Couverture de RECO_634

Article de revue

Bâle 3 et la réhabilitation du ratio de levier des banques

Pourquoi et comment ?

Pages 809 à 820

Notes

  • [*]
    Université de Limoges, lape. Correspondance : 5 rue Félix Éboué, BP 3127, 87031 Limoges, France. Courriels : clovis.rugemintwari@unilim.fr (auteur correspondant), alain.sauviat@unilim.fr, amine.tarazi@unilim.fr
  • [1]
    Un cas exemplaire est celui des deux Majors suisses (ubs et Credit Suisse Group-csg). Elles étaient parmi les banques les mieux capitalisées au monde du point de vue du ratio de capital pondéré de Bâle 2 et parmi les moins bien capitalisées sur la base du ratio simple de levier (Hildebrand [2008], ocde [2009]). Un autre exemple frappant est celui de la Northern Rock en juin 2007 juste avant la course aux dépôts dont elle a fait l’objet. Son ratio Tier 1 pondéré était supérieur à 11 % et son ratio de levier inférieur à 2 % (le p-dg a reconnu avoir distribué un dividende confortable aux actionnaires de la banque car il jugeait que le niveau des fonds propres était largement supérieur à celui requis par Bâle 2 !) (voir Rochet [2008] et Blundell-Wignall et Atkinson [2008]).
  • [2]
    Furfine [2001], Repullo et Suarez [2004], Rime [2005], Feess et Hege [2008] et Hakenes et Schnabel [2011] modélisent les situations où les banques sont soumises soit au ratio ajusté du risque à la Bâle 2, soit au ratio de capital à la Bâle 1 en ne considérant que la seule catégorie d’actifs ayant une pondération de 100 %, ce qui correspond au simple ratio de levier. Empiriquement, Ruthenberg et Landskroner [2008], par exemple, comparent les tarifications de prêt sous les réglementations de capital sensible et non sensible à la prise de risque.
  • [3]
    Les récentes augmentations des pondérations de risque pour certains actifs en sont l’illustration (Hannoun [2010]).
  • [4]
    En fait, Danielsson préconise le rejet même des modèles internes des banques et soutient que la méthode fruste de ratio simple de levier devrait être la seule base de régulation des banques. Blundell-Wignall et Atkinson [2010] et Hellwig [2010] vont dans le même sens. Leur argumentation s’appuie sur la complexité excessive mais surtout sur la défaillance avérée des mesures pondérées des risques. Hellwig suggère des ratios de levier de niveaux très élevés, dans un intervalle de 10-30 %, en remplacement des ratios pondérés de capital qui, selon lui, favorisent l’arbitrage réglementaire et accroissent ainsi la prise de risque excessive des banques.
  • [5]
    Cartapanis [2011] utilise le terme de levier incorporé.
  • [6]
    Cette endogénéité existe en période calme et elle devient particulièrement dangereuse en cas d’instabilité car les modèles internes poussent les banques à agir toutes de la même manière et à amplifier la crise. Au final, au lieu de protéger le système bancaire contre une crise systémique, l’utilisation de ces modèles pourrait l’aggraver.
  • [7]
    Il est à noter que, contrairement au cas classique où ce sont les déposants qui paniquent, ici ce sont les banques qui se ruent sur d’autres banques !
  • [8]
    Rôle que ne peut pas jouer le ratio pondéré en raison de la diminution du niveau estimé des risques pendant le boom.
  • [9]
    Signalons que la contrainte en termes de levier a été introduite fin 2008 pour les deux plus grandes banques suisses ubs et Credit Suisse Group (csg). Elle devrait être effective dès 2013 (sfbc [2008]). Des discussions sont en cours pour son élargissement à l’ensemble des banques suisses (Finma [2010], p. 10).
  • [10]
    Ce minimum de ratio de levier est abaissé à 3 % pour les banques qui sont très bien notées par les superviseurs.
  • [11]
    Ces catégories sont : bien – (? 5 %) et adéquatement – (? 4 %) capitalisées et ; sous- (< 4 %) et substantiellement sous- (< 3 %) capitalisées. Lorsqu’une banque affiche un ratio de capital en dessous du seuil adéquat, elle est considérée comme sous-capitalisée. Cela déclenche une action correctrice immédiate du superviseur sous la forme d’une restriction des activités de la banque. Cette restriction est d’autant plus stricte que la banque est sous-capitalisée.
  • [12]
    bcbs est l’acronyme de Basel Committee on Banking Supervision, organisme abrité par la Banque des règlements internationaux (bri).
  • [13]
    Les six grandes banques canadiennes comptent pour plus de 90 % du total des actifs bancaires. Un levier d’endettement maximal de 30 signifie que ces grandes banques doivent détenir au moins 1 $ canadien en fonds propres pour un financement de 30 $ canadiens d’actifs.
  • [14]
    Ce ratio d’endettement maximal de 20 est plus restrictif que le ratio de levier minimal de 4 % requis aux États-Unis, d’autant plus que la réglementation canadienne inclut des éléments du hors-bilan.
  • [15]
    Aucune contrainte réglementaire sur le levier n’existe en Europe sur la période étudiée.
  • [16]
    Une étude de Standard & Poor’s [2010] montre, par exemple, que le total des actifs de la Deutsche Bank à la fin de l’année 2009, qui est de 891 milliards d’euros avec la méthode comptable américaine gaap, s’élève à 1 501 milliards avec la méthode ifrs, soit presque 50 % en plus.
  • [17]
    Noyer [2011] illustre les conséquences sur le ratio de levier qui résultent des différences entre les méthodes comptables ifrs et gaap. Il se félicite du projet de convergence des deux agences comptables à l’étude et souligne également les difficultés à relever pour que cette convergence soit effective. L’article 165 de Bâle 3 (bcbs [2010b], p. 63) précise que la question de différences entre systèmes comptables sera prise en compte pendant la période de mise en œuvre pour éviter toute distorsion potentielle.
  • [18]
    Les détails sur le dénominateur sont clairement exposés dans bcbs [2010b] p. 61-63.
  • [19]
    Seuls les engagements révocables sans condition par la banque, à tout moment et sans préavis, bénéficient d’un facteur de conversion de 10 %.
  • [20]
    Respectivement 4,5 %, 6 % et 8 % des actifs pondérés du risque doivent être couverts par le montant des actions ordinaires (coreTier1), des fonds propres de base (Tier1) et du total des fonds propres.
  • [21]
    Un volant de conservation de 0,625 % sera instauré en janvier 2016 et augmentera de ce montant chaque année pendant trois ans pour atteindre 2,5 % en janvier 2019, date d’application complète du dispositif de Bâle 3.
  • [22]
    Les banques exercent normalement leur activité, mais elles sont contraintes dans la distribution de leurs bénéfices tant qu’elles ne satisfont pas aux exigences du volant de conservation. Le volant contracyclique est laissé à l’appréciation des autorités nationales en fonction de l’évolution de la croissance des crédits. Lorsqu’il est mis en œuvre, il aboutit à augmenter la taille du volant de conservation et fonctionne donc selon le même principe.
  • [23]
    sifis est l’acronyme de Systemically Important Financial Institutions. g-sifis, où G signifie Global, est également utilisé (Wellink [2011], p. 4).
  • [24]
    Les détenteurs de ces titres devraient jouer un rôle disciplinant car ils sont censés exiger une compensation proportionnelle au risque de conversion.
  • [25]
    Thoraval [2010, p. 17] qualifie le ratio de levier de « préhistorique » aux yeux des banquiers européens ! Frenkel et Rudolf [2010, p. 61] considèrent que l’introduction du ratio de levier pourrait susciter des incitations perverses en termes d’allocation d’actifs car il ne rétribue pas les banques qui financent des activités faiblement risquées. Kiema et Jokivuolle [2010] estiment que cela pourrait conduire à une diminution de financement d’actifs faiblement risqués au profit de ceux plus risqués remettant en cause l’objectif de limitation de prise de risque excessive.

