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Article de revue

Pollution, décès prématuré et compensation

Pages 97 à 118

Notes

  • [*]
    Université Paris Est (ERUDITE), École d’économie de Paris et Institut universitaire de France. Correspondance : ENS, bâtiment B, bureau 009, 48 boulevard Jourdan, 75014 Paris. Courriel : gregory.ponthiere@ens.fr
  • [1]
    Sur les dimensions environnementales affectant la mortalité, voir Sartor [2002].
  • [2]
    Voir également Finkelstein et al. [2003].
  • [3]
    4,3 millions de décès sont liés à la pollution intérieure, et 3,7 millions de décès sont liés à la pollution extérieure. Un million de décès sont causés par une double exposition.
  • [4]
    Ce fait est confirmé par les nombreuses études quantifiant les gains ou pertes de bien-être associés à des variations de longévité. Voir notamment Usher [1973], [1980], et, plus récemment, Costa et Steckel [1997], Becker, Philipson et Soares [2005] et Fleurbaey et Gaulier [2009].
  • [5]
    Sur l’incompatibilité de ces deux principes, voir Fleurbaey et Maniquet [2004].
  • [6]
    Il s’agit de la fonction de survie : equation im200
    equation im201 et equation im202 varie entre equation im203 et 1 (PMAX).
  • [7]
    Vu que la probabilité de survie π(P) joue ici un rôle de taux d’escompte biologique, nous faisons abstraction des préférences temporelles pures.
  • [8]
    Vu que le travail est déjà source de désutilité à travers la pollution, nous faisons ici abstraction de la désutilité pure du travail.
  • [9]
    Notons que si l’existence d’un tel niveau de consommation neutre pour la continuation de l’existence semble plausible, la question empirique de l’estimation de ce niveau a été peu étudiée dans la littérature. Le plus souvent, comme chez Becker, Philipson et Soares [2005], la calibration, sur base d’estimations de la valeur d’une vie statistique, de la fonction d’utilité temporelle u(c) implique de facto un certain niveau pour equation im204.
  • [10]
    Notons que nos résultats ne seraient pas profondément affectés par l’introduction d’une désutilité pure du travail conduisant à une solution intérieure pour ℓ au laisser-faire.
  • [11]
    Notons que si l’on relâchait l’hypothèse de l’existence d’une consommation neutre non négative et que l’on supposait à la place u(c) > 0 pour tout c ≥ 0, alors cette seconde approche ne permettrait plus d’égaliser le niveau de bien-être des individus à vie longue et des individus à vie courte, ces derniers connaissant inévitablement une perte de bien-être par rapport à ceux qui vivent longtemps. Cependant, l’esprit de cette seconde approche serait conservé, car imposer un profil de consommation décroissant permet toujours de minimiser cette perte, même lorsque celle-ci ne peut pas être réduite à zéro.
  • [12]
    Cette conclusion prévaut évidemment dans le cas particulier où equation im205, c’est-à-dire lorsque toute pollution P strictement positive contribue à détériorer les chances de survie.
  • [13]
    L’intuition est que si equation im206 est élevé, polluer au-delà de equation im207 – et donc réduire la durée de vie des moins bien lotis – ne permet pas d’améliorer le sort de ceux-ci.
  • [14]
    Dans l’hypothèse extrême où u(c) > 0 ∀c ≥ 0, on donnerait, sous la seconde approche, 0 aux survivants, de sorte que l’attractivité de chaque approche dépendrait de savoir si : equation im208
    La seconde approche (membre de droite) est donc ici plus attractive que dans l’hypothèse où il existe un niveau non négatif de consommation neutre pour la continuation de l’existence.
  • [15]
    Notons que dans le monde réel, où les polluants sont multiples, une telle identification est requise pour chaque polluant séparément. En effet, du point de vue des conditions de survie, le fait de dépasser le seuil pour un seul des polluants suffit à générer des décès prématurés, indépendamment des niveaux des autres polluants.
  • [16]
    Comme cela est discuté par Fleurbaey, Leroux et Ponthière [2014], les profils de loisir devraient aussi être modifiés, avec davantage de loisir aux âges jeunes. Par ailleurs, et toujours dans l’optique de réduire les pertes de bien-être pour les personnes à vie courte, le départ à la retraite pourrait être reporté de quelques années (voir Fleurbaey et al. [2016]).

Introduction

1La pollution de l’environnement – pollution de l’air, des sols, de l’eau – constitue un facteur de mortalité de premier plan [1]. Dans une étude longitudinale portant sur six villes américaines durant la période 1974-1998, Laden et al. [2006] ont estimé qu’une hausse de la concentration de particules fines PM2.5 de 10 mg/m3 cause une surmortalité de 15 % [2]. Dans une récente étude, l’Organisation mondiale de la santé (WHO [2014]) estime qu’en 2012, environ 7 millions de personnes sont décédées à cause d’une pollution de l’air [3].

2La surmortalité causée par la pollution de l’environnement est à l’origine d’inégalités dans les durées de vie. Étant donné que la longévité constitue une dimension essentielle du bien-être humain – nécessaire afin d’avoir une « vie bonne », quelle que soit la conception de la « vie bonne » à laquelle on adhère – mourir prématurément constitue une cause de déprivation majeure (Sen [1998]) [4]. Les inégalités de longévité liées à la pollution génèrent donc des fortes inégalités de bien-être entre les personnes.

