Notes
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[*]
Cette prévision a été réalisée à l’aide du modèle trimestriel de l’économie française, e-mod.fr, par une équipe dirigée par Éric Heyer, composée de Guillaume Chevillon, Gaël Dupont, Matthieu Lemoine, Hervé Péléraux et Mathieu Plane. La prévision tient compte des informations disponibles à la fin mars 2004 et intègre les comptes nationaux trimestriels de mars 2005, à savoir le compte emplois-ressources jusqu’au quatrième trimestre 2004 et les comptes d’agents jusqu’au troisième trimestre 2004. La prévision et le modèle reposent sur les données et les concepts de la comptabilité nationale base 95 dans le cadre du SEC95. Le modèle est estimé sur la période 1978-2000.
-
[1]
Pour plus de détails sur ces équations économétriques, se référer à Heyer et alii (2005) : « Estimations d’équations de consommation : une comparaison Allemagne, États-Unis et France », Document de travail de l’OFCE, à paraître.
-
[2]
Pour plus de détails, se référer à la note de conjoncture de l’INSEE, mars 2005, p. 101.
-
[3]
Nicolas Sarkozy a présenté le 4 mai 2004 un plan de relance de l’économie française. Ce plan vise à abaisser le taux d’épargne des français pour stimuler la croissance dans un contexte de rigueur budgétaire. Dans une étude de l’OFCE (Valérie Chauvin et alii (2004) : « Évaluation du plan de relance de l’économie française », Document de travail de l’OFCE, n° 2004-04, mai), nous avons évalué principalement trois mesures. 1) Un crédit d’impôt sur les intérêts versés au cours des années 2004 et 2005 au titre du crédit à la consommation. Ce crédit d’impôt pourrait augmenter la consommation de 1 milliard d’euros pour un coût budgétaire de l’ordre de 400 millions d’euros par an. 2) L’exonération de droits sur les donations anticipées inférieures à 20 000 euros. Cette mesure induirait un transfert des plus âgés vers les plus jeunes compris entre 0 et 8,8 milliards d’euros pour un effet sur la consommation de 0 et 500 millions d’euros. 3) Le déblocage anticipé des réserves de participation. Cette mesure pourrait conduire à l’injection de 3 milliards d’euros de réserves de participation et avoir un impact comparable sur la consommation.
-
[4]
L’indicateur avancé de l’OFCE, qui exploite l’information contenue dans les enquêtes de conjoncture, confirme ce schéma : la reprise de l’activité engagée au quatrième trimestre 2004 s’essoufflerait au cours du premier semestre 2005, avec des hausses du PIB de 0,3 % et 0,6 % respectivement aux premier et deuxième trimestres (encadré 1).
-
[5]
Il s’agit des retraites anticipées des personnes ayant eu des carrières longues (voir encadré dans la Revue de l’OFCE, n° 89).
-
[6]
Notre échantillon ne retient que les sociétés non financières du CAC 40 ainsi que celles pour lesquelles nous disposons d’un historique comptable supérieur à dix ans.
-
[7]
Voir Revue de l’OFCE n° 81, pp. 245-300, pour une présentation du modèle et de ses variables.
-
[8]
Voir partie internationale et Revue de l’OFCE, n° 91.
-
[9]
Industries Électriques et Gazières.
-
[10]
La rallonge salariale de 0,8 % promise le 4 avril n’a pas été intégrée dans notre scénario.
Scénario général France
2004, une année de reprise…
1L’année 2004 a été une année de reprise. Alors que l’économie française a connu en 2003 sa plus faible croissance depuis la récession de 1993 et a, pour la première fois depuis 1997, progressé au même rythme que la zone euro (0,5 % en moyenne annuelle), elle retrouve en 2004 une croissance de 2,4 % (tableau 1 et graphique 1). Bien qu’accompagné au deuxième trimestre par les dépenses d’investissement, ce redémarrage de l’économie résulte pour l’essentiel de la croissance de la consommation des ménages. Cette dernière s’étant réalisée dans un climat peu porteur — pouvoir d’achat en berne dû à un marché du travail peu dynamique et à une accélération de l’inflation en raison des effets directs de la hausse des prix du pétrole — les ménages ont réduit leur épargne et ont eu recours à l’emprunt. Cette évolution a été favorisée par le faible niveau des taux d’intérêt.
Contribution à la croissance du PIB
Contribution à la croissance du PIB
Impact des chocs extérieurs sur l’économie française
Impact des chocs extérieurs sur l’économie française
… certes molle…
2Faisant suite à trois années de faible croissance, la vigueur de la reprise est décevante. Ce résultat s’explique en premier lieu par l’appréciation passée de l’euro. La hausse progressive de la monnaie unique a pesé fortement sur les croissances européenne et française au cours des deux dernières années. Son impact négatif a été maximal en 2004, amputant la croissance française de 0,7 point de PIB (graphique 1).
3Le cycle de croissance de l’économie française, fortement dépendant de la courroie de transmission des échanges mondiaux, a alors été atténué et ce d’autant plus que la hausse des prix du pétrole est venue rogner l’activité de 0,2 point en 2004 (graphique 1). Au total, ces deux chocs extérieurs ont, l’an dernier, amputé de près d’1 point la croissance dans l’hexagone, empêchant l’économie française de rattraper une partie de son retard de production accumulé depuis 2001.
4Par ailleurs, la conjoncture française a subi l’influence de deux forces contradictoires : si, comme nous le détaillerons plus tard, la demande intérieure est restée très dynamique, l’environnement extérieur a bridé, sans la rompre, cette phase de reprise de l’activité. Ce caractère dichotomique de la croissance française, observé depuis 2002, a été particulièrement marqué au cours de ces deux dernières années. La France est le pays de la zone euro qui a le moins bénéficié du dynamisme de la demande mondiale en 2003 et 2004 : l’année dernière, les échanges extérieurs ont amputé la croissance de 1,2 point de PIB dans l’hexagone alors qu’ils ont été neutres pour la zone euro. Si l’appréciation du taux de change effectif de l’euro et la hausse du prix du pétrole expliquent ce mauvais résultat, elles ne permettent nullement d’expliquer l’écart de performance avec le reste de la zone euro. Les raisons de celui-ci sont à chercher du côté de la spécialisation géographique et sectorielle de la France mais aussi de la politique menée par l’Allemagne depuis deux ans : en centrant davantage ses échanges sur la zone euro et dans des secteurs moins adaptés à la demande actuelle des pays émergents, la France n’a pas profité pleinement, contrairement à l’Allemagne par exemple, de la reprise engagée dès le second semestre 2003 aux États-Unis et surtout en Asie et dans les pays d’Europe de l’Est. Compte tenu également de sa spécialisation sectorielle forte dans l’aéronautique et dans les biens de consommation sensibles à l’effet-prix, la France a également plus souffert que ses partenaires de la crise du secteur aérien liée aux événements du 11 septembre et de l’appréciation de l’euro. Cette désaffection pour les produits français a renforcé l’érosion de la compétitivité-prix, et explique une partie de la forte baisse des parts de marché de la France au cours de ces deux dernières années.
5Les pertes de parts de marché non expliquées par les effets de taux de change et de spécialisation (6,5 % en cumulé sur deux dernières années) peuvent être liées à la politique économique et sociale menée en Allemagne et à ses répercutions sur l’activité : engagée depuis 2003 dans une thérapie visant l’amélioration de l’offre par la limitation des revenus et des transferts, l’Allemagne présente une contribution fortement négative de la demande intérieure. Cette thérapie de choc induit également une contribution des échanges bien plus positive (+ 1,0 %) que celle de ses partenaires européens (+ 0,1 %) et expliquerait une partie des pertes de marché de la France.
… mais supérieure à celle de nos homologues européens
6Cette situation, qui peut paraître peu brillante au regard de l’histoire récente de la croissance dans l’hexagone, l’est davantage lorsqu’on la compare à celle de ses partenaires européens (tableau 1 et graphique 2) et tout particulièrement à celle de ses deux principaux que sont l’Allemagne et l’Italie (tableau 2).
