Notes
-
[*]
Commissariat à l’énergie atomique, Université des Sciences sociales de Toulouse, 21 allée de Brienne, 31000 Toulouse Cedex. E-mail : bousquet@ cict. fr.
-
[**]
Université de la Rochelle, LASER et LEERNA. E-mail : ppfavard@ cict. fr. Nous remercions Claude Crampes, Franck Portier ainsi que les deux rapporteurs anonymes pour leurs commentaires constructifs.
-
[1]
Cette terminologie a été adoptée en raison de la forme croissante puis décroissante relevée par Kuznets [1955] dans ses travaux sur la relation entre l’inégalité dans la distribution du revenu et la croissance économique.
-
[1]
On pourrait supposer une fonction d’utilité plus générale dans laquelle le taux marginal de substitution entre la consommation et la pollution serait strictement croissant. Une condition suffisante serait Ucp ? 0.
-
[1]
Notons que ce modèle est un modèle statique et donc on n’étudie pas les problèmes liés à l’accumulation de la pollution.
-
[2]
Compte tenu des hypothèses sur la fonction d’utilité, les conditions du second ordre sont vérifiées.
-
[1]
Le fait que la consommation reste croissante malgré une quantité de pollution décroissante permet de rendre crédible ce genre de modèle statique.
-
[1]
La normalisation par ( 1 + µ ) fait que le revenu moyen de la population est égal à M, ce qui nous permettra de comparer les différents résultats. De plus, il est possible de modifier la distribution du revenu par une variation du paramètre µ, sans affecter la valeur du revenu moyen.
-
[1]
Le problème (9) est convenxe, il y a donc un maximum unique.
-
[2]
Sous l’hypothèse que le niveau de consommation est toujours en deçà du niveau de saturation. Compte tenu de la valeur optimale de la taxe, on montre que cette contrainte 2 ve ( 2 + µ ) s’écrit M ?. Si µ < 2, la pollution est maximale pour un niveau de revenu b µ ( 1 + µ ) tel que aucun consommateur n’a atteint son niveau de saturation.
-
[1]
La condition du second ordre est vérifiée.
-
[2]
Il est évident que ? ( ? ) < 0 ne peut être une solution, car dans ce cas la consommation agrégée n’est plus inférieure au revenu total disponible dans cette société ( i.e. M) lorsque l’uniformité de la taxe est imposée. Seules les solutions donnant un niveau de taxe strictement positif et conduisant à une utilité supérieure à l’utilité obtenue lorsque la taxe est nulle, seront retenues.
-
[1]
On pose f1 ( µ ) = 2 ve et g1 ( µ ) =. f est convexe et déb ( 1 + µ )2 b ( 1 + µ )2 croissante et passe par le point A = )4vea ? 1,8 veb |. La fonction g est concave et a2 admet un maximum unique en A. Au-delà de A on a f1 ( µ ) < g1 ( µ ).
-
[2]
Il est clair que l’on aurait pu choisir d’autres règles de vote et que les résultats en auraient été changés.
-
[3]
t ( ? ) est en fait une tranformée d’une densité de probabilité, elle est donnée par (14).
-
[1]
a ?m ( 1 + µ ) ? 2 ve On pose g2 ( µ ) =.
-
[2]
Dans le cas contraire, le calcul de la taxe choisie est simple puisque l’électeur médian a le revenu médian. La méthode de détermination de cette taxe est similaire au cas b.
-
[1]
Sauf dans le sous-cas 2.a, lorsque ? ( ? ) ? ? ( ? ) ? 1 ( i.e. 2 1 ( 1 ? ? )µ ? ( 1 ? ? )µ ? 2 ) alors aucun effort de dépollution n’est engagé puisque plus de la moitié des individus ne souhaite pas payer de taxe.
-
[2]
On pose f2 ( µ ) = 2 ve. b ?m ( 1 + µ )2
-
[3]
Le programme informatique écrit en langage Gauss, utilise une méthode de quasi-Newton pour retrouver les solutions de l’équation non linéaire de la taxe optimale.
