Couverture de RECO_582

Article de revue

Les comportements boursiers sont-ils eulériens ?

Pages 427 à 453

Notes

  • [*]
    Cnrs, EconomiX (umr 7166 du cnrs), Université Paris-X Nanterre, Bât. G, 200 avenue de la République, 92001 Nanterre Cedex, France. Courriel : georges. prat@ u-paris10. fr
    Une première version de ce travail avait été présentée lors du 37e congrès annuel de l’Association canadienne d’économie (Carleton University, Ottawa, mai-juin 2003) et ne conduisait à cette date qu’à des résultats mitigés. J’exprime ma gratitude envers Antonio Melino (Université de Toronto) dont les observations faites à cette occasion m’ont incité à poursuivre dans cette voie. Une seconde version a bénéficié des observations de Roger Guesnerie et de Jean-Charles Rochet lors du LIIIe congrès de l’afse (Paris, septembre 2004), et je tiens à les en remercier. Enfin, je remercie deux lecteurs anonymes de cette revue dont les critiques ont permis une amélioration substantielle de cet article. J’assume bien sûr l’entière responsabilité des insuffisances pouvant subsister dans ce travail.
  • [1]
    Le premier auteur ayant attiré l’attention sur le volatility puzzle est Shiller [1981].
  • [2]
    Le premier travail évoquant le premium puzzle est celui de Mehra et Prescott [1985].
  • [3]
    Nous laissons ici de côté des approches cherchant à endogénéiser la consommation par la modélisation du secteur productif. Ces approches cherchent à rendre compte à la fois des faits stylisés des marchés financiers et des fluctuations économiques dans le cadre unifié de l’équilibre général dynamique. Pour être bref, ces approches n’améliorent pas vraiment la représentation des faits relatifs aux marchés financiers.
  • [4]
    Voir encore Cho et Dokko [1993] ainsi que Hansen, Sargent et Tallarine [1997]. Pour une application en France, voir Epaulard et Pommeret [2001].
  • [5]
    Contrairement aux premiers travaux consacrés à cette approche qui reposaient sur des spécifications différentes des habitudes (voir Constantinides [1990]).
  • [6]
    Néanmoins, les derniers développements de cette approche montrent qu’elle reste potentiellement fructueuse (voir notamment Korniotis [2004]).
  • [7]
    On peut mentionner ici l’approche fondée sur l’idée que les puzzles pourraient résulter de frictions et d’erreurs de mesure ou de spécification perturbant plus fortement les composantes à hautes fréquences des rentabilités que les composantes à basses fréquences. Généralement, les analyses fondées sur une telle décomposition spectrale montrent que, pour des valeurs « raisonnables » de l’aversion au risque, les premium et volatility puzzles restent assez répartis sur le spectre (Hansen et Jagannathan [1997] ; Cogley [2001]).
  • [8]
    Pour une application en France, voir Epaulard et Pommeret [2001].
  • [9]
    Voir encore Cochrane [1997], p. 22 et sq. Notons qu’Attanasio, Banks et Tanner [1998] utilisent une approche probabiliste afin de distinguer les comportements des consommateurs suivant qu’ils détiennent ou non des actions (d’après l’enquête du Panel Study of Income Dynamics de 1984, environ un ménage américain sur quatre détenait des actions), et montrent que cette approche permet de réduire le premium puzzle.
  • [10]
    Voir notamment Heaton [1995].
  • [11]
    Il est intéressant de noter qu’un modèle avec anticipations rationnelles et utilité non espérée (fonction récursive) faisant intervenir des habitudes de consommation peut dans certains cas être formellement équivalent à un modèle avec utilité espérée classique combiné avec des anticipations biaisées (voir Hansen et al. [1999]). Mais cette propriété, qui génère une indétermination sur le sens économique, ne s’applique pas à l’approche CLM.
  • [12]
    Abel [2001] obtient des résultats allant dans le même sens avec un agent représentatif uniformément pessimiste (translation vers la gauche de la distribution des taux de variation de la consommation) et affecté de doute (augmentation exogène du risque perçu par l’agent). Ces deux biais ont pour effet de réduire la valeur d’équilibre du taux sans risque et d’augmenter celle de la prime de risque exigée par les détenteurs d’actions. L’auteur montre qu’en corrigeant les résultats de Mehra et Prescott [1985] de ces biais, il est possible de résoudre l’equity premium puzzle. En fait, l’hypothèse de biais uniformes est très hardie et l’auteur ne s’intéresse qu’aux premiers moments. C’est pourquoi la contribution d’Abel nous semble beaucoup plus limitative que celle de CLM.
  • [13]
    Ce ratio de Sharpe est le rapport entre la prime de risque moyenne et l’écart type de la rentabilité espérée des actions (telle qu’elle ressort des enquêtes de Livingston), la prime étant estimée par la différence entre la rentabilité espérée des actions et le taux sans risque observé. Pour ne pas invalider le modèle de Lucas, la valeur observée de ce ratio doit, suivant que les anticipations sont ou non biaisées (approche CLM) ou suivant qu’il existe ou non des habitudes (approche cc), être plus grande ou égale à sa valeur théorique (une fonction d’utilité crra est utilisée).
  • [14]
    D’une manière plus générale, de nombreuses études montrent que les prévisions des analystes financiers sont biaisées (voir notamment Hong, Lim et Stein [2000]).
  • [15]
    D’après Grandmont ([1976], p. 806-808), « selon ce point de vue, à chaque date les agents doivent prendre des décisions en fonction de leurs anticipations sur leur environnement futur, qui dépendent de leur information sur l’état de l’économie dans les périodes courante et passées… un concept nouveau apparaît dans ces modèles (à équilibres temporaires) par rapport à la théorie traditionnelle de l’équilibre général, celui d’une “fonction d’anticipation”, qui décrit la dépendance des prévisions d’un agent par rapport à son information… ».
  • [16]
    Une question importante est celle de l’existence d’un système de prix équilibrant l’offre et la demande sur le marché de chaque actif (Grandmont [1976], p. 812-813). Dans le cadre de l’équation (1), la réponse paraît évidente : le prix de chaque actif peut s’ajuster de manière à obtenir (1), certains prix augmentant et d’autres baissant, la variation de la consommation globale soldant l’écart entre l’offre et la demande globales de titres.
  • [17]
    Dans le cas où l’inégalité est de sens inverse, les achats nets d’actions induiront une hausse de U’(Ct)Pt. La contrainte de liquidité ne se pose pas ici, car les achats d’actions sont financés par un renoncement à une partie de Ct (i.e. hausse de l’épargne). On admet cependant que Ct se situe suffisamment au-dessus de sa valeur incompressible, condition naturellement remplie pour les détenteurs d’actions dans une économie développée.
  • [18]
    L’intégration forward de (2)’ montre qu’une solution particulière appelée « valeur fondamentale » est la somme actualisée du flux des dividendes anticipés sur un horizon infini. Dans cet article, nous avons travaillé directement à partir des équations (2) ou (3), ce qui évite toute difficulté liée à l’existence de bulle.
  • [19]
    D’après la relation (3), on voit que le premium puzzle est attribuable au fait que la covariance entre l’utilité marginale de la consommation et la rentabilité des actions est en moyenne trop faible pour expliquer l’écart moyen observé entre la rentabilité des actions et le taux d’intérêt, pour des valeurs raisonnables de l’aversion au risque caractérisant la fonction d’utilité. C’est pourquoi ce puzzle est parfois aussi appelé correlation puzzle. Notons bien ici que, même si cette covariance était en moyenne suffisamment élevée pour expliquer la prime moyenne observée, cela ne signifierait pas pour autant que le modèle explique la dynamique de la prime observée par date. En effet, pour qu’il en soit ainsi, il faudrait que la covariance entre la prime observée et la prime théorique soit elle-même suffisamment élevée et positive.
  • [20]
    Grossman [1976] a montré que l’hypothèse de marché efficient soulève un paradoxe : le prix y véhiculant toute l’information disponible, les agents ne sont plus incités à collecter de l’information coûteuse sur les fondamentaux, ce qui a pour conséquence… l’inefficience informationnelle du prix. Grossman et Stiglitz [1980] montrent que si l’information est coûteuse (ou bruitée), le prix d’équilibre du titre ne capture plus d’emblée toute l’information disponible : le paradoxe disparaît, mais le prix ne véhicule plus des anticipations rationnelles.
  • [21]
    Cet exposé conserve l’esprit de Feige et Pearce bien qu’il s’en distingue par le fait que l’information est reliée à l’espérance de l’erreur quadratique et non à la valeur ex post de cette erreur, de sorte que f? apparaît clairement comme une fonction de comportement. Nous reprenons pour une part l’exposé de Prat et Uctum [2006].
  • [22]
    Les types d’information sont les valeurs présente et passées des rentabilités ou de toute autre variable micro ou macroéconomique observable.
  • [23]
    On doit toutefois noter une exception avec l’article de Campbell et Cochrane [1999] introduisant des habitudes de consommation. Cependant, avec les valeurs des paramètres de préférence déterminés par calibrage, et en remplaçant les anticipations (rationnelles) par les valeurs observées ex post, le modèle cc ne peut décrire l’historique par date du rapport cours/dividendes : sur un demi-siècle (1945-1995), les valeurs théoriques de ce rapport restent sans corrélation avec les valeurs observées (voir fig. 9 de l’article). En fait, les commentaires plutôt favorables des auteurs (p. 207) sont largement attribuables à la crise des années 1930 pendant laquelle à la fois les cours boursiers et la consommation chutent drastiquement, comme d’ailleurs la plupart des indicateurs économiques.
  • [24]
    L’approche spectrale de Berkowitz [2001] illustre bien ce point sur données américaines en montrant qu’en minimisant pour chaque fréquence la variance des résidus associés à l’équation d’Euler (2) (les anticipations sont supposées rationnelles), le coefficient d’aversion au risque prend des valeurs raisonnables, allant d’environ 1 à 5 suivant la valeur de la fréquence envisagée et selon la définition de la consommation (cependant, le taux d’impatience reste trop élevé).
  • [25]
    Sources : Datastream.
  • [26]
    Tous les taux considérés dans ce travail étant en base semestrielle, les dividendes et la consommation ont été mis en base semestrielle car ce sont des flux, et sont à ce titre dimensionnés par rapport au temps tout comme le sont lesdits taux. Cette opération est neutre pour la valeur du taux de variation de la consommation mais ne l’est pas pour le calcul de l’utilité marginale et pour le calcul du rendement des actions (dividend yield). Le choix du flux correspondant au second trimestre et au quatrième trimestre (mis en base semestrielle) a été retenu par souci de comparaison des résultats présentés dans cette section avec ceux obtenus avec les données d’enquêtes ; dans ce dernier cas, ce choix permet de rester plus proche de l’instant où les anticipations des experts sont émises (juin et décembre) que si l’on considérait le flux du dernier semestre.
  • [27]
    Concernant l’approche fondée sur la rentabilité espérée, une difficulté tient au fait que certaines variables dépendent elles-mêmes des paramètres estimés, de sorte qu’il n’est pas possible, pour ces variables, d’effectuer des tests de stationnarité avant l’estimation. Leur stationnarité a néanmoins été vérifiée après l’estimation du modèle.
  • [28]
    On admet ln (1 +r ) ? r et ln (1 + ?t + 1) ? ?t + 1, ce qui semble acceptable, compte tenu des domaines de variation vraisemblables de ces deux grandeurs.
  • [29]
    Pour chaque bande de fréquences de la décomposition spectrale, Berkowitz [2001] adopte une approche analogue en minimisant la variance de la grandeur equation im55 dont la valeur théorique est zéro. L’auteur estime ainsi les valeurs optimales de r et de ? (voir note 1, p. 438), mais ne donne pas d’indication sur l’importance des résidus pour chaque bande de fréquences.
  • [30]
    Tous les calculs présentés dans cet article ont été effectués à l’aide du logiciel EViews5.
  • [31]
    Alors que les estimateurs de ? et r sont indépendants de la variance des erreurs de prévision ?t contenues dans les résidus du modèle, le coefficient de corrélation sera d’autant plus petit que la variance de ?t est grande. La part de la variance du résidu attribuable à ?t restant inconnue, le R2 doit donc être considéré comme un critère permettant d’apprécier d’une manière jointe la précision des anticipations rationnelles (variance de ?t) et la validité de l’équation d’Euler.
  • [32]
    En effet, certaines sociétés peuvent partiellement payer cash leurs actionnaires non pas en versant des dividendes mais par le rachat de titres sur le marché en puisant dans les bénéfices non distribués, de sorte qu’une part de ces derniers peut être vue comme du cash-flow. Dans l’équation (8), on a ainsi remplacé le dividende Dt par la grandeur Rt = Dt + a(Bt - Dt) (avec 0 ? a ? 1) où Bt = bénéfice par action après impôt. Si a = 0, on obtient Rt = Dt et on retrouve la spécification initiale ; si a = 1, on obtient Rt = Bt et le dividende doit être remplacé par le bénéfice. Pour toute valeur de a comprise entre 0 et 1, les investisseurs valorisent une part du bénéfice non distribué mesurée par le coefficient a. Les ajustements ont systématiquement conduits à une valeur non significativement différente de zéro du paramètre a, à la fois sur la période 1957-1989 et sur la période 1889-1984.
  • [33]
    L’estimation de (8) d’après la méthode Newey-West conduit sur cette période aux résultats suivants :
    equation im56
  • [34]
    Alternativement, il est intéressant de remarquer qu’en reportant la martingale Et{Gt + 1} = Gt dans la relation structurelle (2) (hypothèse d’anticipations naïves), on déduit que le rapport dividendes/cours est égal au taux d’impatience, soit Dt/Pt = r. Cette conséquence ne saurait traduire la réalité puisque nous savons que les valeurs observées de ce rapport sont caractérisées par une structure autorégressive et qu’elles sont significativement corrélées avec des variables économiques observables (Fama [1990]). Par ailleurs, on a également pu constater que la représentation du « gain anticipé » par un processus de type extrapolatif, adaptatif ou régressif ne permet pas plus que les hypothèses d’anticipations naïves ou rationnelles de valider l’équation d’Euler.
  • [35]
    Puisque equation im57 et que, les valeurs de ?t + 1 étant toujours très inférieures à l’unité, on peut admettre equation im58, on en déduit que equation im59. En reportant ce résultat dans l’équation (3), on obtient la relation (9) avec ? = 1.
  • [36]
    Alternativement, on a considéré des moyennes moyct et moyrt variables au cours du temps (moyennes des n derniers semestres) : la qualité des résultats ne s’est guère améliorée.
  • [37]
    Ceci en dépit du fait que le terme exogène Covt fait intervenir les rentabilités passées, tout comme l’endogène. Cette dernière propriété pouvant induire un « biais d’endogénéîté » résultant d’une dépendance indésirable entre le résidu et les exogènes, nous avons calculé ex post les corrélations entre les résidus et les deux composantes exogènes : les deux coefficients de corrélation s’étant révélés non significativement différent de zéro, on peut conclure en l’absence d’un biais significatif avec nos données.
  • [38]
    Après la mort de Livingston en 1989, la banque fédérale de Philadelphie a poursuivi l’enquête ; elle nous a gracieusement fourni les données. Croushore [1997] donne une synthèse des études ayant utilisé ces données.
  • [39]
    Les enquêtes donnent aussi les anticipations à un horizon de douze mois. Nous n’avons pas utilisé cet horizon car, avec une fréquence semestrielle des données, aurait surgi un biais économétrique dû au chevauchement des observations successives.
  • [40]
    Tant au niveau du consensus que des groupes d’experts qu’à celui des individus (Prat [1994] ; Abou et Prat [1997]). Sur la période 1957.1 à 1989.2 considérée dans le présent article, nous trouvons un coefficient de régression entre le taux de variation anticipé à six mois du cours des actions et le taux de variation réalisé sur les six prochains mois qui est non significativement différente de zéro, ce qui confirme donc les résultats de la littérature. Sur la question de savoir comment se forment les anticipations boursières révélées par les enquêtes de Livingston, voir Abou et Prat [2000]. Les travaux sur les anticipations d’inflation issues de ces enquêtes concluent également à la non-rationalité, et il en est de même des tests que nous avons effectués sur le taux de croissance anticipé du gnp.
  • [41]
    Autrement dit, l’écart entre les anticipations du marché et celles révélées par les enquêtes doit être un bruit blanc augmenté d’un éventuel biais constant. Cette hypothèse est bien sûr discutable dans la mesure où la « proximité au marché » n’est pas assurée pour tous les répondants. Cependant, remarquons que les experts du panel de Livingston sont des personnalités influentes et que les institutions bénéficiant de l’avis de ces personnalités occupent une place non négligeable dans le volume des transactions en bourse (voir Lakonishok [1980], p. 922). On ne peut aussi occulter l’objection courante suivant laquelle, pour des raisons inhérentes aux jeux spéculatifs, les experts ne révéleraient pas leurs vraies anticipations de prix sur les marchés financiers. Il faut à ce propos noter que chaque réponse reste confidentielle, qu’elle ne pèse pas significativement sur le consensus, et qu’en outre ce dernier n’est rendu public qu’au cours du mois suivant l’enquête. Ces conditions paraissent donc éliminer tout mobile pouvant conduire un expert à ne pas révéler sa véritable opinion, et ceci d’autant plus que ce dernier peut trouver un certain intérêt à démontrer sa capacité de prévisionniste auprès de son institution.
  • [42]
    Ceci tient au fait que formellement, la grandeur théorique equation im60 ne s’égalise pas à la grandeur equation im61 qui seule peut être mesurée avec nos données.
  • [43]
    D’une manière générale, les coefficients de variation (rapport écart-type/moyenne) des variables anticipées par les experts de Livingston ont des valeurs qui restent modérées et relativement stables (autour de 10 % pour les cours boursiers sur la période considérée). Ceci nous autorise à retenir dans ce qui suit l’approximation equation im62 correspond au consensus des réponses relatives à la variable Xt.
  • [44]
    Si l’hypothèse d’anticipations rationnelles implique l’égalité entre les moyennes historiques des anticipations et des réalisations (erreur de prévision nulle en moyenne), la réciproque n’est pas vraie : l’égalité des moyennes est une condition nécessaire mais non suffisante pour caractériser des anticipations rationnelles. Notons que la détermination a priori de la valeur de b repose sur le fait que la valeur de ce paramètre est pratiquement indépendante de celle de c.
  • [45]
    Soit Dnt les dividendes nominaux en base annuelle ; le coefficient extrapolatif a été obtenu en estimant le l’équation suivante :
    equation im63
    Puisqu’on a equation im64, on peut en déduire
    equation im65
    Enfin, les dividendes réels anticipés en base semestrielle sont donnés par
    equation im66
    où Et{CPIt + 1} représente l’indice CPI anticipé à six mois (enquêtes).
  • [46]
    Voir supra, note 5, p. 440.
  • [47]
    Soient respectivement kt et SCt, le taux de rendement du papier commercial à six mois sur le marché monétaire et le Consumer Sentiment Index construit par le Survey Research Center de l’université du Michigan à partir d’enquêtes auprès des ménages américains ; cet indice traduit l’opinion des ménages sur leurs situations financières personnelles et sur l’état actuel et futur de l’économie américaine en général ; il est fondé sur la différence entre les opinions favorables et défavorables. L’équation obtenue pour le taux de variation de la consommation nominale totale CNt est la suivante :
    equation im67
    Cette équation permet de déduire l’équation de mesure du taux de variation anticipé à six mois :
    equation im68
    En soustrayant de ce dernier taux le taux d’inflation anticipé à six mois (enquêtes) et le taux de croissance de la population, on obtient le taux de variation attendu de la consommation réelle par habitant Et{?t + 1} (on a constaté que ce taux a pratiquement une même moyenne que le taux observé). Le signe négatif obtenu pour la variable SCt tend à indiquer que, lorsque l’agent représentatif pense que sa situation économique financière est en voie d’amélioration, il envisage une hausse de son épargne (i.e. une baisse de sa consommation), ce comportement correspondant à la volonté de répartir d’une manière optimale ses consommations au cours du temps ; le signe négatif de la variation du taux d’intérêt renforce ce comportement d’arbitrage intertemporel.
  • [48]
    Alternativement, on a considéré des moyennes moyct et moyrt variables au cours du temps (moyennes des n derniers semestres) : la qualité des résultats s’est détériorée.
  • [49]
    Outre le fait que ce processus permet une estimation efficace, il peut traduire l’existence d’un ajustement non instantané de la rentabilité espérée par les experts sur la valeur d’équilibre donnée par l’équation d’Eiuler. Sur ce point, voir Prat [1993].
  • [50]
    Deux variables muettes (valant respectivement 1 en 1987.2 et 1988.1 et 0 pour les autres dates) ont été introduites pour capturer les effets du krach d’octobre 1987. Ces variables s’étant révélées peu significatives, elles ont été supprimées de l’ajustement final.
  • [51]
    Même si les écarts (résidus) sont les mêmes sur les figures 2 et 4, la corrélation entre les deux grandeurs de la figure 4 n’est pas une conséquence nécessaire de la corrélation existant entre celles de la figure 2.
  • [52]
    La volatilité de l’écart equation im69, plus importante que celle de l’inflation anticipée, peut également être attribuée à l’existence d’une prime de négociabilité qui serait variable au cours du temps.
  • [53]
    Rappelons que, sous l’hypothèse d’anticipations rationnelles, la résolution du premium puzzle avec une valeur raisonnable de l’aversion au risque génère une autre énigme, celle portant sur la valeur moyenne du taux d’intérêt (risk-free rate puzzle, Weil [1989]).

