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Article de revue

De papier et de métal

Les archives du département des Monnaies, Médailles et Antiques

Pages 43 à 51

Notes

  • [1]
    L’auteur remercie pour leur aide M. Michel Amandry, directeur du département des Monnaies, Médailles et Antiques, Mme Mathilde Avisseau-Broustet, conservateur en chef, et M. Didier Rivals.
  • [2]
    Dans le « Journal des acquisitions du Cabinet des médailles du roy commancé le 25 octobre 1689 » (Rés. Ms 00001 PAR BN (1689 F)), on trouve à la date du 6 novembre 1690 la mention suivante : « Le livre du Père Noris, théologien du grand-duc, De epochis Syromacedonum, imprimé à Florence en 1689. Envoyé en feuilles par l’autheur. / Dans la bibliothèque du Cabinet des médailles. » Enrico Noris (1631-1704) fut directeur de la Bibliothèque vaticane en 1692 et cardinal en 1695.
  • [3]
    Un mémoire du 15 mai 1720 constate que le régent avait autorisé la vente de volumes se trouvant déjà dans la Bibliothèque du roi. Cette vente rapporta la somme de 6 000 livres (Archives du département, 1 ACM 62).
  • [4]
    La cote actuelle est : Rés. 65100 MEC 8°.
  • [5]
    La bibliothèque de Gros de Boze était particulièrement importante et bien fournie en ouvrages de numismatique et d’érudition : le catalogue de vente dressé en 1753, peu avant sa mort, comptait 2 723 articles (Catalogue des livres du cabinet de M. de Boze, Paris, Martin, Guérin, Delatour, 1753). Une seconde vente eut lieu l’année suivante après le décès de l’académicien (Catalogue des livres provenans de la bibliothèque de feu M. de Boze, dont la vente sera indiquée par affiches, Paris, Gabriel II Martin, 1754). Il en allait de même pour celle de l’abbé Barthélemy, mise en vente cinq ans après sa mort. Le catalogue de la vente compte 1 485 numéros, dont 541 pour l’histoire et les antiquités (Catalogue des livres de la bibliothèque de feu l’abbé Barthélemy, Paris, Bernard et Thuret, an IX-1800).
  • [6]
    La préface initiale avait été mal reçue. Les exemplaires comportant la préface imprimée sont les 65 du tirage de tête ; ceux comportant une préface manuscrite appartiennent au reste du tirage, et la préface y a été insérée pour satisfaire la curiosité des amateurs (Médailles sur les principaux événemens du règne de Louis le Grand, Paris, Imprimerie royale, 1702 (Rés. 31120 MED Fol. (1702)). L’exemplaire des Médailles porte l’estampille de la bibliothèque du Prytanée, celle de la Bibliothèque du roi à Compiègne et une ancienne cote du département des Imprimés. Il était encore à Compiègne en 1884.
  • [7]
    Le fichier des catalogues de vente du département est en cours de rétroconversion. Celle du fichier des monographies devrait intervenir en 2009-2010.
  • [8]
    C’est ce qu’a fait Christian Edmond Dekesel en composant ses bibliographies numismatiques des xvie et xviie siècles : Bibliotheca nummaria : bibliography of 16th century numismatic books, Londres, Spink, 1997 ; Bibliography of 17th century numismatic books, Londres, Spink & son / Crestline (Ohio), Kolbe, 2003.
  • [9]
    La seule différence entre ces deux ensembles tient à leur mode de conservation : les archives, conservées dans des cartons depuis le xixe siècle, forment un ensemble autonome, tandis que les manuscrits constituent une section de la réserve de la bibliothèque.
  • [10]
    Conservées aux Archives nationales dans les sous-séries O1 (Maison du roi) et F17 (Instruction publique).
  • [11]
    Elles ont été exploitées par M. Fabrice Charton, pour une thèse de l’EHESS en cours : « De la Petite Académie à l’Académie des inscriptions et belles-lettres (1663-1743) : une institution et des gens de lettres au service du Prince », sous la direction de Christian Jouhaud.
  • [12]
    La Grande Question d’Occident. Le Rhin dans l’histoire, Paris, E. Leroux, 1916-1917. Les notes de Babelon figurent sous les cotes 1 APM 40 à 44.
  • [13]
    Catalogue général et raisonné des camées et pierres gravées de la Bibliothèque impériale, suivi de la description des autres monuments exposés dans le Cabinet des médailles et antiques, Paris, J. Claye, 1858.
  • [14]
    Citons par exemple : Henri Omont, Missions archéologiques françaises en Orient au xviie et xviiie siècles, Paris, Imprimerie nationale, 1902 ; Antoine Schnapper, Collections et collectionneurs dans la France du xviie siècle, I. Le Géant, la Licorne et la Tulipe : histoire et histoire naturelle, Paris, Flammarion, 1988, II. Curieux du Grand Siècle : œuvres d’art, Paris, Flammarion, 1994.
  • [15]
    Entre 1990 et 1996 à l’occasion de la préparation de deux études sur l’histoire du Cabinet et les numismates français : Thierry Sarmant, Le Cabinet des médailles de la Bibliothèque nationale, 1661-1848, Paris, École des chartes, 1993 ; La République des médailles : numismates et collections numismatiques à Paris du Grand Siècle au siècle des Lumières, Paris, Honoré Champion, 2003.
  • [16]
    Sur le site associatif <archivesmonetaires.org>.
  • [17]
    Inventaire rédigé par Mlle Felicity Bodenstein, qui poursuit une thèse de doctorat sur « Le Cabinet des médailles de la Bibliothèque nationale de 1848 à 1924 », sous la direction du professeur Barthélemy Jobert.
  • [18]
    État général des fonds d’archives du département des Monnaies, Médailles et Antiques de la Bibliothèque nationale de France, par Aurélie Lavillonnière, sous la direction de Thierry Sarmant, en préparation.
English version
Au sein du palais des livres – la Bibliothèque nationale de France –, le département des Monnaies, Médailles et Antiques passe pour le sanctuaire des objets. Camées, intailles, vases, bronzes, ivoires, pièces d’or, d’argent et cuivre forment un îlot quelque peu dépaysant au milieu de l’océan de papier auquel on associe généralement la Bibliothèque. Mais à l’intérieur le tableau s’inverse…

