Notes
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anne-juliette.lecourt@univmed.fr Doctorante en Economie du Travail, Laboratoire d’Economie et de Sociologie du Travail (LEST), UMR 6123.
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philippe.mehaut@univmed.fr Directeur de recherche, Laboratoire d’Economie et de Sociologie du Travail (LEST), UMR 6123.
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Cet article est une version légèrement modifiée d’un texte à paraître dans la Revue Européenne de Formation Professionnelle. La Revue de l’IRES remercie la rédaction de la Revue Européenne pour en avoir autorisé la reproduction. http://www.trainingvillage.gr/etv/projects_networks/EJVT/
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Sources : Insee, enquêtes Emploi (en moyenne annuelle), données révisées en fonction des estimations démographiques 2005 ; calculs DEPP. Et données basées sur estimations Céreq, Formation Continue 2000.
1La reconnaissance de l’apprentissage non formel est l’un des outils que déploient nombre de pays européens dans la perspective de la formation tout au long de la vie [1]. Sa forme peut différer totalement d’un pays à l’autre. C’est « l’agencement des principes politiques, des logiques d’acteurs, des règles et instruments, qui conduit à un régime d’action particulier. Ce régime d’action est alors sociétalement construit, c’est à dire qu’il prend la forme d’une société donnée » (Verdier, 2008).
2En France, la Validation des Acquis de l’Expérience (VAE) n’est pas totalement nouvelle. Elle s’appuie sur la tradition du diplôme et est issue de premières formes de validation des acquis qui remontent aux années 1980. Mais la VAE apporte de nombreuses innovations. Elle ouvre une nouvelle voie d’accès à la certification, en principe obligatoire pour toutes les certifications reconnues. Elle revalorise le rôle joué par l’expérience professionnelle.
3L’objectif de cet article est de présenter dans quelles mesures les caractéristiques institutionnelles et les modes de mise en œuvre de la VAE s’inscrivent dans la continuité du système d’éducation et de formation, mais aussi en quoi cette innovation entame une rupture avec ce système et les règles du marché du travail. Il s’appuie sur une lecture des dispositions légales et sur les premiers travaux analytiques et premières données disponibles. Il ne s’agit pas d’une évaluation du dispositif VAE : développé entre 2002 et 2003, ses effets sont encore récents, non stabilisés et les données précises manquent encore.
4Au-delà du consensus sur la VAE entre les différents acteurs institutionnels, ce nouveau dispositif reste encore flou, dans sa mise en œuvre comme dans son usage et laisse à chaque partenaire l’opportunité de se repositionner dans le système de certification (Partie I). L’accès des individus, les résultats, les succès, les processus de filtrage sont de bons révélateurs des tensions qui traversent le dispositif (Partie II). On peut alors interroger les relations qu’entretient cette nouvelle voie d’accès à la certification avec le rôle du diplôme au sein du système de formation ainsi que sur le marché du travail (Partie III).
I – Un fort consensus entre les acteurs, des stratégies différenciées
5Les valeurs portées par la Validation des Acquis de l’Expérience sont plus ou moins partagées par tous les acteurs. Mais le dispositif est encore imprécis quant à son application et ses usages. Ainsi, une opportunité de repositionnement est donnée à chaque acteur du système de certification, ce qui ne se fait pas sans tensions.
I.1 – Les principes de la Validation des Acquis de l’Expérience (VAE)
6Nicole Péry reprend en 1999 l’idée de la validation des acquis, proposée par Michel de Virville (1996). Il faut favoriser la validation des compétences, peu importe leur mode d’acquisition, l’objectif étant de développer l’accès et l’obtention de certifications. Les débats parlementaires font apparaître plusieurs rationalités (Aubry, 2000 ; Terrier, 2002). Les inégalités d’accès à la certification sont fortes que ce soit par la formation initiale ou par la formation continue. Or la certification est aujourd’hui un élément majeur d’insertion professionnelle durable. Parallèlement, dans un contexte de mutation rapide de l’emploi, l’expérience professionnelle est insuffisamment reconnue par une certification. Pourtant, les individus et les entreprises ont besoin de repères stables pour lire les compétences et connaissances acquises, notamment lorsqu’il y a changement d’employeur. Construire des outils de sécurisation des parcours semble nécessaire. La VAE s’inscrit donc dans un double objectif de lutte contre les inégalités et de fluidité du marché du travail.
7Issue de la loi de modernisation sociale de 2002 (Loi n° 2002-73, 17 janvier 2002, Chapitre II), la Validation des Acquis de l’Expérience (VAE) permet en principe à tout individu (salarié, non salarié, demandeur d’emploi, bénévole, agent public), justifiant d’une expérience personnelle, professionnelle ou bénévole, continue ou discontinue, de trois ans au minimum, de certifier son expérience par un diplôme sans pour autant avoir suivi le cursus de formation. Tous les diplômes, les titres professionnels et autres certifications, inscrits dans le Répertoire National de Certifications Professionnelles créé en même temps que la VAE, sont concernés.
8Les choix faits à cette occasion sont significatifs du modèle français (Aubry, 2000 ; Terrier, 2002) :
9- Ne pas créer de certifications spécifiques à la validation des acquis, ce qui est cohérent avec le modèle français du diplôme (contrairement à la proposition faite par Michel de Virville). Les dispositions de la VAE vont être inscrites dans le Code de l’Education, ce qui marque bien le primat de la dimension éducative.
10- Il ne s’agira donc pas de construire un système distinct mais de s’appuyer sur les diplômes existants, répertoriés dans un Répertoire Nationale des Certifications Professionnelles (RNCP), afin d’améliorer la lisibilité. L’objectif est ici d’une part, de lutter contre la concurrence entre les certifications et d’autre part, de présenter une offre de certification, construite de telle façon qu’elle soit systématiquement accessible par VAE. Toutefois, la commission qui supporte le RNCP, bâtie sur une composition classique de représentation tripartite, s’est vite trouvée tiraillée entre de multiples intérêts. Elle a donc fort logiquement privilégié une logique de consensus large, au détriment de sa fonction de régulation de l’inflation des certifications.
11- Ouvrir en principe toutes les certifications existantes à la validation, ce qui éviterait les conflits entre acteurs éventuellement concurrents dans le système de certification.
