Couverture de RECO_602

Article de revue

Les hôpitaux français face au paiement prospectif au cas

La mise en œuvre de la tarification à l'activité

Pages 457 à 470

Notes

  • [*]
    Essec (chaire d’Économie de la santé), avenue Bernard-Hirsch, BP 50105, 95021 Cergy Pontoise Cedex. Courriel : pouvourville@ essec. fr
  • [1]
    Sur une suggestion de l’auteur, ils ont cependant reçu un début de mise en place par l’assurance maladie dans le cadre de la loi de financement de la Sécurité sociale 2007 sous la forme d’une entente préalable pour des hospitalisations complètes dans le cas où l’intervention prévue peut se faire en hôpital de jour.
  • [2]
    Nous ne donnons pas ici à ce terme exactement le même sens que celui donné dans la littérature économique, pour qui le mix prospectif/rétrospectif existe au sein même du paiement au cas, par exemple par le mélange d’un tarif forfaitaire et d’un ajustement sur la sévérité des patients au sein d’un même drg/ghm.
  • [3]
    Moyennant le respect de règles de bon usage.
  • [4]
    Le caractère rétrospectif de ces financements est encadré par des règles, par la négociation et par la mise en place progressive de mécanismes de partage des risques.

Introduction

1À la fin des années 1970, des travaux de recherche initiés aux États-Unis ont débouché sur une innovation majeure pour la régulation financière et la gestion des hôpitaux, une classification des séjours hospitaliers, les Diagnosis Related Groups (drg), permettant de décrire avec un nombre réduit de classes l’activité de court séjour et de comparer la productivité des établissements entre eux. Pour la première fois, les gestionnaires hospitaliers et les payeurs disposaient d’un outil leur permettant d’observer la production hospitalière à partir des caractéristiques des malades traités et des traitements mis en œuvre. Medicare, le fonds fédéral d’assurance maladie des personnes âgées, a utilisé les drgs pour mettre en place un système de paiement prospectif au cas et remplacer un coûteux système de paiement rétrospectif à la journée (de Pouvourville [1990]).

2Le système drg a été introduit en France en 1982 dans le cadre du Programme de médicalisation du système d’information (pmsi), les drg devenant des Groupes homogènes de malades (ghm) (Kimberly, de Pouvourville [1993]). Depuis 2004, cet outil est utilisé pour instaurer une forme de paiement prospectif au cas, la tarification à l’activité (ou T2A) dans les secteurs hospitaliers publics et privés.

3La T2A a été présentée lors de sa mise en œuvre comme une réforme majeure de financement des hôpitaux, instaurant une incitation à l’efficacité en coût. Désormais, les recettes d’un établissement sont directement liées à son activité, mesurée par sa production en séjours classés en ghm et en actes pour son activité de consultation et d’actes techniques réalisés en externes. Les nomenclatures de production donnent lieu à l’établissement d’un tarif national opposable à tous les producteurs de soins.

4Pour le secteur privé, cette réforme n’était pas un changement aussi important que pour le public : depuis toujours, les recettes des cliniques étaient liées à leur activité. La T2A introduit néanmoins un changement sensible, en forfaitisant et en uniformisant la rémunération des frais de séjour et en rapportant ce forfait à chaque ghm, assurant ainsi la comparabilité avec le secteur public.

5En revanche, dans le secteur public, la T2A présente une rupture majeure avec la procédure préexistante dite de budget global, fondée sur les mécanismes suivants. À partir d’un objectif annuel d’évolution des dépenses hospitalières du secteur public remboursées par l’assurance maladie (l’ondam) voté par le Parlement, une allocation régionale des masses budgétaires correspondantes était réalisée, charge aux agences régionales de l’hospitalisation (les arh) de les répartir entre les établissements sur une base des coûts historiques et, de façon marginale, sur la base de l’écart entre les coûts unitaires de chaque établissement et du coût moyen régional. Les établissements moins chers bénéficiaient alors d’une augmentation autorisée de leur budget historique plus élevée que les établissements plus chers.

6Cette procédure budgétaire avait ralenti la progression des dépenses hospitalières, mais elle était porteuse d’incitations à l’inefficience en coût : pour autant que la contrainte d’équilibre budgétaire était réelle, elle ne corrigeait qu’à la marge les disparités de coûts unitaires entre établissements. Elle pénalisait les établissements dynamiques en activité : pour rester à l’équilibre, ils devaient en effet financer les dépenses supplémentaires liées à un surcroît d’activité par des gains de productivité équivalents. Cela sanctionnait les établissements mal dotés et dynamiques, les établissements bien dotés ayant un slack plus important pour réaliser des gains de productivité. Les établissements peu dynamiques, chers ou moins chers, étaient peu pénalisés, puisque leur dotation budgétaire était indexée sur l’ondam. Enfin, du fait du caractère global de ce mécanisme, les équipes de direction des établissements publics avaient peu d’incitation à connaître leurs coûts de production.