1Le Cabinet des médailles – pour utiliser l’ancienne appellation sous laquelle numismates et archéologues désignent volontiers ce département –, musée enchâssé dans la Bibliothèque, abrite une bibliothèque, des manuscrits et des archives. C’est sur ces collections peu connues, même des spécialistes, sur leur histoire et sur les instruments de recherche qui y donnent accès que l’on voudrait attirer l’attention ici [1].

Une bibliothèque dans la Bibliothèque

2La bibliothèque du département est aussi ancienne que le Cabinet des médailles. Dès le règne de Louis XIV, les gardes du Cabinet, transféré à Versailles en 1684, constituèrent une bibliothèque de travail. Elle appartenait au « bureau des médailles », pièce située dans le Grand Commun, vaste corps de bâtiments construit par Jules Hardouin-Mansart entre 1682 et 1684 à l’est de l’Aile du Midi, tandis que le Cabinet proprement dit était installé dans le Grand Appartement du roi. La première entrée dont on ait gardé la trace est celle du livre du P. Noris, De Epochis Syromacedonum, envoyé en feuilles par l’auteur en 1690 [2]. Cette première bibliothèque fut malheureusement vendue au début du règne de Louis XV, après qu’eut été décidé le retour du Cabinet au sein de la Bibliothèque du roi [3]. L’ancienne estampille du Cabinet – CIMELIARCHII REGII porté à l’encre rouge – ne figure donc plus que sur les anciens catalogues manuscrits. Une seule exception, le livre intitulé Joannis Henrici Meibomii Maecenas, sive de C. Cilnii Maecenatis vita, moribus et rebus gestis, liber singularis. Accessit C. Pedonis Albinovani Maecenati scriptum Epicedium notis illustratum, Leyde, J. et D. Elsevier, 1653 [4]. Il fut remis à Pierre-Anatole Chabouillet, conservateur du Cabinet des médailles, par Ravenel, conservateur au département des Imprimés, le 20 mars 1863. Ce dernier le tenait d’un libraire qui, au vu de l’ancienne estampille, avait cru le livre volé. On voit encore inscrit sur la reliure : « Mr Le Gras de Bardouville. 1726 » (peut-être l’acheteur du volume en 1720).

