré 3).
Taux d’épargne des ménages
Taux d’épargne des ménages
Encadré 3. L’impact des mesures fiscales de 2018-2019 sur le taux d’épargne des ménages
Ces effets différenciés auront un impact sur le comportement d’épargne et de consommation au niveau macroéconomique. Comme la propension à épargner s’accroît avec le revenu des ménages, le taux d’épargne des 5 % les plus aisés est très élevé. Principaux bénéficiaires des mesures discrétionnaires de 2018, ils sont aussi les plus susceptibles d’augmenter leur épargne. À titre d’illustration, le taux d’épargne des ménages appartenant aux 20 % les plus modestes est, selon l’Insee, de 3 % alors que celui des 20 % les plus aisés s’établit à 30 % (graphique 29). La politique fiscale a donc de fortes chances de se traduire par une hausse marquée du taux d’épargne des ménages entre 2017 et 2019, hausse que nous chiffrons à 0,2 point.
Taux d’épargne par quintile de niveau de vie
Taux d’épargne par quintile de niveau de vie
62Au final, la consommation des ménages augmenterait en moyenne de 1,5 % en 2018, et de 2,3 % en 2019 avec l’accélération du revenu réel liée notamment à la montée en charge des mesures fiscales.
63Si la consommation des ménages devrait connaître une accélération en 2018-2019, ce n’est pas le cas de la consommation publique. En effet, en raison des ajustements budgétaires attendus du côté de la dépense publique (réduction des effectifs du secteur non marchand, gel de l’indice fonction publique, réduction du budget du logement, économies dans la santé et la politique familiale, …), la consommation des administrations publiques ne croîtrait, en glissement annuel, que de 0,7 % en 2018 et de 0,6 % en 2019 (pour plus de détails, voir partie finances publiques). En revanche, après cinq années de contraction continue, l’investissement public repartirait à la hausse (2,6 % en 2018 et 4 % en 2019, après -1 % en 2017) sous l’impulsion de la mise en place du Grand plan d’investissement. Par ailleurs, le gouvernement, à travers les économies exigées aux collectivités locales (13 milliards d’euros sur le quinquennat), leur a uniquement fixé des objectifs de dépenses de fonctionnement dans le souci de préserver les dépenses locales d’investissement.
64Tout comme la consommation des administrations publiques est en net ralentissement, l’investissement des ménages fait également l’objet d’inquiétudes pour 2018 et 2019. En effet, si les discussions autour du projet de loi ELAN n’ont pas abouti, les arbitrages budgétaires de la Loi de finances initiale (LFI) pour 2018 ont largement amputé les moyens alloués à la politique du logement et à la construction (encadré 4). Les économies demandées aux organismes de logements sociaux, associées à la contraction des enveloppes consacrées aux aides à l’accession à la propriété et à l’investissement locatif privé, laissent planer le risque d’un repli du marché de la construction dans les trimestres à venir, même si celui-ci pourrait être en partie compensé par le dynamisme du pouvoir d’achat et des taux d’emprunt toujours bas. À l’horizon 2019, l’investissement des ménages devrait ralentir. Après 5,3 % en 2017, il croîtrait de 2,5 % en 2018 et de 1,3 % en 2019 (graphique 30).
Évolution trimestrielle de l’investissement des ménages en volume
Évolution trimestrielle de l’investissement des ménages en volume
Investissement des ménages : en attendant l’ELAN
Associés à des taux d’intérêt bas et à des prix de l’immobilier de nouveau orientés à la hausse, l’amélioration du marché de l’emploi et le dynamisme du pouvoir d’achat ont stimulé le marché de la construction dès le début de l’année 2016. Au cours de cette année, plus de 460 000 logements ont été autorisés à la construction et 370 000 ont été commencés. Jusqu’à la mi-2017, le mouvement de reprise s’est poursuivi et l’investissement des ménages, à plus de 80% constitué d’investissement en logement, a progressé à des rythmes trimestriels élevés.
À partir de la mi-2017, la reprise du marché de la construction s’est quelque peu tassée. Grâce à un premier semestre dynamique, l’année 2017 a affiché des chiffres de production de logements neufs records. Néanmoins, un ralentissement est observable à partir du troisième trimestre. Si fin 2017, le nombre de logements autorisés sur un an s’établissait à 505 000 et le nombre de logements commencés à 427 000, chiffres inobservés depuis 2012, la tendance s’oriente désormais vers une moindre progression des mises en chantier et des permis de construire (graphique 31).
Évolution du nombre de logements autorisés et commencés sur 12 mois
Évolution du nombre de logements autorisés et commencés sur 12 mois
Indicateurs de conjoncture dans le secteur du bâtiment
Indicateurs de conjoncture dans le secteur du bâtiment
4 – L’investissement des entreprises resterait dynamique en 2018 et 2019…
65Alors qu’il était sur un plateau durant la période 2011-2014, à un niveau largement en dessous de celui d’avant-crise, le taux d’investissement des entreprises non financières (ENF) a entamé son redressement à partir de début 2015. Il s’est accru de 0,9 point de PIB entre la fin 2014 et la fin 2017, signe d’un cycle de reprise de l’investissement. Il atteint désormais 12,9 % du PIB, soit un niveau légèrement supérieur à celui d’avant la grande crise financière de 2008 (graphique 33). La reprise de l’investissement des entreprises depuis 2015 a été tirée à hauteur de 46 % par l’investissement en produits manufacturés, soutenu par le dispositif de suramortissement qui cible les investissements industriels, et à hauteur de 51 % par les investissements en information-communication (IC) alors que ces deux composantes ne représentent qu’à peine plus de la moitié de l’investissement. Ainsi, l’investissement global des entreprises a crû de près de 13 % au cours des trois dernières années, de 26 % pour les seuls matériels de transport, de 25 % pour l’IC (soit un rythme supérieur à celui de la période 1998-2001 au moment de la formation de la bulle sur les technologies de l’information et de la communication) et de 15 % pour les biens d’équipement. En revanche, l’investissement en construction ou en services aux entreprises hors IC est resté relativement atone sur cette période.
Taux d’investissement des entreprises non financières par produit
Taux d’investissement des entreprises non financières par produit
66En prévision, l’investissement des entreprises continuerait de se redresser sous l’effet principalement de l’amélioration passée du taux de marge, d’un coût réel du capital encore bas et d’une croissance soutenue couplée à un taux d’utilisation élevé. Après avoir crû de 4,4 % en 2017, l’investissement des entreprises augmenterait de 4,3 % en 2018 et de 3,5 % en 2019, atteignant ainsi un nouveau pic à la fin 2019 à 13,3 % du PIB (graphique 34). Si ce niveau semble très élevé, il ne conduit pas à une augmentation du ratio stock de capital productif des entreprises rapporté à la valeur ajoutée marchande, comme le montre le graphique 11.
Investissement et taux de marge des entreprises non financières
Investissement et taux de marge des entreprises non financières
67La reprise de l’investissement s’appuiera tout d’abord sur le redressement du taux de marge des SNF. Après avoir perdu 3,8 points de valeur ajoutée (VA) entre début 2008 et le quatrième trimestre 2013, le taux de marge des SNF s’est redressé de 2 point de VA sur la période allant de fin 2013 à fin 2017 (graphique 35), sous les effets conjoints de la baisse des prix du pétrole, de la montée en charge du CICE et de la mise en place du Pacte de responsabilité. Le CICE et le Pacte de responsabilité ont contribué, comptablement, à redresser le taux de marge des SNF de 2,5 points de VA sur cette période. Ce gain est toutefois ramené à 1,8 point en prenant en compte les éléments fiscaux ayant pesé sur le coût du travail, comme par exemple la hausse des cotisations retraite. À cela s’ajoute la baisse des prix de l’énergie qui a réduit les prix des consommations intermédiaires énergétiques et qui n’a pas été intégralement répercutée dans les prix de production. Il en a résulté une hausse du prix de valeur ajoutée des entreprises par rapport à celui des prix à la consommation (qui est le déflateur utilisé pour mesurer les salaires réels) conduisant à une hausse de 1 point de VA du taux de marge des SNF depuis la fin 2013. A contrario, le rythme de progression des salaires réels, supérieur à celui de la productivité, a amputé les taux de marge de 0,8 point de VA sur cette même période. Ainsi, sur les 2,8 points supplémentaires du taux de marge liés à la baisse des prix du pétrole et à la réduction du coût du travail, près d’un tiers a été récupéré par les salariés sous forme de rémunérations plus dynamique que la productivité du travail.
Décomposition de la variation du taux de marge des SNF de la fin 2013 à la fin 2017
Décomposition de la variation du taux de marge des SNF de la fin 2013 à la fin 2017
68Après être passé de 29,8 points de VA au dernier trimestre 2014 à 31,8 fin 2017, le taux de marge devrait continuer à s’améliorer en 2018, soutenu d’une part par la hausse d’un point du taux de CICE en 2018, avant sa transformation en allègement de cotisations patronales en 2019, et de l’autre par une progression de la productivité plus rapide que celle des salaires réels en début d’année.
69En revanche, la baisse programmée du taux de l’impôt sur les sociétés (IS) durant le quinquennat (de 33,3 % en 2017 à 25 % en 2022 pour un coût budgétaire de plus de 10 milliards d’euros) améliorerait le taux de profit mais les effets attendus sur l’investissement resteraient modestes à l’horizon de notre prévision (graphique 36). Premièrement, la baisse serait étalée sur tout le quinquennat, représentant 1,2 milliard en 2018, puis 3,6 milliards en 2019 (soit 2,4 milliards supplémentaires par rapport à 2018), ce qui représente une amélioration du taux de profit de 0,1 point de VA en 2018 et de 0,2 point supplémentaire en 2019. Au regard de l’impact graduel de l’amélioration du taux de profit sur l’investissement [6], les effets à attendre de la réforme de l’IS sur l’investissement seraient très faibles en 2018 et en 2019 (0,1 point) mais atteindraient 0,8 point à la fin 2022 (puis 1,4 % en 2028).
Impact de la baisse de l’Impôt sur les sociétés sur l’investissement des entreprises non financières
Impact de la baisse de l’Impôt sur les sociétés sur l’investissement des entreprises non financières
70Enfin, la croissance robuste de l’activité en 2018 et 2019, dans un contexte de taux d’utilisation des capacités de production élevé et de hausse de la durée d’utilisation des équipements va continuer à pousser les entreprises à investir pour accroître leur stock de capital face à une demande soutenue.
…et le commerce extérieur ne serait plus un frein à la croissance
71Le commerce extérieur français s’est redressé en 2017 grâce à l’accélération des exportations passées, en glissement annuel de 1,1 % au début de l’année à 5,1 % au dernier trimestre, rythme qui n’avait pas été atteint depuis six ans. Et en moyenne depuis cinq trimestres, le commerce extérieur contribue positivement, bien que faiblement, à la croissance du PIB (+0,1 point de PIB depuis le dernier trimestre 2016). L’enquête auprès des chefs d’entreprises sur les perspectives générales d’exportations augurent d’une poursuite de cette orientation plus favorable. Elle indique une nette accélération en fin de période (graphique 37), affichant un niveau qui n’avait pas été atteint depuis le sommet des années 2000.
Exportations et perspectives d’exportations dans l’industrie
Exportations et perspectives d’exportations dans l’industrie
72Le premier semestre 2018 serait toutefois marqué par un ralentissement ponctuel des exportations, en lien avec les très fortes ventes en matériel de transport, du fait de records de livraisons aéronautiques en fin d’année 2017 et de livraisons de matériel militaire. Malgré tout, le contrecoup de début d’année serait atténué par les livraisons de grands contrats militaires et navals, notamment celle du paquebot « Symphony of the Seas ».
73Globalement, le contexte est devenu plus favorable au commerce extérieur. L’amélioration des marges des entreprises au niveau macroéconomique masque des contrastes importants au niveau des branches. En effet, depuis la fin 2013, le taux de marge s’est fortement redressé dans l’industrie manufacturière (+5,7 points de VA) alors que celui-ci a connu une plus faible amélioration dans la construction (+2,3 points de VA) et ne s’est pas amélioré dans les services principalement marchands hors activités financières et immobilières (graphique 15). Ainsi le taux de marge dans l’industrie atteint des niveaux supérieurs à ceux d’avant-crise (en 2007) et comparables aux plus hauts historiques de 2000.
