Notes
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Universität Basel et EconomiX, Université Paris Ouest Nanterre La Défense. Correspondance : EconomiX, bâtiment K-125, 20 avenue de la République, 92001 Nanterre. Courriel :Mariana.Rojas-Breu@unibas.ch
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[1]
Par exemple, He, Huang et Wright [2008] considèrent un modèle où l’inflation peut être favorable au bien-être car elle rend le vol d’argent moins profitable.
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[2]
Aiyagari et Williamson [2000] présentent des résultats numériques sur cet effet de l’inflation.
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[3]
Différents arguments ont été proposés pour rationaliser des cibles d’inflation positive. La littérature s’intéressant au rôle du système financier pour étayer l’investissement a montré que l’effet bénéfique de l’inflation vient de ce qu’elle favorise l’efficacité de l’intermédiation financière (Smith [2002]). L’existence des cibles positives du taux nominal d’intérêt est aussi justifiée quand la probabilité pour la politique monétaire d’atteindre le seuil minimal du taux d’intérêt n’est pas négligeable (Eggertsson et Woodford [2003]) ou lorsque l’effort de recherche des coéchangistes est endogène (Berentsen, Rocheteau et Shi [2007]).
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[4]
Voir Giovannini et Turtleboom [1994] pour un résumé de cette littérature. Des travaux récents qui analysent la concurrence entre monnaies en imposant un coût à l’utilisation de la monnaie étrangère sont Matsui [1998] et Engineer [2000].
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[5]
Pour simplifier la notation, nous n’allons pas expliciter la consommation du bien domestique au pm car elle n’est pas nécessaire pour la présentation de nos résultats.
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[6]
L’existence d’un taux d’intérêt plus faible que celui qui apure le marché du crédit du fait des contraintes d’endettement est aussi présente chez Berentsen et al. [2007] et Kehoe et Levine [1993].
1Le caractère bénéfique ou pernicieux de l ’inflation pour l’activité économique et le bien-être demeure un débat central de nos jours, qui s’avère particulièrement important pour établir les objectifs de la politique monétaire. À cet égard, les cibles d’inflation choisies par les banques centrales sont en contradiction avec une prédiction bien établie de la théorie monétaire, à savoir que le bien-être est maximisé lorsqu’il n’y a pas de coût à détenir des encaisses monétaires, en accord avec la règle de Friedman (i.e., lorsque le taux nominal d’intérêt est zéro). C’est pour cette raison que, dans les dernières années, plusieurs travaux ont cherché à identifier des conditions sous lesquelles l’inflation peut améliorer le bien-être social, de manière à réconcilier la théorie monétaire avec la pratique des banques centrales. Selon cette littérature, une inflation positive peut être souhaitable lorsqu’elle punit des activités socialement coûteuses qui s’effectuent avec de la monnaie externe [1]. Dans cet esprit, un des arguments avancés est que l’inflation augmente le coût de faire défaut sur les dettes lorsque les agents ayant fait défaut sont exclus du système bancaire et condamnés à n’utiliser que la monnaie externe. Les articles de Berentsen, Camera et Waller [2007], Díaz et Perera-Tallo [2009] et Antinolfi, Azariadis et Bullard [2007] développent des modèles où ce mécanisme donne lieu à un effet positif de l’inflation en termes de bien-être [2]. Bien que la règle de Friedman soit en général optimale dans ces modèles, des traits de l’environnement peuvent impliquer qu’elle n’est pas réalisable ; dans ce cas, ces travaux montrent que l’allocation optimale est atteinte avec une inflation positive [3].
2Or, cette littérature qui donne appui à l’optimalité d’un taux positif d’inflation fait face à une critique majeure concernant la généralité de son résultat, puisqu’il n’est pas robuste à l’introduction d’une deuxième monnaie avec un taux d’inflation relativement faible. En effet, les agents préféreront utiliser une monnaie moins inflationniste dès lors qu’elle est disponible, en abandonnant la monnaie la plus inflationniste. Les effets bénéfiques de l’inflation ne pourraient être constatés car l’utilisation de la monnaie dont l’inflation est plus élevée ne pourrait correspondre à un équilibre.