3Il semble qu’au xviiie siècle, les gardes des médailles, Claude Gros de Boze (1718-1753) puis Jean-Jacques Barthélemy (1753-1795), se soient surtout servis de leur bibliothèque personnelle, sans chercher à en constituer une particulière au département [5]. Le fonds ancien de la bibliothèque actuelle paraît s’être constitué après la Révolution. On constate sur les rayons la présence d’un grand nombre de livres portant l’estampille de la bibliothèque du Tribunat, ce qui permet de situer leur entrée après 1807, date de la suppression de cette assemblée par Napoléon. Ces livres, qui provenaient eux-mêmes des dépôts littéraires, étaient issus des grands établissements religieux supprimés. On a ainsi retrouvé les marques de Saint-Germain-des-Prés, de Saint-Victor, de la Sorbonne et des bénédictins anglais de Saint-Edmond. Le fonds de la bibliothèque semble s’être enrichi également de doubles du département des Imprimés, entrés à des dates difficiles à déterminer.
Parmi les quelques belles pièces de cette réserve d’imprimés, mentionnons un exemplaire relié en maroquin rouge aux armes de France du célèbre recueil des Médailles sur les principaux événemens du règne de Louis le Grand, 1702, enrichi de la préface originale demeurée manuscrite [6]. Pour les spécialistes, le principal intérêt de ce fonds tient à la présence d’ouvrages annotés, tels que le Recueil de Joseph Pellerin annoté par l’auteur (ill. 1 et 2) ou d’anciens et rarissimes catalogues de vente où sont portés les prix atteints par les enchères [7].

1

Joseph Pellerin, Recueil de médailles de rois, qui n’ont point encore été publiées ou qui sont peu connues, Paris, H.-L. Guérin et L.-F. Delatour, 1762

1

Joseph Pellerin, Recueil de médailles de rois, qui n’ont point encore été publiées ou qui sont peu connues, Paris, H.-L. Guérin et L.-F. Delatour, 1762

Vignette de titre.
BNF, Monnaies, Médailles et Antiques, Méd. Rés. 11009 PEL 4° (1762)
2

Joseph Pellerin, Recueil de médailles de rois, qui n’ont point encore été publiées ou qui sont peu connues, Paris, H.-L. Guérin et L.-F. Delatour, 1762

2

Joseph Pellerin, Recueil de médailles de rois, qui n’ont point encore été publiées ou qui sont peu connues, Paris, H.-L. Guérin et L.-F. Delatour, 1762

Annotation de l’auteur sur une page du Recueil.
BNF, Monnaies, Médailles et Antiques, Méd. Rés. 11009 PEL 4° (1762)

4La réserve du département est riche de « livres de médailles » et de « livres d’antiquités » des xvie, xviie et xviiie siècles, mais ces volumes y sont entrés pour la plupart au xixe siècle. La collection est donc loin d’être exhaustive et, dans le cadre d’une enquête bibliographique, elle doit être consultée concurremment avec la Réserve des livres rares ainsi qu’avec les fonds anciens du département Histoire [8].

Aux origines de l’archéologie

5Manuscrits et archives du Cabinet des médailles représentent un fonds d’un intérêt bien supérieur, car leur enrichissement s’est poursuivi sans solution de continuité depuis le commencement des années 1660. La distinction entre archives et manuscrits est d’ailleurs elle-même spécieuse, dans la mesure où l’on a eu tendance à considérer comme appartenant à la première catégorie les documents non reliés et à la seconde les documents pourvus de reliures [9]. Qu’il s’agisse d’archives ou de manuscrits, le socle de cet ensemble est formé par une extraordinaire collection de catalogues manuscrits des séries de monnaies, de médailles et d’antiques du département. Les catalogues du Cabinet de Versailles, calligraphiés et reliés en forts volumes in-folio de maroquin rouge aux armes de France, ouvrent la marche et permettent de cerner les centres d’intérêt de Louis XIV et de ses savants. Leur succèdent les catalogues et inventaires rédigés périodiquement par la suite, soit pour mettre à jour les catalogues anciens, soit pour décrire le contenu d’une grande acquisition. L’histoire de l’archéologie en France trouve là une de ses sources majeures, car, à côté des catalogues rédigés au sein du département, figurent ceux des collections particulières qui s’y sont fondues.