74À partir de la répartition des branches exportatrices détaillée dans le Tableau Économique d’Ensemble de l’INSEE (TEE), nous avons reconstitué un secteur exportateur. De là, il ressort que les secteurs exportateurs sont ceux qui ont enregistré l’embellie la plus remarquable de leur situation opérationnelle. Ainsi, les biens d’équipement, qui représentent 15 % des exportations françaises, ou les matériels de transport (18 % des exportations), ont vu leurs marges s’améliorer respectivement de 10,1 et 11,2 points de VA entre la fin 2013 et la fin 2017. Et le secteur des « autres biens industriels » (chimie, pharmacie, métallurgie, etc.), qui représente 33 % des exportations, affiche une hausse de ses marges de 6,2 points de VA et, celui des transports une amélioration de 8,4 points (5 % des exportations). Au total, entre le quatrième trimestre 2013 et la fin 2017, le taux de marge du secteur exportateur français est passé de 33,2 % de la VA, soit un point bas depuis ces trente dernières années, à 38,7 %, niveau qui correspond à un plus haut historique, supérieur même à celui atteint au début des années 1990 et au tournant de 2000 et de 2001 (graphique 20). Si cette hausse du taux de marge du secteur exportateur n’est pas encore visible dans l’évolution des parts de marché, notamment sur la période récente, ce redressement financier des exportateurs est un élément positif pour l’avenir car les exportateurs ont des marges désormais pour baisser leurs prix et améliorer leur compétitivité-prix ou maintenir ces hauts niveaux de marge pour investir dans la compétitivité hors-coût, à l’instar du modèle industriel allemand.
75Ainsi, le redressement de la situation financière des entreprises exportatrices et la hausse passée de l’investissement productif, couplés au retour de la fréquentation touristique et à une production agricole revenue à la normale après une année 2016 chaotique seront bénéfiques au commerce extérieur français qui ne devrait plus être un frein à la croissance française. Si la hausse de l’euro pèsera sur les exportations, à travers l’appréciation du taux de change effectif réel (graphique 38), elle affectera peu les exportations qui devrait croître de 4,6 % en 2018 et 3,6 % en 2019.
Facteurs d’évolution des exportations
Facteurs d’évolution des exportations
5 – Emploi : croissance malgré les tensions
76L’économie française connaît depuis maintenant deux années une croissance de l’emploi marchand suffisante pour faire baisser le chômage. La reprise des créations d’emplois, secteur non-marchand inclus, s’est timidement amorcée en 2015 (+108 000 emplois) et a accéléré en 2016 (+227 000 emplois) et 2017 (+271 000 emplois). Les créations d’emplois ont été soutenues dans un premier temps par les mesures de baisse de coût du travail (CICE, Pacte de responsabilité, Prime à l’embauche) et les emplois aidés dans le secteur non marchand, puis, à partir de la fin 2016, par l’accélération de la croissance. Les créations nettes d’emplois étant supérieures à l’évolution de la population active, le nombre de chômeurs a diminué (-408 000 depuis fin 2014), portant le taux de chômage au sens du BIT en France métropolitaine à 8,6 % de la population active au quatrième trimestre 2017, contre 10,1 % fin 2014 (tableau 4).
Emploi et chômage*
Emploi et chômage*
* prévision OFCE.77À l’horizon 2019, les créations d’emplois salariés dans le secteur marchand seraient soutenues par la croissance de l’activité marchande (2,5 % en 2018 et en 2019). Le rythme des créations d’emplois marchands augmenterait légèrement par rapport à 2017, malgré la fin de la montée en charge du CICE et du Pacte de responsabilité. Les difficultés de recrutement, encore en-deçà des pics de 2007 et du début des années 2000 (graphique 12), ne se sont pas traduites par une accélération des salaires et ne constitueraient pas un frein aux créations d’emplois. Au total, et compte tenu de la réduction des effectifs dans le secteur non-marchand, 194 000 emplois seraient créés en 2018, puis 254 000 en 2019.
78En 2018-2019, la politique de l’emploi, hors mesures fiscales, ne soutiendrait plus les créations d’emplois en raison d’un nombre prévu de contrats aidés insuffisant pour maintenir le stock existant. Pour 2018, le gouvernement a annoncé un flux de 200 000 contrats aidés non-marchands, ainsi que l’arrêt du dispositif des emplois d’avenir. Le stock de contrats aidés devrait donc poursuivre sa baisse rapide. Pour 2019 nous avons retenu l’hypothèse d’une stabilisation du stock de contrats aidés non-marchands, hypothèse qui pourrait toutefois s’avérer optimiste compte tenu de la volonté du gouvernement de réorienter la politique de l’emploi vers la formation des jeunes éloignés du marché du travail et des chômeurs de longue durée. L’emploi public hors emplois aidés diminuerait de 24 000 postes chaque année, en cohérence avec l’annonce de la suppression de 120 000 emplois publics sur l’ensemble du quinquennat. En revanche, le Plan d’investissement des compétences (2 millions de formations supplémentaires annoncées pour 2018-2022 dans le cadre du Grand plan d’investissement) débuterait en 2018 et monterait en charge progressivement, ce qui freinerait légèrement la hausse de la population active, en transférant temporairement des chômeurs de longue durée vers l’inactivité, sans toutefois modifier significativement la trajectoire prévue du taux de chômage. Le Plan d’investissement des compétences aurait en retour un léger effet positif sur l’emploi (+37 000 emplois sur la période 2018-2019) en réduisant le stock d’emplois non pourvus [7].
79Au total, la poursuite des créations d’emplois conduirait à un prolongement de la baisse du taux de chômage. Celui-ci atteindrait 8,4 % fin 2018 et 7,9 % de la population active fin 2019 pour la France métropolitaine.
Secteur marchand : retour à la dynamique d’avant-crise
80Ces trois dernières années, l’emploi salarié dans le secteur marchand non agricole a retrouvé le chemin de la croissance. Depuis le quatrième trimestre 2014, les créations d’emplois ont progressivement accéléré, pour atteindre un pic de 250 000 créations en cumul annuel au deuxième trimestre 2017 (graphique 39) retrouvant ainsi un rythme qui n’avait plus été observé depuis la crise. Les créations d’emploi ont toutefois été moins dynamiques au deuxième semestre 2017, après l’arrêt de la Prime à l’embauche.
Évolution de l’emploi salarié marchand corrigé de l’intérim
Évolution de l’emploi salarié marchand corrigé de l’intérim
Champs : Secteur marchand non agricole.81C’est d’abord dans le secteur des services que se sont concentrées les créations d’emplois après le creux de 2012. Ce secteur, où les gains de productivité tendanciels sont plus faibles que dans l’industrie, peut créer des emplois même en période de faible croissance comme ce fut le cas à partir du deuxième semestre 2013. Depuis 2000, les créations d’emplois corrigées de l’intérim se sont d’ailleurs concentrées dans les services marchands, avec 2,1 millions d’emplois créés, dont près de 740 000 depuis 2008.
82Dans l’industrie les gains de productivité sont plus élevés et le secteur détruit tendanciellement des emplois. Depuis 2000 l’industrie a enregistré plus de 900 000 destructions d’emplois, dont 500 000 depuis 2008 (après réaffectation de l’emploi intérimaire par secteur utilisateur). Les pertes ont toutefois fortement ralenti depuis 2015, et le secteur a même créé des emplois depuis le deuxième semestre 2016. Ces créations s’observent d’ailleurs au moment où le taux de marge des branches industrielles atteint des niveaux historiquement élevés (graphique 40). Fin 2017, l’emploi industriel se situe ainsi à son niveau observé fin 2014.
Taux de marge par branche
Taux de marge par branche
83Le secteur de la construction, durablement affecté par la crise, a pour sa part enregistré 190 000 destructions d’emplois depuis 2008 (après 330 000 créations entre 2000 et 2007). Son taux de marge s’est progressivement redressé depuis le creux observé en 2012, et le secteur crée des emplois continûment depuis le deuxième trimestre 2016.
84À court terme, les indicateurs d’intentions d’embauches continuent de progresser et indiquent une poursuite des embauches dans l’ensemble du secteur marchand (graphique 41). Les difficultés de recrutement progressent également (graphique 12). Elles ont retrouvé leur niveau d’avant-crise dans l’industrie, mais restent en-deçà dans les services et la construction. L’accélération franche de l’activité économique en 2017 a pu surprendre les entreprises, notamment dans l’industrie, après plusieurs années de réduction des effectifs. Le besoin soudain de main-d’œuvre industrielle a également pu se heurter à court terme aux délais nécessaires pour mener à bien les procédures de recrutement. Il en résulterait une accentuation du sentiment de tension sur les recrutements. Mais il ne s’agirait pas là d’une contrainte dure à moyen terme compte tenu du niveau encore élevé du chômage et de la possibilité pour les entreprises de faire de la formation au poste en cas d’insuffisance de qualification de la main-d’œuvre. Par ailleurs les difficultés de recrutement actuelles, quel que soit le secteur, sont encore éloignées de leur niveau de 2001. En ce sens, les difficultés de recrutement ne semblent pas avoir atteint un niveau tel qu’elles constitueraient un frein majeur à la poursuite des créations d’emploi : les intentions d’embauches déclarées restent élevées, indiquant que les entreprises n’y ont pas renoncé. Dès lors, la hausse des difficultés de recrutement va de pair avec les intentions d’embauche.
Intentions d’embauche et climat de l’emploi
Intentions d’embauche et climat de l’emploi
Où en est le cycle de productivité ?
85Notre analyse de l’emploi marchand repose sur celle du cycle de productivité (encadré 5) : en période de ralentissement conjoncturel (et symétriquement en période de reprise), les entreprises attendent généralement la confirmation de la baisse de l’activité (et symétriquement le redressement) avant de procéder à des réductions d’effectifs (et symétriquement des embauches), ce qui se traduit dans un premier temps par une dégradation des gains de productivité (et symétriquement une amélioration). Ce n’est que dans un second temps, quand la baisse (hausse) d’activité se confirme, qu’elles procèdent à des suppressions (créations) de postes. Le ralentissement de l’activité se traduit d’abord par des pertes de productivité par rapport à la tendance de long terme, donc par le creusement du cycle de productivité, qui se rétablit progressivement, une fois passé le creux d’activité.
Encadré 5. La modélisation de l’emploi
L | l’emploi salarié du secteur marchand ; |
Q | la valeur ajoutée du secteur marchand ; |
HL | la durée du travail trimestrielle moyenne par salarié du secteur marchand ; |
CL | le salaire horaire super-brut dans le secteur marchand ; |
P | le déflateur de prix de la valeur ajoutée marchande ; |
t | le temps ; |
c | la constante ; |
la tendance de productivité hors effets coût et durée du travail. |
(2) (tendance de productivité)
(3) Zt = Zt – 1 v2, t (taux de croissance tendanciel de la productivité)
avec Z, le taux de croissance tendanciel de la productivité
Les équations d’état représentent la productivité tendancielle, hors effets du coût du travail et de la durée du travail, en niveau (équation (2)) et en taux de croissance (équation (3)). On suppose que des chocs de natures différentes affectent Π et Z : v1 représente ce qui affecte de manière permanente le niveau de la productivité tendancielle et v2 représente ce qui affecte de manière permanente le taux de croissance de la productivité tendancielle.
Les variables ont toutes un coefficient significativement différent de 0 et de signe attendu. La statistique de Student associée au coefficient de la relation de long terme valide l’hypothèse d’une relation de cointégration entre ces variables. Cette équation estime la tendance de productivité de long terme à 1,4 % par an en moyenne sur la période 1990-1999, 1,1 % par an en moyenne sur la période 2000-2009 et à 0,8 % fin 2015. Le coefficient associé au coût du travail s’élève à 0,24 (une hausse du coût du travail accroit la productivité horaire et diminue l’emploi) et celui de la durée du travail à 0,61 (une hausse de la durée du travail diminue la productivité horaire, mais augmente la productivité par salarié et diminue l’emploi). Le cycle de productivité est le résidu de la relation de long terme.