12La VAE s’ajoute donc comme une quatrième voie dans le paysage de la certification, au même titre que la formation initiale, la formation continue et l’apprentissage. Mais si les principes de la VAE font plutôt consensus, il n’en va pas nécessairement de même à propos des modalités de son d’application, de la répartition des rôles et des ressources entre les acteurs institutionnels.
I.2 – Syndicats et employeurs : un consensus sur les principes de la VAE, mais pas sans débats
13Depuis 2002, les principes de la VAE ont été soutenus par les syndicats et par les organisations d’employeurs. En 2003, lors de l’Accord National Interprofessionnel relatif à l’accès des salariés à la formation tout au long de la vie professionnelle, ce concept a été considéré comme une opportunité, un outil pouvant contribuer au développement professionnel de l’individu. L’avenant à cet accord (avenant n° 2, du 20 juillet 2005) assure quant à lui le développement de la VAE et les conditions de mise en application : notamment pour l’accès aux Certificats de Qualifications Professionnelle (CQP), la possibilité d’un congé VAE, le fait que les dépenses relatives à la mise en œuvre d’une démarche VAE dans une entreprise puissent être imputées au budget de formation de la firme et/ou à un Organisme Paritaire Collecteur Agréé.
14Pour la plupart des confédérations syndicales, la VAE est considérée comme un avantage pour les salariés, notamment en terme de promotion ou de protection. Elles agissent de manière à faciliter l’accès en VAE, à déployer des aides financières et à développer des politiques d’accompagnement lors du parcours VAE. Néanmoins, des oppositions se manifestent – et existent encore aujourd’hui dans certaines branches ou pour certains métiers, notamment là où prévalent des règles d’accès « occupationnelles » (reposant sur la possession d’un titre ou diplôme) : crainte de la dévalorisation du diplôme, souhait d’une mise en œuvre stricte des procédures, notamment pour ne pas autoriser la validation d’expériences illégales.
15Pour les organisations d’employeurs, la VAE améliorerait le contrôle des coûts de formation. Les employés peuvent valider leur expérience professionnelle sans participer à des sessions de formations formelles. De plus, en passant par la VAE, même si l’individu ne valide pas intégralement, mais seulement partiellement, le diplôme le passage en formation pour acquérir le reste du diplôme pourrait être raccourci.
16Dans les entreprises ou les branches où le diplôme est un repère fort, la VAE est donc une alternative plausible à la formation formelle. Dans certaines entreprises, promouvoir une politique de VAE peut améliorer les accès en formation professionnelle qualifiante et améliorer la mobilité interne. De plus, l’accent étant mis sur l’expérience au travail, la VAE pourrait entrer dans le cadre des politiques de management par les compétences et en devenir un outil essentiel. Néanmoins, il n’est pas sûr que la VAE soit légitimée par l’ensemble des employeurs. Ce qui laisse supposer que la VAE ne sera pas toujours un élément facilitateur de mobilité externe.
17Le cas des Certificats de Qualification Professionnelle (CQP) est aussi révélateur de ces tensions. On sait que certains CQP sont très spécifiques et d’autres plutôt généraux, en concurrence avec les certifications publiques (Veneau, Charraud, Personnaz, 1999). Certaines organisations d’employeurs et organisations syndicales ont été réticentes à l’inscription des CQP au RNCP. D’un côté, elles rejetaient la procédure qui implique que les certifications publiques sont automatiquement intégrées au RNCP, contrairement aux CQP, au nom d’une égalité de traitement entre certifications qui, dans un cas comme dans l’autre, tirent leur légitimité, pour partie ou totalement de leur intervention (commissions professionnelles consultatives, commissions paritaires de branche). Elles souhaitaient que les CQP soient reconnus ailleurs que dans une entreprise ou une branche. De l’autre, elles ne souhaitaient pas que la gestion des CQP sorte de leur branche, au risque d’en voir certains disparaître, pour cause de doublon avec d’autres certifications dans le RNCP. Aujourd’hui, à la demande des organisations syndicales, les CQP sont accessibles par la VAE, sans être nécessairement enregistrés au RNCP. Le conflit semble s’être atténué depuis que les premiers CQP ont été enregistrés. Et plusieurs secteurs soutiennent et encouragent désormais la voie de la VAE pour l’obtention de CQP.
I.3 – Offreurs de formations et de diplômes : la crainte d’une voie concurrentielle à la formation
18Dans la plupart des cas, les offreurs de formation et de certification ont rapidement été capables d’ouvrir l’accès aux certifications via la voie de la VAE. Cette rapide adaptation est notamment due au fait que les changements opérés dans la construction des diplômes avaient commencé bien avant (notamment pour la construction de référentiels métiers et compétences) et que des dispositifs antérieurs à la VAE avaient déjà été testés. Dans d’autres organisations, comme le ministère de la Santé, ce changement a commencé plus récemment, mais se développe rapidement. Toutefois, là aussi, des tensions ont été et sont encore perceptibles, reflétant à la fois le primat accordé en France à la formation initiale (que la VAE vient potentiellement concurrencer) et le modèle de transmission/acquisition des connaissances qui privilégie fortement la formation formelle.
19Lors de la préparation de la loi de 2002, le ministère de l’Education nationale a montré de fortes réticences. On retrouve certaines de ces tensions dans le faible développement de la VAE à l’Université. Dans certaines disciplines, le syndrome du “not in my back yard” est à l’œuvre : la VAE serait peut-être bonne et applicable dans une discipline voisine, mais pas dans la sienne. Certains enseignants et formateurs voient la VAE comme un amoindrissement de la valeur des diplômes. Ne pas passer par la formation formelle ne garantirait pas la qualité des connaissances et compétences acquises. La crainte était d’autant plus grande lorsque la certification possède une forte valeur sociale, comme par exemple celles délivrées par les grandes écoles et écoles d’ingénieurs (Feutrie, 2003). Favoriser l’obtention de certifications partielles pourrait alors être une solution, pour faire passer les candidats par des unités de formation. Certains offreurs de formation craignent aussi que la voie de la VAE soit plus attractive que la voie de la formation. Certains jeunes pourraient privilégier l’expérience professionnelle et revenir la valider par la suite. Ainsi, la VAE conduirait à une baisse des flux de formés et donc de ressources financières.
