Notes
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[1]
High school dropouts.
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[2]
Les taux d’activité et d’emploi sont issus des données de l’OCDE : www. oecd. org
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[3]
En 2006, le taux de chômage était de 8,6 % en France contre 3,8 % aux États-Unis, et 5,3 % en Suède.
-
[4]
World Values Survey, 2000.
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[5]
Au début des années 1960, dans les 3 pays les taux d’activité des hommes (25-54 ans) étaient proches de 96 %. La réduction de l’activité des hommes a été continue entre le milieu des années 1960 et 2006, elle s’est traduite par une baisse de plus de 5 points du taux d’activité aux États-Unis, contre un peu moins de 4 en Suède et 2 points en France.
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[6]
L’étude de Lombard porte sur la période 1975 à 1991.
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[7]
25 % des enfants âgés de moins de 18 ans vivent avec leur mère célibataire et leur taux de pauvreté est extrêmement élevé : 42 % contre 17 pour l’ensemble des familles avec enfants.
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[8]
Notons qu’en France les mères isolées sont particulièrement affectées par le chômage, ainsi leur taux d’activité (80 %) est sensiblement supérieur à leur taux d’emploi.
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[9]
Celles n’ayant pas le High School degree.
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[10]
Le taux d’emploi des mères isolées non qualifiées était en 1986 de 45,6 % ; en 1990 il atteignait 49,4 %, pour culminer à 73,1 % en 2000.
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[11]
90 % des bénéficiaires de l’AFDC recevaient également les Food Stamps. Les deux programmes représentaient en 1996 respectivement 23,7 et 25,5 milliards de dollars et constituaient le pilier de l’aide sociale américaine.
-
[12]
L’autre source d’impopularité de ces programmes sociaux tient au fait qu’ils auraient encouragé les naissances hors mariage : les jeunes femmes défavorisées auraient provoqué leur grossesse pour percevoir ces aides.
- [13]
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[14]
Il s’agit d’une définition élargie de l’activité, qui comprend l’emploi, la formation, les travaux d’intérêt généraux, …. Néanmoins, le type d’activité pris en compte a été sensiblement resserré avec la reconduction du programme en 2002.
-
[15]
Les États ont disposé d’une grande autonomie pour établir les modalités d’application du programme, ce qui explique la diversité des modalités d’application de la loi sur le territoire américain (Périvier, 2007).
-
[16]
Pour une revue complète de la littérature voir Blank, 2002.
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[17]
Ces chiffres, donnés par le U.S. Department of Labor, portent sur les femmes âgées de 25 à 64 ans.
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[18]
Un peu moins de 18 % des Américaines (7,8 % pour les hommes) sont à temps partiel contre 19 % des Suédoises (8,4 % pour les hommes).
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[19]
L’écart de taux de temps partiel entre les femmes sans enfant et celles avec deux enfants et plus est plus élevé aux États-Unis, avec plus de 13 points d’écart, qu’en France (11,8 points) et qu’en Suède (7,6 points).
-
[20]
De nombreuses mères suédoises ajustent leur temps travail à la marge et conservent un temps de travail proche du temps plein, elles ne sont donc pas comptabilisées dans les chiffres de l’OCDE sur le temps partiel.
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[21]
Notons que, alors que la baisse des taux d’emploi est plus marqué pour les femmes avec enfants que pour celles n’en ayant pas, les pères (- 1,9 points) ont été moins affecté que les hommes sans enfant (- 2,8 points) par le manque de création d’emplois. Ceci confirme le fait que la maternité pèse sur l’emploi des mères alors que la paternité renforce l’emploi des hommes.
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[22]
L’échantillon, représentatif au niveau national, comprend 2 tranches d’âge : les 28-40 ans et les 41-55 ans. Les niveaux de qualification sont les suivants : Graduate degree, professional degree ou high honors undergraduate degree.
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[23]
93 % des femmes qui se sont arrêtées de travailler souhaitent reprendre leur carrière, les trois quart d’entre elles y parviennent et seulement 40 % à temps plein. En moyenne les interruptions de carrière durent un peu plus de 2 ans et impliquent une perte de salaire d’environ 18 %.
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[24]
L’augmentation de la pénalité sur l’emploi des femmes engendrée par la présence d’un enfant n’est significative que lorsque le point de départ est l’année 2000 (une année atypique), mais sur la tranche 2001-2005 la tendance n’est plus significative (Boushey, 2008).
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[25]
Selon les auteurs, le taux de chômage est resté faible (autour de 5 %) car des millions de travailleurs ont quitté le marché du travail.
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[26]
Ceci s’est déjà produit lors de la Seconde Guerre mondiale, mais la tendance s’était retournée, les anciens soldats ayant bénéficié de la GI bill pour aller à l’université.
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[27]
Pourcentage de filles qui devraient changer d’orientation pour obtenir la parité dans toutes les filières. Un indice égal à 1 indique une totale ségrégation, les femmes et les hommes seraient chacun concentrés dans des filières différentes, un indice égal à 0 indique une distribution parfaitement égalitaire.
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[28]
L’âge moyen du mariage est passé de 23 ans pour les femmes nées en 1950 à 26,5 ans pour celles nées en 1965.
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[29]
Les chiffres donnés valent pour l’ensemble de la population active, exception faite du secteur agricole.
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[30]
Les pays du Nord ont une plus forte ségrégation professionnelle (ainsi que l’Allemagne et l’Autriche). La forte segmentation dans les pays nordiques s’explique par la traditionnelle concentration des femmes dans les secteurs de l’éducation, de la santé, dans les services sociaux, secteurs ayant permis le développement de l’activité des femmes.
-
[31]
Le terme « cadre » regroupe la catégorie professionnelle suivante : Management, business et financial (Census Bureau).
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[32]
Cette catégorie correspond à celle des « managers and professional ».
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[33]
En 1967, plus de 65 % des hommes diplômés exerçaient une profession libérale, en 1997 ils étaient 62 % (Black et Juhn, 2000).
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[34]
Parmi les couples dans lesquels les deux conjoints travaillent (http:// www. bls. gov).
- [35]
-
[36]
College graduates and professionals with advanced degrees.
-
[37]
L’écart entre les taux d’activité des femmes qualifiées et des non qualifiées (niveau d’étude inférieur au 2e cycle) est passé de 37,5 points en 1994 à 30 points de pourcentage en 2005 (OCDE, 2007).
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[38]
Les bad jobs n’offrent ni couverture maladie ni plan de retraite et sont assortis d’un salaire faible (Smith, 2007).
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[39]
Ce revenu correspond au revenu annuel disponible d’un parent isolé de deux enfants, qui travaille à mi-temps au salaire minimum après 12 mois de travail (au 1er janvier 2003).
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[40]
L’introduction du TANF est associé à une augmentation de 7,8 % de la probabilité de ne pas être couvertes par une assurance maladie pour les anciennes bénéficiaires de l’aide sociale, c’est-à-dire celles qui sont sorties du programme social en prenant un emploi.
-
[41]
Six mois après la sortie du Welfare, un tiers d’entre elles n’ont plus accès à aucune couverture maladie, seulement la moitié d’entre elles sont couvertes pas un programme public, et un an après leur sortie, moins d’un quart sont couvertes par Medicaid et la moitié n’a pas d’accès à une couverture maladie (Garett et Holahan, 2000).
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[42]
En particulier, certaines bénéficiaires pensent à tort que la durée limitée de perception du TANF s’applique également au programme Medicaid.
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[43]
Pourtant une loi fédérale datant de 1988 (Transitional Medicaid Assistance) permet de lisser dans le temps la perte du droit à la Medicaid due à une augmentation des revenus en garantissant une période de 6 à 12 mois d’éligibilité indépendamment des revenus de la famille (Garett et Holahan, 2000).
-
[44]
Selon l’Urban Institute, en 2002, 42 % des bénéficiaires de l’aide sociale n’avaient pas le bac, 35 % se déclaraient en mauvaise santé, et 30 % n’avaient pas travaillé récemment (hhttp:// www. urban. org/ UploadedPDF/ 900980_welfarereform.pdf).
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[45]
Au total 20 % des anciens bénéficiaires du Welfare sont sans emploi, inéligibles à toute aides sociales et ne profitent des revenus d’un conjoint (http:// www. urban. org/ toolkit/ issues/ welfarereform. cfm#findings).
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[46]
Le salaire horaire minimum a baissé de 30 % en 1979 et 1989, passant de 2,90 dollars à 2,01dollars (en dollars1979).
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[47]
Les trois quarts de cet écart sont inexpliqués et relèvent soit d’une discrimination envers les personnes à temps partiel, soit parce que les caractéristiques non observables (comme par exemple la motivation) diffèrent systématiquement entre les travailleurs à temps partiel et ceux à temps plein.
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[48]
A partir du National Longitudinal Survey of Youth, 1982-1993.
-
[49]
Le Family and Medical Leave Act de 1993 a instauré un congé maternité qui garantit pendant 12 semaines la protection de l’emploi, mais il ne s’applique qu’aux salariées de grandes entreprises, au total seulement la moitié des salariées sont couvertes par ce congé ; il n’est rémunéré que très rarement, cela dépend à la fois de l’État et de l’employeur. Aussi, les femmes combinent-elles souvent des congés maladies sick leave, des congés pour incapacité short-term disability leave, jours de congé et des congés sans solde. Voir : http:// mchb. hrsa. gov/ whusa_05/ pages/ 0304ml. htm
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[50]
La loi Auroux a néanmoins introduit en 1982 l’obligation pour les entreprises de négocier les salaires une fois par an.
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[51]
Le salaire horaire minimum légal est plus faible aux États-Unis qu’en France : 5,85 dollars au niveau fédéral au 1er janvier 2008, soit un peu moins de 4 euros, contre 8,44 euros brut de l’heure en France. Les différences entre les États sont importantes puisque certains États ne garantissent aucun salaire minimum (Alabama ou Louisiane) et d’autres offrent un salaire minimum de 8 dollars (soit 5,4 euros, comme dans l’État du Massachussetts ou de Californie, http:// www. dol. gov/ esa/ minwage/ america. htm). En Suède, il n’existe pas de minimum légal, mais plus de 80 % des salariés sont syndiqués et 90 % occupent un poste encadré par une convention collective, qui définit les salaires. Le salaire minimum serait autour de 7,5 euros de l’heure. Néanmoins aux États-Unis moins de 1,5 % des salariés perçoivent le salaire minimum contre 15,6 % en France (Eurostat, 2006).
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[52]
Dans la pratique, les employés d’entreprises moyennes ou grandes bénéficient de 10 jours de congés payés par an en moyenne la première année, pour atteindre 14 jours après 5 ans d’ancienneté et 17 après 10 ans. Les travailleurs font valoir plus de 90 % de leurs droits aux congés, ce chiffre est plus élevé pour les femmes et les non-qualifiés.
-
[53]
L’étude portait sur 68 000 établissements. Notons que la demande d’emplois d’individus noirs relativement à celle d’individus blancs a cru, quant à elle, de 9 %.
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[54]
Pour une revue de littérature voir Myers, 2005.
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[55]
Le vote en 1996 de la Proposition 209, applicable en janvier 1997, a engendré la suppression de tous les programmes d’action positive dans l’éducation et le recrutement dans la fonction publique. Myers (2005) utilise cette modification législative pour comparer le marché du travail en Californie et dans le reste du pays en appliquant une méthode de triple différence.
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[56]
Pour l’OCDE, une personne travaille à temps partiel si elle travaille moins de 30 heures dans son emploi principal, alors que Eurostat retient la perception qu’ont les personnes interrogées lors de l’Enquête sur les forces travail sur la nature de leur travail. L’utilisation d’un seuil d’heures permet selon l’OCDE de limiter l’impact des emplois qui se trouvent à la limite entre temps partiel et temps plein dans les comparaisons internationales (OCDE, 1999).
- [57]
1Aux États-Unis, comme dans beaucoup de pays développés, la participation des femmes au marché du travail a fortement augmenté durant les dernières décennies. Si au cours des années 1950 et 1960 les femmes qui travaillaient étaient le plus souvent des femmes célibataires sans enfant, les années 1970 et surtout 1980 ont vu les femmes mariées avec et sans enfants entrer massivement dans la sphère économique alimentant ainsi la croissance de l’emploi féminin. Puis l’activité des mères isolées a pris le relais durant la décennie suivante. Dès lors, les États-Unis se sont hissés à des niveaux d’activité féminine proches de ceux atteints par les pays leaders en Europe (Lewis, 2006). Néanmoins, la récession de 2001 a été suivie d’une tendance à la baisse des taux d’activité en général et de celui des femmes en particulier.
2L’objet de cet article est de décrire les transformations de la position des femmes sur le marché du travail aux États-Unis tant sous l’angle quantitatif que qualitatif, en s’appuyant sur la littérature existante. Ces évolutions sont replacées dans leur contexte socio-économique et analysées à la lumière des différentes réformes du système fiscalo-social américain, qui ont fortement marqué l’activité des femmes. Les résultats sont mis en perspective avec les performances de la France et de la Suède, ce dernier pays faisant référence en matière d’égalité entre les sexes sur le marché du travail et dans la société en général. La première section dresse un tableau de l’évolution de l’activité des femmes. La seconde présente les caractéristiques générales des emplois auxquels les Américaines accèdent.
3Globalement, les inégalités entre les femmes et les hommes dans la sphère économique se sont fortement résorbées sur une longue période. Mais en moyenne, elles restent plus marquées qu’en Suède et qu’en France, même si les Américaines les plus qualifiées bénéficient d’un traitement plus favorable du point de vue du déroulement de carrière que leurs homologues françaises et suédoises. Enfin, deux traits marquants ressortent de cette étude : d’une part, la réduction moyenne des inégalités entre les sexes aux États-Unis s’est appuyée sur l’explosion des inégalités sociales à partir des années 1980 ; d’autre part, cette réduction des inégalités entre les sexes ne concerne pas toutes les femmes : pour les moins qualifiées les améliorations sont modestes, voire inexistantes sur certains points, et donc parallèlement, les inégalités entre les femmes qualifiées et celles n’ayant pas de diplôme ont augmenté.
