Notes
-
[*]
Jérôme Bonnin, doctorant en archéologie romaine, Université Charles-de-Gaulle—Lille 3, HALMA-IPEL UMR 8164, courriel : jerome.bonnin@etu.univ-lille3.fr ; Michel DUBOIS, professeur de géologie, Université de Lille 1, 59650 Villeneuve-d’Ascq. Nous tenons ici à remercier le musée de Bavay, et particulièrement Mme I. Raineau, attachée de conservation, pour son accueil et la permission d’étudier les fragments. Nous sommes également redevables à M. Dubois, professeur de géologie à l’université de Lille 1, assisté de S. Ventalon, ainsi qu’à N. Mélard, conservateur du patrimoine, pour leur aide. L’aspect technique et pluridisciplinaire de cette étude doit énormément à P. Leman, ancien conservateur honoraire du patrimoine, qui a accepté de répondre à mes questions et m’a indiqué de nombreuses et fructueuses pistes de recherches. Nous avons pu bénéficier des avis de Sh. Adam, M. Arnaldi, P. Gagnaire, J. Parés, D. Savoie, K. Schaldach, D. Schneider, et M. Tadi. Nous adressons enfin nos remerciements pour leurs encouragements et conseils à J. Arce, professeur et directeur de thèse et à C. Hoët-Van Cauwenberghe, maître de conférences à l’université de Lille 3.
-
[1]
Severino 2003.
-
[2]
Wuilleumier 1963, p. 150. L’interprétation des fragments de l’inscription est problématique, et d’autres auteurs y ont vu la dédicace d’un édifice des poids et mesures et d’une balance (D. Roger, dans Maheo 2004, p. 90, fig. 48 ; Dupuis 1988, p. 69-71). Rien ne permet donc d’assurer la lecture d’un Horologium.
-
[3]
On ne connaît qu’une inscription en Germanie Inférieure, celle provenant du fort auxiliaire de Remagen, et présentant peut-être la réparation d’une horloge hydraulique : CIL XIII 7800 et Lewis 2009, p. 14-15. Trois autres inscriptions sont cependant recensées en Germanie Supérieure. L’une découverte à Mayence (AE 2001, 1545 et Wiegels 1997, p. 235-242), la seconde à Martberg (CIL XIII, 7661 = ILS 4569), et la dernière, conservée à Vienne (CIL XII, 1893).
-
[4]
Cinq cadrans nous sont actuellement connus. Le fragment de cadran solaire du Titelberg, conservé au Musée national d’histoire et d’art de Luxembourg (n° inv. 1965-12/1216). Les informations à son sujet nous ont aimablement été fournies par J. Krier, conservateur de la section gallo-romaine du MNHA de Luxembourg. Voir ainsi Wilhelm 1974, p. 57, n° 363. Le fragment de cadran découvert à Trèves, conservé au Landesmuseum de cette même ville et publié en 1987 (ZÄCK 1987, p. 68-73). Le cadran de Betwiller, conservé au Musée archéologique de Strasbourg et publié entre autres par Sh. Gibbs (GIBBS 1976, p. 162). Les deux derniers objets appartiennent à la Gaule Belgique jusqu’à la réforme de Domitien. Il s’agit du cadran découvert à Andilly-en-Bassigny en 1969 et mentionné dans Frézouls 1969, p. 304-305 et du cadran, inédit, provenant du sanctuaire de Mandeure (information aimablement communiquée par S. Blin, doctorante en archéologie romaine). Mentionnons également pour cette province l’existence de quatre cadrans portatifs et d’un fragment d’horloge hydraulique.
-
[5]
Ne sont connus que cinq cadrans datés du ier, iiie et ive siècle : celui de Xanten-Birten vers 1930, analysé par W. R. Scheid (Scheid 2005, p. 1-38) ; celui d’Evelette, découvert en 1961, catalogué par Sh. Gibbs (Gibbs 1976, p. 335) et présenté par H. Michel (Michel 1966, p. 3-7, fig. 1) ; celui trouvé dans une villa romaine au lieu dit « Moxhais », commune d’AwansBierset, (Gibbs 1976, p. 336, Fresson 1932, p. 124-129, pl. 11) ; le cadran atypique découvert en 1957 à Neuss (Castrum Novaesium) conservé au Clemen-Sels-Museum de Neuss (n° inv. 2738N) et publié par H. Schumacher (Schumacher 1985, p. 115-121). Enfin, le cinquième cadran nous a été communiqué personnellement par K. Schaldach. Il a été découvert à Bonn et demeure actuellement inédit.
-
[6]
Sur l’utilisation des horologia dans la vie courante, voir Rehm 1913, col. 2415-2434 ; Ardaillon 1900, p. 256-264 ou Marquardt 1892, p. 294-317. Sur les cadrans solaires gréco-romains, on se reportera au catalogue déjà ancien de Sh. Gibbs (Gibbs 1976), que l’on complètera avec l’ouvrage récent de R. Hannah (Hannah 2009) pour les aspects sociologiques et urbanistiques. De nombreux articles ont été rédigés sur le sujet, mais aucune étude de l’ensemble de la documentation disponible n’existe actuellement.
-
[7]
Cinquante-sept exactement, selon l’étude en cours de l’auteur. Bonnin 2007, p. 196-204.
-
[8]
Cette notice est tirée de l’inventaire des cadrans solaires de France édité par la Commission des Cadrans Solaires, et aimablement communiqué par Ph. Sauvageot, président de la CCS.
-
[9]
Communication personnelle de Y. Charlez, membre de la SAF.
-
[10]
Cette information « officielle » ne coïncide pas avec celle fournie par Y. Charlez. La date de découverte non plus. Il est probable que le panneau vu à ce moment ou les informations reçues alors étaient erronées.
