Notes
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[*]
Cet article se fonde sur une étude réalisée pour la DARES dans le cadre d’une convention passée entre la Fondation nationale des sciences politiques et le ministère de l’Emploi et de la Solidarité.
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[1]
Qui sont incluses dans les comptes satellites de la comptabilité nationale : voir le Système européen des comptes (Eurostat 1996).
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[2]
En particulier pour ce qui est des exploitations agricoles, de l’artisanat et du petit commerce (Guillemot 1996).
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[3]
Enquête complémentaire durée du travail, 1995 INSEE.
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[4]
Dans plusieurs cas, les améliorations ont été faites grâce à une confrontation systématique entre sources. Ce type de démarche relève de l’effort d’intégration des normes internationales réalisé dans le cadre de la « comptabilité du marché du travail », initié dans les années 1980 par les organismes statistiques nationaux et internationaux (Statistics Netherlands 1999, Hoffman 1997).
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[5]
Selon la définition du BIT, une personne est dans l’emploi si elle a effectué au moins une heure de travail durant la semaine de référence.
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[6]
C’est-à-dire que les semaines de référence, périodes sur lesquelles s’appuie le questionnaire, sont réparties sur toute l’année.
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[7]
Dans les trois cas, des efforts sont en outre entrepris soit au niveau des sources établissements, soit directement au niveau de la comptabilité nationale, pour tenir compte de la tendance croissante à l’annualisation du temps de travail. Cela s’est traduit en France par l’introduction d’une nouvelle enquête ACEMO, en Allemagne par la prise en compte des comptes temps de travail à partir de 2000, aux Pays-Bas par une réforme récente de l’enquête établissements.
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[8]
Une comparaison du même type avait déjà été réalisée pour les pays européens par Eurostat en 1995 (Eurostat 1995), mais s’était heurtée à de nombreuses critiques de la part des pays qui ne se reconnaissaient pas dans les données les concernant.
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[9]
Il faut garder en tête que la restriction au champ des salariés conduit dans certains cas à éliminer une part importante des effectifs. En 1998, la part des non salariés dans l’emploi total était ainsi proche de 30 % en Italie, 18 % en Espagne et au Japon.
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[10]
On renvoie pour un examen plus approfondi aux nombreuses références sur le sujet (Boulin, Cette et Taddei, 1992 ; Grubb et Wells, 1993 ; Roche, Fynes et Morrissey, 1996 ; Bosch, Meulders et Michon, 1997 ; CSERC, 1998 ; CEIES, 1999 ; IRES, 1998 ; OCDE, 1998 ; Passet et Jestaz, 1998 ; Anxo et O’Reilly, 2000 ; Rouilleault, 2001 ; entre autres).
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[11]
Le gouvernement conservateur a levé les restrictions sur le travail de nuit féminin en 1986 (Sex Discrimation Act de 1986) et sur le travail des jeunes en 1989 (Employment Act 1989).
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[12]
Un cadre qui effectue son travail à l’intérieur des horaires prévus sera ainsi moins rémunéré que celui qui dépassera la durée prévue pour faire le même travail et bénéficiera d’une bonification de 25 % pour ses heures supplémentaires (Araki, 1996).
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[13]
On rappellera ici que la période considérée par cette étude s’arrête en 1998 et ne couvre pas le passage aux 35 heures en France.
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[14]
L’extension en 1990 de l’enquête établissement aux petites entreprises ne s’est pas traduite par une augmentation notable de la durée du travail : la durée du travail est élevée dans les petites entreprises, mais cet effet est compensé par le fort volume d’heures supplémentaires des plus grandes unités.
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[15]
Moins de la moitié des salariés des entreprises de plus de 30 salariés bénéficiaient en 1985 de deux jours de repos chaque semaine. En 1997, ce pourcentage était passé à 87 %.
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[16]
En Italie, le rythme de baisse de la durée conventionnelle s’est imparfaitement répercuté sur la durée habituelle dans les années 1980, mais les séries de durée conventionnelle sont assez fragiles.
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[17]
Une nouvelle question a été introduite en 1996 pour mieux capter les personnes absentes lors de la semaine de référence. La divergence ne paraît en revanche pas attribuable à la définition du temps partiel, d’autant que l’EFT tend à incorporer des durées de plus en plus faibles dans le temps plein depuis 1996.
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[18]
Pour une analyse récente des caractéristiques du travail à temps partiel, voir Evans, Lippoldt et Marianna, 2000.
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[19]
Pour une analyse du temps partiel au Japon, voir Houseman et Osawa, 1995.
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[20]
L’utilisation d’un seuil d’heures est en outre délicate pour certaines professions dont la durée effective du travail est difficile à cerner au moyen des EFT. En Italie, par exemple, le choix d’un seuil de 30 heures conduit à doubler le taux de temps partiel en 1998 (14,8 % contre 7,6 %). Cela résulte essentiellement du fait que la durée habituelle déclarée des salariés à temps plein est très faible dans les services administrés, en particulier chez les enseignants.
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[21]
En corrigeant l’EFT de l’occurrence des emplois de courte durée en Allemagne.
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[22]
Aux États-Unis, une mesure du taux de temps partiel sur des critères équivalents à ceux de l’EFT du Japon conduit à surestimer d’un tiers les effectifs à temps partiel par rapport à une mesure basée sur la durée habituelle.
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[23]
Reflétée ici uniquement par les disparités entre pays des niveaux de durée habituelle du travail des salariés à temps partiel (tableau 1).
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[24]
En Italie, l’impact du temps partiel se fait surtout sentir à partir du début des années 1990.
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[25]
L’interprétation du cas japonais reste cependant délicate.
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[26]
Pour en faciliter l’interprétation, les séries de durée annuelle effective ont toutes été converties — le cas échéant — en heures par personnes, afin d’éliminer les écarts dus aux différences de concepts.
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[27]
L’utilisation des effectifs salariés de l’enquête sur les forces de travail pour convertir le volume d’heures travaillées par emploi tiré des comptes nationaux en volume d’heures travaillées par personne peut conduire à surestimer la durée du travail car la croissance de l’emploi est sous-estimée dans l’enquête sur les forces de travail depuis le début des années 1990 en raison de l’absence de redressement récent sur le dernier recensement (Juhn et Potter, 1999 par exemple).
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[28]
Dans tous les pays à l’exception du Japon, la propension des salariés à cumuler plusieurs emplois s’est en outre accrue au cours des quinze dernières années.
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[29]
Le cas du Royaume-Uni illustre également l’impact que peut avoir la mesure des congés payés sur les évolutions de la durée effective du travail. Les divergences reportées dans le tableau 6 proviennent en effet essentiellement d’hypothèses alternatives sur le nombre de jours de congés payés. Convertir sur une base annuelle la durée effective de la semaine de référence pour les années antérieures à 1992, comme cela est fait dans les séries de l’OCDE, repose implicitement sur l’hypothèse que les congés payés n’ont pas évolué dans les années 1980. Nos estimations incorporent en revanche une augmentation des congés payés au début des années 1980 (Blyton, 1985).
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[30]
Abraham, Spletzer et Stewart (1998) montrent en outre que l’écart ne serait pas imputable à des différences de couverture statistique. La durée hebdomadaire des salariés non couverts par l’enquête établissement a certes progressé plus rapidement que celles des salariés à la production lorsqu’elle est mesurée par l’enquête sur les forces de travail, mais ces différences sont insuffisantes pour expliquer la divergence croissante entre l’enquête établissement et l’EFT.
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[31]
On peut également se référer à Robinson et Godbay, 1999.
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[32]
En France, l’exploitation des résultats de l’enquête emploi du temps réalisée par l’INSEE de mars 1998 à février 1999 (Chenu 2001) débouche globalement sur une moindre surestimation (de l’ordre de 1 à 3 % selon les mesures) de la durée du travail tous salariés confondus. Surtout, elle fait ressortir que les écarts entre les diverses mesures de la durée du travail peuvent s’interpréter non pas comme « la manifestation d’une tendance des personnes interviewées à surestimer le caractère extrême des situations de sous-emploi ou de sur-emploi, mais plutôt comme la conséquence du flou qui entoure, pour beaucoup de professions, la définition même de l’activité ». Elle met également en évidence un lien entre la sur ou sous-estimation du travail et le mode de description du travail.
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[33]
Cas de l’enquête emploi conduite par l’INSEE en France.
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[34]
à l’exception, pour les pays couverts ici, du Royaume-Uni.
1 La France connaît depuis plusieurs années un ralentissement de la productivité apparente du travail. Aujourd’hui il faut donc une croissance inférieure à celle d’hier pour accroître l’emploi. Ce constat est partagé par les économistes, les causes de l’enrichissement de la croissance en emplois le sont moins.
2 Une analyse des évolutions et des déterminants de la productivité par tête dans d’autres pays développés, de structure économique comparable à celle de la France, devrait sans doute enrichir le débat. D’une part, parce que les principaux pays développés ont été affectés de manière différenciée par le retournement conjoncturel du début des années 1990. D’autre part, ils n’ont pas tous connu une évolution analogue en termes de durée du travail et en termes de coût relatif des facteurs, ou même de flexibilité (via la montée des CDD et des CDI), autant d’éléments qui peuvent avoir modifié les délais d’ajustement de l’emploi à son niveau désiré.
3 Or force est de constater aujourd’hui qu’il existe des lacunes importantes concernant les données représentatives du marché du travail, que ne comblent pas les efforts d’Eurostat, de l’OCDE ou du Bureau international du travail (BIT par la suite). Si tel est le cas, c’est qu’il n’existe aucune source statistique capable de fournir une mesure incontestable, homogène et comparable d’une notion aussi complexe et plurielle que l’est le volume de travail.
4 Dans le cadre de la mesure de la productivité, la mesure idéale du volume de travail implique d’appréhender au mieux la durée effective du travail des personnes impliquées dans la production intérieure de biens et de services tout au long de l’année, sur une base utilisable en comparaison internationale.
5 La compatibilité avec la mesure de la production renvoie à la définition du travail productif au sens de la comptabilité nationale, l’activité mesurée étant celle de la participation effective à l’économie nationale. Cette conception restrictive exclut du champ de l’analyse les activités domestiques [1], La frontière « comptable » entre travail productif et activités de loisir ou travail domestique n’a pourtant pas toujours été claire dans les comptes nationaux [2] et est de plus en plus floue (De Terssac et Tremblay, 2000). Ce brouillage croissant est pour une grande part lié au mode d’organisation du travail. Dans une organisation du travail de type fordiste, les frontières entre travail et non travail sont relativement peu ambiguës. L’organisation du travail y est hiérarchisée et sa forte division conduit à un rapport de subordination fondé sur la durée du travail. Le rythme et la durée du travail reposent sur une conception homogène du travail (Veltz, 2000). Ils sont imposés par l’employeur et l’homogénéité de ces rythmes entre différents salariés permet d’une part d’identifier plus aisément les passages entre travail productif et non-travail, d’autre part de voir émerger une norme de travail collective.
6 L’organisation actuelle du travail et de la production situe le problème à un tout autre niveau. Une organisation du travail moins hiérarchisée et moins centralisée requiert de la part des salariés plus d’autonomie et de polyvalence. La durée du travail relève de plus en plus de la responsabilité propre du salarié et le rapport de subordination se déplace du contrôle de la durée du travail au contrôle des résultats sur objectifs. Ainsi, en 1995, près de 60 % des salariés français déclaraient n’être soumis à aucun contrôle de leurs horaires [3]. D’autre part, la tendance à la diversification et à la modulation de la durée du travail qui va de pair avec la décentralisation de la négociation collective rend plus difficile la mesure de la durée du travail.
7 Les sources traditionnelles de mesure du temps productif s’avèrent ainsi de plus en plus inadaptées à l’émergence de temps de travail hybrides (temps de formation, d’apprentissage, de réflexion, de coordination, d’astreinte, etc.) (Bouffartigue, et Bouteiller 2000). La durée du travail devient polymorphe.