7Ce mécanisme était de plus atténué par d’autres sources de financement. En premier lieu, il n’y a jamais eu de sanction forte des établissements déficitaires. En deuxième lieu, sur ce mécanisme central, se greffaient d’autres sources de financement ayant pour effet d’alléger la contrainte prospective, par exemple dans le cadre d’actions de santé publique décidées au niveau national.

8En principe, la T2A introduit des mécanismes vertueux incitant les établissements à faire des gains d’efficacité productive, de façon à aligner leurs coûts sur les tarifs nationaux. Les établissements qui parviennent à assurer leur équilibre financier ou qui dégagent des marges peuvent alors, soit les réinvestir dans des activités nouvelles et améliorer leur compétitivité par une diversification des services offerts, soit, dans le secteur privé, redistribuer le surplus entre les propriétaires ou les salariés. Les établissements déficitaires doivent parvenir à équilibrer leurs comptes soit en réduisant leurs coûts unitaires à activité constante, soit en augmentant leur activité pour diminuer leurs coûts fixes.

9Nous montrons, dans une première partie, que la T2A est certes un paiement prospectif au cas, mais qui n’a rien à voir avec le modèle américain dont elle s’inspire, car elle s’inscrit dans le contexte d’un système universel de couverture du risque maladie et dans une offre de soins hospitaliers autrement plus réglementée qu’aux États-Unis (§ 2 et 3). Dans la deuxième partie de l’article (§ 4), nous ferons d’abord la part des problématiques qui sont néanmoins communes aux deux modèles de régulation, puis celle des questions nouvelles que pose la mise en œuvre d’un paiement prospectif au cas dans un contexte hautement régulé. En conclusion (§ 5), on propose des pistes de réflexion pour aboutir à un mode de financement incitatif à l’efficience et équitable.

Le paiement prospectif au cas aux États-Unis

10En 1983, l’administration fédérale a adopté un paiement prospectif fondé sur les drgs pour le fonds Medicare. Un tarif forfaitaire national par cas a été instauré rapidement, couvrant l’ensemble des dépenses de soins à l’hôpital, hors honoraires des médecins. Des ajustements tarifaires par zone géographique ont été prévus pour tenir compte des différences de coûts salariaux et immobiliers, des activités d’enseignement et des patients présentant des coûts catastrophiques (outliers) et des différents types d’établissements (urbain/semi-urbain/rural). L’initiative de Medicare a donné le coup d’envoi à la généralisation d’un paiement par drg pour l’ensemble des assureurs sur le marché américain, mais dans un contexte très différent du contexte français.

Une offre assurantielle pluraliste et concurrentielle

11Premièrement, les États-Unis n’ont pas de système universel de couverture du risque santé ; à part le programme fédéral Medicare et les programmes joints Fédéral/État Medicaid pour les indigents, l’adhésion à un programme d’assurance maladie est volontaire et, dans la majorité des cas, comprise dans les contrats de travail. Les employeurs achètent des plans d’assurance à des organismes privés commerciaux ou à but non lucratif, qui fonctionnent quasiment tous aujourd’hui sur les bases du « managed care » : un modèle de gestion coordonnée de filières de services médicaux et sociaux, aussi bien de soins à l’hôpital et en clinique que de ceux délivrés aux assurés en aval et en amont de l’hospitalisation par la médecine de ville, au sein duquel l’assureur joue le rôle d’acheteur de soins et d’intégrateur. Pour les établissements hospitaliers, cela signifie, contrairement à la France, une pluralité de payeurs offrant des rémunérations différentes par cas traité. Une autre conséquence fondamentale est que la régulation des dépenses de santé est décentralisée économiquement. Quatre acteurs sont directement concernés par la croissance des dépenses, sans coordination au niveau national :

  • l’État fédéral, garant de la solvabilité à long terme du fonds Medicare et de la part prise dans les fonds Medicaid, ainsi que du financement de la Veteran Administration ;
  • les gouvernements de chaque État, pour les programmes Medicaid ;
  • les collectivités locales, qui peuvent développer leurs propres programmes de santé publique ;
  • enfin, les entreprises, pour lesquelles la couverture de leurs employés représente un coût salarial croissant.

Une régulation pluraliste de l’offre de soins

12La deuxième spécificité du système américain est l’existence de différences législatives et réglementaires entre États en matière d’accès au marché des soins. Certains États soumettent l’ouverture de nouvelles structures à une procédure d’autorisation qui s’apparente à la planification, les certificates of needs, mais ceci peut varier d’un État à l’autre. Par ailleurs, il n’existe aucune ou peu de restrictions à l’accès aux technologies innovantes dès lors que celles-ci peuvent être sources de nouveaux patients et de revenus supplémentaires.

