Notes
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Remy Ambühl, doctorant, Université de St-Andrews, 114/2F1 Canongate, Edimbourg, EH8 8DD, U.K. Courriel : rca7@webmail.st-andrews.ac.uk.
Cet article s’inspire d’un mémoire de Master soutenu à l’université de Nottingham en octobre 2004. R. Ambühl, The Prisoners of Agincourt. Ransoming in the Late Middle Ages, University of Nottingham, Masters by Research, ouvrage dactylographié, 2004. Je profite de cette occasion pour remercier mes directeurs de recherche, le Professeur Michael Jones et le Docteur Gwilym Dodd, pour leur précieux soutien dans la réalisation de ce travail. Je tiens également à remercier les Professeurs Chris Given-Wilson et Bertrand Schnerb : le premier, pour son aide dans l’interprétation de certains documents, et le second, pour sa relecture attentive de ce présent article et ses conseils avisés. -
[1]
Voir par exemple l’article synthétique de C.T. Allmand, « War and profit in the Late Middle Age », History Today, 15 (1965), p. 762-769.
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[2]
Sur les circonstances de captures dans la mêlée, voir A. Curry, Agincourt. A new History, Stroud, 2005, p. 214 et 215.
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[3]
M. K. Jones, « Ransom brokerage in the fifteenth century », dans P. Contamine, C. Giry-Deloison, M. H. Keen (éd.), Guerre et société en France, en Angleterre et en Bourgogne, xive-xvesiècle, Lille, 1991, p. 221-35 (cf. p. 221).
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[4]
Avant une bataille rangée, le commandement en chef pouvait ordonner qu’aucun ennemi ne soit pris à merci ou bien que les prises n’interviennent qu’une fois la victoire manifestement acquise sur le terrain. Une fois les ennemis rendus, le chef de guerre pouvait ordonner de mettre à mort les prisonniers, pour des motifs particuliers (ainsi en guise de représailles) ou généraux (assimilation des prisonniers à des traîtres, à des rebelles, à des criminels de lèse-majesté). Des massacres délibérés de prisonniers étaient décidés au plus haut niveau, là encore pour l’exemple. P. Contamine, « Un contrôle étatique croissant. Les usages de la guerre du xive s. au xviiie s. : rançons et butins », dans P. Contamine (éd.), Guerre et concurrence entre les États européens du xive au xviiie s., Paris, 1998, p. 199-236 (cf. p. 204-205).
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[5]
Voir A. Curry, Agincourt (op. cit., n. 2), p. 215-221, 249 et 250 et M. Bennett « The Battle », dans A. Curry (éd.), Agincourt, 1415. Henry V, Sir Thomas Erpingham and the triumph of the English archers, Stroud, 2000, p. 21-36 (cf. p. 32-36).
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[6]
On notera que ni Anne Curry, ni Matthew Bennet n’ont pris en compte l’hypothèse de John Keegan (The Face of Battle, Harmondsworth, 1978, p. 107-112) selon laquelle le massacre des prisonniers n’aurait pu avoir lieu. Les arguments logistiques de l’historien et militaire de profession ne manquent cependant pas d’intérêt, retenant même l’attention de C.T. Allmand, dans sa biographie sur Henry V (Londres, 1992, p. 95). Au cœur de son argumentation, Keegan affirme que l’exécution de quelques milliers de prisonniers (en armure) par 200 archers en un très court laps de temps est impossible et en déduit que les morts, causées vraisemblablement par un violent déplacement des captifs vers une zone plus sûre, n’ont certainement pas excédé quelques centaines.
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[7]
J. De Wavrin, Recueil des Croniques et Anchiennes istories de la Grant Bretaigne a present nommé Engleterre, 1399-1422, W. Hardy (éd.), 5 vol., Londres, 1864-1891, II, p. 216 ; J. Le Févre De Saint-Rùmy, Chronique, F. Morand (éd.), 2 vol., Paris, 1876-1881, I, p. 257-258.
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[8]
Il faut remarquer que peu de chroniqueurs se sont hasardés à donner une estimation du nombre de prisonniers français. Seulement huit des 28 récits de chroniques recensés par Anne Curry (The battle of Agincourt. Sources and interpretations, Woodbridge, 2000, p. 10-194) contiennent des chiffres relatifs aux prisonniers. Les estimations des chroniqueurs français sont les suivantes : 1 400 prisonniers selon le Religieux de Saint-Denis ; 1 500 selon Monstrelet ; 1 600 selon Le Fèvre de Saint-Rémy et Wavrin ; 2 200 selon l’auteur de la Chronique de Ruisseauville.
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[9]
Deux sources seulement sont à l’origine de ces estimations : Walsingham (700) et l’auteur de l’une des versions de Brut (800).
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[10]
F. Bùriac-Lainù, C. Given-Wilson, Les prisonniers de la bataille de Poitiers, Paris, 2002, p. 309.
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[11]
A. Curry, Sources and interpretation (op. cit., n. 8), p. 53 et 94.
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[12]
Il faut noter toutefois qu’en d’autres endroits les chroniqueurs n’hésitent pas à manipuler les chiffres afin de servir leur discours. Cela apparaît très clairement pour la dimension des armées et du nombre des pertes anglaises. Il s’agit tantôt de magnifier la victoire des Anglais ou de minimiser la défaite française. Ibid., p. 12 (Table 1 : ‘Chroniclers’ estimates of numbers’). Remarquons cependant que les nombres relatifs aux prisonniers ne semblent appuyer aucun discours idéologique.
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[13]
R. Ambühl, The Prisoners of Agincourt (op. cit., n. 1), p. 122-147. Quelques noms sont venus depuis lors s’ajouter à cette liste.
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[14]
La captivité du duc d’Orléans est traitée dans de nombreuses études. Il faut d’abord citer l’étude complète de La vie de Charles d’Orléans, 1394-1465 (Paris, 1911) par P. Champion. Deux études consacrées à la détention de Charles et de son frère, Jean d’Orléans, comte d’Angoulême, avaient précédé l’ouvrage de Champion : l’une que l’on doit à A. Joubert (Négociations relatives à l’échange de Charles, duc d’Orléans, et de Jean, comte d’Angoulême, contre les seigneurs anglais, Angers, 1890) et l’autre à G. Dupont-Ferrier (« La captivité de Jean d’Orléans, comte d’Angoulême », Revue Historique, 62 (1896), p. 45-60). Sur le rôle particulier de Charles d’Orléans lors de la convention de paix à Calais en 1439, voir C.T. Allmand, « The Anglo-French negotiations, 1439 », Bulletin of the Inst. of Hist. Res., 40 (1967), p. 1-33. Sur le (non) paiement de sa rançon, voir M. K. Jones, « Henry VII, Lady Margaret Beaufort, and the Orléans ransom », dans Kings and nobles in the later Middle Ages, R. A. Griffiths, J. Sherborne (éd.), Gloucester, 1986, p. 254-273. Enfin, on doit signaler la parution récente d’un ouvrage portant sur la captivité de Charles d’Orléans en Angleterre. Les différentes contributions concernent principalement l’œuvre du poète. Remarquons toutefois l’article de W. Askins (« The brothers Orléans and their keepers », dans M.-J. Arn (ed.), Charles d’Orléans in England 1415-1440, Londres, 2000, p. 27-45) qui se concentre sur la relation du duc d’Orléans avec ses gardiens successifs. En ce qui concerne la détention du duc de Bourbon voir J. Huillard-Brùholles, « La rançon du duc de Bourbon Jean ier, 1415-1436 », Mémoires présentés à l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 8 (1874), p. 37-91 ; et celle du comte de Richemont, voir A. Cosneau, Le connétable de Richemont, Paris, 1888.
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[15]
The National Archives (désormais TNA), E 101/48/2.
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[16]
W. D. Cooper (« Sussex men at Agincourt », Sussex Archeological Collections, 15 (1863), p. 123-137) a tiré quelques informations ponctuelles de cette source. J. H. Wylie (The reign of Henry V, 3 vol., Cambridge, 1914-1929, II, p. 244 et 249), considérant le dossier dans sa totalité, a fait quelques observations très générales. Plus récemment, A. Curry (Agincourt (op. cit., n. 2), p. 244-245) y a consacré deux pages de son ouvrage sur la bataille d’Azincourt, relevant son importance et utilisant quelques informations pour éclairer le processus de mise à rançon. Nous y ferons référence en temps voulu.
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[17]
Voir, par exemple, les endentures éditées dans T. Rymer (éd.), Foedera, Conventiones, Litterae, etc., 20 vol., 1727-1735, IX, p. 223-237.
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[18]
Voir, par exemple, P. Contamine, « Rançons et butins dans la Normandie anglaise, 1424-1444 », dans La guerre et la paix, frontières et violences au Moyen Âge. Actes du congrès national des sociétés savantes. Section de philologie et d’histoire jusqu’à 1610 (Lille, 1976), Paris, 1978, p. 241-270 et A. Ayton, Knights and warhorses. Military service and the English aristocracy under Edward III, Woodbridge, 1994, p. 127-137.
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[19]
D. Hay, « The division of the spoils of war in fourteenth-century England », Transactions of the Royal Historical Society, 5esérie, 4 (1954), p. 91-109 (cf. p. 106 et 107).
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[20]
P. Contamine, « Rançons et butins dans la Normandie anglaise » (op. cit., n. 18), passim ; et en ce qui concerne les comptes de retenues, voir, par exemple, TNA, E 101/48/8, 49/12, 49/21, 49/37, 52/1,2. Tous ces comptes enregistrent des droits royaux sur des gains de guerre qui sont directement prélevés sur les gages des soldats.
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[21]
TNA, E 101/45/12 ; E 101/46/4 ; E 210/2804, 2807, 2829, 2834, 2837, 2865.
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[22]
TNA, E 364/62, m.1.
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[23]
Toutefois, 29 obligations (du montant de 189£ 14s 11d) étaient encore en possession de Bokeland à cette date. L’ancien trésorier de Calais devait en répondre devant le roi.
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[24]
TNA, E 101/53/7.
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[25]
Sur le rôle de ces deux officiers, voir M. S. Giuseppi, Guide to the contents of the Public Record Office, 3 vol., Londres, 1963, I, p. 49 et 50, 95 et 96.
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[26]
Sur cette enquête, voir J. L. Kirby, « The issues of the Lancastrian Exchequer and Lord Cromwell’s estimates of 1433 », Bull. of the Inst. of Hist. Res., 24 (1951), p. 121-151.
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[27]
TNA, E 101/48/2, no. 43.
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[28]
Il s’agit des obligations de deux chevaliers, Sir William Phelip (TNA, E 210/2807) et Sir Henry Husee (TNA, E 101/46/4).
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[29]
A. Curry, Sources and interpretations (op. cit., n. 8), p. 452-453.
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[30]
Il est conservé aux archives nationales à Londres sous la cote TNA, E 358/6. J. H. Wylie (« Notes on the Agincourt Roll », Transactions of the royal historical society, 3e série, 5 (1911), p. 105-140 (cf. p. 114-116)) y avait déjà consacré quelques pages au début du xxe siècle. A. Curry ( Sources and interpretation ( op. cit., n. 8), p. 428-434) a récemment mis en lumière toute l’importance de cette source pour l’étude du recrutement et du paiement des troupes anglaises. Chaque compte fait mention, entre autres, des montants des rançons des prisonniers français et du calcul de la portion royale qui sera ensuite déduite de leurs gages.
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[31]
A. Curry, Sources and interpretations ( op. cit., n. 8), p. 428.
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[32]
TNA, E 101/46/16.
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[33]
TNA, E 358/6, m. 5r.
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[34]
TNA, E 210/2807.
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[35]
TNA, E 101/46/4 (Henry Husee, 16 janvier 1416) ; E 101/45/12 (William Trussel, 31 janvier 1416) ; E 101/48/2, no. 39 (John Pympe et William Perrot, 3 septembre 1416).
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[36]
N.H. Nicolas, History of the battle of Agincourt, Londres, 1832, p. 333 ; J.S. Roskell, L. Clark, C. Radcliffe (dir.), The House of Commons, 4 vol., Stroud, 1992, IV, p. 152 et 670.
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[37]
TNA, E 358/6, m. 4r.
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[38]
N.H. Nicolas, History of the battle of Agincourt ( op. cit., n. 36), p. 373.
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[39]
Cette seconde partie est largement inspirée de la première partie de notre article publié en anglais : « A fair share of the profits ? The ransoms of Agincourt », Notthingam Medieval Studies, 50 (2006), 129-150 (cf. p. 132-142). Quelques figures données ont été modifiées à la suite de la découverte de trois nouvelles obligations et de recherches plus approfondies.
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[40]
A. Curry, Sources and interpretations ( op. cit., n. 8), p. 74.
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[41]
Ainsi qu’il apparaît, par exemple, dans la liste des prisonniers capturés par les gens de guerre de la garnison d’Avranches en avril 1429. BNF, ms fr. 25768/372.
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[42]
Il n’y a bien entendu aucun doute en ce qui concerne les hommes d’armes qui constituaient l’infanterie lourde. Après avoir rompu la charge de la cavalerie, les archers jouèrent un rôle majeur dans la mêlée : Et tantôt après, voyants les dessus dits Anglois cette division en l’avant-garde, tous ensembles entrèrent en eux et jetèrent jus leurs arcs et sagettes, et prirent leurs épées, haches, maillets, becs-de-faucons et autres bâtons de guerre frappants, abattants, et occisants iceux François : tant qu’ils vinrent à la seconde bataille, qui étoit derrière la dite avant-garde ; et après les dits archers suivoit et marchoit le dit roi anglois moult fort atout ses gens d’armes. E.De Monstrelet, Chronique, L. Douët-d’Arcq (éd.), 6 vol., Paris, 1857-1862, III, p. 106.
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[43]
A. Curry, Agincourt ( op. cit., n. 2), p. 187.
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[44]
Remarquons aussi qu’un marchand avéré, Richard Tropenell, citoyen de Londres, a été inclus dans cette catégorie. TNA, E 101/48/2, no. 37. Ce Tropenell fut peut-être un parent et valet de William Tropenell, maître tailleur, qui avait passé un contrat d’endenture avec la couronne pour une retenue de deux valets et quatre archers. A. Curry, Agincourt ( op. cit., n. 2), p. 60.
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[45]
Si cette somme est proportionnelle au montant des rançons, il est toutefois difficile de déterminer le montant exact de la rançon, car il s’avère que les maîtres d’Azincourt payaient tantôt un tiers de la rançon et tantôt un neuvième. Cet usage qui, en théorie, est pourtant bien défini, trouve une application étrange dans le cadre de la campagne d’Azincourt. Voir R. Ambühl, « A fair share of the profits ? ( op. cit., n. 38) », p. 142-148.
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[46]
En fait, la presque totalité des membres du troisième groupe partage la possession d’un prisonnier. Trois seulement font exception : Robert Wysebech (TNA, E 101/48/2, no. 11), John Harwod (TNA, E 101/48/2, no. 14) et John Hillis (TNA, E 101/48/2, no. 33). Quelques maîtres ont contracté plusieurs obligations. Par exemple, Peter Pykeryng et Robert Halton ont passé ensemble cinq obligations (TNA, E 101/48/2, 26, 50, 60, 62, 71) ; John Bakster et William Ledenham en ont passé trois conjointement (TNA, E 101/48/2 61, 73 ; E 210/2834) ; Simon Weting et John Ellestowe, finalement, en ont passé deux ensemble (TNA, E 101/48/2 no. 22, 25).
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[47]
Gilles Thorndon devait payer au roi 46£ 13s 4d pour Rybeburg, tandis que les droits royaux pour Longueval détenu conjointement par l’écuyer John Pympe et l’archer William Perrot s’élevaient à £44 8s 11d. TNA, E 101/48/2 no. 41, 42.
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[48]
TNA, E 101, 48/2, no. 40.
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[49]
Une identification complète des maîtres permettrait de mieux éclairer cette redistribution des prisonniers. L’identification des plus importants montre déjà que ceux dont le rang était le plus élevé, à savoir les capitaines de retenue ou membres du Parlement, étaient aussi les maîtres des prisonniers les plus importants. Sir John Grey, qui contracta l’obligation la plus chère (163£ 6s 8d), peut avoir appartenu à la fameuse Maison de Ruthin. Il était capitaine d’une importante retenue de 35 hommes d’armes et 96 archers à Azincourt. TNA, E 101/48/2, no. 31-2 ; E 358/ m. 6r. ; N. H. Nicolas, History of the battle of Agincourt ( op. cit., n. 35), p. 346-347. Sir Henry Husee of Harting, M.P. (Membre du Parlement), qui avait passé la seconde obligation la plus chère (132£ 28s 8d), était dans la retenue de Humfrey, duc de Gloucester. TNA, E 101/46/4 ; Nicolas, History of the battle of Agincourt ( op. cit., n. 35), p. 333 ; G. Cokayne ET AL. (éd.), The Complete Peerage, 14 vol., Londres, 1910-1998, VII, p. 11. Sir Roger Fiennes, M.P., détenteur de la troisième obligation la plus chère (55£ 11s 4d), était capitaine d’une compagnie de 7 hommes d’armes et 24 archers au départ de la campagne. TNA, E 101/48/2, no. 46 ; The House of Commons ( op. cit., n. 35), III, p. 71. John Pympe, écuyer, co-détenteur du cinquième contrat le plus important, était le fils de Reynold Pympe, M.P. Il servit dans la retenue de Gloucester en 1415 et 1421. TNA, E 101/48/2, no. 41 ; The House of Commons ( op. cit., n. 35), IV, p. 152. Sir William Trussel, M.P., combattit aussi dans la retenue de Gloucester. Sa propre compagnie était composée de 5 hommes d’armes et 13 archers. TNA, E 101/45/12 ; The House of Commons ( op. cit., n. 35), IV, p. 670. Finalement, Sir Henry Fitzhugh, capitaine, détenteur de la neuvième obligation la plus chère, devait servir le roi avec une retenue de 30 hommes d’armes et 90 archers. TNA, E 101/48/2, no. 40 ; A. C. Reeves, Lancastrian Englishmen, Washington, 1981, p. 89.
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[50]
Voir T. Rymer (éd.), Foedera ( op. cit., n. 17), IX, p. 223-237.
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[51]
Ralph Fowne était dans la retenue de Sir Ralph Shirley. Il n’y eut aucun payement de droits royaux pour la rançon du prisonnier puisque celui-ci passa directement entre les mains du roi. TNA, E 358/6, m. 1r.
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[52]
Le 10 janvier 1416, Henri ordonna à ses officiers de l’Échiquier de payer 666£ to Sir John Grey, une partie de la somme qu’il lui avait promise pour lui avoir remis le comte d’Eu. F. Devon (éd.), Issues of the Exchequer ; being a collection of payments made out of his majesty’s revenue, from king Henry VIII to king Henry VI inclusive, Londres, 1837, p. 344 et 345.
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[53]
A. C. Reeves, Lancastrian Englishmen (op. cit., n. 49), p. 156.
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[54]
William Wolf était dans la retenue de Thomas Arundel. W. D. Cooper, « Sussex men at Agincourt » ( op. cit., n. 16), p. 126 et 127.