8 La complexité et la pluralité de la notion de travail rendent dès lors toute tentative de mesure sujette à la critique. Mesurer cette complexité soulève donc de nombreuses difficultés, que l’on peut chercher d’une part à identifier, d’autre part à dépasser. Cet article tente de répondre à ce double objectif, en considérant que la construction d’un indicateur synthétique de durée du travail qui répond également à un objectif de comparabilité internationale doit s’accompagner d’une évaluation systématique des sources statistiques. Cette démarche permet en premier lieu d’identifier une grande partie des biais dont souffrent les comparaisons internationales de durée du travail, mais aussi de déboucher sur des estimations de durée du travail fondées sur des sources et des concepts communs, qui peuvent être ensuite confrontées aux régulations nationales relatives à la durée du travail. Replacer les indicateurs dans leurs contextes institutionnels nationaux permet de se garder d’interprétations éventuellement abusives (Gadrey et Jany-Catrice, 1998), mais la « mise en contexte » de la mesure de la durée du travail ne doit cependant pas affaiblir le pouvoir de généralisation des comparaisons internationales. L’analyse proposée ici se situe donc ici à un niveau intermédiaire entre les approches de type « universaliste », qui considèrent l’existence d’une équivalence fonctionnelle des concepts (Hantrais et Letablier, 1998) et les approches de type « culturaliste », mettant l’accent sur les seules spécificités nationales.
Les obstacles statistiques
L’hétérogénéité des mesures du volume de travail
9 L’hétérogénéité des méthodes de mesure du volume de travail est connue, mais rarement synthétisée et dépassée. L’impossibilité de disposer d’une source statistique unique (voir annexe 1) permettant de construire sur longue période des séries d’emploi et de durée du travail à la fois cohérentes entre elles et compatibles avec la mesure macroéconomique de la production, ainsi que la latitude laissée au niveau des recommandations internationales pour la mesure du volume de travail sont en effet sources de trois principales causes d’hétérogénéité.
10 Il est en premier lieu impossible de disposer sur la base des comptes nationaux d’une mesure du volume de travail sur un concept identique. Certains pays privilégient une mesure du volume de travail sur la base des heures travaillées (par poste de travail ou par personne), d’autres privilégient une mesure en équivalent temps plein, d’autres enfin ne publient que des effectifs.
11 La capacité des sources statistiques nationales à capter le champ des activités productives peut ensuite avoir une influence non négligeable sur la mesure de l’emploi. Le problème se pose surtout pour la mesure des activités marginales, des emplois de très faible durée, du travail clandestin. De ce point de vue, de gros efforts ont été accomplis au cours des dernières années pour améliorer ou harmoniser la mesure des effectifs [4]. L’introduction du nouveau Système européen des comptes nationaux (SEC 95) a été ainsi l’occasion pour la plupart des pays de procéder à d’amples révisions des séries d’emploi. En Allemagne par exemple, la source privilégiée pour la mesure de l’emploi est, comme en France, le recensement. Entre chaque recensement, les séries d’emploi sont construites sur la base de sources administratives et de l’enquête sur les forces de travail. Or jusqu’à récemment, aucune de ces sources ne permettait d’évaluer correctement l’ampleur des emplois de très faible durée. Exempts de l’assujettissement aux cotisations sociales, ils n’étaient pas intégrés dans les statistiques administratives. Ils étaient par ailleurs très mal captés par l’enquête sur les forces de travail auprès des ménages (EFT par la suite), dans laquelle la définition de l’emploi repose pour l’essentiel non pas sur le critère du BIT [5] mais sur l’auto-déclaration des personnes interrogées. L’assujettissement aux cotisations sociales et deux refontes du questionnaire de l’EFT ont ainsi fait émerger près de 3 millions de salariés supplémentaires (données pour 1999), soit une augmentation de plus de 10 % des effectifs. L’intégration des emplois de courte durée en Espagne et leur meilleure perception au Royaume-Uni se sont là aussi traduites par des révisions assez substantielles des niveaux d’emploi.
12 Les biais qui persistent dans la mesure de l’emploi sont pour certains négligeables. Les États-Unis et le Royaume-Uni continuent par exemple d’exclure de l’emploi les travailleurs familiaux non rémunérés, que la résolution du BIT classe dans l’emploi. D’autres sont plus difficiles à évaluer. C’est notamment le cas du travail clandestin, pour lesquels tous les pays ne font pas de correction ou l’évaluent selon des méthodes différentes. Aux Pays-Bas, le travail au noir est assimilé à l’écart résiduel entre les effectifs perçus par l’EFT et les autres sources, après correction des autres biais. En France et en Italie, l’estimation du travail au noir résulte plus d’une estimation de la fraude fiscale.
13 Enfin, l’harmonisation de l’estimation de la durée du travail ou de la correction du temps partiel est loin d’être aboutie. Des huit pays, seuls cinq publient dans le cadre de la comptabilité nationale des séries de durée du travail compatibles avec celles de l’emploi, mais les méthodes et les définitions sous-jacentes sont loin d’être identiques. Le Royaume-Uni est le seul pays où une mesure du volume d’heures travaillées est directement issue de l’enquête continue sur les forces de travail [6], mais seulement à partir de 1992. Les États-Unis, L’Allemagne, la France et les Pays-Bas ont recours à des méthodes combinant à des degrés divers diverses sources. Or une mesure en continu à partir des EFT présente en principe un certain nombre d’avantages. Elle permet d’utiliser directement la durée hebdomadaire effective de ces enquêtes sans courir par exemple le risque de passer à côté de l’essentiel des congés payés ou des jours fériés. Elle est la seule à tenir compte tout à la fois des déterminants individuels et collectifs de la durée du travail, des heures supplémentaires structurelles mais aussi conjoncturelles, rémunérées ou non (voir l’annexe II sur les définitions de durée du travail). Les EFT conduites sur une fréquence plus faible captent en revanche mal les variations conjoncturelles de la durée du travail, tandis que les enquêtes établissements sous-estiment largement les heures supplémentaires non rémunérées.
14 Quelques exemples suffisent alors pour se rendre compte des nombreux biais dont souffre toute comparaison internationale basée sur les séries de la comptabilité nationale. Aux États-Unis, le calcul de la durée effective du travail se base essentiellement sur la durée hebdomadaire rémunérée des salariés liés à la production collectée dans l’enquête établissements mensuelle (Current Employment Survey), corrigée des absences rémunérées des mêmes salariés tirées d’une autre enquête établissements. Ainsi, 20 % en moyenne des effectifs salariés sont exclus du champ de l’enquête. Dans les services, il s’agit essentiellement des cadres, ce qui peut conduire à sous-estimer la durée effective du travail. En Allemagne, en France et aux Pays-Bas, les comptables nationaux ont recours à une méthode par composante (voir l’annexe III pour les méthodes d’estimation de la durée du travail) [7].
15 Comparer directement les durées des salariés à temps plein de ces trois pays équivaut à comparer une durée offerte théorique (cas de la France) à une durée conventionnelle majorée des heures supplémentaires des seuls ouvriers de l’industrie manufacturière (cas de l’Allemagne) et à une durée contractuelle majorée des heures supplémentaires rémunérées de la première semaine d’octobre (cas des Pays-Bas), trois mesures qui sont loin d’être homogènes, tant du fait de la qualité des sources utilisées que du traitement des heures supplémentaires.
16 En règle générale, et cela vaut également pour les pays qui ne publient que des séries en équivalent temps plein, la prise en compte du temps partiel est faite autant que possible à partir de sources administratives ou établissements pour le taux de temps partiel. Par contre, la durée relative des salariés à temps partiel provient des EFT, sauf aux Pays-Bas où elle est issue de l’enquête établissements. La combinaison de différentes sources peut parfois déboucher sur des résultats étranges. En Allemagne par exemple, le taux de temps partiel était tiré avant le changement de base comptable de l’EFT, tandis que la durée relative d’un salarié à temps partiel provenait d’une source administrative. C’est désormais l’inverse dans le nouveau cadre comptable. Or, la durée relative des salariés à temps partiel utilisée dans l’ancien cadre comptable était supérieure de près d’un tiers à ce que l’on observait dans l’EFT, alors même que les effectifs couverts étaient en principe les mêmes. Concrètement, et avant même de considérer l’impact des emplois de très faible durée, le changement de base s’est soldé par une réduction d’une cinquantaine d’heures de la durée annuelle effective, soit de 3 %.
17 Le même constat d’hétérogénéité peut être étendu à l’examen des séries de durée effective publiées régulièrement par le Secrétariat de l’OCDE. L’effort déployé par cet organisme pour mettre à disposition des séries longues pour un nombre important de pays en fait une source couramment utilisée dans le cadre des comparaisons internationales, mais la recherche d’exhaustivité a un coût en terme d’homogénéité. En règle générale et à certains ajustements près (États-Unis, Pays-Bas), l’OCDE privilégie, lorsqu’elles existent, les séries des comptes nationaux. Pour les autres pays, l’utilisation des EFT n’est pas systématique. Se côtoient alors des séries de durée par personne (États-Unis, France, Allemagne, Italie, Espagne, Royaume-Uni) et par emploi (Japon, Pays-Bas), des séries basées essentiellement sur des enquêtes établissements ou tirées de sources conventionnelles (États-Unis, Japon, France, Allemagne Pays-Bas) et des séries construites à partir des EFT (Italie, Espagne, Royaume-Uni), des méthodes par composantes (France, Allemagne, Pays-Bas, Italie) et des méthodes plus directes (États-Unis, Japon, Espagne, Royaume-Uni), des durées effectives (États-Unis, Japon, France, Allemagne, Espagne, Italie, Royaume-Uni) et une durée contractuelle (Pays-Bas). Le secrétariat de l’OCDE met lui-même en garde contre l’utilisation de ces séries pour une comparaison en niveau, conseillant plutôt de les utiliser pour en dégager des tendances temporelles.
Principaux choix méthodologiques
18 Afin de répondre au double objectif de comparaison internationale et de cohérence des données, la démarche adoptée a été double. Le souci de contribuer à éclairer les hiérarchies de durée du travail entre pays a conduit à privilégier l’utilisation des EFT, la seule source qui permette des comparaisons sur un champ et des concepts quasiment identiques. Une autre raison de privilégier la durée des EFT et la durée habituelle à la durée contractuelle, conventionnelle ou normale majorée des heures supplémentaires perçues par les enquêtes établissements réside dans une meilleure perception des heures supplémentaires structurelles de l’ensemble des salariés. Au-delà des avantages techniques de la mesure, l’approche par les EFT suppose aussi que dans un mouvement de dilution des frontières du travail, l’individu qui exerce l’activité dont la durée est à mesurer est encore le mieux placé pour l’évaluer.
19 La durée effective proposée se base sur l’exploitation de l’EFT de printemps pour les pays européens, sur celle des EFT mensuelles au Japon et aux États-Unis (voir l’annexe IV pour une description de la méthode retenue). La construction de l’indicateur repose donc une méthode par composante dans le cas des pays européens, sur une méthode quasi-directe dans le cas des États-Unis et du Japon [8]. Afin de mieux éclairer les spécificités nationales, une attention particulière est apportée à dégager aux différentes étapes de la construction de l’indicateur (temps plein, temps partiel, emploi principal, tous emplois confondus, congés, absences, etc.) une base de comparaison commune à l’ensemble des pays.
20 Cette mesure de la durée du travail a néanmoins ses limites. La difficulté pour l’individu à appréhender sa durée du travail habituelle et effective au-delà des normes contractuelles ou légales en est une de taille. Pour cette raison, la durée des salariés à temps plein a fait l’objet d’un examen plus approfondi, passant notamment par la confrontation des données chiffrées provenant des enquêtes avec les différents types de régulations nationales relatives à la durée du travail [9].
