Notes
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[1]
Nous remercions Sylvie Le Bon de Beauvoir pour ce précieux renseignement, qui allonge encore la durée de remaniement de « Départ ».
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[2]
Vente Sotheby’s, 21 mai 2008, lot n° 85. Acheté par la BNF, le manuscrit porte désormais la cote NAF 28493.
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[3]
Achat 1989 (A. 89-15). Ces cahiers sont cotés NAF 27411-27414. Malgré le rapprochement de ces feuillets volants et du manuscrit acquis en mai 2008, des lacunes subsistent dans le texte, qui semble n’avoir jamais été achevé.
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[4]
Simone de Beauvoir, Cahiers de jeunesse, 1926-1930, texte établi, annoté et présenté par Sylvie Le Bon de Beauvoir, Paris, Gallimard, 2008.
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[5]
Ibid., p. 511. On constate que les dates de l’écriture de « Départ », que l’on peut situer approximativement entre l’été 1926 et l’été 1927, correspondent au début du journal.
-
[6]
Après l’avoir prénommée Marguerite, Beauvoir modifie son choix et se fixe sur Denise.
-
[7]
S. de Beauvoir, Cahiers de jeunesse, op. cit., p. 298 (mardi 12 avril 1927).
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[8]
Ibid., p. 307 (17 avril 1927).
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[9]
S. de Beauvoir, Mémoires d’une jeune fille rangée, Paris, Gallimard, 1958, p. 291-292.
-
[10]
S. de Beauvoir, Cahiers de jeunesse, op. cit., p. 396 (vendredi 19 août 1927). Simone de Beauvoir a vraisemblablement abandonné « Départ » pour entamer une nouvelle œuvre.
-
[11]
Ibid., p. 399 (lundi 22 août 1927). Les amitiés en question sont celles de la Sorbonne, et particulièrement celle de Maurice Merleau-Ponty, dont elle vient de recevoir une lettre le dimanche 21 août.
-
[12]
Ibid., p. 406 (mardi 27 septembre 1927).
-
[13]
Manuscrit de « Départ », f. paginé 20 par S. de Beauvoir.
-
[14]
Ibid., début de rédaction du chapitre IV.
-
[15]
Ibid., 3e f. appartenant à ce que S. de Beauvoir intitule « SS VI » (il semble qu’il s’agisse d’un ajout, ou d’une réécriture d’un chapitre).
-
[16]
S. de Beauvoir, Cahiers de jeunesse, op. cit., p. 287.
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[17]
Ibid., p. 350 (mardi 24 mai 1927). Jean Miquel est un élève d’Alain avec qui Simone de Beauvoir s’était liée à la Sorbonne.
-
[18]
Manuscrit de « Départ », fiche intitulée « thème 8. rapport avec les autres » par S. de Beauvoir.
-
[19]
Ibid., f. paginé 107 par S. de Beauvoir.
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[20]
S. de Beauvoir, Cahiers de jeunesse, op. cit., p. 292 (vendredi 18 mars 1927).
-
[21]
Manuscrit de « Départ », plan de la troisième partie.
-
[22]
S. de Beauvoir, Cahiers de jeunesse, op. cit., p. 82 (6 septembre 1926).
-
[23]
Manuscrit de « Départ », chapitre II, verso.
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[24]
Ibid., f. appelé « plan détaillé » par S. de Beauvoir.
-
[25]
Ibid., f. paginé 69 (verso) par S. de Beauvoir.
-
[26]
Ibid., f. paginé 20 par S. de Beauvoir.
-
[27]
S. de Beauvoir, La Force de l’âge, Paris, Gallimard, 1986, p. 107.
-
[28]
S. de Beauvoir, Cahiers de jeunesse, op. cit., p. 343-344 (vendredi 13 mai 1927).
-
[29]
Ibid., p. 86 (9 septembre 1926).
-
[30]
Manuscrit de « Départ », « possibilité d’intrigue » (description des personnages).
-
[31]
S. de Beauvoir, La Force de l’âge, op. cit., p. 64. L’auteur situe cette tentation en 1931.
-
[32]
Manuscrit de « Départ », f. paginé 87 par S. de Beauvoir.
-
[33]
Ibid., f. paginé 41 bis par S. de Beauvoir.
-
[34]
Ibid., f. de résumé des parties I et II.
-
[35]
Ibid., f. paginé 36 par S. de Beauvoir.
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[36]
Ibid., f. paginé 5 par S. de Beauvoir.
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[37]
S. de Beauvoir, Cahiers de jeunesse, op. cit., p. 363 (jeudi 7 juillet 1927). Plus loin, p. 365, elle décrit dans quelle direction peut aller son œuvre : « je me crée, je crée mon histoire, je vis et fais vivre aux autres des romans compliqués et ardents – d’où besoin de faire passer tout cela dans une œuvre, une œuvre qui dirait tout, qui analyserait minutieusement les âmes tout en faisant respirer chaque corps ».
