Notes
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[*]
Gérard Sivéry, Professeur émérite de l’Université de Lille 3, 513, avenue de la République, 59700 Marcq-en-Baroeul.
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[1]
H. du Passage, « Usure », dans Dictionnaire de théologie catholique, XV, Paris, 1915, p. 2315-2366.
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[2]
Thomas d’Aquin, Summa theologica, IIa IIae, quest. LXXVIII, art. 2, resp. Cf. H. du Passage, « Usure », op. cit. (voir n. 1), p. 2357.
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[3]
Thomas d’Aquin, Summa theological, op. cit. (voir n. 2), IIa IIae, quest. LXXVIII, art. I, resp. et ad. 7, quest. LXI, art. 3, resp. Voir R. de Roover, La pensée économique des scolastiques. Doctrines et methodes, Montréal et Paris, 1971, p. 80-81.
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[4]
L’argent comparé à une semence qui fructifie : Thomas d’Aquin, Summa theologica, op. cit. (voir n. 2), IIa IIae, quest. LXII, art. 4, resp. et ad 1 et 2.
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[5]
R. de Roover, La pensée économique, op. cit. (voir n. 3), p. 78-79 ; H. Hauser, « Les idées économiques de Calvin », dans Les débuts du Capitalisme, Paris, 1931, p. 45-79 ; B. Nelson, The Idea of Usury, Chicago, 1969, p. 73-108 ; G. Fourquin, « Raymond de Roover, historien de la pensée économique », Revue Historique, n° 507, juillet-sept. 1973, p. 19-34.
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[6]
Saint Thomas d’Aquin, Summa theologica, IIa IIae, art. LXI, art. 4, resp.
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[7]
J.-A. Schumpeter, History of Economica Analysis, New York, 1954, p. 91.
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[8]
Id., p. 97 ; R.-H. Tawney, Religion and the Rise of Capitalism, New York, 1926, p. 36 ; R. de Roover, op. cit., p. 10 sq. ; J.-A. Schumpeter, op. cit., p. 93 sq.
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[9]
Thomas d’Aquin, op. cit., IIa IIae quest. LXXVII, art. 1 ; Cajetan, Commentaires de la Somme Théologique, Leonine éd., IX, p. 149 ; R. de Roover, op. cit., p. 56-59 ; G. Fourquin, op. cit., p. 28 sq.
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[10]
Thomas d’Aquin, op. cit., IIa IIae, quest. LXXVII, art. 2, ad ; de Roover, p. 46.
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[11]
R. de Roover, op. cit., p. 46-47, n. 66.
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[12]
Id., p. 56 sq ; G. Fourquin, p. 29 sq. ; J.-W. Baldwin, Masters, Princes and Merchants : The Social Views of Peter the Chanter and his Circle, Princeton, 1970, and The Medieval Theories of the Just Price, Philadelphie, 1959.
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[13]
Thomas d’Aquin, De emptione et venditione ad Tempus, opusculum n° 60, Parme éd., XVII, p. 337 et, pour signaler que le prix-récolte de 15 muids est l’équivalent de 10 muids l’hiver, Thomas d’Aquin, Commentum in III librum sententiarum, Parme éd., VII, p. 430 ; R. de Roover, p. 58-59.
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[14]
Pour l’offre et la demande, cf. J. Höffner (professeur à l’Université de Münster, puis cardinal archevêque de Cologne), « Statistik und Dynamik in der scolastichen Wirtschaftsethik », Arbeitsgemeinschaft für Forschung des Landes Nordrhein-Westfalen, Heft n° 38, Cologne, 1955 et au sujet des monopoles, Wirtschaftsethik und Monopole (xve-xvie), Iena, 1941.
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[15]
J. Duns Scot, Questiones in librum IV Sententiarum, Opera omnia, p. 317-318 ; J. Baldwin, Masters…, op. cit. (n. 12) ; R. de Roover, op. cit. (n. 3), p. 59-61 : le SMIG (salaire minimum interprofessionnel garanti, date de 1950, Georges Bidault était alors président du Conseil et Vincent Auriol, président de la République) est devenu le SMIC (salaire minimum interprofessionnel de croissance en 1970, Georges Pompidou était président de la République et Jacques Chaban-Delmas Premier ministre).
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[16]
Saint Thomas d’Aquin, Summa theologica, Ia IIae quest. CXIV, art. 1, resp. ; Merces dicitur quod alicui recompensatur pro retributione operis, vel laboris, quasi qoddam. Pretium ipsius ; R. de Roover, op. cit. (n. 3), p. 72.
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[17]
Saint Thomas d’Aquin, Summa theologica, IIa IIae quest. 77, art. 3, obj. Et rép. 4 ; J. Höffner, Statistik…, op. cit. (n. 14).
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[18]
Cicéron, De officiis, III, 12 ; de Roover, p. 58.
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[19]
G. Sivéry, « Les débuts de l’économie cyclique et de ses crises dans les bassins scaldien et mosan à la fin du xiie et au début du xiiie siècle », Revue du Nord, t. LXIV, nos 254-255, juillet-décembre 1982, p. 667-681.
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[20]
Id., Saint Louis et son siècle, Paris, 1983, p. 168, « L’enquête de 1247 et les dommages de guerre en Tournaisis, en Flandre gallicante et en Artois », Revue du Nord, t. LIX, n° 232, janvier-mars 1977, p. 7-18 ; Id., « Le mécontentement dans le royaume de France et les enquêtes de saint Louis, Revue historique, t. 545, 1983, p. 5-14.