La durée du travail des salariés à temps plein
Les régulations nationales
21 Même si un mouvement vers plus de décentralisation et de flexibilisation s’observe dans de nombreux pays dans le mode de détermination et le contenu des régulations relatives à la durée du travail (Freyssinet, 2000), les points de départ et l’état actuel de la norme collective des pays présentés ici restent encore fortement caractérisés par des spécificités nationales propres [10].
22 Certains pays se distinguent par un niveau de légalité décentralisé et mettent peu de limites au recours aux heures supplémentaires et à la modulation du temps de travail (États-Unis, Royaume-Uni). Aux États-Unis, il n’existe aucune législation sur la durée du travail à l’exception de celle sur les heures supplémentaires (le Fair Labour Standard Act de 1938). La plupart des cadres ne sont pas concernés par cette législation. Au Royaume-Uni, il n’existe aucune législation sur la durée du travail [11] à l’exception de la directive européenne de 1993, transposée en droit britannique en 1998. Cette dernière fixe la durée maximale hebdomadaire de travail à 48 heures (en moyenne sur quatre mois) et prévoit des périodes minimales de repos hebdomadaire et de congés annuels (quatre semaines). La disparition de nombreux accords collectifs au niveau national s’est traduite par un très fort déclin de la part des salariés couverts par une convention collective depuis la fin des années 1970 (Rubery, 1998). Les heures supplémentaires sont depuis longtemps un élément essentiel de rémunération pour certaines catégories de salariés. Elles sont défendues par les syndicats lors des négociations sur le temps de travail. Le souhait de limiter leur impact sur le coût salarial a incité les entreprises à privilégier le développement d’accords de modulation du temps de travail. Au Japon, le niveau centralisé de légalité est compensé par de nombreuses dérogations (Hippo, 1992) et admet un contingent d’heures supplémentaires élevé. Il n’existait jusqu’en 1999 pas de limite légale aux heures supplémentaires. Seules des lignes directrices gouvernementales fixaient le maximum annuel à 360 heures (450 de 1989 à 1993), avec dérogations possibles pour certaines catégories (Yamakawa, 1998). La rémunération du travail de nombreux cadres est déterminée sur une base qui tient compte des heures effectuées, ce qui constitue une forte incitation à effectuer des heures supplémentaires [12], combattue sans beaucoup de succès par l’introduction de nouveaux systèmes de définition de la norme de durée du travail (Araki, 1996).
23 Dans d’autres pays, le cadre législatif prévoit une durée maximum élevée, supérieure au cadre conventionnel. Le contingent d’heures supplémentaires autorisé par la législation est élevé ; leur niveau et leur rémunération dépend in fine des périodes de compensation légale et des accords de modulation du temps de travail des conventions collectives (Allemagne, Italie, Pays-Bas). En Allemagne, le nombre d’heures supplémentaires autorisé par la législation est élevé (480 heures par an). La loi fixe la durée hebdomadaire maximum à 48 heures en moyenne et non en plafond, mais la législation prévoyait jusqu’en 1994 une période de compensation relativement courte (deux semaines) pour le respect de la durée journalière moyenne maximum de 8 heures. Dans les faits, la modulation du travail est cependant réglée au niveau des conventions collectives, qui prévoient un seuil de déclenchement des majorations pour heures supplémentaires nettement inférieur au plafond légal. Les accords de flexibilisation de la durée du travail se sont développés dès les années 1980, mais n’ont été réellement mis en œuvre que dans les années 1990 (Chagny, 1998). En Italie, la durée hebdomadaire légale était jusqu’en 1997 élevée (48 heures). Elle a été abaissée à 40 heures en 1997, mais avec un contingent d’heures supplémentaires légales élevé (250 heures dans l’industrie). La durée conventionnelle hebdomadaire moyenne était cependant inférieure de 10 heures à la durée légale avant 1997, elle l’était encore de plus de deux heures en 1998 et les contingents d’heures supplémentaires prévus par les conventions collectives sont inférieurs aux dispositions légales. L’annualisation de la durée du travail est présente dans de nombreuses conventions collectives. Aux Pays-Bas, la durée maximum hebdomadaire a été abaissée en 1996. Le nouveau dispositif législatif prévoit des modalités plus souples en cas de signature d’accords collectifs, mais les périodes de compensation restent plus faibles qu’en Allemagne par exemple (Den Broeder, 1996).
24 En Espagne et en France [13], où domine le cadre législatif, le contingent d’heures supplémentaires est relativement faible par rapport aux autres pays. La modulation du temps de travail est encadrée par la loi en Espagne. La durée du travail légale est de 40 heures (depuis 1983), les heures supplémentaires sont majorées à un taux élevé (jusqu’en 1994), ou peuvent être compensées en temps libre. Avec la réforme du statut des travailleurs en 1994, les règles de fixation de la durée du travail se sont cependant considérablement assouplies et déplacées au niveau des accords collectifs (Tuchszirer et Vincent, 1998). La loi ne fixe plus qu’une fourchette à l’intérieur de laquelle les partenaires sociaux peuvent négocier. La durée légale est désormais de 40 heures en moyenne annuelle, ce qui implique qu’une grande partie des heures travaillées au-delà de 40 heures hebdomadaires ne sont plus assimilables à des heures supplémentaires. Si elles sont récupérées dans un délai de quatre mois, elles ne se déduisent pas du contingent d’heures supplémentaires annuel (80 heures). En France, les limites légales sont proches de celles de l’Allemagne, mais le contingent (légal) d’heures supplémentaires fixe une limite aux heures supplémentaires annuelles (130 heures). Les heures effectuées au-delà du contingent donnant droit à un repos compensateur de 100 %. En revanche, la flexibilité de la durée du travail s’y était peu développée jusqu’au passage aux 35 heures et l’aménagement de la durée travail passait pour l’essentiel par d’autres voies (intérim, heures supplémentaires, CDD, heures complémentaires des salariés à temps partiel, non majorées (CSERC, 1998).
Durées comparées du travail des salariés à temps plein
Sur une base hebdomadaire…
25 La comparaison de la durée habituelle tirée des EFT et de la durée des salariés à temps plein tirée des enquêtes établissements donne en principe une première information sur la diffusion de la norme collective et sur l’impact des heures supplémentaires habituelles. Pour tenter d’évaluer l’impact de l’ensemble des heures supplémentaires, il est également possible de majorer la durée conventionnelle ou normale des heures supplémentaires tirées des sources établissements et de la comparer à la durée habituelle majorée éventuellement des heures supplémentaires conjoncturelles de la semaine de référence.
26 En dépit de toutes les réserves que l’on peut émettre sur la possibilité d’établir une base de comparaison commune, une assez bonne cohérence se dégage de la confrontation des différentes informations relatives à la durée hebdomadaire du travail et aux heures supplémentaires pour les salariés à temps plein.
27 Des durées hebdomadaires habituelles très élevées (tableau 1) dans les EFT vont en général de pair avec un cadre normatif soit restreint (États-Unis, Royaume-Uni), soit admettant de nombreuses dérogations (Japon). Le Royaume-Uni et le Japon ont en commun une fréquence importante d’horaires très élevés : 50 % des salariés à temps plein déclaraient ainsi en 1997 travailler habituellement plus de 43 heures hebdomadaires. Aux États-Unis, la durée élevée du travail des salariés à temps plein s’explique en revanche plus par la prédominance de la norme de 40 heures, qui concernait 70 % des effectifs en 1998.
28 Au Japon, la norme de 40 heures souhaitée par la révision du code du travail de 1987 serait encore loin d’être atteinte. À la fin des années 1990, le volume d’heures supplémentaires rémunérées mesuré sur un champ identique y reste l’un des plus élevés des six pays après les États-Unis [14]. La diffusion de la semaine de cinq jours s’est accélérée depuis le milieu des années 1980, au moins dans les entreprises de plus de 30 salariés [15]. À la différence des années 1970, cette diffusion n’a pas eu pour corollaire une augmentation de la durée journalière et des heures supplémentaires, si bien que la durée hebdomadaire effective a baissé d’un peu plus de quatre heures entre la fin des années 1980 et la fin des années 1990. Il est difficile à ce stade de dissocier ce qui résulte de l’adaptation de la durée hebdomadaire du travail à un nombre de jours ouvrés plus faible ou de l’atonie de l’économie nippone.
29 Au Royaume-Uni et aux États-Unis, des fréquences élevées d’horaires très longs sont cohérentes avec une législation très souple sur les heures supplémentaires. Comme au Japon, elles vont de pair avec un profil cyclique des heures supplémentaires plus marqué que dans les autres pays.
Composantes de la durée annuelle habituelle des salariés en 1998
Composantes de la durée annuelle habituelle des salariés en 1998
30 Au Royaume-Uni, la durée normale de l’enquête établissements est faible, de l’ordre de 38 heures, mais le volume d’heures supplémentaires reste très élevé en comparaison des autres pays européens, ce que confirme également l’EFT communautaire. Les heures supplémentaires rémunérées concernent essentiellement les ouvriers à temps plein de sexe masculin. Majorée des heures supplémentaires, la durée hebdomadaire des salariés à temps plein de l’enquête établissements est encore cependant très en deçà (de 8 % en moyenne) de la durée habituelle. La comparaison des deux sources sur un champ identique met en évidence des écarts importants pour la durée normale des cadres et des professions intellectuelles et scientifiques, ainsi qu’un montant élevé d’heures supplémentaires hebdomadaires non rémunérées (1,9 heure) pour ces catégories socioprofessionnelles, en particulier dans l’éducation, les services d’intermédiation financière, l’immobilier et les services aux entreprises (ONS, 2000). Ces éléments recoupent les résultats mis en évidence par Bell et al. (2000), sur la forte fréquence des heures supplémentaires non rémunérées au Royaume-Uni sur la base de l’EFT nationale, essentiellement imputable à une proportion élevée de cadres dans l’emploi salarié, et qui s’expliquerait en partie par une conception assez large de l’emploi cadre au Royaume-Uni (Dull et al., 1999).
31 En Espagne, la durée hebdomadaire habituelle d’un temps plein est supérieure à celle des autres pays européens. Les heures supplémentaires mesurées aussi bien par l’enquête établissements que par l’EFT communautaire sont très faibles. La proportion d’ouvriers la plus élevée des pays européens et la législation sur les heures supplémentaires très contraignante, au moins jusqu’en 1994, peuvent expliquer la prédominance de la norme légale de 40 heures (près de 70 % des salariés à temps plein selon l’EFT communautaire).
32 La durée habituelle d’un temps plein serait aux Pays-Bas assez proche de celle de l’Espagne après incorporation des heures supplémentaires rémunérées et non rémunérées. Ainsi corrigée, la durée habituelle des Pays-Bas est supérieure à celle de la France et de l’Allemagne, ce qui est cohérent avec une durée contractuelle également élevée, au moins jusqu’à la dernière vague de RTT aux Pays-bas. Le recours aux heures supplémentaires, mesuré aussi bien sur la base de l’enquête établissements que sur celle de l’EFT communautaire, est faible par rapport aux autres pays européens.
33 Dans les années 1990, la France et l’Allemagne ont des durées habituelles d’un temps plein salarié assez proches, inférieures à celle de l’Espagne. Sur la base de l’EFT communautaire, le recours aux heures supplémentaires est important en Allemagne, supérieur à la France. Il est même le plus élevé des pays européens après le Royaume-Uni. L’information est cohérente avec la source établissements, qui ne porte cependant que sur les salariés de la branche manufacturière. Elle incite à penser que le cadre conventionnel admet un potentiel assez élevé d’heures supplémentaires en Allemagne.