Croissance du PIB en France et dans la zone euro
Croissance du PIB en France et dans la zone euro
Comparaisons européennes
Comparaisons européennes
7Par leurs projets d’investissement pour les uns, leurs achats pour les autres, les entreprises et les ménages ont permis à l’économie française de croître à un rythme supérieur à celui de ses principaux partenaires européens (tableau 2).
8Certes ce phénomène n’est pas nouveau : depuis 1998, les agents français dépensent plus que leurs homologues Allemands ou Italiens, permettant à la France de connaître un taux de croissance annuelle moyen supérieur de plus de 1 point. Plus atypique est la raison de ce supplément de consommation en 2003 et 2004. Au cours de la période 1998-2002, ce surplus a été alimenté par de plus fortes créations d’emplois dans l’hexagone mais aussi par une politique budgétaire plus expansionniste que chez nos principaux partenaires (graphique 3). Si au cours de ces deux dernières années, l’impulsion budgétaire est restée plus favorable en France, la situation sur le marché du travail, s’est en revanche plus fortement dégradée dans l’hexagone. Le maintien d’une plus forte consommation en France résulte du comportement d’épargne des ménages. Le taux d’épargne a baissé de 0,9 point en 2003 et de 0,5 point en 2004, s’établissant à 15,2 % en fin d’année, alors que dans le même temps les ménages allemands épargnaient davantage (0,2 point supplémentaire en 2003 et 0,3 point en 2004).
Écart entre la France et ses principaux partenaires [*]…
Écart entre la France et ses principaux partenaires [*]…
9La hausse des prix de l’immobilier est une piste susceptible d’expliquer cette baisse du taux d’épargne en France. D’une part, l’immobilier est un vecteur très puissant de transmission de la politique monétaire. Le bas niveau des taux d’intérêt rend, d’un côté, l’achat de logements rentable par rapport à la location et de l’autre solvables les ménages qui veulent se porter acquéreurs. Ce phénomène se traduit par une augmentation de l’écart critique — différence entre le taux de croissance du revenu des ménages et le taux d’intérêt —, indiquant une plus forte capacité d’emprunt des ménages. Ces derniers, en accédant massivement au crédit — la part des nouveaux crédits dans le RDB des ménages est en 2004 à son maximum historique — injectent des liquidités dans l’économie, stimulant la consommation. D’autre part, selon un effet de richesse souvent évoqué, les ménages propriétaires se sentent plus riches, ce qui stimule leur consommation.
10Nous avons tenté, à l’aide d’équations économétriques [1], de quantifier l’impact de ces deux éléments sur l’évolution du taux d’épargne en France et en Allemagne. Deux conclusions ressortent de cette comparaison :
11— La sensibilité de la consommation au taux d’intérêt est plus forte en France qu’en Allemagne (cf. graphique 4). Une baisse permanente de 1 point des taux d’intérêt provoque à l’horizon de 5 ans une baisse de 0,16 point du taux d’épargne en France contre 0,09 point en Allemagne.
Impact d’une baisse ponctuelle de 1 point des taux d’intérêt…
Impact d’une baisse ponctuelle de 1 point des taux d’intérêt…
12— Le seul impact de l’écart critique explique quasi intégralement de la différence de variation du taux d’épargne entre la France et l’Allemagne en 2003 et plus de la moitié en 2004 (cf. tableau 3).
Pourquoi le taux d’épargne baisse plus en France qu’en Allemagne ?
Pourquoi le taux d’épargne baisse plus en France qu’en Allemagne ?
13En 2004, une partie de l’écart non expliqué par ces deux éléments résulte de l’incidence des mesures prises en mai par Nicolas Sarkozy visant à abaisser le taux d’épargne des français. Sur les 15 milliards d’euros rendus liquides par ces mesures, seul 1,5 milliard a été réellement dépensé selon l’INSEE [2]. D’après cette évaluation, proche de celle effectuée par l’OFCE [3], ces mesures auraient permis une baisse de 0,15 point du taux d’épargne en 2004.
Quel scénario à l’horizon 2006 ?
14Avec un net redressement de la situation opérationnelle et financière des entreprises et une réactivation de la politique de l’emploi, l’année 2005 n’a pas démarré sans atouts.
Le redressement de la situation des entreprises…
15Après une phase d’attentisme durant laquelle elles ont gelé leurs projets d’investissement et reconstitué leurs stocks, les entreprises ont profité de taux d’intérêt faibles pour rétablir leur situation financière et leur profitabilité. Grâce à de forts gains de productivité et à un contrôle drastique de leur croissance externe, le taux de marge ainsi que le taux de profit des entreprises — id est épargne brute des entreprises augmenté des dividendes nets versés aux actionnaires — se sont redressés en 2004. L’amélioration constatée de la rentabilité des entreprises, illustré par les bénéfices records de celles du CAC 40, et les bonnes conditions de financement pour les sociétés abondent également dans le sens d’une accélération possible de l’investissement. En l’absence de contrainte de surcapacité, rien ne semble empêcher une reprise franche de l’investissement productif si l’accélération de l’activité se confirme.
… ainsi que la réactivation de la politique de l’emploi…
16Sous l’effet conjugué d’un ralentissement de la productivité du travail dans le secteur marchand et de la réactivation de la politique de l’emploi, la croissance en 2005 et en 2006 devrait être plus riche en emplois que celle de 2004.
17En créant un nouveau contrat — le contrat d’avenir, destiné aux allocataires de minima sociaux — réservé au secteur non marchand, la politique de l’emploi menée par le gouvernement change de cap cette année. Sa réorientation du secteur non marchand vers le secteur marchand (non-renouvellement des emplois-jeunes, réduction importante des effectifs en Contrats Emploi Solidarité, création des contrats jeunes en entreprise) engagée depuis 2002 s’est avéré insuffisante pour améliorer la situation de l’emploi. Pire, menée dans un contexte de ralentissement de l’activité, cette politique a globalement amplifié de respectivement 0,2 et 0,1 point en 2003 et en 2004 la montée du taux de chômage en France (graphique 5).
Cumul des créations de postes dues à la politique de l’emploi
Cumul des créations de postes dues à la politique de l’emploi
18Compte tenu de cette réorientation, et malgré les baisses d’effectifs en CES et en emplois-jeunes, la politique de l’emploi devrait contribuer au recul du taux de chômage pour 0,2 point en 2005 et 2006.
… auraient dû permettre une forte reprise de l’activité
19La demande interne aurait dû contribuer davantage à la reprise et engager la France sur un sentier de croissance dépassant 3 % par an qui lui permettrait de combler son retard de production (graphique 6).
Écart de production en France
Écart de production en France
20Le cheminement que nous envisageons en 2005 s’annonce malheureusement plus heurté : le ralentissement de la demande mondiale consécutif à la hausse des taux d’intérêt aux États-Unis, les prix élevés du pétrole et la disparition des stimulations budgétaires qui ont porté la croissance récemment, limiteraient quelque peu l’activité au cours du premier trimestre 2005 qui renouerait progressivement avec une croissance soutenue en fin d’année 2005 [4].
21La consommation, qui a constitué le principal moteur de la croissance en 2002 et 2003 permettant à l’économie française d’éviter la récession et de se détacher de l’Allemagne et de l’Italie, devrait quelque peu s’essouffler en début d’année 2005 avec le risque grandissant de chômage et de hausse prochaine des prélèvements obligatoires pour financer le système de protection sociale. Les ménages seraient plus prudents, limitant alors la baisse du taux d’épargne (– 0,2 point en 2005 et en 2006) et la croissance de la consommation (2,4 % en 2005 et 2006 contre 2,7 % en moyenne au cours des six dernières années avec des pics à plus de 3,5 % en 1998 et 1999 (graphique 7).
Taux d’investissement et taux d’épargne
Taux d’investissement et taux d’épargne
22La reprise de l’investissement productif, amorcée au deuxième trimestre 2004, prendrait le relais. Il devrait croître à un rythme de 3,8 % en 2005 et de 5,8 % en 2006, rythme toutefois inférieur à ceux observés au cours des dernières périodes de reprise (9 % en moyenne au cours de la période 1998-2000).