-
[38]
Voir S. de Beauvoir, Cahiers de jeunesse, op. cit., p. 408 : « Il faut que j’écrive mon livre pour m’affirmer moi » (jeudi 29 septembre 1927).
-
[39]
Ibid., p. 410 (mardi 3 octobre 1927).
-
[40]
Ibid., p. 417 (lundi 31 octobre 1927).
-
[41]
Ibid., p. 417 (mercredi 2 novembre 1927). Georgette Lévy est une amie connue à la Sorbonne.
1Entrepris probablement pendant l’été 1926, « Départ » constitue un des premiers essais de roman de Simone de Beauvoir. Peu de traces nous indiquent l’étendue de la rédaction, qui semble avoir duré plusieurs mois. Une note, au sein du texte, porte la mention « mars 1927 », rare information interne permettant de dater la période d’écriture. L’allusion à un devoir sur la personnalité donne une indication supplémentaire, ce devoir ayant été entrepris en septembre 1927 et remis à Jean Baruzi fin janvier 1928 [1].
2Le manuscrit est composé de 172 feuillets très variés : papiers de formats et de couleurs différents, encres noire, bleue, brune… Diverses phases du travail – plans, esquisses, rédaction – se trouvent entremêlées, représentant ainsi un ensemble particulièrement riche, voire foisonnant, malheureusement incomplet.
3L’histoire de ce document, mouvementée, explique l’absence de certains feuillets et le caractère fragmentaire de l’ensemble : probablement conservé dans l’armoire où Sartre entassait ses manuscrits rue Bonaparte, il a sans doute, comme beaucoup d’autres, été vendu par un voisin indélicat après le plasticage de 1962, et n’est réapparu qu’en 2008, lors d’une vente publique [2]. Par ailleurs, quelques feuillets demeurés insérés dans le journal de Simone de Beauvoir ont intégré le département des Manuscrits de la BNF en 1989, en même temps que ces « cahiers de jeunesse [3] » – qui viennent d’être publiés [4]. Non seulement « Départ » leur est contemporain, mais il aborde des thèmes identiques à ceux développés dans les lignes personnelles de Beauvoir. La frontière entre fiction et autobiographie apparaît alors très mince.
4La jeune fille a dix-huit ans à peine lorsqu’elle s’attelle à ce projet de roman. Elle y fait allusion dans son journal, en octobre 1928, lorsqu’elle résume ses vacances de l’été 1926 : « Je commence à écrire Denise, je lis de la philo [5]. » Or, l’héroïne de « Départ » se prénomme Denise [6] : l’été 1926 semble bien marquer la première tentative sérieuse, organisée, d’écriture romanesque. « Écrire. Une œuvre où je dirais tout, tout. Il y a un besoin impérieux en moi de cela [7]. » Ce sont ses propres doutes et incertitudes quant à l’avenir que le futur écrivain met en mots : « Je voudrais écrire un roman : d’une jeune fille que son futur visage de 40 ans effraie tant qu’elle emploie toutes ses forces à se refuser à vivre, mais de tout ce que j’imagine, je sais que rien hélas ! ne franchira le seuil de mon cerveau et pourtant j’aurais bien des choses à dire [8]… »
5Si plusieurs préoccupations semblent habiter Simone de Beauvoir, l’apprentissage de l’amour et la description de la vie intérieure de son héroïne, très clairement parallèles à ses propres expériences, forment le sujet central du roman. Se dessine également, au gré de quelques notes et analyses psychologiques assez fouillées, le cheminement philosophique de l’auteur alors en pleine recherche. Enfin, le thème de l’élaboration de la fiction surgit de chaque annotation, rétrospective ou non.
Un roman très autobiographique
6Simone de Beauvoir est alors très proche de son cousin, Jacques-Charles Champigneulle. Son amour pour lui, avec des hauts et des bas, dure jusqu’en 1929 : elle apprend alors qu’il fait un mariage d’argent. Durant cette période, les alternances d’espoir, de doute et d’enthousiasme à l’égard de Jacques constituent une partie importante de sa vie. Cette entreprise de construction personnelle, douloureuse, prendra plusieurs années, l’écriture permettant de mettre à distance, de déverser le trop-plein de ses interrogations. Sous couvert de fiction, « Départ » apparaît comme très autobiographique, dans sa proximité avec les Cahiers de jeunesse. Dans ses Mémoires d’une jeune fille rangée, l’auteur évoque cette période, ainsi que l’intrigue de ce roman, qu’elle rapproche de sa propre existence :
Cette rédaction s’insère dans un quotidien empli d’entreprises diverses, toutes convergeant vers la tentative de découverte de soi et d’un chemin approprié. « Médité sérieusement et commencé ce livre qui m’a l’air de marcher, que je veux écrire et auquel je n’attache pas trop d’importance [10]. » L’écriture apparaît comme une détente qui permet de ne pas s’appesantir sur la pensée pure et le roman n’occupe qu’une place parmi d’autres : Beauvoir se cherche aussi par son journal, ses conversations – notamment avec Maurice Merleau-Ponty et sa grande amie Élisabeth Lacoin, dite Zaza. « Dans ces amitiés et ce livre que j’écris, tout sert de ce que j’ai été [11]. » Afin de tout concilier, il lui faut donc fractionner son temps. C’est ainsi qu’elle note, pour l’année scolaire à venir, le mardi 27 septembre 1927 : « Il faut : faire deux devoirs pour Baruzi, écrire mon livre, finir mes licences [12]. »Je composai ma première œuvre. C’était l’histoire d’une évasion manquée. L’héroïne avait mon âge, dix-huit ans ; elle passait des vacances en famille dans une maison de campagne où devait la rejoindre un fiancé, qu’elle aimait conventionnellement. Jusqu’alors, elle était satisfaite de la banalité de l’existence. Soudain, elle découvrait « autre chose ». Un musicien de génie lui révélait les vraies valeurs : l’art, la sincérité, l’inquiétude. […] Je ne me fis pas d’illusion sur la valeur de ce récit ; mais c’était la première fois que je m’appliquais à mettre en phrases ma propre expérience et je pris plaisir à l’écrire [9].