3Est-ce que les inégalités de bien-être causées par une surmortalité liée à la pollution doivent être compensées ? En d’autres termes, faut-il compenser les victimes de la pollution, définies comme les personnes décédées prématurément à cause de la pollution ? Pour répondre à cette question, il est utile de revenir à la théorie de la justice élaborée par Fleurbaey [2008]. Cette théorie repose sur deux principes. D’une part, le principe de compensation, selon lequel des inégalités de bien-être causées par des facteurs sur lesquels les individus n’ont pas d’influence (c’est-à-dire des circonstances) doivent être abolies. D’autre part, le principe de récompense libérale, selon lequel des inégalités de bien-être causées par des facteurs sur lesquels les individus ont une influence doivent être laissées telles quelles, ces individus étant tenus pour responsables de leur sort [5].

4Appliquée à la surmortalité des victimes de la pollution, cette théorie de la justice conduit à deux observations. Tout d’abord, si l’on se place au niveau social, la pollution de l’environnement ne constitue pas une circonstance. Au contraire, cette pollution est une production jointe à la production de biens. Cependant, les victimes de la pollution ne peuvent pas pour autant être considérées comme responsables de leur sort. En effet, la mortalité liée à la pollution frappe les individus d’une manière arbitraire. Seules les personnes les plus vulnérables connaissent une surmortalité induite par cette pollution, tandis que les autres personnes, moins vulnérables, profitent de leur consommation de biens sans subir les dommages liés à la pollution (ou en subissant des dommages moindres). Par conséquent, si l’on applique le principe de compensation, les pouvoirs publics devraient chercher à réduire les écarts de bien-être associés à cette surmortalité, car celle-ci résulte, au niveau individuel, de circonstances sur lesquelles l’individu ne peut pas agir.

5L’objectif de cette étude est d’analyser la compensation des victimes de la pollution. Comme cela a été discuté antérieurement (Fleurbaey et Ponthière [2013] ; Fleurbaey, Leroux et Ponthière [2014]), la compensation des personnes disparues prématurément semble, à première vue, impossible. Ex ante, il est difficile d’identifier les personnes qui connaîtront un décès prématuré, tandis qu’ex post (une fois la durée de vie révélée), il est trop tard pour les compenser. Malgré ces difficultés, ces travaux ont montré qu’il était possible de minimiser les écarts de bien-être entre les individus à vie courte et à vie longue. À cette fin, l’optimum égalitarien ex post implique des profils de consommation décroissants avec l’âge, voire un report de l’âge de départ à la retraite (Fleurbaey et al. [2016]).

6La modification des profils de consommation peut donc permettre une réduction des inégalités de bien-être entre les personnes qui vivent longtemps et les personnes qui vivent moins longtemps. Notons toutefois que, dans le contexte qui nous intéresse, les pouvoirs publics disposent d’une autre stratégie pour réduire ces inégalités : modifier le niveau de la pollution. En effet, si l’on se place au niveau social, la pollution ne constitue pas une circonstance. Par conséquent, il existe, dans une économie où la production génère de la pollution – et, par là, de la surmortalité – deux manières de réduire les inégalités de bien-être sur la vie. D’une part, ces inégalités peuvent être réduites en modifiant la forme des profils de consommation, sans réduire le niveau de la production et de la pollution ; d’autre part, ces inégalités peuvent également être réduites en diminuant le niveau de la production et de la pollution, sans changer la forme des profils de consommation (seul le niveau de ces profils est alors affecté).

7La présente étude vise à étudier la compensation des victimes de la pollution dans un contexte où ces deux stratégies permettent une réduction des inégalités de bien-être. Pour ce faire, nous allons considérer une économie où la pollution, issue de l’activité de production, réduit la durée de vie de certaines personnes. Après avoir étudié le laisser-faire et l’optimum utilitariste, nous allons comparer ceux-ci à l’optimum égalitarien ex post, défini comme l’allocation maximisant le bien-être réalisé sur la vie de la personne la moins bien lotie dans la population. Nous identifierons les conditions sous lesquelles la stratégie visant à modifier les profils de consommation domine celle visant à modifier le niveau de la pollution.

8Anticipant nos résultats, nous montrons que lorsque le seuil de pollution au-dessus duquel une mortalité prématurée apparaît est élevé, l’optimum égalitarien ex post requiert une pollution égale à ce seuil, et donc inférieure à celle du laisser-faire et de l’optimum utilitariste. La réduction des inégalités de bien-être se fait alors par le moyen d’une diminution du niveau général de pollution. Par contre, lorsque le seuil au-dessus duquel une mortalité prématurée apparaît est faible, le niveau de pollution associé à l’optimum égalitarien ex post est égal à celui prévalant au laisser-faire, et supérieur à celui associé à l’optimum utilitariste. Dans ce second cas, la réduction des inégalités de bien-être est réalisée exclusivement par une modification de la forme des profils de consommation.

9Cette étude est organisée comme suit. La deuxième section présente le modèle. L’équilibre du laisser-faire est caractérisé dans la troisième section. L’optimum utilitariste est étudié dans la quatrième section, puis est comparé à l’optimum égalitarien ex post dans la cinquième section. La sixième section conclut.

Le modèle

10Nous étudions une économie dont la population est un continuum de taille unitaire. Les individus vivent soit deux périodes, soit une seule période. La durée de chaque période est normalisée à 1. Chaque individu travaille une fraction ℓ de la première période, et, en cas de survie, est retraité en seconde période. L’activité de production génère de la pollution. Cette pollution, au-delà d’un certain seuil, réduit les chances de survie.