Les raisons d’une reprise « entravée »
23En moyenne annuelle, l’économie française devrait croître de 2,2 % en 2005 et 2,4 % en 2006. Cette croissance permettrait, en cumulant les effets de la politique de l’emploi et ceux de la réforme des retraites, de faire baisser le taux de chômage à 9,5 % de la population active fin 2005 et à 9,1 % fin 2006.
24Une croissance inférieure à 3 % alors que l’activité au cours des quatre dernières années a été très inférieure à son potentiel, est une performance modeste (graphique 6). Le redémarrage de l’économie française est tempéré dans notre prévision par l’environnement international et la politique budgétaire, et son rythme est inférieur à ce qui serait possible après une phase de fort ralentissement, comme le montre une comparaison avec les précédents scénarios de reprise (graphique 8). À l’horizon 2006, la reprise anticipée est très en deçà de celle constatée à la fin des années 1980 ou plus récemment en 1997. Fin 2006, soit 14 trimestres après le creux conjoncturel, le déficit de croissance cumulé par rapport aux dernières reprises s’élève à près de 5 points de PIB, soit 2 points de taux de chômage supplémentaires.
2004-2006 : Une reprise « entravée »
2004-2006 : Une reprise « entravée »
En 2005, la reprise sera pénalisée par la hausse passée de l’euro et celle du prix du pétrole…
25Cette sortie de crise « molle » s’explique en premier lieu par l’appréciation de l’euro, entamée en 2002. Nous faisons l’hypothèse d’un arrêt de ce mouvement haussier au cours du second trimestre 2005. Cependant, compte tenu des délais de réaction, la hausse antérieure de la monnaie unique pèsera encore sur les croissances européenne et française cette année. Son impact négatif serait, certes, inférieur à celui enregistré en 2004 (– 0,7 point), mais viendrait tout de même amputer la croissance française de 0,2 point en 2005 (graphique 1 et tableau 4). De son côté, la hausse des prix du pétrole continuerait de rogner l’activité en 2005 (– 0,3 point, graphique 1 et tableau 4).
Les raisons d’une reprise « entravée »
Les raisons d’une reprise « entravée »
26En 2005, l’impact cumulé de la hausse de l’euro et du prix du pétrole amputera la croissance de 0,5 point, soit 0,4 point de moins que celui enregistré en 2004 (graphique 1). Cette relative bonne nouvelle est tempérée par les effets contraires de la politique budgétaire.
… et par la politique budgétaire en 2005 et en 2006
27Alors qu’en 2004, la politique budgétaire a été quasiment neutre, elles devrait être plus restrictive en 2005 (– 0,2 point de PIB). En 2006, les variations du dollar ne devraient quasiment plus affecter la croissance dans l’hexagone. Nous faisons également l’hypothèse que le prix du baril retournerait progressivement vers sa valeur « cible », ce qui limiterait son impact sur la croissance. En revanche, la politique budgétaire devrait peser sur l’activité (– 0,4 point de PIB), empêchant, à son tour, l’économie française de croître au-delà de 3 % (tableau 4 et graphique 9).
Impulsion budgétaire…
Impulsion budgétaire…
28Le déficit public passerait de 3,7 % du PIB en 2004 à 3,0 % en 2005 en tenant compte de la recette exceptionnelle issue de la soulte des Industries Électriques et Gazières (IEG), soit un niveau légèrement supérieur à ce que prévoit le gouvernement (2,9 % du PIB). En 2006, l’accélération conjoncturelle et la poursuite de la rigueur budgétaire permettront de compenser l’absence de soulte et de stabiliser le déficit des Administration Publiques (3,0 % du PIB). Le risque d’avoir un déficit supérieur à 3,0 % du PIB pour la cinquième année consécutive en 2006 n’est pas négligeable. Compte tenu de son inertie, la dette publique augmenterait en 2005 et en 2006, où elle atteindrait 66,6 % du PIB.
Les risques
29Bien entendu des risques existent qui pourraient conduire à une remise en cause de notre scénario à l’horizon 2006. Ils sont, pour l’essentiel, relatifs à l’environnement international : crise pétrolière majeure, ralentissement marqué de la croissance dans le monde, chute prolongée du dollar, etc.
30La croissance serait amputée de 0,8 point à l’horizon 2006 si le prix du pétrole se maintenait à 55 dollars le baril et si l’euro s’établissait à 1,4 dollar.
Des scénarios illustratifs des risques sur la croissance française
Des scénarios illustratifs des risques sur la croissance française
31Par ailleurs, bien qu’à l’aune des perspectives économiques de la zone euro, la Banque Centrale Européenne (BCE) n’a aucune raison d’augmenter son taux directeur, ce risque existe tout de même. En réponse à l’accord sur le Pacte de stabilité, décidé le 22 mars dernier, et interprété par le gouverneur de la BCE comme facteur aggravant la tendance au laxisme budgétaire au sein de l’union européenne, la banque centrale pourrait décider de resserrer sa politique monétaire. Une hausse de 1 point des taux d’intérêt d’ici la fin de l’année 2005 amputerait alors de 0,2 point la croissance en 2006.
32Un scénario de dynamique interne plus noir est également envisageable. Il suppose un enchaînement d’évolutions négatives qui pour l’heure ne transparaissent pas dans les enquêtes : pessimisme des ménages qui épargneraient davantage ou blocage des investissements par des entreprises trop frileuses. Ces risques internes paraissent plus limités. Il est même possible que le gouvernement connaisse des difficultés à tenir ses engagements budgétaires. Depuis 2000, l’impulsion budgétaire effective a été chaque année plus forte que celle anticipée sur la base des informations budgétaires fournies par le gouvernement (0,5 point de PIB en moyenne sur la période). Cet écart réside principalement dans la non maîtrise des dépenses de santé (0,3 point). En 2004, alors que les mesures annoncées dans le projet de loi de finance laissaient anticiper une politique budgétaire restrictive, amputant la croissance d’environ 0,3 point, celle-ci s’est finalement avérée moins restrictive (graphique 9). Si un tel écart devait se reproduire à l’horizon de notre prévision, la croissance dans l’hexagone se rapprocherait alors de 3 % en 2006.
1. Trou d’air industriel
Au cours du premier semestre 2005, l’économie française devrait ralentir, tout en faisant preuve de résistance dans un contexte de moindre dynamisme de l’économie mondiale, et surtout européenne. La dégradation du climat international, auquel est davantage exposée l’industrie, a retenti sur la confiance des industriels, en nette baisse depuis trois mois et qui contribue négativement aux prévisions pour la première fois depuis environ deux ans. En revanche, l’amélioration des enquêtes de conjoncture dans les services au second semestre 2004 empêchera une franche dégradation de l’activité au premier semestre 2005. Conséquence de cet effet de ciseaux des enquêtes : l’année 2005 pourrait s’ouvrir sur une hausse trimestrielle du PIB de 0,3 % avant un rebond au deuxième trimestre. Au total, le rythme trimestriel moyen de croissance s’établirait non loin du potentiel, 0,5 %, comme dans la seconde moitié de 2004.
Le taux de croissance trimestriel du PIB observé et prévu
Le taux de croissance trimestriel du PIB observé et prévu
Ménages : insaisissable effet de richesse ?
33L’économie française a été soutenue par les dépenses des ménages, principale contribution à la croissance du PIB en 2004. Consommation et investissement en logement ont contribué pour plus de la moitié (1,4 point) au taux de croissance du PIB.
34Au delà de ses à-coups trimestriels, baisse de 0,2 % au troisième trimestre, puis hausse de 1,2 % au quatrième, la consommation a accéléré en moyenne sur l’année 2004, de 1,6 % en 2003 à 2,2 % (graphique 10). Mais si le crû 2004 de la consommation ne figure pas parmi les meilleurs de ces vingt dernières années, il ne s’inscrit pas non plus au nombre des plus mauvais, à l’inverse de la majeure partie des années 1990 pénalisée par la montée du taux d’épargne.