34 Enfin, la durée d’un temps plein salarié est la plus faible en Italie, aussi bien sur la base des données conventionnelles que sur celle de l’EFT communautaire. Cette faible durée du temps plein en Italie est essentiellement imputable aux administrations publiques (12 % de l’emploi salarié) et aux autres services administrés, où la durée habituelle d’un temps plein est, en comparaison des autres pays, très inférieure à l’ensemble des autres branches. Le recours aux heures supplémentaires mesuré par l’EFT communautaire est faible, ce qui est cohérent avec un contingent conventionnel d’heures supplémentaires assez bas. Enfin, le faible écart entre la durée conventionnelle et la durée habituelle suggère également un faible volume d’heures supplémentaires non rémunérées.
…et annuelle
35 La prise en compte des congés et des jours fériés modifie relativement peu le classement déjà établi sur une base hebdomadaire, à l’exception de l’Italie et du Royaume-Uni (tableau 1). Cela tient au fait que des durées hebdomadaires élevées vont en général de pair avec un nombre de jours de travail dans l’année important, et vice-versa. Le Japon et les États-Unis, qui combinent une durée hebdomadaire et un nombre de jours de travail dans l’année élevés, ont une durée normale annuelle d’un temps plein très élevée. Au Royaume-Uni, la durée du travail des salariés à temps plein reste la plus élevée des pays européens. Sur une base annuelle, elle est plus faible qu’aux États-Unis et au Japon en raison d’un nombre de jours de travail dans l’année plus proche des autres pays européens que des standards américains et japonais. L’Espagne se détache vers le haut des autres pays d’Europe continentale, sous l’effet combiné d’une durée hebdomadaire élevée et d’un nombre de jours de travail dans l’année supérieur à tous ses partenaires européens. L’écart est en revanche ailleurs très resserré (Allemagne, France, Italie, Pays-Bas), au maximum de 2 %. En Italie, le nombre élevé de jours de travail dans l’année compense en effet la très faible durée hebdomadaire, si bien que la durée annuelle des salariés à temps plein est très proche de celle de la France.
36 Lorsque des informations sont recueillies directement sur le nombre de jours de congés effectivement pris, elles peuvent mettre en évidence des écarts importants par rapport aux dispositions légales, conventionnelles, ou contractuelles, illustrant par là même la difficulté d’évaluer l’impact de cette composante sur l’estimation d’une durée annuelle du travail en l’absence d’enquêtes continues.
37 En Espagne par exemple, les congés effectifs mesurés par l’enquête établissements sont très en deçà des droits légaux (tableau 1), et il n’est pas impossible que cet écart soit dû à la très forte fréquence des contrats à durée déterminée, introduits en 1980, et qui ont connu depuis lors une très forte expansion. Des écarts encore plus importants entre congés attribués et réellement liquidés sont observés au Japon, où de nombreux facteurs explicatifs sont invoqués. Certains dispositifs institutionnels, comme la mauvaise prise en charge des absences pour maladie par les entreprises, inciteraient ainsi les salariés japonais à conserver leurs droits pour faire face à des cas d’urgence (Japan Institute of Labor, 2001). Ces écarts reflèteraient également le fait qu’une durée élevée du travail est un élément essentiel de la compétitivité des PME au Japon. Enfin, ils illustreraient également la « peur du retour du foyer » caractéristique des relations entre le salarié et son entreprise au Japon (Cette, 1999). Le cumul de ces multiples facteurs peut contribuer à expliquer que les mesures mises en place par le gouvernement pour inciter les salariés à prendre l’ensemble de leurs congés aient eu jusqu’à présent relativement peu d’effet.
38 Enfin, s’il est difficile de disposer d’informations sur l’impact de l’ancienneté, celle-ci s’avère avoir dans certains cas un rôle prépondérant. Aux États-Unis par exemple, les droits aux congés des salariés — déterminés par les contrats de travail — acquis avec l’ancienneté sont assez proches de ceux des salariés japonais. Or si plus de 50 % des salariés américains avaient une ancienneté moyenne inférieure ou égale à cinq ans en 1995, ils étaient en revanche 64 % à avoir une ancienneté moyenne supérieure à cinq ans au Japon. C’est donc essentiellement le fort taux de rotation qui explique que les salariés américains ne prennent en moyenne que deux semaines de congés par an. À titre d’illustration, si l’on appliquait le taux de rotation de la France aux salariés américains, ces derniers disposeraient d’une semaine supplémentaire de congés par an.
Les évolutions sur longue période
39 La photographie à une date donnée des durées du travail rend certes compte de la diversité et de la diffusion des régulations nationales relatives à la durée du travail des salariés à temps plein, mais non de l’inégale ampleur des processus de réduction collective du temps de travail, que seul un examen des évolutions sur longue période peut mettre en évidence.
40 Or privilégier l’utilisation des EFT dans un contexte non seulement statique mais aussi dynamique (voir annexe V) permet de rendre compte de divergences plus ou moins marquées apparues dans les années 1980 entre l’évolution respective des durées hebdomadaires habituelles déclarées dans le cadre des EFT et des durées collectées auprès des établissements ou des sources conventionnelles.
Durée habituelle et durée contractuelle des salariés à temps plein
41 Des quatre pays pour lesquels une comparaison peut être établie pour les salariés à temps plein, la France est ainsi le seul où l’écart entre la durée offerte de l’enquête établissements et la durée habituelle est stable au cours du temps. En Allemagne, en Italie [16], mais surtout au Royaume-Uni, les divergences ont eu tendance à s’accentuer depuis le début des années 1980 ou dans les années 1990 (tableau 2).
Évolution de la durée annuelle d’un temps plein
Évolution de la durée annuelle d’un temps plein
42 Au Royaume-Uni, la durée hebdomadaire normale de l’enquête établissements n’a quasiment pas bougé depuis le début des années 1980. Les heures supplémentaires structurelles rémunérées collectées par l’enquête établissements sont stables. En revanche, la durée hebdomadaire habituelle a connu une nette progression (0,3 % en moyenne par an de 1983 à 1998), pour l’essentiel due à l’augmentation de la fréquence d’horaires très élevés. Bell et al. (2001) montrent que cette augmentation est pour une bonne part imputable à l’augmentation de la part des femmes cadres ou exerçant des professions intellectuelles et scientifiques dans l’emploi, qui s’est traduite par une nette progression du nombre moyen d’heures supplémentaires non rémunérées. À la différence du Royaume-Uni, l’Allemagne se distingue par une forte diminution de la durée conventionnelle du travail des salariés à temps plein entre le début des années 1980 et la fin des années 1990. Mais cette réduction négociée du temps de travail s’est très imparfaitement répercutée sur la durée habituelle, surtout dans les années 1990 (tableau 2). S’il ne peut être exclu que cette divergence soit pour une part de nature statistique [17], elle renvoie également aux modalités des accords de réduction du temps de travail. La mise en œuvre, effective depuis le milieu des années 1990, des accords de modulation peut en effet s’être soldée par une difficulté plus grande des personnes interrogées à déclarer un horaire habituel, alors même que le questionnaire allemand ne prévoit pas la possibilité de déclarer ne pas avoir de durée habituelle. Comme l’augmentation constatée de la durée habituelle des salariés à temps plein résulte d’un pourcentage croissant de personnes déclarant 40 heures, il n’est pas impossible que certaines personnes dont les horaires sont irréguliers, déclarent par défaut une durée habituelle « normative » de 40 heures hebdomadaires. Les accords de modulation peuvent aussi relâcher la référence à la durée hebdomadaire conventionnelle négociée. Jusqu’en 1996, la durée conventionnelle majorée des heures supplémentaires des ouvriers à temps plein dans l’industrie manufacturière ne s’écarte jamais beaucoup de la durée rémunérée des mêmes catégories de salariés, sauf en période de chômage partiel. En revanche, depuis 1996, la durée hebdomadaire rémunérée dépasse la durée conventionnelle majorée de 0,5 heures, et cet écart persiste.
43 Qu’elle résulte d’une difficulté croissante à cerner un horaire hebdomadaire habituel, d’une sous-estimation croissante des heures supplémentaires non rémunérées ou d’une surestimation croissante des heures travaillées, la divergence dans le temps des différentes mesures de durée hebdomadaire peut néanmoins conduire à réviser dans certains cas dans une ampleur non négligeable le rythme de croissance de la durée habituelle annuelle des salariés à temps plein depuis le début des années 1980 en Allemagne et au Royaume-Uni. Elle a en revanche moins d’impact sur les tendances longues, qui mettent en valeur la particularité des profils nationaux.
La durée habituelle annuelle des salariés à temps plein depuis trente ans : l’exception américaine
44 Des huit pays analysés ici, les États-Unis sont le seul où la durée annuelle habituelle des salariés à temps plein ne s’est pas réduite entre le début des années 1970 et la fin des années 1990 (tableaux 2 et 3) (graphique). Cette évolution résulte d’une baisse du temps de travail d’une ampleur très limitée dans les années 1970, puis d’une remontée de la durée du travail engagée après la récession du début des années 1980, imputable à l’augmentation de la fréquence d’horaires très élevés. Toutes les branches et toutes les catégories socioprofessionnelles ont été touchées par ce mouvement. Dans les années 1990, la très légère remontée de la durée annuelle habituelle des salariés à temps plein est essentiellement imputable à la réduction du nombre effectif de jours de congés.
Évolution de la durée hebdomadaire et des jours de travail dans l’année
Évolution de la durée hebdomadaire et des jours de travail dans l’année
Durée habituelle des salariés à temps plein
Durée habituelle des salariés à temps plein
45 Le Royaume-Uni a en commun avec le Japon d’être le pays où la durée annuelle du travail des salariés à temps plein a le moins reculé sur les trente dernières années, à un rythme annuel moyen de 0,2 %. La durée contractuelle normale était déjà très basse au Royaume-Uni dans les années 1970 et la réduction du temps de travail est passée dans cette décennie essentiellement par la réduction du volume d’heures supplémentaires rémunérées. Dans les années 1980, l’augmentation de la part des cadres dans l’emploi s’est traduite par une forte progression des heures supplémentaires non rémunérées, mais l’augmentation de la durée hebdomadaire a été partiellement compensée par la généralisation de la cinquième semaine de congés payés. Le Japon est le seul des huit pays où la sortie de la récession de 1975 s’est soldée par une forte remontée de la durée annuelle habituelle du travail des salariés à temps plein. La réduction entamée à la fin des années 1980 a été obtenue sous l’impulsion de la réforme du Code du Travail de 1987, qui a entraîné une forte diminution du nombre de jours travaillés dans l’année.
46 L’Allemagne, la France, l’Italie et les Pays-Bas ont connu entre le début des années 1970 et la fin des années 1990 une réduction de durée du travail salarié à temps plein quasiment équivalente, de l’ordre de 0,5 à 0,6 % en moyenne par an, avec une cassure entre les années 1970 et les deux dernières décennies. Les modalités sont cependant assez divergentes.
47 En Italie, le début des années 1970 a été caractérisé par une forte réduction de la durée hebdomadaire conventionnelle, pour l’essentiel obtenue par l’introduction de la semaine de cinq jours ouvrés en 1973. Dans les quatre pays, la norme de 40 heures a été atteinte sur un plan légal ou conventionnel au milieu des années 1970 et est restée quasiment inchangée pendant le reste de la décennie, sauf en Italie. La majeure partie des branches industrielles italiennes avaient en effet négocié dès le milieu des années 1970 une durée hebdomadaire de 40 heures, restée quasiment inchangée jusqu’en 1987. La baisse de la durée hebdomadaire du travail constatée de 1973 à 1987 est donc intégralement imputable à la réduction du temps de travail dans les services, et tout particulièrement dans les services non marchands. L’après premier choc pétrolier a aussi été caractérisé par une remontée du nombre de jours de travail dans l’année, qui explique la faible répercussion de la baisse de la durée hebdomadaire des services non marchands sur la durée annuelle.