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[21]
Thomas d’Aquin, Summa theologica, IIa-IIae, quest. 62, art. 4, resp. ; J. Noonan, The Scolastic Analysis of Usury, Cambridge (Mass), 1957, p. 107-112.
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[22]
Rapport moral sur l’argent dans le monde en 2002, Association d’Économie financière, 2003 ; J.-A. Schumpeter, op. cit. (n. 7), p. 86 sq.
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[23]
AD Nord, 3 H 1016 sq., cf. 3 H 1017 (compte du 22 juillet 1299 au 22 juillet 1300), G. Sivéry, « La gestion du temporel du Saint-Sépulcre de Cambrai (1298-1360) », Études rurales, 1972, n° 48, p. 120-134.
1 L’histoire sérielle a permis d’énormes progrès dans notre connaissance du passé. Elle risque cependant de bloquer la saisie des ensembles de données indispensables pour mieux le comprendre. Est-il possible, par exemple, d’expliquer les prises de positions de saint Thomas d’Aquin dans son étude de l’usure si l’on ne tient pas compte des conditions économiques de son époque et surtout des transformations qui rendent impératives et urgentes des réponses des théologiens moralistes interrogés par un certain nombre d’agents responsables ou simplement en contact avec la marche des affaires au xiiie siècle ?
La définition de l’usure par saint Thomas d’Aquin et par Littré
2 La volonté de réduire la question de l’usure chez saint Thomas d’Aquin à l’examen de l’intérêt d’un prêt d’argent a pratiquement interdit l’examen des rapports entre les positions du grand théologien du xiiie siècle et l’économie de son temps et n’a pas facilité davantage la manière de les aborder. Le meilleur témoignage de cette attitude est l’étude, par ailleurs très érudite, d’Henri du Passage, qui veut s’en tenir à la définition que Littré donne de l’usure, c’est-à-dire l’intérêt que produit l’argent [1]. Il refuse donc de scruter les autres aspects de la question alors qu’il cite, mais en affirmant qu’il n’a pas l’intention de s’en occuper, l’affirmation beaucoup plus large de Thomas d’Aquin : Si aliquis carius velit vendere res suas quam sit justum pretium… manifeste usura committitur. Si quelqu’un veut vendre ses biens plus cher que le juste prix, l’usure est évidente [2]. En bref, le juste prix est déterminant pour les prêts comme pour le reste, mais qu’entend saint Thomas par juste prix ?
Usure et intérêt
3 Avant de répondre à cette question fondamentale du juste prix qui est décisive pour établir s’il y a usure dans le sens de gain anormal, il convient de rechercher des définitions essentielles pour saint Thomas, car elles lui permettent de préciser sa notion de « valeur ». Certaines de ses allégations sont d’une richesse si considérable qu’elles ont été parfois mal comprises, même par d’éminents historiens de l’histoire économique. Faut-il le considérer comme coupable d’appréciations contradictoires sans raison quand il affirme que l’argent est stérile puis, dans une autre occasion, qu’il est source de richesses ? En fait il s’agit d’utilisations totalement différentes de l’argent. Celui-ci ne peut produire de l’argent – en l’occurrence un intérêt – quand il s’agit d’un prêt directement destiné à acquérir du froment ou du vin, c’est-àdire des victuailles, des produits consommables, fongibles, qui sont du domaine de la justice distributive et qui ne peuvent faire l’objet d’un contrat puisque rien ne subsiste [3]. Au contraire, quand il y a échange de l’argent résultant d’un contrat, cet argent peut être comparé à une semence qui fructifie, même si sur le moment il n’y a qu’échange d’argent, mais, comme la semence, cet argent placé peut rapporter ensuite [4]. En clair, pour Thomas d’Aquin l’argent prêté qui ne peut porter intérêt et reste stérile se distingue de l’argent qui est placé et sert à un investissement. On devine combien les applications sont nombreuses et peuvent d’ailleurs se rapporter à des contrats liés tant aux anciennes sources de richesses, c’est-à-dire à la terre ou autres biens immobiliers avec les rentes, qu’aux nouvelles sources d’enrichissement (nolisement, assurances, parts dans différents placements, lettres de change). Dans tous ces cas (cession de fiefs, de tenures, de maisons, d’investissements dans des entreprises textiles, de négoces, etc.) il y a distinction entre l’argent et ce qui est échangé contre cet argent : en fait, on se trouve ici dans le cadre de la justice commutative car l’argent est emprunté grâce à un contrat et laisse subsister une réalité après l’échange d’argent. Il ne s’agit donc pas d’un prêt déguisé. En outre l’utilisation se distingue ainsi du dominium et n’entraîne pas les disparitions de la « chose » dont l’usage est échangé contre de l’argent. On reste donc bien dans le domaine de la distinction entre propriété éminente et propriété utile. Celui qui occupe une maison ou une terre contre une rente ne commet pas d’usure puisque le créancier garde le dominium et ne cède que l’usage. C’est un échange par contrat, pas un prêt, et la rente ne peut être considérée comme un intérêt. Thomas d’Aquin n’a pas eu à s’intéresser à une catégorie de rentes qui posera problème à ses successeurs scolastiques : les rentes d’État qui ne reposent pas sur l’usage d’un bien ni sur un investissement dans une entreprise concrète.