-
[11]
Seuls les cadrans canoniaux peuvent présenter des demi-cercles divisés en six secteurs égaux, mais ces instruments sont typiquement médiévaux et ne sont jamais transportables.
-
[12]
Il n’existe pas d’étude sur ces cadrans, utilisés encore à l’époque moderne en de nombreux pays du Sud, et connus durant l’Antiquité : Pline, H. N., XVIII, 188 ; voir cependant Trousset 1986 et Pavis D’Escirac 1980.
-
[13]
Labate 2001, p. 322.
-
[14]
Nous sommes persuadés que les deux objets possédaient la même forme, celle d’un cercle complet divisé en douze secteurs numérotés en chiffres romains.
-
[15]
Disque de Chevroche et Tabula Bianchini.
-
[16]
Abry 1993 ; Bakhouche 2002.
-
[17]
Bakhouche 2002, p. 58.
-
[18]
Martin 1993, p. 17 : « Il est nécessaire de prendre quelques précautions dans la manière d’interpréter les décors des monuments. Il existe deux dangers à éviter : le premier est de prendre toute forme géométrique pour l’expression d’une idée en rapport avec le ciel ou les astres […]. Le deuxième danger serait de surestimer le sens de tout symbole reconnaissable. »
-
[19]
Ainsi la tegula inédite conservée au musée de Bavay également.
-
[20]
Par exemple le « cadran » en pierre conservé au musée archéologique de Chester, en Grande-Bretagne (Bosanquet 1904, p. 193-300), plus proche d’une décoration que d’un instrument utilitaire, le soi-disant cadran solaire d’Aquilée conservé au musée archéologique sous le numéro d’inventaire 1226 (Scrinari Santa-Maria 1972, p. 140, fig. 407) en fait simple monument funéraire présentant une décoration en forme de coquille, sans aucun réseau horaire ou encore le fragment de marbre découvert en 1964 sur la commune des Arcs-sur-Argens, et catalogué comme cadran solaire (Bérato 1999, p. 221), alors qu’il s’agit bien plus probablement d’un élément architectural.
-
[21]
Goby 1929, p. 116-118. La description de ce dernier est caractéristique de ces fausses attributions : « Un charmant cadran solaire, “solarium”, tout petit de forme, mais fort intéressant ; il mesure 10,5 cm de large sur 11 cm de hauteur et 23 à 24 mm d’épaisseur. Ce cadran est en céramique grossière, de même composition et de même nature que les tegula rencontrées dans la région ; cette pièce a été certainement fabriquée dans notre pays. »
-
[22]
« Informations archéologique, xie circonscription archéologique », Gallia 14, 1956, p. 211-212.
-
[23]
Arnoldi 1907, p. 363-368.
-
[24]
Blondel 1924, p. 51-52, fig. 17-18.
1En effectuant des recherches documentaires dans le cadre d’une thèse en archéologie romaine portant sur le thème des « horloges » romaines, nous avons rencontré assez fortuitement cette notice :
L’ouvrage de N. Severino n’est certes pas des plus fiables. Et s’il recèle de nombreuses erreurs, il s’agit cependant d’une source de renseignements et d’informations parfois utiles sur des cadrans oubliés, inédits ou retrouvés après avoir été catalogués comme perdus. L’expérience même de la recherche de cadrans solaires dans la bibliographie ancienne, mais aussi récente, nous a appris à nous méfier des attributions trop hâtives ou douteuses du terme « cadran solaire » à des objets n’en ayant qu’une ressemblance lointaine. Certes, il n’y aurait rien d’exceptionnel à ce que le site de Bavay puisse avoir livré un cadran solaire, cela est même attendu. Mais avant de diffuser une telle information, comme cela a été fait, il demeure indispensable de la vérifier. C’est le résultat de cette vérification qui est proposé ici, résultat qui nous a amené bien loin de nos préoccupations initiales.Francia, Dipartimento del Nord, presso Lille. Bavay. Probabile meridiana portatile, frammento. Segnalata da Paul Gagnaire. Età gallo-romana. Trovata nelle cave di sabbia di Bavay verso il 1920-1930. Inizialmente di forma circolare e diametro di 10 cm circa. Non vi sono foto. Conservata al museo archeologico di Bavay [1].
1 – Les cadrans solaires à Bavay
2Avant de présenter les objets, il nous a semblé utile de rappeler le contexte scientifique, c’est-à-dire ce pourquoi nous étions en droit d’espérer trouver un cadran solaire à Bavay. La cité des Nerviens est reconnue comme ayant été un lieu de dynamisme économique. Le forum, exceptionnel, est la preuve d’une intense activité, d’un carrefour de routes commerciales et de l’importance du site en Gaule Belgique. La présence de cadrans solaires, au moins publics, y est donc particulièrement attendue. L’inscription découverte en 1958 qui mentionnerait la restauration ou la donation d’un [horolo]gium et d’une balance [2], deux instruments présents sur les marchés et les places publiques, n’est pas assez complète pour en assurer la compréhension. Il s’agirait d’ailleurs de la seule mention épigraphique concernant un horologium en Gaule Belgique, et d’une des rares au Nord de la Gaule [3]. Pouvoir attester de la présence d’une horloge publique sur le site de Bavay viendrait ainsi augmenter le corpus des instruments découverts en Gaule Belgique [4] ou en Germanie Inférieure [5]. Avant de présenter les objets en question, il nous paraît utile de donner une brève définition de l’« horloge romaine », afin d’éviter toute confusion avec d’autres instruments.