1 – La participation des Américaines au marché du travail depuis 40 ans
1.1 – La tendance générale
1.1.1 – L’entrée des femmes dans l’activité
4À partir des années 1960, les États-Unis ont vu arriver en masse les femmes sur le marché du travail, avec quelques années d’avance sur les pays européens, à l’exception des pays nordiques et de la France. Le taux d’activité des femmes âgées de 15 à 64 ans est passé de 44 % en 1965 à 64 % en 1985 pour finalement atteindre un point culminant en 2000 avec 72,5 %. Cette tendance générale cache de grandes disparités selon le niveau de qualification. Le taux d’activité des femmes qualifiées a augmenté de presque 30 points entre 1970 et 1995, mais celui des femmes sans diplôme n’a cru que de seulement 4 points sur cette même période (Blau, 1998). Ainsi, alors qu’actuellement plus de 8 femmes diplômées de l’enseignement supérieur sur 10 sont actives, un peu moins de la moitié le sont chez celles n’ayant pas l’équivalent du bac [1] ; ces dernières sont plus actives en France et en Suède, avec des taux d’activité de respectivement 58,4 % et 62,4 % (OCDE, 2008). L’écart d’activité entre femmes qualifiées et non qualifiées est donc sensiblement plus marqué aux États-Unis qu’en Suède et qu’en France (Evertsson, England Hermsen et Cotter, 2007). Jusqu’au milieu des années 1990, l’activité des femmes n’ayant pas le bac aura peu progressé au regard de celle des autres femmes aux États-Unis.
5La participation de l’ensemble des femmes au marché du travail est désormais comparable au niveau atteint en Suède, pays dans lequel 77 % des femmes sont actives. En outre, les Américaines sont plus actives que les Françaises, et ceci depuis déjà 40 ans (69,3 % contre 63,9 % en 2006, graphique 1). Mais ces tendances concernent les personnes âgées de 15 à 64 ans, tranche d’âge la plus large lorsque l’on s’intéresse à l’activité. Or, le choix de cette population masque une spécificité française indépendante de la question du genre. En effet, en France, les jeunes, femmes et hommes (15-25 ans), sont moins actifs qu’aux États-Unis ou qu’en Suède, il en est de même pour les personnes âgées de plus de 55 ans. Ainsi, l’écart de taux d’activité entre les Françaises et les Américaines ne reflète pas une situation plus « égalitaire » aux États-Unis, mais des entrées plus tardives dans la vie active et des sorties plus précoces du marché du travail en France, ce qui vaut pour les deux sexes. Sur la tranche d’âge 25 à 54 ans, les taux d’activité des femmes en France et aux États-Unis connaissent une évolution similaire entre 1960 et le début des années 2000, avec des niveaux proches. En 2006, les Françaises sont plus actives que les Américaines, 81 % contre 75,5 %, et moins que les Suédoises (86,2 %, graphique 2) [2].
Évolution du taux d’activité des femmes aux États-Unis, en France et en Suède entre 1960 et 2006 (personnes âgées de 15 à 64 ans)
Évolution du taux d’activité des femmes aux États-Unis, en France et en Suède entre 1960 et 2006 (personnes âgées de 15 à 64 ans)
Évolution du taux d’activité des femmes aux États-Unis, en France et en Suède entre 1960 et 2006 (personnes âgées de 25 à 54 ans)
Évolution du taux d’activité des femmes aux États-Unis, en France et en Suède entre 1960 et 2006 (personnes âgées de 25 à 54 ans)
6Si les Américaines âgées de 25 à 54 ans sont moins actives que les Françaises, elles sont néanmoins presque aussi souvent en emploi. Le marché du travail leur étant plus favorable. Leur taux d’emploi est de 72,5 % contre 73,3 % pour les Françaises, et 81,5 % pour les Suédoises. Le chômage en France affecte plus les femmes que les hommes, ce qui n’est pas le cas dans les deux autres pays. Depuis le milieu des années 1980, les taux de chômage des femmes et des hommes aux États-Unis sont très proches, alors qu’en Suède les femmes sont moins touchées par le chômage que les hommes (graphique 3). Certes, le niveau globalement élevé du chômage français [3] rend la comparaison difficile, et la tendance est à la réduction de l’écart de chômage entre les sexes. Il n’en reste pas moins que l’emploi des Françaises est encore aujourd’hui vu comme étant moins important que celui de leur conjoint : 22 % des Français estiment qu’en période de rareté d’emploi, l’homme est prioritaire face à l’emploi relativement à la femme, ils ne sont que 9,7 % aux États-Unis et 2,3 % en Suède [4].
7Parallèlement à l’augmentation de l’activité des femmes, celle des hommes a baissé aux États-Unis, leur taux d’activité passant de 95,7 % en 1965 à 90,6 % en 2006 (cette baisse est observée dans les deux autres pays mais elle y est moins marquée [5]). Ainsi, l’écart entre le taux d’activité des femmes et celui des hommes s’est-il considérablement réduit en un demi siècle, passant de près de 50 points à 15. Cette évolution est proche de celle qu’a connue la France alors qu’en Suède, pays dans lequel les femmes étaient déjà très actives dans les années 1960, la baisse de l’écart d’activité entre les sexes y a été plus précoce et plus rapide (graphique 4).
Évolution de l’écart de taux de chômage entre les sexes aux États-Unis, en France et en Suède entre 1960 et 2006 (taux de chômage des femmes – taux de chômage des hommes) (personnes âgées de 25 à 54 ans)
Évolution de l’écart de taux de chômage entre les sexes aux États-Unis, en France et en Suède entre 1960 et 2006 (taux de chômage des femmes – taux de chômage des hommes) (personnes âgées de 25 à 54 ans)
Évolution de l’écart de taux d’activité entre les hommes et les femmes aux États-Unis, en France et en Suède (taux d’activité des hommes – taux d’activité des femmes)(personnes âgées de 25 à 54 ans)
Évolution de l’écart de taux d’activité entre les hommes et les femmes aux États-Unis, en France et en Suède (taux d’activité des hommes – taux d’activité des femmes)(personnes âgées de 25 à 54 ans)
8L’entrée massive des femmes dans la sphère marchande s’explique par des modifications profondes de leur comportement. En 1968, lorsque l’on questionnait les jeunes femmes (âgées de 14 à 21 ans) sur leur avenir professionnel, 30 % d’entre elles espéraient être actives à l’âge de 35 ans, elles anticipaient leur avenir à la lumière du comportement de leurs mères, dont le taux d’activité était proche de 35 %. Pourtant, 65 % le seront effectivement. En 1975, 65% des jeunes femmes interrogées répondaient qu’elles seraient actives à 35 ans, soit plus du double du résultat constaté seulement 7 ans plus tôt, cette proportion s’élève à plus de 80 % au milieu des années 1980 (Goldin, 2004 ; Goldin, Katz et Kuziemko, 2006). À partir de la génération née en 1940, de plus en plus de femmes ont imposé leur désir de mener à bien une carrière, d’investir dans leur éducation. Pour cela, elles ont repoussé leur mise en couple et leur maternité, les deux événements n’étant plus conditionnés à leur arrêt d’activité. L’augmentation de la participation des femmes au marché du travail ne s’explique pas seulement par un effet de génération, c’est-à-dire par le fait que les nouvelles générations de femmes sont plus enclines à travailler, mais également par une modification du comportement des femmes appartenant à une même génération. Claudia Goldin (1990, 2004) qualifie ces bouleversements de Quiet Revolution.
9Certes, ceci n’est pas l’apanage des seules Américaines, les Suédoises l’ont mené bien avant elles alors que pour les Françaises le point de retournement aurait eu lieu avec la génération née après la Seconde Guerre mondiale, mais il est apparu pour à un niveau d’activité supérieur (graphique 1). Les France ont ceci de spécifique qu’ils ont cherché à encourager l’activité des femmes par des politiques d’affirmative action, instaurées dès les années 1960. Le principe repose sur l’instauration de quotas de places dans certains emplois ou filières de formation, réservées aux femmes parce qu’elles sont jugées discriminées du fait de leur sexe. Globalement, ces programmes ont affecté positivement l’emploi des femmes, même si les effets ont été modestes (voir encadré 1 en annexe).
1.1.2 – Le modèle traditionnel en déclin
10Depuis le début des années 1980, le taux d’emploi des femmes célibataires sans enfant aux France s’est stabilisé à un niveau élevé, autour de 77 % pour celles âgées de 20 à 65 ans (Blank, 2002). Pour autant, l’emploi des femmes a continué de progresser. Ceci s’explique par l’entrée des femmes mariées sur le marché du travail, en particulier celles ayant des enfants. Ce groupe est moins actif que celui des célibataires du fait de l’influence du modèle familial traditionnel : la mise en couple pèse déjà sur l’activité des femmes. Si ce modèle est encore en vigueur aujourd’hui, il s’est considérablement atténué depuis 30 ans. Le taux d’activité des femmes mariées est passé de 45 % en 1975 à 62 % en 1995, et celui des femmes mariées avec enfants de moins de 18 ans est passé 45 % à 70 % (Cohany et Sok, 2007). Le modèle de la mère au foyer s’estompe et l’entrée massive sur le marché du travail des mères en couple a été le moteur de la croissance de l’emploi féminin durant les années 1970 et 1980, et ceci de façon particulièrement marquée en fin de période. Durant la décennie suivante, la hausse s’est poursuivie mais à un rythme moins soutenu. Comment expliquer cette accélération de l’emploi des femmes en couple durant les années 1980 ?
11L’amélioration de leurs caractéristiques du point de vue de l’emploi, (niveau d’éducation, âge plus tardif de la maternité, nombre d’enfants, …) expliqueraient un cinquième de l’augmentation du taux d’emploi des mères de jeunes enfants en couple entre 1971 et 1990 (Leibowitz et Klerman, 1995). De plus, durant les années 1980, le salaire réel des femmes a fortement augmenté alors que celui des hommes a baissé. En théorie, ces deux tendances encouragent les femmes mariées à travailler : d’une part parce que le salaire auquel elles peuvent prétendre augmente et d’autre part elles compensent la perte de revenu pour le ménage due à la baisse du salaire de leur conjoint. Ces évolutions expliqueraient plus de 20 % de l’augmentation de l’emploi des femmes mariées ayant de jeunes enfants. L’amélioration de leurs conditions d’emploi (tendance à la hausse de leur salaire mais aussi réduction de leur taux de chômage) est l’élément ayant contribué le plus à l’augmentation de leur offre de travail, alors que la dégradation des conditions d’emploi de leur conjoint n’a eu que peu d’effet : durant les années 1970 et 1980, l’offre de travail des femmes serait devenue moins réactive à celui de leur conjoint (Leibowitz et Klerman, 1995 ; Juhn et Murphy, 1996). Les travaux de Blau et Kahn (2005) indiquent en effet que l’élasticité de leur offre de travail relativement au salaire de leur conjoint a baissé de plus de 40 % en valeur absolue durant cette même période, pour atteindre -0,2 en 2000. Ceci concerne tous les niveaux d’éducation et également les mères de jeunes enfants.
12En outre, selon Leibowitz et Klerman (1995), durant cette même période, les femmes mariées seraient devenues plus réactives aux évolutions de leur propre salaire. Ce résultat est contesté par Lombard (1999) [6] qui avance au contraire que les femmes réagiraient moins qu’auparavant à l’évolution de leur salaire potentiel. L’incitation au travail induite par les augmentations des salaires des femmes expliquerait moins de 15 % de l’accroissement de l’emploi des femmes mariées, quel que soit le niveau de qualification. Ces résultats sont corroborés par les travaux de Blau et Kahn (2005) qui indiquent que l’élasticité de l’offre de travail des femmes mariées par rapport à leur propre salaire s’est réduite de plus de 50 % entre 1980 et 2000 se rapprochant de celles des hommes et de celles des femmes célibataires. Elle est ainsi passée de 0,8 au début des années 1980 pour atteindre 0,6 dans les années 1990 puis 0,4 en 2000.
13Ainsi l’augmentation de l’activité des femmes en couple s’expliquerait surtout par un renforcement de l’attachement au marché du travail des femmes mariées avec ou sans enfant : les périodes d’emploi de ces femmes, y compris celles des mères de jeunes enfants, se sont sensiblement allongées entre 1975 et 1991 (Lombard, 1999). Pour Goldin (1990), cette modification de comportement reflète d’une part la volonté générale de ces femmes d’investir dans leur propre carrière, d’être indépendantes financièrement, et d’autre part le fait que les femmes en couple se comportent davantage comme des femmes célibataires par anticipation d’une potentielle séparation, le taux de divorce ayant sensiblement augmenté.
0.1.1 – L’adieu au maternalisme impulsé par le Workfare
14Si l’accroissement de la participation des femmes mariées a permis de soutenir l’augmentation de l’emploi des Américaines durant les années 1980, la décennie suivante a été celle du développement de l’emploi des mères isolées qui a connu une progression spectaculaire [7] et sur ce point les France se détachent des autres pays. Tradition-nellement ces femmes sont plus actives que les mères en couple, ce qui s’explique par le fait qu’elles ont impérativement besoin d’un salaire pour vivre. Mais aux France, les mères isolées n’ayant pas de qualification affichaient des taux d’activité particulièrement bas. Le milieu des années 1990 marque une rupture de tendance. Le taux d’emploi des mères isolées en général est passé de 72,5 % en 1992 à 87,5 % en 1999 (Eissa et Hoynes, 2005), dépassant celui qui prévaut en France (68 %) [8] ; celui des mères isolées non qualifiées [9] a augmenté de 11 points entre 1990 et 1997 et de 27,5 points entre 1986 et 2000 (Meyer, 2002) [10]. De même, les mères célibataires n’ayant jamais été mariées et qui avaient, jusqu’à il y peu, un taux d’activité faible autour de 55 %, sont depuis la fin des années 1990 actives à 70 % (Waldfogel, Danziger, Danziger et Seefeldt, 2001).