86Selon notre équation d’emploi, il apparaît, qu’après un redressement du cycle de productivité entre le premier trimestre 2009 et la fin 2010, la rechute de l’activité a conduit de nouveau à une baisse des gains de productivité à partir du deuxième trimestre 2011 (graphique 42), ceux-ci s’écartant de leur tendance de long terme, estimée à 0,8 % par an. Le cycle a atteint un point bas entre le deuxième trimestre 2012 et le premier trimestre 2013, s’expliquant par l’absence de croissance, avant d’amorcer son redressement au deuxième trimestre 2013.
Cycle de productivité dans le secteur marchand
Cycle de productivité dans le secteur marchand
87Le cycle de productivité s’est refermé au deuxième semestre 2014 sous l’effet de la reprise timide de la croissance. La montée progressive des effets du CICE s’est en même temps traduite par un enrichissement de la croissance en emplois. La mise en œuvre en 2015 et en 2016 d’allègements supplémentaires de cotisations sociales patronales (Pacte de responsabilité et dispositif embauche PME) a infléchi à nouveau la tendance de productivité alors que les entreprises se trouvaient en situation de légers sous-effectifs par rapport à leur niveau d’activité [9]. Malgré une croissance de l’activité marchande en 2016 identique à celle de 2015 (1,1 % de croissance contre 1 % en 2015), les créations d’emplois salariés ont donc été deux fois plus nombreuses en 2016, traduisant les embauches des entreprises pour réduire le déficit d’emplois de 2015.
88Au regard du cycle de productivité (+0,9 % par rapport à la tendance de long terme au deuxième trimestre 2017), et de l’accélération de la croissance de la valeur ajoutée marchande, les entreprises continueraient à embaucher au cours des deux prochaines années, à un rythme supérieur à celui observé en 2016-2017. Dès 2018, l’effet des mesures de baisse du coût du travail sur la tendance de productivité s’estomperait progressivement (-0,1 point en 2018, puis 0 en 2019), et celle-ci retrouverait son niveau normal estimé à 0,8 % chaque année. La croissance de la valeur ajoutée marchande se maintenant à un niveau élevé à l’horizon de notre prévision, le cycle de productivité ne se refermerait pas sur la période (graphique 42). Une telle configuration du cycle de productivité a déjà été observée dans le passé en période de croissance soutenue : la productivité peut rester durablement supérieure à la productivité tendancielle, et son retournement en direction de la tendance est le plus souvent synchrone avec le retournement de la croissance. L’emploi salarié dans le secteur marchand augmenterait de 1,4 % en 2018 puis de 1,7 % en 2019 après 1,5 % en 2017. Une fermeture plus rapide du cycle conduirait à davantage de créations d’emplois.
Les effets des mesures de baisse du coût du travail s’estompent
89Héritées du précédent quinquennat, plusieurs mesures fiscales (CICE, Pacte de responsabilité, Prime à l’embauche [10]) de réduction du coût du travail visant à enrichir la croissance en emplois seront toujours à l’œuvre en 2018, avec un faible effet attendu sur l’emploi, effet qui s’estomperait complètement en 2019.
90Le dispositif de la Prime à l’embauche [11] a pris fin au 30 juin 2017. Il est remplacé par un allègement dégressif de cotisations sociales patronales supplémentaire de 4,05 points au niveau du SMIC à partir du 1er janvier 2019 pour les salariés dont les salaires sont compris entre 1 et 1,6 SMIC, ce qui représente 3,3 milliards d’euros d’allègements supplémentaires. Par ailleurs, le taux de CICE, qui avait été augmenté à 7 % pour les salaires versés en 2017, est abaissé à 6 % en 2018, avant sa transformation en allègement pérenne de cotisations sociales patronales de 6 % pour les salaires compris entre 1 et 2,5 SMIC.
91Le passage du taux de CICE de 7 % à 6 % aurait un impact négatif sur l’emploi en 2018-2019 (tableau 5). En 2019, les premiers effets de la transformation du CICE (pour les 6 points restants) et le renforcement des allègements au niveau du SMIC atténueraient les effets de la baisse du taux de CICE.
Effets du CICE et du Pacte de responsabilité sur la dynamique de l’emploi
Variations en moyenne annuelle en milliers | ||||
---|---|---|---|---|
2017 | 2018 | 2019 | 2013-2019 | |
Effet brut du Pacte de responsabilité | 67 | 26 | 6 | 193 |
| 34 | 11 | 0 | 125 |
| 33 | 14 | 6 | 68 |
Effet brut du CICE | 95 | 0 | 0 | 340 |
Transformation CICE | -17 | -5 | -23 | |
Effet brut du Pacte + CICE + Transformation | 162 | 8 | 1 | 511 |
Financement (mds e) | 5 | 0 | 0 | 29 |
Effet du financement sur l’emploi | -59 | -30 | -4 | -273 |
Effet net du Pacte, du CICE et du financement | 103 | -22 | -3 | 238 |
Effets du CICE et du Pacte de responsabilité sur la dynamique de l’emploi
92Concernant le Pacte de responsabilité, nous avons distingué deux éléments : (1) l’allègement portant sur les bas salaires (entre 1 et 1,6 SMIC) dont on attend un effet plus fort sur l’emploi via une élasticité de l’emploi à son coût plus élevée aux abords du SMIC puis décroissante avec le niveau de salaire [12] et (2) l’allègement uniforme entre 1,6 et 3,5 SMIC. Les effets du Pacte de responsabilité sur la dynamique de l’emploi s’estomperaient progressivement en 2018 (+26 000 emplois) et seraient quasi nuls en 2019 (+ 6 000 emplois).
93Les effets cumulés du CICE, de sa transformation [13], du Pacte de responsabilité et de l’impact dynamique de son financement auraient un effet légèrement négatif sur l’emploi en 2018 (-22 000 emplois) et un effet négligeable en 2019 [14] (tableau 5).
La baisse des contrats aidés se poursuit
94Le quinquennat précédent a été marqué par une progression des contrats aidés, avec notamment la création des emplois d’avenir et l’allongement de la durée des CUI-CAE (graphique 43). En 2013-2014, face à la dégradation du marché du travail, 380 000 contrats aidés dans le secteur non-marchand avaient ainsi été signés en moyenne chaque année (360 000 en moyenne sur 2012-2016). La montée en charge des emplois d’avenir, dont la durée moyenne était de 2 ans, ainsi que l’allongement de la durée des CUI-CAE avec pour objectif une durée moyenne des contrats de 10,5 mois contre 7 mois en 2012, avaient permis une forte progression du stock d‘emplois en contrat aidé. Le pic des contrats aidés a été atteint au deuxième trimestre 2016, que l’on considère les contrats aidés dans le non-marchand seuls (307 000 en stock) ou que l’on y inclue l’insertion par l’activité économique (IAE) et les contrats aidés du secteur marchand (540 000 en stock). Par la suite, le nombre d’emplois en contrat aidé a diminué de 57 000 au deuxième semestre 2016, avec la baisse entamée du stock des emplois d’avenir pour le secteur non-marchand et des CUI-CIE dans le secteur marchand. Cette baisse s’est ensuite amplifiée en 2017 (-111 000 contrats aidés dont -81 000 dans le secteur non marchand et -30 000 dans le secteur marchand). Malgré la rallonge de 30 000 contrats aidés décidée par le gouvernement au second semestre 2017, la baisse du stock de contrats aidés a été particulièrement forte dans la seconde moitié de 2017. Cette décision a été insuffisante pour stabiliser le stock. Elle a par ailleurs été ciblée uniquement sur le secteur non-marchand et a été de pair avec la fin des entrées en contrats aidés dans le secteur marchand. Au quatrième trimestre 2017, on comptait ainsi 367 000 contrats aidés en France métropolitaine, dont 211 000 dans le secteur non-marchand, 125 000 dans l’IAE et 31 000 dans le secteur marchand.
Contrats aidés dans le secteur non-marchand
Contrats aidés dans le secteur non-marchand
Champ : France métropolitaine.Note : la baisse des CUI-CAE observée au second semestre 2014 provient du basculement des CAE des entreprises d’insertion en CDDI (CDD d’insertion).
95Cette forte baisse des contrats aidés se prolongera en 2018, le gouvernement ayant annoncé une réorientation des politiques de l’emploi vers la formation des demandeurs d’emplois et des jeunes éloignés du marché du travail. Cette réorientation passe par le Plan d’investissement compétences et par une réforme en cours de la formation professionnelle et de l’apprentissage. Les emplois d’avenir et les CUI-CIE disparaissent et les CUI-CAE sont transformés en Parcours Emploi Compétences (PEC) [15].
96Pour 2018, le gouvernement prévoit 200 000 entrées en PEC exclusivement dans le secteur non-marchand. 30 500 parcours seraient fléchés pour l’accompagnement des élèves en situation de handicap. Sur les 169 500 PEC restant, 3,5 % sont mis en réserve de précaution, 22 000 concernent l’outre-mer et 136 000 concernent la France métropolitaine. La durée des contrats serait de 10,2 mois en moyenne (9 mois minimum), avec un taux de prise en charge par l’État qui baisserait à 50 %, contre environ 70 % en 2017 (tableau 6). Pour 2019, nous avons fait l’hypothèse d’un maintien du stock de PEC à son niveau prévu fin 2018. Les dispositifs d’insertion par l’activité économique bénéficieraient d’une rallonge de 10 000 contrats en 2018, soit une cible de 70 000 emplois en équivalent temps plein, que nous avons maintenue pour 2019.
Entrées et effectifs de bénéficiaires des dispositifs spécifiques de politique de l’emploi(1),(2),(3),*
Entrées et effectifs de bénéficiaires des dispositifs spécifiques de politique de l’emploi(1),(2),(3),*
Champ : France métropolitaine.(1) Hors accompagnement des élèves en situation de handicap.
(2) L’effet de la formation sur l’emploi est calculé en appliquant une élasticité de retour à l’emploi de 0,07 sur le différentiel d’entrées en formations par rapport aux entrées constatées en 2015 (660 000 entrées), l’année 2016 étant marquée par le Plan « 500 000 formations ». Cet effet ne tient pas compte d’un possible effet de changement dans la file d’attente, qui atténuerait l’impact du dispositif sur le retour à l’emploi.
(3) L’effet sur l’emploi est calculé en retenant un impact de 9 % sur le taux d’emploi durable (CDI et CDD de 6 mois et plus hors emplois aidés) sur le nombre de jeunes entrant dans le dispositif chaque année*. Cet effet ne tient pas compte d’un possible effet de changement dans la file d’attente, qui atténuerait l’impact du dispositif sur la probabilité d’être en emploi durable.
* Cf. Tableau 2.2, p. 22 dans Dares, 2016 : « Premiers résultats d’évaluation statistique de l’impact de la Garantie jeunes, Annexe 5 », novembre.
97Compte tenu de ces éléments, le stock de contrats aidés baisserait fortement entre la fin 2017 et la fin 2019 (voir graphique 43 et tableau 6 : -96 000 contrats aidés non-marchands, -125 000 contrats aidés y compris secteur marchand et IAE). L’effet cumulé sur 2018-19 de la baisse du stock de contrats aidés conduirait à réduire le nombre d’emplois de 67 000. Cet effet négatif s’explique principalement par le faible effet d’aubaine des contrats aidés non-marchands contrairement au secteur marchand (0,3 retenu pour les CUI-CAE, 0,4 pour les emplois d’avenir, 0,84 pour les CUI-CIE et 0,75 pour les emplois d’avenir du secteur marchand) [16].
98Concernant l’alternance, le gouvernement a fixé pour 2018 un objectif de hausse de 2 % du nombre d’entrées en apprentissage et nous avons retenu en prévision une hypothèse de stabilisation du stock de contrats de professionnalisation. Mais l’effet sur l’emploi serait négligeable (+1 000 emplois cumulés entre 2018 et 2019).