3Deux types d’instruments de mesure du temps sont connus dans l’Antiquité, les cadrans solaires et les horloges hydrauliques. Seuls les cadrans solaires nous intéressent ici. Il en existe de nombreuses sortes plus ou moins complexes selon les usages et les types utilisés et répondant à des utilisations variées [6]. La typologie qui pourrait nous intéresser ici est le cadran plan, qui peut être soit vertical, soit horizontal. Il nous en est parvenu de nombreux exemplaires [7] et tous présentent dans leurs aspects les plus simples un réseau de lignes horaires bien spécifiques. Ce réseau correspond à la division du cadran en dix ou douze secteurs, permettant ainsi la lecture des douze heures du jour égales entre elles, quelle que soit la saison (les heures avaient donc des durées variables selon la saison). Ce réseau de lignes est calculé, dans les cadrans les plus précis, suivant la latitude du lieu où sera utilisé le cadran. Enfin, des courbes saisonnières (solsticiales et équinoxiales) peuvent venir augmenter la précision de l’instrument.
2 – La découverte
4Les informations données par la Société Astronomique de France et simplement retransmises à N. Severino par l’intermédiaire de P. Gagnaire sont les suivantes :
« BAVAY, musée archéologique (collection). Fragment de cadran solaire gallo-romain ( ?) trouvé dans les sablières de Bavay entre 1920 et 1930. Initialement, forme circulaire, 10 cm de diamètre environ. Vérifié par M. Y. Charlez, 1983. Diapo souhaitée » [8].
6Une recherche auprès des services administratifs de la SAF nous a permis de retrouver la trace de l’informateur initial qui n’a pu cependant nous fournir, trente ans après la notice, des informations plus claires. Ainsi, la visite initiale au musée aurait probablement eu lieu au printemps 1982. L’objet se trouvait alors dans « le jardin/terrasse à côté du parking avec d’autres objets réellement anciens, eux » [9], et les informations présentées dans la notice proviendraient « d’un petit panneau explicatif ou d’explications demandées, sans garantie ». Y. Charlez précise cependant que :
« De toute évidence, cet objet semblait récent. Aucune usure ou patine présente, il semblait avoir été gratté plutôt que taillé. Il ressemblait plus à un essai de gravure, à un brouillon plutôt qu’à un véritable objet ».
8Si certains points présentés sont en accord avec l’objet étudié, telle sa forme générale ou son aspect récent, d’autres soulèvent des problèmes, comme l’affirmation du lieu de découverte ou la qualification de « brouillon ». Il semble ici plus prudent de s’en tenir à la notice provenant du musée de Bavay.
9Si l’origine de la notice, et de sa diffusion dans les milieux gnomoniques internationaux est élucidée, ce n’est pas le cas pour l’objet lui-même. Et l’étude qui suit, réalisée au musée de Bavay, va nous amener à reconsidérer la nature des objets présentés comme des « cadrans solaires ».
3 – Du cadran solaire aux objets indéterminés
10Le premier objet présenté en tant que « cadran portatif » et étudié d’abord dans cette optique se présente comme suit :
11Il s’agit de deux fragments de schiste d’environ 2 mm d’épaisseur, recollés sur une plaque de métal, limitant de ce fait les observations à la seule face visible. Nous le nommerons « fragment A » (fig. 1). D’après les informations conservées par le musée, il aurait été découvert en 1964 lors des fouilles des cryptoportiques du forum, malheureusement parmi des objets tant gallo-romains que médiévaux et modernes [10]. Il mesure 50 mm de longueur au maximum sur 65 mm de largeur. On y distingue plusieurs réseaux de lignes droites et circulaires, gravées très précisément. Les lignes circulaires forment deux cercles concentriques, l’un extérieur, limite probable de l’instrument, de 9,8 cm de diamètre, l’autre intérieur, de six centimètres de diamètre. Ces deux cercles sont divisés par des rayons concentriques en sections de 30° précisément, six étant encore visibles et un décelable. Trois présentent encore ce qui s’apparente à une numérotation en chiffres romains toujours placés à gauche de la ligne séparatrice.
Bavay, fragments A et B
Bavay, fragments A et B
12Cette numérotation semble débuter par le chiffre I, suivit par le II, puis le III, avec ceci de particulier que la barre initiale du I, limitée par les deux cercles dans le second secteur conservé, va s’allonger progressivement par la suite. Elle se poursuit vers l’intérieur du plus petit cercle, ce de façon progressive jusqu’au quatrième secteur d’où elle déborde largement. Cette disposition pose cependant le problème de la valeur des signes gravés, car, en suivant la logique présentée ci-dessus, nous devrions trouver dans le cinquième secteur la trace de la barre verticale du IV ou des trois premières barres si on admet une numérotation telle IIII. Ce qui n’est aucunement le cas. Même en admettant que le premier chiffre conservé est un II, le rayon faisant office de I, le problème n’est pas résolu et ne s’explique que par un changement dans la disposition du marquage ou une absence de numérotation après le III. Enfin, on distingue nettement la trace d’un trou circulaire de 4,87 mm de diamètre à l’intersection des lignes droites divisant le cercle en secteur, et correspondant au centre des deux cercles.
13L’ensemble devait présenter la forme d’un cercle complet, divisé en douze portions égales de 30° chacune. Les secteurs étaient vraisemblablement numérotés de I à XII en chiffres romains, gravés entre deux cercles concentriques. L’instrument était percé en son centre pour une raison encore indéterminée. Enfin, il se développait sur un morceau de schiste de 15 cm de circonférence au minimum.
14Cette pièce nous a été présentée avec un autre fragment, apparemment de même facture, selon toute apparence de même origine (cryptoportiques du forum, 1964) et inventorié sous le même numéro (n° 1964 Z 353). Nous le nommerons « fragment B » (fig. 1). Pourtant, cet élément n’est pas mentionné dans les rapports de la SAF, et Y. Charlez précise ne pas se souvenir d’un autre fragment lors de sa visite à Bavay en 1982. Il mesure également près de 2 mm d’épaisseur, et porte inscrit un numéro d’inventaire supplémentaire spécifique (n° 42353). Les dimensions générales sont de 25 mm sur 50 mm au maximum. Tout comme le premier fragment, il présente des traces de gravures et de numérotations. Cependant, il n’y est observé qu’une portion d’un cercle de même diamètre que le cercle extérieur du premier objet, ainsi que ce qui apparaît comme étant une ligne séparatrice, semblable aux rayons du premier fragment. De part et d’autre de cette ligne se remarque ce qui s’apparente encore une fois à un chiffre, bien moins lisible que dans le premier cas.