-
[1]
Dans le cas de la loi Beta, on sait qu’il existe une relation croissante entre l’indice de concentration de Gini et le paramètre µ.
INTRODUCTION
1Les informations statistiques disponibles ont, pendant longtemps, accrédité l’idée selon laquelle la croissance économique s’accompagnait irrémédiablement d’une dégradation de l’environnement. Des travaux économétriques plus récents exhibent des cas où l’on observe une inversion de tendance dans la relation pollution-croissance. Il semble donc qu’au-delà d’un certain niveau de développement économique les émissions de polluants puissent diminuer et ce, en dépit du maintien de la croissance économique. Ainsi, suivant une phase croissante puis décroissante, la courbe qui lie les niveaux d’émissions de polluants au PIB aurait la forme d’une courbe en cloche. Les premiers articles qui ont tenté de mettre en évidence ce type de relation dénommée Environmental Kuznets Curve [1] (Grossman et Krueger [1991] et [1995], Shafik et Bandyopadhyay [1992] suivis par Panayotou [1993], Selden et Song [1994] et Cropper et Griffiths [1994]), ont posé les bases d’une exploration statistique dans laquelle les principaux polluants de l’air, de l’eau, du sol ou encore des indicateurs de dégradation de l’environnement concernant la faune, la flore ont été systématiquement étudiés.
2Dans tous ces articles, la relation pollution-croissance est appréhendée de la façon la plus simple qui soit, par des tests économétriques d’ajustement d’une courbe théorique en forme de U inversé aux données. La spécification généralement retenue consiste à estimer une forme quadratique faisant intervenir le PIB par tête et le carré du PIB par tête comme variables explicatives des émissions de pollution par tête. À l’exception de quelques différences de spécification (linéaires ou log-linéaires) ou encore la prise en compte d’autres variables explicatives du niveau de pollution comme la densité de population par exemple, il n’existe pas de différence majeure dans les modélisations proposées. La plage des estimations est cependant très vaste. Sur l’ensemble des études, il n’est pas toujours possible de conclure quant à la présence d’une phase décroissante pour les divers polluants anthropiques. Par ailleurs, lorsque cette phase existe, nous avons pu remarquer une très forte variabilité dans l’estimation du revenu par tête où la tendance de la pollution s’inverse, sans que l’on soit sûr que ces différences soient biens réelles ou qu’elles soient le reflet des périodes et/ou des pays considérés dans les études. Bien que les estimations de chaque étude considérée séparément apparaissent souvent fragiles (et même pour nombre d’entre elles statistiquement non significatives), leur conjonction n’en semble pas moins probante. Il semble bien en effet, au moins pour certains polluants (tels le dioxyde de soufre ou plus généralement les pollutions de l’air dans les villes ; voir Ekins [1997] pour une synthèse des résultats empiriques), que l’on observe une réduction significative des émissions dans les économies les plus développées. Ces premières évidences empiriques suggèrent que la croissance économique est compatible avec une amélioration de l’environnement. L’interprétation radicale de ce résultat, telle qu’on peut la trouver dans un rapport sur l’environnement de la Banque mondiale ( IBRD [1992]) est que la croissance économique de long terme est une condition nécessaire à la résolution des problèmes environnementaux. Des positions plus nuancées sur ce sujet considèrent que la décroissance des émissions de polluant n’est pas le résultat d’une politique de « laissez-faire » mais consécutive au succès de politiques environnementales. Ces dernières auraient pu être mises en œuvre dans les économies les plus avancées parce qu’il existe, d’une part, une demande pour préserver l’environnement et, d’autre part, des possibilités technologiques pour satisfaire cette demande à un coût raisonnable.
3Les conclusions, voire les recommandations, qui ont pu être tirées de la littérature économétrique récente sur la relation pollution-croissance mériteraient probablement plus de précautions et cela pour deux raisons.