1Le modèle d’équilibre général de Lucas [1978] considère un consommateur-investisseur représentatif muni de deux types de rationalité. La première est celle de choix intertemporels rationnels ; la seconde est celle d’anticipations rationnelles. Dans un monde caractérisé par ces deux rationalités et par un marché financier parfait, les prix des titres – et en particulier ceux des actions – sont efficients : le prix de chaque titre s’égalise à la valeur actualisée des cash-flows attendus sur l’horizon financier de l’agent représentatif. Depuis les années 1980, ce modèle a été confronté de très nombreuses fois aux données de l’observation en calibrant l’équation d’Euler traduisant l’équilibre de l’agent. Une première vague de travaux a montré, pour des valeurs « raisonnables » du coefficient d’aversion au risque et du taux d’impatience, d’une part, que la volatilité observée du cours (ou rentabilité) des actions est exagérée par rapport à celle prédite par le modèle (the volatility puzzle)[1], et, d’autre part, que la valeur de la prime de risque observée est en moyenne excessive par rapport à la valeur théorique déduite du modèle (the equity premium puzzle)[2].

2Dans le but de résoudre ces deux « énigmes », les nombreuses contributions ultérieures ont suivi cinq axes de recherche [3]. Le premier axe consiste à conserver les hypothèses générales qui viennent d’être rappelées mais en considérant des fonctions d’utilité plus complexes. Epstein et Zin [1989] et Weil [1989] proposent ainsi de remplacer la fonction d’utilité espérée classique à aversion relative au risque constante par une fonction d’utilité non espérée permettant de séparer le coefficient d’aversion au risque et l’élasticité de substitution intertemporelle : les résultats obtenus sont loin de pouvoir résoudre les puzzles[4]. Par contre, Campbell et Cochrane [1999] introduisent l’hypothèse d’habitudes externes de consommation dans une fonction d’utilité standard et concluent qu’il est possible d’expliquer simultanément le premium puzzle et le volatility puzzle ainsi que d’autres faits stylisés caractérisant la rentabilité des actions et le taux d’intérêt aux États-Unis (approche CC) [5]. Cependant, lorsqu’on le calcule, le coefficient d’aversion au risque reste encore très élevé, de sorte que cette explication des puzzles reste discutable, même si CC cherchent à défendre l’idée qu’une forte aversion au risque est moins irréaliste qu’il n’y paraît au premier abord [6].