Introduction

1Les préconisations de décembre 2010 du Comité de Bâle sur le Contrôle Bancaire, communément appelées les accords de Bâle 3, trouvent leur explication dans les failles du dispositif antérieur (Bâle 2) révélées par l’éclatement de la crise des subprimes à l’été 2007. Un des éléments clés du nouveau dispositif a trait à la réapparition d’une simple contrainte de levier d’endettement comme un outil renforçant la panoplie des instruments prudentiels à l’échelle internationale. Comme le souligne Hildebrand [2008], le ratio simple de levier (le rapport entre une mesure du capital et une mesure de l’exposition sur l’ensemble des contreparties) est historiquement la première mesure de contrainte de capital imposée dans la plupart des pays, les exigences pondérées du risque (le ratio Cooke) n’ayant été introduites que par les premiers accords de 1988. Le ratio pondéré du risque apparaissait alors comme un progrès essentiel pour reconnaître que le risque des banques n’était pas lié qu’à leur levier mais aussi au niveau de risque de leurs actifs. Bâle 2 a renforcé la sensibilité du ratio au risque mais au prix d’un dispositif bien plus complexe à mettre en œuvre et à superviser, créant, dans un univers d’imperfection de l’information, l’émergence de « risques sur l’évaluation des risques » (Hildebrand [2008]). L’éclatement de la crise a révélé cette sous-évaluation dramatique de l’ampleur des risques effectifs pris puisque, avant la crise, les ratios de capital pondérés étaient supérieurs aux minima requis alors qu’augmentaient très fortement les leviers d’endettement des plus grandes banques mondiales (banques universelles européennes, banques d’affaires américaines...) [1]. Toutefois, le dispositif de Bâle 3 ne rejette pas l’utilité des exigences en capital construites sur une pondération sophistiquée des risques. Mais elles ne sauraient parvenir à elles seules à déterminer un niveau adéquat de capitalisation des banques comme l’a révélé la crise. Elles doivent donc être complétées par d’autres mesures renforçant l’efficacité d’un dispositif plus global.