4La première tient au manque d’analyse de la robustesse des estimations de la relation pollution-croissance. Il est fort probable que ces estimations soient biaisées. On peut suspecter des biais d’agrégation, il est possible que la diminution des émissions s’explique davantage par l’accroissement du poids des services dans le PIB que par une réelle réduction des rejets de polluant dans l’industrie. Par ailleurs, les bases de données sur l’environnement peuvent contenir des biais de sélection imputables aux choix spatio-temporels des points de mesure pouvant éventuellement sur-représenter les lieux où la pression environnementale est forte. Le problème peut dépasser le cadre du simple problème statistique de biais de sélection si l’on envisage que la réduction d’une pollution locale est le résultat d’une délocalisation des activités polluantes. La seconde raison est plus fondamentale et tient à l’absence d’un modèle économique structurel proposant une explication théorique à la diminution des émissions de polluant au-delà d’un certain niveau de développement ou de richesse. Dans tous les cas, les estimations économétriques proposées s’appuient sur des formes réduites où la relation pollution-croissance et la liste des variables explicatives sont ad hoc. Ceci explique probablement, pour une large part, les difficultés d’interprétation des résultats économétriques.
5L’objectif de cet article est de tenter de combler cette lacune en proposant un modèle analytique simple permettant de caractériser l’évolution de la pollution en fonction de la consommation et du revenu. Dans la section 2, nous proposons un modèle microéconomique dans lequel nous analysons la relation entre un bien désiré, la consommation, un bien indésirable, la pollution, et le revenu. Nous supposons que la pollution est générée par la consommation et qu’il existe, par ailleurs, une technologie de dépollution qui peut être utilisée, le cas échéant, pour circonscrire la dégradation de l’environnement. La relation obtenue dans ce modèle entre la pollution et le revenu dépend des propriétés des préférences et des caractéristiques des technologies utilisées dans les activités de production et de dépollution. Nous déterminons les différentes phases de la relation pollution-revenu en proposant des interprétations économiques aux seuils de revenu à partir duquel l’effort de dépollution est engagé et celui à partir duquel la pollution entre dans une période décroissante.
6Ce premier modèle statique fournit une base de développement théorique permettant d’intégrer une situation plus réaliste. Dans la section 3, nous considérons le cas d’une population hétérogène de consommateurs et nous recherchons dans ce cas la quantité de revenu qui est affectée à la dépollution. Ceci nous permet de mettre en évidence le rôle de l’inégalité des revenus dans le niveau de la pollution et, par voie de conséquence, d’expliquer les retards qu’une nation plus ou moins égalitaire rencontrerait pour parvenir à réduire ses émissions de polluants.
7Dans la section 4, nous considérons le cas d’une société « démocratique » où un projet environnemental est soumis et décidé par une procédure de vote à la majorité. Nous montrons dans quels cas une société démocratique consent à des efforts pour protéger l’environnement. Là encore, nous disposons d’un argument théorique supplémentaire pour comprendre les différences qui peuvent survenir le cas échéant entre différentes nations, dans les politiques environnementales qu’elles devraient ou souhaiteraient mettre en œuvre.
8Comme il n’est pas analytiquement possible de déterminer explicitement les solutions du modèle avec vote à la majorité, la section 5 nous permet de les évaluer pour un vecteur de paramètres donné. La section 6 conclut brièvement.
UN MODÈLE ANALYTIQUE SIMPLE
9Dans un premier temps, on suppose que les individus sont en tous points identiques. L’effectif de la population est normalisé à 1. Cette section est donc consacrée à l’étude de la relation entre le revenu et la pollution dans un modèle avec un agent représentatif. Par souci de simplification, nous spécifions les formes fonctionnelles de telle façon qu’à l’optimum la relation entre pollution et revenu suive une courbe de Kuznets au sens où la pollution est d’abord croissante puis décroissante.
10La fonction d’utilité du consommateur dépend positivement de la quantité
agrégée des biens qu’il consomme et négativement de la quantité de pollution.