Un secteur hospitalier privé

13Il existe une offre hospitalière publique aux États-Unis, fédérale (la Veteran Administration), étatique ou locale, mais l’offre dominante est privée à but non lucratif ou commerciale. La majorité des établissements hospitaliers sont donc des entreprises au gouvernement autonome, soumis à la sanction de la faillite et cherchant à maximiser leur marge. Dans notre perspective, la conséquence la plus importante est que les établissements ont intérêt à contrôler leurs coûts unitaires et à augmenter leur activité en offrant de nouveaux services et en prenant des parts de marché aux concurrents. Ils ont également plus de flexibilité que des structures publiques pour ajuster leurs effectifs en fonction de leurs résultats et de leurs perspectives de croissance. Enfin, dans un contexte d’offre de soins majoritairement privé, pour l’hôpital comme pour les soins de ville, les établissements hospitaliers ont intérêt à mener des stratégies renforçant leurs positions vis-à-vis des assureurs et à procéder à des opérations d’intégration verticale avec leur amont (les médecins qui leur adressent des patients) et leur aval (les établissements de soins de suite et de prise en charge à domicile) soit par accord contractuelle soit par absorption.

Le contexte français

14Le contexte français s’oppose point par point au contexte américain.

15L’existence d’un payeur unique (le couple État/assurance maladie) financé par des ressources collectives signifie la mise en place d’un tarif unique sur le territoire, et donc l’impossibilité pour les établissements hospitaliers de pratiquer des financements croisés par payeur comme aux États-Unis. Mais, surtout, cela impose une régulation macroéconomique des dépenses hospitalières, l’ondam, décliné par secteur de services et différencié entre les secteurs hospitaliers publics et privés. La régulation des dépenses se fait par un ajustement tarifaire en fonction de l’évolution des dépenses constatées (mécanisme d’ajustement prix/volume). Ce mécanisme incite fortement les établissements à développer leur activité sans nécessairement faire des efforts de coût, puisque les recettes des établissements les plus dynamiques souffrent moins de l’ajustement tarifaire.

16L’accès au marché hospitalier et à l’innovation est encadré par la planification de l’offre hospitalière au niveau régional, dans le cadre des schémas régionaux de l’organisation des soins (les sros).

17La planification repose, en France, sur les convictions suivantes des pouvoirs publics :

  • l’existence d’une demande induite de soins, débouchant sur des soins non nécessaires en cas d’abondance de l’offre ;
  • la conviction qu’il existe des effets d’expérience et de seuil dans la pratique médicale, justifiant la concentration des moyens, notamment dans un contexte de pénurie de certaines spécialités médicales ;
  • la recherche d’une répartition spatiale optimale des ressources pour faire face aux urgences et garantir l’équité dans la gestion des risques urgents ;
  • la conviction de l’existence d’effets d’échelle liés à une décroissance des coûts fixes avec le volume d’activité et à une meilleure utilisation des surcapacités requises pour faire face à une demande aléatoire.
Les sros de troisième génération introduisent comme unité de base le territoire de santé, qui définit un marché local de services de soins de santé au sein duquel les différents producteurs de soins, publics et privés, sont incités fortement à se coordonner et à rechercher des complémentarités. Les établissements sont encouragés à former des groupements inter-hospitaliers, pour éviter la redondance de l’offre, assurer sa qualité et organiser la spécialisation des structures. Pour assurer la sécurité des soins, les agences régionales de l’hospitalisation (arh) proposent une gradation des niveaux des plateaux techniques en termes de technicité et de compétences médicales. Les territoires doivent s’engager sur un projet médical se traduisant par des objectifs quantifiés en termes d’activité. Ces objectifs sont opposables aux producteurs de soins, publics et privés. Les arh doivent veiller à ce que les priorités nationales de santé publique soient déclinées au niveau local, chaque producteur de soins devant définir quelle sera sa contribution à la poursuite des objectifs fixés. Les arh disposent d’un outil d’autorisation d’ouverture ou de maintien d’une activité, en fonction des compétences du producteur et des garanties de sécurité qu’il présente et des contraintes géographiques d’accès aux soins. Elles signent des contrats d’objectifs et de moyens (com) avec les établissements, pour définir la gamme de services offerts par chaque hôpital, les gains de productivité à réaliser pour revenir à l’équilibre et une activité cible encadrée par un maximum et un minimum.

18Cet encadrement de l’activité hospitalière se substitue en France aux mécanismes de contrôle de recours aux soins mis en place par les assureurs américains. La question de la mise en place de contrôles similaires avait été évoquée par les experts sollicités par le ministère de la santé lors de la mise en place de la T2A, mais exclus par les représentants du cabinet au nom du libre accès aux soins [1]. En l’absence de mécanismes de rationnement de l’offre, les payeurs ont choisi aux États-Unis une action sur la demande, alors que la France privilégie une action sur l’offre.

19Dans le cadre de la T2A, cela a pour conséquence de limiter le potentiel de concurrence pour les patients et donc la possibilité de redresser une situation financière par l’augmentation des volumes. Les sanctions liées aux quotas d’activité sont un reversement partiel du trop perçu en cas de dépassement et un éventuel retrait d’agrément, voire une fermeture partielle si les minima ne sont pas atteints. La planification joue aussi un rôle non officiel mais quasi reconnu de protection du secteur public par rapport au secteur privé, perçu comme plus réactif aux incitations économiques.