4 Des décisions papales au xive siècle limitent l’intérêt légitime à des taux compris entre « le denier 14 et le denier 10 », c’est-à-dire entre 7,5 et 10 %. Martin V, en 1425, et Calixte III, en 1455, apaisent ainsi les consciences. Jean Calvin les tranquillise de manière radicale au xvie siècle en distinguant les prêts dits commerciaux, qui autorisaient la perception d’intérêts, et les prêts destinés à secourir les gens en difficulté, qui devaient être gratuits, sans intérêt et sans espoir de remboursement [5]. Mais Thomas d’Aquin, comme d’autres théologiens scolastiques, avait déjà différencié le prêt de survie (prêt « biblique » et, pour d’autres, « coranique ») du crédit accordant l’usage d’une maison ou d’une terre grâce, par exemple, à un arrentement, ou du prêt consenti à un homme d’affaires qui engageait son argent dans la participation à une expédition maritime ou commerciale ou dans une entreprise financière ou « artisanale » quelconque. Thomas d’Aquin avait d’ailleurs tenu à dégager un certain nombre de critères permettant de déterminer les emprunts liés à ce que l’on pourrait appeler le monde des affaires au sens large dans l’article IV de la question LXXVII de la Secunda secundae partis de la Somme théologique [6]. Commentant cet article, L.J.A. Schumpeter avait procédé à une présentation synthétique de la justification d’un gain commercial (et donc de la possibilité pour de l’argent emprunté de porter « du fruit ») par la nécessité de pourvoir à la vie des habitants, par le désir d’acquérir des moyens de satisfaire un projet charitable, ou de servir à l’utilité publique, de procurer une rétribution modérée pour le travail fourni. Il faut aussi tenir compte de l’amélioration de la chose négociée, des variations de valeur selon les facteurs temps et espace, et enfin du risque qui tenait une si grande place dans le commerce maritime. Schumpeter note d’ailleurs que Jean Duns Scot (1266-1308) et Richard de Middleton (1249-1306) qui avaient enseigné après la mort de saint Thomas (décédé en 1274) avaient notamment envisagé les avantages sociaux provenant de la différence entre les achats dans un marché aux prix peu élevés et de la vente dans un marché où les prix étaient supérieurs [7].
Le juste prix
5 Thomas d’Aquin n’avait d’ailleurs pas négligé la question de la spéculation, mais nous la verrons sous un autre angle. Toutefois, il avait surtout examiné de manière magistrale la question du juste prix, à un tel point que les deux grandes écoles d’analyse économique s’opposent encore en prenant comme base de leur interprétation l’opinion que chacune juge prédominante chez Thomas d’Aquin. En vérité, le « juste prix » dépend de la valeur équitable d’une chose, mais pour les disciples d’Aristote, donc pour Thomas d’Aquin, la valeur objective d’une chose n’existe pas. Il est donc vain de la chercher et il n’est possible de procéder à son évaluation que selon des critères relatifs qui sont le coût et l’utilité. À partir de la fin du xiie siècle et pendant plusieurs siècles, des scolastiques, des théologiens préoccupés de questions morales, dont le plus célèbre est Thomas d’Aquin, s’attachent aux recherches sur ces questions fondamentales de l’économie, tant et si bien que l’historien et théoricien de l’analyse économique Schumpeter estime que « les scolastiques, plus que n’importe quel autre groupe peuvent mériter le titre de fondateur de la science économique ». En effet, si les valeurs sont déterminées par l’utilité, qui est liée évidemment au désir, aux notions psychologiques et finalement à l’initiative, les tenants du libéralisme représentent cette tendance et Adam Smith, dont la chaîne de dépendance envers les scolastiques est sans faille, en est le véritable héritier. Pour Schumpeter même, les scolastiques avaient dit mieux qu’Adam Smith ce qui se trouvait chez cet auteur. C’est exagéré, mais l’exagération est encore plus manifeste quand R. H. Tawney déclare que le dernier scolastique fut Karl Marx. En effet, ce n’est certainement pas chez les théologiens moralistes du Moyen Âge et chez Thomas d’Aquin en particulier qu’il a découvert la lutte des classes et la haine en lieu et place de l’amour prôné par l’Évangile. Sur ce point, au moins, la rupture dans la chaîne des dépendances est totale. Mais il reste que pour un certain nombre de scolastiques, les éléments des valeurs résident dans le coût, c’est-à-dire dans le prix de revient qui consiste dans un ensemble d’éléments matériels dans lesquels le travail tient une très grande place. Faut-il décréter que Marx a connu la notion de valeur liée au coût et au travail chez les scolastiques et non dans les travaux de leurs successeurs ? Vers 1960, Louis Girard, professeur d’Histoire contemporaine à l’Université de Lille, remarquait que vers les années 1840, Marx vivait en exil dans la région de Bruxelles au temps où enseignait dans cette même région, à Louvain, le professeur d’Économie politique Charles de Coux, disciple de Lamennais, Lacordaire et Montalembert, très attiré par ces questions telles que les avaient traitées les scolastiques et Thomas d’Aquin en particulier. Certes, les cours de de Coux n’étaient pas encore publiés, mais ils circulaient sous forme manuscrite. La question de savoir si Karl Marx en a eu connaissance reste en fait sans réponse… [8].