15Ces tendances sont liées à la réorientation générale de la politique sociale vers l’emploi pour tous. Ceci a concerné les individus qui travaillaient peu ou pas du tout, à savoir essentiellement les femmes en couple et les mères isolées en particulier. Ces dernières étaient les principales bénéficiaires des programmes sociaux issus des années 1930 : l’Aid to Families with Dependent Children (AFDC) et les Food Stamps (tickets d’alimentation) [11]. Jugées « inaptes » au travail, la collectivité devait leur venir en aide sans exiger d’elles une contrepartie en termes d’activité. Ces programmes ont engendré une impopularité croissante car ils ont été de plus en plus perçus comme un encouragement à l’inactivité pour ces femmes [12]. À partir du milieu des années 1980, les réformes successives du Welfare traditionnel vont chercher à inciter, puis à contraindre, les bénéficiaires des transferts sociaux à travailler, en agitant successivement la carotte et le bâton. C’est pourquoi Ann Shola Orloff (2006) voit dans ces transformations de l’aide sociale, et en particulier dans la réforme de l’AFDC, la fin du maternalisme aux France, c’est-à-dire la fin d’une protection particulière de la part de l’État dont les mères isolées bénéficiaient et qui les poussait à rester dépendantes de la collectivité.
16La première étape a consisté à encourager financièrement la reprise d’un emploi en renforçant les revenus issus de l’activité relativement à ceux issus du Welfare. La réforme fiscale de 1986 a ouvert cette voie en élargissant le programme Earned Income Tax Credit (EITC). Il s’agit d’un crédit d’impôt remboursable dès la première heure travaillée, son montant croît avec le salaire jusqu’à un certain seuil. Le but est de rendre la participation au marché du travail plus attractive. En 2001, il concernait 22,4 millions de familles, dont les trois quarts monoparentales, pour une dépense totale de 43,7 milliards de dollars [13]. En moyenne les mères isolées avec 2 enfants perçoivent 2 612 dollars par an (Eissa et Hoynes, 2005), soit un peu moins de 200 euros par mois (en parité de pouvoir d’achat France).
17La seconde étape a été celle de la « fin du Welfare tel que nous le connaissons » selon les termes de Bill Clinton. Le Personal Responsability and Work Opportunity Reconciliation Act (PRWORA), voté en 1996, a remplacé l’AFDC par le Temporary Assistance to Needy families (TANF). Désormais, les mères isolées pauvres doivent travailler [14] au moins 30 heures par semaine pour percevoir l’aide, et ce droit est limité à 60 mois par bénéficiaire. Certains États accordent plus de souplesse que d’autres quant aux traitements des mères selon l’âge des enfants et les exigences en termes de recherche d’emploi et de durée de travail varient considérablement d’un État à l’autre [15]. Les sanctions en cas de non-respect des critères d’activité vont de la suppression totale de l’aide à sa réduction de 25 % selon les États (Rowe et Giannarelli, 2006). Pour permettre aux mères isolées de travailler, le PRWORA a renforcé l’aide à la garde des jeunes enfants pour les familles les plus défavorisées en doublant l’enveloppe qui y est consacrée entre 1996 et 2005, pour atteindre 4,8 milliards de dollars. Malgré tout, la part du PIB que les France consacrent à la garde des jeunes enfants, y compris la préscolarisation (environ 0,6 %) reste bien en-deçà de celle consacrée par la France (1,2 %) ou par la Suède (1,25 %), (OCDE, 2007b).
18L’impact de ces réformes sur l’emploi des mères isolées est incontestable. De nombreux travaux ont évalué l’effet des différentes extensions de l’EITC (1986, 1990, 1993, 2001) sur l’offre de travail des femmes, soit en appliquant des méthodes quasi-expérimentales soit en utilisant des modèles structurels d’offre de travail. D’après Meyer et Rosenbaum (2001), l’EITC expliquerait 60 % des 8,5 points d’augmentation de taux d’emploi de ce groupe entre 1984 et 1996, les modifications du Welfare effectuées durant cette période ayant eu moins d’impact (entre 10 et 14 % de l’augmentation) [16]. Pour Looney (2005), l’instauration du programme TANF expliquerait 26 % de l’amélioration de l’emploi des mères isolées entre 1993 et 1999, l’EITC en expliquerait 22 % et la conjoncture économique favorable 17 %. Au final, « autonomie » et « emploi » sont devenus les maîtres mots de l’aide sociale outre-Atlantique (Périvier, 2007).
0.1 – Maternité et travail des femmes
0.1.1 – Le poids de la maternité sur l’emploi des mères
19Malgré la tendance à la hausse de l’emploi des femmes mariées, et des mères en particulier, la présence d’enfant est encore un facteur propice à l’inactivité des femmes aux France : le taux d’emploi des mères de 2 enfants est de 14 points inférieur à celui des femmes sans enfant, alors qu’en Suède les deux sont équivalents, autour de 82 % avec ou sans enfants (tableau 1). En 2000, à partir de 2 enfants, les mères américaines étaient plus souvent en emploi que les françaises (65 % contre 59 %). La naissance d’un enfant induit moins souvent un retrait d’activité pour la mère aux France qu’en France (dans 16 % des cas pour les Américaines contre 22 % pour les Françaises, OCDE, 2002). La Suède se détache nettement des deux autres pays concernant le taux d’emploi des mères, néanmoins les mères suédoises qui prennent un congé parental sont comptabilisées dans la population active ce qui biaise la comparabilité des données entre pays.
Taux d’emploi des femmes âgées de 25 à 54 ans et écart entre de taux d’emploi des hommes et des femmes selon le nombre d’enfants en 2000
Taux d’emploi des femmes âgées de 25 à 54 ans et écart entre de taux d’emploi des hommes et des femmes selon le nombre d’enfants en 2000
20L’arrivée d’un enfant augmente la charge de travail domestique, et les pères ne s’investissent pas dans la sphère familiale à la hauteur des besoins, ainsi l’inégal partage des tâches domestiques et parentales se renforce avec la maternité. Si, de ce point de vue, Européennes et Américaines évoluent dans des contextes socio-culturels comparables, les premières ont néanmoins à leur disposition des services publics, des droits sociaux qui leur permettent de gérer plus facilement les difficultés liées à l’articulation entre leur vie familiale et leur vie professionnelle (congés de maternité, congés parentaux, modes de garde subventionnés, …). Certes, ces dispositifs peuvent entériner une répartition sclérosée des rôles de chaque sexe, puisque ce sont les femmes qui les utilisent principalement : par exemple, en France, le congé parental rémunéré encourage les mères à interrompre leur activité professionnelle (voir par exemple, Piketty, 2005) et aucune incitation aux pères à y recourir n’a été introduite. Mais ils peuvent aussi leur permettre d’avancer et de progresser dans la sphère économique : par exemple l’accès à des modes de garde subventionnés de qualité favorise le maintien dans l’emploi des mères de jeunes enfants.
21Les écarts entre pays peuvent aussi provenir des différences dans les caractéristiques individuelles des mères : les taux d’emploi plus faibles des mères américaines pourraient en partie être liés au fait que les mères ont des caractéristiques plus défavorables à l’emploi aux États-Unis qu’en Suède par exemple.
22Aux États-Unis, en tenant compte des différences de caractéristiques entre les mères et les femmes sans enfant, les Américaines avec enfants ont un taux d’emploi de presque 13 points inférieur à celui des femmes sans enfant à charge (Boushey, 2008). Plus le nombre d’enfants est important, plus les taux d’activité des mères se réduit (tableau 2).
Taux d’activité des mères âgées de 15 à 44 ans aux États-Unis selon l’âge du plus jeune et le nombre d’enfants et le niveau d’étude de la mère en 2006
Taux d’activité des mères âgées de 15 à 44 ans aux États-Unis selon l’âge du plus jeune et le nombre d’enfants et le niveau d’étude de la mère en 2006
23Si le nombre d’enfants influence l’activité des mères, l’âge du benjamin est également décisif. Certes, le taux d’activité des mères, mariées ou non, ayant un enfant de moins de 6 ans est passé de 40 % dans les années 1970 à plus de 62 % aujourd’hui (graphique 5) [17] ; de même l’activité des mères de très jeunes enfants a sensiblement progressé pour atteindre 62 % pour les mères d’enfants de moins de 3 ans et 53 % pour celles ayant un enfant de moins d’un an. Néanmoins, le taux de participation au marché du travail des mères dont le plus jeune enfant a moins d’un an est de 26 points de pourcentage inférieur à celui des mères dont le plus jeune a plus de 12 ans (graphique 6). Ainsi, « avoir un enfant en bas âge » reste un facteur défavorable à l’emploi des mères, même si son effet a sensiblement baissé à partir de la fin des années 1990 : dans les années 1980 et 1990, « avoir un enfant âgé de 1 à 6 ans » réduisait les taux d’emploi des mères de plus de 25 points de pourcentage, toutes choses égales par ailleurs (Boushey, 2008 ; Juhn et Murphy, 1996), cet effet est d’environ 18 points en 2005 (Boushey, 2008). La persistance de cette pénalité liée à la maternité tient en partie aux carences en modes de garde des enfants non scolarisés et à leur coût élevé aux États-Unis qui les rend peu accessibles pour les familles les plus pauvres : les frais de garde représentent un quart du revenu des familles dont le revenu est inférieur au seuil de pauvreté et 37 % du salaire des mères appartenant à ces familles (Census Bureau, 2005).
Évolution du taux d’activité des mères selon l’âge du plus jeune enfant
Évolution du taux d’activité des mères selon l’âge du plus jeune enfant
Taux d’activité des mères âgées de 15 à 44 ans en fonction du nombre d’années suivant la dernière naissance aux États-Unis en 2004
Taux d’activité des mères âgées de 15 à 44 ans en fonction du nombre d’années suivant la dernière naissance aux États-Unis en 2004
0.1.2 – Temps partiel, activité et maternité
24Selon Lewis (2006) et Orloff (2006), contrairement à l’Europe, où le temps partiel a été et reste encore aujourd’hui le mode d’ajustement privilégié par les mères actives, il n’en serait rien aux États-Unis où les femmes travailleraient majoritairement à temps complet. Pourtant, selon l’OCDE (2007), les Américaines ne semblent pas particulièrement épargnées par le temps partiel (encadré 3 en annexe) [18]. Le temps partiel est, aux États-Unis comme ailleurs, typiquement féminin puisqu’il est pourvu à 67,8 % par des femmes, mais ceci est moins marqué qu’en France (plus de 79,4 % du temps partiel est féminin). Jusqu’au milieu des années 1990, le temps partiel était beaucoup plus concentré sur les femmes en Suède qu’aux États-Unis. Mais, la féminisation du temps partiel y a sensiblement baissé durant la dernière décennie (avec une baisse de presque 10 points par rapport à 1994, graphique 7), de telle sorte qu’elle atteint désormais un niveau (67,3 %) identique à celui qui prévaut outre-Atlantique, où elle est restée stable.
25Dans les trois pays, la maternité renforce le recours au temps partiel des femmes. Aux États-Unis, il semble que cela soit plus marqué qu’en Suède, mais moins qu’en France. À partir de 2 enfants, les mères américaines sont plus souvent à temps partiel court que les Suédoises, quant aux Françaises elles sont les plus affectées avec un taux de presque 32 % [19] (tableau 3). Mais, de nombreuses mères suédoises ajustent leur temps travail à la marge et conservent un temps de travail proche du temps plein, elles ne sont donc pas comptabilisées dans les chiffres de l’OCDE sur le temps partiel. Néanmoins, la baisse de la féminisation du temps partiel en Suède reflète en partie le fait que les pères suédois commencent à ajuster leur temps travail en ayant recours au temps partiel pour participer davantage aux tâches familiales. Ainsi depuis la fin des années 1990, les temps de travail des femmes et des hommes se sont rapprochés, les pères utilisant de plus en plus les congés parentaux (Daune-Richard et Nyberg, 2003)
Évolution de la part des femmes dans l’emploi à temps partiel (en % de l’emploi à temps partiel personnes âgées de 15 ans et plus)
Évolution de la part des femmes dans l’emploi à temps partiel (en % de l’emploi à temps partiel personnes âgées de 15 ans et plus)
Taux de temps partiel des personnes âgées de 25 à 54 ans, selon le sexe et le nombre d’enfants, exprimé en % de l’emploi total de chaque groupe en 2000
Taux de temps partiel des personnes âgées de 25 à 54 ans, selon le sexe et le nombre d’enfants, exprimé en % de l’emploi total de chaque groupe en 2000
26Le nombre d’enfant accentue le recours à une réduction du temps de travail : à partir de 2 enfants, les mères américaines sont plus souvent à temps partiel court que les Suédoises [20] (tableau 3). Toutes choses égales par ailleurs, l’effet marginal de la présence d’un enfant sur la probabilité d’être à temps partiel plutôt qu’à temps plein pour les femmes américaines est de 14 points de pourcentage (12 points si l’enfant a moins de 6 ans), cet effet sur le temps de travail aurait diminué légèrement à partir de la fin des années 1980 (Boushey, 2008). Avant la scolarisation des enfants, les mères américaines interrompent souvent leur activité, puis elles reprennent à temps partiel : « avoir un jeune enfant scolarisé » pèse sur le temps de travail des mères américaines (Anxo et alii, 2007).