I.4 – Politique de VAE : une coordination étatique
20Du côté de l’Etat, compte tenu des ambitions affichées et des difficultés de mise en œuvre de la VAE, le besoin de coordination s’est lui aussi fait sentir (IGAS, 2005). Ainsi un Comité interministériel a été créé en 2006. Il est chargé de définir, de coordonner et de veiller à la mise en œuvre et au développement de la politique de VAE.
21Dans ce cadre, un plan pour le développement de la VAE a été élaboré. Il prévoit tout d’abord la mise en place d’une campagne d’information nationale, notamment sur la démarche et sur les points d’informations. Cette campagne cible les individus mais également les entreprises pour encourager les initiatives collectives de VAE. L’objectif est aussi de simplifier et coordonner la démarche administrative face à l’hétérogénéité des pratiques selon les différents certificateurs. Un formulaire national de candidature a donc été créé. Cependant, cette mesure est loin de faire l’unanimité puisque chaque certificateur, au niveau local, avait déjà mis en place ses propres formulaires, en correspondance avec sa propre appropriation de la VAE. Une charte d’accompagnement, pour clarifier le rôle de l’accompagnement auprès des services valideurs et des candidats, a également été élaborée. Toujours pour développer et faciliter le recours à la VAE, un décret a été envisagé pour garantir, sur les fonds de la formation professionnelle, l’indemnisation des jurés. En effet, l’une des principales difficultés ralentissant les délais de démarches VAE est due à la mise en place difficile de jurys, du fait de l’absence de dédommagement prévu dans la loi. Enfin, l’Etat cible sa politique de financement d’une démarche VAE sur les chômeurs. Seuls les chômeurs indemnisés par l’UNEDIC pouvaient bénéficier d’une prise en charge. Il est alors prévu que le ministère de l’Emploi aide financièrement les chômeurs non indemnisés. Un budget de dix millions d’euros a été annoncé qui chevauche parfois l’aide financière prévue par les régions.
22Concernant les aides dirigées vers les entreprises, l’Etat ne soutient pas les entreprises spécifiquement sur la VAE. Il s’agit en fait essentiellement de campagnes de sensibilisation et d’information auprès des entreprises et de recherches de simplification d’une démarche collective de VAE. L’objectif est aussi de communiquer sur des exemples de démarches collectives de VAE réussies dans certaines entreprises. C’est dans ce but que, par exemple, le 15 février 2007 un accord cadre national de développement de la VAE a été signé entre l’Etat, le MEDEF, la CGPME, l’UPA, l’UNAPL et 16 branches professionnelles. Les signataires ont reconnu que face à l’enjeu de compétitivité économique et donc de reconnaissance des compétences, la VAE pouvait être un outil pertinent.
I.5 – Du côté des autorités régionales : gérer un nouveau dispositif
23Tous les dispositifs du système de formation professionnelle sont marqués par la multiplicité des acteurs et de leurs niveaux d’intervention. Un récent rapport s’est d’ailleurs posé la « question fondamentale de la gouvernance du système de formation professionnelle » (Sénat, 2007). Inscrite dans la politique de formation professionnelle, développée sur l’initiative de l’Etat, la VAE est encastrée et reproduit ce système multi niveaux/multi acteurs. Elle n’échappe donc pas aux mêmes tensions, qu’il s’agisse des conflits de prérogatives ou de la mobilisation de sources de financement diverses.
24De 2002 à 2004, la décentralisation de la politique VAE (information, orientation, conseil) a été lancée, mais les autorités régionales s’y sont investies différemment et à des rythmes variables. En 2004, la loi sur les responsabilités locales réaffirme que les autorités régionales doivent organiser sur le territoire le réseau d’information, de conseil et d’orientation (Loi n° 2004-809). Ainsi, l’autorité régionale est théoriquement en charge de coordonner la politique VAE sur son territoire. Mais cela est loin d’être aisé.
25De nombreuses institutions d’information, de politique de l’emploi et de formation jouent le rôle d’information et d’orientation (étape 1 sur le schéma, p. 26) ; certaines dépendent de l’Etat, d’autres de la région, d’autres de collectivités locales ou des partenaires sociaux. Les offreurs de certifications sont aussi concernés puisque les entreprises et les individus peuvent directement s’adresser à eux (lorsque les étapes 1 et 2 du schéma 1 sont confondues).
26Pour fédérer certaines de ces institutions, un réseau officiel d’information et d’orientation pour la VAE et pour la formation continue a été mis en place, au départ principalement via des fonds de l’Etat, puis progressivement sous l’autorité de chaque région.
27Prenons l’exemple de la région Provence Alpes Côtes d’Azur (PACA).
28Elle possédait 17 points relais-conseils sur son territoire, principalement financés par l’Etat. Ce n’est qu’en 2006 que la région décide de prendre l’entière responsabilité de cette politique. Elle supprime les 17 points relais dans le but de mettre en place un réseau plus étendu sur le territoire (80 institutions à l’étape 1, 100 pour les étapes 2 et 3, sur le schéma 1, p. 26). La plupart de ces institutions sont aujourd’hui principalement financées par la région. Elle donne par exemple une somme forfaitaire à l’Université pour qu’elle mette en place un mécanisme de tutorat (lors de l’étape 3 d’évaluation) pour les demandeurs d’emploi. La région PACA a décidé de cibler les chômeurs, se situant alors dans un jeu de concurrence/complémentarité avec la politique étatique de l’emploi. D’autres régions ont fait d’autres choix.
29Le résultat de ce paysage complexe est une architecture encore floue pour les individus et les entreprises, avec des difficultés à comprendre qui est le bon interlocuteur, avec des chevauchements entre les institutions et leurs responsabilités, avec parfois des discontinuités dans la prise en charge financière. La VAE fait donc consensus sur ses valeurs mais différents enjeux et tensions subsistent.
30Le premier est relatif au lien formation/certification. La VAE relance la question du diplôme, de son mode d’acquisition, de ses fondements. L’hypothèse centrale du dispositif VAE est que l’expérience permet de développer des compétences qui ont la même valeur que des situations de formation formelles. La VAE concrétise l’indépendance entre la valeur d’une certification et le cursus pour obtenir ce titre. En tant que dispositif à vocation générale, elle vient donc bousculer le système éducatif français si marqué par la formation formelle. L’évaluation, traditionnellement encadrée par les formateurs, va devoir être réinterrogée.
