Couverture de RDLI_053

Article de revue

Enjeux syndicaux. L'enlisement de la formation professionnelle continue

Pages 51 à 81

Notes

  • [*]
    Responsable de la prospective à l’Afpa, Chargé d’enseignement à l’université de Paris 1.
  • [1]
    Estimations sur la base des données Dgefp/Dares, PLF 2006, PLF 2007.
  • [2]
    Les liens quasi-organiques entre les différentes variétés de la social-démocratie européenne et les syndicats de salariés furent souvent vampirisés notamment par les fonctions gouvernementales des partis sociaux-démocrates. De ce point de vue il serait inexact de présenter l’actuelle crise syndicale en France comme une exception, les syndicats scandinaves ou allemands sont également traversés par des délitements et des pertes d’influence qui résultent d’une trop grande intégration dans les rouages institutionnels.
  • [3]
    On peut consulter à ce sujet les remarques du dernier rapport public de la Cour des comptes sur « la collecte de la contribution des entreprises à la formation professionnelle », page 249 et suivantes.

Introduction

1Le fil conducteur permettant d’articuler la formation professionnelle continue (FPC) avec les principales questions qui structurent la négociation collective n’a pas été véritablement trouvé. La FPC est un système qui s’est, en quelque sorte, autonomisé alors même que les mutations du travail et les transformations de l’emploi et du marché du travail l’interpellaient de façon directe. La prolifération des accords interprofessionnels et de branches dans le champ de la formation continue depuis 1970 ne change rien au fait que cette question reste étrangère à la vie quotidienne de la très grande majorité des salariés. On peut même estimer, sans craindre d’être démenti par les statistiques, que les ouvriers et les employés de notre pays ont surtout entendu parler de formation au moment des licenciements économiques collectifs et au fur et à mesure que le chômage de masse se développait.

2A vouloir faire de la formation professionnelle un élément du traitement social du chômage on l’a plus souvent dénaturée et dévoyée que promue. L’accord interprofessionnel du 20 septembre 2003 (signé par l’ensemble des organisations professionnelles et syndicales) et la loi du 7 avril 2004 ne dérogent pas à la règle. Si la formation initiale s’est imposée comme référence pour toute la société, l’investissement-formation durant la vie active n’a pas résisté à l’absence de compromis sur la question des mobilités professionnelles des salariés qui, en d’autres termes, ressurgit aujourd’hui dans le débat sur la sécurisation des parcours. La formation continue qui n’a de portée que par rapport à cet enjeu n’a donc pas pu être régulée et gérée convenablement sous l’angle de la négociation collective et plus largement comme élément du pacte social français. Pourtant le poids du paritarisme dans le système d’ensemble de formation qui pèse plus de 25 milliards € nécessite une attention particulière quant à son influence sur les perspectives professionnelles de celles et ceux qui ont eu la scolarité la plus courte et qui exercent les emplois les plus dépréciés.

3Certes la formation continue n’est pas le seul outil promotionnel et de nombreux salariés ont évolué professionnellement par l’autoformation et l’expérience dans le travail ou en dehors. Ainsi les mobilités ascendantes de la période 1998-2003 ont été plus fréquentes que pour 1980-1985 (Monso, 2006) pour les employés non qualifiés (hommes et femmes) et les ouvriers non qualifiés. En réalité c’est la progression des déclassements en début de carrière qui explique ce mouvement. Ainsi la part croissante de jeunes diplômés qui occupent d’abord des emplois du bas de l’échelle puis qui évoluent rapidement sur des emplois plus qualifiés compense et masque la stagnation professionnelle des adultes peu diplômés et le poids marginal de la formation promotionnelle. De nombreux rapports ont d’ailleurs souligné depuis 20 ans la tendance de la FPC à reproduire les inégalités sociales et professionnelles, ce qui est un paradoxe pour un système financé essentiellement par les prélèvements obligatoires et dont on peut penser qu’ils servent prioritairement à compenser les déterminismes sociaux.

4Quant à l’enseignement professionnel, il est resté en dehors de toute appréciation qualitative partagée de la part des représentants du monde professionnel. La coexistence de plusieurs dispositifs à finalité qualifiante liés à la floraison de diplômes, titres ou certificats professionnels en est l’illustration. En effet à côté de l’enseignement professionnel de type scolaire on compte au moins trois autres dispositifs (l’apprentissage, l’Afpa et les contrats de professionnalisation) qui s’appuient sur des structures de formation distinctes même si on trouve des sections d’apprentissage dans des lycées professionnels ou des alternants à l’Afpa. Comment expliquer que les partenaires sociaux n’aient pas pu se mettre d’accord pour privilégier un système de formation professionnelle cohérent et efficace convenant à la fois aux besoins des entreprises et à ceux des jeunes et des salariés ?

5Si l’école républicaine est d’abord un maillon fort de la démocratie politique, les processus de professionnalisation et de qualification s’inscrivent à la fois dans l’évolution du système de production (économie et travail) et les perspectives sociales et professionnelles des individus. L’école, outil de la République, doit tendre à l’unité par la transmission des connaissances en tentant de compenser les effets des inégalités d’origine sociale alors que la formation professionnelle est duale dans son essence et doit, à la fois :

  • S’adapter aux évolutions des métiers et des organisations de travail ;
  • Permettre à chaque salarié d’envisager une progression professionnelle en cours de carrière.

Encadré 1. La place actuelle des syndicats dans le système de formation

Les syndicats de salariés n’ont pas une place anodine dans le système français de formation professionnelle. On pourrait même, à première vue, estimer qu’ils ont une position centrale. En effet ils sont co-producteurs de nombreuses normes :
  • Présents dans les commissions professionnelles consultatives des deux principaux ministères habilités à délivrer des diplômes et titres professionnels (Education nationale et ministère du Travail), ils contribuent à définir les critères de certification des savoirs correspondant aux qualifications professionnelles.
  • Dans le cadre des commissions paritaires nationales de l’emploi, ils négocient les objectifs prioritaires de formation dans les branches, contribuent à la production des certificats de qualification professionnelle (CQP) de branches et établissent même la liste des diplômes et des titres professionnels correspondant aux métiers de la branche.
  • Co-gestionnaires des organismes paritaires collecteurs agréés (Opca) de branches et interprofessionnels régionaux, ils sont censés traduire les orientations des branches professionnelles en matière d’usage des fonds mutualisés de la formation (obligation légale de financement de la formation). Ces attributions sont loin d’être symboliques car elles correspondent à des budgets très conséquents. Les différents types de versement aux Opca s’élèvent à plus de 5,5 milliards d’euros.
  • Co-gestionnaires de l’assurance chômage (Unedic et Assedic), ils sont supposés définir les critères d’usage des formations destinées aux chômeurs qui perçoivent les allocations chômage.
  • Membres de nombreuses instances de pilotage ou de coordination de la formation professionnelle, ils sont censés contribuer à la définition des objectifs et des priorités du système de formation au niveau national, régional et local.

6C’est cette dualité qui implique une régulation qui relève d’une synergie entre les partenaires sociaux et les pouvoirs publics afin de trouver des points d’équilibre entre l’intérêt immédiat des employeurs et celui des salariés qui peuvent être en décalage. Si l’usage économique de la FPC est légitime au même titre que l’ensemble des investissements technico-organisationnels ou en recherche et développement, on ne peut pas l’assimiler aux mécanismes destinés à permettre aux salariés de se donner des perspectives professionnelles au delà de l’entreprise qui les emploie. C’est en partant de cette hypothèse élémentaire que nous allons traiter du rôle du syndicalisme dans le système de formation professionnelle. Cette contribution vise donc à la fois à mieux cerner l’évolution du système de formation professionnelle sous l’angle des enjeux du travail, mais également sous celui des mobilités professionnelles.

Syndicalisme et formation, un bilan mitigé

7L’enseignement professionnel et la formation professionnelle des adultes n’ont jamais été des éléments forts de la stratégie syndicale ni d’ailleurs des partis de gauche. La formation des adultes va prendre corps à la faveur des situations de pénurie lourde de main d’œuvre liées aux périodes de guerre et d’après-guerre (reconstruction). La coexistence durant les années 30 du chômage et de besoins de main d’œuvre qualifiée va également provoquer l’émergence d’initiatives visant à qualifier des jeunes ou des adultes. C’est ainsi que la méthode de la formation professionnelle accélérée (FPA) va se développer sous l’égide des professionnels de la métallurgie et du ministère du Travail. Le Front populaire ne mettra pas en œuvre une réforme de fond du système de l’enseignement professionnel permettant de dépasser l’adaptation immédiate aux exigences immédiates des entreprises et d’ouvrir de façon conséquente la question de la formation des adultes. Le régime de Vichy fera preuve de plus de volontarisme en matière d’enseignement professionnel mais dans des circonstances qui ne pourront guère être relayées par la suite et qui vont même accentuer la défiance du syndicalisme à l’égard de cette question de la formation.