20Si le secteur privé commercial est proche dans sa gouvernance et son fonctionnement du secteur privé américain, en revanche il existe en France un secteur public dominant en termes de nombre de lits et d’activité. Ils sont en droit des établissements publics autonomes, mais, dans les faits, leur autonomie stratégique et de gestion est faible. Il existe certes, depuis plusieurs années, une mise en place d’une logique contractuelle de la relation entre établissement et tutelle, mais cette contractualisation se fait dans le cadre du sros et ne conduit pas systématiquement à des sanctions en cas d’objectifs non atteints. Les établissements publics ne sont pas non plus, dans les faits, tenus de respecter un équilibre budgétaire, les déficits constatés faisant l’objet de report de charges, de financement par dotation exceptionnelle ou par la dette. Cette situation de dépendance stratégique convient à tous les acteurs. Elle donne à l’arh un pouvoir discrétionnaire important lui permettant de ménager le climat social et politique (relation avec les élus locaux) du secteur hospitalier public et des marges de manœuvre pour financer des missions nouvelles d’intérêt général. Elle allège la contrainte budgétaire pour les directeurs d’établissements, qui doivent faire face en interne à une profession médicale hospitalière encore très réticente à faire des efforts d’efficience ; elle permet aux élus locaux de protéger l’offre de soins et les emplois correspondants.

21Par ailleurs, l’emploi dans les établissements publics est régi par le statut de la fonction publique hospitalière, ce qui laisse peu de flexibilité d’adaptation des emplois en fonction de l’activité ou en cas de coûts supérieurs aux tarifs opposables.

22La T2A présente enfin un trait qui existe aussi aux États-Unis, mais dans une moindre mesure : la coexistence de financements prospectifs et rétrospectifs [2].

23Les activités de soins hors paiement par ghm, les dotations aux missions de recherche, d’enseignement et d’intérêt général (dites merri-migac) pour le secteur public, enfin les dépenses relatives aux molécules et aux dispositifs médicaux dits onéreux, qui sont remboursés à 100 % [3] sur la base d’une liste dont le contenu évolue au cours du temps, sont pour l’instant encore financées en grande partie sur une base rétrospective [4]. Mais comme ces activités émargent aussi à l’ondam hôpital, les ajustements tarifaires portant sur les prestations d’hospitalisation sont déconnectés partiellement de l’évolution des coûts de production et des marges de manœuvre des établissements en matière de gains de productivité.

L’impact de la T2A sur l’allocation des ressources

24Le paiement prospectif au cas s’est donc mis en place en France dans un contexte de régulation administrée de l’activité hospitalière, avec des mécanismes de régulation macroéconomique et microéconomique qui s ’ apparentent à une forme de quasi-intégration régionale, à la fois pour contrôler l’activité globale du secteur hospitalier et pour atténuer la concurrence entre les secteurs publics et privés. On est loin du modèle de concurrence par comparaison (yardstick competition) théorisé la première fois par Shleifer [1985] après l’initiative de Medicare en 1983. Dans ce modèle, le payeur peut observer le coût marginal de chaque producteur, ainsi que la fonction de productivité qui lie le coût de l’effort à la réduction du coût marginal. Le prix du producteur i est fixé par le payeur au coût moyen des n – 1 autres producteurs. Shleifer montre alors que la procédure aboutit à un équilibre de Nash où chaque firme a intérêt à choisir un niveau de coût égal au coût moyen de l’ensemble des producteurs.

25Quelles implications ces choix ont-ils du point de vue de l’allocation des ressources ? Peut-on, malgré les différences de contexte, tirer des enseignements de l’analyse du contexte américain ? Quelle analyse peut-on faire des incitations dans le modèle français ?

Le bouclage macroéconomique des dépenses

26En théorie, la détermination de l’enveloppe nationale des dépenses hospitalières devrait résulter d’un arbitrage comparant le coût d’opportunité des dépenses des différents segments des services de santé. Dans la réalité, compte tenu d’un long historique de financement rétrospectif de l’ensemble des services de santé, l’allocation des ressources reflète l’activité passée des services et de la demande de soins, régulée à la marge par une contrainte « molle » de financement de l’assurance maladie. Les ressources de l’enveloppe hospitalière sont elles-mêmes ventilées entre plusieurs fonctions : la fonction de soins, financée par les ghm et les actes de soins externes, par le remboursement rétrospectif de certaines innovations coûteuses, les missions d’intérêt général, les missions de recherche et d’enseignement. La performance des établissements sur les deux dernières missions est encore peu observable par rapport aux missions de soins. Le paiement prospectif au cas peut alors être conçu comme un processus itératif incitant les établissements hospitaliers à un effort de productivité en coût, de façon à récupérer la rente informationnelle accumulée dans le secteur. Mais sa mise en œuvre soulève trois questions.

27– La dimension prospective porte encore principalement sur les missions de soins, ce qui ouvre la possibilité de subventions croisées des autres missions vers le soin venant limiter les efforts de productivité. Ainsi, McClellan [1997] note qu’aux États-Unis la procédure de paiement prospectif s’est accompagnée d’autres incitations venant en atténuer la portée, et rendant difficile d’en évaluer les effets.