Ce passage se retrouve, presque identique, dans un feuillet inséré au sein des « cahiers de jeunesse »
Tout de même, ce n’était pas cette réponse-là que j’attendais anxieuse.
Cette sérénité, cette simplicité que Jean me vantait l’autre jour, dont tout le monde ici me loue, est-ce que vraiment je les possède ? il me semble qu’il me faut un effort pour y atteindre, qu’il y a des choses en moi que j’étouffe. Je ne comprends pas, je ne comprends pas…
[Jean était parti l’autre jour passer la journée chez un ami ; je suis montée au-dessus de la vigne, pour tromper son absence par son souvenir ; je me suis assise sur le banc, j’ai fermé les yeux : j’ai revu une jeune fille en robe bleue… je me suis souvenue d’un émoi délicieux ; mais rien en moi ne répondait, je ne le désirais pas, je ne le sentais pas présent ; elle est si loin de moi cette jeune fille… l’autre jour aussi, je suis revenue avec lui ; les deux images se mêlaient ; et la seconde ne me semblait qu’une pâle, une pâle copie de la première, fautive et mensongère résurrection du passé – j’ai rouvert les yeux ; j’ai regardé ce paysage qui m’avait enchantée. Rien, rien ; je ne le reconnaissais pas. (développer un peu plus).
On m’a appelée ; j’étais énervée, j’avais un tel besoin de solitude, il me semblait que je vivais une minute grave, et tout quitter brusquement ; une immense envie de pleurer m’a prise à la gorge : oh ! la gorge sèche, sèche qui se contracte – des rires, des railleries m’entourent… « où étais-tu… comme tu as l’air sombre ».
Cette simple phrase va amener la crise. Je le sens ; je voudrais crier : « oui je suis triste, triste à mourir, vous ne comprenez rien, laissez-moi » ; je sens des larmes au bord des cils, je ne peux pas parler ; et dire que je n’aurai pas une minute pour laisser couler ces larmes et sangloter un peu ; je ne sais pourquoi, toutes les idées tristes que j’ai pu nourrir pendant ces vacances m’assiègent ; jamais je n’ai connu telle détresse ; d’où vient ce chagrin, à quoi sert-il ? à qui sert-il ? Je ne sais pas comment j’ai fait ; je me suis retrouvée à table riant et plaisantant ; je sais que je n’aurais pas pleuré ; j’ai été frappée de stupeur : ai-je rêvé ma peine ? est-ce que maintenant je rêve ?]
À présent c’est une idée fixe ; le sentiment d’une dualité me hante – hier je m’étais mise à mon piano ; maladroitement j’essayais une mélodie qui depuis quelques jours m’obsède ; oh ! joie ; peu à peu j’entendis mon âme qui chantait dans le piano ; une exaltation m’a saisie, une conscience étonnée de moi-même ? c’est moi, moi qui suis là ! moi qui fais chanter ce piano. Et tout à l’heure, je serai avec maman, en train d’essayer ma robe pour le prochain bal.
Pendant les conversations surtout, je me sens à une distance extraordinaire ; je déteste tant cela, des gens qui se réunissent ; rien à se communiquer ; on parle, on ment ; je ne dis pas ce que vraiment je pense, mais ce qui intéresse les autres, des mots ! des mots ! j’étais dans mon fauteuil. Un étrange état de passivité, comme un rêve.
Écrire un essai intitulé « acte de foi » pour montrer le nombre d’actes de foi qui sont nécessaires pour vivre. Plusieurs essais ou un seul roman ? « La jeune fille qui ne veut pas d’actes de foi » – synthèse de soi et de l’autre.
Une jeune fille rencontre l’autre : extase ! sortir de soi absolument. Elle aime.