11Nous supposons que la fonction de production prend la forme suivante :

12

equation im1

13où Y est l’output, A est un paramètre de productivité et ℓ est la quantité de travail (0 ≤ ℓ ≤ 1).

14La pollution P est proportionnelle à l’output :

15

equation im2

16où η > 0 reflète le caractère polluant du processus de production. Une interprétation simple de cette relation est de considérer qu’une production Y requiert une production d’énergie qui génère des émissions polluantes égales à ηY.

17La probabilité de survie en deuxième période dépend du niveau de la pollution, sur base de la fonction de survie suivante :

18

equation im3

19Nous supposons que π(P) > 0 ∀P ≥ 0. L’impact de la pollution sur les chances de survie dépend du niveau de la pollution. En dessous d’un certain seuil, equation im4, la pollution n’a pas d’impact sur les chances de survie, et π = 1. Par contre, au-delà de equation im5, la pollution réduit les chances de survie :

20

equation im6

21En ce qui concerne les dérivées de π(P), nous supposons :

22

equation im7

23Vu que P = ηAℓ, un niveau particulier de ℓ est associé au seuil de pollution equation im8. Ce niveau, dénoté par equation im9, est tel que equation im10. Nous avons donc equation im11. Le seuil de travail au-delà duquel la pollution associée est une cause de mortalité est croissant avec equation im12, et décroissant avec η et A. Vu que ℓ prend 1 comme valeur maximale, la pollution maximale est égale à PMAX = ηA, conduisant à la plus petite probabilité de survie, égale à equation im13. La figure 1 illustre une fonction de survie satisfaisant nos hypothèses [6].

Figure 1

La fonction de survie π(P)

Figure 1

La fonction de survie π(P)

24Les individus ont des préférences qui satisfont l’hypothèse d’utilité attendue, et qui sont additives à travers le temps [7]. L’utilité de la mort étant normalisée à 0, la fonction d’utilité prend la forme [8] :

25

equation im15

26c est la consommation de première période, d est la consommation de seconde période. Nous supposons uʹ(c) > 0, uʺ(c) < 0 ainsi que limc→0uʹ(c) = +∞ et limc→+∞uʹ(c) = 0. Nous supposons qu’il existe un seuil de consommation equation im16 rendant l’individu indifférent entre, d’une part, la période de vie avec equation im17 et, d’autre part, la mort (voir Becker, Philipson et Soares [2005]). equation im18 satisfait equation im19.

27Supposer qu’il existe un niveau de consommation non négatif neutre pour la continuation de l’existence peut, à première vue, apparaître comme une hypothèse très forte. Cependant, supposer, au contraire, qu’il n’existe pas de niveau de consommation equation im20 tel que equation im21 constituerait une hypothèse encore plus forte. En effet, sous cette hypothèse alternative, deux cas pourraient alors se présenter : soit être en vie avec n’importe quel niveau de consommation – même 0 – serait toujours considéré comme strictement mieux que d’être mort (c’est le cas où u(c) > 0 ∀c ≥ 0) ; soit être en vie avec n’importe quel niveau de consommation – même très élevé – serait toujours considéré comme strictement moins bien que d’être mort (c’est le cas où u(c) < 0 ∀c ≥ 0). Ces deux cas étant peu plausibles, nous allons supposer qu’il existe un niveau de consommation non négatif neutre pour la continuation de l’existence equation im22, c’est-à-dire tel que equation im23[9].

28Notons que la fonction d’utilité est telle que la pollution n’affecte le bien-être sur la vie qu’à travers une détérioration des conditions de survie, et pas autrement. Il s’agit là d’une simplification non négligeable : dans la réalité, un environnement pollué est aussi une source de réduction du bien-être, indépendamment de ses effets sur les chances de survie. Nous allons néanmoins nous en tenir à cette formulation simplifiée, car notre propos porte sur la surmortalité induite par la pollution, plus que sur les dommages moindres associés à celle-ci. De plus, l’ajout d’une désutilité pure de la pollution compliquerait notre analyse sans modifier fondamentalement nos résultats.

Le laisser-faire

29Nous supposons, au laisser-faire, que le travail est rémunéré à sa productivité marginale, et qu’il existe un marché d’annuités parfait, donnant un rendement actuariellement juste. Dès lors, le taux de rendement brut sur l’épargne, dénoté par equation im24, est :

30

equation im25

31où R est égal à 1 plus le taux d’intérêt. Afin de simplifier l’exposition, nous supposerons ici que R = 1.

32Au laisser-faire, les individus choisissent une quantité de travail ℓ et une épargne s de manière à maximiser leur bien-être attendu sur la vie, tout en satisfaisant leurs contraintes budgétaires de première et seconde périodes :

33

equation im26

34Bien que les choix de travail affectent la taille de l’output et, par là, le niveau de la pollution et de l’espérance de vie 1 + π(P), nous allons ici supposer que les individus sont myopes et ne voient pas l’impact de leurs décisions de production sur les conditions de survie prévalant dans l’économie. En d’autres termes, les individus prennent la probabilité de survie π(P) comme donnée equation im27, alors que celle-ci dépend de leur propre mode de vie.