99Les autres dispositifs d’emplois aidés voient la fin de l’exonération de cotisation chômage sur les embauches de jeunes en CDI à compter du 1er octobre 2017 (entrée en vigueur de la nouvelle convention d’assurance chômage de l’Unedic) ainsi que la suppression du contrat de génération dès 2018. L’aide aux chômeurs créateurs d’entreprise serait en revanche étendue progressivement à partir de 2019 [17]. Nous avons inscrit 200 000 bénéficiaires supplémentaires en 2019. Enfin, nous avons stabilisé en prévision les bénéficiaires de l’accompagnement des restructurations, ainsi que les dispositifs ciblés sur les territoires. Ces derniers devraient être toutefois rediscutés en 2019 avec l’allègement supplémentaire de cotisations sociales au niveau du SMIC [18]. Au total, les politiques de l’emploi, via les contrats aidés et les autres dispositifs d’emplois aidés, contribueraient négativement à l’évolution de l’emploi total pour -72 000 emplois sur la période 2018-2019. Ce chiffrage propre aux périmètres des emplois aidés ne tient donc pas compte d’un possible effet de l’extension de l’Accre (Aide au chômeur créant ou reprenant une entreprise) sur l’emploi [19], ni de l’effet positif attendu du Plan d’Investissement Compétences (encadré 6) sur l’amélioration de l’employabilité des jeunes et des chômeurs de longue durée. Compte tenu de la montée en charge des formations et de la Garantie jeunes, et de l’effet attendu sur le retour à l’emploi de ces dispositifs [20], le Plan d’investissement compétences contribuerait positivement à améliorer l’emploi de 37 000 en 2018-2019 et la Garantie Jeune de 17 000 sur la même période.
Encadré 6. Le Plan d’Investissement Compétences
Sur l’ensemble du quinquennat, il s’agit, en complément de la réforme de l’apprentissage et de la formation professionnelle, de financer 2 millions de formations supplémentaires se décomposant en :
- 1 million de formations pour les demandeurs d’emploi peu qualifiés. Les formations longues, d’une durée de 6 à 9 mois, et certifiantes seraient privilégiées ;
- 470 000 formations qualifiantes et certifiantes pour les jeunes ;
- 330 000 préparations aux dispositifs d’apprentissage et d’alternances ;
- 200 000 jeunes supplémentaires accompagnés dans le cadre de la Garantie jeunes.
Pour 2018, la Loi de finances inclut 1 milliard d’euros pour financer 200 000 formations supplémentaires (soit 5 000 euros par formation) et 515 millions d’euros d’autorisations d’engagement au titre de l’accompagnement de 100 000 jeunes via le dispositif de la Garantie jeunes. Cette enveloppe inclut 225 millions d’euros de reste à charge au titre du plan de formation engagé en 2017 et 250 millions d’euros de contributions extérieures.
En 2014, le coût d’une formation s’élevait à environ 8 800 euros dont 4 600 euros de coût pédagogique, le reste correspondant principalement à la rémunération des stagiaires. La durée moyenne des formations s’établissait à environ 4,7 mois. Compte tenu de ces montants, nous avons retenu une durée moyenne des formations additionnelles de 6 mois en 2018 et de 7,5 mois en 2019 en supposant la poursuite de la montée en charge du Plan. Concernant la Garantie jeunes, nous avons retenu 100 000 entrées dans le dispositif en 2018 et 2019, conformément à l’objectif du gouvernement.
Population active et halo du chômage
Plus globalement, un décalage apparaît entre l’évolution de la population active observée et son évolution attendue. Depuis 2014, la population active observée (emploi CN + chômage EEC) progresse moins vite (en moyenne annuelle) que la population active potentielle [21] (tableau 7). Cela induit un « défaut de bouclage » rétrospectif sur les évolutions de la population active. Ce défaut de bouclage s’élève à -135 000 personnes cumulées depuis 2014 (-99 000 personnes depuis 2015, année de reprise des créations d’emplois marchands). Ainsi, sans ce défaut de bouclage, le chômage aurait été plus élevé de 100 000 à 135 000 personnes.
Décomposition de la population active observée et potentielle
Moyenne annuelle, en variation, en milliers | |||||
---|---|---|---|---|---|
2013 | 2014 | 2015 | 2016 | 2017 | |
Population active observée | 238 | 120 | 87 | 100 | 99 |
Population active potentielle | 132 | 157 | 129 | 126 | 129 |
Emploi | 67 | 120 | 61 | 182 | 276 |
Chômage | 171 | 0 | 26 | -83 | -178 |
Défaut de bouclage | 106 | -36 | -42 | -26 | -31 |
Décomposition de la population active observée et potentielle
Créations d’emploi cumulées depuis le premier trimestre 2015
Créations d’emploi cumulées depuis le premier trimestre 2015
Taux d’activité observé et projeté
Taux d’activité observé et projeté
txhalo : | nombre de personnes dans le halo / (population active + halo) |
txchobit : | taux de chômage au sens du BIT |
emploi : | emploi calculé à partir de l’Enquête emploi |
Halo du chômage
Halo du chômage
Chômage : stabilité attendue à court terme
100Après sept années de hausse, la courbe du taux de chômage s’est inversée en 2015. Le dynamisme des créations d’emplois salariés dans le secteur marchand (579 000 entre la fin d’année 2014 et le quatrième trimestre 2017) explique une part importante de cette baisse. La population active observée est aussi bien moins dynamique depuis 2015 (+66 000 actifs par an en moyenne) qu’entre 2008 et 2014 (+167 000 actifs par an en moyenne).
101En prévision et sur la base des dernières projections de population active de l’Insee [22], la population active tendancielle croîtrait ainsi de 77 000 personnes en moyenne sur la période 2018-2019, contre 153 000 personnes en moyenne chaque année sur la période 2008-2017. Le dynamisme des créations d’emplois aurait un effet positif sur la population active via un effet de flexion, des personnes inactives étant incitées à revenir sur le marché du travail du fait de l’amélioration des conditions sur ce dernier. Par ailleurs, la population active observée s’est avérée moins dynamique en moyenne depuis 2014 : l’écart entre la progression effectivement constatée de la population active et la progression attendue (la population active potentielle) s’élève à près de -140 000 personnes cumulées en moyenne annuelle depuis 2014. Ce défaut de bouclage négatif sur la période récente s’explique en partie par le niveau élevé du halo du chômage (encadré 7). On s’attend donc à une hausse de la population active plus forte en 2018-2019 (+80 000 personnes au total sur ces deux années, comptabilisées avec l’effet de flexion, en sus de l’augmentation tendancielle de la population active).
102La montée en charge du Plan d’investissement compétences prévoyant 2 millions de formations supplémentaires pour les demandeurs d’emplois et les jeunes éloignés du marché du travail (encadré 6) se traduirait par une hausse de 200 000 entrées en formations dès 2018 et une poursuite de la montée en charge de la Garantie jeunes. Nous avons fait l’hypothèse d’une poursuite de la montée en charge avec +100 000 formations supplémentaires en 2019 s’ajoutant à celles de 2018. Les chômeurs de longue durée entrés en formation en 2018-2019 sortiraient provisoirement de la population active (-19 000 personnes en 2018 puis -6 000 personnes en 2019). Notons qu’une montée en charge différente des entrées en formation des demandeurs d’emploi modifierait légèrement le profil du taux de chômage.
103L’emploi total serait relativement dynamique en 2018 (+194 000) et en 2019 (+254 000), soit un rythme suffisant pour faire baisser le chômage. Ce dernier atteindrait 8,4 % au quatrième trimestre 2018. La forte baisse des contrats aidés dans le secteur non-marchand et le moindre enrichissement de la croissance en emplois freineraient la baisse du chômage en 2018 après la forte baisse de 2017 (-70 000 personnes en 2018, en glissement annuel). Le surcroît de personnes actives lié à la baisse du halo du chômage contribuerait également à freiner la baisse du chômage (encadré 7). Ce surcroît est comptabilisé dans l’effet de flexion et serait positif en 2018 (+45 000 personnes actives) et en 2019 (+35 000 personnes actives). Hors les incertitudes liées au défaut de bouclage, le chômage baisserait de façon quasi-certaine en 2018 (encadré 8).
104En 2019, le taux de chômage en France métropolitaine poursuivrait sa baisse à un rythme plus rapide pour atteindre 7,9 % de la population active en fin d’année 2019 (tableau 8). Cette baisse serait plus marquée en 2019 qu’en 2018, principalement en raison d’un effet moins négatif des baisses de contrats aidés sur l’emploi total.
Projections de population active*,**
Projections de population active*,**
* Prévisions OFCE** Sont incluses dans l’effet de flexion 45 000 personnes supplémentaires en 2018 (et 35 000 en 2019) auparavant considérées comme inactives car dans le halo du chômage. Voir encadré 3.
Encadré 8. Les incertitudes entourant la baisse du taux de chômage
Hypothèses de distributions de probabilité
Distribution de probabilités | Moyenne | Écart-type | Valeur Min. | Valeur Max. | |
---|---|---|---|---|---|
Emploi salarié marchand (taux de croissance) | Loi normale | 0 | 0,07 | ||
Emploi non-salarié marchand (Variation en milliers) | Loi normale | 0 | 9,6 | ||
Emploi non salarié non- marchand (variation en milliers) | Loi normale | 0 | 2,4 | ||
Impact contrats aidés (coefficient d’impact) | Loi uniforme | 0,5 | 0,9 | ||
Défaut de bouclage (Niveau en milliers) | Loi normale | 0 | 47,9 |
Hypothèses de distributions de probabilité
L’incertitude en prévision
L’incertitude en prévision
Note : Nous associons à notre projection un intervalle de confiance simulée à l’aide de la méthode de Monte-Carlo pour 15 000 simulations. Le premier intervalle est à 75 %, le deuxième à 90 % et le troisième à 95 %.6 – Avec la poursuite de la reprise, la dette publique entamera sa baisse
105En 2017, le déficit public français est passé sous la barre des 3 % pour s’établir à 2,6 % du PIB. Ce déficit est conforme à la recommandation du Conseil européen du 10 mars 2015, émise dans le cadre de la Procédure de déficit excessif (PDE) ouverte en 2009 [24]. En 2018, dans un contexte conjoncturel toujours porteur, le déficit devrait rester en dessous de ce seuil. La perspective d’un passage durable sous ce seuil permettra à la France de mettre un terme à la PDE au cours de l’année.
106La fin de la PDE sera concomitante à un certain relâchement de l’effort de consolidation, alors même que les règles du volet préventif inciteraient plutôt au maintien d’une consolidation significative. En effet, l’essentiel des baisses de prélèvements promises pendant la campagne électorale seront engagées au cours des deux premières années de la législature alors même que les économies en dépenses seront étalées tout au long du quinquennat. Nous évaluons l’effort structurel [25] total, mesure qui écarte l’effet temporaire de certaines mesures, à 0,2 point de PIB au cours des années 2018-2019. Cette consolidation serait très en deçà de ce que stipulent les règles du volet préventif du Pacte de stabilité et de croissance [26]. Le gouvernement tâchera de bénéficier au maximum des flexibilités du Pacte (clause d’investissement et de réformes structurelles) pour préserver sa stratégie de politique économique. Si le gouvernement échoue dans cet objectif, il n’est pas à exclure une correction de la politique budgétaire en 2019, même si cela ne constitue pas le scénario central de notre prévision.
107La baisse prévue du déficit pour 2018 s’expliquerait par le maintien d’un scénario macroéconomique porteur. Le solde public devrait s’améliorer de 0,2 point pour atteindre -2,4 % du PIB. Cette amélioration serait observée alors même que la France ne réaliserait pas d’austérité budgétaire. La croissance de l’activité, supérieure à celle du PIB potentiel, améliore spontanément la composante cyclique du solde (+0,4 point). Au contraire, les composantes non cycliques du solde public se dégraderont de 0,2 point. En effet, le solde public sera ponctuellement dégradé par le remboursement exceptionnel de la taxe sur les dividendes invalidé par le Conseil Constitutionnel, pour un montant de 5 milliards (0,2 point de PIB). Cette mesure dégrade la composante non cyclique du solde de façon ponctuelle, constituant un one-off. Enfin, les baisses structurelles de prélèvements obligatoires (PO) seraient de 0,3 point de PIB et l’effort de réduction structurelle de la dépense publique primaire serait d’un montant équivalent. Ceci se traduit par un effort structurel nul.