Elle s’aperçoit qu’elle est aimée. Pourquoi ? elle a peur de n’être pas connue telle quelle. Il lui dit pourquoi – le portrait est juste et pourtant le malaise subsiste en elle – fait son portrait aussi exact que possible ; lui décrit les misères pour lesquelles elle se méprise à pleurer : il les aime – les mêmes choses senties ou vues ne sont donc pas les mêmes. Solitude de + en + grande.
Soudain elle pense « mais n’est-ce pas de même pour lui ? » essaie de l’imaginer par sympathie – peu à peu l’admiration s’effrite – elle n’aime plus.
Elle lui dit adieu. Jamais elle ne sortira d’elle.
Un jeune garçon seul, écœuré de ses limites cherche l’autre éperdument. Rencontre d’un ami. L’ami l’admet à l’intimité la + complète. Et soudain il n’y a plus lui et l’autre enfin intégré à lui : il n’y a plus que deux enfants solitaires qui se mettent à pleurer ensemble.
Ce serait suffisant pour commencer – ne pas confondre le désir de sortir de soi que choisira le 2e cas (prison, portes fermées…) et l’admiration que choisit le 1er ; pas de choix : contemplation seulement elle sentira que sa contemplation se trompe d’objet.
« Départ », verso d’un feuillet du chapitre VI
« Départ », verso d’un feuillet du chapitre VI
Plusieurs idées de romans, la première étant vraisemblablement « Départ »
Plusieurs idées de romans, la première étant vraisemblablement « Départ »
7Certains renvois à son cahier personnel dans le manuscrit de « Départ » – « Voir mon journal I [13] » écrit-elle entre deux phrases – soulignent l’inspiration autobiographique. La forme initiale du roman, à savoir le journal, contribue elle aussi à fausser les pistes et à assimiler « Départ » à un journal bis : « (un récit ? ou un journal ? environ 240 pages…) » s’interroge-t-elle à la fin du plan de sa troisième partie. Ce principe du journal est repris, par exemple, au début du chapitre IV :
ch. 4
25 août. Comment ai-je pu douter fût-ce une minute de mon amour pour lui ? Le lendemain de mon arrivée, j’échange quelques balles avec Madeleine au tennis, je me suis souvenue d’un matin tout semblable : des toiles d’araignée toutes perlées dans les herbes ; le soleil très chaud déjà – la fraîcheur délicieuse – et ce sentiment de jeunesse physique – cet ensemble de choses qui compose une minute de l’existence, si communes chacune, mais dont la réunion est unique [14] […].
9Quant à la description de la psychologie de l’héroïne, elle semble très proche du questionnement quotidien de l’apprentie écrivain. La comparaison entre le journal et une note datée apparaissant dans le roman est à cet égard significative. Sur un feuillet, Beauvoir a inscrit :
Si elle était sincère, il se refusait avec un mot dur ; si elle se faisait grâce de sa sincérité, il acceptait avec bonne volonté mais sans plaisir, avec un air de lui dire « vous vous donnez bien du mal pour rien » ; de toutes façons elle le sentait embarrassé d’elle – et il n’y avait rien à faire contre ce malaise que contenait leur mutuelle présence : car c’est sa sincérité même qu’il eût fallu changer, non qu’elle [acceptât] d’oublier en sa faveur, mais qu’il sût qu’elle n’avait plus rien à oublier. [Notes du 12 mars 1927] [15].
11Dans les Cahiers de jeunesse, à cette même date (samedi 12 mars 1927) :
Finies les lassantes analyses de moi-même, les recherches, et aussi les efforts trop désespérés vers lui [16].
13Visiblement, Simone de Beauvoir doute de Jacques, et transpose ce désarroi sentimental chez son héroïne.
14À cette période où sa personnalité se construit, son sujet de préoccupation principal est ce qu’elle appelle « le monde intérieur » :
Causé hier encore avec Miquel qui se révèle communiste : j’ai compris qu’on peut être intelligent et s’intéresser à la politique ; mais il est loin de moi, car pour moi quel prix pourrais-je attacher à la recherche du bonheur de l’humanité lorsque le problème tellement plus grave de sa raison d’être me hante ? je ne ferai pas un geste pour ce royaume terrestre ; le monde intérieur seul compte [17].
16C’est ce que traduit son livre en gestation, centré sur la figure féminine de Denise, à la recherche d’elle-même, de son être profond, de son rapport aux autres, mais surtout à l’Autre, l’âme sœur.
[…] chaque être est unique, irremplaçable, q. q. chose d’infini et pourtant périssable ; devoir de les connaître pour qu’ils périssent moins ; comme elle se penche sur elle, elle se penche sur les autres. Pour leur être fidèle, plus fidèle qu’eux-mêmes ; goût ardent des âmes – douleur quand elle en pressent une et qu’elle ne peut la pénétrer autant qu’elle voudrait : toute cette beauté perdue pour moi [18].
18Au milieu de notations si personnelles, de tâtonnements intérieurs à la troisième personne, la fiction peine à faire sa place.