-
[55]
F. Bériac-Lainé, C. Given-Wilson, Les prisonniers de la bataille de Poitiers ( op. cit., n. 10), p. 169-174.
-
[56]
John Cornwall, par exemple, ne fut payé que huit ans plus tard, après la mort d’Henri V. Il fut séparé de son prisonnier après la bataille sans aucune compensation. Vers la fin de l’année 1423, le Conseil délivra le comte à Cornwall, avec les arriérés de sa rançon, et il fut aussi convenu de le défrayer des dépenses soutenues à l’occasion du long procès qu’il avait engagé pour le recouvrement de ses droits sur son prisonnier. N. H. Nicolas (éd.), Proceedings and Ordinances of the Privy Council of England, 7 vol., Londres, 1834-1837, III, p. 126 (minutes du 7 et du 11 novembre 1423) ; voir aussi A. C. Reeves, Lancastrian Englishmen ( op. cit., n. 46), p. 156 et 169. Nous ignorons si John Grey reçut le reste de l’argent qui lui avait été promis. En ce qui concerne Fowne et Wolfe, nous n’avons trouvé jusqu’ici aucune trace de compensation.
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[57]
TNA, C 47/2/49/7 ; cité et traduit dans A. Curry, Sources and interpretations ( op. cit., n. 8), p. 439-441.
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[58]
Fowne est en effet mentionné comme l’auteur de la prise du duc de Bourbon dans le compte remis à l’Échiquier par son capitaine, Sir Ralph Shirley.
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[59]
M. Keen, The Laws of War in the Later Middle Ages, Londres, 1965, p. 128. Selon M. K. Jones (« Ransom brokerage » ( op. cit., n. 3), p. 227), la remise d’un prisonnier français au capitaine était même une obligation. La position de F. Bériac-Laisné et C. Given-Wilson ( Les prisonniers de Les prisonniers de la bataille de Poitiers ( op. cit., n. 10), p. 289) est plus nuancée : « Elles [les meilleures prises] proviennent plutôt d’hommes servant sous leurs ordres et qui se trouvèrent obligés de les leur céder. Cela ne veut pas dire que tous ceux qui, ce jour-là, capturèrent des prisonniers de valeur durent les abandonner aux chefs de l’ost, mais il n’était manifestement pas question qu’un comte français, ou un maréchal restassent trop longtemps aux mains d’un valet. »
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[60]
M. Keen, The Laws of War ( op. cit., n. 59), p. 145.
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[61]
Le Religieux De Saint-Denis, Chronique, L.-F. Bellaguet (éd. et trad.), 3 vol. en 2 t., Paris, 1994 (réimpr. de l’éd. en 6 t. de Paris, 1839-1852), II, p. 568-569.
-
[62]
G. De Lannoy, Œuvres, Ch. Potvin et J.-C. Houzeau (éd.) Louvain, 1878, p. 49 et 50.
-
[63]
J. H. Wylie, History of England under Henry the Fourth, 4 vol., New York, 1969, I, p. 286 n. 2.
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[64]
La détention de Pierre de Hellenvillers est attestée dans une pétition de sa femme Jeanne Gaillouvel adressée au roi de France le 9 mai 1416. BNF, P.O., Hellenvillers, no. 56 (vidimus de juillet 1416) ; cité dans Curry, Sources and interpretations ( op. cit., n. 8), p. 467. Une notice biographique sur ce personnage est fournie dans A. Demurger, « Guerre civile et changements du personnel administratif dans le royaume de France de 1400 à 1418 : l’exemple des baillis et sénéchaux », Francia, 6 (1978), p. 151-298 (cf. p. 264).
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[65]
J. Leland, Itinerary, Thomas Hearne (éd.), 9 vol., Oxford, 1710-1712, I, p. 138 ; cité dans K. B. Mcfarlane, The nobility of Later Medieval England, Oxford, 1973, p. 128.
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[66]
Les sept prisonniers de Hungerford capturés à Azincourt sont Pierre de Rewe (Rieux ?), Moreu de Seeland (Zélande ?), Emyneon Benefyk, Jean de Gey, Magyn Drewen, Jean de Flavyle et Hugues de Belle. TNA, C 76/98, mm. 3-4.
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[67]
Cf. n. 43.
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[68]
Ce dernier ne s’acquittant pas de sa dette, Whittington porta l’affaire en justice et eut finalement gain de cause en avril 1421. Il y a tout lieu de croire ici que la marge de profit fut maigre et que Whittington cherchait en fait à se débarrasser d’un prisonnier peut-être insolvable. A. H. Thomas (éd.), Calendar of Plea and Memoranda Rolls of the City of London, 1413-1417, Cambridge, 1943, 68. — (suite) p. 91-93 ; voir aussi C. M. Barron, « Richard Whittington : the Man behind the Myth », dans Studies in London History, A. E. J. Hollaender et W. Kellaway (éd.), Londres, 1969, p. 197-250 (cf. p. 228).
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[69]
Il faut souligner toutefois que les témoignages relatifs à une pratique collective sont rarissimes. Nous ne pouvons citer qu’un exemple antérieur à Azincourt. En 1376, un groupe de combattants sous le commandement du comte d’Armagnac se partagea les profits des rançons de 21 prisonniers selon l’importance de leurs gages. M. Pena (éd.), Documents sur la Maison de Durfort,xie-xve siècle, Bordeaux, 1977, p. 743 et 744, no. 1274 ; cité dans P. Contamine, « Un contrôle étatique croissant » ( op. cit., n. 4), p. 212 et 213). L’exemple du butinier bourguignon, en 1443, qui recevait l’argent des rançons des prisonniers et le redistribuait parmi les maîtres des prisonniers témoigne plus d’une solide organisation que d’une forme d’entreprise collective. B. Schnerb, Bulgnéville (1431). L’État bourguignon prend pied en Lorraine, Paris, 1993, p. 96-97. Cependant, auxive et dans la première moitié duxve siècle, la mise à rançon des prisonniers demeurait en général une affaire privée et individuelle. Il était déjà coutume en revanche de mettre en commun le mortbutin que l’on mettait aux enchères. Les gains étaient ensuite redistribués parmi les soldats selon leur rang. M. Keen, The Laws of War ( op. cit., n. 58), p. 146. Il faut attendre la seconde moitié duxve siècle en France pour que les rançons de prisonniers deviennent aussi une affaire collective. Jean de Bueil, c. 1462-1465, notait trois différentes options dans la division des gains de guerres (incluant les rançons de prisonniers) : le profit individuel, l’association de plusieurs combattants ou le profit commun de toute la compagnie. Finalement, en 1476, une ordonnance de guerre française déclarait que tous les biens de guerre quels qu’ils soient devaient être mis en commun. Jean De Bueil, Le Jouvencel, C. Favre et L. Lecestre (éd.), 2 vol., Paris, 1887-1889, II, p. 94 ; cité dans P. Contamine, « Un contrôle étatique croissant » ( op. cit., n. 4), p. 212 et 213.
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[70]
En tous cas, cette large proportion de prisonniers détenus par les chevaliers pose question. Pourquoi n’observe-t-on pas ce phénomène au niveau des écuyers qui, eux aussi, commandaient des retenues ? Pourquoi les chevaliers semblent-ils former un groupe à part, distinct de celui des écuyers et des archers ? Il aurait été moins surprenant de trouver les chevaliers et les écuyers, c’est-à-dire les nobles, d’un côté, et les archers de l’autre.
-
[71]
J. De Wavrin, Recueil des Croniques ( op. cit., n. 7), II, p. 220 et 221.
-
[72]
W. P. Balidon (éd), Select cases in Chancery (1364-1471), Londres (Selden Society, 10), 1896, p. 110 ( item 112).
-
[73]
Si l’on écarte les deux obligations passées conjointement par un certain John Gibbeson de Calais avec Thomas Wynford, un chevalier anglais, dont la somme totale s’élève au montant exceptionnel de 43£, la valeur moyenne des 45 autres contrats est à peine supérieure à 3£, soit une livre au dessous de la moyenne de cette catégorie.
-
[74]
Voir l’obligation de William Russel, de Worcester, entrée conjointement avec Roger Duddeley, de Calais, ou bien celle de John Mersk, de Calais, et William Bud, de York. TNA, E 101/48/2, no. 28 et 57. Deux obligations furent passées par un chevalier anglais Thomas Wynford et un certain John Gibbeson de Calais. TNA, E 101/48/2, no. 54 et 64. Le chevalier n’apparaît toutefois pas dans la liste des hommes d’armes qui participèrent à la campagne d’Azincourt dressée par A. Curry, Agincourt ( op. cit., n. 2), p. 280-286. Cette très longue liste n’est toutefois pas complète. Elle contient 6 538 noms d’hommes d’armes et d’archers (les noms des chefs d’endentures ne sont pas inclus dans ces chiffres). L’auteur estime cependant que le contingent anglais d’Azincourt devait compter 8 735 hommes.
-
[75]
TNA, E 101/48/2, no. 67.
-
[76]
Sherborne n’est pas mentionné dans la liste fournie dans A. Curry, Agincourt ( op. cit., n. 2), p. 280-300.
-
[77]
Ces sauf-conduits sont contenus dans les Treaty Rolls conservés aux National Archives à Londres sous la cote TNA, C 76 (pour les années 1415 et 1416, C 76/98, 99). Ils ont été partiellement édités dans T. Rymer, Foedera ( op. cit., n. 17), IX, X et dans T. Carte (éd.), Catalogue des Rolles gascons, normans et francois conservés dans les archives de la Tour de Londres, 2 vol., Londres et Paris, 1743. Ces deux sources, même combinées, ne proposent qu’une sélection des sauf-conduits qui ne sont pas toujours retranscrits dans leur totalité. Vers la fin du xixe siècle, les Treaty Rolls pour les règnes d’Henri V et d’Henri VI ont été complètement catalogués dans les Reports of the Deputy Keeper ( Appendix to 44th Report of the Deputy Keeper of the Public Records [désormais R.D.K. 44th], 1883, p. 543-638 ; Appendix to 48th Report of the Deputy Keeper of the Public Records [désormais R.D.K. 48th], 1887, p. 217-450).
-
[78]
Le fait qu’aucun des prisonniers mentionnés dans les obligations n’apparaisse dans les sauf-conduits est un premier indice en faveur de notre hypothèse. Cet argument n’est toutefois pas infaillible, car les mesures prises par Henri V, le 20 mai 1416, suggèrent que certains captifs détenus en Angleterre avaient quitté le pays illégalement. Henri ordonna alors au shérif de Londres de proclamer qu’aucun homme, de quel qu’état, degré ou condition qu’il soit, sous peine de forfaiture, ne délivre ou n’autorise le départ de prisonniers français sans son consentement. Calendar of Close Rolls 1413-1419, p. 355.
-
[79]
Une liste des prisonniers d’Azincourt sur base des sauf-conduits émis entre 1415 et 1430 est dressée dans N.H. Nicolas, History of the battle of Agincourt (op. cit., n. 35), Appendix, p. 61-63. Il ne fait aucun doute toutefois qu’une large proportion des prisonniers mentionnés n’a pas été capturée à Azincourt, mais peut-être à Verneuil (1424) ou Patay (1429) ou au cours d’un des innombrables combats livrés entre ces deux dates.
-
[80]
J. H. Wylie, The reign of Henry V ( op. cit., n. 16), II, p. 357 et 358.
-
[81]
Le premier Génois qui reçut un sauf-conduit après la bataille de la Seine est un certain Jurdan Bartholomée, prisonnier de Robert Wyfold. Le document fut émis le 24 novembre 1416. Il autorisait le Génois à quitter l’Angleterre pour se rendre au port de l’Écluse en Flandre. R.D.K. 44th ( op. cit.,. — (suite) n. 77), p. 585. De nombreux autres suivent dans le courant de l’année 1417. Voir les sauf-conduits délivrés à Francis Gentille, Édouard Sipion, Paul Lumbard, Thomas Testegros. Ibid., p. 586-597 ; voir aussi J. H. Wylie, The reign of Henry V ( op. cit., n. 16), II, p. 364 n. 3.
-
[82]
Certains prisonniers mentionnés dans des documents sortant de ce cadre chronologique ont peut-être été capturés à Azincourt. Nous avons inclus par exemple le sauf conduit accordé le 12 décembre 1416 à Guillaume de Gamaches parce que d’autres sources confirment sa capture à Azincourt. Sa rançon fut évaluée à 4 000 écus. R. A. Newhall, The English conquest of Normandy (1416-1424), Yale, 1924, p. 157 n. 5. Nous avons également inclus le sauf-conduit délivré le 14 avril 1417 à Baudouin de Noyelle, un chevalier artésien, dont la capture sur le champ de bataille est attestée dans E. De Monstrelet, Chronique ( op. cit., n. 41), III, p. 115.
-
[83]
Ghillebert de Lannoy, titulaire d’un tel sauf-conduit émis le 6 décembre 1415 (TNA, C 76/98, m. 6), fut emmené en Angleterre par son maître John Cornwall.
-
[84]
TNA C 76/98, m. 1, 3, 5, 6 ; 76/99, m. 32, 33.
-
[85]
TNA, C76/98, m. 3.
-
[86]
R. C. Famiglietti, Royal Intrigue. Crisis at the Court of Charles VI, 1392-1420, New York, 1986, p. 298 n. 84.
-
[87]
Si possible, le prisonnier nommait un plège avant sa remise en liberté sur parole qui jouait le rôle de caution. Au cas où le prisonnier ne remplissait pas ses engagements, le maître se retournait contre le plège. M. Keen, The Laws of War ( op. cit., n. 59), p. 167-170.
-
[88]
TNA C 76/98, m. 5,6.
-
[89]
TNA C 76/98, m. 1, 3 à 5.
-
[90]
TNA C 76/98, m. 1 ; 76/99, m. 23 à 25, 31 à 33.
-
[91]
TNA, C 76/99, m. 8 ; R.D.K. 44th( op. cit., n. 77), p. 590. Nous ignorons la date de départ pour quatre prisonniers détenus en Angleterre qui ne bénéficièrent que de sauf-conduits pour se rendre auprès du roi.
-
[92]
TNA, C 76/98, m. 1, 3 ; 76/99, m. 33, 25.
-
[93]
Nous notons deux exceptions. Thomas de Larzis reçut un sauf-conduit le 25 novembre 1415 et un autre le 3 juillet 1416. TNA, C 76/98, m. 7 ; 76/99, m. 23. Charles des Essarts réapparut deux fois en Angleterre après une courte période en France. Il reçut un sauf-conduit le 8 février 1416, un autre le 4 juillet de la même année et finalement un troisième le 26 février 1417. TNA C 76/98, m. 3 ; 76/99, m. 23 ; R.D.K. 44th ( op. cit., n. 77), p. 587.
-
[94]
La même observation est faite à propos des prisonniers de Poitiers dans F. Bériac-Lainé, C. Given-Wilson, Les prisonniers de la bataille de Poitiers ( op. cit., n. 10), p. 124.
-
[95]
…et exinde in regnum regis Angliae seu ad villam regis Cales reveniendo ibidem morando et perhendinando et exinde ad propria redeundo ac bona res et hernesia sua quecumque. TNA, C 76/98, m. 3.
-
[96]
Nous pensons qu’une étude systématique de l’importante série des Treaty Rolls dans lesquels les sauf-conduits apparaissent devrait permettre de répondre aux nombreuses questions soulevées. Une pareille entreprise dépasse toutefois largement le cadre de notre enquête sur les prisonniers d’Azincourt.
-
[97]
C’est également ce qui est suggéré dans A. Curry, Agincourt ( op. cit., n. 2), p. 244.
-
[98]
Le contrat de William Lynde et John Johnsone fut daté et signé à Calais le premier juin 1416. TNA E 101/48/2, no. 21.
-
[99]
A. Curry, Agincourt ( op. cit., n. 2), p. 238.
-
[100]
TNA, E 101/48/2, no. 40.
-
[101]
Il faut toutefois souligner que le cas d’un chevalier français, Mathieu de Cayeu, met cette hypothèse en question. Mathieu de Cayeu, aussi connu sous le nom de Payen de Cayeu, combattit à Azincourt aux côtés de son frère, Jean de Cayeu, dit le Bègue. J. De Vismes, « Essai généalogique sur les premiers sires de Cayeu », Bulletin de la Société d’émulation d’Abbeville, 1934, p. 393-442. E. de Monstrelet ( Chronique, ( op. cit., n. 41), III, p. 114) rapporta la mort des deux frères sur le champ de bataille, ce qui était peut-être vrai pour l’aîné, ne l’était pas en revanche pour son benjamin. Mathieu de Cayeu fut relâché avant le 13 novembre 1415, date à laquelle il fut accueilli à Boulogne-sur-Mer à son retour de la prison des Englés. E. Dupont (éd.), Registre des recettes et dépenses de la ville de Boulogne-sur-Mer, 1415-1416, Boulogne-sur-Mer, 1882, p. 108 et 109. Son nom apparaît dans l’obligation de Robert of Willoughby, lord of Eresby, contractée sept mois et demi plus tard. TNA, E 101/48/2 no. 45. Comment expliquer ce curieux cours des événements ? Pourquoi Cayeu fut-il libéré juste après la bataille et reparut dans un contrat d’obligation, qui marque à notre sens la date de mise en liberté des prisonniers, que sept mois et demi plus tard ? On peut imaginer qu’à l’instar des prisonniers du siège de Harfleur, Cayeu fut peut-être libéré dans un premier temps en raison de son état de santé, promettant de se rendre plus tard à Calais où son maître l’attendrait. Ainsi, Monstrelet reçut-il peut-être prématurément la nouvelle de sa mort ? Le malheureux était peut-être gravement blessé, mais n’avait pas encore rendu son dernier souffle.
-
[102]
Un contrat n’a pu être pris en compte car sa date est illisible : TNA, E 101/48/2, no. 51.
-
[103]
TNA, E 101/48/2, no. 41 et 42.
-
[104]
TNA, E 101/48/2, no. 12, 39, 46, 47, 49, 50, 67 ; 101/45/12 ; 101/46/4.
-
[105]
TNA, E 101/48/2, no. 41 et 42.
-
[106]
TNA, E 101/48/2, no. 31 et 32.
-
[107]
TNA, E 101/48/2, no. 6 et 7.