Reconstruction et anticipation des évolutions de l’emploi

8En 1946 le plan Monnet fixa comme priorité aux pouvoirs publics la relance de l’économie notamment par un effort de reconstruction sans précédent qui nécessitait d’augmenter de 300 000 ouvriers la main d’œuvre employée dans le bâtiment. Pour ce faire l’Etat développera des centres de formation professionnelle accélérée (FPA) dans tout le pays et en 1947 on en comptait près de 200 qui qualifieront des dizaines de milliers d’ouvriers. Cet effort de formation lié aux effets démographiques et sociaux de la guerre résultait également des insuffisances du système d’enseignement professionnel et de la structure économique de la France (poids de l’agriculture et des petites entreprises artisanales notamment) et de la vétusté de l’appareil industriel français. « On ne peut nier qu’il manque trop souvent en France un personnel qualifié dans les techniques difficiles de la fabrication moderne ; la recherche de procédés nouveaux de production a été longtemps négligée, de même que la formation professionnelle en général. (…) Les difficultés que rencontre l’économie française, quant à ses prix de revient, sont vraisemblablement imputables, en premier lieu, au vieillissement de l’outillage, aux destructions ou à l’usure exceptionnelle dues à la guerre, à un manque de personnel qualifié, au coût et aux difficultés d’obtention de certaines matières premières dont le rôle est allé et va toujours croissant dans la technique industrielle moderne. » (Dechamp, 1948). Les enjeux de la reconstruction mais aussi la création des comités d’entreprise (CE) aurait pu permettre d’ouvrir le débat du lien modernisation/qualification dans un contexte favorable aux salariés. Mais cette opportunité se heurtera à l’antagonisme frontal entre le patronat et la CGT amplifié par le dirigisme étatique.

9Si le syndicalisme de type réformiste (à la scandinave) n’abandonnera pas aux propriétaires des usines ou aux ingénieurs les choix techniques et organisationnels, la réticence (à des degrés variables) des syndicats français à peser sur l’organisation et la division du travail dans l’industrie ne les a pas amenés à aborder les savoirs ouvriers comme élément rétroagissant au sein des mutations du système de production. Ainsi l’intérêt de procéder à un effort de montée en qualification des salariés n’apparaîtra jamais comme une façon de se prémunir des effets éventuellement négatifs du plein emploi de type taylorien (qu’on vérifiera dans la douleur à la fin des années 70). Il y aura toujours une forte circonspection du syndicalisme à l’égard des processus de polyvalence, de pluri-compétences, d’hybridation des savoirs, etc. qui résultent des évolutions du travail telles qu’elles ont pu être conduites par les employeurs ou les branches. « La pratique, sur plus de trente années, des comités d’entreprise en matière de contrôle économique est extrêmement problématique. C’est une question généralement ignorée de la plupart des militants. (…) Quant à questionner sérieusement et concrètement un patron sur la politique d’investissement, les relations de celle-ci avec la qualification, les conditions de travail et l’emploi, et informer largement les travailleurs des termes du débat, on peut dire sans risquer de se tromper que cela n’a existé qu’exceptionnellement. » (Moynot, 1982:55). Ainsi la négociation sur le salaire sera menée dans le cadre d’une division du travail qui sera considérée comme intangible : « Le consensus qui s’est établi entre patronat et syndicats sur le changement technique a également comme conséquence que les deux parties estiment qu’en définitive la division du travail ne peut être modifiée. » (Flichy, 2003:59).

10Les déconvenues surgiront dans les années 70 et 80 quand il s’agira à la fois de reconvertir professionnellement les centaines de milliers d’ouvriers licenciés et de procéder à des modernisations technico-organisationnelles dans des secteurs où prévalaient des organisations fondées essentiellement sur la prescription et l’hyper-spécialisation. De fait, la sous-qualification des ouvriers a entretenu les pénuries de main d’œuvre durant le plein emploi et alimenté par la suite le chômage de masse. L’adhésion des syndicats à un enseignement professionnel spécialisé illustré par la prolifération de diplômes professionnels étroits (en 1949 on comptait 2 790 programmes différents de CAP pour le seul secteur de la métallurgie) témoigne d’une conception où l’objectif consistait plus à stabiliser la main d’œuvre qu’à miser sur une progression professionnelle ultérieure. Ce choix interroge a posteriori, en effet les syndicats allemands qui avaient également opté pour un enseignement professionnel plutôt spécialisé, avaient obtenu des contreparties significatives en termes d’embauche des apprentis et de reconnaissance de la détention du diplôme dans le salaire. En France les syndicats n’ont obtenu aucun engagement contractuel de ce type et ont misé sur les pénuries de main d’œuvre comme levier d’embauche et surtout comme élément central du rapport de force salarial. Pourtant d’autres choix plus anticipateurs étaient possibles : « Seul un large apprentissage, polyvalent dans ses effets, permettrait de faire face aux causes complexes de la pénurie de main d’œuvre qualifiée, et de les réduire grâce à la rapidité et au succès des transferts et des reclassements. Il faut que la plasticité professionnelle réponde à la plasticité technique de l’industrie. Il faut que la polyvalence de l’apprentissage réponde au polytechnisme de l’atelier mécanisé et sans cesse retransformé par le progrès » (Friedmann, 1946:232). Cette exigence sur le plan de la formation professionnelle initiale prendra tout son sens dans les années chômage où il s’agira à la fois de procéder à des reconversions professionnelles de salariés en mi-carrière et d’inciter les nouvelles générations à une plus grande mobilité. Mais ni l’enseignement professionnel, ni les acteurs de la formation continue n’étaient préparés à un tel défi.

11La position syndicale à l’égard de la formation permanente s’est ainsi trop souvent limitée à cette exhortation de 1970 : « Vouloir demain une véritable éducation permanente c’est exiger aujourd’hui le droit à l’enseignement le plus large pour tous. Sans cette base fondamentale de départ, parler d’éducation permanente relève du verbiage trompeur. Il est notoire que ce sont les personnes qui possèdent un bon niveau scolaire, qui sont les plus assidues au cours de promotion, et qui en tirent le maximum d’intérêt. » (Michel, 1970). En résonance à ce discours, uniquement centré sur les bienfaits de l’école pour tous, une interrogation tout aussi problématique interrogeait les présupposés et les effets de la division technique du travail:« Pour que les travailleurs éprouvent le désir d’acquérir des connaissances, il est nécessaire qu’ils vivent dans un système où les connaissances puissent leur être utiles. Il ne s’agit pas seulement d’agir au niveau du savoir mais aussi des possibilités d’intégration des connaissances dans le système productif. La formation continue, pour l’instant, est donc adaptée à ces couches socioprofessionnelles qui peuvent intégrer leur savoir dans leur activité productive. Pour établir l’égalité, il est absolument nécessaire que les activités productives des OS puissent exiger aussi une formation et des connaissances. Dans ce sens, la formation doit être intimement liée au processus de changement dans le système industriel et dans ses techniques. Il ne s’agit pas ici de n’importe quel changement mais de celui qui a pour objet de supprimer le travail subalterne et de donner la possibilité aux ouvriers d’utiliser, pendant le travail, leurs facultés intellectuelles, mettant en jeu les mécanismes de la pensée logique et rationnelle qui est exigée dans un certain nombre d’activités humaines. » (Mothé, 1974).

La loi de 1971

12La formation professionnelle des adultes va prendre corps au XXe siècle à la faveur des situations de pénurie lourde de main d’œuvre liées aux périodes de guerre et d’après-guerre (reconstruction). La coexistence durant les années 30 du chômage et de besoins de main d’œuvre qualifiée va également provoquer l’émergence d’initiatives visant à qualifier des jeunes ou des adultes. Comme nous l’avons évoqué, la première impulsion significative en matière de formation des adultes se situe au moment de la reconstruction avec la création des centres de formation professionnelle accélérée (FPA). Mais c’est la loi de 1959 sur la promotion sociale qui va donner un cadre doctrinal à une question qui avait été traitée jusque là de façon plutôt pragmatique. Cette loi s’inscrit dans le cadre dirigiste et centraliste de la Ve République dans lequel s’insèrent naturellement les outils de la régulation économique et sociale et ceux de l’éducation dont la formation professionnelle. Suivra la loi du 3 décembre 1966 fondée sur le principe « d’obligation nationale » en matière de formation professionnelle qui jettera les bases d’un cadre institutionnel fondé sur le tripartisme et l’interministérialité. Si cette loi s’inscrit dans la poursuite de l’objectif de la promotion sociale, la notion de formation qualifiante (sanctionnée par un diplôme professionnel reconnu par l’Etat) n’est cependant pas évoquée. Les textes ne font référence qu’aux notions de spécialisation, d’adaptation ou de perfectionnement limitant de fait le sens d’une éventuelle politique de formation professionnelle.

13Ce cadre législatif et institutionnel, peu relayé par les grands ministères concernés (Education nationale, Industrie et Travail) sera soumis à l’épreuve des négociations de Grenelle issues du mouvement de Mai 68 qui conduiront à l’accord interprofessionnel du 9 juillet 1970. Cette évolution apparaîtra pour beaucoup d’analystes comme l’expression des souhaits du CNPF : « Cet accord fait la part belle au patronat, qui dispose maintenant d’un instrument d’adaptation de la main d’œuvre dont il est en fait le seul maître. » (Charlot, Figeat, 1985:421), en réalité la loi du 16 juillet 1971 qui traduit l’accord de 1970, établit des règles relatives à l’ensemble du champ de la formation continue. Mais tout en ouvrant un espace d’intervention important aux partenaires sociaux, elle donne à l’employeur un rôle déterminant en matière de conception du plan de formation. Celui-ci est certes soumis à l’avis du comité d’entreprise mais ne relève pas d’accords d’entreprise signés par un ou plusieurs syndicats représentatifs.