27Que peut-on conclure malgré les difficultés statistiques de comparaison internationale concernant l’ampleur et la nature du temps partiel (encadré 3 en annexe) ? Dans les trois pays, il se concentre sur les femmes, et sur les mères en particulier. Il est plus développé en Suède qu’aux États-Unis, mais il y est plus long. En outre en Suède, la part des hommes dans le temps partiel est à la hausse, alors que dans les deux autres pays elle stagne, avec pour la France un niveau de féminisation du temps partiel plus élevé que dans les deux autres pays. Enfin, l’emploi à temps partiel aux États-Unis est associé à des salaires horaires plus faibles que ceux associés au travail à temps plein, ce qui n’est pas le cas en Suède (Bardasi et Gornick, 2008).
0.1.3 – Vers un retour de la mère au foyer ?
28La croissance de l’activité des femmes observée sur plusieurs décennies semble s’essouffler et depuis 2000, leur taux d’emploi commence à décliner. Cela s’inscrit dans une baisse généralisée du taux d’emploi qui vaut également pour les hommes (graphique 8). Les raisons de ce repli sont à la fois liées à la conjoncture économique et à des facteurs structurels : les départs à la retraite sont plus nombreux du fait du vieillissement de la population, les jeunes font des études plus longues, le nombre d’individus jugés inaptes à travailler est en augmentation depuis 2002. Enfin, le taux d’activité des nouvelles générations de femmes s’est stabilisé après 30 ans d’augmentation ininterrompue (Aaronson, Fallick, Figura, Pingle, et Wascher, 2006). Le point le plus haut a été atteint en 2000 avec un taux d’emploi de 69,6 % pour les femmes (graphique 8). En particulier, l’activité des femmes mariées, qui a été un élément clé de l’augmentation de l’activité féminine pendant les années 1980, a augmenté à un rythme plus lent dans les années 1990, pour décroître au début des années 2000. Ainsi, le taux d’emploi des femmes mariées avec enfants a atteint son maximum en 1997 avec environ 75 %, puis il a retrouvé son niveau du milieu des années 1980 en 2003, soit un peu moins de 70 % (Eissa et Hoynes, 2005).
29Les mères ont été les plus touchées par cette baisse d’activité : entre 1999 et 2003, les taux d’emploi des femmes âgées de 25 à 44 ans ont baissé de 4,4 points pour les femmes avec enfants et de 3,2 points pour celles sans enfant et de 2,5 points pour les hommes [21] (U. S. Department of Labor). Ce repli de l’activité des mères n’épargne pas les plus diplômées (graphique 9). Alors qu’elles étaient plus actives que les Françaises, elles le sont désormais moins. Leur taux d’activité est passé de 85 % en 1997 à moins de 82 % en 2003. Même si ces taux restent élevés, ils indiquent une tendance générale qui affecte le volume d’emploi des femmes. Une étude statistique publiée dans Harvard Business Review en mars 2005 confirme cette tendance (Hewlett et Buck Luce, 2005) : 37 % des femmes qualifiées [22] affirment avoir interrompu leur carrière, et 43 % des femmes avec enfants. Les raisons invoquées sont multiples : le temps consacré aux enfants et aux personnes âgées, la pression sur le lieu de travail, le manque de motivation dû au « plafond de verre », enfin elles arrêtent de travailler lorsque les revenus de leur conjoint le leur permettent [23]. Concernant les hommes qualifiés, seulement 24 % interrompent leur carrière mais surtout la nature des raisons invoquées diffère : tout d’abord il n’y pas de différence statistiquement significative entre la proportion d’hommes sans enfant et des pères qui font ce choix, ensuite ces interruptions sont le plus souvent motivées par un changement de carrière ou l’obtention d’un diplôme supplémentaire. Cette évolution a été largement interprétée comme le retour de la mère au foyer par les média américains. Cependant, les causes de ce repli de l’activité féminine sont plus complexes qu’une simple redécouverte du modèle traditionnel. En effet, la baisse amorcée depuis 2000 a affecté les hommes comme les femmes et celles avec enfants comme celles sans enfant. Boushey (2008) montre que si l’effet négatif de la présence d’enfant sur l’emploi des femmes a augmenté entre 2000 et 2005, ces modifications ne sont pas statistiquement significatives [24]
Évolution du taux d’emploi selon le sexe aux États-Unis entre 1960 et 2006 (personnes âgées de 15 à 64 ans)
Évolution du taux d’emploi selon le sexe aux États-Unis entre 1960 et 2006 (personnes âgées de 15 à 64 ans)
Évolution des taux d’activité des femmes qualifiées aux États-Unis, en France et en Suède (personnes âgées de 25 à 54 ans)
Évolution des taux d’activité des femmes qualifiées aux États-Unis, en France et en Suède (personnes âgées de 25 à 54 ans)
Note : Le niveau de qualification retenu correspond au moins à 3 années d’étude supérieures (ISCED 5A et 6).30Plutôt qu’un regain du modèle de la femme au foyer, ces tendances seraient liées à la conjoncture économique, qui a été défavorable à l’emploi des femmes. Malgré la croissance économique, le marché du travail n’a jamais retrouvé son niveau de fonctionnement d’avant le retournement conjoncturel de 2001. Les créations d’emplois ont été bien en-deçà de l’accroissement de la population en âge de travailler, ce qui induit mécaniquement une baisse des taux d’emploi [25] (Boushey, Rosnick et Baker, 2005). La mollesse des créations d’emplois a touché le travail des femmes et des hommes, mais elle aurait affecté disproportionnellement les premières, car elle se serait concentrée davantage sur les secteurs d’activité qui emploient majoritairement des femmes.
31Par ailleurs, si une partie des mères américaines se sont bien repliées dans la sphère familiale, il semble que la raison principale n’est pas tant la renaissance du modèle traditionnel qu’une contrainte d’organisation forte qui pèse sur les mères. En effet, alors que dans le contexte de marché du travail tendu des années 1990, les employeurs avaient dû se montrer inventifs et généreux en matière d’outils favorisant l’articulation entre les vies familiale et professionnelle afin de fidéliser leurs employées, à partir des années 2000 ils ont revu leur générosité à la baisse, le marché du travail leur étant à nouveau favorable, ce qui a poussé une partie des mères à se retirer du marché du travail dans un pays où les modes de garde se font rares (Boushey, Rosnick et Baker, 2005).
32Enfin, les extensions successives de l’EITC ont été globalement favorables à la participation des femmes au marché du travail, mais elles ont induit une réduction de l’emploi des femmes en couple. Ceci tient au mode d’attribution de l’EITC : l’individu n’est plus éligible à partir du moment où les ressources du ménage auquel il appartient dépassent un certain seuil. En baissant leur temps de travail, des femmes mariées réduisaient les revenus du ménage et de fait devenaient éligibles au crédit. Eissa et Hoynes (1998 ; 2005) ont montré que alors que la première extension de l’EITC en 1986 n’avait eu que peu d’effets sur l’emploi des femmes mariées, celles de 1990 et 1993 ont engendré une réduction des taux d’emploi des mères mariées relativement aux femmes mariées sans enfant. Ellwood (2000) trouve des résultats similaires en comparant la participation des mères mariées dont le salaire est dans le premier quartile (donc éligibles à l’EITC) et celles dans le dernier (qui ne le sont pas). Au total, selon Eissa et Hoynes les extensions successives de l’EITC entre 1986 et 1996 ont réduit la probabilité de travailler des femmes mariées de plus d’un point. Ceci peut sembler faible, mais certains groupes, en particulier les femmes dont les revenus se situent dans la zone où le crédit baisse, ont vu leur probabilité de travailler réduite de 5 % et le nombre d’heures de travail annuel de 20 %. Les auteures concluent que l’EITC a effectivement subventionné le retour à la maison des femmes mariées, même si leur réaction face à cette désincitation au travail a été faible (Eissa et Hoynes, 2005).
33En résumé de cette première partie, les Américaines ont augmenté massivement leur participation au marché depuis les années 1960, comme les Françaises, mais plus tardivement que les Suédoises. Les années 1970 et surtout 1980 ont été celles de l’accroissement de l’emploi des femmes en couple, relayé durant la décennie suivante par celui des mères isolées sous l’effet de politiques volontaristes qui se sont concentrées sur des objectifs quantitatifs (augmentation des taux d’emploi, et baisse du nombre de dossiers sociaux…), laissant de côté l’aspect qualitatif des emplois créés. Les tendances récentes montrent un essoufflement de l’activité en général, qui affecte les femmes, les plus qualifiées n’étant pas épargnées par cette tendance.
1 – Quels emplois pour les Américaines ?
1.1 – Des emplois de plus en plus qualifiés en moyenne
1.1.1 – Un niveau d’éducation supérieur à celui des hommes
34L’éducation est un élément clé de l’emploi des femmes parce qu’elle modifie la nature des emplois qu’elles peuvent occuper, mais aussi parce qu’elle encourage et soutient leur activité en renforçant leur ambition et leur aspiration à l’indépendance. Dans la plupart des pays de l’OCDE, le taux d’obtention d’un diplôme est désormais plus élevé chez les femmes que chez les hommes. Aux États-Unis, la proportion de femmes effectuant 4 années d’études supérieures s’est fortement accrue pour les générations nées en 1940 et 1950, ce qui correspond aux années de guerre du Vietnam qui ont engendré une réduction de la proportion d’hommes. Ainsi pour les générations 1946-1956, le ratio femmes/hommes de diplômés est passé de 0,65 à 0,95 (Goldin, 2004) [26]. Désormais, les femmes américaines sont davantage susceptibles que les hommes d’arriver au terme de leurs études secondaires : la tendance historique s’est donc inversée.
35Les orientations scolaires des jeunes américaines ont également connu un véritable tournant. L’indice de ségrégation, qui était supérieur à 0,5, a considérablement baissé à partir du début des années 1970, date à laquelle les femmes ont cessé d’investir massivement les filières les conduisant à des postes féminins, ce qui a engendré une baisse de la proportion de femmes dans le secteur de l’éducation [27]. En outre, elles ont investi les orientations typiquement « masculines » du type business management : alors que dans les années 1960 il y avait dans ces filières 10 fois moins de filles que de garçons, elles étaient 2 fois moins nombreuses au milieu des années 1970, et aussi nombreuses à la fin des années 1990.
36Ces générations de femmes ayant choisi les filières dites « masculines » se sont mariées plus tard que leurs aînées, qui se mariaient directement à la sortie de l’université, cette dernière jouant le rôle d’un « marché du mariage » [28] (Goldin, 2004). Les femmes anticipent qu’elles vont rester sur le marché du travail longtemps, elles s’orientent alors vers des filières ouvrant des perspectives de carrières et elles recourent à la formation professionnelle, ce qui était traditionnellement le privilège des hommes.
37Au final en 1998, 27 % de femmes devraient changer d’orientation pour qu’il y ait une parité dans toutes les filières (soit moitié moins qu’en 1966). Les modifications dans les choix des filières ont été relayées par des modifications des postes occupés par les femmes.
1.1.2 – La ségrégation professionnelle en baisse
38La mixité dans les filières de formation a permis d’atténuer la segmentation du marché du travail. Alors que les femmes se concentraient essentiellement dans les secteurs des services, les emplois publics, les années 1970 ont vu la segmentation du marché du travail diminuer sensiblement. L’indice de ségrégation professionnelle [29] est passé de 0,68 en 1970 à 0,52 en 1990 (Blau et Kahn, 2000) pour finalement atteindre 0,46 en 2000 (Anker, Malkas et Korten, 2003). Le rythme de déségrégation professionnelle a été moins soutenu dans les années 1990 (deux fois inférieur) que dans les deux décennies précédentes. Malgré tout, le marché du travail américain est moins segmenté que le marché du travail français ou suédois, avec respectivement un indice de ségrégation de 0,56 et 0,58 (Blau et Kahn, 2002 ; Emerek, Figueiredo, Gonzalez, Gonas et Rubery, 2003) [30].
39Cette tendance générale masque des différences en fonction du niveau de qualification. La ségrégation professionnelle est d’autant moins marquée que les individus sont qualifiés. En effet, elle est relativement stable pour les femmes les moins qualifiées : elles restent davantage concentrées parmi les « employées » et dans le secteur des services, alors que les hommes sont disproportionnellement employés comme « ouvriers », dans la production en général (Donaldo, Felgueroso et Jimeno, 2002). Les personnes ne détenant qu’un diplôme du secondaire affrontent un marché du travail segmenté avec un indice de 0,52 et celles ayant un diplôme professionnel subissent la ségrégation professionnelle la plus forte, avec un indice de 0,61 (Emerek, Figueiredo, Gonzalez, Gonas et Rubery, 2003). En revanche, pour les personnes ayant un diplôme de l’enseignement supérieur, l’indice de ségrégation est de 0,37 et pour celles ayant un doctorat, l’indice tombe à 0,20. En effet, la ségrégation professionnelle à laquelle sont confrontées les femmes qualifiées a fortement baissé au travers des cohortes. En 2000, les femmes représentaient 42 % des emplois de cadres, soit le double de ce qu’était cette proportion en 1975 [31]. Depuis les années 1970, les Américaines ont investi la catégorie « cadres et professions libérales » [32]. En 1967, un peu moins de 5 % des femmes se trouvaient dans cette catégorie professionnelle (excluant les postes d’infirmière et d’enseignant) contre presque 22 % en 1997. Parmi les seules femmes qualifiées (celles ayant un diplôme universitaire), cette proportion a été multipliée par 3 durant cette période pour atteindre 40 % en 1997 (Black et Juhn, 2000). Si l’on considère les professions libérales à haut salaire, la proportion de femmes atteint 11 % pour l’ensemble des femmes et 23,5 % pour les femmes qualifiées. Les évolutions sont certes encourageantes mais la proportion de femmes dans ces professions reste faible en niveau.