On pose pour cela une fonction d’utilité U ( C, P ) additivement séparable [1] avec
une partie quadratique pour l’utilité de la consommation et linéaire dans la
pollution, telle que :
11Par ailleurs, on suppose que la pollution brute est proportionnelle à la quantité consommée avec un coefficient d’émission constant noté e. Contrairement à Andreoni et Levinson [2001], notre objectif n’est pas ici de déterminer les conditions nécessaires et suffisantes sur les préférences ou sur les technologies de dépollution qui assurent l’existence d’une courbe environnementale de Kuznets. En dehors du fait que les formes fonctionnelles retenues pour l’utilité et la technologie sont particulières, le modèle analytique que nous proposons considère, comme dans Andreoni et Levinson [2001], des émissions liées au niveau de consommation.
12Enfin, l’activité de dépollution permet de réduire la pollution totale [1] dans une
proportion égale à la part de l’effort de dépollution dans la richesse totale, M.
D’où l’expression suivante :
13À l’optimum la pollution P exprimée en fonction du revenu s’écrit :
14Le maximum de pollution survient alors pour un revenu seuil au-delà de Mr. Dans ce cas, la courbe qui lie la pollution au revenu comporte trois phases. Tout d’abord, la pollution croît de manière linéaire avec le revenu puisque aucun effort de dépollution n’est réalisé dans cette première phase. Ensuite, la pollution continue de croître jusqu’au point où l’effort de dépollution permet de stabiliser le niveau de pollution. Dans la dernière phase, l’effort de dépollution est tel qu’il permet une diminution nette des émissions. La figure 1 illustre précisément une situation dans laquelle l’évolution de la pollution comporte trois phases. La figure 2 représente un cas dans lequel l’évolution de la pollution ne comporte que deux phases où la pollution diminue dès lors qu’un effort de dépollution est engagé. La phase intermédiaire, où la pollution serait croissante malgré l’affectation de ressources aux activités de dépollution, n’existe pas dans ce cas. L’illustration fournie dans la figure 2 montre un cas particulier de notre modèle correspondant à la relation pollution-revenu obtenue par Stokey [1998].
M M M 0 M
M M M 0 M
15Comparée aux formes fonctionnelles (quadratiques ou cubiques) généralement retenues dans les modèles économétriques existants, la forme non linéaire de la relation pollution-revenu dérivée de notre modèle possède des propriétés intéressantes. La première est que les émissions de polluants demeurent positives ou nulles lorsque le revenu croît. Fréquemment adoptée dans les estimations empiriques de la relation pollution-croissance, la forme quadratique simple peut conduire à des prédictions d’émissions négatives pour un revenu suffisamment grand (cf. Selden et Song [1994]). Signalons, par ailleurs, que de nombreuses estimations reposent sur des spécifications de la relation pollution-revenu basées sur des formes cubiques. Ce choix particulier de spécification est souvent justifié dans la littérature comme un moyen de ne pas imposer a priori de relation symétrique entre la pollution et le revenu. Cependant, les modèles basés sur ces formes fonctionnelles conduisent à des résultats difficilement interprétables en particulier lorsque la relation pollution-revenu estimée suit une courbe en cloche avec une reprise de la croissance de la pollution pour des revenus très élevés (généralement pour des valeurs du revenu très largement hors de l’échantillon). La forme dérivée de notre modèle exclut la possibilité d’une reprise de la croissance de la pollution, bien qu’elle soit non symétrique et qu’elle possède un point d’inflexion.
P
P
HÉTÉROGÉNÉITÉ DES CONSOMMATEURS
16On considère à présent, pour plus de réalisme, une population hétérogène de consommateurs. Chaque consommateur dispose d’une part ? du revenu global de l’économie considérée, celui-ci étant supposé exogène. Le revenu moyen dans cette société est noté M, comme précédemment. La variable aléatoire ? est distribuée dans la population selon une loi Beta ( 1, µ ), qui a pour densité ? ( ? ) = µ ( 1 ? ? )µ?1 et pour fonction de répartition ? ( ? ) = 1 ? ( 1 ? ? )µ, ? ? } 0,1 [. La loi Beta, bien qu’étant une approximation grossière, décrit raisonnablement la répartition des revenus tels qu’ils sont observés. De plus, le modèle se généralise facilement au cas d’une loi Beta de seconde espèce quelconque. Ce n’est que pour éviter des lourdeurs d’écriture que nous présentons le cas d’une loi Beta définie par un seul paramètre.