3Le second axe de recherche suivi consiste à conserver l’hypothèse d’indépendance des préférences par rapport à l’état de la nature, mais à relâcher l’hypothèse de marchés parfaits, c’est-à-dire à introduire certaines frictions du marché telles que les limites à l’emprunt, les contraintes liées aux ventes à découvert, les coûts de transactions, l’incomplétude des marchés, etc. En fait, Heaton et Lucas [1996] puis Luttmer [1999] montrent que ces approches ne peuvent rendre compte que d’une faible partie des puzzles[7]. Le troisième axe de recherche consiste à lever l’hypothèse d’un agent représentatif en introduisant certaines formes d’hétérogénéité entre les agents. Le modèle proposé par Abel [1990] avec interdépendance des préférences individuelles (la fonction d’utilité intègre à la fois la consommation de l’individu et celle de l’ensemble des agents [8]) ne permet guère la résolution des puzzles, tandis que le modèle d’Heaton et Lucas [1995] avec agents hétérogènes ne rend compte que de la moitié de la prime de risque moyenne, tout en impliquant des taux d’intérêt aussi volatiles que la rentabilité des actions [9] ! Le quatrième axe de recherche suivi consiste à relâcher l’hypothèse d’indépendance des préférences par rapport à l’état de la nature (coefficient d’aversion et taux d’impatience) tout en conservant le paradigme de l’utilité espérée. Après des tentatives infructueuses de la littérature [10], Melino et Yang [2003] parviennent à rendre compte des puzzles en supposant des préférences stochastiques et non stationnaires : l’absence de justification économique donnée à ces hypothèses fait que, bien que très intuitive, l’explication proposée ne reste que potentielle.

4Se rattachant au courant de la « finance comportementale », le cinquième axe de recherche introduit des distorsions de nature psychologique dans les préférences des agents et dans la façon dont ils évaluent les performances de leurs portefeuilles. Suivant cette approche, l’utilité espérée de la consommation intervenant dans le modèle de Lucas (suivant laquelle l’aversion est symétrique pour les gains et les pertes) est remplacée par une utilité prospective (prospective utility) qui dépend directement et à tout instant des seuls gains et pertes en bourse (i.e. des rentabilités). Dans ce contexte, Benartzi et Thaler [1995] considèrent deux hypothèses caractérisant les comportements : (i) les agents sont plus sensibles aux pertes qu’aux gains (loss aversion hypothesis) et (ii) les investisseurs de long terme ont un comportement « myope » concernant l’évaluation de la rentabilité de leurs portefeuilles (mental accounting hypothesis). Ces deux biais psychologiques caractérisent un agent représentatif affecté d’une myopic loss aversion. Adoptant une approche par le calibrage, les auteurs trouvent que, pour rendre compte du premium puzzle, l’investisseur représentatif doit être environ deux fois plus sensible (aversion au risque plus forte) aux pertes qu’aux gains, tandis que la fréquence d’évaluation de la rentabilité de son portefeuille de long terme doit être de l’ordre d’une année. Suivant la même approche, mais en y ajoutant l’hypothèse que l’agent est moins adverse au risque après avoir observé une hausse qu’après avoir observé une baisse, Barberis, Huang et Santos [2001] montrent qu’il est possible d’élargir au volatility puzzle et à d’autres faits stylisés les phénomènes pouvant être décrits. Malgré son intérêt et le caractère intuitif des hypothèses sur lesquelles elle repose, les partisans de l’utilité espérée reprochent à cette approche d’introduire d’une manière ad hoc des biais cognitifs qui sont incompatibles avec l’hypothèse d’un comportement rationnel, et qu’en s’écartant de cette dernière hypothèse, il est a priori toujours possible de trouver des biais cognitifs pouvant expliquer une contradiction entre la théorie et les données de l’observation.

5Le sixième axe de recherche suivi conserve le paradigme de l’utilité espérée de la consommation mais introduit des biais dans les anticipations, ce qui revient donc à relâcher l’hypothèse d’anticipations rationnelles dans le modèle de Lucas. Dans cet axe, Rietz [1988] rend compte du premium puzzle en supposant que les agents croient à la survenance d’un krach boursier avec une probabilité plus grande que ne l’indiquent les fréquences historiques des rentabilités. En fait, cette approche repose sur l’hypothèse peu justifiée suivant laquelle les agents fondent systématiquement leurs anticipations sur une distribution des rentabilités ne correspondant pas à la distribution historique. D’une manière beaucoup plus convaincante, Cechetti, Lam et Mark (CLM) [2000] proposent une approche où les agents savent parfaitement si le taux de variation de la consommation est dans son état favorable ou défavorable (un modèle markovien à deux états décrit le taux de variation de la consommation), mais appliquent des probabilités de transition entre l’état actuel et l’état futur qui sont biaisées et qui varient aléatoirement autour de leurs valeurs subjectives, générant ainsi des biais anticipatifs [11]. L’agent représentatif est ici parfaitement rationnel excepté en ce qui concerne ses anticipations. Pour justifier l’existence de tels biais, CLM avancent l’existence d’un coût trop élevé du traitement de l’information conduisant les agents rationnels à ne pas utiliser volontairement la bonne méthode pour estimer les probabilités de transition entre les états actuel et futur (« individuals find it too costly to acquire the skills to do maximum-likelihood ») ; les agents seraient ainsi incités à utiliser une méthode empirique moins précise car moins coûteuse (« instead, they respond by using rules of thumb »). À la question de savoir pourquoi les agents ne finissent pas par appréhender les vraies probabilités de transition ; les auteurs arguent que, si les agents avaient suivi un processus d’apprentissage bayésien, la convergence vers les vraies valeurs des espérances aurait très probablement été observée pendant le siècle étudié [1890-1993], contrairement à ce que montrent les résultats obtenus. Autrement dit, tant que le coût de traitement de l’information ne diminue pas en deçà du seuil nécessaire pour inciter à la mise en œuvre de la bonne méthode, l’apprentissage est désactivé et les agents ne se coordonnent pas sur un équilibre à anticipations rationnelles. En conservant une fonction d’utilité séparable crra avec une valeur « raisonnable » du coefficient d’aversion relative au risque (< 10) et une valeur plausible du taux d’impatience, les auteurs trouvent que les agents sont relativement pessimistes pendant les phases d’expansion de la consommation (espérance subjective inférieure à la vraie espérance des rentabilités, i.e. celle qui prévaudrait si les anticipations étaient rationnelles) mais relativement optimistes pendant les phases de contraction (espérance subjective supérieure à la vraie espérance). En respectant ces biais anticipatifs, CLM parviennent à rendre compte des principaux faits stylisés caractérisant les rentabilités boursières : valeurs des moyennes et variances (rentabilité des actions et taux d’intérêt sans risque), corrélation entre la prime et le taux sans risque, prévision de la prime par les valeurs passées du rendement des actions, valeurs plus grandes en moyenne de la prime pendant les phases d’expansion que pendant les phases de contraction [12].

6La remise en question de l’hypothèse suivant laquelle les investisseurs ne se coordonneraient pas sur des anticipations rationnelles apparaît ainsi comme une voie de recherche ayant le mérite de proposer une explication des principaux faits stylisés caractérisant les rentabilités boursières, tout en ne remettant en cause ni l’indépendance des préférences par rapport à l’état de la nature, ni l’hypothèse simple de séparabilité temporelle de la fonction d’utilité, ni le paradigme de marchés concurrentiels, ni bien sûr l’hypothèse d’une rationalité des choix intertemporels, et ceci avec des valeurs plausibles des paramètres traduisant les préférences. Il n’y a pas ici, à proprement parler, de biais cognitifs, puisque ce sont les coûts d’information qui conduisent les agents rationnels à volontairement ne pas anticiper rationnellement. Il est intéressant d’ajouter que, en construisant des ratios de Sharpe faisant intervenir les rentabilités espérées déduites des enquêtes de Livingston auprès d’un panel d’experts, Park [2006] a récemment montré que les valeurs théoriques moyennes de ces ratios sur le marché américain ont des propriétés qui restent conformes à celles de leurs valeurs observées lorsqu’on considère l’approche CLM, contrairement à ce qui est obtenu avec l’approche CC fondée sur les habitudes de consommation [13]. Ces résultats sont d’autant plus intéressants que l’auteur a pu constater que les anticipations révélées par ces enquêtes présentent des biais de même nature que ceux trouvés par CLM [14].

7Malgré l’apport indéniable de CLM, deux limitations doivent être soulignées. La première, de nature théorique, tient au fait que, puisque la résolution du programme de l’agent représentatif conduisant à l’équation d’Euler (sur laquelle repose le calibrage du modèle de Lucas) nécessite l’hypothèse d’anticipations rationnelles, il convient de justifier l’introduction d’anticipations non rationnelles dans cette équation, ce que ne font pas les auteurs. La seconde limitation est de nature empirique : si l’explication des moments par le calibrage de l’équation d’Euler peut être regardée comme une condition nécessaire pour valider le modèle, cette condition n’est pas suffisante : la compatibilité par date entre le prix des actions sur le marché et l’équation d’Euler reste un critère incontournable. Or, on doit constater que l’approche CLM – comme d’ailleurs toutes les autres approches sus-visées qui sont basées sur le calibrage – laisse de facto en suspens cette question.

8Cet article explore précisément cette question. La partie 1 montre qu’en interprétant l’équation d’Euler dans le cadre des équilibres temporaires, il devient possible d’y introduire à chaque date des anticipations quelconques ; dans ce contexte, il devient alors nécessaire de justifier l’hypothèse d’anticipations fondées sur une information limitée, et la théorie des anticipations économiquement rationnelles sera proposée dans ce but. En outre, on indiquera en quoi l’approche économétrique peut apporter des preuves plus convaincantes que l’approche par le calibrage pour valider ou infirmer l’équation d’Euler. La partie 2 présente une analyse économétrique qui a pour but de confronter par date l’équation d’Euler aux données de l’observation sur le marché américain des actions (indice Standard and Poor’s des actions industrielles) en retenant deux hypothèses pour représenter les anticipations : anticipations rationnelles et anticipations révélées par les enquêtes de Livingston.

ÉQUATION D’EULER ET ANTICIPATIONS NON RATIONNELLES : ASPECTS THÉORIQUES ET MÉTHODOLOGIQUES

9Rappelons que, supposant un agent représentatif (i) adverse au risque, sans illusion monétaire et maximisant l’espérance d’utilité de ses consommations actuelle et futures (horizon infini) sous sa contrainte de budget, (ii) caractérisé par des anticipations rationnelles (ar) et (iii) évoluant dans une économie compétitive à choix séquentiels avec marchés complets, Lucas [1978] a établi l’expression de la valeur du prix de tout actif dans une situation d’équilibre général. Par exemple, le prix Pt d’un portefeuille composé d’actions (moyenne pondérée des prix des différents titres, e.g. un indice boursier) est tel qu’il satisfait l’équation d’Euler suivante, toutes les variables étant exprimées en unité monétaire constante :

figure im1

10avec :

11Ct : consommation réelle de l’agent représentatif à l’instant t

12U’(Ct) : utilité marginale de Ct

13Pt : prix réel du portefeuille d’actions à l’instant t

14Dt : dividendes réels associés à la détention du portefeuille entre t - 1 et t

15r : taux d’impatience réel (intensité de la préférence pour le présent )

16Et{Xt + 1} : espérance de Xt + 1 conditionnelle à t

17Il importe de souligner ici que l’équilibre général intertemporel du consommateur-investisseur caractérisé par l’équation (1) n’est déductible du programme de ce dernier que si les anticipations sont rationnelles : « Le système est clos avec l’hypothèse d’anticipations rationnelles… » (Lucas [1978], p. 1431.) Par conséquent, il faut justifier au plan théorique pourquoi cette équation n’exclut pas a priori la possibilité d’anticipations non rationnelles. S’il en est ainsi, une seconde question est de savoir pour quelles raisons les agents peuvent se coordonner sur le marché autour d’une représentation non rationnelle des anticipations, et cette question implique celle de savoir pourquoi les agents n’utiliseraient pas toute l’information disponible. Enfin, puisque l’approche retenue dans cet article n’est pas fondée sur le calibrage mais sur la vérification par date de l’équation d’Euler, il convient de s’interroger sur l’intérêt de l’économétrie pour estimer les préférences.