31Le deuxième enjeu concerne la coordination des acteurs concernés. L’ouverture de la VAE à tous les ministères atténue le monopole de l’Education nationale… Mais la perte de pouvoir se situe également au niveau du formateur lui-même puisque les formateurs ne sont plus seuls à transmettre des connaissances. Ce n’est plus la même personne, comme dans une formation initiale ou continue classique, qui forme, enseigne et attribue le diplôme. Il va donc falloir construire un socle commun, une culture commune en matière d’évaluation, notamment de l’expérience, de l’emploi occupé et du diplôme visé.
32Enfin, le troisième enjeu porte sur la mise en œuvre d’un droit individuel dans un cadre collectif, ainsi que sur l’utilisation qui sera faite de ce droit et du diplôme obtenu via la VAE. Quels individus vont s’en saisir ? Quels soutiens (financiers et méthodologiques) vont-être mis en place ? Quels retours sur investissement pour les nouveaux diplômés ? Rien ne sera possible si la VAE n’est pas perçue par les employeurs comme un dispositif efficace, notamment moins onéreux et moins long pour les financeurs que la formation continue traditionnelle et ainsi un moyen d’accompagner la mobilité, la fidélisation de leurs salariés ou bien un moyen d’améliorer l’image sociale de l’entreprise et de donner aux salariés l’assurance de la prise en compte de leurs problèmes sociaux.
II – Les parcours individuels en VAE
33Le parcours de VAE peut se décomposer en plusieurs étapes (schéma p. 26). Le plus souvent, l’individu débute sa démarche par une demande d’informations (étape1) auprès de structures gérées par les Régions ou auprès de services d’informations propres aux certificateurs eux-mêmes. Puis, il se dirige vers un service valideur (ministères et services déconcentrés, Chambres de commerce et d’industrie, etc.) (étape 2). Si la candidature au diplôme demandé est acceptée (étape 3), le candidat devra entrer, accompagné ou non, dans une démarche de valorisation de son expérience (constitution d’un dossier, explicitation de son expérience, de son parcours, de ses motivations, etc.). Par la suite, il se présentera devant un jury (étape 4) composé de professionnels et de formateurs pour exposer son travail (exposé oral et/ou mise en situation), puis obtiendra la validation totale ou partielle de son expérience. Dans le premier cas, l’individu sortira du dispositif VAE et rentrera alors dans une démarche de valorisation de son diplôme sur le marché du travail et/ou dans le système de formation (poursuite d’études). Dans le second cas, si les connaissances constituées par l’expérience ne semblent pas suffisantes, l’individu doit repasser devant le jury, en ayant préalablement accompli les prescriptions du jury (dossier à accomplir, période de formation, etc.). Un tuteur est parfois désigné pour cette étape.
34La sortie ou l’abandon du dispositif est possible à chaque niveau de la démarche.
Schéma 1
Schéma 1
II.1 – Une démarche longue et difficile
35Un parcours VAE est « une démarche longue, complexe et sans aucune certitude sur les résultats » (Personnaz, Quintero et Séchaud, 2005). En effet, le différentiel des effectifs de candidats à la VAE, de l’étape 1 à 5, dans le tableau ci-dessous, laisse supposer que plusieurs phénomènes se mettent en œuvre, expliquant notamment la perte d’effectifs au cours de la démarche ou le taux de réussite en VAE.
Etape 1 et 2 : De la demande d’informations à la recevabilité
36Les demandes d’informations ont considérablement augmenté. En 2003, plus de 44 000 individus ont été accueillis en points relais conseils et 90 000 en 2006, ce qui témoigne de la visibilité croissante du dispositif. Cette progression s’explique par ailleurs aussi pour partie par l’extension du champ des possibles (entrée en lice de nouveaux ministères et de nouvelles certifications accessibles en VAE). Comme nous allons le voir, compte tenu du taux de perte aux différentes étapes, on est de fait loin des ambitions affichées au départ.
37En effet, les demandes d’information ne sont pas nécessairement suivies de l’étape suivante. Nous observons un taux de fuite des candidats potentiels de 33 % de l’étape 1 à 2, en 2006 (Labruyère, 2005 et 2006 ; DGEFP, 2007). Ces candidats ont choisi de ne pas continuer vers la VAE (par choix ou découragement) ou ils n’ont pas été orientés ou acceptés en VAE, parce que la VAE ne convenait pas (expérience insuffisante, projet qui ne correspond pas…). Il existe donc un filtre dès le départ.
38L’enjeu de repérage dans le système et ses différentes voies de certification pour les individus et les entreprises reste difficile à surmonter et semble une source de découragement (Personnaz, Quintero et Séchaud, 2005 ; Layec, Leguy, Bataille, Penso-Latouche, Merle, Vern, 2006). Face à une offre de diplômes extrêmement large, il n’est pas inhabituel de choisir ou d’être envoyé par un conseiller vers la mauvaise voie ou la mauvaise certification.
39Les entreprises procèdent également à des sélections internes pour assurer une réussite de la démarche. Elles peuvent filtrer et ne garder que les bons candidats, au regard de caractéristiques individuelles, de la bonne ou mauvaise expérience professionnelle, des difficultés de communication écrite et orale, etc.
Etape 3 : Explicitation de l’expérience
40Lors du travail d’explicitation, le candidat, accompagné ou non, devra expliciter les compétences, capacités et savoir tirés de l’expérience en question, pour les mettre ensuite en correspondance avec le référentiel du diplôme visé. L’une des grandes questions posées à ce stade est celle du caractère formateur ou non de ce processus. S’il s’agit d’une simple mise en forme de connaissances déjà acquises, la VAE est alors un processus de signalement de compétences. Si, lors de cette phase, le processus d’explicitation de l’expérience permet une véritable montée en compétences du salarié, l’amélioration de ses capacités cognitives et subjectives permettant de prendre conscience de ses connaissances et de ses compétences (Leplâtre, 2005), alors la VAE est aussi un dispositif de production et pas seulement de mise en forme de connaissance. Cette deuxième hypothèse était déjà soutenue par certains travaux portant sur l’ancien dispositif de Validation des Acquis Professionnels (Clot et al., 2000).