17Le bien de consommation est soumis à une taxe ad valorem t. Le revenu de
la taxe est utilisé, le cas échéant, dans les activités de dépollution. Chaque
consommateur dispose donc d’un revenu [1] ? ( 1 + µ ) M et détermine son niveau
de consommation ch ( ? ) qui maximise son utilité définie par (1), en prenant le
niveau de la taxe et le montant de pollution comme donnés, la pollution P ayant
un statut de bien public. Le programme individuel est donc le suivant :
18Il semble naturel de supposer que la condition sur le revenu M < b ? ( 1 + µ )
19est vérifiée ? ? ? } 0,1 [ et que donc aucun consommateur, y compris le plus riche, n’a atteint le niveau de saturation a / b.
20La pollution P se définit à partir de la somme des consommations optimales
des consommateurs notée C. On a donc l’écriture suivante pour le niveau de la
pollution P (qui est une constante pour le consommateur de type ?) :
21La solution [1] intérieure de (9) est :
22M M ? a ? 2 ver. Cette condition représente le 2 b I ( µ ) = Mh, notons que Mh = 2 I ( µ )
23revenu seuil à partir duquel le niveau de taxe est strictement positif et donc le
niveau du revenu à partir duquel un effort de dépollution est entripris. En deçà,
la taxe serait négative (ce qui s’explique par le fait que les consommateurs dont
le revenu est faible, souhaiteraient sacrifier la qualité de l’environnement en
échange d’un supplément de consommation). Ce cas, est au demeurant impossible dans la mesure ou pour une taxe négative la contrainte de budget au niveau
agrégé C ? M ne serait plus respectée. On peut montrer que l’on peut trouver de
manière équivalente la valeur de ce revenu seuil en comparant la fonction
d’utilité indirecte dérivée de ce modèle à la fonction d’utilité indirecte issue du
modèle contraint où le niveau de la taxe serait nul. La pollution Ph exprimée en
fonction du revenu s’écrit quant à elle :
24La pollution est maximale pour le revenu seuil Mh, Mh = b I ( µ ) = 2 I ( µ ) M De plus la courbe 2 ver. Ph ( M ) admet un point d’inflexion en Mh = b I ( µ ) = 2 I ( µ )
25Notons que, quel que soit M, la consommation et la pollution sont toujours plus petites dans le cas avec hétérogénéité. En effet, par définition, la variance est toujours positive et donc la valeur 2 I ( µ ) est toujours plus grande que 1.
AGENT MÉDIAN
26Contrairement au cas précédent, on ne va plus supposer que c’est un décideur
public qui va in fine choisir le niveau de la taxe appliquée dans la société que
l’on considère. À présent, ce niveau-là va être choisi par une procédure plus
« démocratique ». Dans un premier temps, chaque consommateur cherche le
niveau de taxe qui maximise son utilité en supposant que ce niveau de taxe
s’appliquera à tous les consommateurs. En d’autres termes, chaque consommateur suppose qu’il va décider du niveau de taxe qui sera appliqué à tous. Chaque
consommateur doit donc résoudre le programme (6), mais il a maintenant deux
variables de décision, la consommation et la taxe. Pour un niveau fixé de la taxe,
la consommation notée cm ( ? ) est la même que dans le modèle précédent et est
donnée par (7). On suppose, comme précédement, qu’aucun individu n’atteint
son niveau de saturation. Le niveau de taxe notionnelle, sans contrainte de
non-négativité de cette taxe, est solution de :
27a2 Cas 2.a : ? ( ?ˆ ) < 0, ?ˆ< 1 et ? ( 1 ) > 0, ce qui est équivalent à M < 8 veb, M > f1 ( µ ) et M > g1 ( µ ).
28Cas 2.b : ? ( 1 ) ? 0, ce qui est équivalent à M ? g1 ( µ ).
29La figure 4 représente en fonction de M et de µ les différents cas examinés précédemment où nous avons supposé a < 4 ve. Dans le cas contraire, seule la partie au-delà de la verticale passant par A est pertinente.