6 Mais quelle était donc la position exacte de l’illustre professeur parisien du xiiie siècle sur cette question fondamentale de la valeur d’une chose et de la détermination de son juste prix ? Celui-ci était-il déterminé en amont par le coût du travail ou au contraire en aval par l’évaluation d’un produit au moment de la vente ou de son utilisation. En vérité, l’intelligence, la finesse d’analyse ou peut-être plus simplement le souci de ne pas négliger le sort du travailleur, ont conduit Thomas d’Aquin a tenir compte des deux éléments. Toutefois, pour le cardinal Giacomo de Vio, plus connu sous le nom de Cajetan (1462-1534), le meilleur commentateur de la Somme théologique de Thomas d’Aquin à la Renaissance, ainsi que pour des historiens de l’économie contemporaine comme R. de Roover et G. Fourquin, le juste prix d’un bien, d’une chose, etc. est lié à l’utilité envisagé par rapport à la satisfaction des besoins ou des désirs de l’acheteur. L’article premier de la question 78 de la deuxième section de la seconde partie de la Somme montre qu’il est injuste de frauder et de vendre quelque chose plus cher qu’elle ne vaut ou d’acheter quelque chose moins cher qu’elle ne vaut. Mais ce juste prix dépend de l’accord entre acheteur et vendeur et, finalement, l’utilité recherchée par l’acheteur l’emporte. Dans le commentaire qu’il donne de cet article, Cajetan conclut que le juste prix est « celui qui peut être obtenu habituellement des acheteurs en présupposant qu’ils soient bien informés et en l’absence de tout dol et de toute contrainte » [9].
7 Dans d’autres passages de son œuvre, Thomas d’Aquin a mieux précisé sa pensée. Dans l’article II de la question suivante, il déclare que le prix des choses à vendre ne dépend pas de leur classement dans la nature, mais varie selon qu’elles peuvent servir à l’homme [10]. Si la valeur se détermine en fonction des besoins de l’homme, il n’est cependant pas question pour le théologien dominicain et parisien d’admettre que le juste prix dépende des caprices de tel ou tel individu ou selon la nécessité d’un vendeur ou d’un acheteur, mais bien selon l’utilité et la nécessité de l’ensemble de la communauté [11]. Il n’admet d’ailleurs pas qu’un prix puisse varier selon les catégories d’acheteurs et il précise que la justice commutative à base de contrat exige que chacune des parties y trouve son profit. Cet équilibre, cette équivalence et la satisfaction des besoins d’une communauté d’habitants par exemple, supposent qu’il y ait une estimation valable pour les vendeurs ou acheteurs potentiels. Cette estimation commune est de fait « l’estimation du marché au moment de la vente ». Encore vagues et imparfaitement formulés, des essais de compréhension de l’économie du temps se perçoivent vers 1200, dans le milieu de Pierre Le Chantre, philosophe et théologien de l’école canoniale de Notre-Dame de Paris, puis se clarifient après la fondation de l’Université de Paris (1215) et surtout avec le maître de Thomas d’Aquin de 1245 à 1248, Albert le Grand, qui définit de manière claire que la commune estimation équivaut au cours du marché et que le juste prix se révèle par l’estimation du marché au moment de la vente [12]. Son disciple emploie l’expression secundum communem forum (selon le cours du marché) lorsqu’il constate que dix muids de blé, en hiver, coûtent aussi cher que quinze en été au moment de la récolte. Dans une lettre qu’il écrit vers 1265 à Jacques de Viterbe, dominicain du couvent de Santa Maria Novella à Florence, il attribue une importance décisive au cours du marché. Les marchands toscans importateurs de draps achetés à Lagny, siège de l’une des foires de Champagne, commettent la faute d’usure (au sens de vendre plus cher que la chose ne vaut) s’ils vendent à terme à un prix supérieur à celui du marché. Mais ils ne la commettent pas en vendant au prix du marché, même si ce prix est supérieur à celui qu’ils obtiendraient en renonçant au paiement à terme et en acceptant d’être payés au comptant [13]. En langage contemporain, le prix du marché est déterminé par la loi de l’offre et de la demande qui est ainsi le critère du juste prix au moment du contrat [14].
8 Dans de telles conditions, il n’est pas étonnant que l’évaluation du juste prix d’après le coût de production ou prix de revient fait piètre figure chez Thomas d’Aquin. Après lui, Jean Duns Scot, franciscain qui enseigna à Paris, développe souvent les thèses opposées à celles de son prédécesseur, notamment en minimisant fort les possibilités de la raison pour prouver l’existence de Dieu et pour le connaître. Dans le domaine économique, il reconnaît que la valeur est liée à l’utilité, mais il tient tellement compte du prix de revient, notamment du coût du travail, qu’il limite la concurrence jugée indispensable par Thomas d’Aquin. Il annonce ainsi les scolastiques de la fin du Moyen Âge qui font de l’État le régulateur décisif des prix, tandis que l’école thomiste n’admettait l’intervention des pouvoirs publics que devant les prix exagérés des vivres dans les temps de grande disette. Ce docteur scolastique écossais, qui est le champion médiéval de la défense du salaire des travailleurs, limite ainsi la concurrence voulue par l’école thomiste. Cela ne signifie pas que Thomas d’Aquin ait ignoré les conditions de vie des artisans et de leurs auxiliaires. Pour lui, les « arts et métiers » ne subsistent que dans la mesure où les travailleurs manuels reçoivent une rétribution en rapport avec les exigences de leur participation à la fabrication et au négoce des choses indispensables ou simplement utiles à la vie de tous. Certes, il est moins précis que Jean Duns Scot déclarant qu’un marchand peut vendre sa marchandise à un prix qui lui permette de vivre et de subvenir aux besoins de sa famille.