35Le problème des individus myopes au laisser-faire s’écrit :

36

equation im28

37La condition de premier ordre pour une épargne optimale est :

38

equation im29

39Il est donc ici optimal de lisser la consommation sur le cycle de vie (c = d).

40En ce qui concerne le choix de la quantité de travail, la condition de premier ordre est, de par la myopie des agents :

41

equation im30

42Vu que equation im31 pour tout c ≥ 0, nous avons uʹ(d) > 0, de sorte que ces deux conditions de premier ordre ne peuvent pas être satisfaites ensemble. Comme les individus ne voient pas l’effet néfaste de la production sur leurs chances de survie, le gain marginal d’utilité associé à une quantité de travail légèrement supérieure est toujours perçu comme plus grand que la perte marginale d’utilité associée à cette hausse du travail. Les individus choisissent donc une solution de coin, qui est la quantité maximale de travail ℓ = 1 [10]. Il s’ensuit que la probabilité de survie prend son niveau minimum : equation im32.

43Proposition 1. Au laisser-faire, nous avons :

44

equation im33

45Preuve. À partir de la condition de premier ordre pour l’épargne, nous avons c = d. Étant donné les contraintes budgétaires c = Aℓ – s et equation im34, la contrainte intertemporelle Aℓ = c + πd est égale à Aℓ c(1 + π). Vu que ℓ = 1, nous avons equation im35 et equation im36.

46Étant donné que πLF < 1, certains individus disparaissent avant d’avoir atteint l’âge de la retraite. Ces disparitions prématurées conduisent, en général, à des inégalités de bien-être réalisé sur la vie. En effet, au laisser-faire, le bien-être réalisé d’un individu malchanceux à vie courte est égal à : equation im37, tandis que celui d’un individu chanceux à vie longue est égal à : equation im38. Il s’ensuit que l’individu à vie courte est pénalisé au laisser-faire lorsque :

47

equation im39

48Cette condition est très plausible dans une économie où la productivité A est suffisamment élevée. Dans le reste de l’article, nous supposerons que equation im40, de sorte qu’au laisser-faire les individus décédés prématurément sont moins bien lotis que les individus profitant de leur retraite.

L’optimum utilitariste

49Le planificateur social utilitariste choisit les niveaux d’épargne et de travail qui maximisent le bien-être social, défini comme la somme des utilités individuelles. Contrairement aux individus, le planificateur utilitariste ne souffre pas de myopie et prend pleinement en compte l’effet de la production sur la pollution et sur les conditions de survie.

50Le problème du planificateur social utilitariste s’écrit :

51

equation im41

52Les conditions de premier ordre pour les consommations impliquent :

53

equation im42

54Comme au laisser-faire, le lissage de la consommation sur le cycle de vie est optimal. Nous obtenons donc, en utilisant la contrainte budgétaire intertemporelle Aℓ = c + πd, que equation im43.

55La condition de premier ordre pour le travail est :

56

equation im44

57Cette condition peut être réécrite comme :

58

equation im45

59L’étude de cette condition donne les résultats suivants.

60Proposition 2. À l’optimum utilitariste,

61• Si equation im46 l’optimum utilitariste est unique et nous avons :

62

equation im47

63• Si equation im48 l’optimum utilitariste est unique et nous avons :

64

equation im49

65U satisfait equation im50.

66Preuve.

67• Existence de l’optimum utilitariste.

68En remplaçant pour equation im51, la condition de premier ordre pour ℓ devient :

69

equation im52

70Cette condition peut être réécrite comme :

71

equation im53

72Lorsque ℓ tend vers 0, le membre de gauche tend vers equation im54, tandis que le membre de droite tend vers –η0[u(0)] = 0. Lorsque ℓ tend vers equation im55 par le bas, le membre de gauche de la condition tend vers equation im56, tandis que le membre de droite tend vers equation im57. En fait, comme equation im58, le membre de gauche equation im59 est toujours supérieur au membre de droite, de sorte que le ℓ optimal n’est pas compris dans l’intervalle equation im60.

73Lorsque ℓ tend vers equation im61 par le haut, le membre de gauche de la condition tend vers equation im62, tandis que le membre de droite tend vers equation im63. Le membre de gauche est supérieur au membre de droite, car equation im64. Il est donc socialement optimal d’avoir equation im65. Lorsque ℓ tend vers 1, le membre de gauche de la condition tend vers equation im66, tandis que le membre de droite tend vers equation im67. Dès lors, plusieurs cas peuvent se produire :

  • si equation im68, le ℓ optimal est égal à 1 ;
  • si equation im69, le ℓ optimal appartient à l’intervalle equation im70. En effet, le membre de gauche excède le membre de droite pour ℓ proche de equation im71, mais est inférieur au membre de droite pour ℓ = 1, de sorte que, par continuité, il existe un ℓ optimal intérieur satisfaisant :

74

equation im72

75Une fois ℓ connu, il est possible de dériver equation im73.

76Si equation im74, on a equation im75.

77Si equation im76 on a equation im77

78avec ℓ satisfaisant

79

equation im78

80• Unicité de l’optimum utilitariste.

81L’unicité prévaut lorsque equation im79. En effet, dans ce cas-là, la quantité de travail maximale est optimale du point de vue utilitariste, et on a donc une solution de coin ℓ = 1. Pour un niveau donné de ℓ, on obtient les consommations à partir de equation im80, et on a donc equation im81 L’optimum utilitariste est alors unique.

