Notes
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[1]
En 2016, le prix moyen de l'hectare s’élevait, en France, à 6 000 €/ha – mais seulement à 4 500 €/ha pour les terres louées qui correspondent à la très grosse majorité des terres – contre plus de 12 000 € en Espagne et en Grèce, plus de 21 000 € en Allemagne, au Danemark et en Irlande, plus de 25 000 € au Royaume-Uni, plus de 40 000 € en Italie et 63 000 € aux Pays-Bas (Eurostat, 2018 ; voir aussi CIAIN et al.,2012). En France, ces différents facteurs ont entraîné une baisse importante de la valeur (en euros constants) de l’hectare agricole depuis 1970. Pour avoir la même valeur qu’en 1970 en euros constants, l’hectare de terre agricole devrait valoir aujourd’hui plus de 50 000 € en euros courants et non 6 000 €
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[2]
Taxe sur le foncier non bâti, taxe pour frais de chambres d’agriculture, droits de mutation à titre onéreux et droits annexes, plus-values immobilières, IFI, taxes sur les assurances, etc.
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[3]
Impôt sur le revenu et prélèvements sociaux.
1 Lorsque l’on évoque l’utilisation de la fiscalité comme instrument de modération de l’artificialisation des sols, la première piste qui vient souvent à l’esprit est la création d’une nouvelle taxe sur ce processus. C’est la solution de facilité des points de vue politique et médiatique. Elle présente deux avantages: la nouvelle taxe serait facilement identifiable et elle procurerait des recettes, lesquelles pourraient être affectées (ou non) à une action publique précise (ou non).
2Mais cette solution comporte aussi de nombreux inconvénients. La fiscalité française se caractérise par sa complexité et son instabilité. Créer une nouvelle taxe accroîtrait ces défauts. Sur le plan social, plus un système fiscal est complexe, et moins il est compréhensible par les catégories populaires et moyennes. D’un point de vue économique, les prélèvements obligatoires s’établissent déjà à un niveau très élevé en France, les pouvoirs publics cherchent plutôt à les stabiliser, voire à les diminuer. Le Conseil des prélèvements obligatoires vient de confirmer le fait que la France est le pays d’Europe où l’immobilier est le plus taxé (CPO, 2018). En outre, la multiplicité des formes de taxation d’un même bien induit parfois des effets de sens opposés. Cette situation se constate déjà dans le domaine de l’urbanisme. Surtout, la multiplication des taxes portant sur l’artificialisation des terres ne semble pas être parvenue jusqu’ici à infléchir notablement non seulement son rythme, mais aussi sa localisation géographique. Il existe déjà près d’une trentaine de taxes en la matière (voir l’Encadré de la page 44). Elles ne sont guère incitatives et ne s’appliquent pas à plusieurs types d’artificialisation. Une nouvelle taxe remédierait-elle à ces défauts ? Cela est peu probable.
3Dans les circonstances actuelles, la fiscalité ne semble pas être l’outil capable, à lui seul, de limiter grandement l’artificialisation. Cela tient à la force de deux mécanismes régulateurs du foncier: d’une part, le marché et, notamment, les différences de valorisation, en termes de prix à l’hectare, entre terrain à usage rural et terrain à bâtir, et, d’autre part, la réglementation, notamment le droit de l’urbanisme et le droit rural. Ces deux mécanismes se renforcent l’un l’autre pour accroître la différence de valorisation entre ces types de terrain.
4 Le classement en zone urbaine (U) ou en zone à urbaniser (AU) d’un terrain lui confère, certes, une valeur nettement plus élevée. Mais, à l’inverse, le Code rural conduit à minorer la valeur des terrains ruraux. Fixés par l’État en dessous de leur valeur de marché, les loyers de fermage français sont très inférieurs à ceux de l’Europe de l’Ouest. En outre, la charge fiscale qui affecte le foncier rural pèse presque entièrement sur le bailleur. La rentabilité nulle du foncier non bâti, sa lourde taxation et des restrictions exorbitantes du droit commun tenant au statut du fermage se conjuguent pour conduire à des valeurs à l’hectare qui figurent parmi les plus basses de l’Europe occidentale [1].
5Faut-il pour autant désespérer de l’outil fiscal dans le domaine de l’artificialisation? Tel n’est pas notre avis.