40Ce mouvement de déségrégation professionnelle des années 1970 et 1980 est lié à l’expansion de nouveaux postes dans lesquels femmes et hommes sont initialement également répartis, mais il provient surtout de l’entrée des femmes dans les secteurs dits « masculins », alors que, durant cette période, les hommes ont peu investi les postes traditionnellement occupés par les femmes, même si à partir de la fin des années 1980, la part des hommes dans ces professions dites « féminines » s’est significativement accrue.
41De plus, les orientations professionnelles des femmes ont répondu à de nouveaux besoins du marché du travail. En effet, les progrès technologiques et la plus grande intégration internationale ont modifié la demande relative de travailleurs qualifiés affectant la composition des emplois occupés par les femmes (Black et Juhn, 2000). Elles ont répondu à ces nouvelles attentes de la demande de travail : l’offre de travail des femmes est plus élastique que celle des hommes et la proportion d’hommes dans ces secteurs était déjà très élevée, ce qui laissait peu de marge d’évolution [33].
42Ces changements ont accéléré l’entrée des femmes dans des carrières dites « masculines » avec des effets économiques et sociaux significatifs tant sur la distribution des ressources au sein de la famille que sur le fonctionnement du marché du travail. Le pourcentage de femmes gagnant plus que leur conjoint est passé de 18 % en 1987 à 26 % en 2006, et s’élève à 33 % pour les femmes mariées (Bureau of Labor Statistics) [34].
43Petit à petit, les femmes ont cessé de voir le travail sous le seul angle de « l’emploi » pour envisager une « carrière », et leur « consommation » de filières a laissé place à « l’investissement » dans l’orientation scolaire. Ces changements ont permis aux femmes de s’affirmer sur le marché du travail. Cependant, ces tendances cachent des situations différentes selon leur niveau de revenus et de qualification.
0.1 – Des inégalités de genre aux inégalités entre les femmes…
0.1.1 – Un « plafond de verre » persistant, mais plus poreux qu’ailleurs
44Si les Américaines évoluent sur un marché du travail moins segmenté qu’ailleurs, ceci est particulièrement marqué pour les femmes les plus qualifiées. Les femmes qualifiées s’en sortent apparemment mieux aux États-Unis qu’ailleurs (notons que les comparaisons internationales doivent toujours être interprétées avec prudence) : les inégalités avec les hommes du point de vue du type de carrière et de leur déroulement y semblent moins fortes pour cette catégorie, même si elles sont moins actives que les Françaises ou les Suédoises à niveau de diplôme égal.
45Certes, comme dans la plupart des pays développés, les femmes sont moins promues que leurs collègues masculins toutes choses égales par ailleurs : le « plafond de verre » existe aussi aux États-Unis. Ce phénomène décrit le fait que les femmes sont discriminées dans les procédures de recrutement et de promotion, ce qui implique qu’elles soient moins nombreuses aux postes à responsabilité que les hommes et que cette rareté des femmes se renforce à mesure que l’on monte dans la hiérarchie. La définition et la mesure de cette forme de discrimination fait encore aujourd’hui l’objet de controverses (Baxter et Wright, 2000 ; Britton et Williams, 2000 ; Weinberger, 2006). Une méthode pour l’évaluer consiste à analyser l’évolution de la proportion de femmes à différents niveaux de postes d’encadrement et l’autre procède de manière identique mais se concentre sur l’évolution de l’écart de salaires entre les femmes et les hommes.
46Durant les vingt dernières années, la part des femmes dans les postes de direction est passée d’un tiers à la moitié, mais dans son rapport de 1995, la Glass Ceiling Commission indique que les femmes ne représentent que 5 % des seniors managers des 1000 plus grosses entreprises industrielles et des 500 plus importantes entreprises de service [35]. De façon générale, la probabilité qu’une femme atteigne un poste à responsabilité est plus faible que celle d’un homme, mais selon Baxter et Wright (2000) ce phénomène se réduirait lorsque l’on progresse dans la hiérarchie des postes : les femmes auraient moins de chances que les hommes de passer de non manager à supervisor, mais cela ne serait plus le cas à partir du stade de manager. La discrimination porterait donc sur le bas de la distribution des postes hiérarchiques, mais elle s’amenuiserait une fois ce cap passé. Ce résultat suggère que la discrimination que subissent les femmes concernant l’accès aux postes à responsabilité s’estompe à mesure que l’on grimpe dans la pyramide de postes : il n’y aurait donc pas de « plafond de verre » (tel que défini plus haut) aux États-Unis. Britton et Williams (2000) contestent la démarche utilisée car elle ne tient pas compte de la ségrégation professionnelle. Le classement par catégorie d’emplois (manager, supervisor…) masque des réalités différentes pour les femmes et les hommes tant en termes de responsabilité (nombre de personnes à encadrer, importance de l’entreprise) que de salaire, ou de prestige. Ainsi, elles peuvent avancer aussi vite dans la hiérarchie représentée par cette classification des postes, mais les emplois auxquels elles accèdent n’ont pas les mêmes caractéristiques que ceux des hommes. Par exemple, une étude a montré que dans un échantillon d’entreprises, les femmes ne représentaient que 2,5 % des dirigeants dans le plus hauts postes et elles gagnaient 45 % de moins que leurs collègues. Les trois quarts de cet écart s’expliquent par le fait qu’elles dirigent de plus petites entreprises et sont moins souvent aux postes de président, directeur ou Chief Executive Officer. 20 % de l’écart est dû au fait qu’elles sont plus jeunes et ont moins d’ancienneté (Bertrand et Hallock, 2000) : l’absence des femmes dans les postes à hautes responsabilités serait liée à leur entrée tardive dans les emplois de direction, et la situation s’améliore petit à petit à mesure qu’elles gravissent les échelons (Blau et Kahn, 2000). Wood, Corcoran et Courant (1993) ont analysé les écarts de salaires sur trois promotions d’étudiants diplômés de la Law School de l’Université du Michigan (1972 à 1975). Si en début de carrière, les salaires sont sensiblement les mêmes, 15 ans après leur sortie de l’école le salaire des femmes représentent 60 % de celui des hommes. 40 % de l’écart est lié directement ou indirectement à la parentalité et presque un tiers de cet écart est inexpliqué (soit 13 points) ; Weinberger (1998) a examiné la différence de salaires pour des diplômés de l’Université et trouve un écart non expliqué du même ordre entre 10 et 15 points. Néanmoins, l’effet de cohorte pourrait être important dans la mesure du « plafond de verre ». Pour contrôler cet effet, Weinberger (2006) compare la progression des salaires des femmes et des hommes diplômés [36] appartenant à une même cohorte sur 10 ans. Elle montre que la progression des salaires des femmes a suivi, et même dépassé, celle des hommes sur la période 1989-1999, et ceci quelles que soit les filières considérées. Mais les salaires des femmes restent en dessous de ceux des hommes. Ces résultats suggèrent que le « plafond de verre » n’est pas largement diffusé : c’est au plus haut niveau de la hiérarchie des postes qu’il se manifeste, contrairement à ce que Baxter et Wright (2000) affirment.
47La mesure et la forme que prend le « plafond de verre » font donc toujours l’objet de débats, mais l’existence du phénomène n’est pas contestée. Or, le fait que les femmes n’accèdent pas aux plus hautes responsabilités dans les mêmes proportions que les hommes renforce les inégalités pour l’ensemble des actives. Cohen et Huffman (2007) ont montré que les inégalités de genre au travail étaient substantiellement atténuées lorsque des femmes appartenaient à l’équipe dirigeante. Cet effet est sensible lorsque les postes les plus élevés dans la hiérarchie sont féminisés. Les auteurs concluent que la déségrégation des postes les plus importants est bénéfique pour l’ensemble des femmes, y compris celles qui n’accèderont jamais à ces emplois. En corollaire, la persistance d’un « plafond verre » a des répercussions négatives sur l’ensemble des femmes qui ont une activité.
48Si le « plafond de verre » est une réalité outre-Atlantique, il y est plus « poreux » qu’en Suède. Mesuré par l’écart de salaires entre les femmes et les hommes dans le haut de la distribution des salaires, il est significativement plus fort en Suède : en effet, alors que dans la plupart des percentiles l’écart entre la rémunération entre les sexes est moins importante en Suède qu’aux États-Unis, cette tendance se retourne à l’avantage des Américaines pour le haut de la distribution (Albrecht, Bjöklund et Vroman, 2003). Le type de profession occupée par des femmes explique un tiers de l’écart de salaire expliqué en haut de la distribution des salaires ; ce qui suggère que la ségrégation professionnelle plus marquée en Suède qu’aux États-Unis est une cause importante de ce phénomène. Mesuré par la différence de probabilité d’accès aux postes à responsabilité entre femmes et hommes, il est également plus important en Suède qu’aux États-Unis (Baxter et Wright, 2000).
49Ces réussites américaines doivent beaucoup aux mouvements féministes, qui se sont appuyés sur un arsenal législatif efficace permettant de lutter contre les discriminations que subissent les femmes (encadré 2 en annexe). Face aux nombreux jugements qui en ont découlés, les entreprises ont levé certains obstacles qui ralentissaient la progression professionnelle des femmes relativement à celle des hommes (Beller, 1982). Ceci a un effet cumulatif, car dans ce contexte de diminution des discriminations à leur égard, les femmes ont été encouragées à investir en capital humain, et les entreprises ont été moins réticentes à engager des femmes à des postes traditionnellement masculins à partir du moment où l’implication des femmes dans leur carrière et leurs qualifications augmentaient.
50Les femmes diplômées américaines s’en sortent donc plutôt mieux que beaucoup de femmes en Europe. Certes elles sont globalement moins présentes sur le marché du travail que les Françaises et Suédoises qualifiées (voir la section précédente), mais du point de vue du type de carrière et de son déroulement, les inégalités de genre semblent moins prégnantes aux États-Unis qu’en France ou qu’en Suède. Ces femmes qualifiées disposent des ressources financières suffisantes pour externaliser les tâches familiales et domestiques en recourant aux services d’employées, le plus souvent des femmes. Ainsi déchargées de leur rôle traditionnel, elles deviennent « des femmes qui sont comme des hommes » (Orloff, 2006, p. 21). En revanche, les femmes les moins qualifiées ne connaissent aucune amélioration de leur situation sur le marché du travail relativement à celle des hommes, et les inégalités entre femmes se creusent.
0.1.2 – La dérive du travail des femmes peu qualifiées
51L’amélioration des positions des femmes sur le marché du travail cachent de grandes disparités selon les niveaux de qualification tant en termes d’accès à l’emploi que des caractéristiques des emplois occupés. Si le taux d’activité des femmes les moins diplômées, en particulier les mères isolées, a sensiblement augmenté durant les années 1990 [37], elles accèdent au marché du travail essentiellement par le biais de bad jobs : emplois de qualité médiocre du point de vue de la rémunération horaire mais aussi des droits sociaux qui leur sont associés [38].
52Les salaires des sortantes de l’aide sociale oscillent entre 6 et 8,5 dollars de l’heure (soit entre 5,4 et 7,5 euros de l’heure en parité de pouvoir d’achat) (Coven, 2005). Certes le dispositif socio-fiscal complète les revenus des personnes pauvres (EITC, TANF, Food Stamps, …) mais ces aides varient considérablement d’un État à l’autre, si bien que la situation des femmes non qualifiées est hétérogène sur le territoire américain. Par exemple, en Alabama une mère isolée ayant deux enfants à charge et travaillant à mi-temps au salaire minimum a un revenu disponible – aides incluses – de 10 671 dollars sur une année complète de travail [39], soit 70 % du seuil pauvreté ; à ce niveau de ressources elle n’est plus éligible au programme TANF. Dans l’État du Massachussetts, cette même femme perçoit un revenu total de 15 704 dollars, dont 30 % est issu du TANF –auquel elle est toujours éligible étant donné ses ressources ; cette femme se situe juste au-dessus du seuil de pauvreté (Green Book, 2004).
53Par ailleurs, l’accès à une couverture santé via l’employeur est essentiel dans un pays qui ne propose pas de couverture maladie universelle. Or, depuis la fin des années 1990, celui-ci s’est dégradé pour les femmes à faibles revenus. Plusieurs raisons expliquent cette tendance. Tout d’abord, la loi de 1996 (PRWORA) a découplé l’accès au programme de couverture maladie pour des familles pauvres (Medicaid) de l’obtention du TANF, alors qu’auparavant l’accès à l’aide sociale impliquait automatiquement une affiliation à Medicaid. L’accès à une couverture maladie est devenu plus rare (Cawley, Schroeder et Simon, 2004) [40] : un an après leur sortie du Welfare, la moitié des femmes n’ont pas accès à une couverture maladie [41]. Pour celles dont les revenus sont restés suffisamment bas pour être éligibles à Medicaid, les barrières administratives et la mauvaise compréhension du nouveau système issues du découplage ont engendré un taux de non recours important [42]. Parmi celles dont les revenus ont augmenté de telle sorte qu’elles ne sont plus éligibles à Medicaid, beaucoup n’ont pas obtenu un emploi assorti d’une couverture maladie [43]. La plupart des mères, anciennes allocataires du Welfare qui travaillent, restent pauvres et ne bénéficient pas de couverture maladie (Reichman, Teitler, Garfinkel et Garcia, 2004).