Les premiers pas d’une philosophe
19La réflexion, tant littéraire que philosophique, est très présente dans le roman : « toute l’interrogation anxieuse d’autrui, les journées à la Sorbonne, le goût passionné des autres qu’il faut dire [19] ».
20Habituée à s’analyser, à s’interroger sur sa vie, la jeune Simone de Beauvoir aborde également des sujets philosophiques plus généraux. Dans ses cahiers de jeunesse, elle souligne la dualité « si souvent constatée entre [s]on être pensant et [s]on être sentant, à la fois (au sens large du mot) amoureuse et intellectuelle [20] […] ». Le manuscrit rend compte de ces questionnements, que le roman se doit de mettre en jeu. Dans son plan de la troisième partie, Simone de Beauvoir prévoit, pour le chapitre VII :
Présences retrouvées – unification de soi – paix grandissante – force qui se conquiert – recréation du réel sur un autre plan : combats, conquête, l’amour etc. parfois lassitude.
prolonger les autres en soi – composer des paysages de beauté – s’y maintenir – sens de la philosophie – sens de l’art – sens de la morale surtout – se sauver du temps – valeur universelle de cela [21] […].
22On le voit, il ne s’agit pas d’une intrigue à proprement parler, mais plutôt d’une suite de concepts à élucider, à mettre en situation. Et l’ambition de la jeune philosophe paraît grande, au vu de cette liste d’interrogations fondamentales.
23Son goût pour ces thèmes n’a rien d’étonnant : la rédaction de « Départ » correspond à une époque de formation personnelle et intellectuelle, en réaction contre sa famille et son milieu, contre ce que l’on attend d’elle. La question de l’avenir de l’héroïne, Denise, apparaît comme une tentative d’élucidation de ses propres tiraillements : qu’est-ce que le mariage entre deux êtres ? Un mari peut-il être « l’âme sœur » ? Peut-on aimer sans admirer ? Les hésitations de Denise épousent celles de Simone de Beauvoir, qui note dans son journal des intrigues possibles, d’éventuels sujets de romans, dont l’un correspond assez bien à « Départ » :
Ce que j’aimerais surtout peindre, c’est celle qui ne peut pas vivre, parce qu’elle voit la duperie de l’amour, la duperie de la vie, parce que libérée, elle ne peut user de sa liberté […].
Et aussi la lutte entre une âme qui voudrait être et devrait se résigner à paraître, et les autres, la victoire des barbares sur une âme trop faible pour leur tenir tête [22].
Ch 1. morale irraisonnée. Préjugés. Puis aux ch. 2 et 3 une fidélité à son moi profond et besoin de servir. Au ch. 4 : besoin de réaliser une vie belle, de ne rien gaspiller de soi. religion de la vie.
puis : il n’y a pas d’appel dans la vie, c’est seulement un donné auquel alimenter mon moi – se prendre pour fin, vouloir simplement être.
paradoxe de cela (conversation avec J. de Nîmes)
Comment trouver un sens à cet être ?
Ou l’infini en chaque moment et je pleure la mort des moments.
Où chaque moment a sa raison dans celui qui suit, mais il faut que le dernier ait sa fin dans q. q. chose d’autre.
Elle s’affranchit des préjugés – réédifie des idoles – partiel écroulement – mais après un grand abattement ivresse d’être – ne + servir mais être – culte du moi : Barrès et Gide – mais alors de cette passion, de cette attention à soi, de l’importance qu’elle y attache naît l’horreur que cela meure – fidélité à la souffrance [passée] – mais c’est impossible – effort d’un livre : mais cela ne donne rien – effort pour vivre dans l’instant – et l’horreur de la mort des instants l’empêche de pouvoir.
mais analysons : pourquoi cette horreur de sa mort ? montrer que cela rejoint une exigence de q. q. chose de nécessaire.
à beaucoup approfondir. 2e partie §§ IV et VI –
Vivre dans la durée. Aimer le devenir et non des moments de ce devenir, mais la raison de ce devenir ? la mort totale, qu’en fait-on ? et la terrible destruction de l’être ?
Horreur, horreur de la mort ! à quoi bon tout ?
Néant – néant.
[mais des impressions suffisent-elles à rien expliquer ? chercher une raison à cela au lieu de gémir sur cela sans savoir qu’il faut gémir].
Isolement des âmes – Mort perpétuelle de soi-même. Stérilité de la vie. Le réel à l’état pur – Conflit des deux vies – Le bonheur : indifférent.
La liberté mais pas de matière pour l’exercer.
Monter comment par un effort vers la vérité et la profondeur, Denise arrive à la stérilité et à une impasse dont elle ne peut sortir.