6La fiscalité de l’urbanisme n’apparaît pas toujours cohérente du fait qu’elle s’est construite par couches successives et pour répondre aux « besoins» apparus au fil du temps: financer les équipements collectifs et procurer des recettes, notamment aux collectivités territoriales. Elle n’a pas été créée dans la perspective de protéger des espaces naturels, ni dans celui de préserver les terrains agricoles. Si l’on souhaite utiliser l’instrument fiscal pour modérer l’artificialisation, il apparaît plus efficace de recourir aux prélèvements existants en les remodelant en fonction de cet objectif que de créer une nouvelle taxe. Cela pourrait notamment se faire en modifiant leurs taux, en les modulant sur la base de critères géographiques, en diminuant les cas d’exonérations ou d’abattements contraires à l’objectif recherché et en réduisant nettement la fiscalité pesant sur le foncier non bâti.
Prendre davantage en compte la surface artificialisée
7Les taux d’un certain nombre de taxes s’appliquent à une valeur forfaitaire. Ce mode de taxation n’incite pas à un usage économe des sols. L’application de taux croissant en fonction de la surface occupée inciterait davantage à économiser l’espace.
8Par exemple, la taxe sur les surfaces commerciales (TASCOM) est basée sur le chiffre d’affaires par m2. Un taux croissant avec la surface inciterait à une utilisation plus parcimonieuse des terres. De même, la taxe d’aménagement (TA) est fixée, pour certains équipements artificialisants, à des valeurs forfaitaires très basses et ne progressant pas avec la surface artificialisée. C’est le cas, par exemple, des piscines (200€/m2), des panneaux photovoltaïques (10 €/m2), etc.
9Les redevances domaniales sont calculées en fonction de formules incluant le chiffre d’affaires et la valeur locative. S’agissant souvent d’espaces naturels publics de qualité (domaine public maritime (DPM), domaine public fluvial (DPF), plages, forêts publiques) et si l’on s’inscrit dans l’esprit de l’État exemplaire et du verdissement de la commande publique, l’absence de critère incitant à un usage économe des sols paraît critiquable et témoigne d’un manque d’intégration de l’environnement dans la politique de la domanialité publique. L’inclusion d’une variable faisant croître la redevance plus que proportionnellement à la surface occupée constituerait un signal incitant à une modération de l’artificialisation, qui plus est privative, de terrains publics (Sainteny, 2012).
Moduler les taxes sur la base de critères géographiques
10En matière d’urbanisme, la fiscalité française ne semble pas suffisamment modulée dans l’espace.
11La loi de finances rectificative (LFR) pour 2017 a instauré un abattement de 70% applicable en matière de plus-value immobilière réalisée sur la vente, dans des zones tendues, de terrains destinés à la construction de logements collectifs correspondant à une surface de plancher au moins égale à 75% du gabarit autorisé par le PLU. En soumettant l’abattement à une condition de densité, cette mesure est susceptible de modérer l’étalement urbain. Mais les PLU relèvent des communes et des intercommunalités. Beaucoup d’entre elles réservant de larges zones à l’habitat pavillonnaire individuel, la mesure ne pourra sans doute pas s’y appliquer. Pour qu’elle puisse l’être, il faudrait donner aux préfets la capacité temporaire de requalifier certains de ces espaces, par exemple lorsqu’ils occupent une part trop importante des zones constructibles prévues au PLU.
12 Le taux de la TASCOM ne diffère pas selon le lieu d’implantation des grandes surfaces. Cela favorise leur installation en périphérie, là où le foncier est moins cher. Cela induit une artificialisation additionnelle, puisque l’on ne peut s’y rendre qu’en automobile, ce qui nécessite la construction de nouvelles voiries, de ronds-points, de parkings…, engendrant un accroissement de l’imperméabilisation des sols, de la circulation automobile, des émissions de CO22, de celles des polluants de l’air, etc. Ce sont autant d’externalités causées par le choix de localisation des grandes surfaces, qui ne sont pas internalisées dans la taxation appliquée à ces dernières. Il semble pourtant possible de différencier le taux de la TASCOM sur la base d’un critère géographique, en le diminuant notablement pour les implantations intra-urbaines et en l’accroissant nettement pour les installations périurbaines.
13Depuis 2012, les communes et intercommunalités peuvent faire varier les taux de la TA d’un secteur à l’autre de leur territoire. Elles peuvent ainsi par l’instauration d’un taux bas favoriser la densification en centre-ville, la reconstruction de la ville sur la ville ou la requalification de friches urbaines, ou, au contraire, pénaliser l’étalement urbain en instaurant un taux plus élevé pour les implantations en périphérie. Cette faculté pourrait être davantage utilisée.