3L’objectif de cet article est de proposer un cadre dans lequel l’inflation de la monnaie nationale peut avoir un effet positif sur le bien-être, tout en étant en concurrence avec une monnaie étrangère moins inflationniste. Pour que les résultats soient plus clairs, aucune différence autre que le taux d’inflation n’est supposée exister entre les monnaies : la monnaie étrangère n’est affectée par aucun coût ni contrainte légale. Le cadre présenté reprend l’argument selon lequel une certaine inflation peut être souhaitable par le biais des incitations à ne pas faire défaut en cas de crédit. Sa spécificité est que, puisque deux monnaies sont disponibles, la monnaie dans laquelle le crédit est libellé peut agir comme un dispositif d’engagement pour les emprunteurs. Les banques peuvent uniquement sanctionner les agents pendant un certain temps, ce qui implique que les agents désirant faire défaut doivent attendre pour dépenser leurs emprunts. En empruntant de la monnaie la plus inflationniste, les agents s’avèrent plus crédibles quant à leur disposition à rembourser l’emprunt, car l’inflation diminue sa valeur et donc le coût d’opportunité de le rembourser. Ainsi, l’inflation relâche les contraintes d’endettement, ce qui assure la préférence des agents pour la monnaie la plus inflationniste et améliore le bien-être.
4La contribution proposée dans cet article est empiriquement pertinente puisque, dans les économies modernes, plusieurs monnaies souveraines coexistent. En particulier, dans les économies en développement avec des taux d’inflation élevés, des monnaies internationales, moins inflationnistes, sont souvent disponibles, ce qui a donné lieu à une large littérature sur la concurrence entre monnaies et la dollarisation [4]. Il paraît nécessaire donc de pouvoir distinguer les cas où l’inflation a des conséquences bénéfiques des cas où les agents ont recours aux options de sortie, telles que des monnaies étrangères, suite à une inflation accrue de la monnaie nationale.
5La première section décrit l’environnement. Deuxièmement, les décisions optimales des agents sont présentées. L’effet de l’inflation sur le bien-être est analysé dans la troisième section. La quatrième section conclut.
L’environnement
6Nous développons un modèle basé sur Lagos et Wright [2005]. Plus précisément, nous empruntons la formalisation de départ à Berentsen et al. [2007]. Le temps est discret. Il y a un continuum de masse unitaire d’agents à durée de vie infinie et un bien divisible et non stockable disponible dans des nombreuses variétés, chaque agent pouvant produire une seule variété. Le taux d’escompte entre périodes est ? ? (0, 1).
Les préférences
7Dans chaque période, deux marchés concurrentiels ouvrent séquentiellement. Avant l’ouverture du premier marché (pm), les agents reçoivent un choc de préférence : soit consommer leur procure une utilité positive, auquel cas ils deviennent « consommateurs » (probabilité (1 — v)), soit consommer ne leur procure aucune utilité et ils deviennent « vendeurs » (probabilité v). Après ce premier choc, les consommateurs reçoivent un deuxième choc de préférence : soit ils préfèrent la variété du bien produite par eux-mêmes ou « bien domestique » (probabilité c/(1 – v)), soit ils désirent consommer une variété du bien produite par d’autres agents ou « bien marchand » (probabilité a/(1 –v), avec a = 1 — v — c). Dans le pm, les consommateurs obtiennent une utilité u(q) = ln q lorsqu’ils consomment une quantité q de bien. Pour les vendeurs, produire qv représente une désutilité c(q) = qv.