-
[108]
Les sommes en écus incluses dans les trois obligations des trois chevaliers William Trussel (TNA, E 101/45/12), John Grey (TNA, E 101/48/2, no. 31et 32) et Richard Tempest (TNA, E 101/48/2, no. 6 et 7) demeurent un mystère. Les montants apparaissent à côté du nom des prisonniers. Dans l’obligation de Grey, la somme totale s’élève à 1 254 écus (Jean de Craon, 404 écus ; Pierre de La Viesville, 300 écus ; Hémont de Vendricort, 200 écus ; Fransoy Dubuschet, 100 écus ;— (suite) Louis Debet, 120 écus ; Pierre de Bonent, 40 écus ; Glande de Duyson, 120 écus ; Colin, Basin et Macy de la Conche, 60 écus), les droits royaux montant à £163 (ou approximativement 978 écus). Dans le document de Trussel, la somme totale s’élève à 524 écus (Guillaume Torsy, 104 écus ; Roger de Cantepré, 100 écus ; Jean Warner, 50 écus ; Jean May, 100 écus ; Colard Rettorey, 40 écus ; Guillaume de Fernoy, 100 écus ; Guillaume de Cortys, 40 écus ; Jean Cavus, 40 écus ; Rouland de Lapeype, 40 écus) et 40£ (ou 240 écus) pour les droits royaux. Dans le contrat de Tempest enfin, la somme monte à 280 écus pour les trois prisonniers et 15£ (90 écus) pour les droits royaux. Pour la conversion en écus, voir P. Spufford, Handbook of medieval exchange (1986), p. 179, 193, 201.) À quoi correspondaient ces sommes d’argent ? On remarque qu’elles ne sont pas proportionnelles au montant des droits royaux. S’agissait-il d’un premier versement qui avait eu lieu pendant leur captivité ? Le cas échéant, il est assez curieux de trouver cette information dans l’obligation.
-
[109]
R. C. Famiglietti, Royal Intrigue ( op. cit., n. 86), p. 298 n. 84.
-
[110]
Le 7 décembre 1418, il reçut 500 lt du roi pour l’aider à payer sa rançon. B.-A. Poquet De Haut-Jussé, La France gouvernée par Jean sans Peur. Les dépenses du receveur général du royaume, Paris, 1959, p. 130, no. 291.
-
[111]
Ibid., p. 239, no. 871.
-
[112]
Le 18 août 1418, il reçut du roi 2,000 lt pour payer sa rançon aux Anglais. Ibid., p. 106 no. 193.
-
[113]
R. De Belleval, Azincourt, Paris, 1865, p. 280 ; A. Demurger, « Guerre civile et changements du personnel administratif » ( op. cit., n. 64), p. 256 et 257.
-
[114]
Nicolas De Baye, Journal, A. Tuetey (éd.), 2 vol., Paris, 1885-1888, II, p. 230 ; A. Demurger, « Guerre civile et changements du personnel administratif » ( op. cit., n. 64), p. 178 et 179.
-
[115]
T. Rymer (éd.), Foedera ( op. cit., n. 17), IX, p. 360.
-
[116]
Voir n. 79.
-
[117]
G. De Lannoy, Œuvres ( op. cit., n. 62), p. 50.
-
[118]
TNA, E 101/48/2, n. 64.
-
[119]
F. Bériac-Lainé, C. Given-Wilson, Les prisonniers de la bataille de Poitiers ( op. cit., n. 10), p. 289.
-
[120]
H. Bonet, L’Arbre des Batailles, E. Nys (éd.), Paris, 1883, p. 138 ; cité dans P. Contamine, « Rançons et butins dans la Normandie anglaise » ( op. cit., n. 18), p. 242.
-
[121]
M. Keen, The Laws of War ( op. cit., n. 58), p. 169. Deux exemples ont été relevés d’une pratique appellée ‘les marz’ qui fixait le montant des dépenses de captivité au cinquième de la rançon du prisonnier. C.A.J. Armstrong, « Sir John Falstof and the law of arms », dans C.T. Allmand (éd.), War, Literature and Politics in the Late Middle Ages, Liverpool, 1976, p. 46-56 (cf. p. 47-48) ; C. Given-Wilson, « The ransom of Olivier du Guesclin », Bulletin of the Inst. of Hist. Res., 44 (1981), p. 17-28 (cf. p. 27). Les exemples de Guillaume de Châteauvillain et de Robert, lord Moleyn montrent cependant que le montant des dépenses pouvait largement dépasser cette proportion. La rançon de Châteauvillain s’élevait à 22 000 saluts d’or au départ. Leurs maîtres en exigèrent 32 000 au terme de sa longue captivité de trois ans. En ce qui concerne Robert Moleyn, ses dépenses furent évaluées à £3 870, ce qui représentait 64,5 % du montant de sa rançon, à savoir £6 000. A. Bossuat, « Les prisonniers de guerre auxve siècle : la rançon de Guillaume de Chateauvillain », Annales de Bourgogne, 23 (1951), p. 7-35 (cf. p. 23) ; M. K. Jones, « Ransom brokerage » ( op. cit., n. 3), p. 224.
-
[122]
Par exemple, les cas de Chateauvillain et Rodemack, voir A. Bossuat, « Les prisonniers de guerre auxve siècle : la rançon de Jean, seigneur de Rodemack », Annales de l’Est, 5e série, 2 (1951), p. 145-62 ; et celui du comte de Denia, A. Rogers, « Hoton versus Shakell : a ransom case in — (suite) the Court of Chivalry, 1390-1395 », Nottingham Medieval Studies, 6 (1962), p. 74-108 ; 7 (1963), p. 53-78.
-
[123]
A. Curry, Agincourt ( op. cit., n. 2), p. 239.
-
[124]
M. K. Jones, « Ransom brokerage » ( op. cit., n. 3), p. 223. La très grande rançon de Guyot Pestel, par exemple, évaluée à 5,000 l.t., fut probablement fixée sur base de ses hautes fonctions comme officier de la couronne. Il était chambellan du roi, bailli des Montagnes d’Auvergne entre 1413 et 1415, et ensuite sénéchal de Beaucaire en 1415 et 1416. Sa capture à Azincourt lui fit cependant perdre son office en mars 1416. NICOLAS DE BAYE, Journal ( op. cit., n. 109), II, p. 243-246 ; A. Demurger, « Guerre civile et changements du personnel administratif » ( op. cit., n. 64), p. 284 et 285.
-
[125]
M. Keen, The Laws of War ( op. cit., n. 58), p. 158 et 159.
-
[126]
TNA, E 101/48/2 no. 4, 8, 21, 35, 52, 65, 71 ; E 210/2834, 2837.
-
[127]
TNA, E 101/48/2 no. 29, 38, 43, 50 (44s 5d o), 57, 63 (44s 5d o).
-
[128]
TNA, E 101/48/2 no. 14 (22s 2d o q), 18, 27, 33 (22s 2d 1 o q), 73 ; E 210/2829.
-
[129]
Une pratique similaire est attestée plus tard en 1449 dans le cadre de la reddition de la garnison de Pont-Audemer. Jean, comte de Dunois, lieutenant de Charles VII, fixa lui-même le montant des rançons des prisonniers anglais. Un capitaine fut évalué à 2 000 écus, chaque homme d’armes à 30 écus et chaque archer à 12 écus. P. Contamine, « Un contrôle étatique croissant » ( op. cit., n. 4), p. 222.
-
[130]
Quelques exemples sont fournis à la note 95. En voici d’autres, Guillaume de Châteauvillan fut emprisonné un peu moins d’un an. A. Bossuat, « Guillaume de Chateauvilain » ( op. cit., n. 116), p. 12. Jean Bourchier fut détenu cinq ans en captivité. M. Jones, « Fortunes et malheurs de guerre. Autour de la rançon du chevalier anglais Jean Bourchier (†1400) », dans La guerre, la violence et les gens au Moyen Âge, P. Contamine, O. Guyotjeannin (éd.), 2 vol., Paris, 1996, I, p. 189-208 (cf. p. 194). Les prisonniers écossais mentionnés par A. King (« “According to the custom used in French and Scottish wars” : Prisoners and casualties on the Scottish Marches in the fourteenth century », Journal of Medieval History, 28 (2002), p. 263-290 (cf. p. 276-277)) qui, selon l’auteur, connurent une période de captivité remarquablement courte, furent quand même détenus durant un peu moins d’un an.
-
[131]
F. Bériac-Lainé, C. Given-Wilson, Les prisonniers de la bataille de Poitiers ( op. cit., n. 10), p. 282.
-
[132]
Ibid., p. 48.
-
[133]
Ibid., p. 95-96.
-
[134]
Ibid., p. 195. Les rançons étaient particulièrement élevées à la fin des années 1360 et vers le début des années 1370, un phénomène qui se reproduit dans la période 1415-1435. En ce qui concerne Poitiers, comtes et évêques valaient entre 2 000£ et 8 000£, les barons, entre 500£ et 2 000£, chevaliers et écuyers entre 50£ et 500£ et enfin les valets et autres genres de serviteurs, au plus, 50£. F. Bériac-Lainé, C. Given-Wilson, Les prisonniers de la bataille de Poitiers ( op. cit., n. 10), p. 190-192. Quant à Azincourt, il n’a pas été possible d’établir une échelle de valeur aussi complète. On remarque toutefois que les chevaliers valaient entre 56£ et 666£ et la rançon de 58 prisonniers sur 129 mentionnés dans les obligations était inférieure à 50£.
1La mise à rançon des prisonniers était une pratique commune pendant la guerre de Cent Ans [1]. La bataille d’Azincourt ne fit pas exception : nombreux furent les prisonniers capturés au cœur même de l’action [2] ; les gens de guerre anglais n’avaient en effet aucune raison de se priver d’une bonne et légitime occasion de s’enrichir grâce à leurs rançons [3], sauf bien sûr s’ils en recevaient l’ordre du commandant [4]. Ainsi, périrent à Azincourt de nombreux prisonniers dont Henri V avait ordonné l’exécution. Cet épisode sanglant de la bataille est bien connu. La version communément admise par les historiens souligne l’urgence de la situation à laquelle le roi d’Angleterre dut faire face [5]. En quelques mots, les Anglais croyant avoir défait le contingent français, commencèrent à faire des prisonniers. Peu après, l’arrière-garde française se rassembla et menaça de reprendre l’assaut. Au même instant, Henri V aurait pris connaissance d’une attaque portée sur son camp. Craignant d’être pris en tenaille et surpassé en nombre, le souverain anglais ordonna de tuer les prisonniers. Les circonstances du massacre qui s’en suivit soulèvent un certain nombre de questions qu’historiens et militaires ont déjà étudiées attentivement sans qu’une réponse claire et définitive n’ait pu être apportée [6]. Pour le moins, cette tuerie aurait dissuadé les Français de poursuivre les hostilités. Maître du terrain, les Anglais se remirent en quête de prisonniers : ils capturèrent les blessés qui gisaient parmi les morts vers la fin de l’après-midi du 25 octobre ainsi que le lendemain selon certains chroniqueurs [7].
2Combien de Français furent capturés ? Les estimations avancées par les chroniqueurs français varient entre 1 400 et 2 200 prisonniers [8]. Ces chiffres sont réduits de plus de moitié par leurs homologues anglais qui n’ont estimé qu’à 700 ou 800 le nombre des survivants [9]. L’écart important qui sépare ces deux ensembles de valeurs pourrait s’expliquer par le fait que les estimations anglaises ne concernent que les prisonniers détenus en Angleterre [10]. L’idée est séduisante, mais elle ne semble pas trouver de fondement dans le texte des deux chroniqueurs anglais qui prétendent bien fournir le nombre total des prisonniers faits par les Anglais [11]. Comme il n’y a pas de raison majeure de privilégier le témoignage de l’une des sources au détriment de l’autre (qu’elle soit anglaise ou française), on est forcé de retenir une large fourchette de 700 à 2 200 prisonniers français capturés à la bataille d’Azincourt [12].
3Un large éventail de sources narratives, comptables et administratives, nous a permis de dresser une liste de quelque 250 prisonniers [13], dont nous proposons maintenant d’examiner le sort qui leur fut réservé. Cette enquête ne portera pas sur la captivité des six otages politiques détenus par Henri V : Charles, duc d’Orléans, Jean de Clermont, duc de Bourbon, Charles d’Artois, comte d’Eu, Arthur de Bretagne, comte de Richemont, Louis de Bourbon, comte de Vendôme et Jean II le Meingre, dit Boucicaut, maréchal de France, dont certains ont déjà fait l’objet d’études particulières et dont les autres en mériteraient probablement autant [14]. La pièce maîtresse de notre documentation, un dossier de 80 contrats d’obligation, nous invite plutôt à un examen détaillé du sort des prisonniers communs, la plupart sans envergure politique, parfois même sans grande valeur financière ; en un mot, la masse des captifs dont les maîtres cherchaient avant tout à tirer un profit immédiat. La présentation et la mise en contexte de ce dossier d’obligations, dont la survie, comme nous le verrons, est tout à fait exceptionnelle, feront l’objet de la première partie. Les deux parties suivantes porteront sur leur captivité : leur transfert dans le cadre de ce qui prend l’apparence d’un véritable marché des prisonniers (deuxième partie) et le processus de leur mise à rançon (troisième partie). Nous tenterons enfin, dans le cadre des considérations finales, de replacer le sort des prisonniers d’Azincourt dans le contexte de la guerre de Cent Ans.
Les contrats d’obligation : présentation et mise en contexte
4La pièce maîtresse de notre corpus de documents est un dossier intitulé Bonds as to the ransoms of prisoners qui est conservé aux National Archives à Londres [15]. On ne lui a pas prêté jusqu’ici toute l’attention qu’il mérite [16]. Il se compose de 72 contrats ou obligations sur parchemin passés par différents maîtres de prisonniers avec le roi d’Angleterre entre le 9 décembre 1415 et le 1er octobre 1416, par lesquels les premiers étaient tenus de payer à une date fixe au second les droits royaux sur la rançon de prisonniers français. Les documents sont scellés. Leur contenu est divisé en deux parties. Dans la première, le ou les maîtres promettent de s’acquitter de ces droits royaux dont le montant est spécifié. La date d’entrée de l’obligation ainsi que la date à laquelle ces droits devaient être payés y sont également incluses. Le nom du ou des prisonniers apparaît dans la seconde partie. Il y est aussi précisé qu’une lettre délivrant le ou les maîtres de leur obligation leur serait fournie par le trésorier de Calais une fois qu’ils se seraient acquittés de leur dette. Dans la majorité des cas (49 obligations), le texte n’occupe qu’une seule face du parchemin. Il n’est pas rare toutefois (25 obligations) que le texte soit réparti sur les deux faces du document. Dans cinq cas seulement, les noms des prisonniers sont inclus dans une cédule attachée à l’acte. Une couleur d’encre différente et des espaces mal calculés à l’emplacement des informations clés – noms, montants et dates – nous laissent penser que ces contrats, écrits à l’avance, se présentaient comme des formulaires dont les maîtres n’avaient plus qu’à remplir les blancs. Il y a toutefois des exceptions. Certaines obligations passées par des maîtres dont le statut était plus élevé furent entièrement rédigées par la même main, généralement très soigneuse.
5Ces 72 obligations relèvent sans aucun doute du droit du tiers ou tiers du tiers que le roi d’Angleterre prélevait sur chaque rançon de prisonniers capturés par ses sujets, ainsi qu’il était stipulé dans leurs contrats d’engagement ou endentures de guerre [17]. Ce droit est bien connu ; il a fait l’objet de nombreuses études notamment à travers ces endentures et les contrôles de comptes de garnisons anglaises stationnées en Normandie [18]. D. Hay a observé que, vers la fin du xive siècle, cette quote-part royale était directement déduite des gages des soldats dans certains comptes [19]. Cette pratique faisait partie des usages dans les années 1420-1440 ainsi que le montrent les contrôles de garnisons anglaises et les comptes de différentes compagnies en expédition sur le sol français à cette période [20]. Le capitaine rendait son compte en mentionnant le montant des gains de guerre (prisonniers et mortbutin) et la portion du roi sur ces gains était directement déduite des gages à payer pour la période de ce compte. Toutefois, il va de soi que nos 72 obligations qui fixaient une date de paiement de la portion réservée au roi n’auraient pas eu de raison d’être si cette pratique était généralisée en 1415.
6Leur conservation paraît être tout à fait exceptionnelle. Nous avons seulement rencontré huit autres obligations similaires aux National Archives à Londres [21]. Ces dernières datent de la même époque et il se peut même qu’elles avaient été initialement regroupées avec les 72 précédentes et ce pour la raison suivante : telles qu’elles se présentent actuellement, les 72 obligations sont reliées dans une pochette en carton. Une note insérée dans le dossier qui fut rédigée le 13 août 1979 indique que les 25 derniers documents du dossier proviennent de Miscellanea non triés. Les huit autres obligations sont conservées séparément dans des enveloppes. Mais toutes sont percées d’un ou deux petits trous par lesquels devaient en fait passer autrefois un ou deux cordons qui les reliaient entre elles. Ces obligations en attente de paiement étaient probablement entre les mains du trésorier de Calais. Un article des Foreign Accounts de l’année 1425-1426 montre en effet que ce dernier avait reçu la charge de conserver 114 obligations similaires relatives à des prisonniers d’Azincourt et d’en recevoir le paiement ; ce qui, par ailleurs, n’était apparemment pas une tâche aisée [22]. Ces 114 obligations dont le montant s’élevait en tout à 686 £ 11s 6d devaient être converties au paiement des gages et « regards » des gens de guerre de la garnison de Calais. Aucune d’entre elles n’avait cependant été payée et le trésorier de Calais, Richard Bokeland, avait reçu l’ordre de les remettre entre les mains du trésorier d’Angleterre, John Stafford, évêque de Bath [23].
7D’autres documents révèlent les difficultés rencontrées par la couronne pour percevoir l’argent que lui devaient les maîtres d’Azincourt. Le 4 octobre 1434, un dossier de 96 obligations relatives aux rançons des prisonniers d’Azincourt fut transmis par John Poutrell, teller of the Receipt, à Thomas Leuesham, king’s Remembrancer, tous deux des officiers de l’Échiquier [24]. Le premier recevait les paiements faits à la chambre des comptes, tandis que le second était principalement responsable du recouvrement des dettes contractées envers le roi [25]. La transmission de ces 96 obligations suggère donc que leur paiement n’avait pas encore été effectué près de 20 ans après la bataille. Cet intérêt si tardif de l’Échiquier pour le recouvrement de ces dettes faisait probablement suite à l’enquête menée sur les revenus du roi par Ralph, Lord Cromwell, en 1433 [26].
8Qu’en est-il de nos 80 obligations conservées dans les archives de l’Échiquier ? Doit-on les compter parmi les impayées ? Une mention portée au dos de trois obligations permet d’apporter des éléments de réponse. Il est indiqué au dos de l’obligation de Thomas Wenlock et William Ludsor, maîtres d’un prisonnier nommé Simon Criquebees, qu’elle fut enregistrée à l’Échiquier dans les Memoranda Rolls du terme de la Sainte-Trinité 1435 (12 juin) dans le cadre d’une action légale (processus) touchant John Wenlock, frère et héritier de Thomas Wenlock [27]. Les deux autres obligations, tenues par Sir William Phelip et Sir Henry Husee, furent enregistrées dans les mêmes Memoranda Rolls pour des raisons identiques à des dates plus tardives encore : l’une à Pâques de 1438 (13 avril) et l’autre à la Saint-Michel (29 septembre) de la même année [28]. Si l’on accepte que l’action intentée contre ces trois débiteurs concernait en fait leur défaut de paiement – ce qui est très vraisemblable, ces témoignages établissent un lien entre le dépôt des obligations à l’Échiquier et leur non-paiement. Ainsi, on peut considérer que nos 80 obligations, conservées à l’Échiquier, étaient en fait des impayés qui donnèrent lieu à une action judiciaire ; ce serait là, la raison pour laquelle elles ont survécu.