14Les premières dispositions de la loi vont plutôt cristalliser la difficulté des partenaires sociaux à trouver un compromis équilibré entre les deux volets :

  1. Le plan de formation dont le chef d’entreprise est l’initiateur unilatéral, il n’a pas d’obligation de former ses salariés (depuis, la jurisprudence oblige l’employeur à assurer l’adaptation de ses salariés aux évolutions de leur poste de travail),
  2. Le droit pour tout salarié (congé individuel de formation), de suivre une formation de son choix, pendant le temps de travail, sans perte de rémunération dans des conditions d’attribution qui resteront cependant homéopathiques (quelques dizaines de milliers de places par an).
L’obligation légale de financement d’un système d’ensemble va se traduire par un système de collecte et de mutualisation à vocation large. Dans un premier temps on assiste à la prolifération de fonds d’assurance formation (FAF) départementaux, inter-départementaux, régionaux, nationaux, intersectoriels, de branche, voire d’entreprises, etc. concurrents et redondants et surtout illisibles dans leur vocation. Le choix de privilégier un tel découpage particulariste mi-sectoriel et mi-local est d’autant plus surprenant que le système d’assurance chômage mis en place en 1958, et géré également par les partenaires sociaux, s’était finalement organisé, après débat et créations de caisses professionnelles en région parisienne, autour de structures administrées sur le plan local selon une logique interprofessionnelle (Assedic) qui pouvait servir de référence pour la gestion des fonds de la formation. L’Etat s’est d’ailleurs accommodé de cette faible cohérence et efficience puisque les FAF n’étaient pas supposés réguler les fonctions qui sous-tendent la qualité et l’opérationnalité de l’appareil de formation ! Un des principes de base de ce système, cadré par l’Etat, reposait sur l’indépendance des collecteurs à l’égard des organismes de formation. L’Etat créera ainsi les conditions d’un paradoxe permanent consistant à responsabiliser les partenaires sociaux sur la gestion des fonds de la FPC mais à les éloigner des instruments de régulation de l’activité de formation tels que :
  • La structuration de l’offre de formation, élément pourtant essentiel à l’optimisation de l’usage des fonds ;
  • la mise en place d’une orientation professionnelle des adultes notamment dans le cadre des contrats en alternance et du congé de formation ;
  • la mise en place de centres ressources dédiés à la qualité de l’appareil de formation destinés aux salariés les moins qualifiés ;
  • l’organisation d’une structure indépendante d’évaluation de l’efficacité du système.

Un système de déresponsabilisation

15L’Etat va corseter l’action syndicale en matière de FPC mais ne fera pas pour autant le choix d’un pilotage direct du système. L’Etat dispose pourtant d’un puissant appareil public (Cnam, Afpa, Greta et universités) qui offre un certain nombre de garanties d’accès aux formations qualifiantes (services d’orientation, jurys d’examen, ingénierie) qui permet une régulation des organismes de formation pouvant intervenir dans le champ d’usage des fonds mutualisés. Des milliers d’organismes de formation vont donc se créer librement avec comme seule contrainte de se déclarer auprès des services préfectoraux et de leur fournir annuellement un bilan pédagogique et financier (BPF). On assiste à une libéralisation de l’offre de formation continue autour d’un pseudo marché alimenté par les prélèvements obligatoires des entreprises. Or cette construction, supposée répondre aux besoins des entreprises, s’est avérée largement artificielle car soumise à des processus assez éloignés d’une demande de formation spontanée ou utile.

Une gestion paritaire sous contrôle

16Faute d’être conçue comme un élément (parmi d’autres) de l’implication des syndicats d’entreprise dans les transformations du travail, la FPC va tendre à s’installer comme un rituel annuel d’organisation de la consommation de stages. Le mécanisme d’obligation légale de dépense en matière de formation dans l’entreprise a ainsi tué dans l’œuf toute évaluation sérieuse sur l’intérêt social ou économique d’un tel exercice. Au-delà de l’entreprise et malgré des financements supposés servir aux salariés, la succession d’accords interprofessionnels puis d’accords de branches (obligation de négociation par branches de la FPC en 1983) va plus aggraver ce désintérêt que l’inverse. C’est un des paradoxes de ce champ que d’avoir généré un dialogue social parfaitement artificiel et coupé des intérêts des salariés mais aussi de ceux des employeurs.

17Parallèlement le système de mutualisation et de gestion paritaire des fonds de la formation professionnelle va prospérer au rythme de la complexification du système d’ensemble sous le contrôle de l’Etat. Ainsi la loi quinquennale du 20 décembre 1993 a imposé aux partenaires sociaux une réorganisation du système de collecte de l’obligation légale selon quelques principes de base :

  • Confirmation du rôle du paritarisme dans la gestion des fonds de la FPC ;
  • confirmation du principe de mutualisation des fonds collectés ;
  • regroupement national de la collecte par grand secteur d’activité réalisé par des Opca de branche ;
  • mise en place d’une collecte régionale « alternative » réalisée par des Opca régionaux (Opcareg) ;
  • création d’un seuil minimal de collecte visant à empêcher l’émergence d’Opca trop petits ;
  • Séparation des activités des Opca de celles des organismes de formation.
A la fin du processus de réforme en 1995, 99 Opca dont 31 uniquement gestionnaires du congé individuel de formation, se sont substitués aux 255 organismes préexistants. A côté des 24 Opcareg, on compte aujourd’hui une quarantaine d’Opca de branches ou interbranches. Mais toute cette architecture institutionnelle a-t-elle profité aux moins qualifiés ? En fait, moins d’un tiers des sommes consacrées à la formation des salariés est destiné aux ouvriers et aux employés. Chaque année, environ 1 700 000 ingénieurs, cadres, techniciens et agents de maîtrise bénéficient des actions des plans de formation alors que celles-ci ne concernent qu’environ 180 000 ouvriers non qualifiés. En ce qui concerne les ouvriers qualifiés (OQ) dont 27,4 % en moyenne accède à la FPC, on peut identifier des différentiels importants (entre 15 % et 76 %) selon les secteurs d’activité. Mais la situation est sans appel : l’objectif de la loi de 1971 qui consistait à promouvoir un effort de formation à destination de ceux qui n’avaient guère profité de l’école a été dévoyé au profit des plus qualifiés et diplômés. L’Insee fait ce constat depuis quelques années : « Ce sont les salariés qui auraient le plus besoin de renforcer leurs liens avec le marché du travail qui finalement bénéficient le moins du dispositif » (Goux, Maurin, 1997). Encore parle-t-on ici essentiellement de l’accès au plan de formation qui correspond à la politique de l’employeur, mais en ce qui concerne les mécanismes promotionnels, l’usage de la formation continue qualifiante comme outil de mobilité ascendante est quasi-nul pour les ouvriers et employés de plus de 30 ans. Car l’ensemble de l’effort de formation qualifiante de ce pays est mené pour les jeunes. Seul le congé individuel de formation (CIF) permet éventuellement d’acquérir un niveau de qualification supérieur à celui que l’on détient et il ne bénéficie qu’à 35 000 salariés. Quant aux formations de l’Afpa, elles visent d’abord les chômeurs. En clair il faut attendre d’être au chômage pour se voir proposer un droit à la qualification. Enfin le Cnam et les centres d’éducation permanente des universités accueillent une population majoritairement d’un niveau supérieur au BAC.

18L’utilisation de la formation continue comme modalité d’évolution professionnelle souhaitée : exercer un travail plus intéressant, remédier à une orientation professionnelle précoce et mal vécue, obtenir un emploi plus qualifié que le sien, etc. est donc microscopique pour la population des 12 millions d’ouvriers et d’employés. Par an, pas plus de 15 000 salariés et chômeurs de plus de 30 ans accèdent à une formation qualifiante leur permettant d’acquérir un niveau de qualification plus élevé ! Si les plus diplômés et les catégories professionnelles intermédiaires et supérieures se sont emparés de la formation pour un usage promotionnel, les moins qualifiés n’arrivent à la formation que dans des conditions bien différentes marquées par des contextes contraignants : reconversion, requalification, formation destinées aux chômeurs, accident du travail, etc. et ne sont essentiellement concernés que par des formations qualifiantes de même niveau que le leur. Quant aux contrats en alternance, ils ne concernent que 10 % de jeunes infra V (n’ayant pas réussi leur cursus professionnel à l’école) soit environ 15 000 jeunes par an avec un taux d’échec (décrochage et non réussite à l’examen) qui avoisine les 50 % !

19Structurellement le système généré par l’obligation légale touche de plus en plus de salariés (sachant que les cadres et ingénieurs en sont les principaux bénéficiaires) mais pour des durées de formation de plus en plus courtes. Cette logique de saupoudrage pénalise les salariés les moins qualifiés et accentue, de fait, leur décrochage social et professionnel. L’option du droit individuel à la formation (DIF) mis en place par l’accord interprofessionnel de 2003 (signé par tous les syndicats) qui permet d’obtenir 20 heures de formation par an pour chaque salarié accentue cette tendance et empêche toute mobilisation prioritaire des fonds paritaires vers les moins qualifiés. Par contre elle stabilise et garantit les modes d’usage de la FPC des cadres et des plus diplômés et des organismes de formation haut de gamme dédiés à l’élite. Ce processus vient d’ailleurs illustrer le faible intérêt de maintenir des mécanismes d’incitation financière d’accès à la formation pour une majorité de salariés qui sont engagés dans des logiques d’acquisition de savoirs à travers les réseaux et l’échange. Par contre on identifie bien les zones sociales où des millions de personnes ne parviennent pas à s’inscrire dans ces dynamiques et ont besoin de bénéficier de ressources formatives pour élargir leur horizon ou, simplement, pour retrouver confiance en elles sur le marché du travail.