Équation d’Euler et anticipations non rationnelles

18À condition de raisonner dans un cadre d’équilibres temporaires, l’équation (1) peut conserver sa pertinence sans pour autant nécessiter l’hypothèse restrictive d’anticipations rationnelles, les agents pouvant alors prendre leurs décisions aujourd’hui sur la base de l’idée qu’ils se font de l’état de la nature demain, cette représentation du futur pouvant être affectée par des erreurs qui ne sont pas des bruits blancs [15]. Il importe de souligner ici que tant l’écriture du sacrifice (en termes de non-consommation) que celle de l’espérance d’utilité des recettes futures actualisées peuvent être effectuées directement et sans ambiguïté. La relation (1) peut ainsi être regardée comme traduisant une succession d’équilibres temporaires, les prix s’ajustant à chaque date pour équilibrer les offres et les demandes de titres qui dépendent de l’opinion en t qu’ont les agents sur l’état de la nature en t + 1. Toujours muni d’une rationalité de ses choix, le consommateur-investisseur est ici caractérisé par un comportement marginaliste simple sur des marchés concurrentiels. Par exemple, lorsque sa consommation, ses préférences, ses anticipations (déterminées d’une manière exogène par un modèle quelconque ou encore par une simple croyance) et le prix du portefeuille sur le marché sont tels que la désutilité (exprimée en termes de renoncement à une consommation immédiate), associée à la détention de la dernière unité de portefeuille, est supérieure à l’espérance d’utilité de la recette future actualisée procurée par la détention de cette unité, soit lorsque :

19

equation im2

20les ventes induites de titres sur le marché conduisent à une baisse du prix Pt, cette désépargne conduisant simultanément à une hausse de la consommation et donc à une baisse de son utilité marginale U’(Ct). Si les ajustements sont instantanés, la relation (1) sera donc respectée à tout instant [16]. Grâce au marché financier, l’agent trouvera ainsi en permanence sa position optimale [17] : la relation (1) n’est donc plus nécessairement la solution de la maximisation sous contrainte de l’espé­rance d’utilité de la consommation sur un horizon infini. Il en résulte que la relation (1) devient indépendante de l’hypothèse faite sur la nature des anticipations : cette relation devient désormais compatible avec toute représentation des anticipations et autorise donc l’existence d’erreurs non purement stochastiques dans les prévisions.

21La fonction d’utilité séparable crra (Constant Relative Risk Aversion, telle que U’(Ct) = 1/C?t, ? > 0) sera utilisée dans cet article car cette spécification permet de tester facilement diverses hypothèses sur les anticipations. Ce choix semble d’autant plus raisonnable que l’hypothèse d’anticipations non rationnelles retenue par CLM permet, avec cette même fonction, de rendre compte des principaux faits stylisés concernant les rentabilités, et notamment les deux premiers moments. En reportant cette fonction dans la relation (1), on obtient l’équation suivante :

22

equation im3

23où Et{Gt + 1} représente l’espérance d’utilité en t de la recette de t + 1, grandeur que l’on nommera désormais pour simplifier « gain anticipé ». On en déduit immédiatement que le prix du portefeuille de titres est égal aux recettes espérées et actualisées de la période suivante [18], soit

24

equation im4

25L’espérance d’un produit de deux variables étant égale au produit des espérances de ces deux variables augmenté de leur covariance, la relation (2) permet aussi de déduire que la rentabilité espérée du portefeuille entre t et t + 1 est égale à la somme du taux d’intérêt sans risque (taux d’actualisation commun à tous les titres) et de la prime de risque propre au portefeuille considéré, soit :

26

equation im5

27avec equation im6.

Le pourquoi et le comment des représentations non rationnelles des anticipations

28Les relations ci-dessus déterminent le cours et la rentabilité des actions [19], la représentation des anticipations étant donnée. L’existence de coûts attachés à la collecte et au traitement des informations suffit pour d’expliquer pourquoi les agents peuvent se coordonner rationnellement sur le marché autour d’une représentation biaisée de l’état futur de la nature [20]. En effet, dans ce contexte, les agents n’utilisent une nouvelle information que si l’avantage qu’elle procure est plus grand que son coût d’acquisition et de traitement. Ce comportement économiquement rationnel (Feige et Pearce [1976]) peut être décrit par le modèle illustratif suivant [21].

29Soit Iit le montant d’information de type i (i = 1, 2, …, n) [22] que l’agent représentatif utilise pour former son anticipation en t et soit cit le coût unitaire de collecte et de traitement de cette information supporté par l’agent. En supposant des rendements d’échelle constants, cit représente le coût marginal. Soit f? une fonction doublement dérivable reliant l’erreur quadratique d’anticipation aux informations utilisées par l’agent. On suppose

30

equation im7

31où Rt est la rentabilité des actions. Le signe négatif de la dérivée première de f? signifie que plus l’agent collecte de l’information, plus il espère diminuer l’erreur d’anticipation en utilisant un processus plus sophistiqué, tandis que le signe positif de la dérivée seconde signifie que l’efficacité marginale de l’information décroît lorsque Iit augmente. Pour déterminer le montant optimal de chaque type d’information, le prévisionniste minimise à tout moment le coût total

32

equation im8

33où ?t > 0 représente l’aversion de l’agent à commettre une erreur de prévision, tandis que ?t f? représente sa fonction de perte (une erreur de prévision donnée sera d’autant plus coûteuse que cette aversion est grande). Les conditions du premier ordre conduisent à représenter l’équilibre du prévisionniste en t par la relation suivante :

34

equation im9

35Cet équilibre détermine le montant optimal d’information de type i utilisé par l’agent, soit I*it. L’équation (6) signifie que ce montant est choisi de manière à ce que le gain marginal dû à la décroissance de l’erreur de prévision (i.e. la décroissance marginale de la fonction de perte) égalise le prix unitaire de l’information. Lorsque le coût est nul, les prévisionnistes augmentent la quantité d’information utilisée jusqu’au point satisfaisant la condition – ?id f / dIit = 0 ?i, ce point correspondant à une erreur quadratique f minimale. À ce point, equation im10 atteint son maximum, ce qui signifie que toute l’information « techniquement » pertinente est utilisée : c’est le cas de la rationalité muthienne. Par contre, lorsque le coût est positif, l’agent subirait une perte s’il utilisait toute l’information pertinente pour satisfaire la condition – ?id f / dIit = 0 ; lorsque cit > 0, il va donc limiter son information au sous-ensemble « économiquement » pertinent satisfaisant la condition (6), point où l’augmentation de l’utilité due à la diminution de l’erreur quadratique de prévision s’égalise au coût attaché à l’utilisation d’une unité supplémentaire d’information. Puisque les coûts d’information sont une réalité, le prévisionniste sera donc incité à utiliser un modèle fondé sur une information limitée : dans ce contexte, il devient donc économiquement rationnel… de ne pas anticiper rationnellement ! On voit donc finalement que si l’équation d’Euler repose sur une analyse avantage-coût quant à l’opportunité de détenir des titres ou de consommer, les anticipations économiquement rationnelles reposent sur une analyse avantage-coût quant à l’opportunité d’utiliser ou non une information. Le fait que ces deux hypothèses se réfèrent à un même type de rationalité instrumentale confère donc un comportement homogène à l’agent.

36Dès lors se pose la question cruciale de savoir comment représenter les anticipations. À ce propos, il importe de remarquer que si l’approche CLM sus-visée implique des anticipations non rationnelles, ces dernières ont à long terme une même moyenne que les anticipations qui auraient prévalues si elles avaient été rationnelles ; en fait, les biais supposés par CLM se traduisent par des anticipations « effectives » plus lisses que ne le seraient des anticipations rationnelles (i.e. sous-évaluation de l’ampleur tant des hausses que des baisses futures). Or, en se basant sur les enquêtes de Livingston révélant l’opinion d’experts sur les valeurs futures de l’indice boursier S&P, Park [2006] a montré que les investisseurs ont effectivement tendance à être relativement pessimistes pendant les phases d’expansion économique et relativement optimistes pendant les phases de récession, confirmant ainsi les biais anticipatifs exhibés par CLM. Ces résultats incitent à retenir deux hypothèses dans ce travail pour représenter les anticipations. La première est celle d’anticipations rationnelles ; il s’agit d’explorer économétriquement cette hypothèse afin de comparer les estimateurs des paramètres de préférences avec ceux issus de l’approche par le calibrage, les résultats obtenus constituant en outre un benchmark pour toute approche économétrique. La seconde approche consiste à exploiter les anticipations révélées par les enquêtes de Livingston auprès d’experts, ces données permettant de s’affranchir d’une hypothèse a priori sur le processus anticipatif, tout en prenant en compte des biais anticipatifs analogues à ceux trouvés par CLM.

Pourquoi estimer économétriquement l’équation d’Euler ?

37Pour évaluer les paramètres de préférence, les contributions de la littérature calibrent l’équation d’Euler, l’objectif étant notamment de représenter les deux premiers moments de la rentabilité des actions. L’avantage de cette approche est de ne pas nécessiter la connaissance des anticipations de rentabilité et de consommation à chaque instant, mais seulement les distributions statistiques de ces dernières [23]. L’inconvénient est qu’elle ne s’intéresse pas à la question de savoir si l’équation d’Euler est vérifiée par date. En fait, lorsque les anticipations sont « connues » par date (soit par une hypothèse sur le processus anticipatif soit directement en exploitant des enquêtes d’opinion), il est facile de voir que l’approche par le calibrage induit deux limitations majeures qui ne sont plus justifiées. La première limitation tient au fait que même si les moments inconditionnels sont représentés, par l’équation d’Euler, les valeurs observées des cours (ou de la rentabilité espérée) et les valeurs calculées à chaque date à partir des préférences estimées par le calibrage des moments peuvent rester parfaitement indépendantes au cours du temps (i.e. sans corrélation) : puisqu’il ne dit rien sur la capacité du modèle à expliquer la chronologie boursière, le calibrage n’autorise pas vraiment une conclusion sur la validité du modèle. La seconde limitation tient au fait que les estimateurs issus du calibrage différeront nécessairement de ceux issus de l’ajustement économétrique. En effet, tout ajustement économétrique « propre » impliquant un résidu indépendant des variables exogènes, il en résulte que la variance des valeurs observées de l’endogène est plus grande que celle des valeurs estimées, la différence traduisant la variance des résidus. Par conséquent, lorsque le calibrage permet une représentation de la variance inconditionnelle de la variable d’intérêt, les paramètres ainsi estimés sont nécessairement biaisés du point de vue d’une représentation économétrique de la chronologie de cette variable. Pour cette raison, il reste a priori possible que les valeurs exagérées du coefficient d’aversion au risque obtenues avec la méthode du calibrage sous l’hypothèse AR résultent de la méthode retenue pour estimer ces paramètres et non du modèle lui-même, ce qui justifie la vérification économétrique de ce dernier [24].

L’ÉQUATION D’EULER EST-ELLE VÉRIFIÉE SUR LE MARCHÉ AMÉRICAIN DES ACTIONS ?

38La première section présente les résultats obtenus avec l’hypothèse d’anticipations rationnelles, tandis que la seconde section examine ceux obtenus avec les anticipations d’experts révélées par les enquêtes de Livingston.