Etape 4 : Le passage devant le jury
41En 2006, de l’étape de recevabilité au passage devant le jury, on observe un taux de fuite de 20 %. Ce taux tend à diminuer par rapport à 2005 (-23 %). Peu de candidats quittent le dispositif entre la recevabilité et le passage devant le jury. Durant l’étape 3, les candidats sont-ils plus compétents qu’avant ? Les acteurs sont-ils plus professionnalisés, l’accompagnement meilleur et le dispositif plus lisible ? Ou bien les candidats son-tils mieux filtrés lors de l’examen de la recevabilité ? En moyenne, le taux de fuite entre la demande d’information (étape1) et le passage devant le jury (étape 4) tend à se maintenir (environ 50 %). Cependant, le taux de maintien des candidats augmente au sein du dispositif, de la recevabilité jusqu’au passage devant le jury (étape 2 à 4). C’est donc probablement au niveau de la première étape de demande d’information et d’orientation que se situe l’un des enjeux cruciaux pour le dispositif VAE.
Etape 5 : le résultat de la démarche
42Le nombre de diplômes obtenus et le taux de réussite augmentent depuis 2003 de l’étape 4 à l’étape 5. Des inquiétudes existaient sur la capacité des jurys à traiter de cette nouvelle procédure. On pouvait aussi s’interroger sur les risques d’une sur-sélection par les jurys compte tenu des réticences de certains formateurs. Tel ne semble pas être le cas.
43Certes, si l’on compare les taux de succès, on remarque que les taux varient considérablement d’un type de diplôme à l’autre et d’une spécialité à l’autre au sein d’un même diplôme. Il existe par exemple un taux de réussite de 71 % pour les CAP délivrés par l’Education nationale en 2005 (DGEFP, 2007), contre 54 % pour les BTS du même ministère. Mais ces taux de réussite sont très proches de ceux de la Formation Professionnelle Continue (FPC). Ainsi, en 2005 (DGEFP, 2007), le taux d’obtention d’un CAP de l’Education nationale est 81 % via la formation continue ; le taux de réussite est identique pour l’obtention d’un BTS par la formation professionnelle continue (54 %) ou par la VAE. Mais les taux sont parfois plus défavorables pour la VAE, notamment pour l’obtention d’un Brevet Professionnel (41 % via la VAE contre 70 % par la formation continue). Notons que ces chiffres ne comprennent pas les validations partielles. En ne considérant pas celles-ci comme des échecs, nous obtiendrions des résultats encore meilleurs en VAE. Ici aussi, les taux de réussite comparatifs entre la VAE et la FPC dépendent des spécialités des diplômes.
44En résumé, les taux de succès augmentent et la VAE atteint des résultats semblables à la FPC. On peut donc supposer que les jurys ne sont pas plus sélectifs qu’en FPC. On peut aussi formuler l’hypothèse que la sélectivité avant le passage devant le jury est plus forte en VAE, et donc que les candidats sont meilleurs que ceux de la voie formation continue. A ce stade, aucune donnée ne permet de tester l’une ou l’autre des hypothèses.
45Les données précédentes et les travaux réalisés sur les parcours en VAE (Personnaz, Quintero et Séchaud ; 2005) observent qu’une démarche réussie implique un jeu vertueux de ressources pour parvenir au terme d’une démarche VAE. L’investissement personnel et financier que représente la VAE est un facteur important de découragement. Après s’être renseignés ou avoir commencé une démarche VAE, certains préféreront passer par la formation formelle.
46Un environnement favorable est indispensable : bénéficier d’une information suffisante pour faire le choix de la certification adéquate, bénéficier de mesures d’accompagnement de la part des entreprises et des institutions VAE, surtout lors de la phase complexe d’explicitation de l’expérience en concordance avec le diplôme visé : tutorat, aide financière, avoir confiance en soi, connaître une situation stable. Il semble évident que les impacts négatifs du chômage comme le manque de confiance en soi (la peur de l’échec) ou qu’un environnement familial difficile, etc., puissent freiner tout engagement dans la VAE. Certains candidats reporteront la démarche en attendant des conditions plus favorables.
47L’abandon peut également être lié à la motivation initiale de l’individu. Si le but premier est de retrouver un emploi pour les chômeurs, le fait de retrouver un emploi en cours de démarche pourra être un facteur d’abandon.
48Il faut enfin souligner que lorsque le candidat obtient une certification partielle, il retombe souvent dans le droit commun de la formation formelle, comme c’est souvent le cas dans le cadre d’initiatives d’entreprise et surtout pour les premiers niveaux de certifications (Liaroutzos, Paddeu et Lozier, 2003). Or, dans la lignée des débats sur l’individualisation (Correia et al., 2004 et 2005) et sur la sécurisation des parcours, l’offre de formation et les modalités de soutien s’avèrent aujourd’hui très mal adaptées à des demandes de formation modulaires liées à des parcours personnels complexes et à des validations partielles de l’expérience.
II.2 – Des motivations individuelles tournées principalement vers le marché du travail
49En 2006, les diplôme les plus demandés via la VAE (notons qu’il s’agit seulement des dossiers présentés devant le jury) (DGEFP, 2007), correspondent aux diplômes des services à la personne : 25.5 % (dont 19 % de Diplôme d’Etat d’Auxiliaire de Vie Sociale du ministère des Affaires Sociales ; 6.5 % de titres professionnels d’Assistante de Vie du ministère de l’Emploi). Contrairement aux autres certificateurs (Enseignement Supérieur, ministère de l’Agriculture, ministère de la Jeunesse et des Sports), ces demandes sont essentiellement émises par des femmes, peu ou non qualifiées, ce qui correspond au taux de féminisation de ce secteur. Ensuite, 8.2 % sont des dossiers de BTS (Education nationale), 5 % représentent des dossiers pour des CAP petite enfance (Education nationale) et 2.5 % sont des dossiers de bac pro des métiers de la sécurité (option police, Education nationale). Il paraît ici très clair que les demandes de VAE ont un objectif de valorisation directe sur le marché du travail puisque nombre de ces diplômes sont obligatoires à l’exercice du métier ou facilitent l’obtention d’un emploi dans le domaine.
50En 2006 (DGEFP, 2007 ; Labruyère, 2006), un tiers des candidats sont au chômage. La part des chômeurs est naturellement plus haute pour les certifications du ministère du Travail, qui a principalement tourné son dispositif et ses aides financières vers ce public. L’objectif de valorisation directe sur le marché du travail est confirmé (logique de protection et d’insertion chez les chômeurs et les salariés précarisés, Personnaz, Quintero et Séchaud, 2005).