108Budgétairement, l’année 2019 sera marquée par la transformation du CICE en baisse de cotisations sociales employeurs. Les créances de CICE générées en 2018 seront intégrées dans le déficit de l’année 2019 [27], tout comme les baisses immédiates de cotisations. Cette mesure aura donc un impact double sur le déficit au sens de Maastricht. Malgré le fort impact de cette mesure (0,9 point de PIB), le solde public augmenterait de seulement 0,1 point pour atteindre -2,5 %. Ceci est possible grâce au maintien d’une forte croissance de l’activité – qui contribue mécaniquement à la baisse du déficit de 0,5 point – et d’un effort structurel de 0,2 point de PIB. Enfin, les composantes non discrétionnaires du solde devraient s’améliorer de 0,1 point de PIB (notamment à travers l’impact des normes comptables sur l’impact des créances passées de CICE sur le solde [28]), ce qui permettra de limiter la hausse du déficit.
109Dans ce contexte, la dette publique au sens de Maastricht devrait baisser à l’horizon 2019 (tableau 10). Compte tenu de notre scénario de croissance nominale, le solde stabilisant la dette s’établirait à -2,9 % en 2018 et -3,7 % en 2019. Comme le solde public prévu s’avère plus faible, la dette publique diminuerait au cours des deux prochaines années, 0,4 point en 2018 et 1,2 point en 2019. Cette évaluation tient compte d’un flux de créances [29] à peine défavorable en 2018 (+0,1 point de PIB). Au final, la dette publique devrait atteindre 95,4 % du PIB en 2019.
Principaux agrégats de finances publiques
En % du PIB | ||||
---|---|---|---|---|
2016 | 2017 | 2018 | 2019 | |
Solde public | -3,4 | -2,6 | -2,4 | -2,5 |
Dépenses publiques (DP, en % du PIB) | 56,6 | 56,5 | 56,0 | 55,0 |
Dépenses publiques hors crédits d’impôts restituables (en % du PIB) | 55,1 | 55,0 | 54,5 | 53,7 |
Taux de croissance de la DP hors crédits d’impôts restituables (en %, en euros courants) | 1,1 | 2,5 | 2,1 | 2,3 |
Taux de croissance de la DP hors crédits d’impôts restituables (en %, en euros constants) | 0,8 | 1,7 | 1,1 | 0,6 |
Taux de prélèvements obligatoires (en % du PIB) | 44,6 | 45,4 | 45,1 | 44,1 |
Dette publique au sens de Maastricht (en % du PIB) | 96,6 | 97,0 | 96,6 | 95,4 |
Principaux agrégats de finances publiques
2017 : et le déficit passa sous la barre des 3 %
110En 2017, le déficit public français est enfin passé sous la barre de 3 % du PIB, une première depuis 2007. Le déficit s’est établi à 2,6 % du PIB, en amélioration de 0,8 point par rapport à 2016 (tableau 11). Cette baisse s’explique par la reprise de l’activité qui améliore la composante conjoncturelle du solde public de 0,4 point de PIB. Par ailleurs, le solde structurel s’est lui aussi amélioré de 0,5 point. Enfin, les composantes non discrétionnaires ont dégradé le solde de 0,1 point. La forte amélioration du solde structurel masque un effort structurel négatif en 2017 (-0,2 point de PIB). Pour concilier ce décalage il faut tenir compte du fort dynamisme des recettes fiscales, qui a largement dépassé celui de la croissance de l’activité, dans un contexte de reprise.
Décomposition de la variation du solde public
En points de PIB | ||||
---|---|---|---|---|
2016 | 2017 | 2018 | 2019 | |
Solde public | -3,4 | -2,6 | -2,4 | -2,5 |
Variation du solde public (A+B+C+D+E) | 0,2 | 0,8 | 0,2 | -0,1 |
Variation du taux de PO (A) | 0,2 | 0,7 | -0,3 | -1,0 |
| -0,1 | -0,1 | -0,3 | -0,1 |
| 0,2 | -0,9 | ||
| 0,3 | 0,6 | 0,0 | 0,0 |
Gains dus à l’écart entre croissance des dépenses publiques hors crédits d’impôts et PIB potentiel | 0,3 | -0,3 | 0,1 | 0,4 |
| 0,2 | 0,0 | 0,3 | 0,3 |
| -0,3 | -0,2 | ||
| 0,1 | 0,1 | 0,0 | 0,0 |
Variation solde conjoncturel (C) | 0,0 | 0,4 | 0,4 | 0,5 |
Impact des recettes non fiscales sur le PIB (D) | -0,2 | -0,2 | 0,0 | 0,0 |
Impact clé de répartition crédits d’impôts recouvrables (E) | 0,0 | 0,1 | 0,0 | 0,1 |
Variation solde structurel (F=A1+A3+B1+B3) | 0,5 | 0,6 | 0,0 | 0,3 |
Variation solde structurel primaire (G=A1+A3+B1) | 0,3 | 0,5 | 0,0 | 0,2 |
Effort structurel (H=A1+B1) | 0,0 | -0,2 | 0,0 | 0,2 |
Décomposition de la variation du solde public
111L’essentiel de l’amélioration du solde structurel s’explique par la très forte hausse du taux de prélèvements obligatoires (PO) de 0,7 point. Cette hausse a eu lieu alors même que les mesures discrétionnaires prises diminuent les PO de 0,1 point de PIB. La différence s’explique par deux facteurs. D’une part, la contribution exceptionnelle de l’impôt sur les sociétés (IS), créée pour financer les remboursements de la taxe sur les dividendes de 3 % invalidée par le Conseil Constitutionnel, a augmenté ponctuellement le taux de PO de 0,2 point. Cette contribution disparaîtra en 2018 que nous interprétons comme un one-off au sens des finances publiques. D’autre part, les recettes fiscales ont été nettement plus dynamiques que ce que la croissance de l’activité aurait laissé augurer. Ce type de surprise positive pour les finances publiques émerge généralement en phase de reprise. Même si une élasticité des recettes fiscales à l’activité supérieure à l’unité peut être espérée en phase de reprise (encadré 9), le niveau des plus-values fiscales de 2017 est particulièrement fort. Ainsi, l’élasticité des recettes fiscales s’est établie, selon nos calculs, à 1,6, contribuant à la hausse du taux de PO de 0,6 point. Les recettes des impôts sur le revenu et le patrimoine (+5,2 %) et des impôts sur les produits (+4,6 %) progressent plus fortement que l’activité (+2,8 % de croissance du PIB nominal). Ainsi, la forte croissance de l’activité et la composition de la reprise – riche en emplois – expliquent le dynamisme des recettes publiques.
112En 2017, les dépenses publiques primaires hors crédits d’impôts ont progressé de +2,7 % en valeur et de +1,9 % en volume (déflaté par le prix du PIB), soit plus que la croissance potentielle (évaluée à +1,2 %). Deux one-off ont également contribué sensiblement à la hausse des dépenses publiques : la recapitalisation de AREVA SA (2,3 milliards) et le remboursement de la taxe sur les dividendes de 3 % (4,9 milliards). En excluant ces deux mesures, la dépense publique primaire a évolué en ligne avec le potentiel de croissance français, écartant l’hypothèse d’une dérive structurelle de la dépense. Ainsi, hors one-off, un effort de 0,3 point de PIB a été réalisé sur la dépense primaire. Enfin, la baisse de la charge de la dette a contribué à la baisse du déficit pour 0,1 point de PIB.
2018 : l’année de la baisse de la fiscalité du capital et des entreprises …
113En 2018, le déficit public resterait sous les 3 % pour la deuxième année consécutive. L’amélioration anticipée de 0,2 point du solde public s’explique essentiellement par la poursuite de la reprise. En revanche, la France ne réalisera pas de consolidation budgétaire. Les baisses de prélèvements obligatoires (PO) pour un montant de 6,7 milliards d’euros (0,3 point de PIB) seront compensées par un effort sur la dépense publique primaire d’un ordre comparable. Toutefois, l’effet du remboursement de la taxe sur les dividendes de 3% invalidée par le Conseil Constitutionnel, augmentera – ponctuellement – le déficit de 4,9 milliards (soit 0,2 point de PIB).
114Dans le détail, les ménages bénéficieront de la réforme de la taxation du capital (suppression de l’ISF et instauration du Prélèvement forfaitaire unique sur les revenus du capital) à hauteur de 4,5 milliards d’euros (0,2 point de PIB, 5,1 milliards en régime de croisière) et de la première tranche de dégrèvement de la taxe d’habitation pour un montant de 3 milliards d’euros (tableau 12). En revanche, leur revenu sera amputé par le calendrier de la bascule CSG-cotisations sociales. En effet, si la hausse de la CSG a été intégrale dès le 1er janvier 2018 (+1,7 point), la baisse complète de cotisations sociales intégrale n’interviendra qu’au 1er octobre. Ainsi, un gain pour les finances publiques sera réalisé au cours de l’année 2018 d’un montant de 4,5 milliards d’euros [30] (0,2 point de PIB). Enfin, le crédit d’impôt pour l’emploi de personnes à domicile soutiendra le pouvoir d’achat pour 1 milliard. Au total, les nouvelles mesures sur la fiscalité directe augmenteront le pouvoir d’achat des ménages de plus de 4 milliards d’euros en 2018. Ces mesures de soutien au pouvoir d’achat seront plus que contrebalancées par une augmentation de la fiscalité indirecte avec la hausse de la fiscalité écologique pour 3,7 milliards (0,2 point de PIB) et celle sur le tabac pour 1,2 milliard (0,1 point de PIB).
Détail des mesures de prélèvements en 2018 (en mds d’euros)
Mesures | Milliards d’euros |
---|---|
Mesures de fiscalité directe affectant le pouvoir d’achat des ménages | -4,0 |
Suppression de l’ISF et remplacement par l’IFI | -3,2 |
Dégrèvement de la taxe d’habitation | -3,0 |
Création du Prélèvement Forfaitaire Unique | -1,3 |
Élargissement du crédit d’impôt pour l’emploi de personnes à domicile | -1,0 |
Bascule CSG | 4,5 |
Mesures fiscales affectant les entreprises | -8,6 |
CICE et crédit d’impôt sur la taxe sur les salaires – montée en charge et hausse du taux à 7 % | -4,7 |
Suppression de la contribution sur les dividendes | -1,9 |
Baisse du taux d’IS | -1,2 |
Réforme des acomptes | -0,8 |
Taxation écologique | 3,7 |
Fiscalité écologique – TICPE et TICGN | 1,5 |
Hausse de la composante carbone | 1,1 |
Alignement fiscalité essence/diesel | 0,8 |
Autres (dont verdissement du barème de la taxe sur les véhicules de société) | 0,3 |
Fiscalité sur le tabac | 1,2 |
Autres (notamment fiscalité locale hors réforme TH) | 0,5 |
TOTAL | -7,2 |
Détail des mesures de prélèvements en 2018 (en mds d’euros)
Note de lecture : ce tableau intègre les évaluations des mesures publiées dans le tableau 21 de l’annexe « Tableaux prévisionnels détaillés » du RESF annexé au PLF 2018.115La fiscalité des entreprises diminuerait fortement en 2018. Le paiement de créances de CICE passées et la hausse de son taux à 7 % – décidée lors du vote de la Loi de finance initiale (LFI) 2017 – diminueront la fiscalité des entreprises de 4 milliards d’euros en 2018 (0,2 point de PIB). Par ailleurs, la baisse du taux d’IS est confirmée, avec un coût pour les finances publiques de 1,2 milliard (0,1 point de PIB). Enfin, le contrecoup de la modification de la date du cinquième acompte d’IS inscrite dans la LFI 2017 diminuerait de 0,5 milliard les impôts qui pèsent sur les entreprises en 2018. Néanmoins, la principale mesure inscrite dans la LFI 2018 en faveur des entreprises reste la suppression de la contribution sur les dividendes qui allègera la fiscalité des entreprises de 1,9 milliard (0,1 point de PIB). Au total, les mesures en faveur des entreprises devraient réduire leurs prélèvements de 8,6 milliards d’euros (-0,4 point de PIB) en 2018.