9C’est peut-être la persistance de ce genre de difficultés rencontrées par la couronne qui incita celle-ci à déduire directement des gages de ses gens de guerre son droit sur les rançons de prisonniers. Il n’est pas improbable d’ailleurs qu’Azincourt ait joué un rôle décisif dans la généralisation de cette mesure. En 1423, Henri VI promulgua un statut, à la requête des capitaines qui avaient combattu à Azincourt, établissant que le droit du tiers et tiers du tiers sur tous les gains de guerre appartenant au roi au jour de sa mort soient déduit et rabattu sur les sommes qui leur étaient dues pour leurs gages [29]. Ce n’est donc, semble-t-il, qu’à la requête des capitaines que les droits royaux furent déduits des gages. Ceci confirme donc qu’en 1415 cette mesure ne faisait pas encore partie intégrante des usages. En même temps ce statut d’Henri VI montre que la couronne n’était pas meilleure payeuse que les maîtres des prisonniers, qui, dès lors, refusaient peut-être de payer les droits royaux en signe de protestation.
10On observe toutefois, dans un rouleau de comptes rédigé après 1422 et établi sur base des comptes rendus par 59 capitaines après la campagne, que les droits royaux sur la rançon de prisonniers furent aussi déduits des gages de certains combattants d’Azincourt [30]. La proportion des prisonniers capturés est ici relativement petite : seulement dix entrées parmi les 59 incluent des rançons de prisonniers. Quel crédit doit-on accorder à ce rouleau de comptes dressé au moins sept ans après la campagne ? La conservation de nombreux comptes particuliers de capitaines de retenue rendus à l’Échiquier juste après la bataille a permis à Anne Curry de constater que les informations incluses dans ces comptes particuliers sont fidèlement reproduites dans le rouleau, ce qui prouve par ailleurs que la situation comptable était restée inchangée sept ans après Azincourt [31]. En revanche, ces données ne correspondent pas du tout à celles contenues dans les obligations. Il est mentionné, par exemple, dans le compte particulier de Sir William Phelip, rendu à l’Échiquier juste après la campagne, qu’il devait au roi 7£ 5s 8d pour la rançon de prisonniers capturés par des hommes d’armes de sa retenue [32]. Cette information est confirmée dans le rouleau de comptes [33]. Dans une obligation scellée le 25 avril 1416, le chevalier anglais reconnaît pourtant devoir au roi 17£ 15s 2d o q [34]. Trois autres exemples : Sir Henry Husee, Sir William Trussel et l’écuyer John Pympe devaient au roi respectivement 132£, 40£ et 44£ (en tout 216£) selon leurs obligations passées en 1416 [35]. Les trois hommes combattirent dans la retenue de Humphrey, duc de Gloucester [36]. Toutefois, le montant de la portion royale due par la compagnie de Gloucester dans le rouleau de compte ne s’élève qu’à 19£ 11s 4d [37] ; c’est d’autant plus surprenant que l’on sait que le duc commandait la seconde plus grande retenue, composée de 200 hommes d’armes et de 600 archers [38]. Doit-on en conclure que deux pratiques ont coexisté au temps d’Azincourt ? L’une, bien connue, consistait à déduire des gages des gens de guerre la portion royale sur les rançons de leurs prisonniers ; l’autre, à passer un contrat d’obligation avec la couronne fixant une date de payement de ces droits royaux.
Un marché des prisonniers ? [39]
11Selon l’auteur de la Vita Henrici Quinti, Henri V ordonna à la fin du combat de dresser une liste de tous les noms des prisonniers d’Azincourt [40]. Un tel document aurait survécu, nous connaîtrions sans doute aussi les noms de leurs maîtres [41]. La disparition de cette source laisse cependant un vide que l’on doit combler par des spéculations. Comme tous les combattants anglais, gens de traits et gens d’armes confondus, participèrent à la mêlée, ainsi qu’en témoigne le chroniqueur Enguerrand de Monstrelet [42], les archers dont la présence sur le champ de bataille était très largement majoritaire – il y avait au moins, selon les estimations d’A. Curry, 7 139 archers pour 1593 hommes d’armes [43], c’est-à-dire un homme d’armes pour (plus de) quatre archers – devaient aussi être les principaux auteurs des captures. Cependant, au moment de passer contrat avec les représentants de la Couronne, la donne avait considérablement changé comme le montre notre échantillon de 80 obligations.
La répartition des prisonniers dans les obligations
12Les informations contenues dans chacun de ces documents permettent en effet de mettre en lumière la répartition des prisonniers parmi trois différentes catégories de maîtres : chevaliers, écuyers et archers. La formation des deux premières catégories ne demande aucun éclaircissement, le statut des chevaliers et écuyers apparaissant clairement dans les obligations. Ce n’est cependant pas le cas pour la troisième catégorie. Nul maître n’est en effet qualifié d’archer. De surcroît, les documents précisent que, dans une forte proportion, les maîtres dont nous ne connaissons pas le statut résidaient en la ville de Calais. Nous avons considéré qu’en l’absence d’indication de statut, le maître devait appartenir aux plus humbles : archers (ou valets) [44]. Les maîtres de Calais, quant à eux, peut-être même des non-combattants, ne furent pas, bien entendu, les auteurs de la capture de leurs prisonniers. Ils les acquirent des combattants d’Azincourt. Ce transfert de captifs, dont nous éclairerons les circonstances plus tard, s’opéra vraisemblablement au bas de la hiérarchie, d’archers à archers ou d’archers à marchands de Calais. Pour clarifier notre propos, nous avons formé une catégorie unique à partir de l’ensemble de ces maîtres dont les prisonniers furent originellement capturés par des archers d’Azincourt. La forte homogénéité de cette catégorie nous affermit dans ce choix.
13Quatre facteurs concernant ces trois catégories de maîtres ont été considérés : leur nombre, la somme totale des droits royaux (qui était proportionnelle au montant de la rançon [45]), le nombre des prisonniers pour lequel cette somme est due, et le nombre des obligations dans lesquelles toutes ces informations sont contenues.
La répartition des prisonniers et des rançons dans les contrats d’obligation
La répartition des prisonniers et des rançons dans les contrats d’obligation
14Les obligations contractées par les chevaliers représentent plus de la moitié des sommes dues au roi (527£/929£). Les chevaliers détiennent aussi plus du tiers des prisonniers (48/130), alors qu’ils ne sont que 10 sur 114 maîtres. En pourcentages, cela revient à dire que 9 % des maîtres ont entre leurs mains 37 % des prisonniers et 57 % de la somme totale des rançons. De toute évidence, les quelques chevaliers ont accaparés la part la plus large du butin ; et ce spécialement au détriment des archers. Ces derniers, aux nombres de 92, soit 81 % de l’ensemble des maîtres, possèdent certes un peu plus de la moitié des prisonniers (71/130), mais le montant des rançons de ces prisonniers n’équivaut qu’à 27 % du total. Dès lors, non seulement près d’un tiers des archers partagent la possession d’un seul prisonnier (71 prisonniers pour 92 archers [46]), mais de plus la rançon de ce prisonnier ne vaut, en moyenne, que le tiers de celle du prisonnier entre les mains des chevaliers (3,5£ de droits royaux contre 11£).
15La somme totale des droits royaux à payer par les écuyers est la moins élevée. Mais comme cette catégorie ne comporte que 12 individus, la somme moyenne due par chaque écuyer est bien plus élevée que celle des archers : 12,5£ pour les premiers contre seulement 2,7£ pour les seconds. À la clé, il y avait donc près de cinq fois plus de profits pour les écuyers que pour les archers. Les écuyers étaient aussi en possession du plus petit nombre de prisonniers, si bien que la valeur moyenne de ces derniers (15£) est même plus élevée que celle des captifs entre les mains des chevaliers (11£). Qui plus est, les deux captifs qui, semble-t-il, étaient les plus lucratifs : deux chevaliers, Lionel de Rybeburg et Charles de Longueval, étaient détenus par deux écuyers et un archer [47].
16Il faut toutefois se garder de tirer des observations précédentes des conclusions hâtives, étant donné que nous ne sommes pas en mesure de déterminer les droits royaux pesant sur les prisonniers des chevaliers pris individuellement. En effet, la plupart des contrats d’obligation scellés par les chevaliers incluent plusieurs prisonniers, mais la somme due au roi est, quant à elle, globale. Il ne fait cependant aucun doute que certains prisonniers avaient plus de valeur que d’autres. Par exemple, parmi les huit prisonniers entre les mains de Sir Henry Fitzhugh, apparaissent Jean Garin et son serviteur ; la rançon du second ne devait bien entendu s’élever qu’à une petite fraction de celle du premier [48]. Il est donc probable que la rançon de certains prisonniers entre les mains des chevaliers ait été plus élevée que celle de Rybeburg ou Longueval, sachant que la somme moyenne due au roi par les chevaliers équivaut à £52,7, soit quatre fois celle des écuyers (et près de vingt fois celles des archers !). En fait, ce que la valeur moyenne par prisonnier met clairement en évidence, c’est que, contrairement aux archers et aux écuyers, les chevaliers ont tous plusieurs prisonniers entre leurs mains. En moyenne, chaque chevalier détenait 4,8 prisonniers (contre seulement 0,8 pour les écuyers et 0,75 pour les archers).
17Notre échantillon de 80 obligations fait ainsi clairement apparaître une redistribution des prisonniers après la campagne qui, à bien des égards, reflète l’ordre hiérarchique de la société militaire [49]. Il est vrai que les archers, qui furent très probablement les auteurs du plus grand nombre de captures, étaient encore après la bataille le groupe qui détenait le plus grand nombre de prisonniers, bien que ce dernier n’ait plus représenté désormais que la moitié du total des prisonniers, alors que les archers devaient représenter un peu plus de 80 % du contingent anglais. La plus grande perte des archers ne s’observe toutefois pas au niveau de la quantité, mais bien de la qualité des prisonniers dont la valeur des rançons ne représente que 27 % du total. À eux seuls, les chevaliers avaient potentiellement entre leurs mains 57 % de la somme totale des rançons. De toute évidence, un transfert de prisonniers s’opéra depuis le bas de la hiérarchie jusqu’au sommet, mais celui-ci ne toucha pas n’importe quel captif ; ce sont avant tout, les captifs les plus lucratifs qui montaient d’un ou deux échelons sur l’échelle.
Le transfert de prisonniers
18Il y a deux moyens facilement identifiables par lesquels un prisonnier changeait de mains. Le premier est contractuel. Il était en effet spécifié dans chaque contrat d’endenture de guerre que le roi se réservait les plus puissants des prisonniers capturés par ses hommes : tout seigneur de sang royal ou capitaine lui était dévolu [50]. Le roi s’engageait en retour à compenser raisonnablement l’auteur de la capture pour la perte de la rançon. C’est sans aucun doute de cette manière qu’Henri V s’empara des six prisonniers les plus importants faits à Azincourt. Nous en avons la preuve pour quatre d’entre eux (le nom et statut du maître suit le nom du prisonnier entre parenthèses) : Jean, duc de Bourbon (Ralph Fowne, écuyer [51]), Charles d’Artois, comte d’Eu (John Grey, chevalier [52]), Louis de Bourbon, comte de Vendôme (John Cornwall, chevalier [53]), Jean II le Meingre, dit Boucicaut, maréchal de France (William Wolf, écuyer [54]). Les auteurs de la capture de Charles, duc d’Orléans, et d’Arthur de Bretagne, comte de Richemont sont, quant à eux, inconnus. Contrairement à Édouard III après la bataille de Poitiers [55], Henri V ne fut apparemment pas un bon payeur [56].
19On remarquera qu’aucun archer n’apparaît dans les sources comme le maître de l’un de ces prestigieux prisonniers. Étaient-ils contraints de céder les meilleures prises à leur supérieur ? C’est en effet ce que suppose le souscontrat d’endenture passé entre Thomas, comte de Dorset, et John Boteler, un écuyer de sa compagnie, qui répète les termes des endentures royales [57].
20Toutefois la remise d’un prisonnier « royal » à son capitaine n’était pas une règle générale. Les deux écuyers Fowne et Wolf ne semblent pas avoir remis leur captif respectif, le duc de Bourbon et le maréchal Boucicaut, entre les mains de leur capitaine, mais directement entre celles du roi [58]. Le souscontrat d’endenture de Le Boteler soulève encore une autre question. On est en droit de se demander si la réserve du comte de Dorset sur les plus importants captifs ne touchait que ceux que celui-ci devait délivrer au roi ou si cette réserve s’appliquait aussi à des prisonniers que Dorset comptait garder pour lui-même. En d’autres mots, le capitaine faisait-il peser sur ses hommes des droits similaires à ceux du roi ? Cette pratique est communément admise par les historiens [59]. Il faut toutefois noter que l’application de ce droit à un échelon inférieur de la hiérarchie est théoriquement injustifiée, car celui-ci se fondait sur la reconnaissance du caractère public de l’intérêt du roi depuis que la guerre était menée en son nom [60]. C’était donc au nom du Bien Public que les prisonniers les plus importants lui étaient remis. À l’opposé, les capitaines ou tout autre homme de guerre n’œuvraient que dans leur intérêt personnel. Cette remarque n’exclut évidemment pas que les capitaines se soient appropriés ce droit tout en négligeant sa valeur politique.
21Notons cependant que les sources attestant un pareil usage sont rares. En ce qui concerne Azincourt, les quelques transferts de prisonnier dont nous avons conservé la trace étaient monnayés. Apres cette sanglante bataille, rapporte le Religieux de Saint-Denis, le roi d’Angleterre et les nobles de son armée achetèrent aux simples soldats, ainsi qu’aux gens de métiers et de menu peuple, les plus marquants des seigneurs francais, afin de les mettre a rançon et d’en tirer de fortes sommes d’argent [61]. Le récit de la capture de Ghillebert de Lannoy illustre bien ce commentaire [62] :
L’an quatre cens et quinse, fus en la bataille de Rousseauville… Mais, par la grace de Dieu, je me trainay hors du feu a quatre piez, où je fus tant que les Anglès, noz ennemis, revindrent, où de rechief fus prins et vendu a monseigneur de Cornuaille, cuidant que je fusse ung grant maistre, pour ce que, la Dieu mercy, j’estoye assez honnestement en point, quant je fus pris la premiere fois, selon le temps de lors. Sy fus mené a Callais et de la en Angleterre jusques atant que on sceut qui j’estoie, et lors fus mis a finance, de quoy je paiay douse cens ecus d’or et ung cheval de cent francs. Et au partir, mon maistre devantdit seigneur de Cornuaille me donna vingt nobles pour racheter ung harnas.
23Même si nous ignorons la marge de profits que Cornwall tira de cette opération, il est toutefois aisément concevable qu’elle fut lucrative. L’intérêt de Cornwall dans le trafic de prisonniers s’était déjà manifesté une dizaine d’années plus tôt, lorsqu’il acheta un prisonnier normand à Henri IV [63]. À Azincourt, ce seigneur anglais détenait encore, en plus de Vendôme et de Lannoy, un autre chevalier français, Pierre de Hellenvillers, seigneur de Feugerolles et d’Avrilly, bailli d’Évreux au moment de sa capture. Hellenvillers avait aussi occupé des fonctions de chambellan auprès du duc d’Orléans. Cornwall pouvait donc avoir tiré une forte rançon de ce prisonnier [64]. Cent ans après les événements d’Azincourt, l’érudit John Leland rapporta que la reconstruction du château d’Hungerford à Farleigh n’avait été possible que grâce aux rançons de prisonniers d’Azincourt [65]. Nous savons que Sir Walter Hungerford fut le maître de sept prisonniers français [66], mais nous ignorons toutefois comment il les acquit. Des marchands investissaient également leur argent dans le trafic de prisonniers. Colyn Bastard, un prisonnier français, est conjointement détenu par John Pateryk, un valet de Gloucester, et Richard Tropenell, un marchand de Londres [67]. Le célèbre mercier londonien Richard Whittington prit aussi part à ces transactions spéculatives. Il avait acquis un certain Hugues Coniers, prisonnier français capturé à Azincourt qu’il vendit à un marchand italien du nom de Stéphane Turnebois, en 1420, pour 296£ [68]. Nous verrons, un peu plus loin, que de nombreux marchands de Calais investirent également dans ce marché.
24Le fait que seuls les chevaliers mentionnés dans les obligations soient les maîtres de plusieurs prisonniers, avec une moyenne de 4,8 prisonniers par individu, donne lieu à plusieurs interprétations différentes, venant à l’appui ou, au contraire, contredisant l’idée de l’existence d’un marché de prisonniers. Premièrement, on pourrait déduire de cette observation que ces chevaliers, plus riches que les écuyers ou les archers, investirent leur argent sans retenue dans ce qui pourrait définitivement être qualifié de marché « sauvage » de prisonniers. Deuxièmement, on pourrait aussi considérer que dans quelques compagnies, le capitaine achetait automatiquement les prisonniers tenus par ses subordonnés, quelle que soit leur valeur ; raison pour laquelle la valeur moyenne de leurs prisonniers était inférieure à celle des écuyers. Dans ce cas de figure, le marché de prisonniers est réduit au cadre de la retenue. Troisièmement, on pourrait imaginer que certains chevaliers jouaient le rôle de manager des gains de guerre de la retenue. Il n’est pas inconcevable en effet que dans certaines compagnies, le chef, à qui avait été déléguée la responsabilité de la mise à rançon, collectait tous les prisonniers capturés par ses hommes, les mettait à rançon et ensuite redistribuait les gains parmi ses hommes. Une forme d’entreprise collective émerge de cette dernière interprétation qui se substitue au marché de prisonniers [69]. Finalement, il n’est pas interdit de penser que les deux pratiques aient coexisté [70].
25Selon le chroniqueur Jean de Wavrin, les circonstances au lendemain de la bataille jouèrent particulièrement en défaveur des combattants anglais de rang inférieur [71] :
La grosse flotte des gens d’armes et archiers se tyrerent vers Callaix…Quant ces gens d’armes Anglois ainsy traveillies et lassez furent arrivez devant Callaix, ou ilz cuidoient eulz rafreschir, on leur refusa l’entrée quy leur fut tres grant dur, car assez y en avoit quy huyt jours n’avoient gousté de pain, combien que d’autres vivres eussent aulcunement trouvé ; si povez penser que prisonniers, dont la pluspart estoient navrez, avoient eu moult a souffrir, mais chacun esperoit de soy aisier a Callaix, dont ilz faillirent, car on n’y laissa entrer fors aulcuns grans seigneurs… Et par ainsy gens d’armes et archiers, qui estoient comme tous affamez et fort chargies et emblavez de bagues et de prisonniers demourerent dehors, dont ilz furent fort mal contens, si que les pluiseurs pour eulz allegier vendirent leurs bagues et prisonniers auz gens de la ville adfin d’avoir argent comptant et passer l’eaue, car il ne leur challoit mais qu’ilz feussent en Angleterre ; et en assez en y eurent qui misrent leurs prisonniers a une courtoise raenchon si les recreoient sur leurs fois et donnerent ce jour par ladite tanance ce qui valloit dix nobles pour quatre, et ne comptoient rien que pain coustats mais qu’ilz en eussent pour mengier.