8Dans le second marché (sm), tous les agents peuvent consommer et produire. Les agents consomment une quantité x qui leur rapporte une utilité u(x) = ln x et produisent une quantité y, avec un coût de production linéaire. Les consommateurs à préférence pour le bien domestique consomment la variété produite par eux-mêmes, alors que les consommateurs à préférence pour le bien marchand consomment des biens échangés sur le marché. L’utilité de l’agent représentatif est donc [5] :
Les monnaies
9Il y a deux monnaies sans utilité intrinsèque, la « monnaie nationale » et la « monnaie étrangère », émises par une banque centrale dont les décisions sont exogènes. Ce qui importe pour notre but est que deux monnaies avec des taux d’inflation potentiellement différents soient disponibles. On désigne Mn,t(Mt,e) la quantité de monnaie nationale (étrangère) dans la période t. La masse de monnaie nationale (étrangère) croît à un taux ?n > 0(?e > 0). Les agents reçoivent transferts de la banque centrale égaux à (?n – 1)M_1,n et (?e – 1)M_1,e au début du sm en t, de sorte que Mt,n = ? nM_1,n et Mt,e = ?eM_1,e, où — 1 désigne la période précédente. La conversion sans coût des monnaies est possible durant le sm. Nous supposons qu’il existe des agents, dont le comportement est exogène, qui sont prêts à produire en échange tant de la monnaie nationale que de la monnaie étrangère. Cette hypothèse a pour but d’autoriser des déviations des agents qui voudraient utiliser une monnaie différente de celle choisie par les autres. Toutefois, elle ne suppose pas une différence entre les monnaies. Aucun coût ni contrainte légale n’est supposé affecter les monnaies.
Les banques
10Les agents peuvent déposer et emprunter, tant la monnaie nationale que la monnaie étrangère, auprès des banques. Les activités des banques ont lieu après le premier choc de préférence et avant le deuxième. Les banques sont concurrentielles et doivent respecter un ratio r des réserves obligatoires. Les prêts et les dépôts sont effectués au début de la période et remboursés à la fin de la même période. Les échangistes sont anonymes, ce qui exclut le crédit bilatéral, mais ne contredit pas l’octroi des prêts puisqu’il ne requiert que l’identification des agents par les banques.
11L’hypothèse clé concerne la technologie dont disposent les banques pour obtenir le remboursement des crédits. Cette technologie est limitée : les banques peuvent uniquement l’appliquer aux dettes des agents participant au sm. Les agents qui n’échangent pas sur le marché ne peuvent être forcés à rembourser leurs dettes. En plus, le registre des banques recensant les emprunteurs s’efface au bout d’une période. De ce fait, les banques ne peuvent contrôler les dettes des agents ayant fait défaut dans le passé. Les banques partagent le registre sur lequel sont inscrits les agents ayant fait défaut, ce qui leur permet d’exclure ces agents des activités bancaires pour une période (par simplicité également, pendant une période les agents ayant fait défaut sont exclus des transferts monétaires). Les banques font face à un coût ? par unité de monnaie prêtée, qui représente les ressources consacrées à la technologie de contrôle des dettes et au registre des emprunteurs.
Le premier marché et le second marché
12On désigne par W(mn, me, dn, de, ln, le) la valeur espérée de l’entrée sur le sm avec des montants mn et me de monnaie nationale et de monnaie étrangère, des dépôts en monnaie nationale et en monnaie étrangère dn et de et d’emprunts en monnaie nationale et en monnaie étrangère ln et le. V(mn,me) est la valeur espérée d’entrer sur le pm avec des montants mn et me de monnaie nationale et de monnaie étrangère reportés de la période précédente. Le programme pour un agent participant au sm pour une période représentative t est :
13où j = n, e et n et e désignent la monnaie nationale et la monnaie étrangère, respectivement. ?n(?e) est le prix de la monnaie nationale (étrangère) sur le sm, id est le taux d’intérêt créditeur et i1 est le taux d’intérêt débiteur. Les conditions de premier ordre et les conditions du théorème de l’enveloppe sont
14où ?V+ 1/?m+ 1, j est la valeur marginale de la monnaie nationale ou étrangère reportée à la période suivante. Les consommateurs qui ne participent pas au sm choisissent leur consommation en fonction de (3). Par contre, ils ne peuvent ajuster leurs encaisses monétaires car ils n’effectuent pas d’échanges. La valeur espérée d’un agent qui détient mn et me avant le pm est :
15où ma, j, mv, j et mc, j sont les montants de monnaie nationale ou étrangère qu’un consommateur qui préfère le bien marchand, un consommateur qui préfère le bien domestique et un vendeur apportent sur le sm, respectivement.