À quoi sert la vie ? elle est et cela suffit. Si tu veux essayer de comprendre la vie au lieu de vivre, tu ne pourras pas vivre ; si tu refuses l’illusion, tu es vouée à l’immobilité. Même ceux qui s’attachent à cette profonde vie intérieure ne subsistent que par un compromis : ils agissent, ils aiment, ils souffrent comme s’ils n’avaient pas vu la vanité de tout cela. Même mystère que dans le monde physique : décompose un germe en ses éléments, en aucun tu ne trouveras le principe de sa vie.
Ne pas prouver mais peindre ; simple essai de psychologie. « Est-ce ma faute si je ne peux pas aimer ? je ne souffre pas dans mon corps et je veux bien avoir pitié du leur qui souffre ; je goûte les joies de l’intelligence et je veux bien leur faire partager mais je n’atteins d’eux-mêmes que cela qui est tout extérieur, et je les aimerai tout juste autant que j’aime mon corps et mon intelligence ; en moi ce que j’aime c’est cet être intérieur que je suis seule à connaître et à chérir : d’autant plus à cause de cela ; je ne me suis pas mariée à cause de cela : je voulais que l’amour fût la fusion de 2 êtres, et j’ai vu que cela était impossible ; j’ai eu tort, parce que de même que sans les aimer je soigne des malades, à cause de ma pitié pour eux, je pouvais me marier ; de l’égoïsme ? peut-être et pourtant je sacrifierais volontiers mon bonheur : ce mot n’a pas de sens pour moi. Non, je ne fais pas passer ma jouissance avant celle des autres ; simplement je m’aime et ils me sont indifférents ». […]
« Fiche 4 »
« Fiche 4 »
« Isolement des âmes – Mort perpétuelle de soi-même. Stérilité de la vie. »
« Isolement des âmes – Mort perpétuelle de soi-même. Stérilité de la vie. »
25Le roman permet d’approfondir une réflexion sur les autres et sur la place qu’ils occupent dans notre existence – place qu’à l’évidence Beauvoir trouve alors trop envahissante. Cette question centrale est cristallisée par Denise, l’héroïne, qui cherche à se définir par rapport à sa famille, à ses amis, et tente un départ afin de ne pas se laisser influencer par son entourage. Au bas de la première page du chapitre II, Beauvoir ajoute quelques notes à l’encre brune : « le rôle des autres dans notre vie en tant qu’autres, non en tant que nous-mêmes [23] ». La tentative de dissociation d’avec les siens l’incite à formuler de façon plus générale la question d’autrui. Au constat initial de la nécessité d’un éloignement succède un second mouvement : « Très important : après l’absorption par les autres le retour à soi. (rôle du cadre familial – le dépaysement d’âme etc.) [24] ». La jeune fille décrit ici les étapes d’une construction personnelle réussie, selon son idéal : refus de la fusion avec autrui, prise d’indépendance, saisie de l’individu par lui-même. « Beaucoup développer ce roman. Insister sur le besoin de sortir d’elle [25]. » Aller vers les autres, certes, mais sans se laisser happer par eux : tel est le pari de Simone de Beauvoir, qu’elle transpose chez son personnage principal.
26À propos de son héroïne, Simone de Beauvoir écrit :
[…] quand Denise passait de la campagne à Paris, c’était deux chemins strictement séparés où rien ne la suivait de ce qui avait été dans l’autre. Au lieu que plus tard, elle devait passer en tous lieux, elle-même, parce que c’était d’elle seule que venait le goût nouveau de sa vie [26].
28Ce thème qui lui est cher revient régulièrement dans ses romans ; elle le souligne dans La Force de l’âge, le nommant « le mirage de l’Autre [27] ».
29L’expérience personnelle prend ici une autre dimension, grâce à l’apprentissage philosophique : « Arranger ça avec mon devoir sur la personnalité » écrit-elle au milieu du chapitre VI, au bas d’un feuillet. Signe que roman, réussite scolaire et réflexion personnelle sont étroitement mêlés, tous trois intégrant l’interrogation philosophique.
30Peu après l’interruption probable de « Départ », Simone de Beauvoir écrit dans son journal :
([…] Il faut que je travaille à un travail auquel je crois et pour lequel je ne désirerai aucune louange. Un roman de la vie intérieure ou quelque chose de semblable.) […] Écrire des « essais sur la vie » qui ne soient pas du roman, mais de la philosophie, en les reliant vaguement d’une fiction. Mais que la pensée soit l’essentiel et que je cherche à trouver la vérité, non à exprimer, à décrire la recherche de la vérité [28].
32Peut-être ce projet est-il à l’origine de l’abandon de « Départ » : trop d’analyses psychologiques, et trop peu de pensée, ont empêché le succès de cet essai. Après plusieurs tentatives inabouties, c’est L’Invitée, paru chez Gallimard en 1945, qui donne le véritable coup d’envoi de son œuvre romanesque.