2L’objet de cet article est d’exposer les raisons de l’introduction du ratio simple de levier en complément du ratio de capital pondéré en prenant appui sur les enseignements des quelques contributions théoriques sur le sujet et sur le constat des expériences américaine (pour les banques commerciales) et canadienne où les deux ratios ont coexisté depuis la mise en œuvre des recommandations du Comité de Bâle au début des années 1990. L’application concrète de cette mesure dans le cadre du dispositif de Bâle 3 et les questions qu’elle soulève seront ensuite brièvement discutées.

Justifications théoriques du ratio de levier comme complément au ratio de capital pondéré

3À notre connaissance, il existe très peu de travaux théoriques qui analysent le pour et le contre de la coexistence de deux contraintes sur les ratios de capital (pondéré et non pondéré du risque) des banques. Une grande partie de la littérature s’est plutôt focalisée sur l’analyse comparée du comportement bancaire (tarification des prêts, choix de portefeuille,…) selon que la banque soit sous la contrainte d’un ratio minimum de capital ajusté du risque ou non [2].

4Le peu d’études théoriques qui ont analysé le comportement de la banque soumise aux deux exigences minimales de ratios de capital partent du principe que Bâle 2 confère aux banques la possibilité d’effectuer, à l’aide de modèles internes, leur propre calcul du capital réglementaire (pilier 1) qu’elles communiquent ensuite au superviseur (pilier 2) qui en a préalablement validé l’utilisation. Le point commun à ces travaux est qu’ils considèrent que cette innovation de Bâle 2 est porteuse d’une potentielle sous-estimation de risque. De manière générale, cette sous-estimation de la prise de risque bancaire peut être due à un déficit informationnel ou à la non-prise en compte des externalités négatives et des conséquences systémiques qu’elle pourrait engendrer. Le ratio de levier apparaît alors à la fois comme un complément nécessaire du dispositif de régulation microprudentielle et comme un des éléments de réponse au besoin de régulation macroprudentielle.

Information imparfaite et régulation microprudentielle

5Le problème informationnel se pose principalement à deux niveaux. Premièrement, il existe des défauts de mesure des risques (risque de modèles) imputables aussi bien au superviseur [3] qu’au supervisé – la banque –, ce qui implique que le capital réglementaire requis par le superviseur est potentiellement différent du capital réglementaire idéal. C’est dans ce cadre que s’inscrivent Bichsel et Blum [2001, 2005], Danielsson [2008] ainsi que Jarrow [2007]. Selon Bichsel et Blum, l’impossibilité de mesurer parfaitement le risque des actifs bancaires conduit inévitablement à de mauvaises définitions de pondérations du risque pour le calcul du capital réglementaire. Danielsson considère potentiellement dangereuse l’harmonisation des techniques de mesures du risque qui pourrait résulter d’une réglementation fondée sur les modèles internes des banques. En effet, chaque banque chercherait à utiliser le modèle qui minimise sa charge réglementaire en capital, l’utilisation des modèles devenant une composante de la concurrence bancaire. Ceci pourrait conduire à une course à la baisse de la qualité des modèles (race to the bottom). Dans ces conditions, le régulateur n’interviendrait plus que pour imposer les standards minimaux à respecter [4]. Par conséquent, les problèmes d’arbitrage réglementaire, les difficultés de validation du modèle interne et les risques du « race to the bottom » justifieraient la coexistence du ratio de levier et du ratio de capital ajusté du risque. Quant à Jarrow [2007], il se place dans le cas américain et s’interroge sur l’opportunité de maintenir la contrainte de ratio de levier en vigueur au moment de l’introduction de la nouvelle contrainte de Bâle 2 sensible au risque. Il considère que l’une ou l’autre de ces deux contraintes de capital ne peut conduire qu’à sous-estimer le montant de capital que nécessiterait une règle idéale (mais non atteignable en information imparfaite) prenant en compte toutes les externalités négatives d’une faillite bancaire sur l’économie que n’intègre pas le capital économique déterminé par la banque. La coexistence des deux ratios simple et pondéré du risque permet ainsi de déterminer le montant de capital par la contrainte la plus sévère, c’est-à-dire celle qui détermine l’exigence réglementaire la plus forte et donc la moins éloignée du montant de capital idéal. Deuxièmement, une asymétrie d’information existe entre le régulé (ou le supervisé) et le régulateur (ou le superviseur). L’utilisation des modèles internes des banques dans le calcul du capital réglementaire – premier pilier de Bâle 2 – crée un gap informationnel à leur profit. Ainsi, Pellizon et Schaefer [2006], Blum [2008] et Rugemintwari [2011] montrent que les banques auraient naturellement tendance à sous-estimer et à cacher au superviseur leur véritable prise de risque afin d’économiser sur le montant de capital réglementaire et, ainsi, maximiser leur profit. Seule la crainte d’une pénalité constituerait une incitation à révéler leur véritable nature. Toutefois, ces travaux montrent que cette pénalité est difficile à mettre en œuvre du fait des difficultés à détecter le risque effectif de la banque et/ou du laxisme du superviseur en cas de capture du régulateur par le régulé et/ou en raison de l’incohérence temporelle de la menace d’une sanction ex post. Le ratio de levier pallie ces difficultés parce qu’il oblige la banque à détenir un certain montant de capital proportionnel à son total d’actifs lui faisant craindre l’éventualité d’une pénalité proportionnelle à ses fonds propres. En outre, l’exigence en termes de levier contraint la banque à détenir davantage de fonds propres, ce qui implique qu’elle a plus à perdre en cas de faillite, conditionnant ainsi sa prise de risque. Elle conduit également à limiter la sous-estimation volontaire du risque puisqu’il devient inutile de tricher sur le ratio pondéré quand le ratio de levier devient mordant. Dans tous les cas, cette contrainte transparente atténue l’incapacité du superviseur à détecter la sous-estimation du risque de la banque et lui confère la possibilité de sanctionner la banque sans compromettre pour autant sa survie. L’ensemble de ces travaux soutient que la nécessité du ratio de levier dépend du degré de respect du ratio de capital ajusté du risque. Ainsi, en fonction du comportement de la banque et de la capacité du superviseur à détecter une éventuelle tricherie, trois cas sont possibles : i) en l’absence de toute tricherie, le ratio de levier serait superflu ; ii) en cas de faible tricherie, les contraintes sur les ratios pondéré et non pondéré du risque sont complémentaires, l’un renforçant l’efficacité de l’autre ; iii) lorsque le degré de tricherie est fort, le ratio de levier devient un substitut du ratio ajusté du risque, et il s’avère indispensable.