15Sous la portion de cercle, à gauche de la ligne séparatrice, se trouve un signe rappelant le chiffre V, tandis qu’à droite sont conservés deux petits traits fort grossiers. Le second semble bien être un éclat, naturel ou postérieur à la réalisation de l’objet, ceci d’après l’étude optique. Cependant, l’attribution de ces signes à un chiffre particulier est bien difficile. En effet, ils diffèrent de ceux présents sur le premier objet par trois points.
16Tout d’abord, leur place, de part et d’autre de la ligne séparatrice. Cela ne correspond pas à la logique initiale, dans laquelle les signes étaient situés à droite de la ligne. Ensuite, ces signes sont relativement courts, ils ne se poursuivent pas, dans l’état actuel de conservation, jusqu’à un hypothétique cercle intérieur. Enfin, la qualité de la gravure n’est pas la même. Les traits sont moins bien marqués et plus grossiers. Ce sont ces éléments qui nous ont amené à émettre des doutes sur l’attribution de ce fragment au premier objet présenté, doutes qui nous ont conduit à faire effectuer une analyse des deux objets à la loupe binoculaire.
4 – Une approche méthodologique pluridisciplinaire
17De prime abord, il pourrait paraître surprenant d’effectuer une analyse optique et géologique sur des fragments aussi insignifiants. Et pourtant, de telles études nous ont permis d’avancer considérablement dans la compréhension de l’objet. C’est d’ailleurs par l’analyse optique et géologique que l’hypothèse initiale d’un seul et même objet composé des deux fragments a été entièrement transformée.
4.1 – Étude géologique (M. Dubois)
18Chacun des deux objets est constitué d’un fragment de plaque de schiste fin, de couleur grise. Les deux échantillons ont été observés à la loupe binoculaire (grossissement maximal x700). L’examen minutieux a révélé que le fragment A contient de nombreux nodules de couleur rouille, de forme sphérique, qui sont totalement absents dans le fragment B, ce qui accrédite l’idée qu’il s’agit de deux pièces différentes.
19Il n’existe pas de marqueur minéralogique ou fossilifère indiscutable pour déterminer l’origine des roches. Toutefois, du point de vue pétrographique, il s’agit de chloritoschiste, roche métamorphique à débit ardoisier. Ces roches sont tout à fait analogues à celles que l’on retrouve dans le Massif de Rocroi, dans les Ardennes franco-belges, ce qui accrédite la thèse d’objets de fabrication locale.
4.2 – Étude des traces
20L’étude géologique des pièces a également permis leur étude optique. Il est alors apparu à la loupe binoculaire que les tracés différaient notablement du point de vue de la gravure (fig. 2). Dans le premier cas (fragment A), les traits sont tracés de façon consciencieuse, à la règle et au compas ou du moins avec un instrument permettant d’atteindre la même précision. Le sillon créé par l’outil utilisé prend la forme d’un U et sa profondeur demeure constante tout au long des tracés, preuve d’une maîtrise de l’outil et de la volonté d’obtenir un objet de qualité.
Bavay, détail des incisions des fragments A et B
Bavay, détail des incisions des fragments A et B
21Dans le second cas (fragment B), les traits sont gravés rapidement, parfois avec des repentirs. Ils ne sont pas réguliers, ni parfaitement rectilignes. Enfin, le sillon créé par l’outil prend la forme d’un V, très clairement. Les profondeurs ne sont pas constantes, preuve que l’outil n’a pas bénéficié de la même pression tout au long de la réalisation.
22De cette étude, il ressort deux points importants. Tout d’abord, il apparaît maintenant évident que les deux fragments appartiennent à deux objets et non plus à un seul : l’un soigné et l’autre beaucoup moins. Ensuite, ils n’ont pas été réalisés avec le même outil ou par le même artisan. Dès lors, nous pouvons conclure notre étude matérielle en affirmant sans grand risque qu’il s’agit de deux objets, assez similaires de forme et certainement d’utilisation, mais différents dans leur mise en œuvre. Le problème, fondamental, de l’usage de ces objets n’est cependant pas résolu, et nous devrons y réfléchir en gardant à l’esprit qu’il ne s’agit plus d’un unicum.
4.3 – Discussion
23Nous sommes donc désormais en mesure d’affirmer que les deux objets présents dans les réserves du musée de Bavay ne sont pas des cadrans solaires, que ce soit pour l’Antiquité, la période médiévale ou même moderne, et encore moins des cadrans portatifs. En effet, ils dénotent par leur forme circulaire et non semi-circulaire (forme que l’on rencontre souvent pour les cadrans solaires verticaux dans l’Antiquité) et surtout par la division parfaite de ce cercle en douze secteurs de 30°. Cela ne correspond en effet à aucun système horaire connu et serait indiscutablement inutilisable dans le cas d’un cadran romain [11]. Une numérotation en chiffres romains est ensuite improbable, la totalité des cadrans numérotés connus l’étant en grec. Enfin, nous n’avons pas connaissance actuellement de cadran solaire antique, même portatif, réalisé sur un support en schiste.
24Ces deux objets en forme de cadran n’étant donc pas des instruments de mesure du temps, à quoi pouvaient-ils servir ? Quelques pistes de recherche peuvent être envisagées, que nous allons brièvement exposer.
25Au préalable doit être rejetée l’hypothèse de cadrans d’irrigation, utilisés pour régler la durée de distribution d’eau [12]. Le lieu de découverte, le nombre de pièces ainsi que le peu de graduations excluent ce type d’utilisation.