Une vocation d’écrivain
33Sur la chemise du manuscrit de « Départ », Simone de Beauvoir a copié une citation de Valéry « Le vent se lève. Il faut tenter de vivre !… », que l’on retrouve dans son journal (année 1928, 12 janvier). Mettre ce premier roman sous le signe de l’appétit de vivre qui la caractérise n’est pas anodin : tenter de vivre, c’est tenter d’être soi, de « sortir de soi », ce qui sera le difficile pari de Denise. À l’époque, Simone de Beauvoir est encore loin d’être écrivain ; cependant, une vocation est déjà née, et plusieurs autres écrits en portent la trace, notamment une esquisse de roman (NAF 27420) que l’on peut dater des années 1930-1931.
34L’écriture de « Départ » incite la jeune fille à réfléchir sur une technique romanesque :
Très amusant et instructif, mon essai de roman. C’est la seule manière de vraiment comprendre à quelles difficultés se heurte un auteur. D’abord il y a cela que mon héroïne m’est tellement présente que je crois qu’elle l’est à tout le monde ; et c’est faux ; il faut non seulement la concevoir, mais la faire comprendre. Et puis telle idée qui pour moi est le résultat de beaucoup d’expériences, derrière laquelle je vois un monde, pour quelqu’un d’autre, elle n’a pas d’autre sens que son sens littéral ; c’est pourquoi tout est décoloré quand on écrit, parce que c’est isolé [29].
36De fait, elle décrit minutieusement la psychologie de ses personnages, tout en se perdant dans des nuances infinies. L’équilibre entre action et intériorité n’est pas maintenu, et les différentes tentatives de rédactions et de plans montrent qu’elle hésite sans parvenir encore à organiser son roman.
37La question de la forme se pose, et la lassitude pointe parfois : « [Pourquoi faire de ceci un roman ? un roman est chose si lente ? que dirai-je de plus que dans cette page rapide] », note-elle dans son manuscrit, avant de résumer en quelques lignes les caractères de ses personnages [30]. Sa vivacité semble s’accommoder assez mal de l’élaboration progressive et de la construction changeante de l’œuvre ; une forme de combat se livre entre la vie et l’écriture, préfigurant la tentation, quelques années plus tard, d’abandonner la littérature : « Un livre, c’est d’une manière ou d’une autre un appel : à qui en appeler, et de quoi ? J’étais comblée [31]. »
38De fait, si ce roman reste à l’état d’ébauche, il n’en constitue pas moins une tentative pour affermir une vision du monde et entrer dans l’univers de l’écriture littéraire. « [À beaucoup développer]. [Peut-être ne mettre cela qu’à la fin au contraire] [32] » : c’est toute la construction du roman que le jeune auteur remet en cause régulièrement : « Mettre la tirade sur la liberté beaucoup plus loin à l’endroit indiqué p. 124 [33]. »
39Le manuscrit de « Départ » rend compte des hésitations de Simone de Beauvoir, de ses repentirs, ainsi que du « roman idéal » qu’elle envisage. Elle analyse a posteriori les pages déjà écrites, et un certain nombre d’injonctions disent la direction à suivre : « Pousser bien plus profondément les idées philosophiques [34] », « il faut que ce soit au moins 3 fois plus long. On n’a pas le temps de faire sa connaissance – plus de détails, de peintures, d’analyses [35]… » Elle revient également sur le style (« Trop d’adjectifs », note-t-elle au crayon dans un des rares espaces blancs du manuscrit [36]). L’insatisfaction à la relecture surgit de chaque feuillet.
40« Sans cesse, écrit Simone de Beauvoir dans ses cahiers, je prends des résolutions que jamais je ne tiens. Pourtant… L’an prochain je n’aurai presque rien à faire comme études. Et il ne me restera pas beaucoup de livres à lire. Il faut que je fasse mon œuvre à moi [37]. » Cette œuvre lui apparaît comme un moyen d’affirmation [38]. Mais également un moyen d’exorciser : « Combien de temps vivrai-je, moi qui choisis les positions intenables ? Oh ! crier cela dans mon livre pour me délivrer [39] ! » Plusieurs autres esquisses lui seront nécessaires avant de trouver son style et d’entreprendre ce qui sera son œuvre véritable.
41« Il suffit qu’à vingt-deux ans j’aie passé mon agrégation et écrit un livre. Alors, délivrée de ma jeunesse et riche d’une rare culture, je commencerai à réaliser ma vie. […] La première étape s’est franchie en deux ans. Je veux un livre pour la marquer [40]. » Le livre, dans cette perspective, constitue une étape importante, une « entrée en écriture », qui doit régler sa vie future. « Mon livre s’écrit grâce aux encouragements de G. Lévy. Ce sera comme j’ai dit. Je veux une vie grande. Je l’aurai [41]. »
Notes
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[1]
Nous remercions Sylvie Le Bon de Beauvoir pour ce précieux renseignement, qui allonge encore la durée de remaniement de « Départ ».
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[2]
Vente Sotheby’s, 21 mai 2008, lot n° 85. Acheté par la BNF, le manuscrit porte désormais la cote NAF 28493.