51Les candidats salariés et déjà diplômés sont plus nombreux au ministère de l’Education nationale et spécialement dans l’enseignement supérieur (essentiellement de niveau Bac + III et Bac + IV). Ces individus, connaissant souvent des perspectives de carrières, veulent obtenir une reconnaissance sociale et réduire la différence qui existe entre leur emploi effectif et leur niveau initial de formation. Mais si ces candidats sont tournés vers une rentabilité directe sur le marché du travail (promotion, réorientation, stabilisation sur le marché du travail), l’objectif peut aussi être parfois une reprise d’études, raccourcie via la VAE (Pons-Desoutter. M, 2007).
52La voie de la VAE est même parfois préférée à la FPC pour l’obtention de ces diplômes. Lorsque l’on compare ces deux voies, concernant les diplômes de l’Education nationale, en 2006 (DGEFP, 2007), les diplômés d’un BTS hôtellerie-restauration sont majoritairement passés par la VAE (53 %). Il en est de même pour les métiers de la sécurité (65 % pour l’option police nationale ; 70 % pour le bac professionnel sécurité/police).
53Pour de nombreux autres diplômes, la VAE occupe une place non négligeable (37 % pour les BTS Electrotechnique, 39 % pour les baccalauréats des services et 42 % pour les CAP Petite enfance). Ces chiffres s’expliquent parfois par le fait que des salariés déjà en fonction dans le secteur du diplôme visé sont obligés d’obtenir la certification pour continuer à exercer. La VAE leur semblerait alors plus adéquate, surtout lorsque l’institution certificatrice a choisi la mise en situation comme modalité de passage devant le jury, notamment pour des demandes de niveau V.
54La motivation première des candidats est donc plutôt tournée directement vers le marché du travail. Ainsi, il semble que le rôle du diplôme en matière d’insertion professionnelle durable et de mobilité externe soit intégré par tous. Mais d’autres motivations, plus ou moins déconnectées du marché du travail, telle que la reprise d’études ou le besoin de reconnaissance sociale, sont aussi présentes dans le dispositif. La VAE corrobore donc le modèle du diplôme français, que l’on parle de la valeur externe du diplôme comme de sa valeur interne au système éducatif.
III – La VAE au sein du système de formation et du marché du travail
55Comment lire alors le dispositif, ses caractéristiques et ses usages au regard des principaux traits sociétaux du système de formation et du marché du travail ?
III.1 – Le « modèle » français de VAE
56Comme la plupart des autres dispositifs européens de validation, la VAE à la française peut être située sur deux dimensions.
57La première concerne le type de compétences/connaissances que l’on cherche à valider. On peut ainsi opposer des dispositifs dont la finalité première est en principe tournée vers le marché du travail à des dispositifs plus articulés à des finalités éducatives. Dans le premier cas, compétences et connaissances sont censées avoir une valeur immédiate sur le marché du travail. Le plus souvent, on cherche à valider des grains de compétences correspondant à des tâches ou fonctions élémentaires. Ces grains ne sont pas nécessairement articulés entre eux, ni avec le système de certification à l’œuvre dans la formation formelle. Les NVQ à l’anglaise sont emblématiques de ce choix (Bessy, 2000). Dans le deuxième cas, sans exclure une finalité « marché du travail », il s’agit d’inscrire la validation dans le système national de titres et de diplômes, en quelque sorte de construire une parité d’estime entre la voie de la validation et les autres voies de formation formelle. L’une des conséquences est que les gains de compétences à valider sont plus gros et/ou articulés entre eux. Le modèle français de VAE s’inscrit dans cette perspective, avec son choix de ne pas créer de certifications spécifiques à la VAE. L’objectif premier est l’acquisition d’un titre équivalent à celui de la formation initiale. Toutefois, l’hétérogénéité interne du système de titres et diplômes introduit une nuance. On sait que les diplômes décernés par le ministère de l’Education sont fortement marqués par la double finalité de ces diplômes (finalités éducatives et sur le marché du travail). Ce sera moins vrai des titres du ministère du Travail, dont la finalité en principe unique est celle du marché du travail. Toutefois, le fait que ces deux catégories de certification coexistent (avec d’autres) au sein d’un seul et même répertoire national et qu’elles y soient toutes classées par niveaux, avec une forme d’équivalence implicite permettant de faire valoir un diplôme en amont d’un titre ou vice versa, pousse à leur rapprochement.
58La deuxième dimension est celle du mode de légitimation sociale des titres ou diplômes. Dans certains pays, ce mode repose essentiellement sur une logique de marché. Les organismes certificateurs se positionnent sur un marché des certifications. Ils sont souvent indépendants des organismes formateurs. La confiance dans leurs titres repose sur un double processus : un contrôle qualité, qui revient souvent à un autre acteur (contrôle qualité de type norme ISO) et la sanction par le marché du travail. Là encore, ce modèle est typique du Royaume Uni. En France, même s’il existe d’autres éléments forts de différentiation, la légitimité et les modes d’élaboration des titres et diplômes reposent sur une forme de régulation par des acteurs centraux, qu’il s’agisse de l’Etat, des seuls partenaires sociaux ou d’une articulation plus complexe entre eux. La forme prise par la VAE fait écho à ce modèle.
59Les choix quant au modèle de VAE (pas de certification spécifique, un RNCP unique, des jurys similaires dans leur composition…) reflètent donc bien les caractéristiques sociétales fortes du système français de formation et de son mode d’articulation au marché du travail. Mais la VAE introduit aussi une rupture dans ce modèle, notamment en créant un pont entre formation continue, validation de l’expérience et un système de certification plutôt caractéristique de la formation initiale, marqué par une coupure forte entre formation initiale et continue (Verdier, 2008). Cette rupture, dont nous avons vu qu’elle est source de tension, porte principalement sur les modalités d’acquisition de connaissances et de compétences. Dans le modèle scolaire à la française (qui trouve son prolongement dans la formation continue formelle), il n’y a d’accumulation de connaissances que par la formation. La VAE suggère une autre voie. En rupture avec la représentation dominante d’un travail consommateur ou même destructeur de connaissance, elle propose une autre lecture du travail et de la validation des compétences acquises. En ce sens, elle interroge le modèle français du diplôme.