28Par ailleurs, au niveau national, le fait de financer rétrospectivement d’autres dépenses, comme certaines innovations thérapeutiques coûteuses, révèle une préférence implicite pour celles-ci, indépendante de leur rendement social, par rapport à d’autres innovations de process, de produit ou des investissements dans la qualité des soins dont le coût serait couvert par le tarif forfaitaire. Ceci a un impact sur le mécanisme d’ajustement des tarifs en fonction des volumes observés : soit l’évolution tarifaire est partiellement déconnectée de l’évolution des coûts, soit les gains induits de productivité sont alloués au financement des innovations en question (ou des autres missions) indépendamment de leur rendement social.

29– Le mécanisme d’ajustement ex post des tarifs sur le volume observé des services produits pour équilibrer recettes et dépenses peut préserver la rente informationnelle des établissements dont les coûts (imparfaitement observables) sont inférieurs au coût moyen.

30Mougeot [2000] a traité la question de l’atteinte d’un optimum collectif avec un mécanisme d’enveloppe globale, comparée avec l’optimum atteint dans un modèle de concurrence par comparaison à la Shleifer. Dans son article, il compare trois régimes de régulation, sous l’hypothèse d’une assurance complète, d’une demande de soins uniquement liée à la qualité, le régulateur fixant les prix par unité produite. Il utilise trois modèles de maximisation du bien-être total. Le premier sert de référence et fait l’hypothèse d’une connaissance complète par le régulateur du coût unitaire des établissements (supposé le même), des efforts réalisés par les producteurs pour baisser les coûts et de la qualité. Ce modèle lui permet de calculer l’effort, le prix et la qualité dans un optimum de premier rang. Il introduit ensuite une contrainte budgétaire globale tenant compte du coût social de la dépense publique et un mécanisme d’ajustement automatique du prix aux quantités produites pour répondre à la demande, ce qui reflète assez fidèlement la situation actuelle de régulation macroéconomique. Dans ce deuxième modèle, le régulateur ne peut pas observer le coût, l’effort de productivité et la qualité. Il montre alors que l’on aboutit à un équilibre de Cournot avec un prix d’équilibre supérieur à celui calculé dans le modèle avec connaissance parfaite, pour une même qualité des soins. Il en conclut qu’un modèle à enveloppe fermée conduit une perte de bien-être collectif liée au maintien d’une rente. Celle-ci existe pour les établissements dont les coûts sont inférieurs au prix fixé pour respecter l’enveloppe globale. Dans un modèle dynamique, cependant, on pourrait montrer que l’itération de la méthode conduirait les établissements les plus coûteux soit à sortir du marché, soit à baisser leurs coûts, contribuant ainsi progressivement à la baisse du prix moyen pour l’ensemble des établissements. Dans son troisième modèle de concurrence par comparaison, qui diffère de celui de Shleifer par l’introduction d’une demande fonction de la qualité, il montre que l’on peut atteindre les résultats de l’optimum de premier rang de référence pour un prix correspondant au prix optimal diminuée d’une taxe forfaitaire. Cette modélisation est importante dans le contexte français, puisqu’elle suggère que, contrairement à ce qu’en attend le régulateur, le mécanisme d’ajustement prix/volume ne conduirait pas à une appropriation par le payeur de la rente liée à l’asymétrie d’information sur les coûts, l’effort et la qualité des soins. Elle ne permet pas cependant de comparer la performance collective du système français et du système américain, qui comporte plusieurs acheteurs en concurrence les uns avec les autres.

La variabilité des coûts par GHM

31Que ce soit dans un système concurrentiel à l’américaine ou dans le système français, la question de la qualité même de l’outil de classification utilisé pour fonder les tarifs a été largement posée et étudiée. On a évoqué au paragraphe précédent l’hétérogénéité liée à des décisions endogènes des établissements en matière d’intensité de traitement et/ou d’adoption de technologies nouvelles. Cette question a été traitée empiriquement par Dormont et Milcent [2002, 2004a, 2004b, 2005], qui ont montré que le recours à des techniques innovantes non invasives de revascularisation conduisait à des surcoûts de 34 à 61 %. Hallais et al. ont montré que la gravité imparfaitement prise en compte des patients dans un établissement hospitalo-universitaire expliquait entre 25 à 32 % des surcoûts observés par rapport à la moyenne nationale pour deux pathologies médicales courantes, les maladies infectieuses et parasitaires et les broncho-pneumopathies chroniques. Les biais peuvent également provenir d’une spécification insuffisamment précise des pathologies regroupées au sein d’un même ghm. Ainsi, Pouvourville et al. [2007] ont montré que le fait de regrouper les accidents vasculaires cérébraux d’origine ischémique (oblitération d’un vaisseau) et hémorragiques pénalisait les centres hospitalo-universitaires de 6,4 % par rapport aux centres hospitaliers généraux.