Un financement organisé pour les plus qualifiés

20Le débat sur le coût du système de FPC est pollué par de nombreuses représentations fausses qui témoignent de sa complexité et du manque de cohérence entre les déclarations de dépenses des entreprises, les comptes des Opca et les bilans pédagogiques et financiers des organismes de formation. Ainsi, sur la base des déclarations des employeurs et des organismes de formation il n’est pas possible d’établir une corrélation entre les budgets de la FPC et les catégories socioprofessionnelles. Tous ces éléments témoignent aussi de l’absence de dialogue social sérieux sur cette question.

21Si le coût global de la FPC avoisine les 25 milliards €, il recouvre des segments différents (formation des fonctionnaires, des chômeurs, des salariés du privé ou des jeunes) et plusieurs postes de dépense (achat de formation et rémunération des stagiaires notamment). Il faut ainsi dissocier :

  • Le des organismes de formation professionnelle (différents modes d’achat de formation des entreprises, des pouvoirs publics et des ménages) qui représente environ 13 milliards € ;
  • les des personnes en formation (allocations de stage au titre du statut de stagiaire, salaire pour les salariés en formation, allocations versées par l’Assedic pour les chômeurs en formation, etc.) qui pèsent environ 12 milliards €.
Dans cet ensemble l’obligation légale de financement de la FPC qui régit les dépenses des entreprises correspond à environ 8,6 milliards € (hors apprentissage) qui se subdivisent en trois blocs :
  1. Le 0,9 % du plan de formation (PDF).
  2. Le 0,5 % alternance.
  3. Le 0,2 % du congé de formation (CIF).
En ce qui concerne l’année 2005 [1] l’essentiel des dépenses déclarées des 107 000 entreprises de 10 salariés et plus (9,9 millions de salariés), assujetties au 1,6 %, dans le cadre du plan de formation se montait à environ 4,3 milliards € et se répartissait comme suit :
  • Formation interne mise en œuvre par les structures de formation des entreprises : 976 millions €.
  • Achat direct de prestations à des opérateurs externes : 870 millions €.
  • Versement aux Opca : 1,422 milliard d’euros soit environ 800 millions € de remboursement d’achat de formation. En réalité le niveau de collecte réalisé par les Opca au titre du plan de formation dépasse les 2,2 milliards €, soit un niveau de remboursement des frais de formation proche de 1,4 milliard €.
En ce qui concerne les autres volets, les versements au titre du CIF, du DIF et de la professionnalisation se montaient à environ 1,9 milliard € soit 1 milliard € d’achat de formation. L’achat de formation (entreprises + Opca) de formation représentent donc un peu plus de 4,2 milliards €. La part de cette somme qui est consacrée aux salariés peu qualifiés s’élève, selon les estimations les plus favorables, à 10 % des différents volets, soit 450 millions d’euros dont 85 millions € consacrés à des formations longues.

22En fait, pour les moins qualifiés, il faut attendre d’être chômeur de longue durée ou accidenté du travail pour pouvoir bénéficier d’une formation qualifiante prodiguée par l’Afpa (600 millions € de subvention) ou les centres de rééducation professionnelle qui accueillent notamment les handicapés victimes d’accidents du travail. Quant aux programmes destinés à la formation des chômeurs, ils représentent aujourd’hui à peine 300 millions € et souffrent d’une inefficacité notoire.

23Résumons notre estimation : la France finance environ 1,5 milliard € de formation pour les moins qualifiés du secteur privé (salariés et chômeurs), soit un peu plus de 11 % des 13 milliards € d’achat de formation. Mais cet effort est essentiellement mené pour les moins de 30 ans. Pas plus de 50 000 ouvriers et employés (salariés et chômeurs) de plus de 30 ans bénéficient d’une formation qualifiante… Dans cette population les moins qualifiés ne sont que quelques milliers. Rappelons qu’il y a 12à 13 millions d’ouvriers et d’employés salariés et chômeurs en France et que 50 % de la population active n’a pas le niveau du BAC. Cela signifie que les opérateurs de formation susceptibles de répondre aux besoins de cette population sont marginaux et qu’une réorientation majeure de la politique de formation qualifiante vers les moins qualifiés se heurterait d’abord aux carences même de l’offre de formation continue (et des autres fonctions concomitantes comme l’orientation, l’ingénierie pédagogique ou les ressources de certification) et nécessiterait, à budget égal, un redéploiement non négligeable des moyens de la formation initiale et post-scolaire vers les adultes.

24De plus, un tel scénario ne peut pas découler du volontarisme des entreprises : obligées de dépenser, celles-ci préféreront toujours former les plus qualifiés qui sont aussi les plus demandeurs de formation. L’engagement des moins qualifiés en formation dépend essentiellement des opportunités liées aux mécanismes promotionnels internes et externes. Mais le choix de nombreux secteurs de privilégier l’embauche de jeunes diplômés pour de nombreux emplois qui auraient pu être pourvus par des adultes expérimentés engagés dans des processus de montée en compétences a cassé toute espérance promotionnelle.

25Le faible intérêt des moins qualifiés à l’égard de la formation dépend :

  • D’une modification lourde des critères de gestion des compétences par les entreprises, modification qui pourra résulter de la pénurie de jeunes susceptibles de remplacer les départs en retraite de la génération du baby boom ;
  • de réorganisations du travail fondées sur la montée en compétences des salariés ;
  • de transformations des représentations des savoirs liées à la valorisation des acquis de l’expérience sociale et professionnelle au détriment des savoirs académiques ;
  • d’un renforcement de tous les leviers favorisant les mobilités professionnelles ascendantes.
Mais un des leviers majeurs de l’intérêt des ouvriers et des employés pour la FPC réside d’abord dans la perspective réaliste de pouvoir en tirer un avantage en termes de mobilité ascendante. Cette hypothèse ne nécessite pas seulement une modification des représentations mais une transformation de la division technique du travail et des critères de constitution des collectifs de travail

L’impasse de la formation des chômeurs

26Une remise à plat de la formation des salariés dans un objectif de priorité faite aux moins qualifiés nécessite une recherche de cohérence avec la formation des chômeurs. Celle-ci relève d’une construction compliquée qui est en train de se simplifier. La formation des chômeurs a longtemps été le champ d’intervention du ministère du Travail, dans un premier temps par le biais de l’Afpa puis, au milieu des années 80, par la mise en place de programmes notamment destinés aux chômeurs de longue durée. Les conseils régionaux ont également développé des programmes de formation destinés aux chômeurs rémunérés par les Assedic notamment dans le cadre de l’Allocation Formation Reclassement (AFR). Cependant, le régime d’assurance-chômage géré paritairement dans le cadre de l’Unedic apparaît aujourd’hui en responsabilité croissante sur les questions de formation en lien avec l’Anpe. Le ministère du Travail a opéré un retrait récent de ce champ par la suppression en 2005 des formules destinées aux chômeurs de longue durée (SIFE et SAE) mais surtout dans le cadre du processus de décentralisation de 70 % de la subvention qu’il versait à l’Afpa précisément pour qualifier les chômeurs. Une comparaison de l’impact des différentes formules de retour à l’emploi des chômeurs interrogeait sur l’efficacité des SIFE par rapport aux différents types de contrats aidés dans le secteur marchand mais l’obtention d’une qualification reconnue apparaissait comme un gage de retour à l’emploi : « Préparer un diplôme ou un certificat de qualification précis accroît la probabilité d’être en emploi. » (Charpail, Klein, Zilberman, 2005).

27« Ila fallu attendre la convention d’assurance chômage issue de l’accord du 30 décembre 1987 (soit 30 ans après la création de l’Unedic) signée par les partenaires sociaux (représentants du patronat et de tous les syndicats sauf la CGT) pour qu’apparaisse une logique de coopération entre l’Unedic et les dispositifs de formation des chômeurs en difficultés mis en place par l’Etat. Cet engagement s’est d’abord principalement traduit par différentes modalités de prise en charge de la rémunération des demandeurs d’emploi en formation par l’Unedic et, notamment, par le système de l’allocation formation reclassement (AFR) qui stoppait les mécanismes de dégressivité de l’allocation-chômage en cas d’entrée en formation. Puis, à partir de 2001, le plan d’aide au retour à l’emploi (Pare) a pris le relais dans une configuration nouvelle » (Santelmann, 2006:92). Plus récemment la nouvelle convention du 18 janvier 2006 du régime d’assurance chômage a mis fin au dispositif du Pare. Le nouveau système renforce la dimension adéquationniste de l’accompagnement personnalisé des allocataires du régime d’assurance-chômage. En effet ce sont les offres locales d’emploi ou les difficultés de recrutement des employeurs qui définissent l’effort de formation des Assedic. La politique de formation des chômeurs est donc clairement découplée de toute ambition promotionnelle ou d’un effort substantiel de montée en compétences et en qualification des chômeurs les moins qualifiés.