Équation d’Euler et anticipations rationnelles

39Deux approches ont été suivies. La première repose sur le concept de « gain anticipé », la seconde, plus classique, sur celui de rentabilité espérée. Afin de pouvoir comparer les résultats avec ceux obtenus avec les anticipations révélées par les enquêtes semestrielles de Livingston, les données utilisées sont de fréquence semestrielle (1 = juin et 2 = décembre) et couvrent la période 1957.1-1989.2. Les séries statistiques utilisées sont les suivantes [25] :

  • Pt : valeur réelle de l’indice boursier = indice Standard and Poor’s 400 des actions industrielles cotées sur le marché américain (moyenne des cours quotidiens de juin ou de décembre) divisé par l’indice cpi des prix à la consommation (juin ou décembre).
  • Dt : Dividendes réels par action = dividendes distribués au cours de la dernière année par les sociétés composant l’indice Pt, mis en base semestrielle et divisés par l’indice cpi des prix à la consommation (juin ou décembre).
  • Ct : Consommation réelle par tête = consommation globale rapportée au nombre d’habitants, divisée par l’indice cpi des prix à la consommation (flux des second ou quatrième trimestres, mis en base semestrielle [26]).
Pour les deux approches indiquées, des tests préalables de Phillips-Perron (non présentés dans cet article) ont montré que l’on peut admettre la stationnarité au seuil de 5 % pour toutes les variables (endogènes et exogènes) intervenant dans les estimations présentées ci-après [27].

Approche par le « gain anticipé »

40D’après la relation (2), les achats et ventes d’actions résultent de la confrontation entre, d’une part, la désutilité associée à la détention d’une unité additionnelle de portefeuille, soit Pt/C?t (partie gauche de (2)), et, d’autre part, le « gain anticipé » actualisé Et{Gt + 1}/(1 + r) associé à cette unité (partie droite de (2)). L’anticipation rationnelle du « gain » peut s’écrire :

41

equation im11

42où ?t + 1 est un bruit blanc représentant l’erreur relative d’anticipation (i.e. pourcentage de Gt + 1 restant imprévu). En reportant l’équation (7) dans la relation (2), et moyennant des approximations acceptables [28], on obtient la relation suivante :

43

equation im12

44L’avantage de la relation (8) tient à sa simplicité d’application : pour l’estimer, il n’est nécessaire ni de connaître la chronique du gain anticipé rationnellement, ni de calculer une covariance conditionnelle [29]. La question est de savoir si les valeurs estimées du taux d’impatience r et du coefficient d’aversion au risque ? sont significatives et économiquement « raisonnables » et si l’erreur ?t est un bruit blanc. L’estimation [30] a été réalisée avec la méthode de Newey-West qui permet des tests sur les estimateurs restant robustes à la fois à l’hétéroscédasticité et à l’autocorrélation des résidus. Les résultats obtenus sont les suivants :

Anticipations rationnelles – Estimation de la relation [8]

figure im13

Anticipations rationnelles – Estimation de la relation [8]

1957.1 – 1989.2 (N = 66)

45Il est intéressant de constater que la valeur estimée du coefficient d’aversion equation im14 est économiquement raisonnable et est significative au seuil de 5 %. Cette valeur est sensiblement plus petite par rapport aux valeurs issues de l’approche par le calibrage, ce qui confirme l’intérêt de ne pas se limiter à cette dernière pour déterminer les valeurs des paramètres de préférences. Cependant, la valeur estimée du taux d’impatience r n’est pas significativement différente de zéro, ce qui contredit l’hypothèse d’une préférence pour le présent. En outre, la qualité de l’ajustement reste limitée [31] et les résidus estimés ne sont pas des bruits blancs (la valeur du DW indique qu’ils sont significativement négativement autocorrélés).

46Trois extensions ont été réalisées, suggérant une certaine robustesse de ces résultats. Tout d’abord, une définition plus restrictive de la consommation (excluant les biens durables) a également été retenue. Ensuite, on a autorisé qu’une part des bénéfices non distribués puisse s’ajouter aux dividendes dans la définition du cash flow. Enfin, des ajustements ont également été effectués sur la période 1889-1984 (données annuelles). Ces extensions ont montré que : (i) les résultats sont peu sensibles à la définition de la consommation, (ii) les bénéfices non distribués ne sont pas significatifs [32], (iii) les estimateurs conservent sur la période séculaire un même ordre de grandeur [33] que sur la période 1957-1989 [34].

Approche par la rentabilité espérée

47La relation structurelle (3) peut être confrontée aux données de l’observation par la relation suivante qui présente l’avantage de faire intervenir le taux de variation de la consommation réelle par habitant ?t, la valeur attendue du coefficient ? étant 1 [35] :

48

equation im15

49où, equation im16 et où ut est l’erreur du modèle. Contrairement à l’approche par le gain anticipé, la difficulté est ici de déterminer les espérances et covariance conditionnelles à l’hypothèse d’anticipations rationnelles. La rentabilité réelle anticipée Et{Rt + 1} et le taux de variation anticipé de la consommation réelle par habitant Et{?t + 1} ont été prédéterminés suivant des processus arma appliqués respectivement aux chroniques Rt + 1 et ?t + 1, une propriété de ces processus étant – conformément à l’hypothèse d’anticipations rationnelles – de générer des résidus qui sont des bruits blancs. Pour une valeur fixée de ?, la grandeur Covt{.} est également issue d’un arma appliqué sur la covariance future Covt + 1 = – (1/C?t + 1moyc) × (Rt + 1moyr) où moyc et moyr représentent respectivement les moyennes [36] de 1/C?t et de Rt, tandis que la grandeur non stationnaire Et{1/C?t + 1} est issue de l’estimation d’un arma appliqué sur la variation (1/C?t + 1 – 1/C?t). On a trouvé un arma (3,2) pour toutes les grandeurs sus-visées, sauf pour la variable Et{?t + 1} qui est représentée par un arma (2,2). À chaque valeur fixée arbitrairement du paramètre c correspond donc une chronique de la composante exogène Covt{.}/Et{1/C?t + 1}, les valeurs des paramètres r et ? étant ensuite déterminés par l’estimation de (9) d’après les moindres carrés non linéaires, en imposant la valeur préalablement fixée de ?. Un large balayage a été opéré sur les valeurs de ?, allant de 10 à – 2 par pas de 0.05. Les estimateurs retenus de ?, r et ? correspondent bien sûr aux valeurs qui minimisent la variance des résidus ut. Les résultats obtenus ont fortement invalidé l’équation structurelle (9) : le coefficient d’aversion au risque est non significatif et prend une valeur négative equation im17, tandis que le coefficient ? est non significativement différent de zéro equation im18. Seul le taux d’impatience est significatif avec le signe attendu equation im19. Enfin, en dépit du fait que les résidus ne sont pas significativement autocorrélés (DW = 1.86), le coefficient equation im20 n’est pas significativement différent de zéro [37].

50Au regard des résultats économétriques obtenus avec les deux approches, on peut donc conclure que l’équation Euler ne s’accorde guère avec l’hypothèse d’anticipations rationnelles, ce qui rejoint les conclusions issues des approches de la littérature fondées sur le calibrage de cette équation.

Équation d’Euler et anticipations révélées par les enquêtes de Livingston

51Depuis 1946, les enquêtes de Joseph A. Livingston révèlent l’opinion sur l’évolution future d’un certain nombre de variables macroéconomiques émanant de 50 à 70 économistes ou financiers professionnellement rattachés à des universités, à des banques commerciales ou d’investissement, à des sociétés non financières et à diverses administrations, tous étant considérés comme des « spécialistes » [38]. Notamment, ces enquêtes donnent en juin et en décembre de chaque année les valeurs anticipées à six mois [39] de l’indice du cours des actions industrielles cotées sur le marché américain (Standard and Poor’s 400 industrial index). Sur le même horizon, les enquêtes révèlent également la valeur anticipée du gnp nominal ; la principale composante de cet agrégat étant la consommation totale (environ 80 % en moyenne), les valeurs anticipées du gnp seront utilisées (avec d’autres variables) pour estimer les anticipations de consommation. Enfin, les enquêtes donnent les valeurs anticipées de l’indice des prix à la consommation (cpi), permettant ainsi de calculer les rentabilités réelles anticipées et le taux de croissance anticipé de la consommation réelle. Les questionnaires sont envoyés début mai et début novembre ; bien que les réponses sont attendues pour la mi-juin et la mi-décembre respectivement, les retours s’étalent en réalité jusqu’à la fin du mois ; nous tiendrons compte de cette imprécision concernant les datations des réponses par un terme correcteur intervenant dans le calcul de la rentabilité espérée. Concernant l’indice boursier, à partir de 1990, l’indice de référence n’est plus le S&P’s 400 industrial index mais le S&P’s 500 composite index ; pour cette raison, nous n’utiliserons pas les données postérieures à 1989. Les anticipations boursières apparaissant en 1952, cette enquête est la plus ancienne fournissant des données continues ; cependant, en raison du fait que les premières enquêtes ne comprenaient qu’un nombre restreint d’individus, et aussi pour laisser aux experts le temps de se familiariser avec l’enquête, la période d’analyse ne débutera qu’en 1956, soit à la neuvième enquête. Au total, les estimations s’effectueront donc sur la période 1956-1989 en données semestrielles et reposeront sur les consensus (moyennes arithmétiques des prévisions individuelles).

52Les opinions émises par les experts peuvent a priori inclure ou exclure tout type d’information. Pour les cours boursiers, on doit cependant souligner que les tests d’absence de biais ou d’orthogonalité effectués dans la littérature concluent au rejet de l’hypothèse d’anticipations rationnelles [40]. On ne suppose donc pas a priori que les anticipations sont biaisées de telle ou telle manière ; au contraire, ce phénomène étant constaté au travers des enquêtes, on suppose que les individus se comportent sur la base de l’opinion révélée dans leurs réponses. L’avantage de ces anticipations révélées est d’évacuer la nécessité d’une hypothèse ad hoc sur le processus anticipatif, permettant ainsi de se dégager de l’hypothèse jointe « équation d’Euler – processus anticipatif ». Cependant, la limitation des données d’enquêtes tient au fait que leur utilisation n’est rigoureuse que si le consensus des anticipations des experts fournit à chaque date un proxy acceptable des anticipations « effectives » [41].

53À partir des consensus des réponses concernant les anticipations de cours, de prix et de gnp il n’est pas possible d’évaluer la valeur du gain anticipé Et{Gt + 1} [42]. Par contre, on peut calculer une valeur de la rentabilité réelle anticipée des actions et une valeur approchée du taux de variation anticipé de la consommation réelle par habitant. C’est pourquoi les tests empiriques ont été conduits suivant l’approche par la rentabilité espérée. Il convient donc en premier lieu de déduire du consensus la valeur de la rentabilité réelle anticipée à six mois du portefeuille d’actions industrielles. Cette rentabilité étant définie par la somme du taux de variation anticipé de l’indice réel du cours des actions et du rendement attendu en dividendes réels, l’expression suivante a été retenue :

54

equation im21

55avec equation im22

56où, pour un mois donné, le cours réel Pt est obtenu en divisant le cours nominal par l’indice cpi des prix à la consommation observé le même mois, tandis que le cours réel anticipé Et{Pt + 1} est donné par le rapport entre l’indice S&P anticipé et l’indice anticipé des prix à la consommation cpi révélé par les mêmes enquêtes (consensus). equation im23 est la moyenne géométrique pondérée des cours réels Pt observés en mai et en juin (première enquête de l’année) ou en novembre et en décembre (seconde enquête de l’année) ; la considération de equation im24 se justifie par le fait que les questionnaires sont envoyés aux experts dès les mois de mai et de novembre, de sorte qu’un nombre significatif d’individus expriment leurs opinions sur le prix futur non pas respectivement en juin et en décembre, mais dès mai et novembre, ce qui les conduit à utiliser comme cours « actuel » les indices observés durant le mois précédant l’enquête. Puisque Pt est déduit de la moyenne des cours quotidiens du mois t, la moyenne pondérée equation im25 indique que la datation de l’indice du cours réel servant de base au calcul du taux de variation anticipé est en moyenne situé entre le 15 mai et le 15 juin pour l’enquête de juin et entre le 15 novembre et le 15 décembre pour l’enquête de décembre. Par exemple, une valeur de c = ½ signifierait une datation au début juin et début décembre du cours de base. Puisque aucun critère a priori ne permet de fixer la valeur de c, cette dernière a été estimée librement en même temps que les paramètres structurels de l’équation d’Euler. Quant à la constante de calage b, elle traduit une erreur systématique de mesure (échantillonnage, erreur sur l’indice de base equation im26, consensus mesuré par des moyennes arithmétiques et non géométriques… [43]). La valeur du biais (equation im27) a été fixée a priori de manière à ce que la rentabilité anticipée et la rentabilité observée ex post aient la même moyenne sur l’ensemble de la période : il est en effet peu probable que, en moyenne sur l’ensemble de la période, les « vraies » anticipations des experts soient différentes des réalisations, et ceci même avec des anticipations qui ne sont pas rationnelles [44]. Enfin, les dividendes réels anticipés Et{Dt + 1} ont été pré-estimés en deux étapes : estimation des dividendes nominaux anticipés suivant un processus extrapolatif, puis division de ces derniers par l’indice cpi anticipé [45]. Bien qu’arbitraire, cette estimation n’est guère gênante dans la mesure où la valeur du rapport equation im28 est très peu sensible à l’hypothèse retenue pour déterminer car est l’élément dominant des fluctuations de ce rapport.