54Non seulement les mères non qualifiées entrent sur le marché du travail principalement par le biais d’emplois de mauvaise qualité, mais de plus leur trajectoire n’est le plus souvent pas ascendante. Ces emplois ne jouent pas le rôle de tremplin vers des emplois de meilleure qualité. Pavetti et Acs (2001) ont étudié les parcours d’emploi des jeunes femmes américaines entre l’âge de 18 et 27 ans en comparant la situation de celles ayant bénéficié de l’aide sociale et les autres. Il ressort de l’étude qu’un tiers des jeunes américaines sortant du Welfare trouvent un emploi stable mais de mauvaise qualité, plus de la moitié ne travaillent que par intermittence, ne trouvant que des emplois de courte durée ; et l’espoir de voir leur situation s’améliorer est faible puisque seules 15 % des femmes n’ayant pas bac, et sortantes de l’aide publique, obtiennent un bon emploi (good job) stable à l’âge de 27 ans. Ainsi, les parcours des anciennes bénéficiaires de l’aide sociale ne sont pas dans l’ensemble des parcours ascendants.
55Enfin, les conditions dans lesquelles elles travaillent sont souvent difficiles et loin de faciliter leur vie quotidienne. Elles sont confrontées à des problèmes de transport, de garde d’enfants, d’horaires atypiques et imprévisibles. Leur salaire est insuffisant pour couvrir les frais induits par le travail. Certes le PRWORA prévoit des crédits fédéraux spécifiquement dédiés au financement de services facilitant l’accès au marché du travail de ces femmes, mais ils ne sont pas développés à la hauteur des besoins et pas de façon uniforme sur le territoire. Les zones les plus touchées par la pauvreté en sont presque dépourvues (Allard, 2007). En particulier, les services qui permettent aux femmes de travailler (garde d’enfants, transports publics, accès aux soins médicaux, programmes de formation) sont peu ou pas accessibles dans les zones rurales, et les salaires offerts dans ces zones sont plus faibles et moins susceptibles de sortir les personnes de la pauvreté (Weber, 2004).
56Plus généralement, les femmes les moins qualifiées ont connu une détérioration de leur situation socio-économique relativement aux autres femmes entre 1970 et 1995. Selon Blau (1998), cette dégradation relative de la position économique de ce groupe d’Américaines ne s’explique pas entièrement par une modification de leurs caractéristiques, l’environnement dans lequel elles évoluent leur est devenu moins favorable qu’avant. Meyers et Sullivan (2004) trouvent au contraire que le bien-être matériel des mères isolées, mesuré par l’évolution de leur niveau de consommation, s’est plutôt amélioré durant les années 1980 et 1990 en termes réel absolu et relativement aux femmes célibataires sans enfant ou aux mères en couple. Ce résultat vaut également pour les mères isolées pauvres (appartenant aux 15e et 25e centiles de la distribution de la consommation) y compris celles qui sont peu qualifiées. Les auteurs en déduisent que les réformes successives du système fiscalo-social ont profité à la plupart des mères isolées, cependant ils admettent que certaines ont pu voir leur situation se dégrader, en particulier les mères isolées les moins qualifiées appartenant aux centiles inférieurs au 15e décile de la distribution de consommation.
57Le Workfare poussé à son paroxysme a certes amélioré les taux d’activité des femmes non qualifiées, en particulier ceux des mères célibataires, mais ceci au prix d’emploi de qualité médiocre pour les moins qualifiées d’entre elles. Pourtant, des programmes d’insertion et de formation y étaient associés mais les financements ont été largement réduits lors de la reconduction de la loi en 2002, sous l’effet d’une conjoncture économique moins favorable (Périvier, 2007). Enfin, en concentrant la protection sociale au sens large sur l’emploi, on écarte de l’aide sociale les personnes les plus en difficulté [44], celles qui, même en période de chômage faible, ne peuvent trouver un travail : elles sont hors du champ de l’aide sociale et exclues de l’emploi [45]. La population – le plus souvent des mères isolées pauvres – qui n’a ni emploi et qui ne bénéficie d’aucune aide sociale (Disconnected Single Mothers) n’a cessé de croître depuis 15 ans, beaucoup d’entre elles ont atteint la limite des droits au TANF et d’autres ont été sanctionnées car elles ne travaillaient pas ou pas suffisamment (Blank et Kovak, 2008).
2.3 – Les salaires, les inégalités et la maternité
2.3.1 – Écart de salaire entre les sexes et inégalités
58Aux États-Unis, les salaires des femmes représentent environ 80 % de ceux des hommes (ratio du salaire médian annuel pour les travailleurs à temps plein). Les différences de capital humain engendré par la formation initiale, l’expérience professionnelle accumulée explique un tiers de l’écart de salaire, 30 % s’explique par les caractéristiques des emplois occupés, la ségrégation professionnelle (les femmes sont plus souvent dans le secteur non marchand…) en explique 30 %. Reste qu’une partie importante de l’écart (38 %) est inexpliquée, ce qui peut s’interpréter comme le fruit d’une discrimination pure (Blau, Ferber et Winkler, 2002 ; Blau et Kahn 2000).
59L’écart de salaires entre les sexes s’est réduit depuis les années 1970 (de 18 points de pourcentage). Cette réduction n’est pas seulement due à un effet de génération, avec l’entrée sur le marché du travail des jeunes femmes mieux formées, et subissant une moindre discrimination que leurs aînées. En effet, le ratio de salaires femmes/hommes a augmenté pour tous les groupes d’âge. Néanmoins cela est plus marqué pour les nouvelles générations (Blau et Kahn, 2000). C’est surtout durant la décennie 1980 que les inégalités de salaires entre les sexes se sont résorbées, cette progression s’est inscrite dans un contexte de forte croissance des inégalités salariales, en particulier entre les travailleurs les moins qualifiés et les plus qualifiés.
60Cette tendance s’explique en partie par l’environnement économique : les changements technologiques ont accru la demande de main-d’œuvre qualifiée (Blau, 1998), de fait le rendement de la qualification a sensiblement augmenté. Ceci s’est traduit par un accroissement des salaires des travailleurs qualifiés et une tendance à la baisse des salaires des travailleurs les moins qualifiés. Or, durant cette période, le niveau de qualification des femmes a augmenté relativement à celui des hommes, ceci est essentiellement dû durant cette période à l’allongement de leur expérience professionnelle, du fait de carrières plus continues qu’auparavant (Blau et Kahn, 2004). Elles ont donc bénéficié davantage en moyenne de cette survalorisation de la qualification. L’amélioration relative des caractéristiques des femmes sur le marché du travail leur a permis d’accéder à des postes plus qualifiés. En conséquence, des hommes sont descendus dans la hiérarchie des emplois, ce qui a alimenté les inégalités de salaires entre eux. Selon Fortin et Lemieux (2000), la moitié de l’augmentation des inégalités de salaires masculins est le résultat d’un effet de compensation de la hausse des salaires des femmes. Certes, les femmes les moins qualifiées ont subi comme les hommes un marché du travail défavorable ; le salaire moyen des femmes travaillant à temps plein a augmenté de 30 % entre 1970 et 1995, celui des femmes n’ayant pas le bac a diminué de 2,2 % (Blau, 1998). Mais, contrairement aux hommes peu qualifiés, qui ont vu leur salaire réel baisser durant cette période, le niveau de leur salaire a néanmoins été stimulé par l’augmentation de leur expérience professionnelle (Blank et Shierholz, 2006). Ainsi, les femmes ont donc pu « tirer leur épingle du jeu » dans ce contexte d’inégalités croissantes des salaires, avec un appauvrissement des travailleurs les moins qualifiés, ce qui mécaniquement a réduit l’écart de salaires entre les sexes.
61L’évolution du contexte institutionnel explique également l’accroissement des inégalités de salaire et partiellement la réduction de l’écart de salaire entre les sexes. Tout d’abord, le processus de désyndicalisation apparu dans les années 1980 a davantage touché les hommes que les femmes (Blau et Kahn, 2004). Il a fortement accentué les inégalités de salaires des hommes mais a peu affecté la distribution des salaires des femmes (Fortin et Lemieux, 1996). Ensuite, certaines lois favorisant les bonnes pratiques de la part des employeurs ont contribué à réduire les inégalités entre les sexes, mais elles ont également accru celles entre les femmes très qualifiées et les moins qualifiées, les premières pouvant davantage en bénéficier (Smith, 1988). En revanche, la baisse en terme réel du salaire minimum [46] a particulièrement concerné la distribution des salaires féminins et peu affecté celle des hommes. Ces facteurs institutionnels expliqueraient un tiers de l’accroissement des inégalités de salaires durant les années 1980 (Fortin et Lemieux, 1996).
62Enfin, la partie inexpliquée de l’écart de salaire entre les sexes a également diminué dans les années 1980, ce qui serait dû soit à une amélioration relative de la qualification des femmes qui ne serait pas mesurée, soit à une baisse de la discrimination dont elles sont victimes, soit aux deux. Blau et Kahn (2004) estiment que si la première explication est crédible la seconde l’est moins. En effet, durant les années 1980, le gouvernement fédéral a reculé sur le terrain de la lutte contre les discriminations, en particulier il était moins enclin à faire respecter les programmes d’action positive qu’il ne l’était auparavant ; or la bureaucratie interne aux entreprises n’est pas spontanément favorable à la dynamique de ces actions et manque de volonté pour les faire appliquer (encadré 1 en annexe, Leonard, 1989). Néanmoins l’amélioration de l’investissement des femmes dans leur vie professionnelle ainsi que leur qualification aurait limité rationnellement le comportement discriminatoire des employeurs vis-à-vis des femmes.
63Depuis les années 1990, la baisse de l’écart de salaire entre les sexes est moins rapide. Pourtant, la qualification relative des femmes a continué d’augmenter sous l’effet non plus de l’allongement de leur expérience professionnelle comme c’était le cas dans les années 1980, mais du fait de l’amélioration significative de leur niveau d’éducation (Blau et Kahn, 2004), qui a dépassé celui des hommes en moyenne. Cependant, la demande de travail qualifié s’est quelque peu tassée relativement à la décennie précédente, ainsi l’avantage relatif en termes de qualification des femmes s’est réduit et l’accroissement des inégalités au sein de la distribution des salaires masculins a été moins vif que durant les années 1980 : les salaires des plus qualifiés ont explosé, mais les salaires des moins qualifiés ont cessé de baisser pour augmenter très légèrement. En outre, les réformes du Welfare instaurées dans les années 1990 ont fait entrer dans l’emploi des femmes peu qualifiées, ce qui a pu modifier la composition de la population active féminine dans un sens défavorable à la convergence des salaires avec les hommes.
2.3.2 – L’impact de la maternité sur les salaires
64La présence d’enfant réduit le salaire des mères alors que la paternité n’affecte pas celui des hommes. Les mères ont donc des salaires plus faibles que les hommes avec ou sans enfant et que les femmes sans enfants. L’effet négatif de la maternité sur les salaires des mères a augmenté dans les années 1980 (Waldfogel, 1997, 1998). Plusieurs facteurs expliquent cette pénalité salariale. Les interruptions de carrière au moment de l’arrivée de l’enfant réduisent l’expérience professionnelle des mères, et l’ancienneté chez leur employeur. Le recours au temps partiel fréquent pour les mères pèse également sur leur salaire. D’une part, comme elles travaillent moins longtemps que les hommes ou les femmes sans enfant, leur expérience professionnelle est réduite et d’autre part, le taux horaire du travail à temps partiel est plus faible que celui du travail à temps plein aux États-Unis, comme dans beaucoup de pays : la rémunération horaire des femmes qui travaillent à temps partiel y serait de 22 % inférieure à celui des travailleurs à temps complet (Bardasi et Gornick, 2008) [47]. Ainsi, le passage par le temps partiel durant la carrière affecte durablement les salaires des mères.
65Globalement, l’expérience professionnelle au sens large, mesurée par le nombre d’années travaillées et le temps de travail, explique entre un tiers et la moitié de la pénalité salariale associée à la maternité. Budig et England (2001) [48] obtiennent une pénalité salariale supportée par les mères relativement aux femmes sans enfant de 7 % par enfant. Un tiers de cette pénalité s’explique par la moindre expérience professionnelle (en nombre d’années et en tenant compte du temps partiel). Ces résultats sont proches de ceux de Waldfogel (1997), qui trouve une pénalité salariale liée à la maternité de 4 % pour un enfant et de 12 % pour deux enfants et plus, une fois l’expérience professionnelle et le recours au temps partiel pris en compte. Par ailleurs, selon les travaux de O’Neil et O’Neil (2005), l’expérience professionnelle au sens large expliquerait la moitié de l’écart de salaire entre les sexes. Sur un ensemble d’individus âgés de 35 à 43 ans, les femmes ont travaillé en moyenne 2 ans de moins que les hommes et 14 % des semaines travaillées par les femmes l’ont été à temps partiel contre 5 % pour les hommes. Les interruptions de carrière pour raisons familiales impliquent une réduction de salaire de 8 % et cela concerne 55 % des femmes contre seulement 13 % des hommes.
66Ainsi, même en tenant compte de cette moindre expérience professionnelle, la pénalité salariale associée à la présence d’enfants reste élevée. Certes, les mères peuvent être amenées à opter pour un travail offrant plus de souplesses (en termes d’horaires, de stress, de responsabilités, …) afin de pouvoir concilier leurs responsabilités familiales et professionnelles ; ou bien les employeurs peuvent juger les mères moins aptes que les femmes sans enfant à assumer des postes à responsabilités et donc les exclure des emplois les mieux rémunérés. Mais, les caractéristiques des emplois occupés par les mères n’expliquent qu’une faible part de la pénalité salariale : en tenant compte des spécificités des postes qu’elles occupent, la pénalité salariale est de 4 % (Budig et England, 2001). Reste que les mères peuvent faire l’objet de discrimination salariale de la part des employeurs qui voient en elles des travailleurs moins productifs que les autres.