30Nous disposons à présent de tous les éléments nécessaires à la détermination du niveau de la taxe qui sera voté à la majorité [2]. Étant donné que le niveau de taxe désiré n’est pas toujours monotone, il importe de considérer plusieurs régimes pour déterminer successivement les cas où un effort de dépollution est décidé et, si oui, le niveau de cet effort. Ici, l’électeur médian n’est pas nécessairement l’individu disposant du revenu médian, ce qui explique l’importance des différents sous-cas dans la figure 3. En effet, lorsque la fonction t ( ? ) est monotone, donc pour les sous-cas de type b, alors la taxe proposée par l’agent de revenu médian sera choisie par la majorité. En revanche, pour les sous-cas de type a, l’électeur médian n’a plus forcement le revenu médian. De ce point de vue, notre modèle clarifie l’article de Congleton [1992] qui suppose que la décision repose sur le choix fait par l’individu de revenu médian « recall that the median voter is approximately the voter with the median income... ».
31La règle de décision par un vote à la majorité est tout simplement le niveau
de taxe choisi par l’électeur médian, que l’on note tm. Ce qui s’exprime sous la
forme [3] :
32Pour les régimes b, la taxe est monotone décroissante. L’agent médian de
type ? = ?m = ) 1 ? (1)1µ | est aussi l’électeur médian dans ce cas. Le niveau
de taxe sur la consommation est donc tm = t ( ?m ). Si t ( ?m ) > 0 dans ce cas, on
est assuré qu’un effort strictement positif de dépollution est entrepris. Le niveau
de pollution Pm agrégé est alors donné par (8). Dans le cas contraire, aucun effort
de dépollution n’est entrepris. On a donc [1] :
33Il faut distinguer suivant que t ( ?m ) ? t ( 1 ) et ) i.e. M ? 2 ve b ( 1 + µ )2 ?m | auquel cas la solution de notre problème est donnée par (16) avec taxe positive ou que t ( ?m ) < t ( 1 ) ( i.e. M > 2 ve ). Malheureusement, dans cette b ( 1 + µ )2 ?m
34b ( ?m ( 1 + µ ) )2
configuration il n’est pas toujours possible [1] de trouver une solution analytique
(cf. annexe). Il faut remarquer tout de même qu’alors la population des individus
qui proposent les plus forts niveaux de taxe, et qui représentent au moins la
moitié de la population, se compose d’individus à revenus faibles mais aussi
d’individus de revenus élevés. Le couple taxe-pollution est de la forme [2] :
SIMULATIONS
35Même dans le cadre du modèle simple adopté ici, on ne peut déterminer analytiquement toutes les solutions. En procédant à une résolution numérique, il est tout de même possible de calculer, pour un choix particulier des paramètres structurels du modèle, les niveaux de taxe et de pollution définis précédemment. Les simulations que nous faisons utilisent le jeu de paramètres ( a, b, v, e ) = ( 20,0,25,3,2,5 ) qui sont tels que la condition a < 4 ve est vérifiée. Nous étudions donc une situation dans laquelle il est possible de distinguer le niveau de revenu à partir duquel un effort de dépollution est réalisé et le seuil de revenu où la pollution devient décroissante. En pratique, la grille de simulation [3] est obtenue en choisissant des valeurs de M et µ prises respectivement (avec un pas fixe de 2 %) dans les intervalles } 0,100 [ pour le revenu et } 0,2 [ pour le paramètre de la loi caractérisant la distribution du revenu. La figure 5 donne pour tous ces couples ( M, µ ) le niveau de la taxe qui sera choisie par un vote à la majorité, donc tm.
36Au-dessous de la courbe g2 aucun effort de dépollution n’est voté et donc tm est nulle. Cela revient à dire que cette fonction g2 donne pour chaque niveau de µ le revenu à partir duquel on commence à dépolluer et donc pour ce vecteur de paramètres g2 est aussi Mm ( µ ). Entre les courbes f2 et g2 c’est l’agent de revenu médian qui décide du niveau de la taxe et au-dessus de f2 la taxe est décidée par une majorité composée d’électeurs ayant les plus faibles revenus et de ceux ayant les revenus les plus élevés. En d’autres termes, la « classe moyenne » souhaitant un niveau de taxe faible, voire nul, n’est plus majoritaire. Lorsque c’est l’agent médian qui décide, ce sont les électeurs à faibles revenus qui sont majoritaires.