57L’expression théorique (3) de la rentabilité réelle espérée peut être estimée par la relation suivante [46] qui autorise une éventuelle structure autorégressive des résidus :

58

equation im29

59avec equation im30

60et equation im31,

61où ?t est l’erreur du modèle. La rentabilité réelle espérée « observée » étant donnée par (10), il faut donc connaître le taux de variation attendu de la consommation réelle par habitant Et{?t + 1} et la grandeur Zt(?, c) pour pouvoir estimer la relation (11).

62Concernant la variable Et{?t + 1}, rappelons que les enquêtes de Livingston comportent des questions sur les valeurs futures du gnp nominal dont la composante principale est la consommation totale. Pour obtenir une estimation du taux de croissance anticipé de la consommation incluant cette information, on commence par régresser le taux de variation observé de la consommation nominale totale sur les taux de variation actuel et passés du gnp ainsi que sur les valeurs passées d’autres variables. On déduit ensuite de ces résultats un proxy du taux de variation anticipé de la consommation nominale où l’élément dominant est le taux de variation anticipé du gnp. On calcule enfin le taux de variation anticipé de la consommation réelle par habitant Et{?t + 1} en soustrayant l’inflation anticipée [47].

63Concernant la variable Zt(?, c), on suppose que la covariance relative aux valeurs futures de 1/C? et R en t + 1 mais conditionnelle à t, se confond avec la covariance des anticipations faites sur ces deux variables en t pour t + 1, soit :

64

equation im32

65moyc et moyr représentent respectivement les moyennes de Et{1/C?t + 1} et de Et{Rt + 1|c} [48], et où Et{Rt + 1|c} est donné par la relation (10). Cette hypothèse – qui ne traduit donc pas une anticipation rationnelle de la covariance – présente l’avantage de ne faire intervenir que des variables connues à l’instant t tout en respectant à la fois le caractère forwardien de la covariance. Cette hypothèse semble intuitive dans la mesure où elle revient à supposer, d’une part, la nullité de la covariance entre les erreurs de prévision associées aux anticipations des variables 1/C?t + 1 et Rt + 1, et, d’autre part, la nullité des covariances entre l’erreur de prévision associée à une de ces deux variables et la valeur de l’autre variable : a priori, on ne voit pas de raison suggérant que ces grandeurs sont liées. Quant au diviseur de la covariance, il est donné par la relation Et{1/C?t + 1} = 1/C?t (1 - ?Et{?t + 1}) où le taux de variation anticipé de la consommation réelle par tête Et{?t + 1} est pré-estimé comme indiqué ci-dessus. On a donc :

66

equation im33

67En reportant dans la relation (11) la rentabilité réelle espérée Et{Rt + 1|c} donnée par (10) et l’expression de Zt(?, c) donnée par (12), (11) devient entièrement spécifiée avec cinq paramètres arbitraires pouvant être estimés par les moindres carrés non linéaires (mcnl) : c, ?, r, ? et ?. Il n’y a pas de problèmes liés à la présence de variables non stationnaires ; en effet, des tests de racine unité (Phillips-Perron) ont été effectués sur les grandeurs intervenant dans la relation (11) : la variable Et{?t + 1} est stationnaire au seuil de 5 %, alors que, pour les valeurs optimales estimées des paramètres ? et c, on a pu vérifier ex post que la variable Et{Rt + 1|?} est stationnaire au seuil de 5 %, un seuil de 10 % étant toutefois requis pour equation im34. Par ailleurs, puisque la variable endogène intervient dans la définition de la variable exogène equation im35, l’estimation de (11) peut générer un biais dit d’« endogénéité » sur les paramètres, car cette particularité implique une dépendance théorique entre les résidus et les variables exogènes contredisant les principes de base de la méthode. Cependant, on a constaté ex post que les résidus equation im36 issus des mcnl ne sont corrélés avec aucune des deux composantes exogènes (les corrélations valent – 0.0001 et 0.0000 respectivement), ce qui exclut en pratique l’existence d’un biais d’endogénéité. Ajoutons que la colinéarité entre les deux composantes exogènes (r = 0.33) est loin du seuil pouvant induire des estimateurs biaisés. Enfin, un processus ar (1) a été introduit sur les résidus car, contrairement aux résultats obtenus sous l’hypothèse d’anticipations rationnelles, une première estimation a montré une autocorrélation faible mais significative de ces derniers [49]. Les résultats obtenus sont les suivants [50] :

Anticipations révélées par les enquêtes de Livingston : Estimation de l’équation (11) sous les hypothèses (10) et (12)

figure im37

Anticipations révélées par les enquêtes de Livingston : Estimation de l’équation (11) sous les hypothèses (10) et (12)

68Les estimateurs du taux d’impatience (? = 4,8% par an) et du coefficient d’aversion au risque equation im38 sont significatifs et leurs valeurs paraissent économiquement acceptables, alors que la valeur estimée du coefficient ? est très proche de sa valeur théorique unitaire equation im39, montrant ainsi que la restriction impliquée par le modèle correspond aux données observées. La figure 1 donne sous la forme de trois ellipses les intervalles de confiance joints de ces trois paramètres structurels au seuil de 5 % (les points centraux correspondent aux estimateurs) : il est économiquement rassurant de constater que, conformément à ce qui était attendu, les valeurs statistiquement admissibles des coefficients r (alias c(1)) et ? (alias c(2)) sont toutes positives, tandis que les valeurs admissibles de ? (alias c(3)) sont bien distribuées autour de l’unité. Quant à la pondération c, sa valeur estimée equation im40 est bien comprise entre ses bornes théoriques et conduit à attribuer un poids plus grand à l’indice boursier du mois précédent l’enquête (0.73) qu’à celui du mois de l’enquête (0.27) pour représenter l’indice de base auquel doit être rapporté l’indice anticipé dans le calcul de la rentabilité espérée. Les valeurs estimées de la rentabilité espérée (partie droite de (13), equation im41 et equation im42 exclus) représentent d’une manière acceptable les principaux mouvements des valeurs observées (fig. 2) ; bien que l’estimation soit globalement de qualité moyenne, on constate non seulement que 80 % des valeurs observées sont situées à l’intérieur de l’intervalle de confiance (seuil de 5 %), mais encore que les 20 % de valeurs situées à l’extérieur restent à proximité de la borne supérieure ou de la borne inférieure (fig. 3). Enfin, les tests effectués sur les résidus equation im43 montrent que ces derniers ont des propriétés satisfaisantes : on peut admettre qu’ils sont indépendants de leur valeur précédente, qu’ils sont homoscédastiques et distribués normalement. Cependant, puisqu’une part de la corrélation exhibée sur la figure 2 peut être attribuée au fait que l’endogène intervient dans la définition de Zt(?, c), il est opportun de regrouper, d’une part, toutes les variables faisant intervenir les anticipations boursières et, d’autre part, les variables ne dépendant que des variations anticipées de consommation. Dans ce but, la figure 4 montre qu’une corrélation significative subsiste entre, d’une part, la rentabilité réelle espérée des actions diminuée de la prime de risque estimée, soit equation im44, et, d’autre part, la valeur estimée du taux d’intérêt réel sans risque, soit equation im45[51].

Figure 1

Intervalles de confiance joints pour les trois coefficients (seuil de 5 %) (équation (13))

Figure 1

Intervalles de confiance joints pour les trois coefficients (seuil de 5 %) (équation (13))

69On se pose finalement la question de savoir si les valeurs estimées du taux d’intérêt réel sans risque equation im47 (échéance implicite de six mois) restent compatibles avec celles du taux d’intérêt observé kt représenté par le rendement du papier commercial à six mois sur le marché monétaire américain. En principe, la compatibilité serait parfaite si la différence entre le taux nominal observé et le taux réel estimé était égale au taux d’inflation anticipé à six mois. Dans le but d’apprécier la validité de cette condition, la figure 5 donne les évolutions comparées de la différence equation im48 et du taux d’inflation anticipé equation im49 calculé d’après les enquêtes de Livingston, ce taux étant diminué d’une constante de calage égale à 0.031 : avec une même échelle, les deux grandeurs suivent la même évolution générale. La constante de calage étant choisie arbitrairement de manière à ce que les deux grandeurs de la figure 5 aient une même moyenne, il convient de s’interroger sur sa signification. En fait, l’introduction de cette constante ne traduit pas nécessairement une insuffisance intrinsèque du modèle. En effet, cette constante peut se justifier au plan théorique par le fait que le taux d’intérêt réel krt impliqué dans l’équation d’Euler a en principe le statut d’un taux d’intérêt « pur », alors que le taux de marché kt contient une « prime de négociabilité » car les titres à six mois sont négociables avant leur échéance ; puisque cette prime traduit un avantage, elle doit être soustraite du taux pur pour obtenir le taux de marché, conformément à ce qui a été opéré sur la figure 5 [52]. La constante peut aussi résulter d’erreurs de mesure sur les variables, et notamment d’un écart systématique entre l’inflation anticipée par les opérateurs sur le marché monétaire (contenue dans le taux kt) et l’inflation anticipée par les experts de Livingston. Enfin, la valeur de la constante doit être relativisée par l’incertitude pesant sur les estimateurs intervenant dans le calcul du taux equation im50 : nous avons vérifié qu’en calculant ce dernier avec les valeurs r = 0.01 et ? = 1.4 qui restent économiquement acceptables tout en appartenant aux intervalles de confiance joints (voir fig. 1), l’écart systématique de 0.031 est divisé par plus de deux, ce qui accroît la crédibilité des hypothèses d’une prime de négociabilité et d’erreurs de mesure pour interpréter la valeur restante de 0.015. Il semble donc que l’on puisse admettre qu’à la fois l’évolution de la rentabilité espérée des actions et l’évolution du taux d’intérêt peuvent être approximées par l’équation d’Euler [53].