Risque systémique et régulation macroprudentielle

6Le risque systémique résulte d’un type de levier qualifié d’« embedded leverage » (D’Hulster [2009]) que l’on peut approcher par le « levier indirect [5] » et du comportement grégaire des banques résultant du caractère endogène du risque. Il est question ici d’un levier dont la dimension découle des relations qu’une banque a nouées avec des structures (banques ou autres établissements) fortement endettées. Les travaux de Danielsson [2002, 2008] sur l’endogénéité du risque ainsi que ceux de Shin [2010] et d’Adrian et Shin [2010] sur la dynamique des bilans bancaires dans les phases ascendante (boom) et descendante (bust) dévoilent l’importance de ce levier indirect dans la stabilité du système bancaire. Pendant la phase ascendante, les banques accroissent leur endettement, et plus particulièrement l’endettement interbancaire, et le réduisent de façon abrupte pendant la phase descendante – deleveraging. L’accent est donc mis sur les relations interbancaires susceptibles de menacer le système dans son ensemble. Les dettes interbancaires décroissent pendant la phase descendante. Cette baisse est accentuée par l’utilisation des modèles internes. En effet, le niveau de risque indiqué par leurs modèles détermine les décisions d’investissement des banques qui conditionnent en retour la perception du niveau global du risque, créant un phénomène de circularité et donc d’endogénéité du risque [6]. Le système bancaire est donc soumis à un risque de panique généralisée car toute banque privilégie sa propre sécurité et réduit son exposition à ses consœurs. Individuellement, toutes les banques peuvent agir ainsi conduisant à un comportement où l’interruption du prêt interbancaire pourrait être interprétée comme un phénomène de bank run[7]. Ces travaux ajoutent deux dimensions à prendre en compte dans la réglementation du capital : la procyclicité et la dimension systémique liées à l’endettement interbancaire, souvent négligées dans l’analyse du levier. Ils montrent que le recours excessif au levier pendant la phase ascendante et l’interconnexion bancaire qui en résulte peuvent se transformer en un risque systémique pendant la phase descendante. D’où le plaidoyer pour une contrainte en termes de levier pour limiter un financement excessif par la dette pendant le boom[8] et éviter un choc important sur l’économie lors du bust. Selon ces auteurs, cette contrainte de levier pourrait être assimilée à une taxe pigouvienne qui permettrait d’internaliser les externalités non prises en compte à l’échelle individuelle de la banque mais qui constituent des menaces pour la viabilité du système bancaire, voire du système financier, dans son ensemble.

Constats et arguments empiriques

7Parmi les trente-quatre pays de l’ocde, seuls deux d’entre eux offrent un recul nécessaire pour juger de l’apport de la coexistence des deux contraintes minimales de ratio de levier et de ratio de capital ajusté du risque dans le dispositif de régulation prudentielle. Il s’agit des États-Unis et du Canada, où la mise en place des accords de Bâle 1 au début des années 1990 n’a pas remplacé, mais plutôt complété la contrainte en termes de levier [9].

Expérience américaine

8Aux États-Unis, le ratio de levier est calculé de la manière suivante : (Capital Tier 1-Actifs intangibles) / (Total actifs-Actifs intangibles) où les actifs intangibles correspondent à la somme du goodwill, des dépenses en logiciel et des impôts différés sur les actifs. Il s’agit donc d’un ratio de levier de bilan. Les banques doivent présenter un ratio d’une valeur au moins égale à 4 % [10]. Par ailleurs, depuis la promulgation de la Federal Deposit Insurance Corporation Improvement Act (fdicia) en décembre 1991, et plus particulièrement des dispositions du Prompt Corrective Action (pca), le niveau du ratio de levier constitue un des critères de classification des banques dans les quatre catégories sur la base desquelles les autorités de supervision prennent les mesures d’intervention [11].