16Dans le pm, les vendeurs choisissent la quantité du bien à être échangée contre chaque monnaie, qvn et qve, et la quantité de monnaie à encaisser auprès des banques. Le problème pour un vendeur est donc :
17où pn(p e) est le prix du bien dans le pm en monnaie nationale (étrangère). En utilisant (4), la condition de premier ordre pour qvn et qve est :
18Les consommateurs doivent choisir la quantité des biens à acheter avec chaque monnaie, qn et qe, ainsi que les montants de monnaie nationale et étrangère à emprunter, ln et le, avant d’apprendre la variété du bien qu’ils préfèrent. Leur programme est :
19où ?j est le montant maximal d’emprunt. Les acheteurs maximisent leur utilité sous la contrainte monétaire et sous la contrainte d’endettement. ?j et ?l,j sont les multiplicateurs associés à ces deux contraintes. Les conditions de premier ordre pour qn, qe, ln et le deviennent, en utilisant (4) et (6) :
Équilibre avec circulation de la monnaie nationale
20Nous considérons des équilibres symétriques et stationnaires dans lesquels ?n et ?e sont invariants et les encaisses réelles en fin de période sont constantes :
21où Mn = mn et Me = me. Le but principal de cette section est de caractériser l’équilibre avec circulation de la monnaie nationale ; i.e. l’équilibre dans lequel ?n > 0 et ?e = 0. Pour simplifier la notation, nous allons supprimer l’indice indiquant les monnaies, car dans cet équilibre seule la monnaie nationale est utilisée.
22À l’équilibre, la condition d’apurement des marchés doit se vérifier :
23De plus, l’hypothèse par laquelle les banques sont concurrentielles assure qu’elles ne font pas de profit à l’équilibre :
La valeur marginale de la monnaie
24À partir de (5), en tenant compte de (3), (4), (6) et (7), l’équilibre stationnaire doit vérifier :
25Selon (10), le coût d’une unité supplémentaire de monnaie nationale (représenté par le membre de gauche) doit être égal à la valeur marginale d’une unité de monnaie, donnée par l’utilité marginale de la consommation du bien dans le cas d’une préférence pour le bien marchand, avec probabilité a, et par l’intérêt obtenu si l’on est vendeur, avec probabilité v.
La contrainte d’endettement
26Les consommateurs ayant une préférence pour le bien marchand participent toujours au sm car ils désirent consommer une quantité positive du bien qui peut être acquise uniquement sur le marché. De cette manière, leurs crédits sont toujours remboursés car, autrement, les banques pourraient les sanctionner. Cependant, les agents à préférence pour le bien domestique n’ont pas besoin d’échanger afin de consommer et, donc, peuvent choisir de ne pas participer au sm afin d’éviter de rembourser leurs dettes. Pour cette raison, les banques déterminent une contrainte d’endettement de manière à ce que l’utilité espérée d’un agent à préférence pour le bien domestique qui rembourse sa dette est égale à celle d’un agent à préférence pour le bien domestique qui fait défaut. Les banques choisissent tel que :
27où le membre de gauche est l’utilité espérée si l’agent rembourse sa dette, auquel cas il travaille yc heures, et le membre de droite est l’utilité espérée si l’agent fait défaut, auquel cas il travaille y*c heures. correspond à la valeur espérée pour l’agent qui fait défaut en t. La contrainte d’endettement est donc :
28où ya et yv sont les heures travaillées par l’agent à préférence pour le bien marchand et par le vendeur qui ne font pas défaut. Le gain pour un agent qui fait défaut en t est de s’épargner des heures de travail en t, car il ne paye pas l’intérêt de son emprunt ; i.e., y*c < yc. De plus, comme l’emprunt n’est pas dépensé en t, l’agent faisant défaut le rapporte en t + 1. Cependant, un agent qui fait défaut n’a pas accès au système bancaire en t + 1 car le registre des agents faisant défaut en t est actif pour une période. Le montant emprunté en t détenu en t + 1 ainsi que l’exclusion du système bancaire impliquent que la quantité potentiellement consommée au pm et les heures travaillées sont différentes. On les distingue par un tilde au-dessus de chaque variable. Comme le registre des emprunteurs dure une période, un agent qui fait défaut en t a, à partir de t + 2, la même utilité espérée qu’un agent n’ayant pas fait défaut. C’est pour cela que les termes qui figurent dans la contrainte (11) ne concernent que les périodes t et t + 1.