28En fait nous assistons à un redéploiement de la formation des chômeurs entre les conseils régionaux et l’Unedic qui devrait impliquer, à terme, de nouvelles modalités de coordination en matière de régulation de l’offre de formation locale. Mais la question qui est également posée est celle de la cohérence entre l’usage des fonds paritaires dédiés aux salariés et celui des fonds paritaires destinés aux chômeurs. Or les difficultés de retour à l’emploi des chômeurs faiblement qualifiés sont en partie liées aux faiblesses de l’effort de formation qui leur est destiné lorsqu’ils sont en emploi. Ainsi le régime d’assurance chômage et plus largement le système d’indemnisation des chômeurs qui comprend les fonds de solidarité de l’Etat et les fonds du RMI des conseils généraux, est largement tributaire de la double discrimination qui affecte les moins qualifiés de plus de 40 ans :

  • Au travail, ils ne bénéficient pas d’un effort de formation prioritaire,
  • au chômage ils sont les plus discriminés à l’embauche.
Si les employeurs ne croient pas à la formation de leurs salariés les moins qualifiés, il n’y a aucune raison qu’ils croient à la formation des chômeurs les moins qualifiés. L’explosion des organismes de formation s’est faite au rythme des programmes annuels dédiés aux jeunes en insertion ou aux chômeurs, échafaudés selon des barèmes ou des tarifs d’achat de formation forfaitaires, établis par les pouvoirs publics indépendamment de toute logique économique. Les organismes de formation qui intervenaient sur le marché des entreprises ou qui percevaient des subventions globales (Afpa ou Cnam) n’avaient aucun intérêt financier à intervenir dans ces dispositifs. En effet les formats standards de ces programmes (300 à 800 heures/stagiaires) rémunérés à des faibles tarifs de 3 € ou 4 €/h ne sont rentables que dans une logique de reconduction incompatible avec le caractère conjoncturel des formations de retour à l’emploi. En dehors de quelques gros opérateurs publics et para-publics qui peuvent s’appuyer sur des financements structurels (Afpa, Cci, Greta ou Cnam) et des organismes privés qui occupent des marchés quasi-monopolistiques sur des créneaux techniques pointus ou des secteurs professionnels organisés et qui peuvent élargir leur champ d’action aux publics prioritaires, les principaux opérateurs des programmes de formation des chômeurs correspondent à des réseaux d’insertion associatifs qui survivent dans des conditions difficiles et précaires, contraints de développer des prestations qui n’ont guère d’impact sur les trajectoires professionnelles des sans emploi même s’ils jouent un rôle d’accompagnement social minimum.

29L’articulation des fonds paritaires dédiés aux salariés (Opca) et dédiés aux chômeurs (Assedic) est une première priorité pour les partenaires sociaux encore faut-il dégager par territoire les priorités d’une telle articulation. Si on veut optimiser les fonds de la FPC tout en ciblant les moins qualifiés au-delà de leur statut, il faut pouvoir s’appuyer sur des opérateurs suffisamment professionnels et compétents pour traiter des différents cas de figure possibles :

  • Permettre à un salarié de changer de métier,
  • réaliser un programme de reclassement professionnel à l’occasion d’un plan social,
  • professionnaliser des jeunes en échec scolaire,
  • requalifier des chômeurs de longue durée,
  • etc.
Selon les bassins d’emploi on peut avoir des situations très différentes : un taux élevé de chômeurs de longue durée, un nombre élevé de jeunes au chômage, un tissu économique déclinant ou en développement, etc. Il est donc nécessaire d’organiser l’appareil de formation en fonction de ces spécificités mais également de l’associer aux projets de développement économique. Cette synergie suppose un dialogue permanent entre les pouvoirs publics (en l’occurrence les conseils régionaux) et les partenaires sociaux qui doivent pouvoir disposer du relais des organismes paritaires. L’action des Assedic et de l’Anpe en matière de formation des chômeurs doit s’intégrer dans un plan local concerté et non relever de présupposés nationaux de type adéquationniste comme aujourd’hui.

Rompre avec le tripartisme de gestion

30La subdivision de la FPC entre formation des salariés et formation des chômeurs est certainement la meilleure illustration de la détérioration de la synergie entre l’action publique et l’action paritaire par le biais du paritarisme de gestion. Cette construction a pris forme dans le cadre et les mécanismes du tripartisme notamment impulsé par le Commissariat général du Plan qui joua, avec Jean Monnet à sa tête, un rôle crucial dans la reconstruction économique de l’après-guerre. Le tripartisme à la française consistait à :

  • Associer les partenaires sociaux à de nombreux processus de décision politique mais où l’Etat conserve un rôle d’arbitre d’autant plus fort que l’antagonisme salariés/employeurs est profond,
  • enfermer le paritarisme dans la gestion de certaines concessions déléguées par les pouvoirs administratifs.
Or cette voie a créé de nombreuses distorsions avec l’action syndicale au quotidien et le champ de la négociation collective. Ce décalage est d’autant plus important que le syndicalisme français est traditionnellement divisé et fragmenté et qu’aujourd’hui il est déclinant et très atomisé dans le secteur privé.

Intégration ou réformisme ?

31Aujourd’hui le tripartisme et le paritarisme de gestion qui en découle font que de façon directe ou indirecte, le syndicalisme est associé à la gestion de milliards d’euros liés aux prélèvements obligatoires (sécurité sociale, Unedic, fonds de la formation professionnelle, etc.). A cette implication s’ajoute le champ du dialogue social (conventions collectives, conseils des prudhommes, commissions paritaires nationales pour l’emploi, etc.) et celui de la régulation institutionnelle (conseil pour l’emploi, conseil pour la formation tout au long de la vie, conseil économique et social, etc.). Enfin il faut ajouter à ce tableau la puissance intégrative du syndicalisme public que nous avons déjà soulignée. « Dans la fonction publique, les commissions administratives paritaires, composées de syndicalistes et de membres nommés par la hiérarchie, jouent un rôle central dans la gestion des différents corps de fonctionnaires. (…) les syndicats sont aujourd’hui partie prenante dans des centaines d’institutions de statut public ou parapublic. (…) Le développement du syndicalisme en tant que fonctionnaire du social apparaît ainsi comme une nécessité du point de vue de l’Etat lui-même. » (Rosanvallon, 1988:111-115).

32Cette intégration du syndicalisme se complète par des mécanismes de financement d’origine publique ou paritaire qui s’ajoutent aux cotisations des adhérents, voire qui s’y substituent… Ainsi, même sans beaucoup d’adhérents, les confédérations syndicales françaises peuvent non seulement survivre mais conserver un véritable pouvoir de représentation des salariés que ce soit dans l’entreprise (délégué syndical) ou dans les centaines d’instances paritaires ou tripartites que le syndicalisme est censé irriguer ou même gérer. Divisées et faiblement implantées dans les entreprises, les confédérations syndicales ne disposent pas des leviers qui leur permettraient d’équilibrer leurs rapports avec les syndicats d’employeurs et l’Etat. « Parler de mainmise de l’Etat sur les relations professionnelles et par là même sur la représentation syndicale est certes une interprétation radicale, mais si on y ajoute la dépendance financière des syndicats à l’égard de la puissance publique, l’image peut paraître non dépourvue de fondement. » (Pernot, 2005:303).

33Dans d’autres pays le syndicalisme réformiste a trouvé son espace dans les thèses social-démocrates. Celles-ci considèrent que le système capitaliste peut intégrer une atténuation des inégalités sociales à travers plusieurs postulats :

  • La capacité du système démocratique à peser sur la redistribution des richesses ;
  • la possibilité d’infléchir les tendances spontanées de l’économie de marché à rentabiliser la production par la seule intensification du travail humain ;
  • le rejet des déterminismes technologiques et organisationnels ;
  • le réalisme économique de la combinaison démocratie/innovation.
Plus fondamentalement la social-démocratie pose comme principe d’action politique la compatibilité entre performance économique et justice sociale [2]. Dans cette approche portée par la social-démocratie et le syndicalisme réformiste, il va de soi que les conditions de travail et de salaire n’obéissent pas à un déterminisme d’airain et peuvent être modifiées dans des sens différents. « La qualification professionnelle n’a pas qu’un intérêt moral et matériel, elle est aussi un impératif d’efficacité économique : motivation des salariés, qualité de la production, productivité du travail au sens d’efficacité, maîtrise des évolutions technologiques et organisationnelles. C’est donc le maillon central d’une chaîne quoi comprend formation, organisation du travail, savoir-faire, classification, salaire. » (Dufour, 1990).

34En France cette alchimie, liée essentiellement aux rapports de confiance entre employeurs et syndicats, n’a pas pu prendre forme et a permis à l’Etat d’occuper une place prépondérante dans l’édification des relations sociales. Par ailleurs, le syndicalisme français n’a pas échappé à la duplication des différentes formes d’avant-gardisme de la gauche nationale. Cette culture avant-gardiste a entretenu l’isolement politique du monde ouvrier et son émiettement. Elle a affaibli l’implication des salariés dans les rouages démocratiques et leur capacité à peser sur les enjeux de société (mécanismes de redistribution, système éducatif, organisation des territoires administratifs, démocratie locale, logement, environnement mais aussi la construction européenne qui recoupe tous ces volets). Cette situation a également favorisé l’omniprésence de l’Etat dans la plupart de ces questions ainsi qu’une certaine forme d’inféodation des cadres syndicaux aux mécanismes de l’intervention publique. Le système de formation professionnelle initiale et continue est une illustration de cette tendance et n’a jamais été correctement investi par les syndicats en tant que forces de proposition.