48 En Allemagne, les employeurs et les syndicats se sont entendus après 1975 pour ne pas réduire la durée du travail en deçà de 40 heures et les syndicats ont milité pour l’avancement de l’âge de départ en retraite et l’augmentation des congés. De 1975 au début des années 1980, la réduction du temps de travail à temps plein est passée par une augmentation des congés aux Pays-Bas et en Allemagne, ainsi que par une réduction des heures supplémentaires en Allemagne et en France. Il a fallu ainsi une décennie à l’Allemagne pour résorber le pic d’heures hebdomadaires supplémentaires observé en 1970, au moment de la généralisation de la semaine de cinq jours.
49 Une nouvelle vague de réduction de la durée du travail s’est enclenchée dans les années 1980. Elle a été concentrée sur l’année 1982 en France, consécutive à la grève de 1984 dans la métallurgie en Allemagne, plus tardive et modérée en Italie (1987). En Italie, elle a concerné cette fois l’ensemble des branches. Aux Pays-Bas, elle est essentiellement passée dans le milieu des années 1980 par l’octroi de jours de RTT consécutifs aux accords de Wassenaar, ce qui explique notamment la faible diminution de la durée hebdomadaire par rapport à la durée annuelle. L’augmentation des heures supplémentaires consécutive à la RTT est restée modérée.
50 Enfin, dans les années 1990, autant aux Pays-Bas qu’en Allemagne, la répercussion effective des accords de RTT a été faible, en partie en raison d’une réduction du nombre de jours de RTT aux Pays-Bas, via la divergence accrue entre la durée habituelle et la durée conventionnelle en Allemagne.
Le temps partiel
51 Dans de nombreux pays, une part croissante de la baisse de la durée du travail de l’ensemble des salariés est depuis le début des années 1980 imputable à la réduction individuelle de la durée du travail. Les caractéristiques de l’emploi à temps partiel diffèrent largement d’un pays à l’autre, en raison de la multiplicité et de la complexité des facteurs en jeu (partage du travail entre sexes, incitations fiscales, statut juridique de ce type de contrat, insertion des étudiants dans la vie active) [18]. S’il est évident que la seule comparaison de l’incidence moyenne du temps partiel évaluée dans le cadre de la construction d’un indicateur synthétique de durée du travail est incapable de rendre compte de cette diversité, l’importance que ce type de contrat a prise s’est traduite par un besoin croissant de statistiques internationales. Pour autant, son évaluation est rendue difficile par la coexistence de définitions et de sources multiples.
La diversité des définitions du temps partiel
52 L’hétérogénéité des définitions nationales du temps partiel (pour une présentation détaillée, voir l’annexe VI) est pour une part due à l’adoption tardive de recommandations internationales sur ce type de contrats. La convention C175 du BIT date de 1994, la Directive européenne de 1997. Aux termes de celle-ci, est considéré comme à temps partiel « un salarié dont la durée normale de travail, calculée sur une base hebdomadaire ou en moyenne sur une période d’emploi pouvant aller jusqu’à un an, est inférieure à celle d’un travailleur à temps plein comparable ». Si l’Allemagne, l’Italie et les États-Unis ont depuis longtemps adopté des définitions nationales cohérentes avec ces recommandations internationales, ce n’est le cas que depuis janvier 2000 en France. Ailleurs, le temps partiel est défini sur la base d’un seuil d’heures (de 30 heures au Royaume-Uni), en référence à un certain pourcentage de la durée des salariés à temps plein (moins de 77 % en Espagne depuis 1994, 80 % en France avant 2000), voire comme un contrat de travail atypique parmi d’autres plutôt qu’en seule opposition au travail salarié à temps plein. Les Pays-Bas distinguent ainsi le temps partiel régulier des contrats flexibles. Au Japon, le travail à temps partiel peut se référer dans certaines enquêtes à des emplois non réguliers, qui sont peu rémunérés, mais dont la durée du travail n’est pas systématiquement inférieure à celle des salariés réguliers. Le statut de temps partiel sur le lieu de travail (pâto) recouvre ainsi essentiellement des contrats qui n’ouvrent pas droit aux mêmes avantages que ceux des salariés réguliers (emploi à vie, progression salariale à l’ancienneté) [19], mais 16 % des salariés employés qui sont sous ce type de contrats travaillaient autant que les salariés dits « réguliers » en 1995 selon le General Survey on Part Time Workers (Fujiki et al., 2001).
53 Pour s’émanciper de la disparité des définitions nationales de temps partiel, un deuxième type de définition repose sur l’utilisation d’un seuil d’heures commun à tous les pays (Van Bastelaer, Lemaître et Marianna, 1997). Cette méthode est facile à mettre en œuvre sur la base des EFT, mais elle conduit à gommer complètement les particularités institutionnelles et notamment le fait que dans de nombreux pays, les droits des salariés à temps partiel étaient ou sont encore différents de ceux des salariés à temps plein. Sur longue période, l’enjeu de la mesure du temps partiel dans une optique de comparaison internationale est aussi de distinguer entre, d’un côté, l’évaluation de la réduction collective du temps de travail et, de l’autre, l’ampleur prise par les facteurs individuels de réduction du temps de travail. Le choix d’un seuil d’heures commun équivaut dans un certain sens à considérer que le temps de travail se définit de manière objective et universelle et est de ce fait rarement retenu dans les comparaisons internationales de durée du travail [20].
Une comparaison de la part du temps partiel
54 Sur la base des définitions retenues dans les EFT [21], le Royaume-Uni, mais surtout les Pays-Bas, se distinguent à la fin des années 1990 par une proportion très élevée de salariés à temps partiel, l’Espagne et l’Italie par une très faible fréquence du temps partiel (tableau 1). Dans les autres pays, la fréquence du temps partiel est assez proche, mais sur la base de dynamiques antérieures assez différentes.
55 Si l’essentiel des créations nettes d’emploi sont imputables au temps partiel en France et aux Pays-Bas entre 1973 et 1983 (tableau 4), la montée en régime des emplois à temps partiel a même été de pair avec un recul assez marqué des emplois à temps complet en Allemagne et au Royaume-Uni. En revanche, la contribution du temps partiel à la croissance de l’emploi entre 1973 et 1998 a été plus faible en Italie (56 %), au Japon (58 %), et surtout aux États-Unis (17,5 %).
56 Au début des années 1970, la part des emplois à temps partiel était assez proche et déjà relativement élevée aux Pays-Bas, aux États-Unis et au Royaume-Uni. De ces trois pays, les États-Unis sont le seul où elle est par la suite restée relativement stable. Elle a même régressé dans les années 1990, car l’essentiel des créations nettes d’emploi a porté depuis lors sur des emplois à temps plein. La part du temps partiel a connu en revanche une progression régulière et ininterrompue au cours des trente dernières années au Royaume-Uni, mais surtout aux Pays-Bas. Au début des années 1970, près de 40 % des emplois à temps partiels étaient occupés par des hommes aux Pays-Bas, mais plus des quatre cinquièmes de leur progression ultérieure est imputable à l’entrée sur le marché du travail des femmes, dont l’insertion professionnelle était défavorisée par un certain nombre de dispositions législatives ou fiscales jusqu’au milieu des années 1970 (Visser et Hemerijk, 1997, Wierinck, 1998). Les emplois de courte durée, d’une durée inférieure à 12 heures, représentent à la fin des années 1990, 12 % de l’emploi salarié total et sont dans une proportion importante le fait d’étudiants (CSERC, 1998).
57 La montée en régime du temps partiel a été plus tardive ailleurs. Elle s’est enclenchée dès les années 1980 en France, entre autres raisons du fait des travaux d’utilité collective (TUC), puis des contrats emploi-solidarité (CES), mais la part du temps partiel était assez faible au début des années 1970 en comparaison de l’Allemagne.
Évolution de l’emploi salarié et contribution du temps plein et du temps partiel 1
Évolution de l’emploi salarié et contribution du temps plein et du temps partiel 1
58 Enfin, dans tous les pays à l’exception des États-Unis et du Royaume-Uni, les années 1990 ont été caractérisées par une forte progression des emplois à temps partiel. Au Japon, il y a cependant de fortes chances qu’à la fois le niveau et la progression du temps partiel soient surestimés. Le temps partiel se définit en effet dans l’EFT comme un emploi (régulier ou non) d’une durée effective (tous emplois confondus) de moins de 35 heures. Or de nombreuses personnes travaillent moins de 35 heures pour des raisons passagères et sont susceptibles d’avoir une durée habituelle plus élevée. En 1997, sur les 20,7 % de salariés classés à temps partiel sur le critère du seuil de 35 heures hebdomadaires effectives, seuls la moitié déclaraient travailler normalement moins de 35 heures. Près de 16 % des salariés déclaraient travailler moins de 35 heures pour des raisons économiques, près de 14 % pour des raisons familiales (Sakashita, 2000). En adoptant une définition cohérente avec celle des autres EFT, le taux de temps partiel serait ainsi divisé par deux en 1997 [22]. Il n’est ainsi pas exclu que la progression du temps partiel dans les années 1990 reportée par l’EFT, et que l’on retrouve fréquemment dans les comparaisons internationales, soit pour partie imputable à l’impact de l’atonie prolongée de l’économie japonaise et de ce fait probablement surestimée : selon les données de l’EFT, le temps partiel aurait contribué pour près de 70 % à la croissance de l’emploi entre 1990 et 1997. En se basant sur d’autres sources, la contribution des emplois à temps partiel (enquête établissements MLS) ou des emplois non réguliers, en majorité de faible durée du travail, (enquête quinquennale Employment Status Survey) serait sur la même période respectivement comprise entre 40 et 55 %.
Durées du travail comparées, temps partiel inclus
59 À la fin des années 1990, l’inégale diffusion du temps partiel, mais aussi l’hétérogénéité des formes d’emplois qu’il recouvre [23], ont deux principales conséquences sur les comparaisons de durée du travail. La prise en compte du temps partiel dans le calcul de l’indicateur de durée annuelle du travail tend à rapprocher la durée du travail des États-Unis et du Royaume-Uni de celle de certains pays européens, mais elle se solde aussi par une dispersion dans l’ensemble beaucoup plus forte des niveaux de durée du travail (tableau 1).
60 Si les États-Unis continuent d’avoir une durée du travail supérieure à celles des pays européens, l’écart est en effet désormais plus resserré par rapport à l’Espagne, où l’impact du temps partiel est très faible. Le Royaume-Uni et l’Italie, assez polaires pour la durée d’un temps plein, la part du temps partiel et la fréquence des emplois de courte durée, ont des durées habituelles tous contrats confondus finalement assez proches. La France est dans une position intermédiaire. La part du temps partiel a certes progressé dans les années 1990, mais elle reste inférieure à ce que l’on observe en Allemagne. Mais surtout, la durée des emplois à temps partiel est restée en moyenne stable, alors qu’elle a reculé de plus de deux heures hebdomadaires en Allemagne. Enfin, même majorée des heures supplémentaires non rémunérées, la durée du travail est considérablement réduite aux Pays-Bas après prise en compte du temps partiel.
61 Entre le début des années 1970 et la fin des années 1990 (tableau 5), les États-Unis sont le seul pays où les emplois à temps partiel n’ont pas contribué à réduire la durée habituelle annuelle du travail des salariés. Cela tient d’une part à ce que les salariés à temps partiel tendent, tout comme les salariés à temps plein, à travailler un nombre d’heures plus élevé depuis le début des années 1980, mais aussi au recul de la part des emplois à temps partiel dans les années 1990. Ailleurs, la réduction individuelle de la durée du travail est devenue à partir du début des années 1980, et tout particulièrement dans les années 1990, le principal facteur de réduction de la durée du travail [24]. La contribution du temps partiel est la plus forte aux Pays-Bas, où le taux de temps partiel a progressé de 20 points entre 1970 et 1998, ainsi qu’au Royaume-Uni et au Japon [25]. Au Royaume-Uni, elle reflète avant tout une dualité croissante des durées individuelles du travail depuis le milieu des années 1980, l’augmentation de la part des emplois à temps partiel, d’une faible durée du travail, étant allée de pair avec celle d’emplois à temps plein d’une durée du travail très élevée. À une échelle certes beaucoup plus réduite, cette dualité se retrouve aussi en Allemagne dans les années 1990, avec la montée en régime des emplois de courte durée concomitante à l’augmentation de la durée déclarée par les salariés à temps plein dans l’EFT.