29La quantité est égale à (m_1 + l_1)/p car les encaisses monétaires dans la période qui suit le défaut sont égales aux encaisses monétaires en t plus la monnaie empruntée en t (non remboursée). Comme l est un multiple de m_1, l_1 = l/?n. De plus, à l’équilibre l = pq — m_1. On utilise (6) et (8) pour écrire :
30Par conséquent, . Après calcul des heures travaillées, (11) s’écrit :
31Le membre de gauche est le gain de ne pas faire défaut. Ce gain est dû à la différence d’utilité entre consommer q et consommer , grâce à l’emprunt en t + 1, net du coût espéré d’utilisation du système bancaire en
, qui résulte de la différence entre l’intérêt perçu en tant que déposant et l’intérêt payé en tant que débiteur, et les heures travaillées pour rembourser l’emprunt au cas où il a été effectivement dépensé, avec probabilité
. À ce gain il faut ajouter les transferts reçus en t + 1, égaux à
. Le membre de droite est le coût de rembourser la dette : le taux de l’intérêt multiplié par la valeur réelle de l’emprunt en
. De plus, si l’agent fait défaut et s’il ne dépense pas l’emprunt sur le pm en t + 1, avec probabilité (1 – a), il peut acheter des biens sur le sm en t + 1 pour une valeur de
. Ce montant est donc un coût d’opportunité pour l’agent qui ne fait pas défaut. À l’équilibre,
; en utilisant (8), (13) devient :
32Définition 1. Un équilibre avec circulation de la monnaie nationale est satisfaisant (9), (10), (12) et (14).
Effet de l’inflation sur le bien-être
33Le but principal de cet article est de déterminer de quelle manière l’utilité de l’agent représentatif est affectée lorsque le taux d’inflation de la monnaie nationale augmente et si cette monnaie est effectivement utilisée lorsqu’une deuxième monnaie moins inflationniste est disponible. À ce fin, il convient de calculer la dérivée de l’utilité espérée par rapport à ?n. À partir de (1) et (8), étant donné que y = aya + vyv + cyc, on obtient :
34Par conséquent, l’effet de ?n sur l’utilité espérée est déterminé par l’effet de ?n sur q. On définit comme la valeur de ?n pour laquelle id = 0.
35Lemme 1. Le taux minimal d’inflation compatible avec crédit, , est plus grand que 1.
36Démonstration. En remplaçant il par ? en (14), on vérifie que seul constitue une solution.
37On définit r* comme la valeur de r qui satisfait .
38Proposition 1. Si , une augmentation de ?n améliore le bien-être.
39Démonstration. dq/d?n est calculée à partir de (14). sont calculées à partir de (9), (10) et (12). dq/d ?n évaluée à
est :
40où l’on a pris en compte (10) lorsque . Le dénominateur à droite de l’égalité est positif pour toutes les valeurs de paramètres. Pour que le numérateur soit positif, une condition suffisante est que
. Donc, si
0. Comme il est nécessaire que
pour qu’un équilibre avec crédit existe, dq/d?n > 0 implique dW/d?n > 0.
41Proposition 2. Une augmentation de ?n qui entraîne une augmentation de q donne lieu à une augmentation de id, de il et de ?.
42Démonstration. D’après (10), on vérifie que, si q augmente avec ?n, alors id augmente, auquel cas (9) implique une augmentation de il. Comme vq = [v + r(l – v)]?l, le signe des variations de q et de ? avec ?n est le même.
43D’après la Proposition 1, si r est suffisamment faible, une augmentation de ?n a un effet positif sur le bien-être, car elle entraîne une augmentation de q. Le canal par lequel q augmente se comprend avec la Proposition 2. L’inflation diminue le gain qu’un agent a à faire défaut, car elle réduit la valeur que l’argent emprunté aura quand l’agent faisant défaut pourra le dépenser (en t + 1). De ce fait, la contrainte d’endettement est relâchée, ce qui autorise une augmentation de il et, pour respecter la condition de profit nul par les banques, de id. L’existence de la contrainte d’endettement entraîne une augmentation de id plus forte que ce qu’elle serait s’il n’existait pas de limites à l’obligation de rembourser les dettes, car la valeur initiale de id est plus faible que la valeur de id lorsque les agents ne sont pas contraints par le montant maximal d’emprunt [6]. Par conséquent, ? augmente (p diminue) du fait de l’augmentation de la demande de monnaie nationale, ce qui permet aux agents détenant de la monnaie nationale de consommer plus. Nous vérifions l’effet positif de l’inflation sur le bien-être malgré la disponibilité d’une deuxième monnaie moins inflationniste. La condition sur r implique que il augmente peu lorsque ?n augmente (autrement, les incitations à rembourser la dette ne seraient pas assurées) car les banques doivent compenser un montant faible des dépôts par prêt octroyé, relativement à la dépréciation de l’argent emprunté, résumée par le terme .