14De même, le versement pour sous-densité (VSD), institué en 2012, permet de taxer les nouvelles constructions qui n’atteignent pas un seuil minimal de densité. En renchérissant le coût des constructions peu denses, le VSD apparaît, en théorie, comme un outil idéal pour limiter l’artificialisation des sols. Mais seule une trentaine de communes l’a instauré. La question se pose, dès lors, de savoir s’il convient de le rendre obligatoire dans certains secteurs géographiques (par exemple, en centre-ville ou à proximité des transports collectifs). Une simulation de son application à l’ensemble de l’Île-de-France suggère qu’il permettrait de diminuer les surfaces urbanisées, tout en augmentant les surfaces de plancher construites (Avner, Viguié et Hallegatte, 2014).
Réduire les incitations fiscales à l’artificialisation des sols
15Une part importante de l’artificialisation des sols résulte directement de l’action de l’État et des collectivités territoriales. Ici aussi les principes de l’État exemplaire, de l’intégration de l’environnement dans les politiques publiques et du verdissement de la commande publique paraissent peu mis en oeuvre. Ainsi, la fiscalité applicable au bâti public s’avère des plus légères. Les immeubles bâtis de l’État, des collectivités territoriales ou bien encore des ports autonomes sont exonérés de la taxe sur le foncier bâti (TFB). Les voies publiques n’acquittent ni la TFB ni la TFNB. Les constructions affectées à un service public ou à une activité reconnue d’utilité publique, édifiées par l’État, des collectivités territoriales, des établissements publics, des mutuelles, etc. sont exemptées de TA. Les ports publics et ceux gérés par des sociétés d’économie mixte sont exonérés de cotisation économique territoriale. Ces exonérations conduisent à minorer les coûts de l’artificialisation d’origine publique. Elles n’incitent donc pas les opérateurs publics à un usage économe des sols. L’instauration d’une contribution à caractère incitatif ou d’un système de bonus-malus déterminés en fonction du ratio d’artificialisation de ces constructions pourrait être étudiée. Pour des raisons voisines, la cession au prix symbolique de 1 euro par certaines collectivités territoriales de terrains à des aménageurs peut aussi être critiquée. Elle devrait être mieux encadrée.
16De nombreux abattements existent sur des taxes portant sur des surfaces construites ou sur des processus d’artificialisation. Ainsi, les aéroports – nombreux en France – bénéficient pour le calcul de la cotisation foncière des entreprises d’un abattement correspondant au tiers de leur valeur locative. De même, les entrepôts et hangars non ouverts au public faisant l’objet d’une exploitation commerciale, qui constituent une part importante de l’artificialisation observée au cours des dernières années, bénéficient pour le calcul de la TA d’un abattement de 50 % sur la valeur forfaitaire par m2 de la surface construite. Les collectivités territoriales peuvent minorer de 50% la TA applicable aux maisons individuelles en secteur diffus financées à l’aide du prêt à taux zéro (PTZ). Par ailleurs, la différence de valeur forfaitaire utilisée pour le calcul de la TA conduit à ce que les parkings couverts intégrés à une construction soient taxés entre deux et huit fois plus que ceux de surface. Or, si les seconds induisent une artificialisation supplémentaire, ce n’est pas le cas des premiers. De plus, les coûts de construction des premiers sont nettement plus élevés que ceux des seconds. Alors que la fiscalité pourrait corriger partiellement ce biais, elle l’accentue, incitant à l’artificialisation et réduisant les possibilités de densification (Sainteny, 2012).
Alléger la fiscalité pesant sur le foncier non bâti
17Toutefois, aucune des différentes pistes de réforme suggérées ci-dessus ne permettrait d’apporter une réponse à l’une des causes essentielles de l’artificialisation française.
18La rentabilité annuelle moyenne avant impôt des classes d’actifs s’ordonne comme suit: actions, environ 7% ; bâti locatif, environ 3 à 4% ; foncier non bâti, inférieur à 1,5%. Or, en dépit de loyers de fermage réglementés et d’un rendement du foncier non bâti moitié moindre que celui du logement locatif, ces deux types de bien sont taxés de la même manière. De même, depuis la réforme fiscale de décembre 2017, la classe d’actifs la plus rentable est la moins fiscalisée, alors que la moins rentable est la plus taxée. Ainsi, après impôts, le rendement annuel moyen des actions s’établit à 5%, tandis que celui du foncier non bâti est nul ou négatif.