Les limites du paritarisme de gestion

35Aujourd’hui la dérive financière du système paritaire de FPC est patente [3] au regard :

  • De son absence de valeur ajoutée en matière de politique de formation des entreprises ;
  • de son impact quasi-nul en matière de mobilités et de montée en qualification des ouvriers et des employés en cours de carrière.
Dans ce deuxième registre, où il s’agit d’organiser un système d’ensemble s’adressant aux salariés indépendamment de leur appartenance à une entreprise ou un secteur d’activité, l’effort permanent de qualification des adultes est essentiellement réalisé par les fonds publics (subventions de l’Afpa et du Cnam notamment), et marginalement par les fonds paritaires (congé de formation). La majorité des ouvriers et des employés formés dans ce cadre sont d’ailleurs accueillis par les organismes publics (Afpa et Greta forment annuellement plus de 10 000 salariés en CIF sur 35 000) qui disposent d’une logistique liée aux programmes publics de formation.

36L’effort annuel de montée en qualification des adultes et d’accès à la VAE qui devrait être multiplié au moins par cinq ne peut pas s’appuyer sur les seules forces administratives de l’Etat et des collectivités locales. De même il est illusoire de faire dépendre cette ambition du marché concurrentiel où l’offre de formation n’occuperait que les créneaux rentables ou ne viserait que les publics solvables (cadres). Elle suppose une implication locale et intersectorielle forte des partenaires sociaux autour d’axes d’intervention permettant aux salariés de constater l’apport du syndicalisme à l’organisation du système de formation. Compte tenu des budgets concernés que nous avons détaillés précédemment, il est urgent d’ouvrir une négociation entre l’Etat et les partenaires afin de faire la part entre ce qui nécessite le maintien de prélèvements obligatoires (les priorités sociales) et ce qui doit relever de la liberté de chaque entreprise ou branche. Une telle démarche permettrait de réaliser des économies substantielles mais aussi de peser favorablement sur la qualité de l’offre de formation. D’une logique de dépense aveugle, non évaluée, on pourrait revenir à un cercle vertueux fondé sur :

  • Des exigences renouvelées du côté des programmes prioritaires ;
  • les effets d’une véritable émulation et concurrence du côté du marché libre en matière de politiques d’entreprises.
Ces axes d’intervention sont à l’opposé de la place qu’occupent les organisations syndicales dans l’architecture institutionnelle actuelle du système de formation. Mais « on peut finalement se demander si la stabilité formelle de l’ordre social, incarné en quelque sorte dans les relations routinières entre l’appareil politico-administratif et les partenaires sociaux, ne dissimule pas une difficulté, voire une incapacité, à repenser les règles. (…) La réalité de la vie des entreprises – notamment la fragmentation croissante de la situation des salariés au travail – est à opposer à la mise en scène d’un jeu social régulé, organisé, contrôlé, dont on finit à la longue par se demander s’il n’existe pas avant tout pour faire comme si le monde ne changeait pas ou, mieux, pour dissimuler le fait que tout a changé et que les acteurs centraux n’y peuvent plus rien. » (Mathiot, 2000:184).

Faut-il un nouveau cadre de réforme ?

37La reconfiguration du système définie par l’accord interprofessionnel du 20 septembre 2003 (signé par l’ensemble des organisations professionnelles et syndicales) et la loi du 7 avril 2004 sont apparues comme une avancée majeure aux yeux de nombreux observateurs. Elle porte à son terme le mouvement qui, depuis 20 ans, tente de concilier dans le cadre du dialogue social d’entreprise les intérêts des salariés et des employeurs. Le droit individuel à la formation (DIF) est le point ultime de ce lent cheminement puisqu’il ouvre le principe d’un droit négocié entre le salarié et son employeur et la possibilité d’abonder ce mécanisme au moyen des trois volets financiers de l’obligation légale. Or cette orientation est doublement erronée :

  • D’une part, il n’y a aucune raison, sauf pour quelques secteurs d’exception et les marchés internes, que les salariés trouvent intérêt à échanger sur leurs projets professionnels personnels avec leur employeur (ni d’ailleurs avec les syndicats d’entreprise). Les projets professionnels des salariés doivent pouvoir bénéficier de points d’appui qui ne relèvent pas du face-à-face avec les employeurs. Certes, de grandes firmes ont développé cette dimension et travaillent même à l’anticipation de la mobilité externe de leurs salariés, mais c’est faire preuve d’une grande méconnaissance du monde du travail que d’imaginer les millions de TPE et PME intégrer ce type de pratiques.
  • D’autre part, l’enjeu de la FPC est très différent selon le niveau de qualification des salariés. Si les cadres et ingénieurs ont plutôt une large marge de manœuvre pour se construire une stratégie de développement personnel et professionnel autonome, les moins qualifiés sont dans une situation beaucoup plus difficile puisqu’ils sont dans une situation de subordination plus forte vis-à-vis de leur employeur et dans un rapport au marché du travail plus difficile. Cette question se situe donc à un autre niveau que celui du dialogue d’entreprise et concerne la façon dont les pouvoirs publics et les partenaires sociaux contribuent aux mobilités professionnelles et à l’accompagnement des évolutions professionnelles de celles et ceux qui ont un bagage scolaire faible et qui occupent les activités qui offrent le moins de perspectives. Il y a par ailleurs une intervention à maintenir en direction des cadres seniors qui sont pénalisés par les logiques managériales de courte vue et le choix français du déclin professionnel après 50 ans.
Une des faiblesses intrinsèques de la loi de 1971 avait été de considérer que l’intérêt des salariés sous l’angle éducatif se situait en dehors de l’économie (droit à la culture). Le congé de formation était supposé répondre à des intérêts personnels et non professionnels dans la continuité des thèses sur l’éducation permanente. Dans une société de plein emploi et de fort déterminisme social (l’appartenance socio-professionnelle était supposée immuable), l’objectif promotionnel pour les ouvriers et les employés avait été jugé irréaliste par les représentants des employeurs et ambigu par le mouvement syndical (devenir chef d’atelier ou technicien n’était-ce pas trahir sa classe d’origine ?). Par ailleurs le modèle de la stabilité professionnelle des salariés a circonscrit le champ de la FPC qui est apparue, en dehors de la formation des chômeurs, un objet strictement confiné dans le périmètre de l’entreprise. Seules les grandes firmes et les administrations publiques ont pu concilier formation et promotion interne et souvent dans l’ordre inverse (on promeut puis on forme). Or les trente dernières années ont été riches en mises en cause du modèle du plein emploi stable dans le même établissement et ont également révélé la situation de blocage professionnel des millions de salariés des TPE et PME. Mais c’est le chômage de masse, le développement des emplois de courte durée en début de carrière et les mutations du travail qui ont sérieusement égratigné le modèle de la carrière professionnelle dans la même entreprise.

38Le modèle du surplace professionnel est aujourd’hui contre-productif et pénalisant pour les moins qualifiés et ne prémunit d’ailleurs pas des licenciements. Elargir les objectifs de la formation à l’accompagnement des mobilités (du changement de métier à la promotion professionnelle au-delà de son entreprise) permet de rétablir l’équilibre entre employeurs et cette population en matière de gestion de l’instabilité et de sécurisation des parcours. Il n’est pas besoin d’être expert pour comprendre que chaque employeur ne peut pas être comptable de cette dimension qui suppose :

  • Une fluidité du marché du travail (pouvoir remplacer sans peine les partants) ;
  • un investissement sur l’élargissement des compétences de celles et ceux qui occupent les emplois les plus dégradés et les plus précaires. Cela ne veut pas dire que les CDD ou l’intérim sont à proscrire mais que la société doit se donner des mécanismes pour aider celles et ceux qui occupent ces statuts d’emploi afin qu’ils puissent évoluer et ne pas s’y enfermer.
Un troisième enjeu est sous-jacent à toute réforme du système de formation. Chaque année 70 000 jeunes décrochent de l’enseignement professionnel de façon précoce et 80 000 sortent du secondaire sans diplôme. Pourtant après 20 années de dispositifs et de programmes post-scolaires, il n’y a toujours pas d’évaluation sérieuse de leur contribution à la résolution de cette situation. Et pourtant l’accord interprofessionnel de 2003 a réédité une nouvelle formule destiné e à insérer et former les jeunes : le contrat de professionnalisation qui remplace les anciens contrats d’insertion en alternance. Ce nouveau dispositif (120 000 entrées) s’ajoute donc à l’apprentissage (400 000 apprentis), aux stages jeunes des conseils régionaux (400 000 entrées par an dans des formations courtes), à l’Afpa qui qualifie plus de 20 000 jeunes de moins de 25 ans.

39Il n’est pas illégitime que les partenaires sociaux soient responsabilisés sur l’accès au travail des jeunes peu ou non diplômés mais cela suppose l’ouverture d’une réflexion commune et simultanée des pouvoirs publics et des partenaires sociaux sur la modernisation de l’enseignement professionnel et la rationalisation de la formation post-scolaire des jeunes dont les 550 000 places annuelles étaient supposées qualifier les jeunes non diplômés.