27Dans quelle mesure ce témoignage accablant est-il fidèle à la réalité ? Et dans quelle mesure les gens de guerre les plus fortunés tirèrent-ils injustement profit de cette situation ? Les sources disponibles nous permettent à tout le moins de faire deux observations. La première se fonde sur une pétition de Simon Irby et John Craven, deux archers anglais, adressée au roi dans le cadre d’un procès contre un écuyer anglais se nommant William Buckton. Les deux hommes se plaignirent que Buckton a force et a tort ad tolu les ditz prisonners des ditz suppliantz et countre lour gree et assent les ad raunsonés et deliverés sanz satisfaction ent fait au roy de ceo que a luy appartient [72]. Les deux archers font bien entendu référence aux droits royaux sur la rançon des prisonniers. En mettant en exergue le défaut de payement de Buckton, Craven et Irby tentaient de mettre toutes les chances de leurs côtés pour gagner le procès, mais il ne faut pas perdre de vue l’origine du problème, à savoir la spoliation de leurs biens par un supérieur hiérarchique cupide et malhonnête. Comme l’exemple de ce procès est isolé, il serait toutefois imprudent d’en tirer des conclusions générales sur le comportement des combattants anglais.
28La seconde observation repose sur la grande quantité de transferts de prisonniers observables dans notre échantillon de 80 obligations, parmi lesquelles 47 incluent le nom d’un maître de prisonnier demeurant en la ville de Calais. Comme ceux-ci ne participèrent pas au combat, ils durent acheter leurs prisonniers à des combattants d’Azincourt. La quasi-totalité de ces transactions prit place au sein du troisième groupe (les archers) ; elles ne concernent que des prisonniers de peu de valeur [73]. Ainsi, tout porte à croire que des archers d’Azincourt vendirent leurs prisonniers à des hommes de guerre ou marchands de Calais. La question de savoir si ces transactions entre les combattants d’Azincourt et les gens de Calais étaient un symptôme des difficultés rencontrées par les combattants anglais les moins fortunés, ainsi que Wavrin le suggère, demeure. Il est en effet aisément concevable que ces maîtres anglais se contentèrent de plus modestes profits qui avaient l’avantage d’être immédiats ; ceci leur permettant de rentrer en Angleterre.
29On remarquera aussi que quelques obligations furent passées conjointement par un maître de Calais et un combattant présumé d’Azincourt [74]. De pareilles associations supposent que les deux maîtres avaient convenu de se partager les gains. Il apparaît enfin dans l’obligation de John Miston et John Petyt, tous deux de Calais, que ceux-ci n’étaient pas les maîtres du prisonnier pour lequel ils s’étaient engagés à payer des droits royaux s’élevant à 8£ [75]. Le prisonnier, ainsi que le document le précise, appartenait à un certain Richard Sherborne. Les deux Calaisiens jouaient-ils le rôle d’intermédiaire pour un combattant d’Azincourt ? Nous ignorons cependant si Sherborne avait participé à la bataille [76]. Il n’est pas improbable dès lors que Miston et Petyt aient passé cette obligation pour le compte d’un de leurs compères calaisiens.
La mise à rançon des prisonniers
30Il convient maintenant de se concentrer sur le sort des prisonniers : ceux que les maîtres ont laissés derrière eux, à Calais, entre les mains de nouveaux maîtres et les autres qui sont demeurés la propriété de combattants d’Azincourt, les accompagnant ou non en Angleterre. Le fait que certains prisonniers furent conduits en Angleterre est en effet indiscutable. La conservation de sauf-conduits mis à leur disposition pour se déplacer sur l’île ou pour rentrer temporairement chez eux en 1415 et 1416 ne laissent aucun doute à ce sujet [77]. En revanche, l’identification des prisonniers qui n’ont jamais traversé la Manche est moins facile. Ce fut sans aucun doute le cas des prisonniers vendus aux gens de Calais et probablement celui de l’ensemble des 129 prisonniers inclus dans les 80 contrats d’obligation. C’est ce que nous tenterons de démontrer plus tard en mettant en lumière, par la même occasion, les mécanismes et circonstances de leur mise à rançon [78]. Dans un premier temps, nous porterons notre attention sur le sort des prisonniers qui furent emmenés en Angleterre.
Le témoignage des sauf-conduits
31Les sauf-conduits sont des documents malheureusement avares en détails. Comme ils ne fournissent par exemple ni le lieu ni la date de la capture, le danger est d’attribuer à tort leur capture à Azincourt [79]. Il importe donc avant tout de délimiter une période pendant laquelle on peut raisonnablement considérer que les prisonniers mentionnés y ont été effectivement pris. La plus proche confrontation anglo-française qui suit dans le temps la bataille est le combat sur la Seine qui eut lieu vers la mi-août 1416. Une flotte française composée de navires français, génois et bretons assiégeant Harfleur fut défaite par les Anglais [80]. Quelque 400 prisonniers auraient été capturés. Les noms de plusieurs captifs génois apparaissent dans des sauf-conduits délivrés vers la fin 1416 et en 1417 [81]. Nous ne pouvons affirmer avec certitude qu’ils furent pris lors de cette bataille, mais cette hypothèse ne peut être écartée. Par conséquent, nous n’avons pris en compte dans le cadre de cette étude, à deux exceptions près, que les sauf-conduits émis entre novembre 1415 et la miaoût 1416, période pendant laquelle 46 sauf-conduits sont donnés à 39 prisonniers différents [82].
32À tout le moins, chaque document contient les informations suivantes : le nom du ou des prisonniers, celui de leur(s) maître(s), la date d’émission et d’expiration du document et bien entendu son objet : c’est-à-dire autoriser le prisonnier à aller en France (24 sauf-conduits), dans ses états (12), à se rendre auprès d’Henri V (7) ou enfin à venir en Angleterre (1). De nombreux prisonniers mentionnés dans ces documents furent détenus en Angleterre. Ce fut le cas pour 18 d’entre eux qui se trouvaient sur l’île (in regnum regis Angliae) le jour de l’émission de leur sauf-conduit [83]. On peut aussi supposer que l’ensemble des titulaires de sauf-conduits pour la France (qui ne s’y trouvaient donc pas) fut détenu en captivité en Angleterre. En revanche, rien n’est moins sûr en ce qui concerne les prisonniers munis de sauf-conduits les autorisant à se rendre dans leurs états (versus partes suas proprias). Ceux-ci n’avaient peut-être pas quitté le sol français, leurs maîtres les détenant dans une place occupée par les Anglais. Si l’on suit ce raisonnement, parmi les 39 prisonniers apparaissant dans les sauf-conduits, 28 furent emmenés en Angleterre et 11 restèrent sur le continent.
33Tout porte à croire que les prisonniers partaient en France ou dans leurs états dans le but de réunir l’argent de leur rançon. Cette précision n’est donnée que dans neuf sauf-conduits (per redempcione et financia adquirendo) [84]. Il semblerait néanmoins que, même en l’absence de cette indication, les prisonniers consacraient leurs efforts à trouver l’argent de leur rançon. Ainsi, le chevalier français Aubert le Flament, seigneur de Canny, bénéficiaire d’un sauf-conduit pour aller en France (sans autre précision) émis le 8 février 1416, valide pour quatre mois [85], cherchait de l’aide auprès de la ville de Noyon dans le courant du mois d’avril. Celle-ci lui octroya 300 écus le 24 de ce mois [86]. Au moment de l’octroi de ces sauf-conduits, le maître et le prisonnier devaient donc avoir préalablement passé un contrat fixant le montant de la rançon et les modalités de payement ; l’émission du document marquait alors le début de la mise en liberté sur parole du captif pendant laquelle il trouverait l’argent de la rançon et payerait son maître [87]. Trois prisonniers furent ainsi libérés avant la fin de l’année 1415 [88] ; vingt autres furent relâchés en janvier et février [89] ; 11 libérations s’étalent entre mars et juillet [90] ; Guillaume de Gamaches fut mis en liberté le 12 décembre 1416 et Baudouin de Noyelle, le 14 avril 1417 [91].
34La protection des sauf-conduits s’étendait sur une période d’un à quatre mois. Quinze sauf-conduits autorisant les prisonniers à se rendre en France prévoyaient leur retour en Angleterre au terme de cette période (et in dictum regnum regis Angliae se divertendo) [92]. Néanmoins, ces documents sont la dernière trace de leur présence sur l’île. En fait, à deux exceptions près [93], l’ensemble des prisonniers bénéficiaires d’un sauf-conduit leur permettant de se rendre en France ou dans leurs états ne réapparaissent plus dans les documents de l’administration anglaise [94]. Doit-on en déduire qu’aucun captif ne tint ses engagements ? Cela paraît peu probable. Les termes des sauf-conduits délivrés le 11 février 1416 à Jeannet Tyrel de Poix et Jean Chastell, deux écuyers français, prisonniers de Nicolas Merbury, les autorisant à se rendre dans leurs terres pour lever l’argent de leur rançon, proposent une solution alternative. Les deux hommes étaient attendus à Calais ou en Angleterre avant le 3 mai suivant, et ensuite, selon les termes du document, il leur était permis de rentrer chez eux [95]. On peut suggérer le scénario suivant : une fois l’argent de leur rançon réuni, Tyrel et Chastell l’avaient remis entre les mains de Merbury ou d’un délégué qui en avait eu la charge à Calais et avaient reçu en retour leur lettre d’obligation, si toutefois leur rançon avait été payée dans sa totalité. Dans ce cas de figure, la date d’expiration du sauf-conduit correspondrait à la date avant laquelle la rançon devait être payée. Ce scénario a l’avantage d’expliquer la disparition des prisonniers des sources anglaises [96].
Le témoignage des obligations
35Calais apparaît comme le centre des opérations dans les 80 contrats d’obligation. Une fois que les maîtres avaient payé les droits royaux, le contrat d’obligation prévoyait que le trésorier de Calais ou son député leur fournirait une lettre, les délivrant de leur obligation envers la couronne. Le règlement des droits royaux se faisait donc vraisemblablement à Calais entre les mains du même trésorier [97]. Nous avons d’ailleurs vu plus haut que le trésorier était en possession des obligations en attente de payement. On peut aussi déduire de cette dernière observation que c’est également à Calais que les maîtres des prisonniers passaient ces obligations, ce qui n’est cependant spécifié que dans un seul contrat (les autres ne mentionnant pas le lieu où ils ont été rédigés !) [98]. L’hypothèse que Calais ait été le lieu de signature des contrats implique que les prisonniers n’avaient pas été conduits en Angleterre. Autrement, il y a lieu de penser que les maîtres auraient passé le contrat avec un officier de la couronne basé en Angleterre, les prisonniers se rendant par eux-mêmes sur le continent sous la protection d’un sauf-conduit.
36L’obligation d’Henry Fitzhugh qui offre des détails éclairants sur le sort de ses sept prisonniers au lendemain de la bataille permet de mettre en lumière le processus de leur mise à rançon. Ceux-ci, précise-t-elle, furent capturés à Azincourt, puis conduits à Calais (arrivée du contingent anglais le 28 octobre [99]) où ils se trouvaient encore au moment de la signature du contrat qui eut lieu le 26 février 1416 [100]. Dans l’intervalle, Fitzhugh dut évaluer et négocier avec eux le montant de leur rançon sans lequel le calcul des droits royaux et donc la rédaction de l’obligation étaient impossibles. La signature du contrat avec la couronne devait alors correspondre à la date de mise en liberté sur parole des sept prisonniers qui auraient alors été munis de sauf-conduits leur permettant de se rendre dans leurs états. Le chevalier anglais s’était engagé à payer les droits royaux sur la rançon de ses prisonniers avant le 7 juin 1416. Un peu plus de trois mois séparaient donc le scellement de l’obligation de la date de paiement. Ce délai devait tenir compte du temps nécessaire aux prisonniers pour payer leur rançon à Fitzhugh.
37En considérant que le processus de mise à rançon des prisonniers de Fitzhugh est exemplaire [101], nous pouvons réaliser une étude statistique sur la base de la date de signature de chaque obligation fournie dans 79 documents. Cette date correspondant, comme nous venons de le voir, au moment de la remise en liberté sur parole des prisonniers, elle met donc en lumière par la même occasion leur durée de captivité. Les résultats de cette étude sont présentés dans le graphique Remise en liberté des prisonniers (décembre 1415-octobre 1416). Nous avons utilisé le mois comme unité temporelle. Trois données ont été prises en compte pour chaque mois : le nombre d’obligations passées, le nombre de prisonniers et enfin la somme totale due au roi. Cette dernière valeur, présentée sous forme de pourcentage, correspond également à la valeur totale des prisonniers libérés dans le courant du mois [102].
38Près des trois quarts des obligations (58/79) furent passées dans les quatre mois qui suivirent la bataille. Ces contrats concernent aussi les trois-quarts des prisonniers (99/128) et enfin les trois-quarts de la somme totale due à la couronne (681£/915£). Cette intense activité se concentre sur les trois mois de décembre – auquel remonte le premier contrat et donc la première libération sur parole – à février. Au sein de cette période, 34 obligations, soit plus de 60 % de l’ensemble des obligations, furent signées pendant les deux dernières semaines de décembre. Elles comprennent 40 prisonniers ne représentant toutefois que 11 % du total des rançons. Cette dernière valeur triple le mois suivant, plafonnant à 33,7 %, tandis que le nombre des obligations a diminué de plus de moitié (15). Celui des prisonniers, en revanche, n’a perduque quelques unités (33). En février, on ne compte plus que neuf obligations incluant 26 prisonniers, dont la valeur reste considérable (30 %). On remarque qu’au sein des trois mois, le nombre des obligations décroît proportionnellement à celui des prisonniers. Cette évolution est en revanche inversement proportionnelle à la valeur des obligations.
39Il apparaît donc clairement que la masse des prisonniers les moins lucratifs fut relâchée avant la fin du mois de décembre, ceux-ci ne connaissant qu’une courte captivité d’un mois et demi. La somme moyenne payée par prisonnier ne s’élève alors qu’à 2£ 10s. La valeur moyenne des 33 captifs relâchés en janvier est presque quatre fois plus importante, les maîtres payant en moyenne 9£ 6s 8d par prisonnier. Cette somme moyenne augmente encore légèrement en février s’élevant à 10£ 10s. Si la différence de valeur des prisonniers entre janvier et février est presque insignifiante, le nombre des contrats a toutefois sensiblement diminué, ce qui n’est pas sans importance. Seuls 14 maîtres de prisonniers avaient passé un contrat avec la couronne en février, contre 27 en janvier ; ces contrats étaient par conséquent bien plus importants. Ainsi, plus le prisonnier était important, plus le maître avait besoin de temps pour évaluer le montant de sa rançon et le négocier avec lui. Cette durée de captivité était encore augmentée lorsque le maître avait plusieurs captifs entre les mains.
40L’évolution des données après février est nettement moins cohérente. La valeur moyenne des droits royaux chute en mars, ne s’élevant plus qu’à £2 et quelques poussières. Elle atteint un sommet sept mois plus tard en septembre, montant à £44 9s. Un mois plus tôt, elle avait atteint le minimum enregistré, à savoir £2. Ces observations ne doivent cependant pas remettre en cause fondamentalement le modèle qui émerge des données de la période précédente, car elles ne se fondent que sur le quart des obligations incluant 29 prisonniers et dont les montants ne s’élèvent au total qu’à £233. De surcroît, il faut noter que les droits payés pour deux prisonniers dont la valeur était peut-être la plus élevée sont inclus dans cette somme : Lionel de Rybeburgh (£46/14 avril) et Charles de Longueval (£44/13 septembre) [103]. Et le fait que ces prisonniers furent libérés tardivement ne contredit pas nos précédentes conclusions.
41La date de paiement des droits royaux fixée dans chaque obligation permet également de faire plusieurs remarques concernant le temps nécessaire aux prisonniers pour réunir l’argent de leur rançon. Le délai de trois mois qui avait été accordé à Henry Fitzhugh pour le règlement des droits royaux s’inscrit dans la moyenne. En effet, les délais impartis aux autres maîtres variaient d’un mois et demi à six mois et demi. La majorité des obligations (44) devait être réglée à Pâques (19 avril 1416), laissant de deux à quatre mois à leur détenteur pour les payer. Les neuf obligations qui bénéficièrent des délais les plus longs, à savoir de quatre mois et demi à six mois et demi [104], ont une valeur moyenne très élevée (36£). On en déduit que les prisonniers dont le montant de la rançon était plus élevé devaient avoir besoin de plus de temps pour lever les fonds. Le montant des obligations n’était toutefois pas toujours proportionnel au délai de paiement. Par exemple, les écuyers John Pympe et Gilles Thorndon, titulaires de deux obligations particulièrement élevées, n’avaient respectivement que deux mois et deux mois et demi (46£) pour payer les droits royaux [105], alors que la valeur moyenne des 28 obligations dont les maîtres bénéficiaient d’un délai de quatre mois pour la régler ne s’élève qu’à environ 4£. C’est également un délai de quatre mois qui fut imparti à John Grey, titulaire de l’obligation la plus élevée (163£) [106]. Un autre chevalier, Richard Tempest, dont le montant de l’obligation s’élevait à 15£ devait régler son dû en seulement un mois et neuf jours, le plus court intervalle [107]. En conclusion, aucun modèle clair n’émerge de ces différentes observations fondées sur les dates de paiement des obligations royales et donc sur les délais impartis aux prisonniers pour réunir l’argent de leur rançon [108].