67Les inégalités de salaires entre les sexes sont largement entretenues par les interruptions de carrière, et par le recours au temps partiel des femmes avec enfants, même si cela n’explique pas l’intégralité de la pénalité salariale que subissent les mères relativement aux femmes sans enfant. Aux États-Unis, ces interruptions de carrière ne sont pas assorties d’un cadre législatif protecteur. En effet, les politiques américaines ont visé l’égalité des chances entre les femmes et les hommes sans s’attaquer spécifiquement à la question de la maternité et de son poids sur les carrières des mères. L’écart entre les salaires des mères et celui des femmes sans enfant est ainsi plus important aux États-Unis que dans les autres pays développés, qui ont intégré cette dimension par le biais de congé parentaux et d’une offre de modes de garde subventionnés (Waldfogel, 1998, Budig et England, 2001). L’absence d’un congé maternité [49], qui garantit le retour à l’emploi, pèse sur le salaire des mères : elles s’arrêtent de travailler, même une courte période, au moment de la naissance, mais leur retour au travail se fait souvent en changeant d’employeur (perdant alors les avantages liés à l’ancienneté). Elles retrouvent le plus souvent une situation moins favorable que celle de leur emploi précédent, en particulier du point de vue salarial. L’environnement institutionnel est donc au cœur des difficultés que rencontrent les mères sur le marché du travail.
2.3.3 – Mise en perspective internationale de l’écart de salaire
68La progression des salaires féminins durant les années 1980 et 1990 a permis aux États-Unis de combler une partie du retard qu’ils affichaient en matière d’inégalité salariale entre les sexes relativement à la France et à la Suède (tableau 4). Selon l’OCDE (2002), l’écart mesuré par un indice 100 en 1979 est de 62 en 1999, contre 66 en France et 86 en Suède. Néanmoins, l’écart de salaire est plus important outre-Atlantique que dans les deux autres pays.
Rapport entre le salaire médian hebdomadaire des femmes et celui des hommes pour les travailleurs à temps plein
Rapport entre le salaire médian hebdomadaire des femmes et celui des hommes pour les travailleurs à temps plein
69Comment expliquer ce décalage du point de vue des inégalités de salaires entre les sexes par rapport aux deux autres pays ? Selon Blau et Kahn (2002, 2000), cela tient essentiellement aux différences de structure de la distribution des salaires entre les pays. En effet, la distribution des salaires est beaucoup plus inégalitaire aux États-Unis que dans les deux autres pays, ce qui pénalise davantage ceux qui sont dans la partie inférieure de la distribution des salaires (Blau et Kahn, 2000). Ceci s’explique à la fois par des facteurs économiques et par des facteurs institutionnels.
70Tout d’abord, la plus grande valorisation des qualifications, les différences sectorielles et la plus grande distribution de la productivité des emplois qui caractérisent le marché du travail américain engendrent une structure des salaires plus inégalitaire aux États-Unis qu’ailleurs. Cette sur-valorisation du travail qualifié relativement au travail non qualifié est été favorable aux salaires féminins durant la décennie 1980, ce qui a permis de combler une partie du retard américain par rapport aux deux autres pays.
71Ensuite, les différences entre les trois pays du point de vue de l’environnement institutionnel sont très marquées (poids des syndicats, niveau du salaire minimum, …). Or, cela influence la distribution des salaires (Blau et Kahn, 2002 ; Fortin et Lemieux, 1996). En Suède, les syndicats jouent un rôle central dans les négociations salariales, qui se font plutôt collectivement ce qui limite la dispersion des salaires. En France, le taux de syndicalisation est faible mais les salaires sont principalement soutenus par le biais du salaire minimum légal, qui n’existe pas en Suède, et qui est rehaussé régulièrement. Aux États-Unis, le niveau de négociation collective est, comme en France [50], extrêmement faible, et les salaires sont le plus souvent déterminés au niveau de l’usine, y compris dans un même secteur syndiqué ; mais contrairement à la France, il n’existe pas de mécanismes formels (ou non) permettant d’étendre des taux de rémunération négociés par les syndicats aux travailleurs non syndiqués. Par ailleurs, le salaire minimum légal est beaucoup plus faible qu’en France et s’est fortement dévalorisé depuis vingt ans [51], ce qui a particulièrement affecté les salaires féminins (Fortin et Lemieux, 1996). Ainsi, une partie importante de l’écart de salaire entre les sexes aux États-Unis s’explique par le différentiel de salaires entre secteur d’activité et entre les entreprises, ce différentiel résultant du processus de négociation des salaires décentralisé. Les systèmes qui prévalent en France ou en Suède réduisent les variations de salaires tant entre les secteurs qu’entre les entreprises, ce qui limite l’effet défavorable de la segmentation du marché du travail sur les salaires des femmes. Dans tous les pays, la distribution des salaires féminins se situe au-dessous de celle des salaires masculins, ainsi toute compression de la distribution des salaires en général tend à réduire l’écart de salaires entre les femmes et les hommes.
? Conclusion
72Incontestablement, aux États-Unis, les inégalités entre les sexes ont été réduites, tant du point de vue de l’éducation, des salaires, de la participation au marché du travail, que de la segmentation de l’emploi. Les progrès en termes d’insertion des femmes sur le marché du travail, et en particulier des mères isolées, sont indéniables : ces avancées ont permis aux États-Unis de se hisser parmi les pays développés ayant les femmes les plus actives. Tout ceci s’accompagne d’un taux de fécondité élevé (2,10) qui place les États-Unis devant la Suède (1,85) et la France métropolitaine (1,98) champions européens dans ce domaine (INED, 2006). Ces améliorations cachent néanmoins un bilan plus mitigé.
73Depuis 2000, le taux de participation des femmes au marché du travail décroît légèrement. Les États-Unis, à l’instar des autres pays développés, n’ont pas entamé de réorganisation profonde de la société (Méda et Périvier, 2007) à la mesure de la Quiet Revolution dont parle Goldin (2004), qui a eu lieu entre la fin des années 1960 et le début des années 1970. Les femmes continuent d’assumer les tâches domestiques et familiales en plus de leur activité professionnelle, ce qui affecte les conditions de vie des femmes ayant des revenus modestes. Celles ayant des revenus suffisants pour se décharger de ces tâches, souvent les plus qualifiées, ajustent leur activité pour atténuer la pression exercée par leur environnement professionnel, qui réduit comme peau de chagrin le temps familial. En effet, les femmes ayant obtenue l’égalité ont dû se caler sur la carrière des hommes, ce qui exige un temps de travail long et peu de temps à consacrer à la famille. Les États-Unis constituent l’un des rares pays développés où la durée hebdomadaire de travail est de 40 heures, et où il n’existe aucune politique nationale déterminant une durée obligatoire de congés payés. Les droits de congés payés sont laissés à l’appréciation de l’employeur [52]. Evan Woodward (2001) parle de « the most vacation-starved country in the industrialized world », (« le pays industriel le plus affamé de temps libre »).
74Concernant les tendances générales, deux conclusions peuvent être tirées. La première est que la réduction moyenne des inégalités entre les sexes s’est inscrite dans un contexte d’augmentation substantielle des inégalités sociales, en particulier la progression des salaires des femmes durant les années 1980 est allée à contre courant de la tendance à la baisse des salaires des hommes, ce qui explique la résorption importante de l’écart de salaire entre les sexes.
75La seconde est que l’ampleur de la réduction des inégalités entre les sexes diffère sensiblement selon les catégories sociales et, de façon concomitante, les inégalités entre les femmes ont augmenté : les femmes non qualifiées sont moins en emploi que les hommes et que les femmes qualifiées, elles ont des ressources inférieures. Les femmes les plus qualifiées ont les moyens de recourir au marché pour externaliser les tâches domestiques et familiales, et celles-ci n’ayant, aujourd’hui comme hier, jamais peser sur l’emploi des hommes. Les femmes peu qualifiées qui travaillent subissent de plein fouet le manque d’investissements publics et l’absence d’une solidarité nationale envers les familles ; le coût des services privés amputent sensiblement leur revenu et les difficultés d’organisation pèsent sur leur emploi. Les motivations qui sont à l’origine de l’entrée de ces deux groupes de femmes sur le marché du travail ne sont pas de même nature : alors que la progression des femmes qualifiées dans l’emploi s’est faite à partir de revendications exigeant l’égalité de traitement avec les hommes (c’est d’ailleurs une des explications de l’absence de congé maternité selon Waldfogel), celle des moins qualifiées s’est faite à partir de considérations économiques (besoin accru de main-d’œuvre en période de croissance économique) et budgétaires, avec une remise en cause de l’État-providence traditionnel, s’appuyant sur la rhétorique de l’incitation au travail qui est à l’origine du développement du workfare.
1 – Les programmes d’action positive et leurs effets sur l’activité des femmes aux États-Unis
76Les actions positives consistent à compenser le traitement défavorable que subissent les groupes d’individus victimes de discrimination. Le principe est d’instaurer des quotas de places, réservés pour ces groupes discriminés, dans certains types d’emplois ou dans certaines filières de formation. Les groupes visés peuvent alors faire la preuve de leur compétence et de leur valeur, ce qu’ils n’auraient pas eu l’occasion de faire sinon. À long terme, les attitudes négatives à leur égard doivent disparaître. S’ils sont efficaces, ces programmes sont donc destinés à être limités dans le temps : une fois retirés, les individus anciennement discriminés ne devraient pas voir leur situation se détériorer à nouveau.
77En 1965, l’Executive Order 11246 du Président Johnson a été la première forme de régulation gouvernementale par l’action positive (Myers, 2005) : il s’agissait de s’assurer que les candidats à un poste, et les employés soient traités indifféremment selon leur race, leur couleur, leur religion ou leur sexe. Si ces programmes ont eu incontestablement un effet sur la situation des Américaines dans l’emploi, les résultats sont plutôt mitigés concernant l’ampleur du phénomène. L’action positive n’aurait pas grandement modifié la donne concernant l’emploi des femmes dans les entreprises participant aux programmes, ceux-ci auraient été plus efficaces pour l’emploi des minorités ethniques. Certes, entre 1974 et 1980, la demande d’emploi de femmes (blanches) relativement à celle d’hommes (blancs) dans les entreprises participant au programme d’action positive a cru presque 3 % plus vite que dans les entreprises ne pratiquant pas d’action positive (Leonard, 1984) [53]. Mais à partir de 1980, la part de femmes dans le personnel a augmenté dans les mêmes proportions dans les entreprises participantes et non participantes. Leonard (1989) explique cette tendance par le fait qu’à partir de 1980 le gouvernement fédéral était moins enclin à faire respecter les programmes d’action positive qu’il ne l’était auparavant. Or la bureaucratie interne aux entreprises n’est pas spontanément favorable à la dynamique de ces actions et manque de volonté pour les faire appliquer. Des études récentes indiquent que dans les entreprises pratiquant l’action positive dans leur procédure de recrutement, le dernier employé embauché avait 8 % de chances en plus d’être une femme blanche [54]. Myers (2005) utilise la suppression des programmes d’action positive en Californie [55] pour en mesurer l’impact sur le marché du travail. Elle trouve qu’après la suppression des programmes, le taux d’activité des femmes blanches et des minorités a baissé. Ce résultat peut s’interpréter de deux manières : soit les programmes d’action positive sont inefficaces car ils ne permettent pas de modifier les comportements, et dès qu’ils sont supprimés les groupes discriminés subissent à nouveau un marché du travail qui leur est défavorable ; soit ces programmes doivent être prolongés pour obtenir des résultats durables en matière de lutte contre la discrimination au travail.
2 – Les lois anti-discrimination et leur application
78Parmi les lois anti-discrimination, les articles fondateurs sont l’article VII des Droits civils de 1964 qui interdit la discrimination dans l’embauche et la promotion, ainsi que l’article IX des amendements de l’éducation de 1972, qui exige un égal traitement des sexes dans les programmes éducatifs, y compris dans les grandes écoles et à l’université. Ces lois ne sont pas restées lettres mortes comme en témoignent quelques exemples de sanctions ou de règlements auxquels certaines grandes entreprises ont dû se soumettre. En ayant des pratiques discriminatoires à l’égard des femmes, les entreprises s’exposent au risque de payer une amende dont le montant est dissuasif. Par exemple, en 1994 Lucky Store (une chaîne de distribution alimentaire) a dû verser 107 millions de dollars après que le juge l’ait déclaré coupable de pratiquer de façon régulière de la discrimination sexuelle concernant les procédures de placement, de promotion, de temps de travail et de distribution des heures supplémentaires entre ses employés. De même, en 1990, Price Waterhouse (un cabinet d’audit et de gestion d’envergure internationale) a été condamné par la Cour de justice comme étant coupable de maintenir un système d’évaluation permettant aux salariés de devenir associés, qui favorisait les commentaires négatifs basés sur des stéréotypes sexuels influençant une sélection des associés défavorable aux femmes (Blau et Kahn, 2000).
3 – Mesure du temps partiel et comparaison internationale
79Les comparaisons internationales de durées du travail doivent être abordées avec beaucoup de prudence tant l’hétérogénéité des données est grande (Bruyère et Chagny, 2004); de plus, selon la définition du temps partiel retenue, l’ampleur du phénomène varie sensiblement, ainsi les chiffres publiés par Eurostat et ceux de l’OCDE diffèrent de manière spectaculaire (tableau). Ces différences tiennent pour l’essentiel aux choix méthodologiques pour définir le concept de « temps partiel » [56].