32Malgré les améliorations substantielles apportées sur ces points par les versions successives des drg et, en France, des ghm, il est inévitable que subsiste une variabilité résiduelle dont une partie est exogène. Ceci a justifié les propositions de systèmes de paiement associant paiement prospectif et rétrospectif, la partie rétrospective étant assise sur l’observation des différences de recrutement des établissements. Pope [1990] a proposé une méthode empirique pour estimer la part relative de paiement prospectif et rétrospectif. Il a montré que cette dernière part était d’autant plus importante que la variance observée des coûts liés à la sévérité était élevée. Pour l’instant, en France, l’option choisie a été l’amélioration progressive de la classification en ghm en fonction de la sévérité des patients ; la comparaison des coûts dans les secteurs public et privé et la question de la définition d’un tarif unique ont également conduit à étudier le poids de la précarité de la patientèle dans les deux secteurs.

33L’hétérogénéité observable des coûts est également liée aux différences d’efficience entre les établissements. Dans leur étude empirique du coût de l’infarctus du myocarde, Dormont et Milcent [2002, 2004a, 2004b, 2005] ont décomposé la variabilité des coûts en un composant lié à l’hétérogénéité non observée des patients, un composant correspondant à l’effort de court terme de réduction des coûts (ou composant de hasard moral de court terme) ; le troisième composant correspondant à un effet spécifique de l’hôpital, lui-même décomposé en trois effets : un effet d’antisélection (l’infrastructure de l’hôpital conduisant à un fonctionnement plus ou moins coûteux), un effet qualité des soins, un effet de hasard moral de long terme. Les auteurs montrent alors a) que les caractéristiques des patients expliquent 50 % de la variance des coûts observées ; b) que les variances des effets de hasard moral transitoire et des effets spécifiques établissements représentent une part important de la variance observée des coûts par séjour. Elles concluent que la mise en œuvre d’une procédure mixte de paiement prospectif et rétrospectif est souhaitable, mais qu’elle doit tenir compte des effets spécifiques de l’hôpital pour ne pas rémunérer l’inefficience.

34Dans le contexte français, il est techniquement possible de tenir compte de l’hétérogénéité subie liée aux caractéristiques des patients pour le secteur public et privé à but non lucratif en utilisant l’étude nationale des coûts par séjour (enc), enquête permanente sur cinquante établissements servant à l’établissement des tarifs. En effet, le payeur a accès aux informations spécifiques sur les patients d’un établissement et peut comparer, pour chaque ghm, la distribution des patients de l’établissement en fonction de leur sévérité (ou bénignité) à celle observée dans l’enc. Le payeur peut donc calculer combien coûterait un ghm dont la distribution des patients serait la même que dans l’hôpital H mais dont les coûts unitaires seraient ceux de l’échantillon de l’enquête, supposée refléter les coûts moyens au niveau national, et obtenir ainsi une estimation de la part de coût rétrospectif à introduire dans le paiement. Dormont et Milcent suggèrent qu’il est aussi possible, à un moindre coût, d’imposer à tous les établissements une comptabilité analytique suivant un format standard, ce qui permettrait d’ajuster au mieux le mix prospectif/rétrospectif. Si tel était le cas, alors il serait possible de différencier la rémunération de l’activité de soins proprement dite du paiement des prestations hors soins et de l’infrastructure de l’hôpital, mais le contrôle de la sincérité des comptes produits devient un élément critique de la procédure. À l’heure actuelle, il n’est pas certain que les services extérieurs de l’État, même renforcés par ceux de l’assurance maladie, soient capables d’effectuer ces contrôles.

Les stratégies d’adaptation des établissements

35Un autre thème est récurent dans l’analyse des effets des paiements prospectifs au cas. Ellis [1997] met l’accent sur l’hétérogénéité résiduelle des patients au sein de chaque drg pour montrer que, dans le cas d’un système de paiement prospectif, un établissement a intérêt à sélectionner (creaming) des patients à bas risque en leur offrant une sur-qualité rémunérée par les tarifs, à éviter les patients à haut risque (dumping) ou à diminuer l’intensité de leurs soins (skimping). De telles stratégies sont possibles à un niveau plus agrégé d’un segment d’activité : des établissements peuvent avoir intérêt à abandonner une gamme de services déficitaires et redéployer leurs moyens sur les gammes bénéficiaires. Dans ce cas, s’il n’y a pas d’offre alternative sur le marché local des soins, un paiement prospectif peut réduire la gamme de services disponibles pour les patients. En principe, dans le contexte français, le risque de dumping est très limité dans le secteur hospitalier public, un établissement public ne pouvant pas refuser la prise en charge d’un patient sur la base de la gravité de son état. Mais il existe dans le secteur privé, qui n’est pas tenu d’accueillir des urgences et qui présélectionne ses patients par le biais de son réseau d’adressage. En revanche, le risque d’une limitation des soins donnés à des patients sévères (skimping) et d’écrémage (creaming) peut exister dans les deux secteurs, mais il y a pour l’instant peu d’études empiriques qui permettraient d’en observer l’amplitude.