9 Pour faible que semble être le souci de Thomas d’Aquin pour les coûts, il n’en existe pas moins et témoigne de sa volonté de lier le prix du marché et le prix de revient. La plupart de ses successeurs vont considérer comme antithétiques ces deux notions. Ne faut-il pas, d’ailleurs, attendre 1950 et la création du SMIG, que peu de pays connaissent encore en ce troisième millénaire, pour voir enfin liés le prix du marché, ou prix d’équilibre entre l’offre et la demande, et le prix du coût de la production, surtout celui de la part du salaire qui y est incorporé. N’est-ce pas la réponse apportée au cardinal Robert de Courçon qui, en 1215 déjà, voulait prouver que le producteur ne produirait plus s’il ne récupérait pas ses frais et la récompense pour son travail ? [15]
Thomas d’Aquin et l’économie de marché
10 Thomas d’Aquin poussa l’analyse plus loin que le cardinal de Courçon, auteur des premiers statuts de l’Université de Paris en 1215. En effet, une cinquantaine d’années plus tard, dans la deuxième section de la première partie de sa Somme théologique, il déclara que le salaire, rétribution d’un travail, équivaut en quelque sorte à son prix. Il est évident que payer le juste prix pour une chose achetée est un acte de justice. On peut donc affirmer que payer le salaire nécessaire pour une œuvre ou pour un travail est un acte strict de justice. Thomas d’Aquin signale ensuite qu’il y a plusieurs types de justice et que la justice peut être de type égalitaire ou d’équilibre ou bien au contraire de type paternelle ou celle du maître. Ce qui signifie que la justice paternelle ou divine est de type différent de la justice égalitaire et peut la surpasser beaucoup. Appliquer cette distinction aux salaires revient à dire que le salaire, qui n’est que le « quasi prix » de la rétribution due, n’est pas du type égalitaire et qu’il n’établit pas systématiquement l’équilibre entre l’offre et la demande. On en revient alors à l’obligation de toujours permettre à celui qui dépend de son salaire pour vivre et pour faire vivre sa famille de toucher une rétribution suffisante. Autrement dit, le juste prix pour le salaire échappe aux lois du marché de l’offre et de la demande et ne peut absolument pas correspondre à une phase anormalement creuse d’une période de dépression, car les travailleurs ne pourraient même plus acheter les produits indispensables à la vie de leur famille si le coût salarial devait suivre une allure identique à celles d’un marché fortement baissier [16].
11 Douterait-on encore que Thomas d’Aquin n’ait pas eu connaissance de prix en oscillations fortes et fréquentes ? Il suffit de voir un autre passage de sa Somme théologique pour être convaincu que les marchés pouvaient accuser des pointes de prix très élevés suivies rapidement par des baisses profondes. Il expose le cas de conscience d’un marchand à qui les circonstances offrent l’occasion d’une spéculation de grand profit. Avant ses concurrents, ce négociant a eu la possibilité d’acheter des grains en quantité suffisante pour remplir un chariot qu’il s’empresse de conduire sur le marché d’une ville dans une région qui souffre d’une grande disette de grains. Véritables prix de famine, leurs cours sont si excessifs que le marchand se demande s’il peut profiter de cette occasion car il sait que d’autres chariots suivent et que leur arrivée va bientôt provoquer une brutale chute des cours. Thomas d’Aquin sort de cette épineuse question avec une grande habileté. Le marchand témoignerait certes d’une plus grande vertu en avertissant la population de la venue imminente d’un approvisionnement suffisant, mais il n’agit pas contre la justice en observant le prix du marché tel qu’il le trouve au moment de la vente de ses grains. En bref, il n’est pas coupable d’usure, puisqu’il se contente de vendre son grain au prix fixé par l’estimation commune, en l’occurrence selon l’offre et la demande. Il ne vend donc pas son grain plus cher qu’il ne vaut sur ce marché et au moment précis de la vente [17].
12 Comment expliquer la possibilité de tirer parti de ce qui est en fait une spéculation ? À l’époque romaine Cicéron, qui avait examiné une situation à peu près identique n’avait pas donné un avis aussi favorable au profit éventuel [18]. Comment se comprend la position très large du grand théologien médiéval ? Il estime que le juste prix est celui du marché au moment de la transaction. Mais ce n’est pas par pure satisfaction d’une réflexion intellectuelle. On sait en effet que la recherche du bien commun — c’est-à-dire du bien de tous, du bien de la communauté — était alors le but et le devoir de l’activité humaine. Or au xiiie siècle l’essor démographique et l’essor urbain sont tels qu’on ne peut négliger ni l’initiative individuelle, ni la possibilité d’entreprendre librement. Refuser de manière radicale et a priori la possibilité qu’apporte la spéculation de mettre fin à une disette, comme de donner à une région, grâce à de fructueuses exportations, la faculté de produire des tissus en abondance afin de fournir du travail aux habitants, n’est-ce pas compromettre les chances de sortir de la famine ou du chômage ? En outre, il faut tenir compte du risque qui éliminerait toute tentative aventureuse de satisfaire un quelconque besoin indispensable à la vie de la communauté s’il n’apportait que l’échec ou, en cas de réussite, la condamnation. De toute manière, on ne peut parler d’usure, c’est-à-dire de prix supérieur à ce que vaut la chose vendue conformément au cours du marché au moment précis de la vente.