… et en même temps la maîtrise de la dépense publique
116Dans la continuité de la politique budgétaire mise en œuvre depuis 2014, le gouvernement financerait les baisses de prélèvements obligatoires par un important effort sur l’évolution des dépenses publiques.
117La dépense publique primaire hors crédits d’impôts augmenterait de 1,0 % en volume en 2018 (après 1,9 % en 2017, graphique 48). Ceci représenterait un effort budgétaire de 0,1 point de PIB [31]. Toutefois, ce chiffre masque l’impact ponctuel des remboursements de la taxe de 3 % sur les dividendes invalidée, qui augmentera – temporairement – la dépense publique de 5 milliards d’euros. Une fois corrigé cet impact ponctuel, les efforts réalisés sur la dépense publique seraient de 0,3 point de PIB, comparables aux efforts réalisés depuis 2014 [32]. Hors crédits d’impôts, la dépense publique progresserait toujours moins que le PIB nominal : le ratio de la dépense publique au PIB poursuivrait sa baisse pour atteindre 56,0 % (54,5 % hors crédits d’impôts restituables), un niveau plus faible que celui de 2009 (56,8 %) mais toujours supérieur à celui d’avant-crise (52,2 %). Dans le détail, la maîtrise de la dépense publique en 2018 concernerait principalement l’État et les collectivités locales. Le périmètre de la masse salariale publique serait largement mis à contribution (-0,2 point de PIB) en raison de la réduction des emplois aidés et du gel de l’indice de lae fonction publique. Les prestations sociales et transferts en nature contribueraient aux économies à hauteur de 0,1 point de PIB chaque année, principalement sous l’effet de la baisse du budget dédié au logement et de la réforme de la politique familiale. En revanche, l’investissement public, en particulier la mise en place du GPI, contribuerait à accroître la dépense de 0,1 point de PIB. Enfin, le bouclage budgétaire passe par des économies substantielles (0,2 point de PIB par an) liées à une amélioration de l’efficacité de la dépense publique, la réduction des consommations intermédiaires notamment via la baisse de certains prix [33].
Évolution annuelle de la dépense publique primaire hors crédits d’impôts
Évolution annuelle de la dépense publique primaire hors crédits d’impôts
2019 : l’année du rééquilibrage en faveur des ménages
118La stabilisation du déficit attendue pour 2019, dans un contexte de croissance soutenue, ne traduit pas un relâchement de l’effort budgétaire. Pour comprendre la stabilisation du déficit, alors que les conditions macroéconomiques continueront d’améliorer le solde conjoncturel et qu’un effort structurel sera mis en œuvre, il faut rappeler les effets comptables de la transformation du CICE en baisse de cotisations sociales patronales. Les créances de CICE générées en 2018 seront intégrées dans le déficit public de l’année 2019, tout comme les baisses immédiates de cotisations. Cette mesure aura donc un impact ponctuel – de 0,9 point de PIB – sur le déficit au sens de la comptabilité nationale. Enfin, les composantes non discrétionnaires devraient améliorer le solde de 0,2 point (recettes non fiscales, impact comptable de la montée en charge des anciennes créances de CICE et charge d’intérêts).
119Une fois contrôlé du double impact comptable de la transformation du CICE, l’ajustement budgétaire sera réalisé essentiellement à travers la dépense publique (0,3 point de PIB). Hors CICE, une légère baisse de la fiscalité est attendue pour 2019 (-0,1 point de PIB et -1 point de PIB y compris le one off CICE). La baisse de la fiscalité sera concentrée cette fois-ci sur les ménages. Il faut relever notamment la matérialisation des effets pleins des baisses de cotisations salariales en 2019 par rapport à 2018 (-0,2 point de PIB), la poursuite de l’exonération de taxe d’habitation pour 3,5 milliards (-0,1 point) et la montée en charge du Prélèvement forfaitaire unique (PFU) (tableau 13). Ces baisses seront partiellement compensées par la hausse de la taxation écologique et du tabac (+0,1 point de PIB). Hors fiscalité écologique, les ménages verraient leur fiscalité diminuée de 7,5 milliards (0,3 point de PIB). Hors effet one off du CICE, la fiscalité reposant sur les entreprises devrait augmenter en 2019 (+1,2 milliard). Si les entreprises bénéficieront de la baisse du taux d’IS (-0,2 point de PIB), la transformation du CICE en baisse de cotisations sociales aura des impacts multiples sur les entreprises. D’une part, les effets de la baisse du taux de CICE (de 7 % à 6 %) inscrite dans la LFI 2018 s’appliquant aux salaires de l’année 2018 sera comptabilisé dans le solde public en 2019. Ainsi, la baisse du taux de CICE augmentera les PO de 0,2 point de PIB en 2019. En outre, la transformation du CICE en baisse de cotisations sociales induira une hausse des marges des entreprises. Par un effet d’assiette, ceci génèrera un retour positif d’IS, expliquant la hausse des PO sur les entreprises en 2019 (hors effet de l’année double). Au final, sans compter l’impact double ponctuel de la transformation du CICE, l’année 2019 verra une pause dans la baisse de la fiscalité des entreprises engagée en 2014. L’année 2019 sera ainsi celle d’un rééquilibrage des mesures fiscales en faveur des ménages.
Détail des mesures de prélèvements obligatoires en 2019
Milliards d’euros | Point de PIB | |
---|---|---|
Mesures fiscales ménages | -7,5 | -0,3 |
Taxe d’habitation | -3,6 | -0,1 |
Bascule complète CS/CSG | -4,5 | -0,2 |
Prélèvement forfaitaire unique | -0,6 | 0,0 |
Taxes sur le tabac | 1,2 | 0,0 |
Mesures fiscales entreprises | 1,2 | 0,0 |
Baisse du taux d’IS | -3,7 | -0,2 |
Cotisations sociales à 0 % au niveau du SMIC | -4,0 | -0,2 |
Retour d’IS lié à la transformation du CICE | 4,9 | 0,2 |
Baisse du taux de CICE en 2018 | 4,0 | 0,2 |
Fiscalité écologique | 2,8 | 0,1 |
Total | -3,5 | -0,1 |
Détail des mesures de prélèvements obligatoires en 2019
120Les efforts sur la dépense publique primaire de 2019 seront maintenus au même rythme qu’en 2018 (0,3 point de PIB). Pour l’instant, le détail des viviers d’économies est inconnu, mais le gouvernement a lancé le processus « Action Publique 2022 », avec pour objectif d’évaluer le périmètre d’action des administrations publiques. Il est certain que le contrôle de la masse salariale publique restera un levier important des économies avec la poursuite de l’objectif d’une réduction de 120 000 postes dans la fonction publique à la fin du quinquennat et potentiellement un nouveau gel du point d’indice. Par ailleurs, les économies de dépenses de fonctionnement des collectivités locales seront d’un montant identique à celui prévu pour 2018, comme pour les économies dans le champ de l’Ondam de l’assurance maladie. L’austérité générale sur la dépense publique sera atténuée à nouveau par la poursuite de la montée en charge du GPI qui soutiendrait l’investissement public.
121Un risque existe sur la mise en œuvre de cette stratégie de finances publiques. La fin de la procédure de déficit excessif devrait être rendue officielle courant 2018. Ainsi, la France devra respecter désormais les règles du volet préventif du Pacte de stabilité et de croissance en 2018 et en 2019. Or, le passage dans le volet préventif du Pacte avec une dette supérieure à la cible de 60 %, et un déficit structurel plus dégradé que l’Objectif de moyen terme (OMT) du gouvernement [34] devraient contraindre la politique budgétaire. Une lecture à la lettre du traité suggère que la France devrait faire un ajustement budgétaire structurel minimal de 0,5 point de PIB en 2018. Or, selon nos prévisions, l’ajustement structurel attendu pour 2018 déviera significativement de cette cible. Toutefois, si la surprise dans les élasticités des PO observée en 2017, bien supérieure à l’unité, se maintenait en 2018, l’ampleur de la déviation sera moindre. Si ceci ne constitue pas le scénario central, la perspective de renouveler des recettes fiscales dynamiques par rapport à la croissance du PIB nominale ne peut pas être exclue et constitue un aléa positif sur le solde public. Dans tous les cas, le respect des règles du Pacte ne sera évalué par la Commission qu’en début d’année 2019, au moment de la notification du déficit public de 2018. Ainsi, il est possible – même si cela ne constitue pas le scénario central – qu’un rééquilibrage de l’effort structurel soit demandé pour l’année 2019. L’expérience récente montre que la Commission fait une lecture plus souple du volet préventif du Pacte [35]. La Commission tient notamment compte du contexte conjoncturel afin d’évaluer les décisions des États. En outre, de nouvelles flexibilités ont été introduites dans la gouvernance budgétaire européenne en 2015. Celles-ci permettent de dévier par rapport aux cibles des traités, à condition de réaliser des nouveaux investissements publics ou de mettre en place des réformes structurelles. Vraisemblablement, la France profitera de ce contexte afin d’alléger la consolidation budgétaire requise pour la période 2018-2019 et préserver sa stratégie de politique économique.
La politique budgétaire ne pèsera pas sur la croissance à horizon 2019
122Pour évaluer l’impact de la politique budgétaire sur l’activité, il est nécessaire d’entrer dans le détail des mesures [36]. L’hétérogénéité des effets multiplicateurs de chaque mesure et la dynamique propre des effets de chaque type de mesure [37], font que la composition et le timing de la politique budgétaire mise en œuvre jouent un rôle premier pour expliquer son impact sur la croissance.
123En 2018, la politique budgétaire aura un impact légèrement positif (+0,1 point de PIB) sur l’activité. Si l’impulsion budgétaire est neutre, elle résulte d’une forte baisse de PO principalement sur le capital et les entreprises, à faible multiplicateur à court terme, et d’une impulsion négative sur la dépense publique, à multiplicateur plus élevé à court terme. Du fait de sa composition, l’impact total de la politique contemporaine issue de la Loi de finances 2018 est récessive en 2018 (contribution de -0,2 point de PIB à la croissance). En revanche, les effets d’offre et de demande des mesures budgétaires passées compenseront ces effets (+0,3 point de PIB de contribution), expliquant le soutien, modeste mais positif, de la politique budgétaire à la croissance de l’activité.
124En 2019, la politique budgétaire soutiendra à nouveau la croissance du PIB. Elle le fera à hauteur de 0,2 point et ce, malgré la restriction budgétaire mise en œuvre – hors effets de la bascule du CICE. Hors CICE, le multiplicateur lié aux mesures contemporaines sera inférieur à l’unité car la consolidation se fera essentiellement avec des mesures d’offre (baisse du taux de CICE) à faible multiplicateur la première année. Si la dépense publique sera toujours contrainte, les baisses de PO seront importantes pour les ménages (poursuite du dégrèvement de la taxe d’habitation), ce qui compensera les effets négatifs des mesures sur la demande. En revanche, la croissance 2019 bénéficiera encore des mesures passées (contribution de +0,1 point de PIB à la croissance). En particulier, elle bénéficiera du début du Grand plan d’investissement initié en 2018 et de la baisse des multiplicateurs des économies en dépenses passées. En outre, si on ajoute les effets escomptés de la bascule CICE/cotisations (avec le soutien des entreprises en difficulté et le ciblage des baisses de cotisations vers les bas salaires), le soutien total de la politique budgétaire sera un peu plus important. Certes, le versement exceptionnel du CICE ne devrait avoir qu’un très faible multiplicateur, inférieur à 0,1, en absence de tension de financement de la trésorerie des entreprises. Toutefois, compte tenu de l’importance du choc (proche de 1 point de PIB), son impact sur la croissance sera non négligeable [38]. Au total, la politique budgétaire soutiendra la croissance de 0,2 point et expliquera en partie le regain de croissance attendu.