Épargne, revenu disponible réel et consommation des ménages
Épargne, revenu disponible réel et consommation des ménages
35Après avoir culminé en 2002 à 16,8 %, le taux d’épargne a fortement reculé en 2003 et en 2004, soutenant les dépenses de consommation alors que la croissance du revenu disponible brut (RDB) réel tombait largement en dessous de son niveau moyen des années 1998 à 2002. Engagée alors que le taux de croissance du RDB chutait fortement en 2003, la baisse du taux d’épargne, qui aurait pu être moins marquée en 2004 au regard du redressement du RDB, voire inexistante, s’est prolongée et a permis une accélération de la consommation.
36Cette hausse de la propension à consommer peut s’expliquer par les effets patrimoniaux de la hausse du marché de l’immobilier. Non pas par le canal du crédit hypothécaire, c’est-à-dire le crédit à la consommation gagé sur un bien apporté en garantie des capitaux empruntés, qui, à la différence des pays anglo-saxons n’existe pas en France, mais par l’injection de liquidités dans l’économie liée au développement du crédit immobilier. En effet, la baisse des taux d’intérêt incite les ménages à se tourner vers l’emprunt immobilier. Les banques sont d’autant plus enclines à répondre à cette demande que les crédits sont gagés sur un patrimoine immobilier qui s’apprécie. En allongeant la durée des prêts, pour ne pas épuiser la solvabilité des nouveaux prétendants à l’accession à la propriété, les établissements prêteurs favorisent directement la montée des prix.
37Cette montée de l’endettement immobilier a profité davantage à l’ancien qu’au neuf. La FBCF des ménages, qui ne concerne que les logements neufs, ne s’est en effet redressée que tardivement. Avec une hausse de 3,7 % en 2004 après une quasi stagnation entre 2001 et 2003, l’investissement dans le neuf est loin d’égaler les pics de 1989 et 1999 à plus de 7 % de hausse annuelle.
38En conséquence, la hausse de l’endettement, principalement pour l’achat de logements anciens, permet au vendeur en dernier ressort de réaliser en liquidités son patrimoine immobilier. Le crédit immobilier est donc finalement à l’origine d’une création de liquidités, qui a atteint 2,5 points de RDB en 2004 (graphique 11), dont une partie est utilisée pour la consommation, entraînant alors une baisse du taux d’épargne.
39Les « mesures Sarkozy » ont pu aussi ponctuellement doper la consommation, mais dans la deuxième moitié de l’année seulement avec l’annonce puis la mise en place du train de mesures. Force est de constater cependant que la nette hausse de la consommation au quatrième trimestre 2004 a fait suite à un repli au troisième. Difficile donc de démêler l’impulsion et l’évolution spontanée. Au total, la consommation aura ralenti à 1 % au second semestre 2004, à comparer au 1,5 % du premier semestre.
40À l’horizon de la prévision, la consommation poursuivrait sa progression. D’abord les facteurs de baisse du taux d’épargne continueraient à jouer cette année et l’année prochaine, mais plus modérément qu’auparavant. Ensuite, l’augmentation de l’emploi serait à l’origine d’une reprise des revenus salariaux qui compenserait l’impact négatif sur la consommation de la moindre baisse du taux d’épargne.
Le revenu des ménages
41En 2004, le revenu des ménages a été très faiblement soutenu par la progression de la masse salariale, essentiellement celle du secteur privé (tableau 6). Si l’emploi salarié dans le secteur marchand a stagné en 2004, après avoir fléchi de 0,1 % en 2003, l’emploi salarié non marchand a fortement reculé, de 0,6 % après une hausse de 0,3 % en 2003. La progression des revenus salariaux résulte ainsi de la reprise du salaire par tête dans le secteur marchand, liée à l’embellie conjoncturelle de 2004 après le creux marqué de 2003 (encadré 2). Dans le secteur non marchand, le recul du salaire par tête en termes réels est allé de pair avec la baisse de l’emploi. En 2005 et en 2006, le rythme de progression de la masse salariale s’élèvera, porté par l’accélération des salaires individuels dans le secteur privé, mais aussi par la reprise de l’emploi. Dans le secteur public, les évolutions seront moins défavorables si les annonces du gouvernement concernant la revalorisation du traitement des fonctionnaires sont suivies d’effets.
Croissance du revenu réel des ménages
Croissance du revenu réel des ménages
2. En 2003, hausse du SMIC, mais baisse des bas salaires…
La hausse provient de la revalorisation du SMIC en euros courants de 5,3 % au 1er juillet 2003 (tableau 1). La revalorisation fait suite à la loi « Fillon » visant d’ici à 2005 la convergence progressive des salaires horaires minimaux issus du SMIC et des garanties mensuelles de rémunération (GMR). Mais ce nouveau dispositif impliquait également des revalorisations plus faibles des différentes GMR, entre 1,6 % et 3,2 % en 2003 (tableau 1). La hausse moyenne du salaire réel net des « smicards » au sens large, c’est-à-dire y compris les GMR, a donc été de 0,3 % en 2003 et non de 1,3 %.
Revalorisations des salaires minima depuis 2002
Revalorisations des salaires minima depuis 2002
Distribution des salaires annuels nets de tous prélèvements
Distribution des salaires annuels nets de tous prélèvements
42En 2005 et en 2006, la consommation serait davantage soutenue par la progression des salaires (respectivement 1,7 % et 2,6 %, après 1,1 % en 2004). La masse salariale prendrait ainsi le relais de la baisse du taux d’épargne, moins ample qu’en 2003 et en 2004, pour maintenir la croissance de la consommation à un niveau voisin de celui de 2004.
43Les prestations sociales n’accéléreraient que légèrement en 2005, si le plan de maîtrise des dépenses de santé du gouvernement parvenait à son objectif. En 2006, en reprenant cette hypothèse, le reflux sensible du chômage permettrait un net fléchissement de la hausse des prestations.
44La baisse des impôts directs en 2004 en termes réels fait suite, par un effet d’assiette, à la déprime des revenus d’activité l’année précédente. S’y est ajouté le recul des taux d’imposition. Naturellement, le mécanisme inverse jouera en 2005 du fait du regain de vigueur du revenu en 2004 et de la hausse prévue des taux de contribution sociale généralisée.
Les prix
45Dans un contexte de renchérissement des prix du pétrole et des matières premières, l’inflation en France est restée très modérée (graphique 12). L’indice d’ensemble s’est naturellement ressenti de la hausse du baril de pétrole : sous 2 % au premier trimestre 2004, le glissement annuel de l’indice des prix est passé à 2,6 % en mai, qui a représenté le point culminant de l’inflation en 2004. Depuis lors, sous l’effet du recul des prix du brut dans la seconde moitié de 2004, l’inflation annuelle est retombée au voisinage de 1,5 % au début 2005, soit un peu plus bas qu’un an auparavant. L’inflation sous-jacente (hors énergie, alimentation et tabac) n’a quasiment pas réagi au choc pétrolier, hormis une poussée en août 2004 liée à la diffusion de la hausse des produits pétroliers dans l’économie. Au début 2005, le recul de l’inflation sous-jacente suggère que le risque d’enclenchement d’une spirale inflationniste prix-salaires due au choc pétrolier doit être écarté.
Indice des prix à la consommation en France
Indice des prix à la consommation en France
46En 2005, l’inflation s’établirait à 1,4 % en glissement annuel. Comparée à la hausse de 2004, 2,1 %, cette prévision marque un nouveau ralentissement. De fait, les tensions inflationnistes resteront inexistantes en France cette année. D’un côté, la force de l’euro permet d’atténuer le renchérissement du prix du pétrole et des matières premières, et de l’autre, les entreprises pourront préserver leurs marges sans augmenter les prix grâce à la croissance de la productivité qui restera supérieure à celle du salaire réel. En 2006 au contraire, la réanimation du marché du travail soutiendra les salaires alors que la croissance de la productivité fléchira du fait des embauches. Le rythme d’inflation, 1,9 % en glissement annuel serait alors un peu plus élevé qu’en 2005.
2005 : année charnière pour l’emploi
47En 2004, la croissance est revenue et l’économie française a recommencé à créer des emplois salariés dans le secteur marchand. Mais ces emplois ont souvent été à temps partiel et en nombre insuffisant (39 000 emplois créés en 2004) pour faire baisser le chômage qui est resté stable à 10 % de la population active pendant toute l’année (graphique 14). Pire, la stabilité du taux de chômage n’a été permise qu’en raison des 100 000 départs en retraite anticipée induits par la réforme des retraites.