13 Ce prix du marché qui correspond à une estimation commune est le résultat de la confrontation puis de l’établissement d’une situation d’équilibre entre l’offre et la demande. Mais cet équilibre ne correspond nullement à une moyenne stable. Les prix qui résultent de l’offre et de la demande sont en évolution constante au gré de l’abondance ou de la raréfaction du produit, au gré de la volonté ou des besoins des acheteurs, au gré des évolutions en quantité ou en valeur de la monnaie, etc. Les deux situations examinées par Thomas d’Aquin suffiraient à montrer que des situations extrêmes des prix existent, soit en tendant vers un maximum soit au contraire en descendant fort bas. En outre, il ne faut pas oublier que Thomas d’Aquin, qui tient ici le rôle de théologien moraliste, agit comme ses collègues en tant que consultant et en réponse à des cas de conscience formulés, soit par des confesseurs interrogés par leurs pénitents soit par des hommes d’affaires. On l’a vu nettement avec les marchands de draps de Viterbe. Thomas n’examine pas des cas virtuels ou artificiels pour le plaisir de cogiter ou de montrer sa virtuosité. Il montre son souci de l’humain par son refus de tout ce qui pourrait ressembler à de la spéculation pour les salaires, mais en l’admettant pour les produits.
14 Des études de prix menées pour le xiiie siècle prouvent combien les cas examinés par Thomas d’Aquin correspondent à la réalité, notamment avec les fluctuations incessantes des prix et des maxima et minima très marqués. Telle est la rançon de l’économie de marché. Mais une économie cyclique avec des phases d’essor, des crises ou changements de tendance précédant des phases dépressives qui se repèrent dès la seconde moitié du xiiie siècle dans les régions mosanes ou scaldiennes est perçue parce que des comptabilités en nombre suffisant prouvent et éclairent de telles conclusions. Faudrait-il alors conclure qu’on ne peut établir de telles conclusions pour des périodes antérieures parce que la plupart de leurs comptabilités ne nous sont pas parvenues ? N’est-il pas au contraire plus conforme à la réalité de se demander le motif de l’existence, plus précoce en certaines contrées que dans d’autres, de comptabilités en nombre massif permettant de découvrir une allure très mouvante des prix avec parfois des hausses ou de baisses excessives, des maxima et minima très prononcés ? La question authentique est la suivante. Pourquoi certaines époques et régions ont-elles eu des comptabilités en nombre suffisant pour qu’il soit possible de procéder à l’examen quantitatif de leur économie ? La réponse est simple : l’existence de noyaux d’économie de marché suppose l’apparition très rapide de la possibilité d’enregistrer les prix et ensuite les quantités négociées qui fluctuent sans cesse selon l’offre et la demande afin de disposer d’une solide base de discussions pour les échanges à venir [19].
15 Il faut ensuite se demander pourquoi des contrées connurent plus vite que d’autres l’économie de marché et par le fait même pourquoi les hommes d’affaires qui en sont originaires sont incités à interroger les confesseurs ou les professeurs de théologie morale, devenus en quelque sorte les théoriciens du droit des affaires. L’éclosion précoce n’a rien de fortuit. L’essor démographique et urbain des xiie et xiiie siècles exige notamment des approvisionnements considérables de nourritures, de grains surtout. Les responsables des anciennes villes en renaissance ont gardé suffisamment de techniques de l’Antiquité, notamment de l’Empire romain, pour continuer à assurer la fourniture de vivres à leur population grâce à des mesures autoritaires. Rien de tel dans les villes des pays neufs du Nord-Ouest de l’Europe qui n’avaient pas connu ces techniques puisqu’elles étaient de création récente. L’approvisionnement comme d’ailleurs les nécessités d’achats de laine exigèrent d’autres méthodes. Telle fut la cause de la grande innovation : l’économie de marché apparue dans certains noyaux géographiques d’avant-garde avant qu’elle ne s’étende à d’autres contrées. Par la force des choses les producteurs, intermédiaires et négociants se chargèrent de l’approvisionnement et du commerce en général et les pouvoirs publics, incapables d’assurer ces tâches, leur laissèrent la liberté de produire, d’entreprendre et de négocier.
16 Des problèmes se signalèrent dans la morale des affaires notamment à cause de la grande liberté reconnue dans l’activité économique. Ils se posèrent très tôt comme on l’a vu avec les remarques du cardinal de Courçon en 1215 à propos des rétributions des travailleurs manuels. Ils affectèrent le grand commerce à un point tel qu’en 1265 des négociants en produits de la draperie consultèrent Thomas d’Aquin sur la conduite à tenir dans le commerce à terme. Mais à une date antérieure, on découvre des franciscains, chargés en 1247 par saint Louis d’enregistrer les griefs contre la royauté, incapables de comprendre certaines exigences d’hommes d’affaires de la région scaldienne. Comment des disciples du petit pauvre d’Assise pouvaient-ils accepter que des descendants d’hommes d’affaires arrageois viennent réclamer des dommages au sujet d’investissements potentiels perdus à cause des rançons exigées par Philippe Auguste au temps de Bouvines ? Il fallut remplacer en hâte ces enquêteurs par des hommes d’Église de la région capables de saisir de telles complications [20].