9La plupart des études sur l’expérience américaine, par exemple Avery et Berger [1991], Thomson [1991], Peek et Rosengren [1996, 1997], Hwang et al. [1997], Estrella et al. [2000], s’accordent sur le fait que, parmi un ensemble de ratios comptables, le ratio de levier de bilan est le meilleur indicateur avancé dans la prévision des détresses financières des banques. Dans le même ordre d’idées, Evanoff et Wall [2001] font une analyse comparative des outils dont les superviseurs pourraient se servir pour prévoir l’évolution de l’état de santé des banques américaines afin de déclencher des mesures correctives précoces (pca). Ils montrent que le ratio de levier est, parmi tous les autres ratios de capital, celui qui a le plus grand pouvoir prédictif. Les résultats de ces études conduisent leurs auteurs à considérer le ratio de levier comme un complément au ratio de capital ajusté du risque pour le superviseur. Dans le cas européen, certains auteurs (Aglietta et Scialom [2010]) préconisent des recommandations similaires et proposent d’adopter un dispositif de type pca (ajusté par la prise en compte des activités de hors bilan) comme « benchmark » pour la réglementation bancaire en Europe car il est automatique, progressif et transparent.

10Les récentes calibrations du comité de Bâle corroborent ces résultats. Elles montrent que, parmi tous les ratios de capital, le ratio de levier est celui qui discrimine le mieux les banques qui ont connu des difficultés pendant la crise de celles qui n’en ont pas subies (BCBS [12] [2010a]). La pertinence de l’information contenue dans le ratio de levier comparativement à celle contenue dans le ratio de capital pondéré pourrait ainsi s’expliquer par la complexité de la détermination des encours pondérés et par les possibilités de manipulation des coefficients de pondération de risque, ce qui biaiserait le contenu en information du ratio de capital pondéré.

Expérience canadienne

11Au Canada, la réglementation du levier inclut des éléments du hors-bilan estimés à environ 75 % du total du hors-bilan (Bordeleau et al. [2009]) et ainsi, la définition du ratio de levier se rapproche de la mesure du levier économique (Price [2010]). Ce ratio est calculé comme suit : (Total des actifs + éléments retenus du hors-bilan) / (Capital Tier 1 + Tier 2). De 1982 à 1991, un levier maximal de 30 a été introduit pour les grandes banques [13]. L’endettement maximal a été abaissé à 20 de 1991 à 2000 [14]. Depuis 2000, certaines banques bénéficient d’un plafond plus élevé de 23 selon l’appréciation et l’approbation du superviseur notamment sur le degré de la diversification de leurs portefeuilles.

12En étudiant l’apport de cette contrainte de ratio de levier sur les vingt-cinq dernières années au Canada, Bordeleau et al. [2009] soutiennent qu’elle joue comme un complément à la contrainte sur le ratio de capital ajusté du risque et qu’elle est nécessaire pour limiter la procyclicité du capital réglementaire. La mise en place d’une contrainte explicite en 1982 aurait conduit les banques à réduire leur endettement de façon substantielle. Le levier d’endettement agrégé sur les six grandes banques est passé de 40 en 1980 à 25 en 1983 et depuis 1985, il se situe en dessous de 20. En menant une analyse comparative, Bordeleau et al. [2009] trouvent que la contrainte en termes de levier aurait vraisemblablement contribué à limiter l’endettement et à réduire la procyclicité du capital observée depuis le début de la crise des subprimes au Canada par rapport à la situation des États-Unis, de l’Europe continentale et du Royaume-Uni [15]. Ils en concluent que le ratio de capital ajusté du risque n’est pas suffisant pour empêcher un endettement excessif. Selon eux, l’exemple du Canada illustre le rôle complémentaire et nécessaire d’une contrainte sur le ratio de levier pour limiter l’endettement excessif et le problème de procyclicité du capital réglementaire.

Le ratio de levier dans le dispositif de Bâle 3

13Le dispositif de Bâle 3 adopté en décembre 2010 marque ainsi la reconnaissance à l’échelle internationale du ratio de levier comme un des instruments de la panoplie prudentielle à la disposition des autorités de supervision. Il prévoit une exigence minimale de 3 % de ratio de levier applicable à toutes les banques dès janvier 2013 dont la mise en œuvre effective s’étendra sur quatre ans, dans une première phase en tant qu’élément complémentaire du second pilier puis, dans une seconde phase à partir de janvier 2018, comme partie intégrante du premier pilier (bcbs [2010b], p. 63).