37Les résultats de cette simulation sont comparés avec les résultats obtenus dans les sections 3 et 4. Les deux premiers graphiques de la figure 6 représentent en fonction de M et de µ, les niveaux de pollution agrégés. Le premier correspond au cas d’une population hétérogène, tandis que le second correspond au cas d’une société démocratique. Le troisième graphique représente, quant à lui, la différence de pollution entre ces deux cas. Cette différence est, comme on peut le voir, toujours positive. Si l’on regarde à présent la figure 7, on peut remarquer pour deux niveaux de µ que la pollution dans un modèle à agent représentatif est encore plus élevé que dans les deux autres cas. Il semblerait donc que le modèle à agent représentatif soit plutôt pessimiste. Notons que cette dernière conclusion est faite dans un cadre où l’on ne remet pas en cause la forme « kuznets » de la relation pollution-revenu couramment admise dans la littérature.
HÉTÉROGÉNÉITÉ DÉMOCRATIE
HÉTÉROGÉNÉITÉ DÉMOCRATIE
38Les deux premiers graphiques de la figure 6 montrent clairement que, à revenu moyen fixé, lorsque µ augmente la pollution n’augmente pas. Si l’on considère que µ est un bon indicateur d’inégalité [1] de la population face au revenu, alors on peut dire que non seulement la société dépollue parce que la pollution est un bien indésirable mais aussi parce que c’est le seul moyen de redistribuer de la richesse, dans notre modèle.
CONCLUSION
39Cet article montre que la prise en compte des inégalités n’est pas sans conséquence sur l’évolution de la pollution. Un premier modèle dans lequel le caractère hétérogène de la population est négligé, ce qui correspond à l’hypothèse généralement retenue dans la littérature, nous a permis de caractériser la courbe de Kuznets appliquée à l’environnement. Le modèle analytique simple que nous avons choisi conduit à une relation pollution-revenu comportant trois phases. En général et aussi bien dans la littérature appliquée que théorique, seulement deux phases sont retenues. Ce qui ne permet pas d’envisager une situation, qui nous semble réaliste, dans laquelle la pollution demeure croissante malgré un effort de dépollution. Nous avons ensuite, contrairement à la littérature existante, introduit des inégalités dans la répartition du PIB. Dans ce contexte, l’effort de dépollution est différent selon la règle de décision. Deux modèles de choix public ont été considérés. Dans le premier, la décision appartient à un planificateur bienveillant et, dans l’autre, la décision résulte d’un vote à la majorité. Ces extensions permettent de mettre en évidence certaines différences entre les relations pollution-revenu trouvées. En particulier, pour chaque niveau de revenu, la pollution dans le modèle avec planificateur est toujours la plus faible. Non seulement parce qu’il y a un « effet Kuznets » comme dans les autres cas, mais aussi parce que le fait de dépolluer est le seul moyen de redistribuer des ressources dans cette société. On pourrait appeler cet effet « effet redistributif ». Cela tendrait à penser que les travaux empiriques qui ne considèrent pas une population hétérogène sont plutôt « pessimistes » dans le sens où ils prévoient toujours des niveaux de pollution trop élevés. On peut penser que ce pessimisme pourrait conduire à des choix sociaux inadaptés aux réalisations futures, par exemple un surinvestissement dans les projets de protection de l’environnement. De plus, notre modèle montre que la relation structurelle entre la pollution et le revenu est affectée par le mode de décision des politiques environnementales. Nos résultats sont donc beaucoup plus généraux que ceux de Barret et Graddy [1998] qui ont simplement introduit de manière ad hoc le degré de démocratie comme variable explicative de la pollution.