17 Un penseur de l’envergure de Thomas d’Aquin était, lui, capable de trouver des justifications à des griefs aussi étranges pour beaucoup et certainement nouveaux, même pour les intellectuels chevronnés du temps. En considérant l’usure comme l’équivalent de ce qui était supérieur à la valeur d’un bien il trouve la méthode indispensable et le plus sûr des arguments pour admettre moralement la prise en compte de dommages dans l’évaluation de la valeur d’un bien ou pour faire admettre un bénéfice énorme dans une affaire, car le succès lié à la spéculation pouvait rendre légitime un gain considérable que justifiaient le risque encouru ainsi que la satisfaction urgente et vitale des besoins de la communauté. Ses points de vue s’imposèrent le plus souvent. La plupart des moralistes n’admirent-ils pas son point de vue sur le droit d’un créancier à recevoir une compensation pour les dommages subis à l’occasion d’un prêt, par exemple à cause de frais de procès nécessaire pour recouvrer la somme de l’emprunt [21].
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20 Très classique et très respectueux de la doctrine de l’Église, Thomas d’Aquin condamne le prêt à intérêt qui sert à l’acquisition des vivres ou des semences indispensables à la survie et qui est toujours usuraire. Les grands profits éventuels de l’argent avancé dans le commerce maritime ou le négoce lointain ne posaient pas de problème à cause du risque et les rentes pour l’utilisation d’une terre ou d’une maison ou de locaux professionnels ne constituaient pas vraiment l’intérêt d’un prêt puisqu’il s’agissait en fait d’une location ou, en cas de rentes perpétuelles, de l’équivalent d’un achat à crédit. Mais la question de l’usure devient plus délicate avec la nouvelle économie, celle dite de marché et liée à l’offre et à la demande. Car cette économie dépend d’avances d’argent pour des entreprises locales, du négoce terrestre de faible ou moyenne amplitude ou du négoce à terme. Le critère du risque lié à tout investissement semble difficile à prendre constamment en compte, ne serait-ce qu’à cause de la multiplicité des affaires dont la conclusion dépend de l’équilibre entre l’offre et la demande. S’appuyant sur les expériences de la pratique et sur les recherches des théologiens qui l’ont précédé, Thomas d’Aquin innove en considérant coupable d’usure celui qui vend un objet supérieur à son juste prix. En bref, il n’est pas question d’un prêt à intérêt puisqu’il s’agit d’un investissement, mais la multiplicité des échanges locaux ainsi que les possibilités de la spéculation rendent nécessaire la confrontation entre les valeurs d’achat et de vente. L’exagération peut être considérée comme revenu anormal donc comme usure. Mais comment peut-on évaluer le juste prix ? En tenant compte de la commune estimation, c’est-à-dire du prix du marché. Saint Thomas assure ainsi la possibilité d’un gain aux producteurs et entrepreneurs des pays neufs de l’Europe occidentale qui ont oublié ou n’ont pas connu les techniques hériées de l’Antiquité, celles de l’approvisionnement des villes assurées par les pouvoirs publics, municipaux ou étatiques. Dans ces contrées, producteurs, entrepreneurs, négociants et hommes d’affaires prennent en mains l’approvisionnement et les moyens de vivre des habitants et ont le droit de tirer profit de leur entreprise ou de leur commerce. Ils peuvent être avantagés ou connaître des handicaps selon les phases de l’économie de marché, mais Thomas d’Aquin et ses collègues moralistes veulent que les rétributions des travailleurs manuels échappent à cet aspect cyclique de la nouvelle économie.
21 Schumpeter remarquait combien Thomas d’Aquin ne négligeait pas les éléments moraux dans l’analyse économique et qu’il fallait attendre la Renaissance pour que la science économique ne se préoccupât plus de la morale. Mais à la fin du deuxième millénaire ne voit-on pas la reviviscence de ces éléments moraux, notamment avec la protection salariale et la recherche de la transparence financière ? [22] Il faut aussi se souvenir que la « recherche économique » médiévale ne s’était pas arrêtée avec Thomas d’Aquin. Veut-on un exemple ? Dans les dernières années du xiiie siècle, des moines de l’abbaye du Saint-Sépulcre de Cambrai justifient la reprise de leur faire-valoir direct en indiquant que seule la production crée des biens « hors de la valeur » c’est-à-dire ajoute à la valeur existante. Peut-on trouver meilleure adaptation à l’économie de marché et justification de la production créatrice de richesses nouvelles à la différence de la rente foncière ou commerciale [23].
Mots-clés éditeurs : juste prix, marché, Usure, valeur, cycles économiques
Mise en ligne 30/09/2014
https://doi.org/10.3917/rdn.356.0697Notes
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Gérard Sivéry, Professeur émérite de l’Université de Lille 3, 513, avenue de la République, 59700 Marcq-en-Baroeul.
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[1]
H. du Passage, « Usure », dans Dictionnaire de théologie catholique, XV, Paris, 1915, p. 2315-2366.
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[2]
Thomas d’Aquin, Summa theologica, IIa IIae, quest. LXXVIII, art. 2, resp. Cf. H. du Passage, « Usure », op. cit. (voir n. 1), p. 2357.
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[3]
Thomas d’Aquin, Summa theological, op. cit. (voir n. 2), IIa IIae, quest. LXXVIII, art. I, resp. et ad. 7, quest. LXI, art. 3, resp. Voir R. de Roover, La pensée économique des scolastiques. Doctrines et methodes, Montréal et Paris, 1971, p. 80-81.