Évolution de la durée habituelle des salariés (à temps plein et à temps partiel 1)
Évolution de la durée habituelle des salariés (à temps plein et à temps partiel 1)
Réévaluation des hiérarchies des durées du travail
Les conséquences d’une mesure homogène
62 Le principal enseignement que l’on peut tirer de la démarche privilégiée jusqu’ici est qu’après correction des différences de concepts, le choix d’une mesure homogène, basée sur une source et une méthode aussi proches que possible, a beaucoup plus d’impact sur la comparaison des niveaux que sur les évolutions de durée du travail, à l’exception du Royaume-Uni et des États-Unis.
63 Le tableau 6 propose une comparaison de différentes estimations de durée annuelle effective [26] ainsi qu’une évaluation de la productivité horaire macroéconomique du travail sur les quinze dernières années. Mesurée uniquement sur la base du volume d’heures des salariés, elle doit être interprétée avec réserve : l’objectif est ici avant tout de mettre en avant l’impact de choix méthodologiques différents sur la mesure du volume de travail.
Durée annuelle effective du travail par personne en niveau et en évolution et productivité horaire (emploi salarié)
Durée annuelle effective du travail par personne en niveau et en évolution et productivité horaire (emploi salarié)
64 Il en ressort globalement que dans les pays où les estimations des comptes nationaux ou celles publiées par le secrétariat de l’OCDE se basent sur l’exploitation d’enquêtes établissements ou sur des sources conventionnelles (États-Unis, Japon, France, Allemagne), l’utilisation de l’EFT conduit à relever de plus de 4 % le niveau de durée effective. Ce n’est que partiellement le cas pour les États-Unis, où la durée estimée par l’OCDE est assez proche de celle que l’on peut obtenir à partir de l’enquête sur les forces de travail, mais cela pourrait être imputable à un artefact statistique [27].
65 Sans modifier fondamentalement les hiérarchies entre pays, l’utilisation des EFT conduit ainsi à réviser dans certains cas de manière assez nette les écarts entre pays. Le Japon se dégage ainsi par une durée très élevée, y compris vis-à-vis des États-Unis. Cela s’explique par le cumul d’une durée journalière et d’un nombre annuel de jours travaillés encore élevé, mais aussi par un très faible absentéisme.
66 Alors qu’à la fin des années 1970 la durée du travail des salariés américains était assez proche des pays européens, les États-Unis se dégagent nettement à la fin des années 1990 par une durée élevée. La part du temps partiel est élevée mais n’a quasiment pas bougé. La durée du travail des salariés autant à temps plein qu’à temps partiel a augmenté depuis le début des années 1980. Les pertes d’heures pour maladie et raisons techniques sont plus importantes que dans la plupart des pays européens, mais le nombre de jours annuels de travail est le plus élevé après le Japon. L’Espagne, qui combine une durée d’un temps plein élevée, un taux de temps partiel très bas et peu de jours de congés payés effectifs, se détache nettement des autres pays européens par une durée élevée du travail, même si les heures supplémentaires y sont encore peu fréquentes. La durée du travail est très proche en Italie et au Royaume-Uni lorsqu’elle est mesurée sur l’emploi principal. Les heures supplémentaires conjoncturelles sont plus fréquentes au Royaume-Uni qu’en Italie, mais les pertes d’heures pour maladie sont près de deux fois plus élevées au Royaume-Uni qu’en Italie. En revanche, la durée effective du travail des salariés est en Italie supérieure à celle du Royaume-Uni lorsqu’elle tient compte des activités multiples. Avec 10,4 % de salariés occupant plusieurs emplois, l’Italie est en effet le pays où l’écart entre le nombre de postes de travail et de personnes employées est le plus important (tableau 7) même si une fréquence relativement élevée d’activités multiples s’observe également aux États-Unis, aux Pays-Bas et au Japon [28].
Impact des activités multiples sur la mesure de l’emploi salarié
Impact des activités multiples sur la mesure de l’emploi salarié
67 La France se situe dans la moyenne des cinq autres pays européens, mais l’écart avec les pays européens à durée longue est plus faible lorsque la comparaison est faite sur la base des EFT. Enfin, l’Allemagne et les Pays-Bas sont dans le bas de la fourchette, mais la singularité du cas néerlandais ressort beaucoup plus. La durée du travail était déjà très faible aux Pays-Bas mesurée sur la base d’une durée contractuelle majorée des heures supplémentaires, elle l’est encore plus sur une base effective en raison de pertes d’heures massives pour cause de maladie.
Quel crédit accorder aux déclarations des individus ?
68 L’utilisation des EFT était fondée sur l’objectif de construire un indicateur synthétique de durée du travail basé sur des concepts et des définitions communs. L’un des risques majeurs associé à l’utilisation des EFT est cependant d’accorder un crédit trop important à une mesure que l’on sait par ailleurs biaisée.
69 Lorsque la durée du travail est calculée en tenant compte de l’ensemble des composantes de la durée du travail, les biais tendent dans certains cas à se compenser si bien que les divergences plus ou moins importantes entre les indicateurs de volumes d’heures travaillées des salariés à temps plein construits à partir des déclarations des entreprises ou des sources conventionnelles n’ont qu’un impact limité en Allemagne et en Italie.
70 Il en va en revanche différemment aux États-Unis et au Royaume-Uni, où la durée du travail mesurée par les enquêtes établissements est restée quasiment stable depuis le début des années 1980, alors qu’elle a progressé de plus de 3 % sur la base de l’EFT [29]. Privilégier, comme cela est généralement fait, la source établissements dans le cas américain et la source EFT dans le cas du Royaume-Uni peut donc introduire un biais non négligeable dans les comparaisons internationales macro-économiques de productivité depuis le début des années 1980, puisqu’elle conduit à traiter ces deux pays totalement différemment.
71 S’il apparaît en première analyse que la divergence constatée au Royaume-Uni résulterait plutôt d’une mauvaise perception des modifications structurelles de l’emploi par les enquêtes établissements, il en va différemment aux États-Unis, où l’augmentation de la durée déclarée a touché toutes les branches d’activité et toutes les catégories socioprofessionnelles [30], et où un certain nombre d’études empiriques ont mis en évidence une imprécision croissante de la durée reportée dans les EFT.
72 Bostrom et Robinson (1994) [31] constatent ainsi dans le cas des États-Unis une surestimation systématique de la durée hebdomadaire estimée et déclarée par rapport à la durée mesurée sur la base des carnets d’activité des enquêtes emplois du temps. La surestimation est de l’ordre de 12 % pour l’ensemble des personnes travaillant plus de 20 heures ; elle est supérieure pour les personnes dont la durée du travail est très élevée, tandis que les personnes dont la durée du travail est faible (moins de 20 heures) auraient plutôt tendance à sous-estimer leur durée du travail. Cette propension à surestimer la durée du travail aurait en outre progressé au cours des vingt dernières années. Bostrom et Robinson (1994) avancent un certain nombre de facteurs pouvant avoir affecté la capacité des répondants à évaluer correctement leur durée du travail. (multiplication des emplois dans les services sans horaire de travail fixe, flexibilisation croissante de la durée du travail, interpénétration croissante du travail domestique et du travail productif, etc.)
73 Il faut cependant interpréter ces résultats avec prudence, car la comparaison entre les EFT et les enquêtes emploi du temps peut être biaisée. Les enquêtes emplois du temps sont par exemple rarement effectuées sur la base de méthodologies communes au cours des années (Schor, 1991), et les carnets d’activité sont remplis pour une journée et non une semaine. Sur la base d’une enquête portant sur les heures de départ et d’arrivée au travail, Jacobs (1998) remet ainsi en cause les résultats tirés des enquêtes emploi du temps américaines et attribue les écarts à un artefact statistique de régression vers la moyenne. En outre, il montre que l’analyse des corrélations entre les facteurs socio-économiques, psychologiques et démographiques (type de travail, contrôle des horaires, rapport hiérarchique, rythmes imposés, âge situation familiale, niveau d’éducation) indiquerait que les erreurs de mesure de la durée des EFT sont largement aléatoires. Finalement, aucun élément ne permet aujourd’hui de rejeter a priori la pertinence d’une mesure du temps de travail fondée sur la déclaration de l’intéressé dans le cas américain [32].
Trente ans d’évolution de la durée du travail
74 Les évolutions de durée annuelle effective peuvent être résumées en quelques traits saillants. Le Japon a mis en œuvre une politique volontariste de réduction du temps de travail à la fin des années 1980 via une généralisation de la semaine de cinq jours et une augmentation des jours fériés. À la différence des années 1970, la réduction du nombre de jours ouvrables ne s’est pas traduite par une augmentation des heures supplémentaires. Cette évolution a peut être été favorisée par l’atonie prolongée de l’économie japonaise. Le temps partiel y serait encore peu répandu, en dépit des statistiques officielles, mais la part des emplois non réguliers, d’une faible durée du travail, a fortement progressé.
75 Les États-Unis ont connu des années 1960 au début des années 1980 un mouvement de réduction du temps de travail d’une ampleur beaucoup plus limitée que dans la plupart des pays européens. Fortes dans les années 1930, les revendications pour la réduction du temps de travail ont totalement été abandonnées dès les années 1950 par des syndicats soucieux d’accroître le volume de production national (Schor, 1991). Le mouvement de réduction du temps de travail s’est inversé depuis le début des années 1980 en parallèle avec une montée en régime des doubles emplois et une rupture dans les relations professionnelles. À la sortie de la récession du début des années 1980, les entreprises ont cherché à enrayer le mouvement de baisse du temps de travail, pour accroître la durée d’utilisation des équipements en augmentant le temps de travail. Concrètement, cela s’est traduit par une diminution des heures supplémentaires rémunérées, par la suppression de la prime payée en cas de travail le week-end, par des horaires plus souples, une réduction de l’absentéisme, un retour en arrière sur les fermetures de commerces le dimanche (Rosenberg 1992, Kirkland, 2000). À la différence d’autres pays, la réduction du temps de travail n’a pas été considérée comme une contrepartie à l’assouplissement des horaires. Aux États-Unis, l’essentiel de la progression du temps partiel s’est produite du début des années 1960 au milieu des années 1970.
76 Les Pays-Bas se sont engagés très tôt dans une réduction tous azimuts du temps de travail. La contribution de l’emploi à temps partiel aux créations nettes d’emploi était déjà importante dans les années 1970, alors qu’en même temps la durée du travail d’un temps plein a baissé à un rythme équivalent à celui de la France ou l’Allemagne du début des années 1970 à la fin des années 1990. Le niveau de la norme collective d’un temps plein est cependant encore supérieur à celui de l’Allemagne et le temps partiel n’est devenu une priorité collective que dans les années 1990 (Plantenga et Dur, 1998, Jean 2000). Le niveau de la durée légale était encore très élevée en Espagne au début des années 1980, de 44 heures, alors que la plupart des pays européens avaient atteint la norme de 40 heures dans les années 1970. Elle a connu deux baisses successives importantes et rapprochées (10 % entre la fin des années 1970 et le début des années 1980), mais reste encore largement supérieure à celle des autres pays européens. Le pourcentage d’ouvriers y est prédominant, le régime des heures supplémentaires était encore très rigide jusqu’en 1994, et la norme légale est prédominante. L’Espagne et l’Italie se distinguent par une fréquence encore faible du temps partiel. Mais dans ces deux pays, la part du temps partiel a fortement progressé dans les années 1990. La faible réduction de la durée du travail en Italie s’explique aussi par une baisse plus limitée que chez ses partenaires européens de la durée annuelle d’un temps plein, en particulier parce que la baisse massive du temps de travail dans les services non marchands a été compensée par une diminution des jours fériés après le premier choc pétrolier dans le secteur privé. La stabilité de la durée du travail au Royaume-Uni dans les années 1980 recèle une dualité croissance des durées individuelles du travail. En France et en Allemagne, la réduction de la durée du temps plein s’est opérée à un rythme équivalent. En revanche, les emplois de courte durée ont connu une expansion très importante dans les années 1990 en Allemagne.