Taux de chômage au sens du BIT
Taux de chômage au sens du BIT
48Les gains de productivité réalisés en 2004 ont permis aux entreprises de rétablir leur situation financière (le taux de marge est passé de 31,6 en 2003 à 32,6 en 2004). Dans notre hypothèse d’une croissance à 2,2 % en 2005, les entreprises accéléreraient les recrutements (149 000 créations d’emplois salariés marchands en 2005). En ajoutant à cela la politique de l’emploi qui serait progressivement réactivée en 2005 (75 000 créations d’emplois aidés non marchands en 2005 et 46 000 en 2006), le taux de chômage devrait connaître une nette décrue, passant de 10 % de la population active fin 2004 à 9,1 % fin 2006. La baisse ne débuterait qu’à la mi-2005 en raison du retard dans la mise en œuvre plan de cohésion sociale.
Emploi et chômage
Emploi et chômage
2005-2006 : une croissance plus riche en emplois qu’en 2004
49À première vue, on pourrait penser que, avec des taux de croissance prévus en 2005 et en 2006 (2,2 % et 2,4 %) proches de celui enregistré en 2004 (2,3 %), l’emploi devrait connaître une croissance semblable, c’est-à-dire à peu près nulle dans les branches marchandes. Mais un tel raisonnement ne prend pas en compte le mécanisme du cycle de productivité. En 2004, les entreprises ont attendu que la reprise se confirme avant de lancer des recrutements. Elles ont donc connu de forts gains de productivité (2,4 % en 2004), dépassant sa tendance de long terme (graphique 13). En 2005, avec une croissance qui perdure, l’emploi augmenterait alors, avec un retard de un an, comme dans les cycles précédents. Étant donné le plus grand nombre d’heures supplémentaires autorisées suite aux assouplissements des 35 heures, la durée du travail serait stable en 2005, mais augmenterait selon nos prévisions de 0,2 % en 2006. La croissance nécessaire pour créer des emplois descendrait alors à 1,9 % en 2005 et à 1,6 % en 2006, contre 2,4 % en 2004. La croissance resterait tout de même nettement moins riche en emplois que dans les années 1990 : entre 1994 et 2000, en raison des baisses de charges sociales et de la réduction du temps de travail, il suffisait en moyenne de 1,1 % de croissance pour créer des emplois.
Cycle de productivité du travail dans les branches marchandes
Cycle de productivité du travail dans les branches marchandes
50Autrement dit, la croissance serait plus riche en emplois en 2005-2006 qu’en 2004 : l’emploi marchand connaîtrait une croissance de 0,7 % en 2005 et de 1,0 % en 2006. Avec une progression tendancielle de la population active d’environ 80 000 personnes par an, la dynamique de l’emploi marchand (127 000 créations d’emplois fin 2005 et 164 000 fin 2006) devrait à elle seule engendrer une baisse du taux de chômage, de respectivement 0,15 et 0,24 point en 2005 et en 2006 (cf. tableau 8).
Déterminants de l’évolution du chômage
Déterminants de l’évolution du chômage
Politique de l’emploi : retard à l’allumage
51Tablant sur une reprise en 2002, à son arrivée au pouvoir, le gouvernement Raffarin a voulu réorienter la politique de l’emploi du secteur non marchand vers le secteur marchand (non-renouvellement des emplois-jeunes, réduction importante des effectifs en Contrats Emploi Solidarité, création des contrats jeune en entreprise). Les aides à l’emploi marchand s’étant avéré insuffisantes, cette politique a globalement amplifié de 0,2 point en 2003 la montée du taux de chômage (tableau 2) qui ne s’est arrêtée fin 2003 à 10 % qu’en raison d’une conséquence secondaire de la réforme des retraites. Celle-ci engendrerait respectivement 100 000, 70 000 et 50 000 retraits d’activité [5] en 2004, 2005 et 2006 auxquels il faut retrancher les diminutions d’effectifs en préretraites et en formation pour obtenir l’effet global des retraits d’activité sur le chômage (tableau 8). La situation dégradée sur le marché du travail et les effets des nouvelles règles d’indemnisation ont donné lieu à une importante progression du nombre de RMIstes en 2004 (de 9,2 % entre décembre et décembre), que le Revenu minimum d’activité (RMA) marchand a échoué à endiguer (seuls mille contrats ont été signés en 2004).
52Avec le Plan de cohésion sociale, le gouvernement engage une mutation profonde de sa politique de l’emploi dans le secteur non marchand. Il projette notamment de lancer en 2005 un nouveau contrat, le contrat d’avenir. La mise en œuvre de ce dispositif a été sérieusement retardée et devrait connaître une montée en charge progressive (185 000 contrats prévus d’ici fin 2005). Ce contrat destiné aux allocataires de minima sociaux semble plus adapté à des publics éloignés du marché du travail que le RMA, dans la mesure où il est réservé au secteur non marchand et obligatoirement accompagné d’une formation. Il ouvre également les mêmes droits sociaux que tout contrat de travail. Le remplacement des CES par des contrats d’avenir est compliqué par le changement important des publics visés.
53Dans le secteur marchand, le Plan de cohésion sociale met l’accent sur le développement de l’apprentissage, avec principalement la création d’un crédit d’impôt pour les entreprises de 1 600 euros par apprenti. Cette mesure devrait engendrer, pour l’embauche d’un apprenti, une baisse du coût du travail d’environ 16 %. En prenant pour hypothèse une élasticité de l’emploi au coût du travail égale à 0,7 (modèle e-mod.fr), le crédit d’impôt engendrerait une hausse des effectifs de 35 000 apprentis d’ici 2009. En 2005 et en 2006, cette nouvelle mesure serait insuffisante pour compenser la poursuite des baisses d’effectifs en contrat à temps partiel bénéficiant d’exonérations de charges. Les aides à l’emploi dans le secteur marchand ne contribueraient toujours pas à la baisse du chômage.
54Étant donné le retard pris pour lancer les contrats d’avenir et, compte tenu des baisses d’effectifs qui perdurent en CES comme en emploi jeune, la politique de l’emploi ne devrait contribuer à la baisse du taux de chômage qu’à partir du second semestre 2005 (– 0,18 point en 2005 et – 0,13 point en 2006, tableau 2). En tenant compte en plus de la reprise de l’emploi marchand et de la suite des effets de la réforme des retraites, le taux de chômage baisserait de 10 % de la population active fin 2004, à 9,5 % fin 2005, puis à 9,1 % fin 2006 (graphique 14).
Les entreprises françaises
55L’investissement des entreprises françaises a connu un ajustement marqué entre la mi-2001 et le troisième trimestre 2003. Le taux de formation brute de capital (qui correspond à la FBCF et aux variations de stocks rapportées à la VA des SNFEI) a en effet perdu 2,8 points durant cette période (graphique 15). Cette baisse est cependant moins nette si l’on se focalise uniquement sur la formation brute de capital fixe : l’ajustement n’est plus alors que de 1,1 point de VA.
Taux d’investissement (en volume) des SNFEI
Taux d’investissement (en volume) des SNFEI
56Comparé à la dernière période où l’investissement productif a reculé de façon marquée, c’est-à-dire la période 1992-1993, l’ajustement réalisé sur le stock de capital productif, entre la mi-2001 et la mi-2003, a été moins rapide et d’une ampleur inférieure à celui d’après 1992 : l’investissement des entreprises a en effet baissé de 11,4 % entre début 1992 et fin 1993 contre 6,8 % après 2001 sur une période de temps équivalente (8 trimestres). À partir de notre équation d’investissement (encadré 3), nous avons pu mesurer la contribution de chaque variable à l’ajustement de la FBCF sur ces deux périodes.
57Le différentiel de croissance entre ces deux périodes explique pour une grande partie cet écart (plus de 3 points de pourcentage) (tableau 9).