40En tout état de cause deux niveaux d’intervention des syndicats se dessinent :

  1. Au niveau de l’entreprise et du secteur ou de la branche. Il s’agit ici d’articuler les mutations du travail et les compétences mais aussi d’objectiver le lien entre la qualification des salariés et les salaires, sachant que pour « la Cour de Cassation (…) l’employeur « a le devoir d’assurer l’adaptation des salariés à l’évolution de leurs emplois », donnant ainsi force juridique à la nécessaire adaptation professionnelle des salariés au changement technique. » (Supiot, 1994:260).
  2. Au niveau interprofessionnel et local. Il s’agit ici de faciliter la professionnalisation en début de carrière qui suppose une réforme de fond de la formation initiale et immédiatement post-scolaire et une instrumentation des mobilités au cours de la vie professionnelle quelles qu’en soient les causes (subies ou choisies).
Le système d’ensemble peut être minimaliste ou maximaliste selon les conjonctures économiques et les choix politiques. Dans l’adaptation et le perfectionnement professionnels liés aux transformations technico-organisationnelles du travail il y a une marge non négligeable pour l’action syndicale qui est notoirement sous-estimée en France. « L’évolution des techniques exige non seulement la mise en œuvre de nouveaux outils et de nouveaux équipements mais encore rend nécessaire une nouvelle organisation du travail. » (Lagandré, 1990:27).

41Dans l’accompagnement de l’insertion et des mobilités, il y a également un large éventail d’options notamment :

  • Celle (minimaliste et française) qui consiste à accompagner la promotion des plus qualifiés et organiser le reclassement professionnel et le surplace catégoriel des moins qualifiés au nom de la défense de l’emploi.
  • Celle (plus ambitieuse) qui consiste à consolider les processus d’intégration au travail pour les jeunes (professionnalisation), à développer prioritairement la promotion professionnelle des ouvriers et employés afin d’éviter les décrochages et les déclassements professionnels en cours ou en fin de carrière.
Dans les versions minimalistes les fonds privés et paritaires (issus de l’entreprise) suffisent à traiter des questions. Dans les logiques socialement ambitieuses et conformes aux exigences démocratiques (et la mobilité promotionnelle pour les ouvriers et employés en est une), l’apport des fonds publics dans le cadre d’une politique concertée est vital. Notamment tant que l’on n’aura pas démontré l’intérêt économique de la montée en compétences de celles et ceux qui ont eu une scolarité courte et exercent les emplois les moins qualifiés. Mais cette priorité, souvent affichée mais rarement concrétisée, n’est possible que s’il y a un contrôle social fort des fonctions permettant de l’assurer. Comment mettre en place des dispositifs prioritaires vers des publics sans orientation professionnelle et sans contrôle sur les pratiques des opérateurs ? La responsabilité du monde professionnel dans la performance des opérateurs de l’orientation, de la formation ou de la certification professionnelle est décisive. La présence de professionnels des métiers dans les jurys d’examen des diplômes professionnels en est une expression de bon sens. Mais qui pourrait contester la participation des mêmes représentants des professions, des métiers et des secteurs aux choix des équipes de formateurs ou des contenus de l’orientation professionnelle ? Sans nier l’autonomie de gestion des organismes de formation ou d’orientation mobilisés dans les programmes prioritaires, l’implication des professionnels dans le contrôle social de ces opérateurs apparaît comme un incontournable. Mais cela suppose de privilégier des modes d’organisation fondés sur la mobilisation de syndicalistes d’entreprises et de représentants syndicaux territoriaux au détriment de commissions ou de structures administratives ou gestionnaires nationales ou régionales coupées des réalités. Certes, cela existe de façon sporadique ou informelle, mais il n’y a pas de visibilité sociale de ces dimensions du point de vue des salariés, alors même que l’imprégnation bureaucratique est, elle, aveuglante.

Des pistes d’amélioration

42Parce qu’elle s’adresse à la population qui a le moins bénéficié de l’école et qui occupe les emplois les moins valorisés, la formation des adultes doit déployer une qualité de prestations proportionnellement plus élevée que les opérateurs haut de gamme destinés aux cadres car il s’agit de compenser efficacement toute une série d’obstacles psycho-sociologiques liés à un passé scolaire négatif ou à des expériences professionnelles faiblement enrichissantes. Il faut également prendre garde à ne pas dévaloriser des personnes qui ont acquis des savoirs sans en être forcément conscients. La tendance à mobiliser la formation lors des crises (licenciement, chômage de longue durée, décrochage social, etc.) a accentué ce sentiment d’échec que l’on peut ressentir dans ces périodes. La fragilisation des chômeurs a été un terreau pour l’émergence de démarches d’appuis psychologiques déconnectés du rapport au travail et qui se sont substituées à la formation professionnelle en tant que telle. Or l’objet de la formation est, au départ, très pragmatique (acquérir ou développer des compétences professionnelles dans un domaine d’activité donné), et n’a que peu de points communs avec le traitement social des exclus. On peut même estimer qu’en période de crise de l’emploi et de dévaluation du travail, le système de formation doit accentuer ses liens avec le travail et consolider ses objectifs professionnels.

43Ce dernier volet nécessite une régulation et un contrôle de l’appareil de formation professionnelle. On peut débattre sur l’organisation et le statut de cet appareil (public, para-public, privé, etc.) et des services qui lui sont associés (orientation, lien avec les valideurs et certificateurs, ingénierie de formation, services d’appui, etc.) mais les règles pures du marché ne peuvent s’y appliquer. La meilleure option est celle qui évite une trop grande fragmentation de l’offre de formation et qui incite un même opérateur à pouvoir intervenir sur les différents volets de la FPC car c’est un gage de qualité intrinsèque. Un opérateur de formation qui ne contribue pas significativement à la promotion professionnelle des moins qualifiés sera amputé d’une grande partie de ses moyens quand il lui faudra contribuer au reclassement professionnel des licenciés économiques ou des chômeurs. On peut convenir d’une segmentation sectorielle de l’appareil de formation, on peut également comprendre (sans l’approuver entièrement) une segmentation par niveau (public cadre et public ouvrier) mais il est beaucoup plus difficile d’identifier les avantages d’une segmentation par objectifs de formation ou par statut de public. Celles et ceux qui sont confrontés aux aléas du marché du travail doivent savoir que leurs besoins de formation seront traités par les organismes les plus performants. Et les seuls états de service qui vaillent en ce domaine sont ceux qui s’acquièrent dans l’effort de montée en compétences et en qualification des moins qualifiés. Cette ambition doit être fondée sur un tripartisme d’action destiné prioritairement aux publics que nous avons évoqués. Il ne s’agit pas ici de suggérer un droit abstrait à la qualification professionnelle tout au long de la vie mais de définir les conditions :

  • D’un traitement permanent des besoins et des projets des personnes (pilotage tripartite d’un service public d’orientation et de conseil professionnels) ;
  • d’un droit au congé de qualification se substituant aux actuels DIF et CIF ;
  • de prise en charge des salariés démissionnaires en mi-carrière ayant un projet professionnel ou désireux de se reconvertir professionnellement ;
  • d’un accès régulé aux opérateurs et organismes préparant aux différents diplômes, titres et certificats (ce qui suppose une habilitation de la part des valideurs) ;
  • d’une organisation de l’appareil de formation concerné permettant de garantir une couverture territoriale et sectorielle exhaustive ;
  • de ressources permettant de faire fonctionner les démarches de validation et de certification.
Cet objectif nécessite également de privilégier les revendications communes des salariés tout en développant une capacité à peser sur l’évolution du système de production. Par exemple :
  • En évitant que les différentiels sectoriels et techniques soient mis en avant pour justifier des écarts trop importants de salaires et de statuts ;
  • en retravaillant sur les fondements de l’éventail des salaires entre catégories professionnelles ;
  • en relativisant les avantages liés à l’ancienneté d’exercice de la même activité au profit d’incitations à la mobilité professionnelle ;
  • en participant comme force de proposition aux évolutions techniques et organisationnelles des entreprises et des grands secteurs (ce qui est une façon de dépasser la position conservatrice du corporatisme) ;
  • en misant sur l’investissement formation comme mode d’accompagnement des changements dans l’entreprise et comme corollaire des mobilités professionnelles et du renforcement de l’employabilité face au risque de chômage.