Les différentes sources statistiques
77 Les enquêtes sur les forces de travail (EFT) auprès des ménages permettent d’obtenir une information complète pour l’ensemble de l’économie. Effectuées par sondage, elles en présentent également les limites. Seules à fournir des informations sur les heures supplémentaires non rémunérées, elles permettent également de mesurer la durée du travail sur des concepts proches pour tous les pays. Dans plusieurs pays, ces enquêtes font l’objet de redressements réguliers et peuvent dans ce cas être utilisées pour une mesure de l’emploi. En revanche, le champ de ces enquêtes n’est pas compatible avec celui de la production et la durée du travail est affectée de biais subjectifs.
78 Les efforts d’harmonisation internationale des EFT en font la source privilégiée pour ce qui est de l’objectif de comparabilité internationale. C’est particulièrement le cas en Europe, avec l’EFT communautaire lancée en 1973, qui prévoit une semaine de référence et un cahier des charges communs. Pour autant, l’harmonisation n’est pas totale. Les pays membres ont une certaine latitude pour intégrer l’EFT communautaire dans leurs enquêtes nationales, si bien que les séries reflètent les particularités des questionnaires et des définitions propres à chaque pays, comme par exemple pour la définition du temps partiel. Il est ainsi très difficile d’utiliser les séries de l’EFT communautaire dans le cas des Pays-Bas : l’enquête nationale ne pose plus de question sur la durée réellement effectuée depuis 1992 et l’imputation des données manquantes pose de nombreux problèmes.
79 La continuité temporelle des séries n’est pas non plus assurée, tant au niveau des enquêtes nationales que communautaire. Dans de nombreux pays, les questions relatives à la durée habituelle ont été introduites assez tardivement (1982 en France, 1984 en Italie, 1987 en Espagne). Même s’il est possible de reconstituer des séries de durée assimilables à des durées habituelles, des ruptures sont inévitables. La durée du travail n’a pas toujours porté sur l’emploi principal, la population couverte par l’enquête a dans certains pays varié au cours du temps, etc. Enfin, la structure des enquêtes ménages au Japon et aux États-Unis n’est pas strictement comparable à celles des pays européens. Le concept de durée habituelle n’a été véritablement introduit qu’en 1994 aux États-Unis dans l’enquête mensuelle, il est absent de l’enquête ménage japonaise mensuelle, la durée effective du travail est demandée pour le cumul des emplois dans les deux pays, alors qu’elle porte sur l’emploi principal dans l’EFT communautaire.
80 Les enquêtes auprès des établissements sont censées recueillir auprès des employeurs des réponses objectives et fiables sur l’emploi et la durée du travail. Les séries se rapportent à des emplois et non à des personnes occupées. En revanche, ces enquêtes portent sur un champ en général plus restreint que les EFT. Il s’agit souvent des salariés du secteur privé non agricole. Il est difficile de couvrir les petites structures car leur grande hétérogénéité exigerait un échantillon de taille trop importante.
81 Les sources administratives présentent l’avantage de la rapidité de leur mise en œuvre. Elles sont peu onéreuses et permettent de surveiller les tendances de court terme en effectuant des calages sur les autres sources. Elles sont précises et ne présentent pas d’erreur d’échantillonnage. En revanche, elles sont non exhaustives et leur hétérogénéité internationale fragilise les comparaisons internationales.
82 L’un des principaux objectifs des enquêtes emploi du temps auprès des ménages est de fournir une mesure des activité productives non marchandes, avec comme finalité leur intégration dans les comptes satellites aux comptes nationaux. On considère en règle générale que le type de questionnaire de ces enquêtes, qui détaille l’enchaînement des activités d’une journée, s’avère à plusieurs égards meilleur que les autres sources pour mesurer la durée effective du travail. Vis-à-vis des enquêtes établissements, ces enquêtes ont l’avantage de recueillir des réponses au niveau individuel.
Les différentes notions de durée du travail et leur articulation
83 Six principales définitions de durée du travail peuvent être distinguées. Les trois premières sont des durées collectives, les trois dernières des durées individuelles.
84 La durée conventionnelle ou légale est la durée collective du travail fixée par la loi ou par accords collectifs. La durée normale est fixée par la législation, par accords collectifs ou par sentences arbitrales. Lorsque la durée du travail n’est pas fixée par la législation, accords collectifs ou sentences arbitrales, cette expression désigne le nombre d’heures au-delà duquel tout travail effectué est rémunéré au taux des heures supplémentaires ou constitue une exception aux règles ou usages de l’établissement concernant les catégories de travailleurs considérées. La durée offerte, qui fait l’objet d’une définition par Eurostat, correspond aussi à une durée collective. Elle s’applique aux salariés à temps plein, dans la mesure où la durée des salariés à temps partiels est fixée de manière individuelle dans les contrats de travail. La durée offerte théorique correspond à l’horaire collectif affiché habituel. Lorsqu’elle est effective, la durée offerte tient compte des heures supplémentaires collectives, de la modulation et du chômage partiel, mais ne tient pas comptes des éléments individuels affectant la durée du travail, comme les heures supplémentaires non collectives.
85 La durée effective est une durée qui prend l’individu pour référence. Elle a été définie par la 10e Conférence internationale des statisticiens du travail et cherche à mesurer le temps passé à la production proprement dite, en incluant les heures supplémentaires, les temps de pause ou d’arrêts de machine. Elle exclut les heures rémunérées mais non effectuées comme les congés annuels, les absences pour maladie et les jours fériés, les pauses repas et les heures consacrées aux trajets entre le domicile et le lieu de travail. Elle est utilisée dans les EFT et concerne dans ce cas une semaine d’observation appelée semaine de référence. La durée habituelle, fondée elle aussi sur l’individu, diffère de la durée effective en ce sens qu’elle s’applique à une période sans événement exceptionnel plutôt qu’à une période de référence spécifique, comme l’est par exemple la semaine qui précède l’interview [33]. La durée habituelle hebdomadaire correspond au nombre d’heures travaillées durant cette semaine type. Cette notion est largement utilisée pour appréhender la durée du travail. Enfin, la durée rémunérée inclut les heures de travail rémunérées mais non effectuées comme les congés payés, congés maladie, etc. Elle provient en règle générale des enquêtes établissements.
86 Il existe en principe des liens identifiables entre les différentes définitions. Les heures habituelles des EFT sont souvent assimilées à des heures normales majorées des heures supplémentaires habituelles (rémunérées ou non). Les heures rémunérées corrigées des absences rémunérées s’approchent d’une durée réellement effectuée, mais ne captent pas les heures supplémentaires non rémunérées. La durée offerte théorique diffère d’une durée conventionnelle ou légale car elle intègre des heures supplémentaires structurelles. La durée réellement effectuée prend en compte l’intégralité des motifs de variation autour de la durée normale, et la durée offerte effective uniquement les motifs collectifs. En pratique, au-delà des différences dues à la nature des sources, de nombreux facteurs fragilisent cependant les comparaisons. Le lien entre une durée normale et une durée rémunérée ou habituelle dépend du degré d’application de la norme, du développement des contrats atypiques et de la période prise en référence pour l’évaluation de la durée du travail. Dans certains secteurs, des durées du travail supérieures à la norme conventionnelle sont considérées comme équivalentes à la durée normale pour tenir compte des périodes d’inactivité des salariés, si bien qu’il serait par exemple erroné d’interpréter certaines durées habituelles longues, par exemple dans les transports, comme la preuve d’un volant important d’heures supplémentaires. Les nombreux régimes d’équivalence comme celui de la restauration et des transports en France incitent à articuler heures supplémentaires et durée habituelle avec prudence.
87 Le passage de la durée rémunérée à la durée réellement effectuée nécessite de connaître les heures supplémentaires non rémunérées, qui ne sont déclarées que dans les EFT, et très rarement identifiées séparément [34]. La durée habituelle est un concept qui dérive des EFT et ne se définit que par rapport à la conception que s’en font les répondants. Dans la plupart des pays, une seule question permet d’observer la durée habituelle, qui se décompose rarement entre durée contractuelle et heures supplémentaires régulières. Pour aller plus loin, rien ne conduit les personnes interrogées, du moins dans les questionnaires, à définir leur durée habituelle en fonction de leur durée contractuelle, même si les pics de réponses autour des durées légales ou conventionnelles amènent à penser qu’une part importante des personnes interrogées répondent de manière normative. Théo-riquement, la durée habituelle est donc indépendante de toute référence à la durée contractuelle, conventionnelle ou légale c’est-à-dire à toute norme collective. Les heures supplémentaires que le salarié effectue de manière régulière ne sont alors pas des heures supplémentaires qui se définissent par rapport à une norme mais elles s’intègrent dans une durée du travail qui diverge elle-même de la norme (contractuelle, conventionnelle ou légale).
Les méthodes d’estimation de la durée annuelle effective du travail
88 Deux grandes méthodes d’estimations de la durée du travail peuveunt être distinguées (Greenwood 2000).
89 La méthode directe consiste à estimer directement les heures de travail réellement effectuées à partir des enquêtes. Elle suppose une observation régulière de la durée du travail, si possible avec des enquêtes continues.
90 La méthode par composantes part d’une durée normale comme la durée habituelle ou conventionnelle et corrige cette durée pour tenir compte des facteurs de variation (congés, heures supplémentaires, chômage partiel….) afin d’aboutir à une durée réellement effectuée. Cette seconde démarche est plus adaptée dans les pays où la fréquence des enquêtes est faible. Elle conduit à mobiliser diverses sources.
Construction de l’indicateur synthétique de durée effective du travail des salariés
91 Le point de départ est la durée hebdomadaire des salariés à temps plein, corrigée dans un premier temps de l’impact du temps partiel à partir du taux de temps partiel et de la durée relative d’un temps partiel (éventuellement lissée) tirés directement de l’EFT communautaire. Une durée hebdomadaire effective de l’ensemble des salariés est ensuite calculée en tenant compte des principaux facteurs de variation déclarés la semaine de référence (absences partielles ou totales pour maladie, maternité, chômage technique, heures supplémentaires – autant que possible uniquement conjoncturelles). Cette durée hebdomadaire effective est enfin annualisée à partir d’informations spécifiques sur les congés et les jours fériés. Elle a été calculée pour l’emploi principal mais aussi tous emplois confondus lorsque cela était possible, pour mesurer l’impact de la multi activité.
92 Aux Pays-Bas, les limites de l’EFT nationale conduisent à privilégier les séries de durée annuelle rémunérée (corrigées des congés et jours fériés) de la comptabilité du marché du travail, mais les séries ont été majorées des heures supplémentaires non rémunérées sur la base des informations disponibles au Royaume-Uni. Pour les États-Unis et le Japon, les séries de durée effective hebdomadaire récoltées sur une base mensuelle ont été corrigées lors de l’annualisation pour tenir compte de la sous-estimation des jours fériés imputable à la position fixe de la semaine de référence (seuls cinq jours fériés sur huit sont perçus par l’EFT aux États-Unis, deux à trois jours sur quinze au Japon).