La convergence tarifaire entre secteur public et secteur privé

36La dernière problématique spécifique au contexte français est celui de la convergence tarifaire entre le secteur public et le secteur privé. La question ne s’est pas posée aux États-Unis, les modes de financement étant homogènes entre les deux secteurs, ce qui n’est pas le cas en France. Même en incluant la période du budget global à l’hôpital public, le secteur public a été financé principalement sur une base rétrospective. Le secteur privé a toujours connu un financement en fonction de son activité : un prix de journée pour couvrir les frais d’hospitalisation hors rémunération des médecins payés à l’acte, un forfait de financement du plateau technique proportionnel à la rémunération conventionnelle du médecin, un forfait journalier « médicament » et un remboursement des prothèses, implants et médicaments coûteux. À ces recettes s’ajoutent les redevances payées par les médecins libéraux pour rémunérer l’outil de travail. La base historique de ces tarifs était dès l’origine plus basse que pour les établissements publics et leur évolution dans le temps a divergé de celles des établissements publics, rémunérés jusqu’en 1984 par le biais d’un prix de journée réévalué rétrospectivement. Par ailleurs, à l’origine, les établissements privés étaient la propriété d’un médecin ou de quelques partenaires, ne disposant pas de capitaux requis pour investir dans des établissements de grande taille. Compte tenu du mode de financement décrit plus haut, les cliniques ont assuré leur rentabilité par la spécialisation dans une chirurgie standardisée, de façon à maîtriser l’utilisation de leur capacité en lits, mal rémunérée par les prix de journée et maximiser leur recettes par l’utilisation intensive des blocs opératoires. Par ailleurs, si leur offre s’inscrit bien dans le cadre général de la planification régionale, les cliniques privées ne sont pas tenues de participer au service public de l’urgence, ni d’offrir des services dans le cadre de missions d’intérêt général. Elles ont un potentiel d’attraction des médecins, qui peuvent choisir entre une pratique libérale payée à l’acte avec des revenus modulables en fonction de leur effort et une pratique salariée avec un revenu déconnecté de leur niveau d’effort. Les médecins peuvent également moduler leurs honoraires en adoptant le secteur 2 hors tarif conventionnel. Les établissements privés peuvent donc sélectionner leurs patients par la gamme restreinte des services qu’elles offrent, par la capacité de ceux-ci à payer les dépassements d’honoraires et par leur réseau d’adressage, ce qui n’est pas le cas du secteur public. En contrepartie, contrairement au secteur public, les cliniques sont soumises à une contrainte forte de rentabilité et peuvent disparaître du marché.

37Il y a donc de fait spécialisation des rôles en matière d’hospitalisation, les deux secteurs étant à la fois complémentaires (le public est dominant sur les séjours de médecine) et concurrentiels (les deux secteurs se partagent les activités de chirurgie).

38Un prix de journée bas et étroitement régulé a conduit les établissements privés à contrôler leurs coûts de main-d’œuvre, en quantité et en degré de qualification. Par ailleurs, ils sont en moyenne plus petits en taille que leurs homologues publics et supportent des coûts d’infrastructure plus faible.

39Un financement rétrospectif sans contrôle n’a pas incité les établissements publics à réguler leurs effectifs, ni en volume ni en qualité : les besoins en effectif des établissements publics sont établis par ceux-ci en fonction de la conception qu’ils se font de soins de qualité et de la charge de travail ressentie, sans prise en compte de normes de productivité. Il en résulte une différence notable en matière de dépenses remboursées par l’assurance maladie, en ajustant l’activité sur le casemix. Un rapport récent de l’Inspection générale des affaires sociales (igas [2006]) chiffrait ce différentiel à 48 %. Ce différentiel n’intègre cependant pas les dépassements d’honoraires des médecins, qui restent à la charge des patients par le biais des assurances complémentaires. Dans ces conditions, il paraît difficile de fixer un tarif unique pour les deux secteurs, sans tenir compte des différences observables des fonctions de production et des modes de gouvernance des établissements dans les deux secteurs.

Conclusions pour une clarification du rôle du régulateur dans le système français

40On a montré que la T2A s’écarte en France notablement du modèle initial de concurrence par comparaison tel qu’il a été théorisé aux États-Unis lors de l’introduction d’un paiement prospectif au cas. Ceci est lié à une caractéristique structurante de la régulation hospitalière en France. L’État recherche l’efficience dans l’utilisation de la ressource collective, compte tenu de son coût d’opportunité, mais son modèle d’intervention est fondé sur la conviction que la concurrence ouverte est porteuse de demande induite et donc de gaspillage. Ceci implique le contrôle de l’offre par la planification, tempéré par des considérations d’équité géographique dans l’accès aux soins. Par ailleurs, face à une médecine de ville privée et éclatée, difficile à mobiliser autour d’objectifs de santé publique, l’hôpital public lui permet d’offrir des services d’intérêt général à la population et d’adapter l’offre de soins aux nouveaux besoins. Faute de pouvoir ou de vouloir expliciter le coût d’opportunité de chacune de ces contraintes, l’État accepte de laisser une rente informationnelle aux établissements publics. Cet arbitrage se manifeste notamment par la persistance de déficits dans le secteur hospitalier public.