III.2 – Une spécificité : la double valeur de la plupart des certifications
60L’attention doit être portée sur la double valeur des diplômes. Si les diplômes décernés par le ministère de l’Emploi (essentiellement pour les adultes et chômeurs) ont principalement une valeur sur le marché du travail, ceux du ministère de l’Education ont une double valeur : ils ont en principe un rôle externe sur le marché du travail et un rôle interne au sein du système d’éducation et de formation (Méhaut, 1997) :
61ß Valeur interne : un diplôme professionnel atteste de l’achèvement d’un certain niveau d’étude dans la hiérarchie nationale des diplômes, permettant d’accéder au niveau supérieur.
62ß Valeur externe : le diplôme fournit un indicateur au marché du travail, qui est plus ou moins institutionnalisé selon les règles du marché.
63Cette double valeur du diplôme est une source constante de tension, en particulier entre ceux qui portent plus d’intérêt à l’une et l’autre de ces valeurs. On peut par exemple privilégier la valeur immédiate du diplôme au risque de voir diminuer sa valeur sur le système éducatif et vice versa. Située dans ce modèle, la VAE n’échappe pas à ces tensions (réticences des enseignants, diversité des motivations individuelles à la VAE, comme nous l’avons vu précédemment).
64Néanmoins, la VAE contribue à d’importants changements dans la conception des processus d’apprentissage et de certifications. Apprendre était auparavant associé aux bases éducatives seulement acquises à l’école et le lieu de travail était considéré comme un lieu de destruction des connaissances plutôt que de développement de celles-ci (contrairement à d’autres pays comme ceux qui possèdent un système dual d’apprentissage). L’unité de mesure des connaissances était les heures de cours (Gehin, Méhaut, 1993). Cette vision a évolué. Aujourd’hui, le lieu de travail et l’expérience professionnelle sont considérés comme facteurs de montée en compétences. Le développement du management par les compétences, de l’apprentissage et la création de la VAE le démontrent. Les règles et les concepts touchant à la VAE contribuent à ce changement, qui s’est amorcé dans les années 1980 avec le développement de l’alternance (Monaco, 1993).
65D’abord la VAE pourrait faire évoluer les comportements au regard de la formation continue et initiale, en offrant une nouvelle voie d’accès à la certification tout au long de la vie. Elle pourrait contrecarrer les limites du système de formation continue, qui est principalement basé sur l’entreprise et qui a essentiellement déployé des formations courtes et adaptatives à l’évolution du travail. Il n’y a pas beaucoup d’opportunités d’obtention de formations diplômantes et le système de promotion sociale, qui avait pour objectif d’offrir une seconde chance aux individus via le système d’éducation et de formation continue, est en déclin (Dubar, 1999). Ensuite, elle pourrait faire évoluer les comportements individuels au regard de l’éducation initiale en rendant plus plausible l’acquisition d’un diplôme (ou la progression dans la hiérarchie des diplômes) au-delà de la formation initiale. D’autres stratégies d’investissement en formation pourraient donc apparaître. Toutefois, cela suppose d’une part que les diplômes attribués en VAE atteignent une certaine visibilité sociale et donc une masse critique qui est loin d’être atteinte aujourd’hui. Cela suppose d’autre part que leur rentabilité soit prouvée, ce qui nous renvoie au marché du travail.
III.3 – De nouvelles règles sur les marchés du travail ?
66La plupart des travaux s’accordent à caractériser le marché du travail français comme dominé par les règles du marché interne (MIT) (i.e. ancienneté comme principal indicateur, promotion basée sur l’expérience, hiérarchie verticale avec des portes d’entrées par le bas). Cette image est cependant controversée.
67D’un côté le fonctionnement de ce marché évolue, ses règles changent. D’un autre côté, de nouveaux types de marchés du travail se développent, comme le marché « secondaire » et externe qui met l’accent sur les services et travailleurs non qualifiés (Valette, 2007). Toutefois de nouvelles sortes de marchés du travail de niveau supérieur destinés aux professionnels se développent (Beffa, Boyer, Touffu, 1999). Ces marchés permettent aux travailleurs de passer d’une firme à une autre, au regard de leurs compétences, certifications et réputation. Ici, la certification pourrait jouer un rôle de confortement de l’expérience. Par ailleurs, des règles professionnelles tendraient à s’étendre pour l’accès à certains marchés du travail, même si cela est hautement controversé (Cahuc et Kramarz, 2004). C’est le cas dans les services à la personne (maisons de soins, soins à domicile, garde des jeunes enfants), mais aussi dans plusieurs activités où la qualité des biens et services est en question (secteur de la sécurité, de l’alimentaire). Les procédures d’agrément qualité (ISO) mènent aussi parfois à la nécessité d’augmenter la part des travailleurs diplômés dans l’entreprise. Là encore, la VAE viendrait à la fois renforcer les règles occupationnelles (exigence du diplôme) tout en offrant de nouvelles opportunités pour se conforter à ces règles.
68Comment situer la VAE dans ces évolutions ? Même si cela concerne une minorité des entreprises, le développement du management par les compétences traduit une réorganisation des règles des marchés internes.
69Dans ce management par les compétences, les travailleurs sont évalués chaque année en correspondance à un référentiel compétences. De plus, ces entreprises essaient de développer de nouvelles organisations de l’emploi, aussi bien que de nouveaux managements de carrières (Kalck, Marquette, Monchatre, 2002). Dans la plupart des cas, le point est porté sur la réorganisation des critères de mobilité interne. Souvent cette gestion par les compétences est présentée comme une alternative au diplôme et à la formation. Mais dans les faits, elle peut s’appuyer aussi sur eux. Par exemple, dans l’étude de Béret et Lewandowski (2005), la firme de microélectronique pratiquait une politique de formation basée d’une part sur un management par les certifications et de l’autre par les compétences, de façon bien dissociée. Puis, cette firme a pu dresser un pont entre les deux en articulant progressivement la VAE au sein du management par les compétences. Dans certaines entreprises c’est au niveau du groupe que se pose la question de la mobilité. La VAE est alors un moyen de créer une visibilité des compétences transversales au groupe (Brochier, Guitton, Legay, Machado, 2007). D’autant qu’elle est aussi un argument de recrutement comme opportunité proposée à des publics peu ou pas qualifiés.