Contribution des variables à l’ajustement de la FBCF sur 8 trimestres
Contribution des variables à l’ajustement de la FBCF sur 8 trimestres
58Deux points de pourcentage s’expliquent par la différence de taux d’endettement bancaire, les entreprises s’étant moins désendettée que sur la période précédente. Cette variable mesure à la fois le comportement d’offre de crédit des banques et de politique d’endettement des entreprises. Plus sa croissance sera élevée, plus les banques financeront des investissements risqués et encourageront les entreprises à accroître leur stock de capital. L’offre de crédit a moins décéléré en 2002-2003 qu’en 1992-1993. Malgré l’éclatement de la bulle Internet, les entreprises ont maintenu sur la dernière période des ratios de solvabilité élevés et ont connu une restriction de l’offre de crédit des banques moindre que sur la période 1992-1993.
59En revanche, le coût du capital a soutenu l’investissement au cours des deux périodes. Il mesure le coût d’opportunité des fonds nécessaires à l’investissement. Le coût du capital a contribué à une hausse plus importante de l’investissement (1,3 point de pourcentage) sur la période 1992-1993 que sur la période 2001-2003. Cela s’explique par la baisse des taux longs réels deux fois plus importante entre début 1992 et fin 1993 qu’en 2001-2003 (– 2,4 point contre – 1,2 point).
60Enfin, la baisse du taux de profit (mesuré comme l’épargne brute plus les dividendes nets versées rapportés à la valeur ajoutée) plus marquée en 1992-1993 qu’en 2001-2003 a contribuée plus négativement à la baisse de l’investissement lors de la première période.
3. Équation d’investissement
Cdt : encours de crédit des SNF auprès des banques résidentes
VA_val : valeur ajoutée des SNF en valeur
VA_vol : valeur ajoutée des SNFEI en volume
I : formation brute de capital fixe des SNFEI
Ck : coût du capital
[*] (tx d’int réel 10 ans (déflaté par les px conso)+tx de décla)
? : profits des SNF
= épargne burte+dividendes versés–dividendes reçus
Diagnostic statistique
Formation brute de capital fixe des SNFEI
Formation brute de capital fixe des SNFEI
Une reprise en douceur de l’investissement…
61Depuis le troisième trimestre 2003, le taux de formation brute de capital s’est redressé de 2,5 points, atteignant 19,7 points de VA au quatrième trimestre 2004. Les variations de stocks ont cependant contribué durant cette période à plus de 80 % de cette hausse. Nous ne prolongeons pas ce mouvement de forte contribution des stocks dans notre prévision.
62Le mouvement de reprise de l’investissement s’est fait en douceur en 2004, les entreprises n’étant pas encore contrainte par leurs capacités de production : la FBCF a crû de 2,8 % en 2004 après deux années de baisse (– 3,8 % en 2002 et – 1,6 % en 2003). Le taux d’utilisation, qui s’est redressé de 2,5 points depuis le troisième trimestre 2003, est revenu au niveau de sa moyenne de long terme. Les entreprises pourraient donc à l’avenir commencer à éprouver des tensions sur leurs capacités de production.
63L’investissement des entreprises devrait progressivement s’accélérer au cours des années 2005 et 2006 (respectivement + 3,8 % et + 5,8 %), la FBCF prenant le relais des stocks dans la dynamique de croissance.
… sans commune mesure avec celle de 1997-1999
64Cette reprise de l’investissement reste cependant sans commune mesure avec celle de 1997-1999 (tableau 10), dernière période de croissance durable de la FBCF productive. À durée identique (12 trimestres), la FBCF des SNFEI a crû de 26 % entre le premier trimestre 1997 et le dernier trimestre 1999 alors qu’elle n’augmenterait que de 13 % entre le premier trimestre 2004 et fin 2006.
Contribution des variables à la hausse de la FBCF sur 12 trimestres
Contribution des variables à la hausse de la FBCF sur 12 trimestres
65Selon notre équation d’investissement, le différentiel de croissance de la VA entre ces deux périodes explique à hauteur de 10 points de pourcentage l’écart de croissance de la FBCF. Même s’il existe des différences importantes dans les rythmes de croissance entre ces deux période (5,2 points de VA), l’effet d’accélérateur amplifie les écarts sur la FBCF.
66Le coût du capital n’aurait pas d’effet sur la croissance de la FBCF au cours de ces deux périodes. Le coût du capital a en effet très peu varié entre le début et la fin de ces deux périodes.
67Le taux d’endettement bancaire n’est en revanche pas neutre sur l’évolution de l’investissement au cours de ces deux périodes. Si les entreprises ont eu assez peu recours au crédit bancaire pour financer leur investissement entre 1997 et 1999, notre scénario pour la période 2004-2006 repose sur un recours à l’endettement plus important. Les entreprises françaises, qui ont mis en place des politiques de désendettement en 2002 et 2003, ont arrêté de se désendetter en 2004 et devraient recourir plus nettement au crédit bancaire en 2005 et en 2006. Toutes les conditions sont réunies pour ce scénario : d’une part le coût du crédit est historiquement bas et le resterait à l’horizon de notre prévision. D’autre part, les entreprises affichent des signes de bonne santé : ratios de solvabilité élevés (graphique 16) et taux de profit en net redressement qui continueraient à s’améliorer au cours de l’année 2005. Les banques sont attentives à la solidité financière des entreprises et leur prêteront d’autant plus facilement si celles-ci affichent des bilans sains, ce qui semble être le cas aujourd’hui. Le crédit bancaire qui n’avait contribué qu’à 0,7 % de la croissance de la FBCF entre 1997 et 1999 jouerait un rôle plus important entre 2004 et 2006 (contribution de 2,7 %).
Ratio de solvabilité des SNF et intérêts nets versés
Ratio de solvabilité des SNF et intérêts nets versés
68Enfin, le redressement du taux de profit a contribué au cours des deux périodes pour plus d’un tiers à la croissance de la FBCF. Le taux de profit qui se redresse depuis la mi-2003 (+ 1,2 point de VA entre mi-2003 et fin 2004) continuerait sa progression jusqu’à la fin 2005, sous l’effet des gains de productivité réalisées par les entreprises déformant le partage de la valeur ajoutée en faveur du capital, avant de baisser en 2006 (graphique 17).
Taux de profit des SNF
Taux de profit des SNF
Des profits records en 2004 pour les sociétés du CAC 40
69Ce redressement de la rentabilité pour les entreprises françaises dans leur ensemble reste cependant sans commune mesure avec celui des entreprises cotées pour l’année 2004.
70En effet, en agrégeant les comptes publiés de 27 entreprises [6] non financières du CAC 40, on s’aperçoit que l’indicateur de rentabilité économique (résultat net/chiffres d’affaires) a explosé en 2004. Il atteint 5,5 %, soit un niveau supérieur à celui de 2000 (5 %) (graphique 18). De même, la rentabilité financière (résultat net/capitalisation boursière) a atteint des sommets : elle se situe en effet à 7,6 % alors qu’elle était de 4,8 % en 2003 et de 4,1 % en moyenne sur la période de 1997-2000. Les bénéfices de ces 27 entreprises cotées ont en effet explosé en 2004 (15 milliards d’euros de plus qu’en 2003, soit une augmentation de plus de 65 %) alors que de fin 2003 à fin 2004, la capitalisation boursière de ces entreprises n’a progressée que de 5 %. Le diagnostic n’est pas différent si l’on retire l’entreprise Total, de notre échantillon, qui a affiché des bénéfices records mais aussi une forte augmentation du chiffre d’affaires.
Résultat net…
Résultat net…
71En revanche, si l’on retire de notre échantillon les comptes des trois entreprises les plus endettées (France Telecom, Vivendi Universal et Suez), les résultats sont quelque peu atténués. Ces trois entreprises ont effet des ratios de rentabilité économique (7,8 % pour la moyenne des trois) supérieurs à la moyenne, ce qui n’était plus arrivé depuis 1997. Ces trois entreprises tirent donc vers le haut la rentabilité moyenne des 27 entreprises et expliquent un tiers de la hausse du ratio entre 2003 et 2004. Ces trois grands groupes ont redressé leurs bilans de façon drastique depuis 2002 en cédant leurs actifs les moins rentables et en reportant les projets d’investissements les plus coûteux. En témoigne une augmentation de 51 milliards d’euros du résultat net cumulé de ces trois groupes en l’espace de deux ans en même temps qu’une baisse de 42 milliards de leurs chiffre d’affaires.