26L’hypothèse d’une utilisation comme anémoscope est tout aussi improbable, même si la forme de l’objet, circulaire avec une cavité au centre et douze rayons disposés en éventail, évoque un objet bien spécifique conservé au musée archéologique Oliveriano de Pesaro, désigné comme étant une rose des vents [13]. Ce dernier ressemble, de prime abord, étrangement au fragment A. Cependant, une étude comparative montre de réelles différences, la principale étant la présence de cinq lignes horizontales supplémentaires et d’indications épigraphiques en latin sur l’instrument de Pesaro, indications astronomiques sur la position du soleil à divers moments de l’année. De plus, les secteurs ne sont pas divisés de manière égale. Ils se présentent en quatre secteurs égaux suivis de deux autres, également égaux entre eux mais plus larges que les premiers, ce schéma se répétant une deuxième fois. Il est donc impossible de rapprocher les objets de Bavay de cet instrument particulier, et de tout autre instrument d’agrimensores en général. La division angulaire particulière ne s’accorde pas avec les besoins de ces derniers.
27Il pourrait alors s’agir de plateaux de jeu mais aucun exemplaire archéologique connu de jeu romain ne correspond à cela. Il pourrait cependant s’agir d’un plateau de jeu moderne, la présence d’un collège à proximité du lieu de la découverte et la stratigraphie très bouleversée à cet endroit autorisant cette hypothèse. Ici, le fait de posséder deux objets identiques n’est pas un critère d’exclusion, contrairement aux hypothèses précédentes.
28La division en douze secteurs pourrait faire penser à un parapegma, mais l’absence de trou sur le contour extérieur du fragment B exclut de nouveau une telle hypothèse.
29Un point attire cependant l’attention plus que les autres. En effet, la division supposée des deux cadrans en douze parties égales [14] comprenant chacune 30° n’est pas sans rappeler les signes du zodiaque qui dans l’Antiquité, et ce depuis les Chaldéens, sont disposés sur un cercle divisé en douze secteurs de 30° dans les versions les plus simples, le soleil traversant chaque zodiaque en à peu près un mois. Une utilisation astrologique pourrait être envisagée. La comparaison avec les pièces archéologiques parvenues jusqu’à nous (tablettes de Grand, disque de Chevroches, Tabulla Bianchini, disque Daressy par exemple) présente des points de similitude, tels que la délimitation d’un anneau extérieur, la division en douze secteurs, la présence dans deux cas [15] d’un percement circulaire central plus ou moins large. Mais dans tous les cas connus, tous les objets présentent, soit de façon figurée, soit de façon écrite (disque de Chevroches) des indications zodiacales, les mois égyptiens ou encore les mois romains [16] etc. Ce n’est absolument pas le cas à Bavay. Seule une numérotation en chiffres romains figurerait sur l’objet. Dans le même registre, il est possible de rapprocher la simplicité des objets de figures géométriques utilisées en astrologie pour déterminer le cercle de géniture ou les « maisons astrologiques » par exemple [17]. Mais encore une fois, la prudence, déjà préconisée par J.-P. Martin [18] à propos des monuments celtes et de leurs décors sculptés, doit être de rigueur, et il ne faudrait pas tomber dans « l’excès astrologique », tant les informations existantes sont modestes.
30Dès lors et dans l’espoir de nouvelles découvertes, nous laisserons ouverte la question de la fonction ainsi que de la chronologie de ces deux objets.
Conclusion
31Il pourrait sembler vain d’avoir dévolu tant de pages à essayer de résoudre une énigme, et finalement de ne pas arriver au but. Pourtant deux éléments fondamentaux ressortent de cette étude.
32Tout d’abord, la mise en exergue d’un type d’objet inconnu jusqu’alors, fabriqué au moins à deux exemplaires à Bavay, et sur des matériaux similaires. Ignorés jusqu’à présent, peut-être quelques éléments de ce type existent-ils dans d’autres musées, et ne demandent qu’à être pris en compte, étudiés et enfin compris. Alors cette étude aura été utile si, par la suite d’autres pièces sont retrouvées ou exhumées des réserves ou dépôts.
33Ensuite, et surtout, le cadran solaire de départ s’est peu à peu transformé en objet non identifié. En « faux cadran solaire » en attente de classification. Combien d’objets identiques ne sont-ils pas catalogués comme « cadrans solaires », faute de mieux ! Ce point-ci est des plus importants et constituerait un sujet d’article à part entière. Car lors de notre étude, ces rencontres de « faux cadrans » ont été nombreuses. Lorsqu’un fragment de céramique, de tegula ou encore de pierre porte un réseau de lignes et des chiffres romains, il est souvent présenté comme un cadran solaire ou comme une supposition de cadran solaire. Nous ne pourrons entrer ici dans les détails, car nous avons déjà recensés plus de neuf de ces objets non identifiés. Certaines de ces erreurs se démasquent facilement. Simple morceau de tegula présentant un réseau d’incisions concentriques (fig. 3) [19] ou fragment de pierre très probablement décoratif (fig. 4-6) [20], ces objets ne posent pas trop de difficultés. D’autres deviennent très embarrassants dès lors qu’il est prouvé qu’il ne s’agit pas de cadran solaire. Nous pensons ainsi au cadran (car ici comme à Bavay, il s’agit bien d’un « cadran ») découvert à Mougins vers 1930 et entièrement ignoré ensuite (fig. 7), incisé sur un fragment de tegula et présentant un réseau de lignes construit et numéroté en chiffres romains, cadran d’ailleurs très proche de par sa numérotation des fragments de Bavay [21]. Nous pensons également au cadran découvert à Nissan-lez-Ensérune et conservé dans le musée de la commune (fig. 8). Gravé sur un tesson de terre sigillée portant l’estampille OPBILICA, il présente de nouveau un réseau de lignes et une numérotation en chiffres romains, absolument incompatible avec toute utilisation gnomonique [22]. Nous pensons enfin au « cadran » découvert en 1907 à Ober-Winningen, gravé sur une base de colonne et présentant deux cercles concentriques et inscrits de chiffres romains de nouveau (fig. 9) [23].