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[3]
Achat 1989 (A. 89-15). Ces cahiers sont cotés NAF 27411-27414. Malgré le rapprochement de ces feuillets volants et du manuscrit acquis en mai 2008, des lacunes subsistent dans le texte, qui semble n’avoir jamais été achevé.
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[4]
Simone de Beauvoir, Cahiers de jeunesse, 1926-1930, texte établi, annoté et présenté par Sylvie Le Bon de Beauvoir, Paris, Gallimard, 2008.
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[5]
Ibid., p. 511. On constate que les dates de l’écriture de « Départ », que l’on peut situer approximativement entre l’été 1926 et l’été 1927, correspondent au début du journal.
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[6]
Après l’avoir prénommée Marguerite, Beauvoir modifie son choix et se fixe sur Denise.
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[7]
S. de Beauvoir, Cahiers de jeunesse, op. cit., p. 298 (mardi 12 avril 1927).
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[8]
Ibid., p. 307 (17 avril 1927).
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[9]
S. de Beauvoir, Mémoires d’une jeune fille rangée, Paris, Gallimard, 1958, p. 291-292.
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[10]
S. de Beauvoir, Cahiers de jeunesse, op. cit., p. 396 (vendredi 19 août 1927). Simone de Beauvoir a vraisemblablement abandonné « Départ » pour entamer une nouvelle œuvre.
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[11]
Ibid., p. 399 (lundi 22 août 1927). Les amitiés en question sont celles de la Sorbonne, et particulièrement celle de Maurice Merleau-Ponty, dont elle vient de recevoir une lettre le dimanche 21 août.
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[12]
Ibid., p. 406 (mardi 27 septembre 1927).
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[13]
Manuscrit de « Départ », f. paginé 20 par S. de Beauvoir.
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[14]
Ibid., début de rédaction du chapitre IV.
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[15]
Ibid., 3e f. appartenant à ce que S. de Beauvoir intitule « SS VI » (il semble qu’il s’agisse d’un ajout, ou d’une réécriture d’un chapitre).
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[16]
S. de Beauvoir, Cahiers de jeunesse, op. cit., p. 287.
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[17]
Ibid., p. 350 (mardi 24 mai 1927). Jean Miquel est un élève d’Alain avec qui Simone de Beauvoir s’était liée à la Sorbonne.
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[18]
Manuscrit de « Départ », fiche intitulée « thème 8. rapport avec les autres » par S. de Beauvoir.
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[19]
Ibid., f. paginé 107 par S. de Beauvoir.
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[20]
S. de Beauvoir, Cahiers de jeunesse, op. cit., p. 292 (vendredi 18 mars 1927).
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[21]
Manuscrit de « Départ », plan de la troisième partie.
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[22]
S. de Beauvoir, Cahiers de jeunesse, op. cit., p. 82 (6 septembre 1926).
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[23]
Manuscrit de « Départ », chapitre II, verso.
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[24]
Ibid., f. appelé « plan détaillé » par S. de Beauvoir.
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[25]
Ibid., f. paginé 69 (verso) par S. de Beauvoir.
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[26]
Ibid., f. paginé 20 par S. de Beauvoir.
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[27]
S. de Beauvoir, La Force de l’âge, Paris, Gallimard, 1986, p. 107.
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[28]
S. de Beauvoir, Cahiers de jeunesse, op. cit., p. 343-344 (vendredi 13 mai 1927).
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[29]
Ibid., p. 86 (9 septembre 1926).
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[30]
Manuscrit de « Départ », « possibilité d’intrigue » (description des personnages).
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[31]
S. de Beauvoir, La Force de l’âge, op. cit., p. 64. L’auteur situe cette tentation en 1931.
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[32]
Manuscrit de « Départ », f. paginé 87 par S. de Beauvoir.
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[33]
Ibid., f. paginé 41 bis par S. de Beauvoir.
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[34]
Ibid., f. de résumé des parties I et II.
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[35]
Ibid., f. paginé 36 par S. de Beauvoir.
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[36]
Ibid., f. paginé 5 par S. de Beauvoir.
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[37]
S. de Beauvoir, Cahiers de jeunesse, op. cit., p. 363 (jeudi 7 juillet 1927). Plus loin, p. 365, elle décrit dans quelle direction peut aller son œuvre : « je me crée, je crée mon histoire, je vis et fais vivre aux autres des romans compliqués et ardents – d’où besoin de faire passer tout cela dans une œuvre, une œuvre qui dirait tout, qui analyserait minutieusement les âmes tout en faisant respirer chaque corps ».
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[38]
Voir S. de Beauvoir, Cahiers de jeunesse, op. cit., p. 408 : « Il faut que j’écrive mon livre pour m’affirmer moi » (jeudi 29 septembre 1927).
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[39]
Ibid., p. 410 (mardi 3 octobre 1927).
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[40]
Ibid., p. 417 (lundi 31 octobre 1927).
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[41]
Ibid., p. 417 (mercredi 2 novembre 1927). Georgette Lévy est une amie connue à la Sorbonne.