82Dans le cas où equation im82, l’unicité de l’optimum utilitariste (qui est ici un optimum intérieur) peut être étudiée en repartant de la condition de premier ordre pour un travail optimal. On a :

83

equation im83

84Le membre de gauche de cette expression est strictement décroissant en ℓ. Par la condition d’existence d’un optimum intérieur, on sait que quand ℓ = 1, on a :

85

equation im84

86de sorte que le membre de droite de la condition ci-dessus est plus grand que le membre de gauche. Dès lors, si on revient à l’expression :

87

equation im85

88étant donné que le membre de gauche equation im86 est strictement décroissant avec ℓ, et qu’en ℓ = 1 le membre de droite est plus grand que le membre de gauche, une condition suffisante pour l’unicité de l’optimum utilitariste intérieur est que le membre de droite soit strictement monotone croissant dans ℓ. La dérivée du membre de droite par rapport à ℓ est :

89

equation im87

90Étant donné que l’on est à un optimum intérieur, on a nécessairement equation im88. Dès lors, de par la concavité de equation im89, on sait que le premier terme est nécessairement positif. Le second terme peut être simplifié comme suit :

91

equation im90

92Vu que equation im91, ce terme est strictement positif. Par conséquent, equation im92 est strictement monotone croissant dans ℓ.

93Dès lors, la condition suffisante pour l’unicité de l’optimum utilitariste intérieur est nécessairement vérifiée. Nous pouvons donc dire que lorsqu’il existe un optimum utilitariste intérieur, celui-ci est nécessairement unique.

94La condition de la proposition 2 peut être écrite comme equation im93, de sorte que la structure de l’optimum utilitariste dépend de la forme précise des fonctions equation im94 et equation im95. Notons également que, dans les économies pauvres, la productivité A est faible, de sorte que equation im96 est très élevé et equation im97 est faible. Il s’ensuit que le premier cas – où l’optimum utilitariste coïncide avec le laisser-faire – est ici davantage probable. Par contre, dans les économies avancées, où A est élevé, equation im98 est davantage faible et equation im99 est plus élevé, de sorte que l’optimum utilitariste est davantage susceptible d’appartenir au second cas.

95Sur base des propositions 1 et 2, la comparaison avec le laisser-faire est immédiate. Comme le montre la proposition 3, l’optimum utilitariste coïncide avec le laisser-faire lorsque :

96

equation im100

97par contre, il est associé à des consommations plus petites, à une production et une pollution moindres, et à une espérance de vie plus élevée qu’au laisser-faire lorsque :

98

equation im101

99Proposition 3. Comparons le laisser-faire et l’optimum utilitariste.

100• Si equation im102, nous avons :

101

equation im103

102• Si equation im104, nous avons :

103

equation im105

104

equation im106

105Preuve. La preuve repose sur la comparaison des propositions 1 et 2.

106Notons cependant que, même si l’optimum utilitariste est, sous certaines conditions, associé à une mortalité moindre qu’au laisser-faire, il n’en demeure pas moins que la pollution conduit, même à l’optimum utilitariste, à des décès prématurés. Il en résulte un écart de bien-être réalisé entre les individus chanceux à vie longue et les individus malchanceux à vie courte.

107Lorsque equation im107, cet écart est positif si et seulement si :

108

equation im108

109Cette condition est identique à celle prévalant au laisser-faire.

110Lorsque equation im109, cet écart est positif si et seulement si :

111

equation im110

112Les inégalités de bien-être réalisé sont ici réduites par rapport au laisser-faire, car la consommation en seconde période est plus faible qu’au laisser-faire, de par une production moindre et une plus grande proportion de retraités.

L’optimum égalitarien ex post

113Au laisser-faire comme à l’optimum utilitariste, certains individus décèdent avant d’avoir atteint la seconde période de vie. Ces décès précoces sont causés par un niveau de pollution excédant le seuil equation im111. Notons que si tous les jeunes adultes contribuent ici également au processus de pollution, seuls certains d’entre eux sont victimes de la pollution ainsi générée. Il en résulte des inégalités de bien-être réalisé sur la vie plus ou moins importantes.

114Ces inégalités prévalant ex post sont inacceptables : comment justifier que, parmi des individus égaux ex ante, certains d’entre eux – ceux qui ont une vie courte – sont fortement désavantagés par rapport aux autres ? La responsabilité de chacun est engagée – chacun contribue ici au processus de pollution, y compris ceux qui décèdent prématurément – mais l’inégalité qui en résulte en termes de bien-être ex post n’est pas juste. Face à une situation où des individus égaux ex ante se retrouvent ex post avec des niveaux de bien-être réalisé très différents, un planificateur social peut estimer que ces écarts de bien-être relèvent de l’arbitraire de la nature et va chercher à minimiser ceux-ci.

115Le problème du planificateur égalitarien ex post consiste à choisir les niveaux de production et de consommation de manière à maximiser le niveau de bien-être sur la vie des personnes les moins bien loties. Si l’on considère une économie où π < 1, le problème est simple, car les individus les moins bien lotis sont généralement ceux qui bénéficient d’une vie courte. Le planificateur peut donc maximiser leur bien-être en transférant les ressources vers les âges jeunes, de manière à compenser ceux qui disparaissent plus tôt (voir Fleurbaey, Leroux et Ponthière [2014]).