Bavay, fragment de tegula incisée
Bavay, fragment de tegula incisée
Housestead, fragment de pierre gravé (élément décoratif ?) conservé au musée de Chester
Housestead, fragment de pierre gravé (élément décoratif ?) conservé au musée de Chester
Aquilée, partie supérieure d’un édifice funéraire
Aquilée, partie supérieure d’un édifice funéraire
Arcs-sur-Argens, fragments de pierre gravé indéterminé (élément décoratif ?)
Arcs-sur-Argens, fragments de pierre gravé indéterminé (élément décoratif ?)
Mougins, fragment de tegula incisée mis au jour dans le quartier de Saint-Basile
Mougins, fragment de tegula incisée mis au jour dans le quartier de Saint-Basile
Nissan-lez-Ensérune, fragment de céramique incisée
Nissan-lez-Ensérune, fragment de céramique incisée
Ober-Winningen, élément architectural gravé indéterminé mis au jour dans la villa romaine « auf der Bingstel »
Ober-Winningen, élément architectural gravé indéterminé mis au jour dans la villa romaine « auf der Bingstel »
34Le dernier type d’erreur rencontré est causé non pas par une interprétation trop hâtive, mais par une surinterprétation astronomique. Nous pensons ici au fameux disque de Gabie ou autel des douze dieux, conservé au musée du Louvre et parfois présenté comme un cadran solaire sans aucune justification, ou au fragment de même type conservé à Genève [24] et également catalogué comme cadran solaire dans la publication sans raison apparente.
35La liste est longue, et encore n’est-elle pas ici complète. Elle montre cependant l’étendue des fausses attributions, dues souvent à une mauvaise compréhension du mobilier, parfois peut-être même répertorié ainsi par défaut. Car il faut le reconnaître, dès lors qu’il ne s’agit plus de cadran solaire, il est difficile d’identifier ces objets, faute de description antique ou de correspondance moderne. Comme pour les fragments de Bavay, les objets d’Ober-Winningen, Mougins ou Nissan-les-Ensérune demeurent énigmatiques. D’autant plus que ces trois derniers exemples sont sans aucun doute d’époque romaine et présentent de nombreuses caractéristiques communes aux fragments de Bavay : ainsi une délimitation en secteurs, la présence de cercles concentriques ou de délimitation rectiligne de ces secteurs, et une numérotation en chiffres romains. Ici encore, nous espérons que d’autres objets similaires dont l’usage aura pu être déterminé, nous donneront la clef d’une identification autre que celle, erronée, de cadran solaire.
Bibliographie
- Abry 1993 : Abry J.-H. (dir.), « Les tablettes astronomiques de Grand (Vosges) et l’astronomie en Gaule romaine », dans Actes de la Table Ronde du 18 mars 1992 organisée au Centre d’Études Romaines et Gallo-Romaines de l’Université Lyon III, Lyon, 1993.
- Ardaillon 1900 : Ardaillon A., s.v. « Horologium », dans Daremberg Ch., Saglio E., Pottier E., Dictionnaire des antiquités grecques et romaines, III, 1900, p. 256-264.
- Arnoldi 1907 : Arnoldi Fr., « Die römische Ansiedlung Ober-Winningen “auf dem Bingstel” », Bonner Jahrbücher, 116, 1907, p. 363-368.
- Bakhouche 2002 : Bakhouche B., L’astrologie à Rome, Louvain, 2002.
- Blondel 1924 : Blondel L., « Chronique des découvertes archéologiques genevoises en 1923 », Genava, 2, 1924, p. 51-52, fig. 17-18.
- Bonnin 2007 : Bonnin J., Horologia Romana, les horloges dans les cités romaines, mémoire de master 2 archéologie romaine, sous la direction de Arcé J., Université Charles-de-Gaulle—Lille 3, mai 2007.
- Bosanquet 1904 : Bosanquet R. C., « The roman Camp at Housesteads (Brocovicus) : Report of excavations in 1898 », Archaeologia Aeliana, 25, 1904, p. 193-300.
- Bérato, Dugas 1999 : Bérato J., Dugas Fr., « Arcs sur Argens », dans Le Var, Paris, 1999, p. 221, fig. 91. (Carte archéologique de la Gaule 83/1)
- Dupuis 1988 : Dupuis X., « Inscriptions latines de Bavay », Revue du Nord, 70, 1988, p. 69-76.
- Fresson 1932 : Fresson E., « Un cadran solaire Gallo-Romain », dans Comptes Rendus du Congrès de la Fédération archéologique et historique de Belgique, 29e session, t. 4, Liège, 1932, p. 124-129, pl. 11.
- Frézouls 1969 : Frézouls Ed., « Circonscription de Champagne-Ardennes », Gallia, 27, 1969, p. 304-305.
- Gibbs 1976 : Gibbs Sh. L., Greek and Roman Sundials, New-Haven, 1976.
- Goby 1929 : Goby P., « Trouvailles Gallo-Romaines à Staint-Bazile près Mougins (Alpes-Maritimes) », dans Rhodania, compte rendu du XIe congrès, 11, 1929, p. 116-118, pl. VI, fig. 1.
- Hannah 2009 : Hannah R., Time in Antiquity, New-York, 2009.
- Labate 2001 : Labate D., « Strumenti agrimensores nel Modenese : Gnomoni, meridiane, e Compassi », dans Corti C., Giordani N. (éd.), Pondera. Pesi e misure nell’Antichità, Modène, 2001, p. 320-325.