19En effet, le foncier non bâti est soumis à plusieurs taxes indépendantes des revenus éventuels qu’il génère [2]. Ces taxes, à elles seules, rendent systématiquement négatif le rendement annuel après impôts du foncier non bâti non productif de revenu. Outre ces taxes, le foncier non bâti productif de revenus est redevable de prélèvements [3], dont les taux annuels varient entre 31,2% et 75% de ses revenus. Les montants résultant de l’application de ces taux ajoutés aux taxes indépendantes du revenu conduisent à un prélèvement global pouvant dépasser 100 % des revenus du foncier non bâti. Même lorsque les taux de taxation appliqués au titre de l’impôt sur le revenu (et des prélèvements sociaux) se rattachent aux premières tranches d’imposition (31,2%, puis 47,2%), le cumul avec les taxes indépendantes du revenu induit un taux de prélèvement global supérieur à 50%, ce qui aboutit à un rendement au mieux égal à l’inflation, c’est-à-dire nul, voire négatif en euros constants.
20Cette absence de rentabilité du foncier non bâti pousse ses détenteurs à l’artificialiser. De fait, on ne peut guère espérer qu’un agent économique détienne durablement un actif dont le rendement annuel est nul, voire négatif. À moyen terme, il ne peut conserver que les actifs dégageant une rentabilité minimale en euros constants ou procurant un avantage fiscal. Or, depuis le 1er janvier 2018, non seulement l’avantage fiscal lié au foncier rural a été supprimé, mais de plus sa fiscalité a été accrue. La réforme fiscale intervenue fin 2017 accentue donc nettement la nécessité pour son détenteur d’artificialiser un espace naturel pour retrouver une rentabilité positive.
21Pourtant, si la fiscalité ne peut à elle seule permettre d’égaliser les rentabilités annuelles pas plus que les valeurs d’actifs des fonciers non bâti et bâti, elle pourrait toutefois faire en sorte que le foncier non bâti dégage un rendement positif après impôts, ne serait-ce que de 1 % en euros constants. Cela permettrait aux agents économiques de ne pas être obligés de se défaire d’un actif affichant systématiquement une perte.
Taxes relatives à l’artificialisation et aux terrains urbanisables
Aucune de ces taxes n’est internalisante.
À l’exception du VSD (facultatif) et, partiellement, de la TA et de la majoration de la TFNB (elles aussi toutes deux facultatives) soit trois taxes facultatives sur un total de vingt-neuf –, aucune taxe n’est incitative. Il s’agit de taxes à but de rendement. L’artificialisation est donc considérée comme une base servant d’assiette à des financements d’équipements, à des formalités administratives ou à des recettes générales. Une nouvelle taxe ne serait probablement pas plus incitative. Si elle l’était, elle entrerait en conflit avec les autres taxes, puisqu’un certain nombre de structures, de budgets, d’équipements dépendent de la poursuite de l’artificialisation des sols pour pouvoir être financés. Rendre incitatives certaines des taxes déjà existantes semble davantage pertinent et un peu moins contradictoire.
- Taxe d’aménagement (2012) (rassemblant elle-même plusieurs taxes (taxe locale d’équipement, taxe départementale des conseils d’architecture, d’urbanisme et d’environnement, taxe départementale des espaces naturels sensibles, etc.)
- Redevance d’archéologie préventive (2003)
- Taxe forfaitaire sur les terrains nus devenus constructibles (2007)
- Taxe sur la cession à titre onéreux de terrains nus rendus constructibles (2010)
- Majoration valeur locative Taxe foncier non bâti (terrains urbanisables)
- Taxe de défrichement
- Versement pour sous densité (2012)
- Participation pour le financement de l’assainissement collectif
- Participation spécifique des constructeurs en zone d’aménagement concertée
- Participation spécifique pour la réalisation d’équipements publics exceptionnels
- Prise en charge financière d’équipements dans le cadre des conventions de Projet urbain partenarial
- Taxe fiscale sur assurance construction
- Taxe fiscale sur assurance dommages ouvrages
- Contribution solidarité victimes terrorisme infractions au Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions (sur assurance dommages ouvrage) (1986)
- Taxe de publicité foncière
- Contribution de sécurité immobilière
- Droit sur attestation immobilière
- Droits de mutation à titre onéreux (terrains urbanisables) (majorés en 2014)
- Impôt sur plus-values immobilières (terrains urbanisables) (accru en 2011, puis en 2012)
- Prélèvements sociaux sur plus-values immobilières (terrains urbanisables) (accrus en 2011, puis en 2017)
- Contribution exceptionnelle sur les hauts revenus (plus-values immobilières sur les terrains urbanisables) (2011)
- Taxe spéciale d’équipement
- Impôt sur la fortune immobilière (2018)
- 1 % paysage-développement (1989)
- Redevances domaniales
- Taxe générale sur les activités polluantes (granulats) (2000)
- Taxe sur création de locaux à usage de bureaux ou de commerces en IDF (construction)
- Droits de mutation à titre gratuit (terrains urbanisables)
- TVA (sur terrain à bâtir, construction, assurance construction, attestation immobilière, frais de notaire, de géomètre, d’avocat, d’architecte, etc.)