Encadré 9. Le dynamisme des recettes publiques de 2017 peut-il persister en 2018 ?
Dans certains contextes, les recettes peuvent évoluer plus fortement que l’activité.
À court terme, les élasticités des recettes fiscales au PIB peuvent fluctuer fortement et s’éloigner de leur niveau de long terme [39]. Princen et al. (2013) [40] montrent qu’au sein des États membres de la zone euro, ces fluctuations sont particulièrement fortes dans les moments de retournement cyclique. Quatre raisons fondamentales peuvent modifier le lien entre niveau d’activité et recettes :
- la composition de la croissance : toutes les composantes du PIB ne sont pas soumises à la même taxation. Ainsi, un retournement de la consommation des ménages aura plus d’impact sur les recettes publiques que celui des exportations ;
- le cycle du prix des actifs : certaines recettes peuvent être liées aux prix des actifs (immobiliers ou financiers) qui ne sont pas toujours directement corrélés avec le cycle du PIB. Ceci est notamment vrai pour la fiscalité locale ou certains impôts assis sur la valeur du patrimoine ;
- un effet dynamique sur l’assiette fiscale : certains impôts sont encaissés sur la base d’une assiette correspondant à une année antérieure. Ainsi, les recettes d’IS de l’année t sont dépendantes des profits déclarés en t – 1. De même, l’IR dépend du revenu de l’année précédente. Le décalage entre la dynamique du PIB et de celle des profits ou du RDB peut casser le lien entre PIB et recettes ;
- l’incitation à éviter l’impôt peut évoluer dans le cycle : notamment, en présence des contraintes de liquidité, les agents privés (entreprises ou ménages) peuvent avoir une incitation différente dans le cycle à sous-déclarer leurs impôts. Ainsi, la sous-déclaration de certaines assiettes fiscales peut être corrélée avec le cycle.
Évaluer le lien existant entre l’évolution des recettes et celle du PIB est difficile du fait des changements législatifs introduits chaque année. Mais il est possible d’appréhender les nouvelles mesures fiscales à partir des évaluations réalisées par le gouvernement dans chaque projet de loi de finances. Toutefois, ces évaluations sont faites a priori, réalisées hors modifications des comportements, ce qui est une hypothèse trop forte. Elles sont aussi fondées sur le calcul d’une évolution contrefactuelle sans modification de la législation. La construction d’un tel scénario garde une part d’arbitraire. Par exemple, les recettes contrefactuelles d’IR sont calculées à partir d’une indexation sur l’inflation du barème. Avec une croissance de long terme non nulle, ceci pousse à augmenter structurellement la part de l’IR dans le PIB. Ce contrefactuel peut donc être critiqué et une indexation sur la croissance nominale du PIB de long terme ou sur la croissance du RDB serait plus adéquate.
Selon nos calculs, les mesures nouvelles discrétionnaires prises auraient dû diminuer le taux de PO de 0,5 point entre 1998 et 2017 (graphique 49). Or, le taux de PO a augmenté de 2,1 points au cours cette période. Ceci peut suggérer que l’élasticité des PO – hors nouvelles mesures – est supérieure à l’unité.
Pour calculer l’élasticité annuelle sur la période 1998-2017, nous suivons la méthodologie de Lafféter et Pak (2015) [41]. Cette méthode nécessite de choisir une date de référence (notée T). À la suite des auteurs nous avons choisi la dernière date disponible. À partir de cette date nous construisons la série de la façon suivante :
Avec cette méthode, l’évolution des recettes corrigées des mesures discrétionnaires de 2017 est évaluée à +4,6 % alors que la croissance du PIB nominal s’est établie – d’après les comptes nationaux trimestriels – à +2,8 %. Ceci suggère une élasticité des PO à 1,6 au cours de l’année, largement supérieure à l’unité.
Une élasticité unitaire peut servir de base pour la prévision mais manque d’information cyclique pertinente.
La série ESt, purgée des effets des changements législatifs, peut être mobilisée pour évaluer le lien existant entre l’évolution spontanée des PO et le cycle de l’activité économique. À cette fin, le modèle de base estimé économétriquement est le suivant :
Évolution annuelle du taux de PO
Évolution annuelle du taux de PO
Résultats économétriques (1999-2016)
Variable | (1) | (2) | (3) |
---|---|---|---|
Δ PIB | 1,01*** [0,10] | 0,94*** [0,12] | 1,21*** [0,14] |
Δ PIB x (Δ OG > 0) | 0,11 0,19 | ||
Δ PIB x (OG > 0) | -0,41*** [0,16] | ||
Test élasticité PO (β) = 1 | 0,01 [p-v: 0,93] | 0,26 [p-v: 0,62] | 2,14 [p-v: 0,16] |
R2 | 0,82 | 0,83 | 0,86 |
RMSE | 1,6 % | 1,6 % | 1,4 % |
N | 19 | 19 | 19 |
Élasticité prévue pour 2017 | 1,0 | 1,0 | 1,2 |
Élasticité réalisée | 1,6 | 1,6 | 1,6 |
% expliqué | 63 % | 64 % | 76 % |
Déficit prévu pour 2018 | 2,4 | 2,4 | 2,1 |
Résultats économétriques (1999-2016)
Note : Les valeurs entre crochets sont les erreurs standards des coefficients. ***, ** et * correspondent à des p-values inférieures à 1 %, 5 % et 10 % respectivement.L’évaluation de l’output-gap retenue dans ces estimations est celle de l’OFCE. Les résultats qualitatifs restent identiques avec l’évaluation réalisée par l’OCDE.
Enfin, la spécification (3) couple la croissance du PIB nominal avec le niveau de l’output-gap. Lorsque celui-ci est négatif (situation de bas de cycle), l’élasticité des recettes serait sensiblement supérieure à l’unité. Ainsi, l’élasticité estimée s’établit à 1,21. Avec un output gap positif (situation de haut de cycle), l’élasticité estimée s’établit à 0,79. En comparant les trois spécifications par leur RMSE (ou leur R2), la troisième spécification est celle qui aurait minimisé les erreurs de prévision au cours de la période.
Sur la base d’une élasticité prévue à 1,21, l’erreur de prévision de recettes aurait été de l’ordre de 9 milliards d’euros (0,4 point de PIB). Ainsi, ce dernier modèle, tenant compte du cycle économique, aurait permis une meilleure prévision des recettes publiques mais il n’aurait pas éliminé intégralement l’erreur de prévision [43].
Les erreurs qui subsistent peuvent être de différente nature. D’une part, la croissance du PIB nominal issue des comptes trimestriels peut être revue à la hausse lors de la publication à venir des comptes annuels, des comptes semi-définitifs et définitifs au cours des prochaines années. D’autre part, le PIB nominal n’est qu’une approximation de l’assiette fiscale des PO. En soi, plus que la croissance nominale, ce qui importe c’est la composition de cette croissance. Ainsi, les cotisations sociales dépendent surtout de la masse salariale, l’impôt sur le revenu dépend du RDB nominal (et de sa distribution au sein des ménages), la TVA de la consommation, les taxes sur le tabac de la consommation de tabac, etc. D’ailleurs il peut exister un décalage temporel entre la taxation et l’assiette fiscale de référence. Ceci est notamment vrai pour l’IS et l’IR.
En 2018, l’output gap resterait ouvert en France et la reprise devrait se poursuivre. Dans ce contexte, les modèles estimés (tableau 14) laissent entrevoir un aléa haussier sur le niveau des recettes, en lien avec une élasticité spontanée des recettes fiscales supérieure à l’unité. Ainsi, dans notre scénario de base – prudent – où l’élasticité des PO serait unitaire, le déficit nominal devrait s’établir à 2,4 %, en amélioration de 0,2 point par rapport à son niveau de 2017. En revanche, si l’élasticité reste à un niveau élevé de 1,2, un surplus de recettes de 6 milliards peut être attendu (0,3 point) et le déficit s’établirait ainsi à un niveau de 2,1 %.
Moyenne annuelle, en % | ||||
---|---|---|---|---|
2016 | 2017 | 2018 | 2019 | |
En % de variation aux prix chaînés : | ||||
| 1,1 | 2,0 | 2,0 | 2,1 |
| 4,2 | 4,1 | 3,5 | 3,6 |
Dépenses de consommation des ménages | 2,1 | 1,3 | 1,5 | 2,2 |
FBCF totale, dont : | 2,7 | 3,8 | 3,6 | 3,1 |
| 3,4 | 4,4 | 4,3 | 3,5 |
| 2,4 | 5,3 | 2,5 | 1,3 |
| -0,1 | -1,0 | 2,6 | 4,0 |
Exportations | 1,9 | 3,3 | 4,6 | 3,6 |
Contribution des stocks à la croissance, en % | -0,1 | 0,4 | -0,1 | 0,0 |
Demande intérieure hors stocks | 2,0 | 1,9 | 2,0 | 2,1 |
Compte des ménages, en termes réels % | ||||
Salaires bruts | 2,1 | 2,3 | 1,2 | 2,0 |
Salaires nets | 2,0 | 2,4 | 3,3 | 2,6 |
Prestations sociales | 1,9 | 0,7 | 0,0 | 0,1 |
Prélèvements sociaux et fiscaux | 1,6 | 2,3 | 0,3 | -0,8 |
Revenu disponible | 1,8 | 1,5 | 1,6 | 2,4 |
Taux d’épargne, en % du RDB | 14,0 | 14,2 | 14,3 | 14,4 |
Déflateur de la consommation | ||||
| 0,2 | 1,0 | 1,4 | 1,8 |
| -0,1 | 0,9 | 1,4 | 1,6 |
Compte des sociétés non-financières, en % | ||||
Taux de marge | 31,8 | 31,7 | 32,4 | 34,0 |
Taux d’épargne | 19,7 | 19,6 | 20,2 | 21,8 |
Taux d’investissement (en volume) | 21,4 | 21,8 | 22,1 | 22,3 |
Taux d’autofinancement (hors stock) | 84,3 | 82,1 | 85,0 | 91,4 |
Compte des administrations | ||||
Taux de prélèvement obligatoire, en % du PIB | 44,6 | 45,4 | 45,1 | 44,1 |
Solde public au sens de Maastricht, % du PIB | -3,4 | -2,6 | -2,4 | -2,5 |
Emploi salarié, en moyenne annuelle, en % | 0,8 | 1,1 | 0,8 | 0,9 |
Emploi total, en moyenne annuelle, en % | 0,7 | 1,0 | 0,7 | 0,9 |
Chômage BIT, en millions | 2,807 | 2,631 | 2,478 | 2,361 |
Taux de chômage BIT moyen, en % | 9,8 | 9,1 | 8,5 | 8,1 |
Taux de change $/z | 1,1 | 1,1 | 1,2 | 1,3 |
Taux d’intérêt à court terme1 | -0,3 | -0,3 | -0,3 | 0,0 |
Taux d’intérêt à long terme2 | 0,5 | 0,8 | 0,7 | 1,1 |
Emploi et productivité par habitant
Emploi et productivité par habitant
Taux d’intérêt et taux de change(1),(2)
Taux d’intérêt et taux de change(1),(2)
(1) Taux PIBOR puis EURIBOR à 3 mois.(2) Taux des OAT à 10 ans.
Notes
-
[*]
Cette prévision a été réalisée à l’aide du modèle trimestriel de l’économie française, e-mod.fr, par une équipe dirigée par Mathieu Plane, composée de Bruno Ducoudré, Pierre Madec, Hervé Péléraux et Raul Sampognaro. La prévision tient compte des informations disponibles à la fin mars 2018 et intègre les comptes nationaux trimestriels du quatrième trimestre 2017.
-
[1]
Voir par exemple Heyer É., Péléraux H., « Reprise sous tension ? », Lettre de l’OFCE, n° 175, mai 1998.
-
[2]
Bruno Ducoudré et Éric Heyer, « Baisse de l’euro et désinflation compétitive : quel pays en profitera le plus ? », Revue de l’OFCE, n° 136, octobre 2014.