116Cependant, dans le présent contexte, la proportion de survivants dépend du niveau de pollution, qui est choisi par le planificateur. Le niveau de bien-être minimum dans l’économie considérée prend donc la forme suivante :

117

equation im112

118Il existe donc, dans le présent contexte, deux manières distinctes de maximiser le bien-être des individus les moins bien lotis. Une première manière consiste à produire de façon à ce que la pollution soit inférieure ou égale au seuil equation im113, ce qui revient à travailler une quantité equation im114. Dans ce cas, tous les individus bénéficient d’une vie longue (π = 1). Une seconde manière consiste à produire bien plus equation im115, générant ainsi une pollution supérieure au seuil equation im116, et à transférer une grande partie des ressources produites vers les âges jeunes, de façon à compenser ceux qui auront, du fait de cette pollution, une vie plus courte. La question est donc de savoir dans quel cas – equation im117 ou equation im118 – les personnes les moins bien loties ont le niveau de bien-être réalisé le plus élevé.

119Considérons le premier cas, où equation im119. Dans ce cas, tous les membres de la population bénéficient de la même durée de vie. Le niveau de bien-être de tous les individus est égal à u(c) + u(d). Dès lors, le problème du planificateur est :

120

equation im120

121Vu que le Lagrangien associé est croissant en ℓ pour des valeurs de equation im121, la solution de ce problème est donnée par :

122

equation im122

123Il s’ensuit que le bien-être maximum des individus les moins bien lotis est ici égal à :

124

equation im123

125Ce niveau de bien-être est apprécié par tous les membres de la population, puisque tous les individus ont ici exactement la même vie (même durée et même profil de consommation).

126Considérons le second cas, où equation im124. Dans ce cas, la population se divise ex post en deux groupes. D’une part, des individus qui vivent une seule période et dont le bien-être est u(c). D’autre part, des individus qui vivent deux périodes et dont le bien-être est u(c) + u(d). Le problème du planificateur est donc :

127

equation im125

128La fonction objectif est ici non différentiable. Mais ce problème peut être réécrit sous une forme plus appropriée. Pour ce faire, notons que la condition u(d) = 0 est nécessaire et suffisante pour égaliser le niveau de bien-être réalisé des membres des deux groupes. Cette condition équivaut à equation im126. Dès lors, sous l’hypothèse que l’économie est suffisamment productive equation im127, le problème peut être réécrit comme un problème de maximisation de la consommation de première période c sous la contrainte de ressources, sous la contrainte equation im128 et sous la contrainte égalitarienne equation im129, qui assure que les individus à vie longue ne sont ni mieux ni moins bien lotis que les individus à vie courte. Étant donné que equation im130 et que equation im131, le problème peut s’écrire comme :

129

equation im132

130Vu que, pour equation im133, nous avons equation im134, il s’ensuit que la fonction objectif est croissante en ℓ pour des valeurs de equation im135. Par conséquent, l’optimum égalitarien ex post est le suivant :

131

equation im136

132Cet optimum inclut, comme au laisser-faire, ℓ = 1, et conduit à la même mortalité qu’au laisser-faire equation im137. Mais il est très différent du laisser-faire, au sens où le profil de consommation est ici décroissant avec l’âge et non plus plat comme au laisser-faire. Le bien-être des moins bien lotis est ici égal à :

133

equation im138

134Ce niveau de bien-être est également celui dont bénéficient les individus qui vivent longtemps, car ceux-ci ne profitent, par construction, que d’une utilité additionnelle equation im139 en seconde période. Par conséquent, sous cette seconde option, des inégalités de durée de vie prévalent, mais le profil de consommation est tel que les individus sont indifférents entre avoir une vie longue ou une vie courte [11].

135En définitive, l’option la plus favorable pour le planificateur égalitarien ex post dépend de savoir si :

136

equation im140

137Le choix est donc entre, d’une part, produire au seuil critique et répartir ces quelques ressources également à travers les âges, et, d’autre part, produire au-dessus du seuil critique et concentrer ces ressources aux jeunes âges, afin de neutraliser l’effet des décès prématurés. La proposition 4 identifie les conditions sous lesquelles les deux options sont les plus souhaitables.

138Proposition 4. Considérons l’optimum égalitarien ex post. Définissons

139

equation im141

140• Si equation im142, alors :

141

equation im143

142• Si equation im144, alors :

143

equation im145

144• Si equation im146, fixer equation im147 ouPOST = 1 génère le même bien-être pour les moins bien lotis.

145Preuve. Les deux alternatives génèrent le même niveau de bien-être pour le moins bien loti lorsque : equation im148. Isolant equation im149, nous obtenons : equation im150. Lorsque equation im151, la première alternative donne un niveau de bien-être réalisé pour le moins bien loti supérieur. Lorsque equation im152, c’est la deuxième option qui est préférable.

146La forme de l’optimum égalitarien ex post dépend du seuil equation im153 en dessous duquel la pollution ne conduit pas à des décès prématurés. Si ce seuil est élevé equation im154, il est optimal, d’un point de vue ex post égalitarien, de faire travailler les individus au niveau de ce seuil equation im155, de manière à maximiser le bien-être sur la vie des individus, qui, sous cette option, profitent tous de la même durée de vie. Par contre, si le seuil equation im156 est faible equation im157, alors l’optimum égalitarien ex post requiert une quantité de travail supérieure à equation im158, conduisant à des décès prématurés. En effet, dans ce cas, la survie de tous – impliquant equation im159 – se ferait au détriment des moins bien lotis, à cause de consommations trop faibles. Cela explique qu’il est alors optimal, dans l’intérêt des moins bien lotis, d’augmenter la production et la pollution au-delà du seuil equation im160[12].