14Le caractère international des propositions du comité de Bâle atténue mais ne lève pas toutes les inquiétudes qui pourraient résulter de choix différents de définition du ratio de levier entre pays. Comme le soulignait Noyer [2008], de grandes différences dans les systèmes comptables (normes gaap, ifrs, iasb) et dans les structures bancaires rendaient la contrainte d’un ratio de levier minimal difficile à mettre en œuvre à l’échelle internationale. Il est par exemple acquis que la méthode américaine gaap surestime le ratio de levier en sous-estimant le total des actifs notamment en raison du netting relatif aux produits dérivés [16]. Ainsi, au moment de la mise en œuvre à l’échelle nationale de cette nouvelle contrainte, une convergence sur le mode de calcul du ratio de levier sera une condition sine qua non pour pallier toutes distorsions concurrentielles potentielles entre pays [17].

15Plus précisément, la proposition du comité de Bâle intègre à la fois la notion de levier de bilan et celle de levier économique dans la mesure où l’exposition totale de la banque (le dénominateur du ratio) inclut, au-delà du total des actifs, tous les éléments du hors-bilan [18]. L’inclusion du hors-bilan dans le ratio de levier est une des façons, indirecte certes, de répondre à la question (en cours d’étude par le comité) de l’exposition des banques au shadow banking (voir Walter [2011]). Le hors-bilan est le principal reflet de l’interaction entre système bancaire classique et shadow banking, et il est composé d’éléments dont le risque est très difficile à évaluer. Sa prise en compte dans le ratio de levier garantit que les banques détiennent un montant plus élevé de capital. Toutefois, la proposition d’appliquer un facteur de conversion de 100 % à tous les éléments du hors-bilan [19] ne fait pas encore l’unanimité (icc [2010]). Le numérateur, quant à lui, est composé du capital Tier 1, mais une option plus stricte (common equity Tier 1) et une option plus large (capital total réglementaire) sont également examinées.

16Le ratio de levier n’est qu’un des éléments de l’ensemble des contraintes sur le capital des banques du dispositif de Bâle 3 dans lequel la question macroprudentielle et celle de procyclicité du capital réglementaire occupent une place essentielle (voir Hannoun [2010]). Au-delà des exigences minimales renforcées en fonds propres [20], sont ainsi introduits des volants de sécurité (buffers) sur le core Tier 1 : un volant de conservation de 2,5 % [21] et un volant contra-cyclique pouvant varier entre 0 et 2,5 % [22] des actifs pondérés du risque selon l’appréciation des autorités nationales. Le comité de Bâle reconnaît également la nécessité d’aller plus loin que les minima de capital requis en ce qui concerne les banques considérées comme systémiquement importantes (sifis) [23] (bcbs [2010b], p. 7). Le bcbs en collaboration avec le fsb (Financial Stability Board) élabore actuellement une approche globale exigeant un surplus de capital pour ce type d’institutions en contrepartie de la garantie implicite dont elles bénéficient. Sont aussi à l’étude d’autres outils appelés contingent capital et bail-in debt qui sont des titres de dette dont les détenteurs s’engagent à accepter leur conversion en capital lorsque les autorités de supervision le jugent nécessaire en fonction de la situation dans laquelle se trouve l’institution sifi[24]. Enfin, le dispositif est complété par d’autres mesures importantes non centrées sur le niveau de capital, telles que les ratios de liquidité, le renforcement des restrictions sur les expositions totales des sifis ou encore une supervision renforcée dont les modalités effectives ne sont pas encore finalisées.

17Les banques ont contesté le durcissement de la régulation bancaire et ont notamment invoqué que le renforcement des fonds propres en augmenterait le coût, qu’il aurait pour conséquence une augmentation des taux débiteurs et une limitation de l’offre de crédit. Comme le souligne Pollin [2010], cette position oublie que la réduction du risque de faillite de la banque, liée à la diminution de son levier, devrait réduire le rendement exigé par les actionnaires. Sauf à considérer que les actionnaires interprètent la réduction du levier comme une diminution de la valeur de l’option liée à une clause implicite de sauvegarde de la banque en cas de difficultés (surtout si elle est grande et/ou d’importance systémique) et qu’ils revendiquent une compensation de la baisse de cette subvention implicite. Et si les actionnaires continuent de croire qu’ils seront secourus en cas de difficultés, ils seront de nouveau incités à faire prendre davantage de risque à leur banque. Il est ainsi primordial de responsabiliser les actionnaires et de lutter à tout prix contre l’aléa moral sans pour autant décourager les banques de financer des projets audacieux à condition qu’elles en assument les risques. Des mesures crédibles doivent responsabiliser pleinement les actionnaires et les créanciers de la banque bénéficiant de la prise de risque. Il est nécessaire que des outils, tels que dette subordonnée, capital contingent ou autres instruments hybrides qui restent à inventer, puissent effectivement dédouaner le contribuable en cas de futures crises sans risquer de mettre en péril le système financier. Le gradualisme de la prise en compte du ratio de levier, surveillé avant d’être imposé, devrait permettre, avec l’ensemble du dispositif de Bâle 3, d’accroître la solidité du système bancaire sans nuire à son efficacité dans le financement de l’économie.