93 En Allemagne, les séries de temps partiel de l’EFT ont été corrigées pour tenir compte de la sous-estimation des emplois de courte durée.
94 La durée par personne tirée des EFT a été appliquée à l’emploi salarié issu des comptabilités nationales, préalablement converti en personnes dans le cas où seules des séries de postes de travail sont publiées (Japon, États-Unis, Royaume-Uni).
95 Enfin, pour faciliter la comparaison avec les séries publiées par l’OCDE ou les comptabilités nationales, ces dernières ont été systématiquement converties en heures par personne dans le cas où elles étaient initialement exprimées en heures par poste de travail.
La reconstitution de séries longues de durée habituelle annuelle des salariés à temps plein
96 En l’absence de questions sur la durée habituelle avant le début des années 1980, il n’est pas possible de construire sur longue période des séries de durée du travail basées uniquement sur les EFT, à l’exception des États-Unis. En principe, il est cependant possible de reconstituer des séries s’approchant d’une durée habituelle pour les antérieures sur la base des enquêtes nationales, ce qui n’a été fait ici que pour la France. Dans le cas du Japon, la durée utilisée ici est la durée effective des salariés qui ont travaillé à temps plein au cours de la semaine de référence (EFT). Si le niveau de la durée du travail est surestimé par rapport à une durée habituelle, son évolution devrait être assez proche, c’est du moins ce que l’on observe aux États-Unis sur des concepts identiques. Ailleurs, les séries ont été rétropolées sur la base des enquêtes établissements ou des sources conventionnelles. La stabilité de l’écart entre sources établissements et les séries de durée hebdomadaire effective de l’EFT communautaire que l’on constate dans les années 1970 en Italie, en France, en Allemagne et au Royaume-Uni, laisse penser qu’il n’en résulte qu’un biais limité pour ce qui est des évolutions. Les durées hebdomadaires conventionnelles ou normales ont été majorées le cas échéant des heures supplémentaires, pour tenir compte du fait que la durée habituelle intègre les heures supplémentaires habituelles.
Les différentes définitions du temps partiel
Les différentes définitions du temps partiel
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- Passet, O. et D. Jestaz, 1998 : Flexibilité et performances comparées des marchés du travail dans les pays de l’OCDE, Rapport IRES-CGC, décembre.
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- Robinson J.P. et G. Godbey, 1999 : Time for Life, the surprising Way Americans use their Time, Pennstate.
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- Rosenberg S., 1992 : « L’allongement du temps de travail aux États-Unis », Futuribles, n° 156-166, mai-juin
- Rouilleault H., 2001 : Réduction du temps de travail : les enseignements de l’observation, Commissariat Général du Plan.
- Rubery J., 1998 : « Working Time in UK », Transfer, European Review of Labour and Research, Vol 4, n° 4.
- Sakashita N., 2000 : Present State and Problems of measuring Hours of Work with Household Survey, contribution du Statistics Bureau Government of Japan à la 4e réunion du Groupe de Paris, 21-22 septembre.
- Schor J., 1991 : The overworked American : the unexpected Decline of Leisure, Basic Books.
- Statistics Netherlands, 1999 : Labour Accounts in Theory and in Practice, the dutch Experience.
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- Tuchszirer C. et C. Vincent, 1998 : « La politique contractuelle aux prises avec les 35 heures », Chronique internationale de l’IRES, n° 54, septembre.
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Notes
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[*]
Cet article se fonde sur une étude réalisée pour la DARES dans le cadre d’une convention passée entre la Fondation nationale des sciences politiques et le ministère de l’Emploi et de la Solidarité.
-
[1]
Qui sont incluses dans les comptes satellites de la comptabilité nationale : voir le Système européen des comptes (Eurostat 1996).
-
[2]
En particulier pour ce qui est des exploitations agricoles, de l’artisanat et du petit commerce (Guillemot 1996).
-
[3]
Enquête complémentaire durée du travail, 1995 INSEE.
-
[4]
Dans plusieurs cas, les améliorations ont été faites grâce à une confrontation systématique entre sources. Ce type de démarche relève de l’effort d’intégration des normes internationales réalisé dans le cadre de la « comptabilité du marché du travail », initié dans les années 1980 par les organismes statistiques nationaux et internationaux (Statistics Netherlands 1999, Hoffman 1997).
-
[5]
Selon la définition du BIT, une personne est dans l’emploi si elle a effectué au moins une heure de travail durant la semaine de référence.
-
[6]
C’est-à-dire que les semaines de référence, périodes sur lesquelles s’appuie le questionnaire, sont réparties sur toute l’année.
-
[7]
Dans les trois cas, des efforts sont en outre entrepris soit au niveau des sources établissements, soit directement au niveau de la comptabilité nationale, pour tenir compte de la tendance croissante à l’annualisation du temps de travail. Cela s’est traduit en France par l’introduction d’une nouvelle enquête ACEMO, en Allemagne par la prise en compte des comptes temps de travail à partir de 2000, aux Pays-Bas par une réforme récente de l’enquête établissements.
-
[8]
Une comparaison du même type avait déjà été réalisée pour les pays européens par Eurostat en 1995 (Eurostat 1995), mais s’était heurtée à de nombreuses critiques de la part des pays qui ne se reconnaissaient pas dans les données les concernant.
-
[9]
Il faut garder en tête que la restriction au champ des salariés conduit dans certains cas à éliminer une part importante des effectifs. En 1998, la part des non salariés dans l’emploi total était ainsi proche de 30 % en Italie, 18 % en Espagne et au Japon.
-
[10]
On renvoie pour un examen plus approfondi aux nombreuses références sur le sujet (Boulin, Cette et Taddei, 1992 ; Grubb et Wells, 1993 ; Roche, Fynes et Morrissey, 1996 ; Bosch, Meulders et Michon, 1997 ; CSERC, 1998 ; CEIES, 1999 ; IRES, 1998 ; OCDE, 1998 ; Passet et Jestaz, 1998 ; Anxo et O’Reilly, 2000 ; Rouilleault, 2001 ; entre autres).
-
[11]
Le gouvernement conservateur a levé les restrictions sur le travail de nuit féminin en 1986 (Sex Discrimation Act de 1986) et sur le travail des jeunes en 1989 (Employment Act 1989).
-
[12]
Un cadre qui effectue son travail à l’intérieur des horaires prévus sera ainsi moins rémunéré que celui qui dépassera la durée prévue pour faire le même travail et bénéficiera d’une bonification de 25 % pour ses heures supplémentaires (Araki, 1996).
-
[13]
On rappellera ici que la période considérée par cette étude s’arrête en 1998 et ne couvre pas le passage aux 35 heures en France.
-
[14]
L’extension en 1990 de l’enquête établissement aux petites entreprises ne s’est pas traduite par une augmentation notable de la durée du travail : la durée du travail est élevée dans les petites entreprises, mais cet effet est compensé par le fort volume d’heures supplémentaires des plus grandes unités.
-
[15]
Moins de la moitié des salariés des entreprises de plus de 30 salariés bénéficiaient en 1985 de deux jours de repos chaque semaine. En 1997, ce pourcentage était passé à 87 %.
-
[16]
En Italie, le rythme de baisse de la durée conventionnelle s’est imparfaitement répercuté sur la durée habituelle dans les années 1980, mais les séries de durée conventionnelle sont assez fragiles.
-
[17]
Une nouvelle question a été introduite en 1996 pour mieux capter les personnes absentes lors de la semaine de référence. La divergence ne paraît en revanche pas attribuable à la définition du temps partiel, d’autant que l’EFT tend à incorporer des durées de plus en plus faibles dans le temps plein depuis 1996.
-
[18]
Pour une analyse récente des caractéristiques du travail à temps partiel, voir Evans, Lippoldt et Marianna, 2000.
-
[19]
Pour une analyse du temps partiel au Japon, voir Houseman et Osawa, 1995.
-
[20]
L’utilisation d’un seuil d’heures est en outre délicate pour certaines professions dont la durée effective du travail est difficile à cerner au moyen des EFT. En Italie, par exemple, le choix d’un seuil de 30 heures conduit à doubler le taux de temps partiel en 1998 (14,8 % contre 7,6 %). Cela résulte essentiellement du fait que la durée habituelle déclarée des salariés à temps plein est très faible dans les services administrés, en particulier chez les enseignants.
-
[21]
En corrigeant l’EFT de l’occurrence des emplois de courte durée en Allemagne.
-
[22]
Aux États-Unis, une mesure du taux de temps partiel sur des critères équivalents à ceux de l’EFT du Japon conduit à surestimer d’un tiers les effectifs à temps partiel par rapport à une mesure basée sur la durée habituelle.
-
[23]
Reflétée ici uniquement par les disparités entre pays des niveaux de durée habituelle du travail des salariés à temps partiel (tableau 1).
-
[24]
En Italie, l’impact du temps partiel se fait surtout sentir à partir du début des années 1990.
-
[25]
L’interprétation du cas japonais reste cependant délicate.
-
[26]
Pour en faciliter l’interprétation, les séries de durée annuelle effective ont toutes été converties — le cas échéant — en heures par personnes, afin d’éliminer les écarts dus aux différences de concepts.
-
[27]
L’utilisation des effectifs salariés de l’enquête sur les forces de travail pour convertir le volume d’heures travaillées par emploi tiré des comptes nationaux en volume d’heures travaillées par personne peut conduire à surestimer la durée du travail car la croissance de l’emploi est sous-estimée dans l’enquête sur les forces de travail depuis le début des années 1990 en raison de l’absence de redressement récent sur le dernier recensement (Juhn et Potter, 1999 par exemple).
-
[28]
Dans tous les pays à l’exception du Japon, la propension des salariés à cumuler plusieurs emplois s’est en outre accrue au cours des quinze dernières années.
-
[29]
Le cas du Royaume-Uni illustre également l’impact que peut avoir la mesure des congés payés sur les évolutions de la durée effective du travail. Les divergences reportées dans le tableau 6 proviennent en effet essentiellement d’hypothèses alternatives sur le nombre de jours de congés payés. Convertir sur une base annuelle la durée effective de la semaine de référence pour les années antérieures à 1992, comme cela est fait dans les séries de l’OCDE, repose implicitement sur l’hypothèse que les congés payés n’ont pas évolué dans les années 1980. Nos estimations incorporent en revanche une augmentation des congés payés au début des années 1980 (Blyton, 1985).
-
[30]
Abraham, Spletzer et Stewart (1998) montrent en outre que l’écart ne serait pas imputable à des différences de couverture statistique. La durée hebdomadaire des salariés non couverts par l’enquête établissement a certes progressé plus rapidement que celles des salariés à la production lorsqu’elle est mesurée par l’enquête sur les forces de travail, mais ces différences sont insuffisantes pour expliquer la divergence croissante entre l’enquête établissement et l’EFT.
-
[31]
On peut également se référer à Robinson et Godbay, 1999.
-
[32]
En France, l’exploitation des résultats de l’enquête emploi du temps réalisée par l’INSEE de mars 1998 à février 1999 (Chenu 2001) débouche globalement sur une moindre surestimation (de l’ordre de 1 à 3 % selon les mesures) de la durée du travail tous salariés confondus. Surtout, elle fait ressortir que les écarts entre les diverses mesures de la durée du travail peuvent s’interpréter non pas comme « la manifestation d’une tendance des personnes interviewées à surestimer le caractère extrême des situations de sous-emploi ou de sur-emploi, mais plutôt comme la conséquence du flou qui entoure, pour beaucoup de professions, la définition même de l’activité ». Elle met également en évidence un lien entre la sur ou sous-estimation du travail et le mode de description du travail.
-
[33]
Cas de l’enquête emploi conduite par l’INSEE en France.
-
[34]
à l’exception, pour les pays couverts ici, du Royaume-Uni.