41Le pmsi et la T2A ont mis en évidence une variabilité importante du coût des soins hospitaliers, qui permet de mesurer de façon approximative le coût social de ces arbitrages en période de déficit récurrent de l’assurance maladie. On peut effectuer le calcul suivant pour estimer des ordres de grandeur des économies possibles au sein du secteur hospitalier. Selon le rapport de l’igas [2006] portant sur la convergence des tarifs entre les secteurs hospitaliers public et privé, le différentiel tarifaire ajusté sur le casemix aurait été de 2 179 € par séjour en 2005, hors séjours de moins de quarante-huit heures. Admettons qu’environ 50 % de cette différence soit légitime, c’est-à-dire liée à la permanence des soins, au poids de l’activité non programmée dans le secteur public, à la prise en charge des patients en situations précaires, aux créances irrécouvrables et à une sévérité plus lourde des patients dans le secteur public. Par simplicité, supposons que le différentiel non justifié soit de 1 000 € par séjour. En 2006, selon les données pmsi publiées par l’atih, le secteur public aurait réalisé un peu plus de dix millions de séjours d’hospitalisation complète. Sous réserve d’un affinement des résultats présentés par l’igas, le gisement d’économie serait de 10 milliards d’euros, soit le double du déficit prévisionnel de l’assurance maladie en 2008.

42La question est donc de savoir quelle est la part de ce coût social imputable aux contraintes d’accès aux soins et de santé publique et celle imputable à la rente informationnelle des établissements et à des différences non observables dans l’intensité des traitements et la qualité des soins. On a vu que la question se compliquait par la coexistence de deux secteurs concurrentiels dont les fonctions de production ne sont pas identiques.

43Une solution envisageable est celle de la mise en place d’un processus itératif visant à inciter les établissements à révéler les coûts et la qualité de toutes les prestations qu’ils réalisent, ainsi que des contraintes auxquelles ils sont soumis, notamment dans le secteur public. En première analyse, une approche économétrique est possible et a déjà été explorée en France pour la mission de recherche (Bonastre [2007]), ainsi que par l’administration du ministère de la Santé pour la prise en compte du poids de la précarité. Mais cette approche présente des limites de mise en œuvre, car elle doit être répétée de façon systématique et faire la part de facteurs exogènes et endogènes. Elle réintroduit, en tout état de cause, une dimension rétrospective dans l’allocation des ressources.

44Ses résultats pourraient néanmoins être utilisés pour amorcer le processus itératif suggéré plus haut. Supposons qu’à un moment donné on puisse aboutir à une première estimation des surcoûts induits par les contraintes de service public, en fonction des caractéristiques de chaque établissement. Cette estimation pourrait servir de base à une allocation de ressources avec risque partagé, comme dans le modèle de Pope. Par exemple, les missions d’intérêt général feraient l’objet de l’établissement d’une liste positive mais restrictive, ainsi que d’une définition plus précise des objectifs attendus et des conditions de leur mise en œuvre. Elles pourraient alors faire l’objet d’un appel d’offre régional ouvert aux deux secteurs hospitaliers, l’estimation économétrique initiale servant à déterminer le montant total des ressources allouées pour ces missions. Le résultat de l’appel d’offre permettrait alors d’ajuster les montants alloués d’une période à l’autre, en fonction des performances observables des établissements. Un dispositif semblable a été proposé (Pouvourville [2005]) et adopté partiellement pour les missions de recherche et d’enseignement. Ce modèle intègre explicitement la mesure de la production scientifique des établissements par le biais de leurs publications.

45De façon plus générale, dans la logique actuelle de la régulation hospitalière, on peut imaginer un système de financement administré reposant, pour les soins, sur un modèle mixte de paiement à la Pope, tenant compte des caractéristiques observables du recrutement de chaque établissement ; pour les autres activités, d’un modèle fondé soit sur le principe de l’appel d’offres tel que décrit ci-dessus, soit sur un paiement à la performance comme dans le cas de la recherche. Enfin, un tel processus devrait tout d’abord s’inscrire dans un cadre commun de mesure de la performance des établissements, du point de vue des résultats, des risques et de la qualité du service rendu au patient en cours d’hospitalisation.

Bibliographie

Références bibliographiques

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  • Schleifer A. [1985], « A theory of yardstick competition », Rand Journal of Economics, 16 (3), p. 319-328.

Notes

  • [*]
    Essec (chaire d’Économie de la santé), avenue Bernard-Hirsch, BP 50105, 95021 Cergy Pontoise Cedex. Courriel : pouvourville@ essec. fr
  • [1]
    Sur une suggestion de l’auteur, ils ont cependant reçu un début de mise en place par l’assurance maladie dans le cadre de la loi de financement de la Sécurité sociale 2007 sous la forme d’une entente préalable pour des hospitalisations complètes dans le cas où l’intervention prévue peut se faire en hôpital de jour.
  • [2]
    Nous ne donnons pas ici à ce terme exactement le même sens que celui donné dans la littérature économique, pour qui le mix prospectif/rétrospectif existe au sein même du paiement au cas, par exemple par le mélange d’un tarif forfaitaire et d’un ajustement sur la sévérité des patients au sein d’un même drg/ghm.
  • [3]
    Moyennant le respect de règles de bon usage.
  • [4]
    Le caractère rétrospectif de ces financements est encadré par des règles, par la négociation et par la mise en place progressive de mécanismes de partage des risques.
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