Conclusion

44Les partenaires sociaux sont dans l’obligation de définir un pacte social rénové qui implique de relativiser les espaces gestionnaires qu’ils occupent sous l’égide de l’Etat (l’obligation légale de financement de la formation continue, dans son architecture actuelle, fait partie de cette construction) pour établir des niveaux d’intervention plus opérationnels. Réinvestir ce chantier suppose de différencier :

  1. La politique de formation des entreprises et des branches qui obéit à des impératifs strictement économiques articulés aux choix technologiques, organisationnels et gestionnaires auxquels les syndicats doivent être associés. Cette politique d’entretien et de développement des compétences des salariés dans le cadre de leur emploi et dont le lien avec les classifications et le salaire doit être objectivé.
  2. Les processus d’autoformation et de développement des compétences de nombreux cadres et professionnels de haut niveau qui disposent des compétences et des réseaux qui leur permettent de progresser sans qu’il soit nécessaire de mobiliser des prélèvements obligatoires ou les fonds de l’entreprise.
  3. La politique d’appui permanent aux évolutions professionnelles de celles et ceux qui occupent les emplois les moins valorisés et qui sont les plus fragilisés sur le marché du travail.
Ces dimensions ne sont pas étanches (une politique d’investissement formation ambitieuse favorise de fait l’employabilité des salariés) et peuvent être articulées. Dans certains secteurs la formation des cadres et des ingénieurs peut s’avérer une priorité partagée par les pouvoirs publics ou les fonds paritaires. Mais ces volets ne peuvent pas obéir aux mêmes mécanismes budgétaires.
  • Ce qui relève de l’obligation d’entretien des compétences des salariés par les employeurs et des politiques d’investissement, doit être dégagé de toute logique de taxe, d’impôt et d’obligation financière. Le volontarisme externe en la matière est inopérant.
  • Le deuxième champ est l’illustration de la diffusion des savoirs dans la société et de la volonté individuelle de construire sa vie par ses propres moyens et selon ses propres souhaits non négociables avec quiconque.
  • La troisième dimension relève, certes, de la nécessité de remédier aux dysfonctionnements socio-économiques de l’économie de marché (licenciement, déclin professionnel, obsolescence de certains métiers ou de certaines technologies, etc.) mais elle ne peut pas s’y limiter, sans contribuer à la stigmatisation des personnes (risque du traitement social). Cette dernière finalité relève d’abord de l’ambition démocratique qui consiste à permettre à chacun d’aller jusqu’au bout de ses ambitions sociales et professionnelles indépendamment de ses origines sociales ou de son passé scolaire. C’est parce que cette exigence démocratique est tenue qu’elle permet, techniquement parlant, de traiter correctement des situations d’urgence.
Il ne peut donc pas y avoir une réforme ambitieuse du système de FPC qui dédouanerait le monde du travail du développement des compétences professionnelles des moins qualifiés au-delà de leur appartenance à telle ou telle entreprise. Mais cette option n’est réaliste qu’au moyen de dispositifs prioritaires à financements ciblés qui impliquent les pouvoirs publics et les partenaires sociaux. Plus précisément il ne s’agit pas de dépenser plus mais :
  • De déplacer un volet substantiel des prélèvements obligatoires vers des populations prioritaires ce qui suppose des convergences entre pouvoirs publics et partenaires sociaux sur le plan sectoriel et local ;
  • de libérer l’entreprise de tout cadre budgétaire contraint (ce qui n’implique pas la levée de toute exigence réglementaire) quant à la politique d’entretien et de développement des compétences de leurs salariés.
Pour celles et ceux qui ont le moins bénéficié de l’investissement éducatif, il est légitime sur le plan social que l’Etat contribue à établir des droits et à organiser des ressources favorisant l’accès à la formation professionnelle continue dans ses aspects promotionnels ou qualifiants (obtention d’une qualification supérieure à celle que l’on possède). Il est également juste économiquement que les entreprises puissent contribuer financièrement à un tel système puisqu’elles en tirent bénéfice globalement : la qualification de la main d’œuvre est un atout macro-économique mais plus prosaïquement le retour rapide au travail des chômeurs est également une limitation des budgets sociaux consacrés à la prise en charge des sans emploi. Enfin, les syndicats ont objectivement intérêt à favoriser les choix d’organisation fondés sur la montée en compétences des actifs car ce processus favorise aussi leur employabilité (potentiel de mobilité) mais justifie également l’investissement éducatif (ouvrir des perspectives aux jeunes). Ces exigences ont d’ailleurs été exprimées récemment sous diverses formes, pour la CGT : « Il faut donc inscrire le droit à l’emploi dans une vision nouvelle du travail impliquant la reconnaissance d’un droit à la mobilité professionnelle, à l’organisation d’une carrière diversifiée, à la définition de formes de travail complémentaires. On dépasse ainsi la seule relation classique du travail reconnue dans le contrat salarié/employeur, comme l’approche, à dominante libérale, du contrat d’activité… » (Le Duigou, 2005:109). Pour la CFDT : « (…) dans un monde où les techniques sont toujours plus rapidement menacées d’obsolescence, où l’intensification du travail et l’allongement des carrières, rendent inimaginable l’exercice du certains métiers toute une vie, dans un monde hanté par la menace du chômage et la peur du déclassement, une révolution culturelle est nécessaire. Il s’agit de donner à chacun, en permanence, la possibilité de « se relancer » – dans une autre entreprise, une autre administration, un autre métier, un autre niveau hiérarchique. » (Chérè que, 2005:109-110).

45En ce qui concerne les salariés les moins qualifiés, une politique prioritaire de formation qualifiante suppose une réactivation de la négociation salariale qui est l’élément majeur de la reconnaissance de la qualification, mais aussi des évolutions professionnelles (élargissement des responsabilités, fonctions nouvelles, pluri-compétences ou polyvalence, etc.). Aujourd’hui l’intervention publique influence lourdement la négociation des salaires de base. Si on additionne le mécanisme du Smic, l’exonération des charges sociales sur les bas salaires et la prime pour l’emploi on aboutit à plusieurs effets pervers dont le moindre n’est pas le tassement par le bas de la hiérarchie des classifications de base et une déformation des mécanismes de formation du salaire lui-même : « (…) on a – pour le bas de la distribution salariale au moins – une transformation des règles relatives à l’établissement des revenus. » (Volovitch, 2006:67). Ce phénomène réinterroge les fondements et le périmètre de la négociation collective car il positionne l’Etat dans un rôle de substitution aux négociations salariales pour un nombre croissant de salariés. Or cette conjonction d’intervention de l’Etat au nom de la croissance du salaire minimum (Smic), des compléments de revenu (prime pour l’emploi) mais aussi du maintien de l’emploi des moins qualifiés, réduit la légitimité des syndicats de salariés dans la défense de la qualification professionnelle et ampute la négociation collective d’une dimension essentielle. Cette situation est d’autant plus paradoxale que l’Etat se désinvestit subrepticement du champ professionnel en misant sur la négociation d’entreprise.

46Dans une économie traversée par la construction européenne, la mondialisation, les défis du développement durable et local, les mutations du travail et les mobilités, l’antagonisme entre le social et l’économique n’est plus tenable. Cette partition explique en partie de nombreux constats relatifs à notre système de production : sous-développement de la recherche-développement, archaïsmes en matière de conditions et d’organisation de travail, politiques d’embauche discriminantes, enrayement des mécanismes promotionnels, sous-estimation des compétences d’expérience, marginalisation professionnelle des seniors, etc. Sous l’angle de la formation, ces options reposent sur l’ouverture, la mutualisation et le renouvellement permanent des savoirs (des personnes et des entreprises) Des chantiers comme ceux de la sécurisation des parcours des moins qualifiés ou des mobilités professionnelles ascendantes ne pourront être engagés que si des problématiques habituellement séparées sont articulées (gestion prévisionnelle des emplois et des compétences et formation continue, qualité du travail et cotisations sociales, statut d’emploi et mobilités intersectorielles, organisation de la durée du travail et statuts d’emploi, etc.). Si on considère notamment que les territoires sont des espaces à réinvestir pour les politiques du travail, de l’emploi et de la formation, alors il faudra réduire considérablement les effets de la fragmentation sectorielle.

47Une telle orientation ne se heurte pas à la complexité des sujets mais à l’atonie de notre démocratie sociale et à l’état déliquescent du dialogue social. Ce constat n’est ni original, ni nouveau mais il imprègne toute la société et il imprime une marque particulièrement pessimiste dans les consciences populaires. La crise du syndicalisme est au centre de cette situation, mais c’est tout l’édifice républicain qui est atteint et c’est la démocratie politique qui connaît désormais une déstabilisation profonde. Pourtant l’essentiel des difficultés que connaissent les couches populaires (les 15 millions d’ouvriers et d’employés au travail ou au chômage dont 50 % de pauvres) tient à des dysfonctionnements qui n’ont rien de fatal. Ceux-ci relèvent d’abord d’une crise de gestion de notre système de production et des mécanismes qui sont censés y remédier : notamment la négociation collective et plus largement la capacité des partenaires sociaux à établir des compromis qui concilient les intérêts des entrepreneurs et ceux des salariés mais qui développent également des perspectives de développement personnel pour ces derniers.

Bibliographie

Références bibliographiques

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Notes

  • [*]
    Responsable de la prospective à l’Afpa, Chargé d’enseignement à l’université de Paris 1.
  • [1]
    Estimations sur la base des données Dgefp/Dares, PLF 2006, PLF 2007.
  • [2]
    Les liens quasi-organiques entre les différentes variétés de la social-démocratie européenne et les syndicats de salariés furent souvent vampirisés notamment par les fonctions gouvernementales des partis sociaux-démocrates. De ce point de vue il serait inexact de présenter l’actuelle crise syndicale en France comme une exception, les syndicats scandinaves ou allemands sont également traversés par des délitements et des pertes d’influence qui résultent d’une trop grande intégration dans les rouages institutionnels.
  • [3]
    On peut consulter à ce sujet les remarques du dernier rapport public de la Cour des comptes sur « la collecte de la contribution des entreprises à la formation professionnelle », page 249 et suivantes.
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