Conclusion
44Cet article a présenté un modèle dans lequel les agents peuvent choisir entre deux monnaies pour effectuer leurs transactions afin d’étudier l’impact de l’inflation de la monnaie nationale sur le bien-être lorsqu’une deuxième monnaie opère comme option de sortie. L’inclusion des banques, ainsi que l’existence d’un pouvoir limité à rendre exécutoire le remboursement des dettes, donne lieu à un effet positif de l’inflation de la monnaie nationale sur le bien-être. L’extension la plus naturelle de cet article consiste à considérer la technologie contraignant au remboursement des dettes comme une variable de politique, susceptible d’être affectée par les décisions du gouvernement. Par ailleurs, le cas de deux pays pourrait être envisagé, ce qui permettrait d’effectuer une comparaison avec la littérature sur les unions monétaires.
Références bibliographiques
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- Berentsen A., Rocheteau G. et Shi S. [2007], « Friedman meets Hosios: efficiency in search models of money », The Economic Journal, 117, p. 174-195.
- Diaz A. et Perera-Tallo F. [2009], « Credit and inflation under borrower’s lack of commitment », Manuscrit, Universidad Carlos III.
- Eggertsson G. et Woodford M. [2003], « The zero bound on interest rates and optimal monetary policy », Brookings Papers on Economic Activity, 1, p. 139-233.
- Engineer M. [2000], « Currency transaction costs and competing fiat currencies », Journal of International Economics, 52, p. 113-136.
- Giovannini A. et Turtleboom A. [1994], « Currency Substitution », dans Frederick van der Ploeg (ed.), Handbook of International Macroeconomics, Cambridge, Blackwell Publishers.
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- Matsui A. [1998], « Strong currency and weak currency », Journal of the Japanese and International Economies, 12, p. 305-333.
- Smith B. [2002], « Monetary policy, banking crises, and the Friedman rule », American Economic Review, 92, p. 128-134.
Notes
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[*]
Universität Basel et EconomiX, Université Paris Ouest Nanterre La Défense. Correspondance : EconomiX, bâtiment K-125, 20 avenue de la République, 92001 Nanterre. Courriel :Mariana.Rojas-Breu@unibas.ch
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[1]
Par exemple, He, Huang et Wright [2008] considèrent un modèle où l’inflation peut être favorable au bien-être car elle rend le vol d’argent moins profitable.
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[2]
Aiyagari et Williamson [2000] présentent des résultats numériques sur cet effet de l’inflation.
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Différents arguments ont été proposés pour rationaliser des cibles d’inflation positive. La littérature s’intéressant au rôle du système financier pour étayer l’investissement a montré que l’effet bénéfique de l’inflation vient de ce qu’elle favorise l’efficacité de l’intermédiation financière (Smith [2002]). L’existence des cibles positives du taux nominal d’intérêt est aussi justifiée quand la probabilité pour la politique monétaire d’atteindre le seuil minimal du taux d’intérêt n’est pas négligeable (Eggertsson et Woodford [2003]) ou lorsque l’effort de recherche des coéchangistes est endogène (Berentsen, Rocheteau et Shi [2007]).
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Voir Giovannini et Turtleboom [1994] pour un résumé de cette littérature. Des travaux récents qui analysent la concurrence entre monnaies en imposant un coût à l’utilisation de la monnaie étrangère sont Matsui [1998] et Engineer [2000].
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Pour simplifier la notation, nous n’allons pas expliciter la consommation du bien domestique au pm car elle n’est pas nécessaire pour la présentation de nos résultats.
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[6]
L’existence d’un taux d’intérêt plus faible que celui qui apure le marché du crédit du fait des contraintes d’endettement est aussi présente chez Berentsen et al. [2007] et Kehoe et Levine [1993].