147Notons que plus equation im161 est élevé et plus le seuil equation im162 est faible, ce qui rend la première option – la pollution maintenue à equation im163 – davantage souhaitable [13]. Par ailleurs, si les individus assignent une grande valeur à la survie, equation im164 est faible, ce qui augmente le seuil equation im165, rendant la première option – la pollution maintenue à equation im166 – moins attractive. En effet, un plus faible equation im167 rend l’option « pollution au-delà de equation im168 » plus attractive pour les moins bien lotis, car un faible equation im169 permet au planificateur égalitarien de redistribuer davantage vers les jeunes [14].

148La proposition 5 compare l’optimum égalitarien ex post avec le laisser-faire.

149Proposition 5. Comparons l’optimum égalitarien ex post avec le laisser-faire :

150• Si equation im170, alors :

151

equation im171

152

equation im172

153• Si equation im173, alors :

154

equation im174

155Preuve. La première partie de la proposition découle de equation im175 et equation im176. Vu que equation im177 et equation im178, on a cPOST < cLF. Le même raisonnement prévaut pour equation im179. En ce qui concerne la seconde partie, l’hypothèse equation im180 implique cPOST > cLF et dPOST < dLF.

156Si le seuil equation im181 au-dessus duquel la pollution devient une cause de décès prématuré est élevé, l’optimum égalitarien ex post implique une quantité de travail plus faible qu’au laisser-faire, des consommations plus faibles, mais une espérance de vie plus grande. Par contre, si le seuil equation im182 est faible, le laisser-faire et l’optimum égalitarien ex post impliquent les mêmes niveaux de production, de pollution et d’espérance de vie. Les profils de consommation sont toutefois différents : la consommation aux jeunes âges est plus élevée qu’au laisser-faire sous l’optimum ex post, mais plus faible aux âges élevés.

157Proposition 6. Comparons l’optimum égalitarien ex post avec l’optimum utilitariste sous equation im183 :

158• Si equation im184, alors :

159

equation im185

160• Si equation im186, alors :

161

equation im187

162Preuve. L’inégalité cPOST < cU provient de equation im188 pour equation im189. De même, l’inégalité dPOST < dU provient de equation im190 pour equation im191.

163Si le seuil equation im192 au-delà duquel la pollution devient une cause de décès est supérieur à equation im193, l’optimum égalitarien ex post implique moins de production et de pollution que sous l’optimum utilitariste, une espérance de vie plus élevée, mais au prix de consommations plus petites. Par contre, si equation im194 est inférieur à equation im195, l’optimum égalitarien ex post implique davantage de production et de pollution, ainsi qu’une espérance de vie plus petite.

Conclusions

164Cette étude a analysé la compensation des individus victimes d’une surmortalité causée par la pollution. Pour ce faire, nous avons caractérisé, dans un modèle du cycle de vie où la pollution affecte les chances de survie, l’optimum égalitarien ex post, et nous l’avons comparé au laisser-faire, ainsi qu’à l’optimum utilitariste.

165Notre analyse a révélé que l’optimum égalitarien ex post peut comporter une pollution soit inférieure, soit égale à celle prévalant au laisser-faire. De plus, l’optimum égalitarien ex post peut être caractérisé par une pollution et une mortalité soit plus faibles, soit plus élevées qu’à l’optimum utilitariste. La comparaison des deux optima sociaux requiert donc une analyse précise des caractéristiques du processus de pollution étudié. Ces caractéristiques incluent non seulement le niveau critique equation im196, en dessous duquel la pollution n’a pas d’effet sur la mortalité, mais également les caractéristiques equation im197 et equation im198, qui déterminent le seuil equation im199, et, par là, la forme précise de l’optimum égalitarien ex post.

166Quels pourraient être les apports pratiques de cette étude pour l’amélioration, dans la réalité, du sort des victimes de la pollution ? Répondre à cette question exige une certaine prudence, tant le modèle que nous avons étudié est une forme réduite épurée, avec deux périodes de vie, un seul bien et un seul polluant. Néanmoins, malgré ces simplifications, notre analyse a le mérite de mettre en lumière l’existence de deux canaux distincts par lesquels nos sociétés peuvent réduire l’impact négatif de la pollution sur les plus démunis. Le premier canal consiste à réduire la pollution elle-même, afin de la rapprocher le plus possible du seuil de nocivité (seuil à identifier au préalable) [15]. Le second canal, moins évident à première vue, consiste à modifier les profils de consommation tout au long de la vie, en les rendant davantage décroissants avec l’âge, afin de réduire le plus possible les pertes pour les victimes de la pollution [16].

167Si l’on adopte, comme dans cette étude, le point de vue de l’optimum égalitarien ex post, la solution optimale est de type « bang bang » et requiert qu’un seul de ces canaux – celui qui améliore le plus le sort des moins bien lotis – soit suivi. Notons que si l’on adoptait un objectif social moins extrême (présentant une aversion à l’inégalité plus faible), la compensation des victimes de la pollution pourrait s’appuyer simultanément, et dans certaines proportions, sur la réduction des émissions et sur les modifications des profils de consommation. Le sort des victimes de la pollution pourrait alors être amélioré par l’action jointe de politiques de réduction des émissions et de politiques fiscales encourageant des profils de consommation (davantage) décroissants avec l’âge (taxe sur l’épargne).