Conclusion

18L’introduction d’une contrainte en termes de ratio de levier en complément de celle du ratio de capital ajusté du risque est fondée sur plusieurs arguments. Ceux-ci comprennent notamment la complexité et la probable sous-évaluation du niveau de risque qui peuvent résulter de l’utilisation des modèles internes des banques. Le ratio de levier est susceptible de contenir de l’information non véhiculée par le ratio de capital ajusté du risque. Il permet aussi de limiter le recours excessif à l’endettement bancaire pendant les périodes d’embellie économique et atténue le problème de procyclicité du capital réglementaire qui se manifeste lors des retournements de conjoncture. En outre, la définition du ratio de levier adoptée par le comité de Bâle a le mérite de proposer un ratio de levier économique en incluant les activités du hors-bilan négligées dans le cas américain.

19Le ratio de levier n’est considéré qu’en tant que complément du ratio de capital pondéré. Ainsi, cette coexistence devrait assurer que la réhabilitation du ratio de levier ne soit pas un retour en arrière comme certains auteurs semblent le penser en raison essentiellement de l’absence de différenciation des risques dans la prise en compte de l’exposition totale des banques [25]. L’absence actuelle de pratiques comptables communes dans le calcul du ratio de levier reste cependant un point préoccupant.

20Le ratio de levier est une composante de la grande réforme de Bâle 3 dont la mise en œuvre complète n’interviendra pas avant janvier 2019. Cette régulation plus contraignante de l’activité des banques repose sur un arbitrage où l’emporteraient les conséquences positives d’une plus grande stabilité financière à moyen et long terme sur celles d’une possible réduction de l’efficacité du système bancaire dans les phases hautes du cycle. L’analyse de l’interaction des différents éléments réglementaires de Bâle 3 appelle donc nécessairement de nouvelles recherches pour évaluer l’efficacité de l’ensemble du dispositif. Mais on peut espérer dès à présent que le ratio de levier limitera les arbitrages réglementaires permis par des contraintes de capital plus sophistiquées et contribuera ainsi à renforcer la solidité du système bancaire mondial.

Bibliographie

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Date de mise en ligne : 09/07/2012.