Considérations finales
42Une trentaine de prisonniers seulement sur un total de 168 apparaissant dans les 46 sauf-conduits et les 80 obligations furent conduits en Angleterre. Qui sont-ils et pourquoi furent-ils emmenés ? Ils étaient de puissants seigneurs au service du roi ou de grands princes. Par exemple, Aubert le Flament, seigneur de Canny, était à la fois chambellan du duc de Bourgogne et du roi en 1411. Il était également capitaine de Noyon jusqu’à ce qu’il soit capturé à Azincourt [109]. Athis de Brimeu, chevalier, était conseiller du comte de Charolais et du duc de Bourgogne en 1418 [110]. Jacques de Trie, seigneur de Rolleboise, fut conseiller et chambellan du roi [111]. Charles de Savoisy, seigneur de Seignelay, fut conseiller et premier chambellan du roi en 1418 [112]. Guillaume de Gamaches eut plus tard des fonctions importantes dans le royaume : il fut bailli de Rouen en 1417, capitaine de Compiègne en 1418 et Grand maître des eaux et forêts en 1424 [113]. Thomas de Larzis fut nommé bailli de Vermandois le 15 décembre 1415 [114]. Ghillebert de Lannoy fut conseiller et chambellan du comte de Charolais et capitaine du château de L’Écluse en décembre 1416. Nous ne connaissons le montant de la rançon que de trois seigneurs qui traversèrent la Manche : Jean, seigneur de Ligne, devait payer 14 400 écus (2 400£) [115] ; Guillaume de Gamaches 4 000 écus (666£) [116] et Ghillebert de Lannoy, 1 200 écus d’or et un cheval de la valeur de 100 francs (en tout, sa rançon devait s’élever à 215£) [117]. On observe que la rançon de certains prisonniers qui ne traversèrent pas la Manche était plus élevée que celle de Lannoy. Celle de Lionel de Rybeburg dont les droits royaux s’élevèrent à 46£ 13s 4d pouvait valoir 420£ ; celle de Charles de Longueval, 400£ et celle de Jean de Mesny, 350£ [118]. La valeur lucrative d’un prisonnier ne semble donc pas avoir été un facteur décisif. Le choix du transport en Angleterre était probablement d’ordre politique et devait donc émaner du roi. La présence de nombreux bourguignons témoigne peut-être d’une pression qu’Henri V tenta d’exercer sur Jean sans Peur, ou bien plus simplement de la nature des sources conservées. Il est toutefois curieux qu’au final, ces prisonniers n’aient pas été retenus plus longtemps que les autres en captivité.
43Le processus de mise à rançon des prisonniers d’Azincourt, tel qu’il est décrit dans les sources, fut rapide et efficace. On a d’abord observé la redistribution des prisonniers au lendemain de la bataille ; les plus importantes prises glissant des mains des archers dans celles des écuyers et des chevaliers, ces derniers semblant tirer les meilleurs profits. On commettrait toutefois une erreur en analysant ce phénomène en termes d’inégalité ou d’injustice. La société médiévale, hautement hiérarchisée, n’autorisait pas un simple combattant à rançonner un puissant seigneur. C’était d’abord une question de rang et de statut [119]. Au-delà de la question d’honneur, les raisons étaient aussi d’ordre financière. Selon l’usage, il revenait en effet au maître de fournir des conditions de détention adéquates au rang de son prisonnier [120]. Les dépenses occasionnées par la captivité étaient aussi payées par le maître qui devait être remboursé plus tard, au moment du paiement de la rançon [121]. Le cas échéant, le maître devait également être capable de défendre ses droits devant une cour, ce qui pouvait également entraîner des dépenses considérables [122].
44Les transferts des prisonniers participaient donc d’une certaine manière au bon déroulement des opérations. Ils commencèrent probablement dès la fin du combat et durent s’achever au moment du départ de Calais pour l’Angleterre. Les troupes anglaises avaient évacué la place le 11 novembre [123]. Un mois et demi plus tard, un peu plus du tiers des prisonniers mentionnés dans les obligations avait déjà été remis en liberté, ce qui impliquait qu’entretemps le maître avait évalué le montant de la rançon de son captif, négocié un contrat avec celui-ci ainsi qu’avec le trésorier de Calais. Cela n’était possible que dans la mesure où la rançon du prisonnier était rapidement fixée. « En des temps où le gouvernement lui-même n’avait qu’une vague idée de la richesse du patrimoine foncier de ses sujets, l’évaluation de la rançon dut se faire sur base du rang du statut et de la réputation », observe M.K. Jones [124]. Cette évaluation devait aussi inclure une contribution des proches du prisonnier [125]. En ce qui concerne la masse des captifs les plus humbles, sans grande valeur, il était probablement impossible de fixer le montant de leur rançon en fonction de leurs possessions, leur réputation ou leurs proches. En même temps, il était important de les libérer dans les plus brefs délais – leur captivité ayant son prix. Les maîtres concernés par ce problème semblent avoir trouvé une solution. On observe, au plus bas de la hiérarchie, la récurrence de plusieurs montants de droits royaux : neuf obligations s’élèvent à 33s 4d [126], six à 44s 6d [127] et six autres à 22s 3d [128]. Ces dernières valent exactement la moitié des six plus importantes et les deux tiers des neuf autres. Une échelle de valeur semble donc avoir été établie qui devait correspondre à un statut ou une fonction bien précise dans l’armée [129].
45Dans l’espace d’une année, tous les prisonniers qui apparaissent dans les sources que nous avons utilisées devaient être en quête de leur rançon. Près des trois quarts des prisonniers mentionnés dans les 40 sauf-conduits et les 80 obligations (122/168), qu’ils fussent emmenés ou non en Angleterre, avaient même été libérés dans les trois ou quatre mois qui suivirent la bataille. Si l’on considère la date d’expiration des sauf-conduits et la date de paiement des obligations comme date limite du paiement des rançons, il apparaît même que la plupart des prisonniers s’étaient acquittés de leurs dettes dans le courant de l’année 1416. Rien ne prouve toutefois que les rançons furent payées dans les délais. Rappelons d’ailleurs que l’on doit la survie des 80 obligations au fait que les maîtres n’avaient pas réglé les droits royaux, soit parce que leurs prisonniers n’avaient pas tenu leurs engagements, soit peut-être en signe de protestation parce que le roi n’avait pas payé leurs gages.
46Quoi qu’il en soit, le processus de mise à rançon des prisonniers d’Azincourt semble avoir été exceptionnellement rapide en comparaison d’autres cas de prisonniers de guerre pendant la guerre de Cent Ans. Les durées de captivité mises en évidence par différentes études montrent en effet que les prisonniers demeuraient un an ou plus, voire beaucoup plus, entre les mains de leurs maîtres [130]. Il y a toutefois une exception : les prisonniers de la bataille de Poitiers dont la mise à rançon présente d’ailleurs plusieurs similitudes avec celle des prisonniers d’Azincourt. Les sources à la disposition de F. Bériac-Lainé et C. Given-Wilson ne leur ont pas permis d’éclairer le sort des plus humbles [131], mais il leur est néanmoins apparu clairement que l’on dut « décider sur le champ de la rançon de la grande majorité des prisonniers simples chevaliers et autres qui n’étaient de moult grant auctorité ; sur quoi on les libéra sans tarder, après qu’ils ont juré sur l’honneur de venir la payer à Bordeaux [132]. » Selon les auteurs, la raison était d’ordre pratique. Les Anglais étaient à 300 km de Bordeaux et, pour une armée forte de 7000 hommes, escorter un à deux mille prisonniers sur une si longue distance aurait présenté de grands dangers. À l’exception des otages politiques, F. Bériac Lainé et C. Given-Wilson pensent que tous les prisonniers furent libérés sur parole avant le milieu ou la fin de l’année 1357 [133].
47La singularité de ces deux batailles rangées se situe au niveau du nombre très important de prisonniers qui y fut capturé : 700 à 2 200 pour Azincourt et 1 000 à 2 000 pour Poitiers. Ces circonstances, combinées à une conjoncture économique défavorable dans les années 1350, avaient considérablement altéré le marché des rançons, selon F. Bériac-Lainé et C. Given-Wilson, entraînant la diminution des exigences [134] et, doit-on en conclure peut-être, la rapidité du processus. Les difficultés résultant de la situation en territoire ennemi sont mises en évidence dans le cas d’Azincourt : l’armée harassée au terme de la campagne et peut-être l’hostilité de la ville de Calais. Combinées au nombre important des prisonniers, ces circonstances durent très certainement accélérer le processus de mise à rançon. Mais peut-être avons-nous tort de chercher à tous prix à singulariser les circonstances d’Azincourt et de Poitiers. Celles-ci viennent-elles peut-être simplement nuancer le portrait dressé par les différentes études de cas sur lesquelles nos connaissances sont fondées.
P.j.
481416, 16 janvier – (Calais ?)
49Contrat d’obligation envers la couronne d’Angleterre scellé par Sir Henry Husee pour la rançon de dix prisonniers français.
50A. Original. Parchemin scellé sur simple queue du sceau aux armes de Sir Henry Husee. TNA, Eb1/46/4.
51[ro] Noverint universi, per presentes, me, Henricum Husee, militem, teneri et firmiter obligari serenissimo in Christo principi et domino, domino Henrico, regi Anglie et Francie illustri quinto post conquestum, in ducentis marcis sterlingorum solvendis eidem domino regi eius deputato seu assignato in festo Nativitatis sancti Johannis Baptiste proximo futuro sine ulteriori dilacione, ad quam quidem solutionem fideliter faciendam obligo me, heredes et executores meos, ac omnia terras et tenementa mea infra potestatem regis regnorum superdictorum existentia. Sigillo meo signato dato sextodecimo die januari anno regni supradicti tertio.
52[vo] Condicio istius obligationis talis est quod, si infrascriptus Henricus respondeat et satisfaceat domino regi infrascripto de eo quod eidem domino regi pertinet aut pertinere potest per redemptione certorum prisonariorum quorum nomina patent in quadam cedula hinc scripto annexa secundum ordinationem et iudicium regis et consilii sui aut litteras sufficientes thesaurii Calensis aut eius deputatum dirigendum, deliberet ad exonerandum predictum Henricum infra obligatum de obligatione sua predicta infra dato istius obigationis ; extunc obligatio predicta nullius sit vigoris.
53Irrotulo in memorando Scaccarii videlicet inter recorda de termino Sancti Michellis anno XVImo regis Henrici VIti in quodam processu tangente infrascriptum Henricum Husee.
54[Cédule attachée au document] Therry le Conte de Beausse ; Mayot de Vally ; Pierrotin de Lotefiere de Vimeu ; Lowis de Taillis de Beaugel oys ; Alain le Sevysal ; Jehannott de Seint ; Martin de la conté d’Eu ; Alisandre de Bouvet d’Abeville ; Vallet Ruchon ; Jehan de Hallay.
Table des contrats d’obligation
55Signes et abréviations : [x] illisible ; éc. écuyer ; ch. chevalier ; capt. capitaine ; cté du comté de ; Cal. de Calais ; £ livre sterling ; s sou ; d denier ; o obole ; q quadran.
Mots-clés éditeurs : rançons, prisonniers, Azincourt, Calais, guerre de Cent Ans
Mise en ligne 19/03/2013
https://doi.org/10.3917/rdn.372.0755Notes
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[*]
Remy Ambühl, doctorant, Université de St-Andrews, 114/2F1 Canongate, Edimbourg, EH8 8DD, U.K. Courriel : rca7@webmail.st-andrews.ac.uk.
Cet article s’inspire d’un mémoire de Master soutenu à l’université de Nottingham en octobre 2004. R. Ambühl, The Prisoners of Agincourt. Ransoming in the Late Middle Ages, University of Nottingham, Masters by Research, ouvrage dactylographié, 2004. Je profite de cette occasion pour remercier mes directeurs de recherche, le Professeur Michael Jones et le Docteur Gwilym Dodd, pour leur précieux soutien dans la réalisation de ce travail. Je tiens également à remercier les Professeurs Chris Given-Wilson et Bertrand Schnerb : le premier, pour son aide dans l’interprétation de certains documents, et le second, pour sa relecture attentive de ce présent article et ses conseils avisés. -
[1]
Voir par exemple l’article synthétique de C.T. Allmand, « War and profit in the Late Middle Age », History Today, 15 (1965), p. 762-769.
-
[2]
Sur les circonstances de captures dans la mêlée, voir A. Curry, Agincourt. A new History, Stroud, 2005, p. 214 et 215.
-
[3]
M. K. Jones, « Ransom brokerage in the fifteenth century », dans P. Contamine, C. Giry-Deloison, M. H. Keen (éd.), Guerre et société en France, en Angleterre et en Bourgogne, xive-xvesiècle, Lille, 1991, p. 221-35 (cf. p. 221).
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[4]
Avant une bataille rangée, le commandement en chef pouvait ordonner qu’aucun ennemi ne soit pris à merci ou bien que les prises n’interviennent qu’une fois la victoire manifestement acquise sur le terrain. Une fois les ennemis rendus, le chef de guerre pouvait ordonner de mettre à mort les prisonniers, pour des motifs particuliers (ainsi en guise de représailles) ou généraux (assimilation des prisonniers à des traîtres, à des rebelles, à des criminels de lèse-majesté). Des massacres délibérés de prisonniers étaient décidés au plus haut niveau, là encore pour l’exemple. P. Contamine, « Un contrôle étatique croissant. Les usages de la guerre du xive s. au xviiie s. : rançons et butins », dans P. Contamine (éd.), Guerre et concurrence entre les États européens du xive au xviiie s., Paris, 1998, p. 199-236 (cf. p. 204-205).
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[5]
Voir A. Curry, Agincourt (op. cit., n. 2), p. 215-221, 249 et 250 et M. Bennett « The Battle », dans A. Curry (éd.), Agincourt, 1415. Henry V, Sir Thomas Erpingham and the triumph of the English archers, Stroud, 2000, p. 21-36 (cf. p. 32-36).
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[6]
On notera que ni Anne Curry, ni Matthew Bennet n’ont pris en compte l’hypothèse de John Keegan (The Face of Battle, Harmondsworth, 1978, p. 107-112) selon laquelle le massacre des prisonniers n’aurait pu avoir lieu. Les arguments logistiques de l’historien et militaire de profession ne manquent cependant pas d’intérêt, retenant même l’attention de C.T. Allmand, dans sa biographie sur Henry V (Londres, 1992, p. 95). Au cœur de son argumentation, Keegan affirme que l’exécution de quelques milliers de prisonniers (en armure) par 200 archers en un très court laps de temps est impossible et en déduit que les morts, causées vraisemblablement par un violent déplacement des captifs vers une zone plus sûre, n’ont certainement pas excédé quelques centaines.
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[7]
J. De Wavrin, Recueil des Croniques et Anchiennes istories de la Grant Bretaigne a present nommé Engleterre, 1399-1422, W. Hardy (éd.), 5 vol., Londres, 1864-1891, II, p. 216 ; J. Le Févre De Saint-Rùmy, Chronique, F. Morand (éd.), 2 vol., Paris, 1876-1881, I, p. 257-258.
-
[8]
Il faut remarquer que peu de chroniqueurs se sont hasardés à donner une estimation du nombre de prisonniers français. Seulement huit des 28 récits de chroniques recensés par Anne Curry (The battle of Agincourt. Sources and interpretations, Woodbridge, 2000, p. 10-194) contiennent des chiffres relatifs aux prisonniers. Les estimations des chroniqueurs français sont les suivantes : 1 400 prisonniers selon le Religieux de Saint-Denis ; 1 500 selon Monstrelet ; 1 600 selon Le Fèvre de Saint-Rémy et Wavrin ; 2 200 selon l’auteur de la Chronique de Ruisseauville.
-
[9]
Deux sources seulement sont à l’origine de ces estimations : Walsingham (700) et l’auteur de l’une des versions de Brut (800).
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[10]
F. Bùriac-Lainù, C. Given-Wilson, Les prisonniers de la bataille de Poitiers, Paris, 2002, p. 309.
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[11]
A. Curry, Sources and interpretation (op. cit., n. 8), p. 53 et 94.
-
[12]
Il faut noter toutefois qu’en d’autres endroits les chroniqueurs n’hésitent pas à manipuler les chiffres afin de servir leur discours. Cela apparaît très clairement pour la dimension des armées et du nombre des pertes anglaises. Il s’agit tantôt de magnifier la victoire des Anglais ou de minimiser la défaite française. Ibid., p. 12 (Table 1 : ‘Chroniclers’ estimates of numbers’). Remarquons cependant que les nombres relatifs aux prisonniers ne semblent appuyer aucun discours idéologique.
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[13]
R. Ambühl, The Prisoners of Agincourt (op. cit., n. 1), p. 122-147. Quelques noms sont venus depuis lors s’ajouter à cette liste.
-
[14]
La captivité du duc d’Orléans est traitée dans de nombreuses études. Il faut d’abord citer l’étude complète de La vie de Charles d’Orléans, 1394-1465 (Paris, 1911) par P. Champion. Deux études consacrées à la détention de Charles et de son frère, Jean d’Orléans, comte d’Angoulême, avaient précédé l’ouvrage de Champion : l’une que l’on doit à A. Joubert (Négociations relatives à l’échange de Charles, duc d’Orléans, et de Jean, comte d’Angoulême, contre les seigneurs anglais, Angers, 1890) et l’autre à G. Dupont-Ferrier (« La captivité de Jean d’Orléans, comte d’Angoulême », Revue Historique, 62 (1896), p. 45-60). Sur le rôle particulier de Charles d’Orléans lors de la convention de paix à Calais en 1439, voir C.T. Allmand, « The Anglo-French negotiations, 1439 », Bulletin of the Inst. of Hist. Res., 40 (1967), p. 1-33. Sur le (non) paiement de sa rançon, voir M. K. Jones, « Henry VII, Lady Margaret Beaufort, and the Orléans ransom », dans Kings and nobles in the later Middle Ages, R. A. Griffiths, J. Sherborne (éd.), Gloucester, 1986, p. 254-273. Enfin, on doit signaler la parution récente d’un ouvrage portant sur la captivité de Charles d’Orléans en Angleterre. Les différentes contributions concernent principalement l’œuvre du poète. Remarquons toutefois l’article de W. Askins (« The brothers Orléans and their keepers », dans M.-J. Arn (ed.), Charles d’Orléans in England 1415-1440, Londres, 2000, p. 27-45) qui se concentre sur la relation du duc d’Orléans avec ses gardiens successifs. En ce qui concerne la détention du duc de Bourbon voir J. Huillard-Brùholles, « La rançon du duc de Bourbon Jean ier, 1415-1436 », Mémoires présentés à l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 8 (1874), p. 37-91 ; et celle du comte de Richemont, voir A. Cosneau, Le connétable de Richemont, Paris, 1888.
-
[15]
The National Archives (désormais TNA), E 101/48/2.
-
[16]
W. D. Cooper (« Sussex men at Agincourt », Sussex Archeological Collections, 15 (1863), p. 123-137) a tiré quelques informations ponctuelles de cette source. J. H. Wylie (The reign of Henry V, 3 vol., Cambridge, 1914-1929, II, p. 244 et 249), considérant le dossier dans sa totalité, a fait quelques observations très générales. Plus récemment, A. Curry (Agincourt (op. cit., n. 2), p. 244-245) y a consacré deux pages de son ouvrage sur la bataille d’Azincourt, relevant son importance et utilisant quelques informations pour éclairer le processus de mise à rançon. Nous y ferons référence en temps voulu.
-
[17]
Voir, par exemple, les endentures éditées dans T. Rymer (éd.), Foedera, Conventiones, Litterae, etc., 20 vol., 1727-1735, IX, p. 223-237.
-
[18]
Voir, par exemple, P. Contamine, « Rançons et butins dans la Normandie anglaise, 1424-1444 », dans La guerre et la paix, frontières et violences au Moyen Âge. Actes du congrès national des sociétés savantes. Section de philologie et d’histoire jusqu’à 1610 (Lille, 1976), Paris, 1978, p. 241-270 et A. Ayton, Knights and warhorses. Military service and the English aristocracy under Edward III, Woodbridge, 1994, p. 127-137.