168À cela, on pourra objecter que ces analyses sont effectuées dans le cadre idéal d’une économie au premier rang. Dans la réalité, la mise en œuvre de telles politiques fait face à de nombreux obstacles qui constituent, dans un monde de second rang, autant de freins à la compensation des victimes de la pollution. Il est cependant à espérer que poser, comme nous l’avons fait ici, la question de la compensation des victimes de la pollution contribuera, dans une certaine mesure, à mieux éclairer la problématique des injustices face à la pollution, et les défis que ces injustices posent aux décideurs publics.

L’auteur remercie Antoine Bommier, Arnold Chassagnon, Fabrice Etilé, Marc Fleurbaey, Jean-François Laslier, François Maniquet, Philippe Mongin et un rapporteur anonyme pour leurs commentaires et suggestions sur ce travail. L’auteur bénéficie du soutien de l’ANR EQUIRISK (Equity in Risky Economic Environments) (ANR-12-INEG-0006-01).

Bibliographie

Références bibliographiques

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Notes

  • [*]
    Université Paris Est (ERUDITE), École d’économie de Paris et Institut universitaire de France. Correspondance : ENS, bâtiment B, bureau 009, 48 boulevard Jourdan, 75014 Paris. Courriel : gregory.ponthiere@ens.fr
  • [1]
    Sur les dimensions environnementales affectant la mortalité, voir Sartor [2002].
  • [2]
    Voir également Finkelstein et al. [2003].
  • [3]
    4,3 millions de décès sont liés à la pollution intérieure, et 3,7 millions de décès sont liés à la pollution extérieure. Un million de décès sont causés par une double exposition.
  • [4]
    Ce fait est confirmé par les nombreuses études quantifiant les gains ou pertes de bien-être associés à des variations de longévité. Voir notamment Usher [1973], [1980], et, plus récemment, Costa et Steckel [1997], Becker, Philipson et Soares [2005] et Fleurbaey et Gaulier [2009].
  • [5]
    Sur l’incompatibilité de ces deux principes, voir Fleurbaey et Maniquet [2004].
  • [6]
    Il s’agit de la fonction de survie : equation im200
    equation im201 et equation im202 varie entre equation im203 et 1 (PMAX).
  • [7]
    Vu que la probabilité de survie π(P) joue ici un rôle de taux d’escompte biologique, nous faisons abstraction des préférences temporelles pures.
  • [8]
    Vu que le travail est déjà source de désutilité à travers la pollution, nous faisons ici abstraction de la désutilité pure du travail.
  • [9]
    Notons que si l’existence d’un tel niveau de consommation neutre pour la continuation de l’existence semble plausible, la question empirique de l’estimation de ce niveau a été peu étudiée dans la littérature. Le plus souvent, comme chez Becker, Philipson et Soares [2005], la calibration, sur base d’estimations de la valeur d’une vie statistique, de la fonction d’utilité temporelle u(c) implique de facto un certain niveau pour equation im204.
  • [10]
    Notons que nos résultats ne seraient pas profondément affectés par l’introduction d’une désutilité pure du travail conduisant à une solution intérieure pour ℓ au laisser-faire.
  • [11]
    Notons que si l’on relâchait l’hypothèse de l’existence d’une consommation neutre non négative et que l’on supposait à la place u(c) > 0 pour tout c ≥ 0, alors cette seconde approche ne permettrait plus d’égaliser le niveau de bien-être des individus à vie longue et des individus à vie courte, ces derniers connaissant inévitablement une perte de bien-être par rapport à ceux qui vivent longtemps. Cependant, l’esprit de cette seconde approche serait conservé, car imposer un profil de consommation décroissant permet toujours de minimiser cette perte, même lorsque celle-ci ne peut pas être réduite à zéro.
  • [12]
    Cette conclusion prévaut évidemment dans le cas particulier où equation im205, c’est-à-dire lorsque toute pollution P strictement positive contribue à détériorer les chances de survie.
  • [13]
    L’intuition est que si equation im206 est élevé, polluer au-delà de equation im207 – et donc réduire la durée de vie des moins bien lotis – ne permet pas d’améliorer le sort de ceux-ci.
  • [14]
    Dans l’hypothèse extrême où u(c) > 0 ∀c ≥ 0, on donnerait, sous la seconde approche, 0 aux survivants, de sorte que l’attractivité de chaque approche dépendrait de savoir si : equation im208
    La seconde approche (membre de droite) est donc ici plus attractive que dans l’hypothèse où il existe un niveau non négatif de consommation neutre pour la continuation de l’existence.
  • [15]
    Notons que dans le monde réel, où les polluants sont multiples, une telle identification est requise pour chaque polluant séparément. En effet, du point de vue des conditions de survie, le fait de dépasser le seuil pour un seul des polluants suffit à générer des décès prématurés, indépendamment des niveaux des autres polluants.
  • [16]
    Comme cela est discuté par Fleurbaey, Leroux et Ponthière [2014], les profils de loisir devraient aussi être modifiés, avec davantage de loisir aux âges jeunes. Par ailleurs, et toujours dans l’optique de réduire les pertes de bien-être pour les personnes à vie courte, le départ à la retraite pourrait être reporté de quelques années (voir Fleurbaey et al. [2016]).
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