72On peut noter deux points essentiels pour conclure sur l’évolution des profits en France. Premièrement, la remontée spectaculaire de la rentabilité des entreprises cotées est en partie due à une politique de cession d’actifs peu rentables qui permet de libérer rapidement des cash-flows importants et de réduire la dette. Cette politique de désengagement de certains groupes envers les filiales les moins rentables, si elle rapporte de l’argent à court terme, risque de peser à plus long terme sur la profitabilité de ces entreprises. Ces dernières pourraient en effet progressivement perdre des parts de marché au profit des entreprises étrangères plus innovantes qui supportent un risque plus grand.
73Deuxièmement, l’écart de rentabilité entre les sociétés cotées et l’ensemble des SNF résidentes en France peut aussi s’expliquer par la différence d’orientation géographique des secteurs de production. Les multinationales du CAC 40 ont, à la différence de la plupart des sociétés non cotées, des unités de production implantées dans les zones à très forte croissance. L’importante croissance des bénéfices des groupes du CAC 40 serait donc en partie due à la forte rentabilité des filiales étrangères implantées dans ces zones. A contrario, les entreprises non cotées dont la plupart des unités de production se situent en France auraient du mal à redresser aussi rapidement leur rentabilité, contrainte par un marché moins dynamique.
Coup de froid sur le commerce
74Le commerce extérieur français a subi un accès de faiblesse en 2004 où pour la première fois depuis 1991, le solde de la balance commerciale (en valeur) est devenu négatif à – 160 millions d’euros courants au quatrième trimestre et s’est établi à 7,6 milliards d’euros sur l’année, suivant un excédent de 13,4 milliards en 2003. Malheureusement, cette poussée de fièvre n’est qu’un signe avant-coureur qui présage une longue convalescence car la lente dépréciation que subit le dollar depuis 2002, si son influence ne se voit pas sur le solde courant américain, a commencé à mordre sur le commerce français. Les augures n’étant pas favorables à une forte réappréciation du dollar, et sous l’hypothèse d’une stabilisation relative du taux de change (avec une légère réappréciation du dollar à l’horizon 2006), le déficit commercial se résorbera, mais de peu, à l’horizon de la prévision : l’excédent commercial sera de 1,3 puis de 3,4 milliards d’euros courants en 2005 et 2006. La faiblesse de ces chiffres cache des facteurs d’espoir car la stagnation des exportations en volume observée depuis le point haut du quatrième trimestre 2000 cesserait en 2005 (graphique 19) : celles-ci croîtraient en moyenne annuelle de 4,8 % en 2005 et 6,4 % en 2006. Toutefois, la demande interne soutiendrait davantage les importations qui progresseraient de 7,0 % en volume en 2005 et 2006.
Commerce extérieur français
Commerce extérieur français
Les exportations souffrent
75La France perd des parts de marché à l’export depuis fin 2002 et la remontée de l’euro vis-à-vis de ses monnaies partenaires (graphique 20) : nous l’interprétions jusqu’à présent comme une faiblesse conjoncturelle qui prendrait fin si l’euro commençait à se déprécier. Les performances de 2004 indiquent, malheureusement, qu’une érosion structurelle est à l’œuvre : en prolongeant sur 2002-2004 l’équation du modèle e-mod.fr [7] liant les exportations à la demande mondiale adressée à la France et à sa compétitivité-prix (graphique 21), nous constatons que les données conjoncturelles expliquent 70 % de la perte de parts de marché de 2003 ; elles impliquent en revanche une stabilisation sur 2004 alors qu’on observe une deuxième année de forte baisse de la position compétitive française : sur la période, 50 % de la perte n’est pas expliquée par notre modèle. Cela implique un déficit d’exportations de 3,7 % en 2003 et en 2004 (tableau 11) par rapport à ce que la France aurait pu espérer. La désaffection vis-à-vis des produits français renforce l’érosion de la compétitivité-prix observée entre 2001 et 2003.
Position compétitive française
Position compétitive française
Le taux de change effectif est calculé en monnaie étrangère : une baisse indique une appréciation de l’euroÉrosion des parts de marché
Érosion des parts de marché
Contribution aux variations des exportations
Contribution aux variations des exportations
76Les facteurs qui permettraient d’interpréter les 6,5 % de pertes de parts de marché non expliqués sont de deux ordres :
771) La méthode de calcul des parts de marché se réfère à une demande adressée à orientation stable du commerce extérieur (fixée sur la base de 1995). Ainsi l’intégration commerciale de zones géographiques, dans lesquelles les échanges entre partenaires s’intensifient comme en Asie du Sud-Est, entraînent dans nos calculs une augmentation des importations desdits pays qui ne s’adresse naturellement pas à la France mais est toutefois comptabilisée comme incapacité de notre pays à satisfaire un accroissement de la demande de biens et services. Depuis 2002, cet effet « comptable » entraîne une surestimation des pertes de parts de marché d’environ 1 à 2 %.
782) Une désaffection pour les produits français expliquerait la perte de parts de marché. La spécialisation relative de la France en produits de construction automobile et de biens de consommation assez sensibles à l’effet de prix permettrait de comprendre pourquoi la France souffre davantage que son concurrent allemand de l’appréciation de l’euro [8]. Par ailleurs les nets efforts de réduction des coûts intervenus en Allemagne favorisent notre partenaire à notre détriment : et si notre concurrent le plus à surveiller n’était pas dans les nouveaux pays adhérents à l’UE mais bien outre-Rhin ?
79Cette érosion — structurelle ? — perdurerait en 2005 et 2006 et entraînerait une perte d’exportations d’environ 3 % par an en volume, mais se réduisant fin 2006, à la suite des importants efforts de prix consentis par les exportateurs français (5 % puis 3 % d’écart entre la croissance des prix relatifs et la dépréciation du taux de change effectif réel).
Politique budgétaire : 5 ans hors du PSC
80En 2004, l’objectif de déficit des administrations publiques (Apu) prévu en loi de finances initiale (LFI) a été presque atteint (3,7 % du PIB au lieu de 3,6 % escomptés). Les dépenses ont connu une croissance plus vive que celle initialement prévue (2,1 % de croissance en volume au lieu de 1,1 % prévus dans la LFI 2004), mais la meilleure conjoncture économique (2,3 % de croissance contre 1,7 % en LFI) a financé ces dépenses. En 2004, comme en 2003, l’impulsion budgétaire (calculée hors effet des charges d’intérêts) a été presque neutre (tableau 12). La dynamique des dépenses sociales et des dépenses des collectivités locales a compensé la rigueur des dépenses de l’État.
Résumé des prévisions des finances publiques
Résumé des prévisions des finances publiques
81En 2005, nos hypothèses de finances publiques sont proches de celles du gouvernement. Compte tenu d’une prévision de croissance (2,2 %) également proche de celle de Bercy (2,0 à 2,5 %), le déficit des Apu tomberait à 3,0 % cette année.
82En 2006, l’accélération conjoncturelle et la poursuite de la rigueur budgétaire permettront de compenser l’absence de soulte IEG [9] et de stabiliser le déficit des Apu (3,0 % du PIB). Compte tenu de son inertie, la dette publique augmenterait en 2005 et en 2006, pour atteindre 66,6 % du PIB. Malgré ce niveau élevé, les charges d’intérêt de la dette continueraient de baisser en point de PIB en 2005, avant de remonter légèrement en 2006 (tableau 12).
83Nous prévoyons une stabilisation du déficit en point de PIB pour 2006, alors que Bercy prévoyait une baisse de 0,2 point (tableau 13). Pourtant nous supposons une stabilisation du taux de prélèvement obligatoire (PO) quand le gouvernement annonce une baisse de 0,1 point. Cela tient à la prévision de recettes non fiscales et à la prévision de dépenses publiques. Selon le gouvernement, les dépenses publiques vont augmenter de 1,3 % en volume, alors que nous prévoyons une hausse de 1,5 %, ce qui induit un écart de 0,2 point de PIB du taux de dépenses publiques. Par ailleurs, hors soulte, nous supposons une stabilisation des recettes non fiscales en point de PIB, alors que le gouvernement prévoit une hausse de 0,2 point. Le gouvernement n’a pas justifié cette augmentation.