-
[19]
D. Hay, « The division of the spoils of war in fourteenth-century England », Transactions of the Royal Historical Society, 5esérie, 4 (1954), p. 91-109 (cf. p. 106 et 107).
-
[20]
P. Contamine, « Rançons et butins dans la Normandie anglaise » (op. cit., n. 18), passim ; et en ce qui concerne les comptes de retenues, voir, par exemple, TNA, E 101/48/8, 49/12, 49/21, 49/37, 52/1,2. Tous ces comptes enregistrent des droits royaux sur des gains de guerre qui sont directement prélevés sur les gages des soldats.
-
[21]
TNA, E 101/45/12 ; E 101/46/4 ; E 210/2804, 2807, 2829, 2834, 2837, 2865.
-
[22]
TNA, E 364/62, m.1.
-
[23]
Toutefois, 29 obligations (du montant de 189£ 14s 11d) étaient encore en possession de Bokeland à cette date. L’ancien trésorier de Calais devait en répondre devant le roi.
-
[24]
TNA, E 101/53/7.
-
[25]
Sur le rôle de ces deux officiers, voir M. S. Giuseppi, Guide to the contents of the Public Record Office, 3 vol., Londres, 1963, I, p. 49 et 50, 95 et 96.
-
[26]
Sur cette enquête, voir J. L. Kirby, « The issues of the Lancastrian Exchequer and Lord Cromwell’s estimates of 1433 », Bull. of the Inst. of Hist. Res., 24 (1951), p. 121-151.
-
[27]
TNA, E 101/48/2, no. 43.
-
[28]
Il s’agit des obligations de deux chevaliers, Sir William Phelip (TNA, E 210/2807) et Sir Henry Husee (TNA, E 101/46/4).
-
[29]
A. Curry, Sources and interpretations (op. cit., n. 8), p. 452-453.
-
[30]
Il est conservé aux archives nationales à Londres sous la cote TNA, E 358/6. J. H. Wylie (« Notes on the Agincourt Roll », Transactions of the royal historical society, 3e série, 5 (1911), p. 105-140 (cf. p. 114-116)) y avait déjà consacré quelques pages au début du xxe siècle. A. Curry ( Sources and interpretation ( op. cit., n. 8), p. 428-434) a récemment mis en lumière toute l’importance de cette source pour l’étude du recrutement et du paiement des troupes anglaises. Chaque compte fait mention, entre autres, des montants des rançons des prisonniers français et du calcul de la portion royale qui sera ensuite déduite de leurs gages.
-
[31]
A. Curry, Sources and interpretations ( op. cit., n. 8), p. 428.
-
[32]
TNA, E 101/46/16.
-
[33]
TNA, E 358/6, m. 5r.
-
[34]
TNA, E 210/2807.
-
[35]
TNA, E 101/46/4 (Henry Husee, 16 janvier 1416) ; E 101/45/12 (William Trussel, 31 janvier 1416) ; E 101/48/2, no. 39 (John Pympe et William Perrot, 3 septembre 1416).
-
[36]
N.H. Nicolas, History of the battle of Agincourt, Londres, 1832, p. 333 ; J.S. Roskell, L. Clark, C. Radcliffe (dir.), The House of Commons, 4 vol., Stroud, 1992, IV, p. 152 et 670.
-
[37]
TNA, E 358/6, m. 4r.
-
[38]
N.H. Nicolas, History of the battle of Agincourt ( op. cit., n. 36), p. 373.
-
[39]
Cette seconde partie est largement inspirée de la première partie de notre article publié en anglais : « A fair share of the profits ? The ransoms of Agincourt », Notthingam Medieval Studies, 50 (2006), 129-150 (cf. p. 132-142). Quelques figures données ont été modifiées à la suite de la découverte de trois nouvelles obligations et de recherches plus approfondies.
-
[40]
A. Curry, Sources and interpretations ( op. cit., n. 8), p. 74.
-
[41]
Ainsi qu’il apparaît, par exemple, dans la liste des prisonniers capturés par les gens de guerre de la garnison d’Avranches en avril 1429. BNF, ms fr. 25768/372.
-
[42]
Il n’y a bien entendu aucun doute en ce qui concerne les hommes d’armes qui constituaient l’infanterie lourde. Après avoir rompu la charge de la cavalerie, les archers jouèrent un rôle majeur dans la mêlée : Et tantôt après, voyants les dessus dits Anglois cette division en l’avant-garde, tous ensembles entrèrent en eux et jetèrent jus leurs arcs et sagettes, et prirent leurs épées, haches, maillets, becs-de-faucons et autres bâtons de guerre frappants, abattants, et occisants iceux François : tant qu’ils vinrent à la seconde bataille, qui étoit derrière la dite avant-garde ; et après les dits archers suivoit et marchoit le dit roi anglois moult fort atout ses gens d’armes. E.De Monstrelet, Chronique, L. Douët-d’Arcq (éd.), 6 vol., Paris, 1857-1862, III, p. 106.
-
[43]
A. Curry, Agincourt ( op. cit., n. 2), p. 187.
-
[44]
Remarquons aussi qu’un marchand avéré, Richard Tropenell, citoyen de Londres, a été inclus dans cette catégorie. TNA, E 101/48/2, no. 37. Ce Tropenell fut peut-être un parent et valet de William Tropenell, maître tailleur, qui avait passé un contrat d’endenture avec la couronne pour une retenue de deux valets et quatre archers. A. Curry, Agincourt ( op. cit., n. 2), p. 60.
-
[45]
Si cette somme est proportionnelle au montant des rançons, il est toutefois difficile de déterminer le montant exact de la rançon, car il s’avère que les maîtres d’Azincourt payaient tantôt un tiers de la rançon et tantôt un neuvième. Cet usage qui, en théorie, est pourtant bien défini, trouve une application étrange dans le cadre de la campagne d’Azincourt. Voir R. Ambühl, « A fair share of the profits ? ( op. cit., n. 38) », p. 142-148.
-
[46]
En fait, la presque totalité des membres du troisième groupe partage la possession d’un prisonnier. Trois seulement font exception : Robert Wysebech (TNA, E 101/48/2, no. 11), John Harwod (TNA, E 101/48/2, no. 14) et John Hillis (TNA, E 101/48/2, no. 33). Quelques maîtres ont contracté plusieurs obligations. Par exemple, Peter Pykeryng et Robert Halton ont passé ensemble cinq obligations (TNA, E 101/48/2, 26, 50, 60, 62, 71) ; John Bakster et William Ledenham en ont passé trois conjointement (TNA, E 101/48/2 61, 73 ; E 210/2834) ; Simon Weting et John Ellestowe, finalement, en ont passé deux ensemble (TNA, E 101/48/2 no. 22, 25).
-
[47]
Gilles Thorndon devait payer au roi 46£ 13s 4d pour Rybeburg, tandis que les droits royaux pour Longueval détenu conjointement par l’écuyer John Pympe et l’archer William Perrot s’élevaient à £44 8s 11d. TNA, E 101/48/2 no. 41, 42.
-
[48]
TNA, E 101, 48/2, no. 40.
-
[49]
Une identification complète des maîtres permettrait de mieux éclairer cette redistribution des prisonniers. L’identification des plus importants montre déjà que ceux dont le rang était le plus élevé, à savoir les capitaines de retenue ou membres du Parlement, étaient aussi les maîtres des prisonniers les plus importants. Sir John Grey, qui contracta l’obligation la plus chère (163£ 6s 8d), peut avoir appartenu à la fameuse Maison de Ruthin. Il était capitaine d’une importante retenue de 35 hommes d’armes et 96 archers à Azincourt. TNA, E 101/48/2, no. 31-2 ; E 358/ m. 6r. ; N. H. Nicolas, History of the battle of Agincourt ( op. cit., n. 35), p. 346-347. Sir Henry Husee of Harting, M.P. (Membre du Parlement), qui avait passé la seconde obligation la plus chère (132£ 28s 8d), était dans la retenue de Humfrey, duc de Gloucester. TNA, E 101/46/4 ; Nicolas, History of the battle of Agincourt ( op. cit., n. 35), p. 333 ; G. Cokayne ET AL. (éd.), The Complete Peerage, 14 vol., Londres, 1910-1998, VII, p. 11. Sir Roger Fiennes, M.P., détenteur de la troisième obligation la plus chère (55£ 11s 4d), était capitaine d’une compagnie de 7 hommes d’armes et 24 archers au départ de la campagne. TNA, E 101/48/2, no. 46 ; The House of Commons ( op. cit., n. 35), III, p. 71. John Pympe, écuyer, co-détenteur du cinquième contrat le plus important, était le fils de Reynold Pympe, M.P. Il servit dans la retenue de Gloucester en 1415 et 1421. TNA, E 101/48/2, no. 41 ; The House of Commons ( op. cit., n. 35), IV, p. 152. Sir William Trussel, M.P., combattit aussi dans la retenue de Gloucester. Sa propre compagnie était composée de 5 hommes d’armes et 13 archers. TNA, E 101/45/12 ; The House of Commons ( op. cit., n. 35), IV, p. 670. Finalement, Sir Henry Fitzhugh, capitaine, détenteur de la neuvième obligation la plus chère, devait servir le roi avec une retenue de 30 hommes d’armes et 90 archers. TNA, E 101/48/2, no. 40 ; A. C. Reeves, Lancastrian Englishmen, Washington, 1981, p. 89.
-
[50]
Voir T. Rymer (éd.), Foedera ( op. cit., n. 17), IX, p. 223-237.
-
[51]
Ralph Fowne était dans la retenue de Sir Ralph Shirley. Il n’y eut aucun payement de droits royaux pour la rançon du prisonnier puisque celui-ci passa directement entre les mains du roi. TNA, E 358/6, m. 1r.
-
[52]
Le 10 janvier 1416, Henri ordonna à ses officiers de l’Échiquier de payer 666£ to Sir John Grey, une partie de la somme qu’il lui avait promise pour lui avoir remis le comte d’Eu. F. Devon (éd.), Issues of the Exchequer ; being a collection of payments made out of his majesty’s revenue, from king Henry VIII to king Henry VI inclusive, Londres, 1837, p. 344 et 345.
-
[53]
A. C. Reeves, Lancastrian Englishmen (op. cit., n. 49), p. 156.
-
[54]
William Wolf était dans la retenue de Thomas Arundel. W. D. Cooper, « Sussex men at Agincourt » ( op. cit., n. 16), p. 126 et 127.
-
[55]
F. Bériac-Lainé, C. Given-Wilson, Les prisonniers de la bataille de Poitiers ( op. cit., n. 10), p. 169-174.
-
[56]
John Cornwall, par exemple, ne fut payé que huit ans plus tard, après la mort d’Henri V. Il fut séparé de son prisonnier après la bataille sans aucune compensation. Vers la fin de l’année 1423, le Conseil délivra le comte à Cornwall, avec les arriérés de sa rançon, et il fut aussi convenu de le défrayer des dépenses soutenues à l’occasion du long procès qu’il avait engagé pour le recouvrement de ses droits sur son prisonnier. N. H. Nicolas (éd.), Proceedings and Ordinances of the Privy Council of England, 7 vol., Londres, 1834-1837, III, p. 126 (minutes du 7 et du 11 novembre 1423) ; voir aussi A. C. Reeves, Lancastrian Englishmen ( op. cit., n. 46), p. 156 et 169. Nous ignorons si John Grey reçut le reste de l’argent qui lui avait été promis. En ce qui concerne Fowne et Wolfe, nous n’avons trouvé jusqu’ici aucune trace de compensation.
-
[57]
TNA, C 47/2/49/7 ; cité et traduit dans A. Curry, Sources and interpretations ( op. cit., n. 8), p. 439-441.
-
[58]
Fowne est en effet mentionné comme l’auteur de la prise du duc de Bourbon dans le compte remis à l’Échiquier par son capitaine, Sir Ralph Shirley.
-
[59]
M. Keen, The Laws of War in the Later Middle Ages, Londres, 1965, p. 128. Selon M. K. Jones (« Ransom brokerage » ( op. cit., n. 3), p. 227), la remise d’un prisonnier français au capitaine était même une obligation. La position de F. Bériac-Laisné et C. Given-Wilson ( Les prisonniers de Les prisonniers de la bataille de Poitiers ( op. cit., n. 10), p. 289) est plus nuancée : « Elles [les meilleures prises] proviennent plutôt d’hommes servant sous leurs ordres et qui se trouvèrent obligés de les leur céder. Cela ne veut pas dire que tous ceux qui, ce jour-là, capturèrent des prisonniers de valeur durent les abandonner aux chefs de l’ost, mais il n’était manifestement pas question qu’un comte français, ou un maréchal restassent trop longtemps aux mains d’un valet. »
-
[60]
M. Keen, The Laws of War ( op. cit., n. 59), p. 145.
-
[61]
Le Religieux De Saint-Denis, Chronique, L.-F. Bellaguet (éd. et trad.), 3 vol. en 2 t., Paris, 1994 (réimpr. de l’éd. en 6 t. de Paris, 1839-1852), II, p. 568-569.
-
[62]
G. De Lannoy, Œuvres, Ch. Potvin et J.-C. Houzeau (éd.) Louvain, 1878, p. 49 et 50.
-
[63]
J. H. Wylie, History of England under Henry the Fourth, 4 vol., New York, 1969, I, p. 286 n. 2.
-
[64]
La détention de Pierre de Hellenvillers est attestée dans une pétition de sa femme Jeanne Gaillouvel adressée au roi de France le 9 mai 1416. BNF, P.O., Hellenvillers, no. 56 (vidimus de juillet 1416) ; cité dans Curry, Sources and interpretations ( op. cit., n. 8), p. 467. Une notice biographique sur ce personnage est fournie dans A. Demurger, « Guerre civile et changements du personnel administratif dans le royaume de France de 1400 à 1418 : l’exemple des baillis et sénéchaux », Francia, 6 (1978), p. 151-298 (cf. p. 264).
-
[65]
J. Leland, Itinerary, Thomas Hearne (éd.), 9 vol., Oxford, 1710-1712, I, p. 138 ; cité dans K. B. Mcfarlane, The nobility of Later Medieval England, Oxford, 1973, p. 128.
-
[66]
Les sept prisonniers de Hungerford capturés à Azincourt sont Pierre de Rewe (Rieux ?), Moreu de Seeland (Zélande ?), Emyneon Benefyk, Jean de Gey, Magyn Drewen, Jean de Flavyle et Hugues de Belle. TNA, C 76/98, mm. 3-4.
-
[67]
Cf. n. 43.
-
[68]
Ce dernier ne s’acquittant pas de sa dette, Whittington porta l’affaire en justice et eut finalement gain de cause en avril 1421. Il y a tout lieu de croire ici que la marge de profit fut maigre et que Whittington cherchait en fait à se débarrasser d’un prisonnier peut-être insolvable. A. H. Thomas (éd.), Calendar of Plea and Memoranda Rolls of the City of London, 1413-1417, Cambridge, 1943, 68. — (suite) p. 91-93 ; voir aussi C. M. Barron, « Richard Whittington : the Man behind the Myth », dans Studies in London History, A. E. J. Hollaender et W. Kellaway (éd.), Londres, 1969, p. 197-250 (cf. p. 228).
-
[69]
Il faut souligner toutefois que les témoignages relatifs à une pratique collective sont rarissimes. Nous ne pouvons citer qu’un exemple antérieur à Azincourt. En 1376, un groupe de combattants sous le commandement du comte d’Armagnac se partagea les profits des rançons de 21 prisonniers selon l’importance de leurs gages. M. Pena (éd.), Documents sur la Maison de Durfort,xie-xve siècle, Bordeaux, 1977, p. 743 et 744, no. 1274 ; cité dans P. Contamine, « Un contrôle étatique croissant » ( op. cit., n. 4), p. 212 et 213). L’exemple du butinier bourguignon, en 1443, qui recevait l’argent des rançons des prisonniers et le redistribuait parmi les maîtres des prisonniers témoigne plus d’une solide organisation que d’une forme d’entreprise collective. B. Schnerb, Bulgnéville (1431). L’État bourguignon prend pied en Lorraine, Paris, 1993, p. 96-97. Cependant, auxive et dans la première moitié duxve siècle, la mise à rançon des prisonniers demeurait en général une affaire privée et individuelle. Il était déjà coutume en revanche de mettre en commun le mortbutin que l’on mettait aux enchères. Les gains étaient ensuite redistribués parmi les soldats selon leur rang. M. Keen, The Laws of War ( op. cit., n. 58), p. 146. Il faut attendre la seconde moitié duxve siècle en France pour que les rançons de prisonniers deviennent aussi une affaire collective. Jean de Bueil, c. 1462-1465, notait trois différentes options dans la division des gains de guerres (incluant les rançons de prisonniers) : le profit individuel, l’association de plusieurs combattants ou le profit commun de toute la compagnie. Finalement, en 1476, une ordonnance de guerre française déclarait que tous les biens de guerre quels qu’ils soient devaient être mis en commun. Jean De Bueil, Le Jouvencel, C. Favre et L. Lecestre (éd.), 2 vol., Paris, 1887-1889, II, p. 94 ; cité dans P. Contamine, « Un contrôle étatique croissant » ( op. cit., n. 4), p. 212 et 213.
-
[70]
En tous cas, cette large proportion de prisonniers détenus par les chevaliers pose question. Pourquoi n’observe-t-on pas ce phénomène au niveau des écuyers qui, eux aussi, commandaient des retenues ? Pourquoi les chevaliers semblent-ils former un groupe à part, distinct de celui des écuyers et des archers ? Il aurait été moins surprenant de trouver les chevaliers et les écuyers, c’est-à-dire les nobles, d’un côté, et les archers de l’autre.
-
[71]
J. De Wavrin, Recueil des Croniques ( op. cit., n. 7), II, p. 220 et 221.
-
[72]
W. P. Balidon (éd), Select cases in Chancery (1364-1471), Londres (Selden Society, 10), 1896, p. 110 ( item 112).
-
[73]
Si l’on écarte les deux obligations passées conjointement par un certain John Gibbeson de Calais avec Thomas Wynford, un chevalier anglais, dont la somme totale s’élève au montant exceptionnel de 43£, la valeur moyenne des 45 autres contrats est à peine supérieure à 3£, soit une livre au dessous de la moyenne de cette catégorie.
-
[74]
Voir l’obligation de William Russel, de Worcester, entrée conjointement avec Roger Duddeley, de Calais, ou bien celle de John Mersk, de Calais, et William Bud, de York. TNA, E 101/48/2, no. 28 et 57. Deux obligations furent passées par un chevalier anglais Thomas Wynford et un certain John Gibbeson de Calais. TNA, E 101/48/2, no. 54 et 64. Le chevalier n’apparaît toutefois pas dans la liste des hommes d’armes qui participèrent à la campagne d’Azincourt dressée par A. Curry, Agincourt ( op. cit., n. 2), p. 280-286. Cette très longue liste n’est toutefois pas complète. Elle contient 6 538 noms d’hommes d’armes et d’archers (les noms des chefs d’endentures ne sont pas inclus dans ces chiffres). L’auteur estime cependant que le contingent anglais d’Azincourt devait compter 8 735 hommes.