COMPARAISON µ = 1
COMPARAISON µ = 1
ANNEXE MAJORITÉ COMPOSÉE (cas 1.a et 2.a)
40Dans les cas 1.a et 2.a, lorsque la majoritée est composée, la difficulté est de trouver le niveau de taxe approuvé par une majorité des individus. Soit un niveau de taxe t ˜; cherchons tout d’abord à identifier la proportion de la population telle que t ( ? ) > t ˜. Un calcul intermédiaire consiste à déterminer ??et ??tels que t ( ?? ) = t ( ?? ) = t ˜.
41Un calcul simple nous donne :
Bibliographie
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
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Notes
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Cette terminologie a été adoptée en raison de la forme croissante puis décroissante relevée par Kuznets [1955] dans ses travaux sur la relation entre l’inégalité dans la distribution du revenu et la croissance économique.
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On pourrait supposer une fonction d’utilité plus générale dans laquelle le taux marginal de substitution entre la consommation et la pollution serait strictement croissant. Une condition suffisante serait Ucp ? 0.
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Notons que ce modèle est un modèle statique et donc on n’étudie pas les problèmes liés à l’accumulation de la pollution.
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Compte tenu des hypothèses sur la fonction d’utilité, les conditions du second ordre sont vérifiées.
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Le fait que la consommation reste croissante malgré une quantité de pollution décroissante permet de rendre crédible ce genre de modèle statique.
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[1]
La normalisation par ( 1 + µ ) fait que le revenu moyen de la population est égal à M, ce qui nous permettra de comparer les différents résultats. De plus, il est possible de modifier la distribution du revenu par une variation du paramètre µ, sans affecter la valeur du revenu moyen.
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[1]
Le problème (9) est convenxe, il y a donc un maximum unique.
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[2]
Sous l’hypothèse que le niveau de consommation est toujours en deçà du niveau de saturation. Compte tenu de la valeur optimale de la taxe, on montre que cette contrainte 2 ve ( 2 + µ ) s’écrit M ?. Si µ < 2, la pollution est maximale pour un niveau de revenu b µ ( 1 + µ ) tel que aucun consommateur n’a atteint son niveau de saturation.
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[1]
La condition du second ordre est vérifiée.
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[2]
Il est évident que ? ( ? ) < 0 ne peut être une solution, car dans ce cas la consommation agrégée n’est plus inférieure au revenu total disponible dans cette société ( i.e. M) lorsque l’uniformité de la taxe est imposée. Seules les solutions donnant un niveau de taxe strictement positif et conduisant à une utilité supérieure à l’utilité obtenue lorsque la taxe est nulle, seront retenues.
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[1]
On pose f1 ( µ ) = 2 ve et g1 ( µ ) =. f est convexe et déb ( 1 + µ )2 b ( 1 + µ )2 croissante et passe par le point A = )4vea ? 1,8 veb |. La fonction g est concave et a2 admet un maximum unique en A. Au-delà de A on a f1 ( µ ) < g1 ( µ ).
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[2]
Il est clair que l’on aurait pu choisir d’autres règles de vote et que les résultats en auraient été changés.
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[3]
t ( ? ) est en fait une tranformée d’une densité de probabilité, elle est donnée par (14).
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[1]
a ?m ( 1 + µ ) ? 2 ve On pose g2 ( µ ) =.
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[2]
Dans le cas contraire, le calcul de la taxe choisie est simple puisque l’électeur médian a le revenu médian. La méthode de détermination de cette taxe est similaire au cas b.
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[1]
Sauf dans le sous-cas 2.a, lorsque ? ( ? ) ? ? ( ? ) ? 1 ( i.e. 2 1 ( 1 ? ? )µ ? ( 1 ? ? )µ ? 2 ) alors aucun effort de dépollution n’est engagé puisque plus de la moitié des individus ne souhaite pas payer de taxe.
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[2]
On pose f2 ( µ ) = 2 ve. b ?m ( 1 + µ )2
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[3]
Le programme informatique écrit en langage Gauss, utilise une méthode de quasi-Newton pour retrouver les solutions de l’équation non linéaire de la taxe optimale.
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[1]
Dans le cas de la loi Beta, on sait qu’il existe une relation croissante entre l’indice de concentration de Gini et le paramètre µ.