22On peut difficilement conserver un cadre réglementaire et fiscal entraînant le rendement nul ou négatif du foncier agricole et le déclin de sa valeur à l’hectare et regretter dans le même temps que ses détenteurs tentent de sortir de cette double spirale déflationniste par la seule voie qui s’offre à eux pour valoriser leur actif aux conditions du marché, après des décennies de pertes et de dépréciation de leur bien, entrainées par le couple « statut du fermage/fiscalité ».
23L’artificialisation est en grande partie provoquée par la différence de valorisation existant entre le foncier non bâti urbanisable et le foncier non bâti non urbanisable. Mais cette différence ne découle pas du seul fait de classer un terrain en zone urbanisable. Elle est aussi la conséquence de la minoration-déflation du prix du foncier agricole et de son rendement nul, voire négatif, causés par la charge fiscale qui pèse sur lui et le statut du fermage. Cette réalité, dont il est trop souvent fait abstraction dans les analyses, constitue un facteur propre à la France qui contribue à expliquer une progression de l’artificialisation des sols plus rapide que dans les pays voisins. Une nouvelle taxe sur l’artificialisation n’apporterait pas de solution à ce problème. L’allègement des charges fiscales et statutaires pesant sur le foncier rural, en permettant de lui conférer un rendement après impôts non nul et de revaloriser sa valeur d’actif, contribuerait davantage à un ralentissement de l’artificialisation des sols.
Bibliographie
- AVNER P., VIGUIÉ V. & HALLEGATTE S. (2014), « Le versement pour sous-densité: analyse d’un outil de densification urbaine et premiers retours d’expériences», Point Climat, n°36, mai.
- CIAIN P. et al. (2012), “Key issues and Developments in Farmland Rental Markets in EU Member States and Candidate Countries”, Center for European Policy Studies, Factor Markets, Working Paper, n°13, February.
- Conseil des prélèvements obligatoires (2018), « Les prélèvements obligatoires sur le capital des ménages».
- Eurostat (2018), « Prix des terres agricoles par région », dernière mise à jour 14/12/2017,
- www.ec.europa.eu/eurostat/data/database
- SAINTENY G. (2018), « Les subventions publiques dommageables à la biodiversité », rapport de la Commission du CAS présidée par Guillaume Sainteny, Paris, La Documentation Française, 2012, 414p. (version en anglais disponible sur Internet).
Notes
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[1]
En 2016, le prix moyen de l'hectare s’élevait, en France, à 6 000 €/ha – mais seulement à 4 500 €/ha pour les terres louées qui correspondent à la très grosse majorité des terres – contre plus de 12 000 € en Espagne et en Grèce, plus de 21 000 € en Allemagne, au Danemark et en Irlande, plus de 25 000 € au Royaume-Uni, plus de 40 000 € en Italie et 63 000 € aux Pays-Bas (Eurostat, 2018 ; voir aussi CIAIN et al.,2012). En France, ces différents facteurs ont entraîné une baisse importante de la valeur (en euros constants) de l’hectare agricole depuis 1970. Pour avoir la même valeur qu’en 1970 en euros constants, l’hectare de terre agricole devrait valoir aujourd’hui plus de 50 000 € en euros courants et non 6 000 €
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[2]
Taxe sur le foncier non bâti, taxe pour frais de chambres d’agriculture, droits de mutation à titre onéreux et droits annexes, plus-values immobilières, IFI, taxes sur les assurances, etc.
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[3]
Impôt sur le revenu et prélèvements sociaux.