Figure 2

Valeurs observées et calculées de la rentabilité réelle espérée des actions industrielles

Figure 2

Valeurs observées et calculées de la rentabilité réelle espérée des actions industrielles

Figure 3

Valeurs observées de la rentabilité espérée et intervalle de confiance des valeurs théoriques (seuil de 5 %)

Figure 3

Valeurs observées de la rentabilité espérée et intervalle de confiance des valeurs théoriques (seuil de 5 %)

Figure 4

Rentabilité réelle espérée des actions diminuée de la prime de risque estimée et valeur estimée du taux d’intérêt sans risque 1957.2 à 1989.2

Figure 4

Rentabilité réelle espérée des actions diminuée de la prime de risque estimée et valeur estimée du taux d’intérêt sans risque 1957.2 à 1989.2

Figure 5

Écart entre le taux d’intérêt nominal et le taux d’intérêt réel estimé, et taux d’inflation anticipé (1957.2 à 1989.2)

Figure 5

Écart entre le taux d’intérêt nominal et le taux d’intérêt réel estimé, et taux d’inflation anticipé (1957.2 à 1989.2)

CONCLUSION

70À condition d’interpréter l’équation d’Euler dans un cadre d’équilibres temporaires, il est possible d’y introduire des anticipations quelconques, rationnelles ou non rationnelles. En conservant une fonction d’utilité séparable de type crra et des préférences indépendantes de l’état de la nature, l’hypothèse d’anticipations rationnelles ne permet pas de valider l’équation d’Euler par date. Par contre, les anticipations d’experts révélées par les enquêtes de Livingston – lesquelles exhibent une représentation du futur éloignée de la rationalité – permettent de montrer, avec des paramètres de préférences prenant des valeurs plausibles, que tout se passe comme si le cours des actions industrielles cotées sur le marché américain des actions vérifiaient par date l’équation d’Euler, d’une manière approximative tout au moins. L’existence de coûts associés à l’accès et au traitement de l’information pourrait expliquer pourquoi des investisseurs rationnels se coordonneraient en adoptant un comportement eulérien, mais avec des anticipations non rationnelles.

71Dans l’ensemble, les résultats économétriques présentés dans cet article renforcent ceux de la littérature qui ont montré – en calibrant l’équation d’Euler – que l’introduction de biais anticipatifs permet de résoudre le premium puzzle et le volatility puzzle. Au regard des enquêtes de Livingston, alors que l’hypothèse d’une efficience allocative traduite par l’équation d’Euler s’accorde avec les données de l’observation, celle d’une efficience informationnelle impliquant des anticipations rationnelles est au contraire infirmée. L’interprétation suggérée dans cet article est que les coûts d’information joueraient un rôle crucial (non-rationalité des anticipations), tandis que les coûts de transaction auraient une influence plus modérée (validité approximative de l’équation d’Euler).

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  • Weil P. [1989], « The equity premium puzzle and the risk-free rate puzzle », Journal of Monetary Economics, 24 (3), p. 401-421.