70De plus, les firmes et les individus cherchent plus de marge de manœuvre au sein du marché du travail externe. Des entreprises souhaitent explicitement que des travailleurs quittent volontairement leur emploi, dans le but d’avoir l’opportunité de remodeler la force de travail. D’autres, par anticipation, pensent que les salariés diplômés seront plus transférables et seront plus à même de bouger au sein du marché externe. La VAE s’inscrirait alors dans une politique d’accroissement des opportunités de mobilité externe et, éventuellement, d’érosion des marchés internes, au profit de règles portant plus sur l’obtention d’un diplôme. Enfin, la VAE s’inscrit dans les politiques de recrutement. On sait qu’en France, le diplôme joue un rôle fort comme critère de sélection, nécessaire mais non suffisant. Les non diplômés sont les plus fragilisés sur le marché du travail et leur taux de chômage est significativement plus élevé. La VAE est alors l’un des outils de la politique publique de l’emploi en direction de cette catégorie. Mais, au-delà, le diplôme tend, dans certaines activités et professions à devenir une norme obligatoire, pour garantir une certaine qualité de service, éventuellement pour lutter contre certaines formes de dumping social. Le cas du secteur des soins à la personne est un bon exemple de ce débat. Les établissements d’accueil de personnes âgées (avec le vieillissement de la population) et les structures d’accueil pour les enfants sont perçues comme un potentiel d’emploi avec la demande croissante de ces services. Une question est alors soulevée : ces services pourront-ils être assurés par des femmes non qualifiées, disposant seulement de leurs expériences personnelles et familiales ou ont-ils besoin de personnel diplômé ? Dans certaines professions, le diplôme est obligatoire pour exercer, comme dans le cas des aides soignants ou pour certains types de soins à domicile. Cela a aussi été débattu pour les assistantes scolaires dans les écoles maternelles. De fait, la VAE est ici totalement inscrite dans des enjeux qui touchent au fonctionnement des divers marchés du travail, aux règles qui les organisent. Elle est à la fois porteuse de subversion (l’expérience versus la formation) et de confortement (le diplôme versus l’ancienneté). On comprend alors pourquoi, au delà du consensus fondamental autour de son principe, de multiples tensions apparaissent au niveau de sa mise en œuvre.
Conclusion
71La VAE est encore une politique jeune mais son développement est très marqué par quelques caractéristiques sociétales fortes du système de formation et de certification et du marché du travail. Les difficultés rencontrées, les échecs et les succès en découlent.
72Ainsi, le mode de légitimation du diplôme VAE suit le modèle traditionnel du diplôme. La VAE hérite des tensions émanant de la double valeur du diplôme, ce qui explique les nombreuses résistances du système éducatif par exemple ou encore la possibilité d’entrevoir des motivations individuelles d’entrée en VAE diverses (valorisation directe ou non sur le marché du travail).
73La VAE est également encastrée au sein de composantes de la politique publique. Elle est l’un des outils de la politique publique active de l’emploi. Elle fait alors écho aux règles de fonctionnement du marché du travail et de ses politiques de recrutement, en relançant le rôle du diplôme. Enfin, la VAE est aussi influencée par la nouvelle étape de décentralisation du système d’éducation et de formation, qui redistribue les différents rôles des acteurs.
74Ceci aboutit à certaines tensions et à certains chevauchements entre les institutions et leurs responsabilités. L’accès des individus, les résultats, les succès, les processus de filtrage sont de bons révélateurs des tensions qui traversent le dispositif.
75Mais cette innovation entame aussi une rupture avec le système du diplôme et répond ainsi à des enjeux sociopolitiques et économiques nouveaux.
76Les règles de la VAE contribuent par exemple à appuyer l’évolution déjà entamée de la conception des apprentissages. La VAE crée un pont entre la formation tout au long de la vie et le système de certification, régulé essentiellement par la formation initiale. Les politiques de formations des entreprises et les stratégies individuelles d’accès à la formation et à la certification en seront alors modifiées.
77Enfin, la VAE semble accompagner l’évolution des règles de fonctionnement du marché du travail, dominé traditionnellement en France par le marché interne. La VAE pourrait donc être un outil d’accompagnement de ces mouvements en s’inscrivant dans une politique d’accroissement des opportunités externes et éventuellement d’érosion des marchés internes, tout en contribuant à la sécurisation des parcours par la mise en forme et le signalement de l’expérience.
78Toutefois, le diplôme obtenu par voie de VAE doit encore prouver sa rentabilité sur le marché du travail. Etat, Régions, entreprises et partenaires sociaux sont confrontés à ce défi, dont dépendra, in fine, l’avenir d’une VAE qui restera anecdotique ou non. Aujourd’hui 26 000 diplômes en moyenne sont délivrés en VAE (probablement un peu plus avec les CQP), soit environ 4 % de ceux délivrés en formation initiale et continue. Ces 26 000 diplômés représentent environ 30 % du flux annuel des sorties sans qualifications du système éducatif [2]. Seule une masse critique de diplômes acquis en VAE, non vérifiée à ce jour, permettrait de valider l’hypothèse d’une rupture avec le modèle français du diplôme.
Bibliographie
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- Virville de. M, (1996) « Donner un nouvel élan à la formation professionnelle », Rapport La documentation française, octobre.
Notes
-
[*]
anne-juliette.lecourt@univmed.fr Doctorante en Economie du Travail, Laboratoire d’Economie et de Sociologie du Travail (LEST), UMR 6123.
-
[**]
philippe.mehaut@univmed.fr Directeur de recherche, Laboratoire d’Economie et de Sociologie du Travail (LEST), UMR 6123.
-
[1]
Cet article est une version légèrement modifiée d’un texte à paraître dans la Revue Européenne de Formation Professionnelle. La Revue de l’IRES remercie la rédaction de la Revue Européenne pour en avoir autorisé la reproduction. http://www.trainingvillage.gr/etv/projects_networks/EJVT/
-
[2]
Sources : Insee, enquêtes Emploi (en moyenne annuelle), données révisées en fonction des estimations démographiques 2005 ; calculs DEPP. Et données basées sur estimations Céreq, Formation Continue 2000.