Variation des agrégats de finances publiques : contributions en points de PIB sur le solde public
Variation des agrégats de finances publiques : contributions en points de PIB sur le solde public
84Le risque d’avoir un déficit supérieur à 3,0 % du PIB pour la cinquième année consécutive en 2006 n’est pas négligeable.
85En 2005, le solde structurel s’améliorerait de 0,3 point de PIB. La principale contribution à cette amélioration est la hausse des prélèvements sociaux (0,3 point de PIB), consécutive aux réformes de la Sécurité sociale. Les impôts de l’État connaîtront au contraire une baisse équivalent à 0,15 % du PIB. En 2006, la rigueur budgétaire devrait se poursuivre.
86Le gouvernement a un objectif très strict de croissance des dépenses publiques : 1,6 % de croissance en volume en 2005 et 1,3 % en 2006. Or dans le passé récent, les gouvernements ont rarement respecté la rigueur budgétaire annoncée. On a retenu l’hypothèse d’une poursuite de la politique de rigueur, tout en supposant une croissance légèrement plus élevée des dépenses publiques (respectivement 1,7 % et 1,5 % en 2005 et 2006), qui nous paraît plus réaliste.
87La réforme de l’assurance maladie ralentit — en 2005 et 2006 — les dépenses de santé, facteur systématique de dépassement des objectifs de dépenses publiques dans le passé.
88L’emploi public subit une inflexion sensible. Après une hausse d’environ 60 000 en 2004 comme en 2003, les emplois non aidés de l’ensemble des administrations publiques n’augmenteraient que de 17 000 en 2005 et de 12 000 en 2006, soit une quasi-stabilisation (+ 0,2 %). La politique de l’emploi induirait une hausse de 75 000 emplois aidés dans le secteur non marchand en 2005 et de 47 000 en 2006. D’éventuelles hausses des rémunérations des fonctionnaires n’ont pas été retenues, au-delà de ce qui a déjà été officiellement annoncé [10] : deux augmentations de 0,5 % de l’indice fonction publique en 2005 (une en février et une en novembre), ainsi que 400 millions de mesures indemnitaires et catégorielles.
Le programme de stabilité transmis à la Commission est, comme il est d’usage, très peu disert sur les hypothèses. Qu’il s’agisse des recettes exceptionnelles (soulte IEG qui n’existe plus à partir de 2006), des recettes fiscales (le taux ne PO ne baisse pas malgré les baisses annoncées) ou des moyens pratiques de réaliser l’objectif d’une croissance des dépenses publiques de 1,2 % en volume en moyenne de 2006 à 2008, aucune explication n’est fournie.
89En 2005, les recettes augmenteraient de 4,0 %, ce qui induirait une hausse du taux de Prélèvements Obligatoires (PO) de 0,2 point de PIB. L’élasticité des prélèvements au PIB, légèrement supérieure à 1 impliquerait une augmentation spontanée de 0,1 point de PIB, alors que les hausses de prélèvements représenteraient 0,1 point.
90Les mesures comprises dans la loi de finances pour 2005 réduisent les prélèvements sur les ménages de 855 millions, principalement par la baisse des droits de succession (630 millions). En sens inverse, les ménages paient 2,2 milliards de CSG supplémentaire pour financer l’assurance maladie. Les mesures prises par le passé atténuent quelque peu la note, notamment la diminution de l’imposition des plus values immobilières.
91Côté entreprises, les mesures prises pour 2005 réduisent la charge fiscale. Parmi les principales mesures, on peut citer la forte baisse des charges patronales (– 1,6 milliard) et la diminution du taux de l’impôt sur les bénéfices des sociétés qui passe de 34,33 % en 2004 à 33,83 % en 2005 et à 33,33 % en 2006. La hausse des prélèvements sociaux (+ 1,9 milliard) ne compense que partiellement ces baisses.
92Pour 2006, nous prévoyons une stabilisation du taux de PO, la forte élasticité des recettes au PIB compensant des baisses de PO de l’ordre de 0,1 % du PIB.
Résumé des prévisions pour l’économie française
Résumé des prévisions pour l’économie française
France. Ressources et emplois en biens et services, aux prix de 1995
France. Ressources et emplois en biens et services, aux prix de 1995
Prix de détail et taux de salaire horaire
Prix de détail et taux de salaire horaire
Effectifs salariés
Effectifs salariés
Eléments du compte des ménages
Eléments du compte des ménages
Commerce extérieur et parts de marché
Commerce extérieur et parts de marché
Taux d’intérêt et taux de change
Taux d’intérêt et taux de change
Notes
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[*]
Cette prévision a été réalisée à l’aide du modèle trimestriel de l’économie française, e-mod.fr, par une équipe dirigée par Éric Heyer, composée de Guillaume Chevillon, Gaël Dupont, Matthieu Lemoine, Hervé Péléraux et Mathieu Plane. La prévision tient compte des informations disponibles à la fin mars 2004 et intègre les comptes nationaux trimestriels de mars 2005, à savoir le compte emplois-ressources jusqu’au quatrième trimestre 2004 et les comptes d’agents jusqu’au troisième trimestre 2004. La prévision et le modèle reposent sur les données et les concepts de la comptabilité nationale base 95 dans le cadre du SEC95. Le modèle est estimé sur la période 1978-2000.
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[1]
Pour plus de détails sur ces équations économétriques, se référer à Heyer et alii (2005) : « Estimations d’équations de consommation : une comparaison Allemagne, États-Unis et France », Document de travail de l’OFCE, à paraître.
-
[2]
Pour plus de détails, se référer à la note de conjoncture de l’INSEE, mars 2005, p. 101.
-
[3]
Nicolas Sarkozy a présenté le 4 mai 2004 un plan de relance de l’économie française. Ce plan vise à abaisser le taux d’épargne des français pour stimuler la croissance dans un contexte de rigueur budgétaire. Dans une étude de l’OFCE (Valérie Chauvin et alii (2004) : « Évaluation du plan de relance de l’économie française », Document de travail de l’OFCE, n° 2004-04, mai), nous avons évalué principalement trois mesures. 1) Un crédit d’impôt sur les intérêts versés au cours des années 2004 et 2005 au titre du crédit à la consommation. Ce crédit d’impôt pourrait augmenter la consommation de 1 milliard d’euros pour un coût budgétaire de l’ordre de 400 millions d’euros par an. 2) L’exonération de droits sur les donations anticipées inférieures à 20 000 euros. Cette mesure induirait un transfert des plus âgés vers les plus jeunes compris entre 0 et 8,8 milliards d’euros pour un effet sur la consommation de 0 et 500 millions d’euros. 3) Le déblocage anticipé des réserves de participation. Cette mesure pourrait conduire à l’injection de 3 milliards d’euros de réserves de participation et avoir un impact comparable sur la consommation.
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[4]
L’indicateur avancé de l’OFCE, qui exploite l’information contenue dans les enquêtes de conjoncture, confirme ce schéma : la reprise de l’activité engagée au quatrième trimestre 2004 s’essoufflerait au cours du premier semestre 2005, avec des hausses du PIB de 0,3 % et 0,6 % respectivement aux premier et deuxième trimestres (encadré 1).
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[5]
Il s’agit des retraites anticipées des personnes ayant eu des carrières longues (voir encadré dans la Revue de l’OFCE, n° 89).
-
[6]
Notre échantillon ne retient que les sociétés non financières du CAC 40 ainsi que celles pour lesquelles nous disposons d’un historique comptable supérieur à dix ans.
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[7]
Voir Revue de l’OFCE n° 81, pp. 245-300, pour une présentation du modèle et de ses variables.
-
[8]
Voir partie internationale et Revue de l’OFCE, n° 91.
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[9]
Industries Électriques et Gazières.
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[10]
La rallonge salariale de 0,8 % promise le 4 avril n’a pas été intégrée dans notre scénario.