https://doi.org/10.3917/reco.634.0809

Notes

  • [*]
    Université de Limoges, lape. Correspondance : 5 rue Félix Éboué, BP 3127, 87031 Limoges, France. Courriels : clovis.rugemintwari@unilim.fr (auteur correspondant), alain.sauviat@unilim.fr, amine.tarazi@unilim.fr
  • [1]
    Un cas exemplaire est celui des deux Majors suisses (ubs et Credit Suisse Group-csg). Elles étaient parmi les banques les mieux capitalisées au monde du point de vue du ratio de capital pondéré de Bâle 2 et parmi les moins bien capitalisées sur la base du ratio simple de levier (Hildebrand [2008], ocde [2009]). Un autre exemple frappant est celui de la Northern Rock en juin 2007 juste avant la course aux dépôts dont elle a fait l’objet. Son ratio Tier 1 pondéré était supérieur à 11 % et son ratio de levier inférieur à 2 % (le p-dg a reconnu avoir distribué un dividende confortable aux actionnaires de la banque car il jugeait que le niveau des fonds propres était largement supérieur à celui requis par Bâle 2 !) (voir Rochet [2008] et Blundell-Wignall et Atkinson [2008]).
  • [2]
    Furfine [2001], Repullo et Suarez [2004], Rime [2005], Feess et Hege [2008] et Hakenes et Schnabel [2011] modélisent les situations où les banques sont soumises soit au ratio ajusté du risque à la Bâle 2, soit au ratio de capital à la Bâle 1 en ne considérant que la seule catégorie d’actifs ayant une pondération de 100 %, ce qui correspond au simple ratio de levier. Empiriquement, Ruthenberg et Landskroner [2008], par exemple, comparent les tarifications de prêt sous les réglementations de capital sensible et non sensible à la prise de risque.
  • [3]
    Les récentes augmentations des pondérations de risque pour certains actifs en sont l’illustration (Hannoun [2010]).
  • [4]
    En fait, Danielsson préconise le rejet même des modèles internes des banques et soutient que la méthode fruste de ratio simple de levier devrait être la seule base de régulation des banques. Blundell-Wignall et Atkinson [2010] et Hellwig [2010] vont dans le même sens. Leur argumentation s’appuie sur la complexité excessive mais surtout sur la défaillance avérée des mesures pondérées des risques. Hellwig suggère des ratios de levier de niveaux très élevés, dans un intervalle de 10-30 %, en remplacement des ratios pondérés de capital qui, selon lui, favorisent l’arbitrage réglementaire et accroissent ainsi la prise de risque excessive des banques.
  • [5]
    Cartapanis [2011] utilise le terme de levier incorporé.
  • [6]
    Cette endogénéité existe en période calme et elle devient particulièrement dangereuse en cas d’instabilité car les modèles internes poussent les banques à agir toutes de la même manière et à amplifier la crise. Au final, au lieu de protéger le système bancaire contre une crise systémique, l’utilisation de ces modèles pourrait l’aggraver.
  • [7]
    Il est à noter que, contrairement au cas classique où ce sont les déposants qui paniquent, ici ce sont les banques qui se ruent sur d’autres banques !
  • [8]
    Rôle que ne peut pas jouer le ratio pondéré en raison de la diminution du niveau estimé des risques pendant le boom.
  • [9]
    Signalons que la contrainte en termes de levier a été introduite fin 2008 pour les deux plus grandes banques suisses ubs et Credit Suisse Group (csg). Elle devrait être effective dès 2013 (sfbc [2008]). Des discussions sont en cours pour son élargissement à l’ensemble des banques suisses (Finma [2010], p. 10).
  • [10]
    Ce minimum de ratio de levier est abaissé à 3 % pour les banques qui sont très bien notées par les superviseurs.
  • [11]
    Ces catégories sont : bien – (? 5 %) et adéquatement – (? 4 %) capitalisées et ; sous- (< 4 %) et substantiellement sous- (< 3 %) capitalisées. Lorsqu’une banque affiche un ratio de capital en dessous du seuil adéquat, elle est considérée comme sous-capitalisée. Cela déclenche une action correctrice immédiate du superviseur sous la forme d’une restriction des activités de la banque. Cette restriction est d’autant plus stricte que la banque est sous-capitalisée.
  • [12]
    bcbs est l’acronyme de Basel Committee on Banking Supervision, organisme abrité par la Banque des règlements internationaux (bri).
  • [13]
    Les six grandes banques canadiennes comptent pour plus de 90 % du total des actifs bancaires. Un levier d’endettement maximal de 30 signifie que ces grandes banques doivent détenir au moins 1 $ canadien en fonds propres pour un financement de 30 $ canadiens d’actifs.
  • [14]
    Ce ratio d’endettement maximal de 20 est plus restrictif que le ratio de levier minimal de 4 % requis aux États-Unis, d’autant plus que la réglementation canadienne inclut des éléments du hors-bilan.
  • [15]
    Aucune contrainte réglementaire sur le levier n’existe en Europe sur la période étudiée.
  • [16]
    Une étude de Standard & Poor’s [2010] montre, par exemple, que le total des actifs de la Deutsche Bank à la fin de l’année 2009, qui est de 891 milliards d’euros avec la méthode comptable américaine gaap, s’élève à 1 501 milliards avec la méthode ifrs, soit presque 50 % en plus.
  • [17]
    Noyer [2011] illustre les conséquences sur le ratio de levier qui résultent des différences entre les méthodes comptables ifrs et gaap. Il se félicite du projet de convergence des deux agences comptables à l’étude et souligne également les difficultés à relever pour que cette convergence soit effective. L’article 165 de Bâle 3 (bcbs [2010b], p. 63) précise que la question de différences entre systèmes comptables sera prise en compte pendant la période de mise en œuvre pour éviter toute distorsion potentielle.
  • [18]
    Les détails sur le dénominateur sont clairement exposés dans bcbs [2010b] p. 61-63.
  • [19]
    Seuls les engagements révocables sans condition par la banque, à tout moment et sans préavis, bénéficient d’un facteur de conversion de 10 %.
  • [20]
    Respectivement 4,5 %, 6 % et 8 % des actifs pondérés du risque doivent être couverts par le montant des actions ordinaires (coreTier1), des fonds propres de base (Tier1) et du total des fonds propres.
  • [21]
    Un volant de conservation de 0,625 % sera instauré en janvier 2016 et augmentera de ce montant chaque année pendant trois ans pour atteindre 2,5 % en janvier 2019, date d’application complète du dispositif de Bâle 3.
  • [22]
    Les banques exercent normalement leur activité, mais elles sont contraintes dans la distribution de leurs bénéfices tant qu’elles ne satisfont pas aux exigences du volant de conservation. Le volant contracyclique est laissé à l’appréciation des autorités nationales en fonction de l’évolution de la croissance des crédits. Lorsqu’il est mis en œuvre, il aboutit à augmenter la taille du volant de conservation et fonctionne donc selon le même principe.
  • [23]
    sifis est l’acronyme de Systemically Important Financial Institutions. g-sifis, où G signifie Global, est également utilisé (Wellink [2011], p. 4).
  • [24]
    Les détenteurs de ces titres devraient jouer un rôle disciplinant car ils sont censés exiger une compensation proportionnelle au risque de conversion.
  • [25]
    Thoraval [2010, p. 17] qualifie le ratio de levier de « préhistorique » aux yeux des banquiers européens ! Frenkel et Rudolf [2010, p. 61] considèrent que l’introduction du ratio de levier pourrait susciter des incitations perverses en termes d’allocation d’actifs car il ne rétribue pas les banques qui financent des activités faiblement risquées. Kiema et Jokivuolle [2010] estiment que cela pourrait conduire à une diminution de financement d’actifs faiblement risqués au profit de ceux plus risqués remettant en cause l’objectif de limitation de prise de risque excessive.
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