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[4]
L’argent comparé à une semence qui fructifie : Thomas d’Aquin, Summa theologica, op. cit. (voir n. 2), IIa IIae, quest. LXII, art. 4, resp. et ad 1 et 2.
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[5]
R. de Roover, La pensée économique, op. cit. (voir n. 3), p. 78-79 ; H. Hauser, « Les idées économiques de Calvin », dans Les débuts du Capitalisme, Paris, 1931, p. 45-79 ; B. Nelson, The Idea of Usury, Chicago, 1969, p. 73-108 ; G. Fourquin, « Raymond de Roover, historien de la pensée économique », Revue Historique, n° 507, juillet-sept. 1973, p. 19-34.
-
[6]
Saint Thomas d’Aquin, Summa theologica, IIa IIae, art. LXI, art. 4, resp.
-
[7]
J.-A. Schumpeter, History of Economica Analysis, New York, 1954, p. 91.
-
[8]
Id., p. 97 ; R.-H. Tawney, Religion and the Rise of Capitalism, New York, 1926, p. 36 ; R. de Roover, op. cit., p. 10 sq. ; J.-A. Schumpeter, op. cit., p. 93 sq.
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[9]
Thomas d’Aquin, op. cit., IIa IIae quest. LXXVII, art. 1 ; Cajetan, Commentaires de la Somme Théologique, Leonine éd., IX, p. 149 ; R. de Roover, op. cit., p. 56-59 ; G. Fourquin, op. cit., p. 28 sq.
-
[10]
Thomas d’Aquin, op. cit., IIa IIae, quest. LXXVII, art. 2, ad ; de Roover, p. 46.
-
[11]
R. de Roover, op. cit., p. 46-47, n. 66.
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[12]
Id., p. 56 sq ; G. Fourquin, p. 29 sq. ; J.-W. Baldwin, Masters, Princes and Merchants : The Social Views of Peter the Chanter and his Circle, Princeton, 1970, and The Medieval Theories of the Just Price, Philadelphie, 1959.
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[13]
Thomas d’Aquin, De emptione et venditione ad Tempus, opusculum n° 60, Parme éd., XVII, p. 337 et, pour signaler que le prix-récolte de 15 muids est l’équivalent de 10 muids l’hiver, Thomas d’Aquin, Commentum in III librum sententiarum, Parme éd., VII, p. 430 ; R. de Roover, p. 58-59.
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[14]
Pour l’offre et la demande, cf. J. Höffner (professeur à l’Université de Münster, puis cardinal archevêque de Cologne), « Statistik und Dynamik in der scolastichen Wirtschaftsethik », Arbeitsgemeinschaft für Forschung des Landes Nordrhein-Westfalen, Heft n° 38, Cologne, 1955 et au sujet des monopoles, Wirtschaftsethik und Monopole (xve-xvie), Iena, 1941.
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[15]
J. Duns Scot, Questiones in librum IV Sententiarum, Opera omnia, p. 317-318 ; J. Baldwin, Masters…, op. cit. (n. 12) ; R. de Roover, op. cit. (n. 3), p. 59-61 : le SMIG (salaire minimum interprofessionnel garanti, date de 1950, Georges Bidault était alors président du Conseil et Vincent Auriol, président de la République) est devenu le SMIC (salaire minimum interprofessionnel de croissance en 1970, Georges Pompidou était président de la République et Jacques Chaban-Delmas Premier ministre).
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[16]
Saint Thomas d’Aquin, Summa theologica, Ia IIae quest. CXIV, art. 1, resp. ; Merces dicitur quod alicui recompensatur pro retributione operis, vel laboris, quasi qoddam. Pretium ipsius ; R. de Roover, op. cit. (n. 3), p. 72.
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[17]
Saint Thomas d’Aquin, Summa theologica, IIa IIae quest. 77, art. 3, obj. Et rép. 4 ; J. Höffner, Statistik…, op. cit. (n. 14).
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[18]
Cicéron, De officiis, III, 12 ; de Roover, p. 58.
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[19]
G. Sivéry, « Les débuts de l’économie cyclique et de ses crises dans les bassins scaldien et mosan à la fin du xiie et au début du xiiie siècle », Revue du Nord, t. LXIV, nos 254-255, juillet-décembre 1982, p. 667-681.
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[20]
Id., Saint Louis et son siècle, Paris, 1983, p. 168, « L’enquête de 1247 et les dommages de guerre en Tournaisis, en Flandre gallicante et en Artois », Revue du Nord, t. LIX, n° 232, janvier-mars 1977, p. 7-18 ; Id., « Le mécontentement dans le royaume de France et les enquêtes de saint Louis, Revue historique, t. 545, 1983, p. 5-14.
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[21]
Thomas d’Aquin, Summa theologica, IIa-IIae, quest. 62, art. 4, resp. ; J. Noonan, The Scolastic Analysis of Usury, Cambridge (Mass), 1957, p. 107-112.
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[22]
Rapport moral sur l’argent dans le monde en 2002, Association d’Économie financière, 2003 ; J.-A. Schumpeter, op. cit. (n. 7), p. 86 sq.
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[23]
AD Nord, 3 H 1016 sq., cf. 3 H 1017 (compte du 22 juillet 1299 au 22 juillet 1300), G. Sivéry, « La gestion du temporel du Saint-Sépulcre de Cambrai (1298-1360) », Études rurales, 1972, n° 48, p. 120-134.