-
[3]
La croissance de long terme considérée ici n’est pas la croissance potentielle estimée par ses déterminants structurels au moyen d’une fonction de production, mais la moyenne du taux de croissance du PIB sur l’intervalle de temps considéré telle qu’elle ressort de l’estimation avec des régresseurs centrés-réduits. Des ruptures de cette croissance de long terme ont été introduites pour répliquer le ralentissement de la croissance potentielle mais en évidence par d’autres méthodes d’estimation.
-
[4]
Pour plus de détails, voir P. Madec, M. Plane et R. Sampognaro (2018) « Pas d’austérité mais des inégalités », Document de travail de l’OFCE, n° 2018-01.
-
[5]
« Budget 2018 : pas d’austérité mais des inégalités », OFCE Policy brief n° 30, janvier 2018.
-
[6]
Selon notre estimation, une hausse de 1 point de taux de profit conduit à une amélioration de la FBCF de 1,5 % à long terme (au bout de dix ans). À peine plus de 10 % de l’effet total se fait sentir la première année et la moitié de l’effet total est réalisé au bout de deux ans et demi.
-
[7]
Voir notamment B. Ducoudré, « 2018 : baisse du chômage non garantie », Blog de l’OFCE, décembre 2017.
-
[8]
Voir étude spéciale de la prévision d’octobre 2017 : « Quel nouveau sentier de croissance de la productivité du travail ? Une analyse pour six grands pays développés », Revue de l’OFCE, n° 152.
-
[9]
Les politiques de baisse du coût du travail (le CICE, puis le premier volet du Pacte de responsabilité portant sur les « bas salaires »), qui enrichissent la croissance en emplois, ont abaissé temporairement la tendance de productivité, de l’ordre de 0,2 point en 2014, 0,4 point en 2015 et 2016 puis 0,5 point en 2017.
-
[10]
La mesure, décidée par le gouvernement précédent dans le cadre du Plan d’urgence pour l’emploi, consistait en une prime temporaire à l’employeur pour les embauches de salariés dont les salaires sont compris entre 1 et 1,3 SMIC, là où l’élasticité du coût du travail à l’emploi est la plus forte. La prime à l’embauche concernait toute embauche de plus de 6 mois ayant lieu en 2016 et jusqu’au 30 juin 2017 dans les entreprises de moins de 250 salariés. Durant les deux premières années du contrat, l’embauche donne droit à une prime trimestrielle de 500 euros, soit 4 000 euros au maximum.
-
[11]
Pour près de 30 000 emplois.
-
[12]
Le calcul de l’élasticité macroéconomique de la mesure s’appuie sur une élasticité moyenne de l’emploi au coût du travail de 0,3 (cf. Ducoudré et Plane, 2015, « Les demandes de facteurs de production en France. Estimation et analyse des effets de la crise », Revue de l’OFCE, n° 142) et intègre les effets d’assiette liés au profil d’allègement des mesures incluses dans le Pacte de responsabilité (cf. Bock Lissot et Ozil, 2015, « Matis : une maquette d’évaluation des effets sur l’emploi de variations du coût du travail », Documents de travail de la DG Trésor, n° 2015/02).
-
[13]
Voir Ducoudré, 2017, « Évaluation du remplacement du CICE par une baisse des cotisations sociales patronales », OFCE Policy brief, n° 20, 6 juillet.
-
[14]
Pour rappel, l’État devra reverser aux entreprises 18,9 milliards d’euros par an en moyenne pour le CICE sur la période 2016-2017, 4,5 milliards par an pour les allègements sur les bas salaires sur la période 2016-2017 et 3,4 puis 4,5 milliards d’euros sur la période 2016-2017 pour l’allègement uniforme entre 1,6 et 3,5 SMIC. Ces transferts sont financés aux deux tiers par des économies sur la dépense publique et pour un tiers par une hausse des prélèvements fiscaux.
-
[15]
Cf. circulaire N° DGEFP/SDPAE/MIP/MPP/2018/11 du 11 janvier 2018. Les PEC ciblent les « personnes sans emploi rencontrant des difficultés sociales et professionnelles particulières d’accès à l’emploi ». Ils doivent faire l’objet d’un accompagnement renforcé, de l’acquisition de compétences et d’expérience professionnelle avec un objectif d’insertion professionnelle.
-
[16]
Pour plus de détails, voir « Les contrats aidés : quels objectifs, quel bilan ? », Dares Analyses, n° 21, mars 2017.
-
[17]
Suivant le PLF 2018, l’exonération de cotisations sociales « Aide au chômeur créant ou reprenant une entreprise » (ACCRE) sera étendue dès 2019 à l’ensemble des travailleurs indépendants qui créent ou reprennent une activité, pour un coût de 200 millions d’euros et pourrait bénéficier à terme à 350 000 créateurs ou repreneurs d’entreprise supplémentaires.
-
[18]
Les allègements supplémentaires rendraient ces dispositifs non incitatifs.
-
[19]
Cet effet pourrait toutefois être négligeable. Cf. Redor, D. « L’aide à la création d’entreprises a-t-elle un impact sur leur survie ? Une évaluation pour quatre cohortes d’entreprises créées par des chômeurs en France », Économie et Statistique, n° 493, 2017.
-
[20]
L’effet de la formation sur l’emploi est calculé en appliquant une élasticité de retour à l’emploi de 0,07 sur le différentiel d’entrées en formation par rapport aux entrées constatées en 2015 (660 000 entrées). Cf. Card, D., Kluve, J., & Weber, A. (2017), « What works? A meta analysis of recent active labor market program evaluations », Journal of the European Economic Association, jvx028. L’effet de la Garantie jeunes sur l’emploi est calculé en retenant un impact de 9 % sur le taux d’emploi durable (CDI et CDD de 6 mois et plus hors emplois aidés) sur le nombre de jeunes entrant dans le dispositif chaque année. Cf. tableau 2.2, p. 22 dans Dares, 2016 : « Premiers résultats d’évaluation statistique de l’impact de la Garantie jeunes – Annexe 5 », novembre.
-
[21]
La population active potentielle est calculée à partir des projections de population active de l’Insee, auxquelles sont ajoutés les effets de flexion et les effets des formations sur les comportements d’activité.
-
[22]
Cf. Koubi, M., & Marrakchi, A. (2017), Projections de la population active à l’horizon 2070, Insee, Document de travail, n° F1702.
-
[23]
Le défaut de bouclage provient de l’utilisation de sources différentes pour décomposer la population active entre emploi (source Comptabilité nationale) et chômage (source Enquête emploi). Ce défaut de bouclage est nul en moyenne sur la période 2002-2016.
-
[24]
Qui tablait sur un déficit nominal de 2,8 % du PIB.
-
[25]
Deux mesures de l’orientation budgétaire sont traditionnellement utilisées : la variation du solde structurel (primaire) et l’effort structurel (primaire). La principale différence entre les deux mesures provient de la comptabilisation de l’effort budgétaire en recettes. Ainsi, l’effort structurel tient compte exclusivement de l’évaluation ex-ante des nouvelles mesures discrétionnaires tandis que la variation du solde structurel tient compte de l’évolution ex-post du taux de prélèvements obligatoires. Ainsi, cette mesure inclut dans la mesure des effets d’assiette ou les gains ou pertes fiscales liées à une élasticité des recettes à l’activité différente de l’unité. Dans certaines années, comme en 2017, ces deux mesures peuvent différer sensiblement.
-
[26]
Les règles du volet préventif fixent des objectifs en termes d’évolution du solde structurel et non d’effort structurel. Toutefois, comme on a supposé une élasticité unitaire, ces deux mesures ne divergent pas en prévision. Le maintien d’une élasticité des recettes supérieure à l’unité pourrait diminuer l’écart vis-à-vis des règles européennes.
-
[27]
Plus exactement les règles de la comptabilité nationale obligent à inclure les créances de CICE dont l’administration prend connaissance au cours de l’année 2019, lors de la déclaration d’impôt sur les sociétés correspondant à l’année 2018. L’essentiel des nouvelles créances déclarées correspondra à celles générées en 2018, mais un reliquat des années 2016 et 2017 peut rester.
-
[28]
Au sens des règles de la comptabilité nationale, le CICE est comptabilisé comme une hausse de la dépense publique (sur la totalité de la créance déclarée) et non comme une baisse de la fiscalité sur les entreprises (sur le montant de la créance effectivement encaissée). Ceci brouille l’analyse économique du dispositif. Pour réconcilier l’analyse économique de l’analyse budgétaire il est nécessaire d’ajouter une clé de passage qui tient compte notamment de l’écart entre les créances déclarées (qui impactent le solde public au sens de Maastricht) et les créances dépensées par l’État (qui impactent le solde public au sens de la trésorerie publique). Ainsi, avec la montée en charge du dispositif et le décalage entre la déclaration des créances et leur encaissement, la clé de passage avait tendance à augmenter le solde public en points de PIB. Avec l’arrivée à maturité du dispositif, la clé de passage en diminuant contribue à la réduction du déficit public en points de PIB.
-
[29]
Cela correspond principalement aux acquisitions nettes d’actif telles que les prises de participation ou les prêts à des entités hors du secteur des administrations publiques.
-
[30]
L’impact serait de 4,3 milliards avec la baisse de cotisations des indépendants et de 3,5 milliards si l’on tient compte de la prime aux fonctionnaires pour compenser la hausse de CSG.
-
[31]
Cet effort est calculé par rapport à la croissance potentielle, évaluée à +1,2 %.
-
[32]
Entre 2014 et 2017, l’effort moyen annuel d’économies en dépenses aurait été de 0,3 point de PIB.
-
[33]
Le détail des mesures a été explicité dans Madec P., M. Plane et R. Sampognaro (2018), « Budget 2018 : pas d’austérité mais des inégalités », Sciences Po OFCE, Working paper, n° 2018/01/15 et dans OFCE (2017), « France : Croissance en héritage. Perspectives 2017-2019 pour l’économie française », Revue de l’OFCE, n° 152, octobre 2017.
-
[34]
L’OMT français s’établirait à -0,4 point de déficit structurel et ne devrait pas être atteint avant 2023 selon le Programme de stabilité 2018-2022.
-
[35]
Cf. encadré 1, in OFCE, 2017, « La nouvelle Grande Modération ? Perspectives économiques 2017-2019 pour l’économie mondiale et la zone euro », Revue de l’OFCE, n° 152.
-
[36]
Référence à l’étude spéciale.
-
[37]
Voir Creel, Heyer et Plane (2011), « Petit précis de politique budgétaire par tous les temps : les multiplicateurs budgétaires au cours du cycle », Revue de l’OFCE, n° 176, pages 61-88, janvier 2011.
-
[38]
Bruno Ducoudré, 2017, « Évaluation du remplacement du CICE par une baisse des cotisations sociales patronales », OFCE, Policy brief n° 20, 6 juillet.
-
[39]
Dans un premier temps on peut considérer cette élasticité de long terme comme étant unitaire. La DG Trésor l’évalue à 1,04.
-
[40]
Princen S., G. Mourre, D. Paternoster et G-M Isbasoiu (2013), « Discretionary tax measures: pattern and impact on tax elasticities », European Economy – Economic Papers 2008 – 2015 499, Directorate General Economic and Financial Affairs (DG ECFIN), Commission européenne.
-
[41]
Lafféter Q. et M. Pak (2015), « Élasticités des recettes fiscales au cycle économique : étude de trois impôts sur la période 1979-2013 en France », Document de travail, INSEE, G. 2015/08.
-
[42]
Notre évaluation de l’output gap a été utilisée dans ces estimations. Par souci de robustesse, l’output gap de l’OCDE a aussi été utilisée (Perspectives Économiques, n° 102 de novembre 2017). Les résultats donnent les mêmes résultats qualitatifs.
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[43]
Les estimations réalisées avec l’output gap de l’OCDE aboutissent à des conclusions qualitativement identiques mais avec une plus forte sensibilité de l’élasticité des recettes au cycle. Ainsi, dans la spécification (3), l’élasticité des recettes aurait été prévue à 1,4 et l’erreur de prévision des recettes aurait été de l’ordre de 0,1 point de PIB.