Notes

  • [*]
    Cnrs, EconomiX (umr 7166 du cnrs), Université Paris-X Nanterre, Bât. G, 200 avenue de la République, 92001 Nanterre Cedex, France. Courriel : georges. prat@ u-paris10. fr
    Une première version de ce travail avait été présentée lors du 37e congrès annuel de l’Association canadienne d’économie (Carleton University, Ottawa, mai-juin 2003) et ne conduisait à cette date qu’à des résultats mitigés. J’exprime ma gratitude envers Antonio Melino (Université de Toronto) dont les observations faites à cette occasion m’ont incité à poursuivre dans cette voie. Une seconde version a bénéficié des observations de Roger Guesnerie et de Jean-Charles Rochet lors du LIIIe congrès de l’afse (Paris, septembre 2004), et je tiens à les en remercier. Enfin, je remercie deux lecteurs anonymes de cette revue dont les critiques ont permis une amélioration substantielle de cet article. J’assume bien sûr l’entière responsabilité des insuffisances pouvant subsister dans ce travail.
  • [1]
    Le premier auteur ayant attiré l’attention sur le volatility puzzle est Shiller [1981].
  • [2]
    Le premier travail évoquant le premium puzzle est celui de Mehra et Prescott [1985].
  • [3]
    Nous laissons ici de côté des approches cherchant à endogénéiser la consommation par la modélisation du secteur productif. Ces approches cherchent à rendre compte à la fois des faits stylisés des marchés financiers et des fluctuations économiques dans le cadre unifié de l’équilibre général dynamique. Pour être bref, ces approches n’améliorent pas vraiment la représentation des faits relatifs aux marchés financiers.
  • [4]
    Voir encore Cho et Dokko [1993] ainsi que Hansen, Sargent et Tallarine [1997]. Pour une application en France, voir Epaulard et Pommeret [2001].
  • [5]
    Contrairement aux premiers travaux consacrés à cette approche qui reposaient sur des spécifications différentes des habitudes (voir Constantinides [1990]).
  • [6]
    Néanmoins, les derniers développements de cette approche montrent qu’elle reste potentiellement fructueuse (voir notamment Korniotis [2004]).
  • [7]
    On peut mentionner ici l’approche fondée sur l’idée que les puzzles pourraient résulter de frictions et d’erreurs de mesure ou de spécification perturbant plus fortement les composantes à hautes fréquences des rentabilités que les composantes à basses fréquences. Généralement, les analyses fondées sur une telle décomposition spectrale montrent que, pour des valeurs « raisonnables » de l’aversion au risque, les premium et volatility puzzles restent assez répartis sur le spectre (Hansen et Jagannathan [1997] ; Cogley [2001]).
  • [8]
    Pour une application en France, voir Epaulard et Pommeret [2001].
  • [9]
    Voir encore Cochrane [1997], p. 22 et sq. Notons qu’Attanasio, Banks et Tanner [1998] utilisent une approche probabiliste afin de distinguer les comportements des consommateurs suivant qu’ils détiennent ou non des actions (d’après l’enquête du Panel Study of Income Dynamics de 1984, environ un ménage américain sur quatre détenait des actions), et montrent que cette approche permet de réduire le premium puzzle.
  • [10]
    Voir notamment Heaton [1995].
  • [11]
    Il est intéressant de noter qu’un modèle avec anticipations rationnelles et utilité non espérée (fonction récursive) faisant intervenir des habitudes de consommation peut dans certains cas être formellement équivalent à un modèle avec utilité espérée classique combiné avec des anticipations biaisées (voir Hansen et al. [1999]). Mais cette propriété, qui génère une indétermination sur le sens économique, ne s’applique pas à l’approche CLM.
  • [12]
    Abel [2001] obtient des résultats allant dans le même sens avec un agent représentatif uniformément pessimiste (translation vers la gauche de la distribution des taux de variation de la consommation) et affecté de doute (augmentation exogène du risque perçu par l’agent). Ces deux biais ont pour effet de réduire la valeur d’équilibre du taux sans risque et d’augmenter celle de la prime de risque exigée par les détenteurs d’actions. L’auteur montre qu’en corrigeant les résultats de Mehra et Prescott [1985] de ces biais, il est possible de résoudre l’equity premium puzzle. En fait, l’hypothèse de biais uniformes est très hardie et l’auteur ne s’intéresse qu’aux premiers moments. C’est pourquoi la contribution d’Abel nous semble beaucoup plus limitative que celle de CLM.
  • [13]
    Ce ratio de Sharpe est le rapport entre la prime de risque moyenne et l’écart type de la rentabilité espérée des actions (telle qu’elle ressort des enquêtes de Livingston), la prime étant estimée par la différence entre la rentabilité espérée des actions et le taux sans risque observé. Pour ne pas invalider le modèle de Lucas, la valeur observée de ce ratio doit, suivant que les anticipations sont ou non biaisées (approche CLM) ou suivant qu’il existe ou non des habitudes (approche cc), être plus grande ou égale à sa valeur théorique (une fonction d’utilité crra est utilisée).
  • [14]
    D’une manière plus générale, de nombreuses études montrent que les prévisions des analystes financiers sont biaisées (voir notamment Hong, Lim et Stein [2000]).
  • [15]
    D’après Grandmont ([1976], p. 806-808), « selon ce point de vue, à chaque date les agents doivent prendre des décisions en fonction de leurs anticipations sur leur environnement futur, qui dépendent de leur information sur l’état de l’économie dans les périodes courante et passées… un concept nouveau apparaît dans ces modèles (à équilibres temporaires) par rapport à la théorie traditionnelle de l’équilibre général, celui d’une “fonction d’anticipation”, qui décrit la dépendance des prévisions d’un agent par rapport à son information… ».
  • [16]
    Une question importante est celle de l’existence d’un système de prix équilibrant l’offre et la demande sur le marché de chaque actif (Grandmont [1976], p. 812-813). Dans le cadre de l’équation (1), la réponse paraît évidente : le prix de chaque actif peut s’ajuster de manière à obtenir (1), certains prix augmentant et d’autres baissant, la variation de la consommation globale soldant l’écart entre l’offre et la demande globales de titres.
  • [17]
    Dans le cas où l’inégalité est de sens inverse, les achats nets d’actions induiront une hausse de U’(Ct)Pt. La contrainte de liquidité ne se pose pas ici, car les achats d’actions sont financés par un renoncement à une partie de Ct (i.e. hausse de l’épargne). On admet cependant que Ct se situe suffisamment au-dessus de sa valeur incompressible, condition naturellement remplie pour les détenteurs d’actions dans une économie développée.
  • [18]
    L’intégration forward de (2)’ montre qu’une solution particulière appelée « valeur fondamentale » est la somme actualisée du flux des dividendes anticipés sur un horizon infini. Dans cet article, nous avons travaillé directement à partir des équations (2) ou (3), ce qui évite toute difficulté liée à l’existence de bulle.
  • [19]
    D’après la relation (3), on voit que le premium puzzle est attribuable au fait que la covariance entre l’utilité marginale de la consommation et la rentabilité des actions est en moyenne trop faible pour expliquer l’écart moyen observé entre la rentabilité des actions et le taux d’intérêt, pour des valeurs raisonnables de l’aversion au risque caractérisant la fonction d’utilité. C’est pourquoi ce puzzle est parfois aussi appelé correlation puzzle. Notons bien ici que, même si cette covariance était en moyenne suffisamment élevée pour expliquer la prime moyenne observée, cela ne signifierait pas pour autant que le modèle explique la dynamique de la prime observée par date. En effet, pour qu’il en soit ainsi, il faudrait que la covariance entre la prime observée et la prime théorique soit elle-même suffisamment élevée et positive.
  • [20]
    Grossman [1976] a montré que l’hypothèse de marché efficient soulève un paradoxe : le prix y véhiculant toute l’information disponible, les agents ne sont plus incités à collecter de l’information coûteuse sur les fondamentaux, ce qui a pour conséquence… l’inefficience informationnelle du prix. Grossman et Stiglitz [1980] montrent que si l’information est coûteuse (ou bruitée), le prix d’équilibre du titre ne capture plus d’emblée toute l’information disponible : le paradoxe disparaît, mais le prix ne véhicule plus des anticipations rationnelles.
  • [21]
    Cet exposé conserve l’esprit de Feige et Pearce bien qu’il s’en distingue par le fait que l’information est reliée à l’espérance de l’erreur quadratique et non à la valeur ex post de cette erreur, de sorte que f? apparaît clairement comme une fonction de comportement. Nous reprenons pour une part l’exposé de Prat et Uctum [2006].
  • [22]
    Les types d’information sont les valeurs présente et passées des rentabilités ou de toute autre variable micro ou macroéconomique observable.
  • [23]
    On doit toutefois noter une exception avec l’article de Campbell et Cochrane [1999] introduisant des habitudes de consommation. Cependant, avec les valeurs des paramètres de préférence déterminés par calibrage, et en remplaçant les anticipations (rationnelles) par les valeurs observées ex post, le modèle cc ne peut décrire l’historique par date du rapport cours/dividendes : sur un demi-siècle (1945-1995), les valeurs théoriques de ce rapport restent sans corrélation avec les valeurs observées (voir fig. 9 de l’article). En fait, les commentaires plutôt favorables des auteurs (p. 207) sont largement attribuables à la crise des années 1930 pendant laquelle à la fois les cours boursiers et la consommation chutent drastiquement, comme d’ailleurs la plupart des indicateurs économiques.
  • [24]
    L’approche spectrale de Berkowitz [2001] illustre bien ce point sur données américaines en montrant qu’en minimisant pour chaque fréquence la variance des résidus associés à l’équation d’Euler (2) (les anticipations sont supposées rationnelles), le coefficient d’aversion au risque prend des valeurs raisonnables, allant d’environ 1 à 5 suivant la valeur de la fréquence envisagée et selon la définition de la consommation (cependant, le taux d’impatience reste trop élevé).
  • [25]
    Sources : Datastream.
  • [26]
    Tous les taux considérés dans ce travail étant en base semestrielle, les dividendes et la consommation ont été mis en base semestrielle car ce sont des flux, et sont à ce titre dimensionnés par rapport au temps tout comme le sont lesdits taux. Cette opération est neutre pour la valeur du taux de variation de la consommation mais ne l’est pas pour le calcul de l’utilité marginale et pour le calcul du rendement des actions (dividend yield). Le choix du flux correspondant au second trimestre et au quatrième trimestre (mis en base semestrielle) a été retenu par souci de comparaison des résultats présentés dans cette section avec ceux obtenus avec les données d’enquêtes ; dans ce dernier cas, ce choix permet de rester plus proche de l’instant où les anticipations des experts sont émises (juin et décembre) que si l’on considérait le flux du dernier semestre.
  • [27]
    Concernant l’approche fondée sur la rentabilité espérée, une difficulté tient au fait que certaines variables dépendent elles-mêmes des paramètres estimés, de sorte qu’il n’est pas possible, pour ces variables, d’effectuer des tests de stationnarité avant l’estimation. Leur stationnarité a néanmoins été vérifiée après l’estimation du modèle.
  • [28]
    On admet ln (1 +r ) ? r et ln (1 + ?t + 1) ? ?t + 1, ce qui semble acceptable, compte tenu des domaines de variation vraisemblables de ces deux grandeurs.
  • [29]
    Pour chaque bande de fréquences de la décomposition spectrale, Berkowitz [2001] adopte une approche analogue en minimisant la variance de la grandeur equation im55 dont la valeur théorique est zéro. L’auteur estime ainsi les valeurs optimales de r et de ? (voir note 1, p. 438), mais ne donne pas d’indication sur l’importance des résidus pour chaque bande de fréquences.
  • [30]
    Tous les calculs présentés dans cet article ont été effectués à l’aide du logiciel EViews5.
  • [31]
    Alors que les estimateurs de ? et r sont indépendants de la variance des erreurs de prévision ?t contenues dans les résidus du modèle, le coefficient de corrélation sera d’autant plus petit que la variance de ?t est grande. La part de la variance du résidu attribuable à ?t restant inconnue, le R2 doit donc être considéré comme un critère permettant d’apprécier d’une manière jointe la précision des anticipations rationnelles (variance de ?t) et la validité de l’équation d’Euler.
  • [32]
    En effet, certaines sociétés peuvent partiellement payer cash leurs actionnaires non pas en versant des dividendes mais par le rachat de titres sur le marché en puisant dans les bénéfices non distribués, de sorte qu’une part de ces derniers peut être vue comme du cash-flow. Dans l’équation (8), on a ainsi remplacé le dividende Dt par la grandeur Rt = Dt + a(Bt - Dt) (avec 0 ? a ? 1) où Bt = bénéfice par action après impôt. Si a = 0, on obtient Rt = Dt et on retrouve la spécification initiale ; si a = 1, on obtient Rt = Bt et le dividende doit être remplacé par le bénéfice. Pour toute valeur de a comprise entre 0 et 1, les investisseurs valorisent une part du bénéfice non distribué mesurée par le coefficient a. Les ajustements ont systématiquement conduits à une valeur non significativement différente de zéro du paramètre a, à la fois sur la période 1957-1989 et sur la période 1889-1984.
  • [33]
    L’estimation de (8) d’après la méthode Newey-West conduit sur cette période aux résultats suivants :
    equation im56
  • [34]
    Alternativement, il est intéressant de remarquer qu’en reportant la martingale Et{Gt + 1} = Gt dans la relation structurelle (2) (hypothèse d’anticipations naïves), on déduit que le rapport dividendes/cours est égal au taux d’impatience, soit Dt/Pt = r. Cette conséquence ne saurait traduire la réalité puisque nous savons que les valeurs observées de ce rapport sont caractérisées par une structure autorégressive et qu’elles sont significativement corrélées avec des variables économiques observables (Fama [1990]). Par ailleurs, on a également pu constater que la représentation du « gain anticipé » par un processus de type extrapolatif, adaptatif ou régressif ne permet pas plus que les hypothèses d’anticipations naïves ou rationnelles de valider l’équation d’Euler.
  • [35]
    Puisque equation im57 et que, les valeurs de ?t + 1 étant toujours très inférieures à l’unité, on peut admettre equation im58, on en déduit que equation im59. En reportant ce résultat dans l’équation (3), on obtient la relation (9) avec ? = 1.
  • [36]
    Alternativement, on a considéré des moyennes moyct et moyrt variables au cours du temps (moyennes des n derniers semestres) : la qualité des résultats ne s’est guère améliorée.
  • [37]
    Ceci en dépit du fait que le terme exogène Covt fait intervenir les rentabilités passées, tout comme l’endogène. Cette dernière propriété pouvant induire un « biais d’endogénéîté » résultant d’une dépendance indésirable entre le résidu et les exogènes, nous avons calculé ex post les corrélations entre les résidus et les deux composantes exogènes : les deux coefficients de corrélation s’étant révélés non significativement différent de zéro, on peut conclure en l’absence d’un biais significatif avec nos données.
  • [38]
    Après la mort de Livingston en 1989, la banque fédérale de Philadelphie a poursuivi l’enquête ; elle nous a gracieusement fourni les données. Croushore [1997] donne une synthèse des études ayant utilisé ces données.
  • [39]
    Les enquêtes donnent aussi les anticipations à un horizon de douze mois. Nous n’avons pas utilisé cet horizon car, avec une fréquence semestrielle des données, aurait surgi un biais économétrique dû au chevauchement des observations successives.
  • [40]
    Tant au niveau du consensus que des groupes d’experts qu’à celui des individus (Prat [1994] ; Abou et Prat [1997]). Sur la période 1957.1 à 1989.2 considérée dans le présent article, nous trouvons un coefficient de régression entre le taux de variation anticipé à six mois du cours des actions et le taux de variation réalisé sur les six prochains mois qui est non significativement différente de zéro, ce qui confirme donc les résultats de la littérature. Sur la question de savoir comment se forment les anticipations boursières révélées par les enquêtes de Livingston, voir Abou et Prat [2000]. Les travaux sur les anticipations d’inflation issues de ces enquêtes concluent également à la non-rationalité, et il en est de même des tests que nous avons effectués sur le taux de croissance anticipé du gnp.
  • [41]
    Autrement dit, l’écart entre les anticipations du marché et celles révélées par les enquêtes doit être un bruit blanc augmenté d’un éventuel biais constant. Cette hypothèse est bien sûr discutable dans la mesure où la « proximité au marché » n’est pas assurée pour tous les répondants. Cependant, remarquons que les experts du panel de Livingston sont des personnalités influentes et que les institutions bénéficiant de l’avis de ces personnalités occupent une place non négligeable dans le volume des transactions en bourse (voir Lakonishok [1980], p. 922). On ne peut aussi occulter l’objection courante suivant laquelle, pour des raisons inhérentes aux jeux spéculatifs, les experts ne révéleraient pas leurs vraies anticipations de prix sur les marchés financiers. Il faut à ce propos noter que chaque réponse reste confidentielle, qu’elle ne pèse pas significativement sur le consensus, et qu’en outre ce dernier n’est rendu public qu’au cours du mois suivant l’enquête. Ces conditions paraissent donc éliminer tout mobile pouvant conduire un expert à ne pas révéler sa véritable opinion, et ceci d’autant plus que ce dernier peut trouver un certain intérêt à démontrer sa capacité de prévisionniste auprès de son institution.
  • [42]
    Ceci tient au fait que formellement, la grandeur théorique equation im60 ne s’égalise pas à la grandeur equation im61 qui seule peut être mesurée avec nos données.
  • [43]
    D’une manière générale, les coefficients de variation (rapport écart-type/moyenne) des variables anticipées par les experts de Livingston ont des valeurs qui restent modérées et relativement stables (autour de 10 % pour les cours boursiers sur la période considérée). Ceci nous autorise à retenir dans ce qui suit l’approximation equation im62 correspond au consensus des réponses relatives à la variable Xt.
  • [44]
    Si l’hypothèse d’anticipations rationnelles implique l’égalité entre les moyennes historiques des anticipations et des réalisations (erreur de prévision nulle en moyenne), la réciproque n’est pas vraie : l’égalité des moyennes est une condition nécessaire mais non suffisante pour caractériser des anticipations rationnelles. Notons que la détermination a priori de la valeur de b repose sur le fait que la valeur de ce paramètre est pratiquement indépendante de celle de c.
  • [45]
    Soit Dnt les dividendes nominaux en base annuelle ; le coefficient extrapolatif a été obtenu en estimant le l’équation suivante :
    equation im63
    Puisqu’on a equation im64, on peut en déduire
    equation im65
    Enfin, les dividendes réels anticipés en base semestrielle sont donnés par
    equation im66
    où Et{CPIt + 1} représente l’indice CPI anticipé à six mois (enquêtes).
  • [46]
    Voir supra, note 5, p. 440.
  • [47]
    Soient respectivement kt et SCt, le taux de rendement du papier commercial à six mois sur le marché monétaire et le Consumer Sentiment Index construit par le Survey Research Center de l’université du Michigan à partir d’enquêtes auprès des ménages américains ; cet indice traduit l’opinion des ménages sur leurs situations financières personnelles et sur l’état actuel et futur de l’économie américaine en général ; il est fondé sur la différence entre les opinions favorables et défavorables. L’équation obtenue pour le taux de variation de la consommation nominale totale CNt est la suivante :
    equation im67
    Cette équation permet de déduire l’équation de mesure du taux de variation anticipé à six mois :
    equation im68
    En soustrayant de ce dernier taux le taux d’inflation anticipé à six mois (enquêtes) et le taux de croissance de la population, on obtient le taux de variation attendu de la consommation réelle par habitant Et{?t + 1} (on a constaté que ce taux a pratiquement une même moyenne que le taux observé). Le signe négatif obtenu pour la variable SCt tend à indiquer que, lorsque l’agent représentatif pense que sa situation économique financière est en voie d’amélioration, il envisage une hausse de son épargne (i.e. une baisse de sa consommation), ce comportement correspondant à la volonté de répartir d’une manière optimale ses consommations au cours du temps ; le signe négatif de la variation du taux d’intérêt renforce ce comportement d’arbitrage intertemporel.
  • [48]
    Alternativement, on a considéré des moyennes moyct et moyrt variables au cours du temps (moyennes des n derniers semestres) : la qualité des résultats s’est détériorée.
  • [49]
    Outre le fait que ce processus permet une estimation efficace, il peut traduire l’existence d’un ajustement non instantané de la rentabilité espérée par les experts sur la valeur d’équilibre donnée par l’équation d’Eiuler. Sur ce point, voir Prat [1993].
  • [50]
    Deux variables muettes (valant respectivement 1 en 1987.2 et 1988.1 et 0 pour les autres dates) ont été introduites pour capturer les effets du krach d’octobre 1987. Ces variables s’étant révélées peu significatives, elles ont été supprimées de l’ajustement final.
  • [51]
    Même si les écarts (résidus) sont les mêmes sur les figures 2 et 4, la corrélation entre les deux grandeurs de la figure 4 n’est pas une conséquence nécessaire de la corrélation existant entre celles de la figure 2.
  • [52]
    La volatilité de l’écart equation im69, plus importante que celle de l’inflation anticipée, peut également être attribuée à l’existence d’une prime de négociabilité qui serait variable au cours du temps.
  • [53]
    Rappelons que, sous l’hypothèse d’anticipations rationnelles, la résolution du premium puzzle avec une valeur raisonnable de l’aversion au risque génère une autre énigme, celle portant sur la valeur moyenne du taux d’intérêt (risk-free rate puzzle, Weil [1989]).

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