- Lewis 2009 : Lewis M., « A Roman Clock at Vindolanda », Current Archaeology, 228, 2009, p. 14-15.
- Maheo 2004 : Maheo N. (dir.), La marque de Rome, Samarobriva et les villes du nord de la Gaule, Amiens, 2004. (Catalogue d’exposition, Musée de Picardie)
- Marquardt 1892 : Marquardt J., « La vie privée des Romains », dans Manuel des antiquités romaines, XIV-I, Paris, 1892, p. 294-317.
- Martin 1993 : Martin J.-P., « L’astrologie dans l’Occident Romain, les conditions de pénétration », dans Abry 1993.
- Michel 1966 : Michel H., « Un cadran solaire Gallo-Romain », Ciel et Terre, 82, 1966, p. 3-7, fig. 1.
- Pavis d’Escurac 1980 : Pavis d’Escurac H., « Irrigation et vie paysanne dans l’Afrique du Nord antique », Ktèma, 5, 1980, p. 177-191.
- Rehm 1913 : Rehm A., s.v. « Horologium », Pauly Wissova Real-Encyclopaedie, 8B, 1913, p. 2415-2434.
- Scheidt 2005 : Scheidt W. R., Ein griechish-römische Sonnenuhr vom Typ der azentrischen Grosskreis-Variante aus dem neronischen Doppellegionslager, VETERA I, 2005, p. 1-38.
- Schumacher 1985 : Schumacher H., « Die römische Sonnenuhr in Neuss am Rhein », Freunde alter Uhren 24, 1985, p. 115-121.
- Scrinari Santa-Maria 1972 : Scrinari Santa-Maria V., Museo Archeologico di Aquileia – Catalogo delle sculture romane, Rome, 1972, p. 140, fig. 407.
- Severino 2003 : Severino N., « Orologi Diversi », dans Orologi Solari Greco-Romani, Aggiornamento al catalogo di Sharon Gibbs, Ed. Roccasecca, 2003.
- Trousset 1986 : Trousset P., « Les Oasis Présahariennes dans l’Antiquité : partage de l’eau et division du temps », Antiquités Africaines, 22, 1986, p. 163-193.
- Wiegels 1997 : Wiegels R., Berichte zur Archäologie an Mittelrhein und Mosel, 5, 1997, p. 235-242. (Trierer Zeitschrift, Beiheft 23)
- Wilhelm 1974 : Wilhelm E., Pierres sculptées et inscriptions de l’époque romaine, Musée d’histoire et d’art, Luxembourg, 1974, p. 57, n° 363.
- Wuilleumier 1963 : Wuilleumier P., « Inscriptions latines des Trois Gaules », xviie supplément à Gallia, Paris, 1963, p. 150.
- Zäck 1987 : Zäck W., Sonnenuhren in der Eifel-Typologie und raumzeitliche Differenzierung, Bonn, 1987, p. 68-73.
Mots-clés éditeurs : Bavay, cadran solaire, objets énigmatiques, horologia, mesure
Date de mise en ligne : 22/03/2013
https://doi.org/10.3917/rdn.388.0193Notes
-
[*]
Jérôme Bonnin, doctorant en archéologie romaine, Université Charles-de-Gaulle—Lille 3, HALMA-IPEL UMR 8164, courriel : jerome.bonnin@etu.univ-lille3.fr ; Michel DUBOIS, professeur de géologie, Université de Lille 1, 59650 Villeneuve-d’Ascq. Nous tenons ici à remercier le musée de Bavay, et particulièrement Mme I. Raineau, attachée de conservation, pour son accueil et la permission d’étudier les fragments. Nous sommes également redevables à M. Dubois, professeur de géologie à l’université de Lille 1, assisté de S. Ventalon, ainsi qu’à N. Mélard, conservateur du patrimoine, pour leur aide. L’aspect technique et pluridisciplinaire de cette étude doit énormément à P. Leman, ancien conservateur honoraire du patrimoine, qui a accepté de répondre à mes questions et m’a indiqué de nombreuses et fructueuses pistes de recherches. Nous avons pu bénéficier des avis de Sh. Adam, M. Arnaldi, P. Gagnaire, J. Parés, D. Savoie, K. Schaldach, D. Schneider, et M. Tadi. Nous adressons enfin nos remerciements pour leurs encouragements et conseils à J. Arce, professeur et directeur de thèse et à C. Hoët-Van Cauwenberghe, maître de conférences à l’université de Lille 3.
-
[1]
Severino 2003.
-
[2]
Wuilleumier 1963, p. 150. L’interprétation des fragments de l’inscription est problématique, et d’autres auteurs y ont vu la dédicace d’un édifice des poids et mesures et d’une balance (D. Roger, dans Maheo 2004, p. 90, fig. 48 ; Dupuis 1988, p. 69-71). Rien ne permet donc d’assurer la lecture d’un Horologium.
-
[3]
On ne connaît qu’une inscription en Germanie Inférieure, celle provenant du fort auxiliaire de Remagen, et présentant peut-être la réparation d’une horloge hydraulique : CIL XIII 7800 et Lewis 2009, p. 14-15. Trois autres inscriptions sont cependant recensées en Germanie Supérieure. L’une découverte à Mayence (AE 2001, 1545 et Wiegels 1997, p. 235-242), la seconde à Martberg (CIL XIII, 7661 = ILS 4569), et la dernière, conservée à Vienne (CIL XII, 1893).