-
[75]
TNA, E 101/48/2, no. 67.
-
[76]
Sherborne n’est pas mentionné dans la liste fournie dans A. Curry, Agincourt ( op. cit., n. 2), p. 280-300.
-
[77]
Ces sauf-conduits sont contenus dans les Treaty Rolls conservés aux National Archives à Londres sous la cote TNA, C 76 (pour les années 1415 et 1416, C 76/98, 99). Ils ont été partiellement édités dans T. Rymer, Foedera ( op. cit., n. 17), IX, X et dans T. Carte (éd.), Catalogue des Rolles gascons, normans et francois conservés dans les archives de la Tour de Londres, 2 vol., Londres et Paris, 1743. Ces deux sources, même combinées, ne proposent qu’une sélection des sauf-conduits qui ne sont pas toujours retranscrits dans leur totalité. Vers la fin du xixe siècle, les Treaty Rolls pour les règnes d’Henri V et d’Henri VI ont été complètement catalogués dans les Reports of the Deputy Keeper ( Appendix to 44th Report of the Deputy Keeper of the Public Records [désormais R.D.K. 44th], 1883, p. 543-638 ; Appendix to 48th Report of the Deputy Keeper of the Public Records [désormais R.D.K. 48th], 1887, p. 217-450).
-
[78]
Le fait qu’aucun des prisonniers mentionnés dans les obligations n’apparaisse dans les sauf-conduits est un premier indice en faveur de notre hypothèse. Cet argument n’est toutefois pas infaillible, car les mesures prises par Henri V, le 20 mai 1416, suggèrent que certains captifs détenus en Angleterre avaient quitté le pays illégalement. Henri ordonna alors au shérif de Londres de proclamer qu’aucun homme, de quel qu’état, degré ou condition qu’il soit, sous peine de forfaiture, ne délivre ou n’autorise le départ de prisonniers français sans son consentement. Calendar of Close Rolls 1413-1419, p. 355.
-
[79]
Une liste des prisonniers d’Azincourt sur base des sauf-conduits émis entre 1415 et 1430 est dressée dans N.H. Nicolas, History of the battle of Agincourt (op. cit., n. 35), Appendix, p. 61-63. Il ne fait aucun doute toutefois qu’une large proportion des prisonniers mentionnés n’a pas été capturée à Azincourt, mais peut-être à Verneuil (1424) ou Patay (1429) ou au cours d’un des innombrables combats livrés entre ces deux dates.
-
[80]
J. H. Wylie, The reign of Henry V ( op. cit., n. 16), II, p. 357 et 358.
-
[81]
Le premier Génois qui reçut un sauf-conduit après la bataille de la Seine est un certain Jurdan Bartholomée, prisonnier de Robert Wyfold. Le document fut émis le 24 novembre 1416. Il autorisait le Génois à quitter l’Angleterre pour se rendre au port de l’Écluse en Flandre. R.D.K. 44th ( op. cit.,. — (suite) n. 77), p. 585. De nombreux autres suivent dans le courant de l’année 1417. Voir les sauf-conduits délivrés à Francis Gentille, Édouard Sipion, Paul Lumbard, Thomas Testegros. Ibid., p. 586-597 ; voir aussi J. H. Wylie, The reign of Henry V ( op. cit., n. 16), II, p. 364 n. 3.
-
[82]
Certains prisonniers mentionnés dans des documents sortant de ce cadre chronologique ont peut-être été capturés à Azincourt. Nous avons inclus par exemple le sauf conduit accordé le 12 décembre 1416 à Guillaume de Gamaches parce que d’autres sources confirment sa capture à Azincourt. Sa rançon fut évaluée à 4 000 écus. R. A. Newhall, The English conquest of Normandy (1416-1424), Yale, 1924, p. 157 n. 5. Nous avons également inclus le sauf-conduit délivré le 14 avril 1417 à Baudouin de Noyelle, un chevalier artésien, dont la capture sur le champ de bataille est attestée dans E. De Monstrelet, Chronique ( op. cit., n. 41), III, p. 115.
-
[83]
Ghillebert de Lannoy, titulaire d’un tel sauf-conduit émis le 6 décembre 1415 (TNA, C 76/98, m. 6), fut emmené en Angleterre par son maître John Cornwall.
-
[84]
TNA C 76/98, m. 1, 3, 5, 6 ; 76/99, m. 32, 33.
-
[85]
TNA, C76/98, m. 3.
-
[86]
R. C. Famiglietti, Royal Intrigue. Crisis at the Court of Charles VI, 1392-1420, New York, 1986, p. 298 n. 84.
-
[87]
Si possible, le prisonnier nommait un plège avant sa remise en liberté sur parole qui jouait le rôle de caution. Au cas où le prisonnier ne remplissait pas ses engagements, le maître se retournait contre le plège. M. Keen, The Laws of War ( op. cit., n. 59), p. 167-170.
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[88]
TNA C 76/98, m. 5,6.
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[89]
TNA C 76/98, m. 1, 3 à 5.
-
[90]
TNA C 76/98, m. 1 ; 76/99, m. 23 à 25, 31 à 33.
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[91]
TNA, C 76/99, m. 8 ; R.D.K. 44th( op. cit., n. 77), p. 590. Nous ignorons la date de départ pour quatre prisonniers détenus en Angleterre qui ne bénéficièrent que de sauf-conduits pour se rendre auprès du roi.
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[92]
TNA, C 76/98, m. 1, 3 ; 76/99, m. 33, 25.
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[93]
Nous notons deux exceptions. Thomas de Larzis reçut un sauf-conduit le 25 novembre 1415 et un autre le 3 juillet 1416. TNA, C 76/98, m. 7 ; 76/99, m. 23. Charles des Essarts réapparut deux fois en Angleterre après une courte période en France. Il reçut un sauf-conduit le 8 février 1416, un autre le 4 juillet de la même année et finalement un troisième le 26 février 1417. TNA C 76/98, m. 3 ; 76/99, m. 23 ; R.D.K. 44th ( op. cit., n. 77), p. 587.
-
[94]
La même observation est faite à propos des prisonniers de Poitiers dans F. Bériac-Lainé, C. Given-Wilson, Les prisonniers de la bataille de Poitiers ( op. cit., n. 10), p. 124.
-
[95]
…et exinde in regnum regis Angliae seu ad villam regis Cales reveniendo ibidem morando et perhendinando et exinde ad propria redeundo ac bona res et hernesia sua quecumque. TNA, C 76/98, m. 3.
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[96]
Nous pensons qu’une étude systématique de l’importante série des Treaty Rolls dans lesquels les sauf-conduits apparaissent devrait permettre de répondre aux nombreuses questions soulevées. Une pareille entreprise dépasse toutefois largement le cadre de notre enquête sur les prisonniers d’Azincourt.
-
[97]
C’est également ce qui est suggéré dans A. Curry, Agincourt ( op. cit., n. 2), p. 244.
-
[98]
Le contrat de William Lynde et John Johnsone fut daté et signé à Calais le premier juin 1416. TNA E 101/48/2, no. 21.
-
[99]
A. Curry, Agincourt ( op. cit., n. 2), p. 238.
-
[100]
TNA, E 101/48/2, no. 40.
-
[101]
Il faut toutefois souligner que le cas d’un chevalier français, Mathieu de Cayeu, met cette hypothèse en question. Mathieu de Cayeu, aussi connu sous le nom de Payen de Cayeu, combattit à Azincourt aux côtés de son frère, Jean de Cayeu, dit le Bègue. J. De Vismes, « Essai généalogique sur les premiers sires de Cayeu », Bulletin de la Société d’émulation d’Abbeville, 1934, p. 393-442. E. de Monstrelet ( Chronique, ( op. cit., n. 41), III, p. 114) rapporta la mort des deux frères sur le champ de bataille, ce qui était peut-être vrai pour l’aîné, ne l’était pas en revanche pour son benjamin. Mathieu de Cayeu fut relâché avant le 13 novembre 1415, date à laquelle il fut accueilli à Boulogne-sur-Mer à son retour de la prison des Englés. E. Dupont (éd.), Registre des recettes et dépenses de la ville de Boulogne-sur-Mer, 1415-1416, Boulogne-sur-Mer, 1882, p. 108 et 109. Son nom apparaît dans l’obligation de Robert of Willoughby, lord of Eresby, contractée sept mois et demi plus tard. TNA, E 101/48/2 no. 45. Comment expliquer ce curieux cours des événements ? Pourquoi Cayeu fut-il libéré juste après la bataille et reparut dans un contrat d’obligation, qui marque à notre sens la date de mise en liberté des prisonniers, que sept mois et demi plus tard ? On peut imaginer qu’à l’instar des prisonniers du siège de Harfleur, Cayeu fut peut-être libéré dans un premier temps en raison de son état de santé, promettant de se rendre plus tard à Calais où son maître l’attendrait. Ainsi, Monstrelet reçut-il peut-être prématurément la nouvelle de sa mort ? Le malheureux était peut-être gravement blessé, mais n’avait pas encore rendu son dernier souffle.
-
[102]
Un contrat n’a pu être pris en compte car sa date est illisible : TNA, E 101/48/2, no. 51.
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[103]
TNA, E 101/48/2, no. 41 et 42.
-
[104]
TNA, E 101/48/2, no. 12, 39, 46, 47, 49, 50, 67 ; 101/45/12 ; 101/46/4.
-
[105]
TNA, E 101/48/2, no. 41 et 42.
-
[106]
TNA, E 101/48/2, no. 31 et 32.
-
[107]
TNA, E 101/48/2, no. 6 et 7.
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[108]
Les sommes en écus incluses dans les trois obligations des trois chevaliers William Trussel (TNA, E 101/45/12), John Grey (TNA, E 101/48/2, no. 31et 32) et Richard Tempest (TNA, E 101/48/2, no. 6 et 7) demeurent un mystère. Les montants apparaissent à côté du nom des prisonniers. Dans l’obligation de Grey, la somme totale s’élève à 1 254 écus (Jean de Craon, 404 écus ; Pierre de La Viesville, 300 écus ; Hémont de Vendricort, 200 écus ; Fransoy Dubuschet, 100 écus ;— (suite) Louis Debet, 120 écus ; Pierre de Bonent, 40 écus ; Glande de Duyson, 120 écus ; Colin, Basin et Macy de la Conche, 60 écus), les droits royaux montant à £163 (ou approximativement 978 écus). Dans le document de Trussel, la somme totale s’élève à 524 écus (Guillaume Torsy, 104 écus ; Roger de Cantepré, 100 écus ; Jean Warner, 50 écus ; Jean May, 100 écus ; Colard Rettorey, 40 écus ; Guillaume de Fernoy, 100 écus ; Guillaume de Cortys, 40 écus ; Jean Cavus, 40 écus ; Rouland de Lapeype, 40 écus) et 40£ (ou 240 écus) pour les droits royaux. Dans le contrat de Tempest enfin, la somme monte à 280 écus pour les trois prisonniers et 15£ (90 écus) pour les droits royaux. Pour la conversion en écus, voir P. Spufford, Handbook of medieval exchange (1986), p. 179, 193, 201.) À quoi correspondaient ces sommes d’argent ? On remarque qu’elles ne sont pas proportionnelles au montant des droits royaux. S’agissait-il d’un premier versement qui avait eu lieu pendant leur captivité ? Le cas échéant, il est assez curieux de trouver cette information dans l’obligation.
-
[109]
R. C. Famiglietti, Royal Intrigue ( op. cit., n. 86), p. 298 n. 84.
-
[110]
Le 7 décembre 1418, il reçut 500 lt du roi pour l’aider à payer sa rançon. B.-A. Poquet De Haut-Jussé, La France gouvernée par Jean sans Peur. Les dépenses du receveur général du royaume, Paris, 1959, p. 130, no. 291.
-
[111]
Ibid., p. 239, no. 871.
-
[112]
Le 18 août 1418, il reçut du roi 2,000 lt pour payer sa rançon aux Anglais. Ibid., p. 106 no. 193.
-
[113]
R. De Belleval, Azincourt, Paris, 1865, p. 280 ; A. Demurger, « Guerre civile et changements du personnel administratif » ( op. cit., n. 64), p. 256 et 257.
-
[114]
Nicolas De Baye, Journal, A. Tuetey (éd.), 2 vol., Paris, 1885-1888, II, p. 230 ; A. Demurger, « Guerre civile et changements du personnel administratif » ( op. cit., n. 64), p. 178 et 179.
-
[115]
T. Rymer (éd.), Foedera ( op. cit., n. 17), IX, p. 360.
-
[116]
Voir n. 79.
-
[117]
G. De Lannoy, Œuvres ( op. cit., n. 62), p. 50.
-
[118]
TNA, E 101/48/2, n. 64.
-
[119]
F. Bériac-Lainé, C. Given-Wilson, Les prisonniers de la bataille de Poitiers ( op. cit., n. 10), p. 289.
-
[120]
H. Bonet, L’Arbre des Batailles, E. Nys (éd.), Paris, 1883, p. 138 ; cité dans P. Contamine, « Rançons et butins dans la Normandie anglaise » ( op. cit., n. 18), p. 242.
-
[121]
M. Keen, The Laws of War ( op. cit., n. 58), p. 169. Deux exemples ont été relevés d’une pratique appellée ‘les marz’ qui fixait le montant des dépenses de captivité au cinquième de la rançon du prisonnier. C.A.J. Armstrong, « Sir John Falstof and the law of arms », dans C.T. Allmand (éd.), War, Literature and Politics in the Late Middle Ages, Liverpool, 1976, p. 46-56 (cf. p. 47-48) ; C. Given-Wilson, « The ransom of Olivier du Guesclin », Bulletin of the Inst. of Hist. Res., 44 (1981), p. 17-28 (cf. p. 27). Les exemples de Guillaume de Châteauvillain et de Robert, lord Moleyn montrent cependant que le montant des dépenses pouvait largement dépasser cette proportion. La rançon de Châteauvillain s’élevait à 22 000 saluts d’or au départ. Leurs maîtres en exigèrent 32 000 au terme de sa longue captivité de trois ans. En ce qui concerne Robert Moleyn, ses dépenses furent évaluées à £3 870, ce qui représentait 64,5 % du montant de sa rançon, à savoir £6 000. A. Bossuat, « Les prisonniers de guerre auxve siècle : la rançon de Guillaume de Chateauvillain », Annales de Bourgogne, 23 (1951), p. 7-35 (cf. p. 23) ; M. K. Jones, « Ransom brokerage » ( op. cit., n. 3), p. 224.
-
[122]
Par exemple, les cas de Chateauvillain et Rodemack, voir A. Bossuat, « Les prisonniers de guerre auxve siècle : la rançon de Jean, seigneur de Rodemack », Annales de l’Est, 5e série, 2 (1951), p. 145-62 ; et celui du comte de Denia, A. Rogers, « Hoton versus Shakell : a ransom case in — (suite) the Court of Chivalry, 1390-1395 », Nottingham Medieval Studies, 6 (1962), p. 74-108 ; 7 (1963), p. 53-78.
-
[123]
A. Curry, Agincourt ( op. cit., n. 2), p. 239.
-
[124]
M. K. Jones, « Ransom brokerage » ( op. cit., n. 3), p. 223. La très grande rançon de Guyot Pestel, par exemple, évaluée à 5,000 l.t., fut probablement fixée sur base de ses hautes fonctions comme officier de la couronne. Il était chambellan du roi, bailli des Montagnes d’Auvergne entre 1413 et 1415, et ensuite sénéchal de Beaucaire en 1415 et 1416. Sa capture à Azincourt lui fit cependant perdre son office en mars 1416. NICOLAS DE BAYE, Journal ( op. cit., n. 109), II, p. 243-246 ; A. Demurger, « Guerre civile et changements du personnel administratif » ( op. cit., n. 64), p. 284 et 285.
-
[125]
M. Keen, The Laws of War ( op. cit., n. 58), p. 158 et 159.
-
[126]
TNA, E 101/48/2 no. 4, 8, 21, 35, 52, 65, 71 ; E 210/2834, 2837.
-
[127]
TNA, E 101/48/2 no. 29, 38, 43, 50 (44s 5d o), 57, 63 (44s 5d o).
-
[128]
TNA, E 101/48/2 no. 14 (22s 2d o q), 18, 27, 33 (22s 2d 1 o q), 73 ; E 210/2829.
-
[129]
Une pratique similaire est attestée plus tard en 1449 dans le cadre de la reddition de la garnison de Pont-Audemer. Jean, comte de Dunois, lieutenant de Charles VII, fixa lui-même le montant des rançons des prisonniers anglais. Un capitaine fut évalué à 2 000 écus, chaque homme d’armes à 30 écus et chaque archer à 12 écus. P. Contamine, « Un contrôle étatique croissant » ( op. cit., n. 4), p. 222.
-
[130]
Quelques exemples sont fournis à la note 95. En voici d’autres, Guillaume de Châteauvillan fut emprisonné un peu moins d’un an. A. Bossuat, « Guillaume de Chateauvilain » ( op. cit., n. 116), p. 12. Jean Bourchier fut détenu cinq ans en captivité. M. Jones, « Fortunes et malheurs de guerre. Autour de la rançon du chevalier anglais Jean Bourchier (†1400) », dans La guerre, la violence et les gens au Moyen Âge, P. Contamine, O. Guyotjeannin (éd.), 2 vol., Paris, 1996, I, p. 189-208 (cf. p. 194). Les prisonniers écossais mentionnés par A. King (« “According to the custom used in French and Scottish wars” : Prisoners and casualties on the Scottish Marches in the fourteenth century », Journal of Medieval History, 28 (2002), p. 263-290 (cf. p. 276-277)) qui, selon l’auteur, connurent une période de captivité remarquablement courte, furent quand même détenus durant un peu moins d’un an.
-
[131]
F. Bériac-Lainé, C. Given-Wilson, Les prisonniers de la bataille de Poitiers ( op. cit., n. 10), p. 282.
-
[132]
Ibid., p. 48.
-
[133]
Ibid., p. 95-96.
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[134]
Ibid., p. 195. Les rançons étaient particulièrement élevées à la fin des années 1360 et vers le début des années 1370, un phénomène qui se reproduit dans la période 1415-1435. En ce qui concerne Poitiers, comtes et évêques valaient entre 2 000£ et 8 000£, les barons, entre 500£ et 2 000£, chevaliers et écuyers entre 50£ et 500£ et enfin les valets et autres genres de serviteurs, au plus, 50£. F. Bériac-Lainé, C. Given-Wilson, Les prisonniers de la bataille de Poitiers ( op. cit., n. 10), p. 190-192. Quant à Azincourt, il n’a pas été possible d’établir une échelle de valeur aussi complète. On remarque toutefois que les chevaliers valaient entre 56£ et 666£ et la rançon de 58 prisonniers sur 129 mentionnés dans les obligations était inférieure à 50£.