Part du temps partiel en 2006 dans l’emploi et selon les sources statistiques
Part du temps partiel en 2006 dans l’emploi et selon les sources statistiques
80Selon l’OCDE, en 2006, la part du temps partiel dans l’emploi total aux États-Unis est comparable à celle qui prévaut en France ou en Suède (tableau). Certes un peu moins de 18% des femmes américaines (7,8% pour les hommes) sont à temps partiel contre 19% des femmes suédoises (8,4% pour les hommes), mais ces proportions sont somme toute très proches. Alors qu’en France 22,9% des femmes sont concernées par le temps partiel (5,1% pour les hommes). Les Américaines ne semblent donc pas particulièrement épargnées par le temps partiel. Si la définition retenue par l’OCDE présente l’avantage d’être précise et homogène, «avoir travaillé moins de 30 heures dans son emploi principal», elle ne donne qu’une mesure incomplète du temps partiel et ceci pour deux raisons principales. La première tient à la durée de travail choisie pour définir le temps partiel: en Suède le temps partiel est plutôt long alors qu’aux États-Unis il est souvent inférieur à 30 heures, de fait les données sous-estiment l’ampleur du temps partiel en Suède et appréhendent approximativement l’ampleur du phénomène outre-Atlantique. La seconde tient à la définition de l’emploi retenue. En effet il s’agit de «l’emploi principal». Or, un travailleur à temps partiel peut cumuler plusieurs emplois et au final avoir un temps de travail équivalent à un temps plein. La multi-activité (qui consiste à cumuler plusieurs employeurs pour un seul travailleur) est plus développée aux États-Unis qu’en Europe: cela représente en 2006 environ 5% de l’emploi total [57], contre 3,9% en France (en 2003 selon Skalitz, 2006). Mais ce phénomène est partagé à part égale avec les hommes outre-Atlantique (alors qu’en France il se concentre davantage sur les femmes), de fait s’il est possible qu’il réduise l’ampleur du temps partiel (au sens du temps de travail par individu), il n’en modifie pas sa répartition entre les sexes outre-Atlantique.
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Mots-clés éditeurs : emploi des femmes, inegalites entre les sexes, Etats-Unis, maternite
Date de mise en ligne : 01/05/2009
https://doi.org/10.3917/reof.108.0049Notes
-
[1]
High school dropouts.
-
[2]
Les taux d’activité et d’emploi sont issus des données de l’OCDE : www. oecd. org
-
[3]
En 2006, le taux de chômage était de 8,6 % en France contre 3,8 % aux États-Unis, et 5,3 % en Suède.
-
[4]
World Values Survey, 2000.
-
[5]
Au début des années 1960, dans les 3 pays les taux d’activité des hommes (25-54 ans) étaient proches de 96 %. La réduction de l’activité des hommes a été continue entre le milieu des années 1960 et 2006, elle s’est traduite par une baisse de plus de 5 points du taux d’activité aux États-Unis, contre un peu moins de 4 en Suède et 2 points en France.
-
[6]
L’étude de Lombard porte sur la période 1975 à 1991.
-
[7]
25 % des enfants âgés de moins de 18 ans vivent avec leur mère célibataire et leur taux de pauvreté est extrêmement élevé : 42 % contre 17 pour l’ensemble des familles avec enfants.
-
[8]
Notons qu’en France les mères isolées sont particulièrement affectées par le chômage, ainsi leur taux d’activité (80 %) est sensiblement supérieur à leur taux d’emploi.
-
[9]
Celles n’ayant pas le High School degree.
-
[10]
Le taux d’emploi des mères isolées non qualifiées était en 1986 de 45,6 % ; en 1990 il atteignait 49,4 %, pour culminer à 73,1 % en 2000.
-
[11]
90 % des bénéficiaires de l’AFDC recevaient également les Food Stamps. Les deux programmes représentaient en 1996 respectivement 23,7 et 25,5 milliards de dollars et constituaient le pilier de l’aide sociale américaine.
-
[12]
L’autre source d’impopularité de ces programmes sociaux tient au fait qu’ils auraient encouragé les naissances hors mariage : les jeunes femmes défavorisées auraient provoqué leur grossesse pour percevoir ces aides.
- [13]
-
[14]
Il s’agit d’une définition élargie de l’activité, qui comprend l’emploi, la formation, les travaux d’intérêt généraux, …. Néanmoins, le type d’activité pris en compte a été sensiblement resserré avec la reconduction du programme en 2002.
-
[15]
Les États ont disposé d’une grande autonomie pour établir les modalités d’application du programme, ce qui explique la diversité des modalités d’application de la loi sur le territoire américain (Périvier, 2007).
-
[16]
Pour une revue complète de la littérature voir Blank, 2002.
-
[17]
Ces chiffres, donnés par le U.S. Department of Labor, portent sur les femmes âgées de 25 à 64 ans.
-
[18]
Un peu moins de 18 % des Américaines (7,8 % pour les hommes) sont à temps partiel contre 19 % des Suédoises (8,4 % pour les hommes).
-
[19]
L’écart de taux de temps partiel entre les femmes sans enfant et celles avec deux enfants et plus est plus élevé aux États-Unis, avec plus de 13 points d’écart, qu’en France (11,8 points) et qu’en Suède (7,6 points).
-
[20]
De nombreuses mères suédoises ajustent leur temps travail à la marge et conservent un temps de travail proche du temps plein, elles ne sont donc pas comptabilisées dans les chiffres de l’OCDE sur le temps partiel.
-
[21]
Notons que, alors que la baisse des taux d’emploi est plus marqué pour les femmes avec enfants que pour celles n’en ayant pas, les pères (- 1,9 points) ont été moins affecté que les hommes sans enfant (- 2,8 points) par le manque de création d’emplois. Ceci confirme le fait que la maternité pèse sur l’emploi des mères alors que la paternité renforce l’emploi des hommes.
-
[22]
L’échantillon, représentatif au niveau national, comprend 2 tranches d’âge : les 28-40 ans et les 41-55 ans. Les niveaux de qualification sont les suivants : Graduate degree, professional degree ou high honors undergraduate degree.
-
[23]
93 % des femmes qui se sont arrêtées de travailler souhaitent reprendre leur carrière, les trois quart d’entre elles y parviennent et seulement 40 % à temps plein. En moyenne les interruptions de carrière durent un peu plus de 2 ans et impliquent une perte de salaire d’environ 18 %.
-
[24]
L’augmentation de la pénalité sur l’emploi des femmes engendrée par la présence d’un enfant n’est significative que lorsque le point de départ est l’année 2000 (une année atypique), mais sur la tranche 2001-2005 la tendance n’est plus significative (Boushey, 2008).
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[25]
Selon les auteurs, le taux de chômage est resté faible (autour de 5 %) car des millions de travailleurs ont quitté le marché du travail.
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[26]
Ceci s’est déjà produit lors de la Seconde Guerre mondiale, mais la tendance s’était retournée, les anciens soldats ayant bénéficié de la GI bill pour aller à l’université.
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[27]
Pourcentage de filles qui devraient changer d’orientation pour obtenir la parité dans toutes les filières. Un indice égal à 1 indique une totale ségrégation, les femmes et les hommes seraient chacun concentrés dans des filières différentes, un indice égal à 0 indique une distribution parfaitement égalitaire.
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[28]
L’âge moyen du mariage est passé de 23 ans pour les femmes nées en 1950 à 26,5 ans pour celles nées en 1965.
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[29]
Les chiffres donnés valent pour l’ensemble de la population active, exception faite du secteur agricole.
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[30]
Les pays du Nord ont une plus forte ségrégation professionnelle (ainsi que l’Allemagne et l’Autriche). La forte segmentation dans les pays nordiques s’explique par la traditionnelle concentration des femmes dans les secteurs de l’éducation, de la santé, dans les services sociaux, secteurs ayant permis le développement de l’activité des femmes.
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[31]
Le terme « cadre » regroupe la catégorie professionnelle suivante : Management, business et financial (Census Bureau).
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[32]
Cette catégorie correspond à celle des « managers and professional ».
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[33]
En 1967, plus de 65 % des hommes diplômés exerçaient une profession libérale, en 1997 ils étaient 62 % (Black et Juhn, 2000).
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[34]
Parmi les couples dans lesquels les deux conjoints travaillent (http:// www. bls. gov).
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[36]
College graduates and professionals with advanced degrees.
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[37]
L’écart entre les taux d’activité des femmes qualifiées et des non qualifiées (niveau d’étude inférieur au 2e cycle) est passé de 37,5 points en 1994 à 30 points de pourcentage en 2005 (OCDE, 2007).
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[38]
Les bad jobs n’offrent ni couverture maladie ni plan de retraite et sont assortis d’un salaire faible (Smith, 2007).
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[39]
Ce revenu correspond au revenu annuel disponible d’un parent isolé de deux enfants, qui travaille à mi-temps au salaire minimum après 12 mois de travail (au 1er janvier 2003).
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[40]
L’introduction du TANF est associé à une augmentation de 7,8 % de la probabilité de ne pas être couvertes par une assurance maladie pour les anciennes bénéficiaires de l’aide sociale, c’est-à-dire celles qui sont sorties du programme social en prenant un emploi.
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[41]
Six mois après la sortie du Welfare, un tiers d’entre elles n’ont plus accès à aucune couverture maladie, seulement la moitié d’entre elles sont couvertes pas un programme public, et un an après leur sortie, moins d’un quart sont couvertes par Medicaid et la moitié n’a pas d’accès à une couverture maladie (Garett et Holahan, 2000).
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[42]
En particulier, certaines bénéficiaires pensent à tort que la durée limitée de perception du TANF s’applique également au programme Medicaid.
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[43]
Pourtant une loi fédérale datant de 1988 (Transitional Medicaid Assistance) permet de lisser dans le temps la perte du droit à la Medicaid due à une augmentation des revenus en garantissant une période de 6 à 12 mois d’éligibilité indépendamment des revenus de la famille (Garett et Holahan, 2000).
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[44]
Selon l’Urban Institute, en 2002, 42 % des bénéficiaires de l’aide sociale n’avaient pas le bac, 35 % se déclaraient en mauvaise santé, et 30 % n’avaient pas travaillé récemment (hhttp:// www. urban. org/ UploadedPDF/ 900980_welfarereform.pdf).
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[45]
Au total 20 % des anciens bénéficiaires du Welfare sont sans emploi, inéligibles à toute aides sociales et ne profitent des revenus d’un conjoint (http:// www. urban. org/ toolkit/ issues/ welfarereform. cfm#findings).
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[46]
Le salaire horaire minimum a baissé de 30 % en 1979 et 1989, passant de 2,90 dollars à 2,01dollars (en dollars1979).
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[47]
Les trois quarts de cet écart sont inexpliqués et relèvent soit d’une discrimination envers les personnes à temps partiel, soit parce que les caractéristiques non observables (comme par exemple la motivation) diffèrent systématiquement entre les travailleurs à temps partiel et ceux à temps plein.
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[48]
A partir du National Longitudinal Survey of Youth, 1982-1993.
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[49]
Le Family and Medical Leave Act de 1993 a instauré un congé maternité qui garantit pendant 12 semaines la protection de l’emploi, mais il ne s’applique qu’aux salariées de grandes entreprises, au total seulement la moitié des salariées sont couvertes par ce congé ; il n’est rémunéré que très rarement, cela dépend à la fois de l’État et de l’employeur. Aussi, les femmes combinent-elles souvent des congés maladies sick leave, des congés pour incapacité short-term disability leave, jours de congé et des congés sans solde. Voir : http:// mchb. hrsa. gov/ whusa_05/ pages/ 0304ml. htm
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[50]
La loi Auroux a néanmoins introduit en 1982 l’obligation pour les entreprises de négocier les salaires une fois par an.
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[51]
Le salaire horaire minimum légal est plus faible aux États-Unis qu’en France : 5,85 dollars au niveau fédéral au 1er janvier 2008, soit un peu moins de 4 euros, contre 8,44 euros brut de l’heure en France. Les différences entre les États sont importantes puisque certains États ne garantissent aucun salaire minimum (Alabama ou Louisiane) et d’autres offrent un salaire minimum de 8 dollars (soit 5,4 euros, comme dans l’État du Massachussetts ou de Californie, http:// www. dol. gov/ esa/ minwage/ america. htm). En Suède, il n’existe pas de minimum légal, mais plus de 80 % des salariés sont syndiqués et 90 % occupent un poste encadré par une convention collective, qui définit les salaires. Le salaire minimum serait autour de 7,5 euros de l’heure. Néanmoins aux États-Unis moins de 1,5 % des salariés perçoivent le salaire minimum contre 15,6 % en France (Eurostat, 2006).
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[52]
Dans la pratique, les employés d’entreprises moyennes ou grandes bénéficient de 10 jours de congés payés par an en moyenne la première année, pour atteindre 14 jours après 5 ans d’ancienneté et 17 après 10 ans. Les travailleurs font valoir plus de 90 % de leurs droits aux congés, ce chiffre est plus élevé pour les femmes et les non-qualifiés.
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[53]
L’étude portait sur 68 000 établissements. Notons que la demande d’emplois d’individus noirs relativement à celle d’individus blancs a cru, quant à elle, de 9 %.
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[54]
Pour une revue de littérature voir Myers, 2005.
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[55]
Le vote en 1996 de la Proposition 209, applicable en janvier 1997, a engendré la suppression de tous les programmes d’action positive dans l’éducation et le recrutement dans la fonction publique. Myers (2005) utilise cette modification législative pour comparer le marché du travail en Californie et dans le reste du pays en appliquant une méthode de triple différence.
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[56]
Pour l’OCDE, une personne travaille à temps partiel si elle travaille moins de 30 heures dans son emploi principal, alors que Eurostat retient la perception qu’ont les personnes interrogées lors de l’Enquête sur les forces travail sur la nature de leur travail. L’utilisation d’un seuil d’heures permet selon l’OCDE de limiter l’impact des emplois qui se trouvent à la limite entre temps partiel et temps plein dans les comparaisons internationales (OCDE, 1999).
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