-
[4]
Cinq cadrans nous sont actuellement connus. Le fragment de cadran solaire du Titelberg, conservé au Musée national d’histoire et d’art de Luxembourg (n° inv. 1965-12/1216). Les informations à son sujet nous ont aimablement été fournies par J. Krier, conservateur de la section gallo-romaine du MNHA de Luxembourg. Voir ainsi Wilhelm 1974, p. 57, n° 363. Le fragment de cadran découvert à Trèves, conservé au Landesmuseum de cette même ville et publié en 1987 (ZÄCK 1987, p. 68-73). Le cadran de Betwiller, conservé au Musée archéologique de Strasbourg et publié entre autres par Sh. Gibbs (GIBBS 1976, p. 162). Les deux derniers objets appartiennent à la Gaule Belgique jusqu’à la réforme de Domitien. Il s’agit du cadran découvert à Andilly-en-Bassigny en 1969 et mentionné dans Frézouls 1969, p. 304-305 et du cadran, inédit, provenant du sanctuaire de Mandeure (information aimablement communiquée par S. Blin, doctorante en archéologie romaine). Mentionnons également pour cette province l’existence de quatre cadrans portatifs et d’un fragment d’horloge hydraulique.
-
[5]
Ne sont connus que cinq cadrans datés du ier, iiie et ive siècle : celui de Xanten-Birten vers 1930, analysé par W. R. Scheid (Scheid 2005, p. 1-38) ; celui d’Evelette, découvert en 1961, catalogué par Sh. Gibbs (Gibbs 1976, p. 335) et présenté par H. Michel (Michel 1966, p. 3-7, fig. 1) ; celui trouvé dans une villa romaine au lieu dit « Moxhais », commune d’AwansBierset, (Gibbs 1976, p. 336, Fresson 1932, p. 124-129, pl. 11) ; le cadran atypique découvert en 1957 à Neuss (Castrum Novaesium) conservé au Clemen-Sels-Museum de Neuss (n° inv. 2738N) et publié par H. Schumacher (Schumacher 1985, p. 115-121). Enfin, le cinquième cadran nous a été communiqué personnellement par K. Schaldach. Il a été découvert à Bonn et demeure actuellement inédit.
-
[6]
Sur l’utilisation des horologia dans la vie courante, voir Rehm 1913, col. 2415-2434 ; Ardaillon 1900, p. 256-264 ou Marquardt 1892, p. 294-317. Sur les cadrans solaires gréco-romains, on se reportera au catalogue déjà ancien de Sh. Gibbs (Gibbs 1976), que l’on complètera avec l’ouvrage récent de R. Hannah (Hannah 2009) pour les aspects sociologiques et urbanistiques. De nombreux articles ont été rédigés sur le sujet, mais aucune étude de l’ensemble de la documentation disponible n’existe actuellement.
-
[7]
Cinquante-sept exactement, selon l’étude en cours de l’auteur. Bonnin 2007, p. 196-204.
-
[8]
Cette notice est tirée de l’inventaire des cadrans solaires de France édité par la Commission des Cadrans Solaires, et aimablement communiqué par Ph. Sauvageot, président de la CCS.
-
[9]
Communication personnelle de Y. Charlez, membre de la SAF.
-
[10]
Cette information « officielle » ne coïncide pas avec celle fournie par Y. Charlez. La date de découverte non plus. Il est probable que le panneau vu à ce moment ou les informations reçues alors étaient erronées.
-
[11]
Seuls les cadrans canoniaux peuvent présenter des demi-cercles divisés en six secteurs égaux, mais ces instruments sont typiquement médiévaux et ne sont jamais transportables.
-
[12]
Il n’existe pas d’étude sur ces cadrans, utilisés encore à l’époque moderne en de nombreux pays du Sud, et connus durant l’Antiquité : Pline, H. N., XVIII, 188 ; voir cependant Trousset 1986 et Pavis D’Escirac 1980.
-
[13]
Labate 2001, p. 322.
-
[14]
Nous sommes persuadés que les deux objets possédaient la même forme, celle d’un cercle complet divisé en douze secteurs numérotés en chiffres romains.
-
[15]
Disque de Chevroche et Tabula Bianchini.
-
[16]
Abry 1993 ; Bakhouche 2002.
-
[17]
Bakhouche 2002, p. 58.
-
[18]
Martin 1993, p. 17 : « Il est nécessaire de prendre quelques précautions dans la manière d’interpréter les décors des monuments. Il existe deux dangers à éviter : le premier est de prendre toute forme géométrique pour l’expression d’une idée en rapport avec le ciel ou les astres […]. Le deuxième danger serait de surestimer le sens de tout symbole reconnaissable. »
-
[19]
Ainsi la tegula inédite conservée au musée de Bavay également.
-
[20]
Par exemple le « cadran » en pierre conservé au musée archéologique de Chester, en Grande-Bretagne (Bosanquet 1904, p. 193-300), plus proche d’une décoration que d’un instrument utilitaire, le soi-disant cadran solaire d’Aquilée conservé au musée archéologique sous le numéro d’inventaire 1226 (Scrinari Santa-Maria 1972, p. 140, fig. 407) en fait simple monument funéraire présentant une décoration en forme de coquille, sans aucun réseau horaire ou encore le fragment de marbre découvert en 1964 sur la commune des Arcs-sur-Argens, et catalogué comme cadran solaire (Bérato 1999, p. 221), alors qu’il s’agit bien plus probablement d’un élément architectural.
-
[21]
Goby 1929, p. 116-118. La description de ce dernier est caractéristique de ces fausses attributions : « Un charmant cadran solaire, “solarium”, tout petit de forme, mais fort intéressant ; il mesure 10,5 cm de large sur 11 cm de hauteur et 23 à 24 mm d’épaisseur. Ce cadran est en céramique grossière, de même composition et de même nature que les tegula rencontrées dans la région ; cette pièce a été certainement fabriquée dans notre pays. »
-
[22]
« Informations archéologique, xie circonscription archéologique », Gallia 14, 1956, p. 211-212.
-
[23]
Arnoldi 1907, p. 363-368.
-
[24]
Blondel 1924, p. 51-52, fig. 17-18.