3

Une planche du Cabinet de Versailles dessinée par André Morel, s.d. [vers 1685]

3

Une planche du Cabinet de Versailles dessinée par André Morel, s.d. [vers 1685]

Ces planches étaient destinées à être découpées pour être placées au-dessus des tablettes des médailliers de Versailles.
BNF, Monnaies, Médailles et Antiques, Rés. Ms 70100 MOR Fol (1)
4

Dessin de Charles Simonneau pour le revers de la médaille de Louis XIV commémorant la campagne de 1713

4

Dessin de Charles Simonneau pour le revers de la médaille de Louis XIV commémorant la campagne de 1713

Sous le dessin, l’annotation de Claude Gros de Boze : « Il faut que les deux écus ou boucliers soient de la mesme forme, que celuy de dessous soit un peu plus avancé pour y distinguer les armoiries de Landauw qui y seront ; celles de Fribourg au dessus ».
BNF, Monnaies, Médailles et Antiques
5

« Dessins des figures, bas-reliefs et inscriptions, vases, lampes, instruments de sacrifices et autres curiositez de ce genre, qui composoient le cabinet de feu M. Foucault, conseiller d’Estat, et qui appartiennent présentement à M. de Boze, de l’Académie françoise », s.d. [vers 1719]

5

« Dessins des figures, bas-reliefs et inscriptions, vases, lampes, instruments de sacrifices et autres curiositez de ce genre, qui composoient le cabinet de feu M. Foucault, conseiller d’Estat, et qui appartiennent présentement à M. de Boze, de l’Académie françoise », s.d. [vers 1719]

Dessin d’un antique de la collection de Nicolas-Joseph Foucault (4e armoire, n° XI).
BNF, Monnaies, Médailles et Antiques

6À ces catalogues s’ajoutent les correspondances entretenues par les gardes puis les conservateurs avec leurs supérieurs hiérarchiques, avec leurs collègues des autres départements et avec de nombreux savants français et étrangers. De ce fait, les archives anciennes du Cabinet des médailles sont indissociables des archives centrales de la Bibliothèque, déposées au département des Manuscrits, et de celles des départements ministériels qui en ont eu la tutelle : surintendance des Bâtiments du roi, département de la Maison du roi, ministère de l’Intérieur [10]. Au-delà de l’histoire propre du département, ses archives apportent beaucoup à la connaissance de l’histoire générale de la Bibliothèque et des cercles érudits du xviie au xxe siècle. Parcourir les archives du Cabinet des médailles, c’est rencontrer les souverains de la France et leur goût de collectionneur, Louis XIV, Louis XV, Louis XVI, Napoléon. C’est côtoyer les hauts responsables politiques qui se sont mêlés des arts et des lettres – Colbert, Louvois, les Pontchartrain, le comte de Maurepas, le comte d’Argenson, le baron de Breteuil, pour s’en tenir à l’Ancien Régime. C’est enfin fréquenter les grands collectionneurs français des trois derniers siècles, l’intendant Foucault, le comte de Caylus, Joseph Pellerin, le duc de Luynes, la baronne Edmond de Rothschild ou Carlos de Beistegui.
Les gardes du Cabinet ont souvent mal distingué parmi leurs papiers ce qui ressortait de leurs fonctions au sein de la Bibliothèque, de leurs autres charges officielles et de leurs travaux savants. Les archives de l’administration de Claude Gros de Boze, garde du Cabinet des médailles et secrétaire de l’Académie des inscriptions de 1706 à 1741, constituent ainsi une source fondamentale pour l’histoire de ce corps et de ses activités scientifiques dans la première moitié du xviiie siècle [11]. Le département conserve par exemple plusieurs planches de cuivre ayant servi à l’illustration des premiers volumes des célèbres Histoire et Mémoires de l’Académie royale des inscriptions et belles-lettres, publiés par l’Imprimerie royale sous les auspices de ce même Gros de Boze.
Avec le temps, le départ est mieux fait entre correspondance administrative et papiers érudits des conservateurs, mais plusieurs de ces derniers ont laissé au département tout ou partie de leur documentation scientifique, quel qu’en soit le sujet. On conserve ainsi le manuscrit d’un livre d’Ernest Babelon, directeur du Cabinet de 1892 à 1924, La Grande Question d’Occident, plaidoyer pour l’annexion de la rive gauche du Rhin à la France [12].

La clef des archives

7La mise en valeur des archives du département a commencé dès le xixe siècle. Anatole Chabouillet, directeur de 1859 à 1890, a tenté un premier classement chronologique et la constitution de dossiers d’affaire, sans doute au moment où il préparait son Catalogue général et raisonné des camées et pierres gravées de la Bibliothèque impériale[13]. Ce classement a été l’occasion de destructions et de désordres, mais il a sans doute sauvé le fonds de la disparition. L’erreur de Chabouillet fut de mettre de côté les documents non datés, comme ne pouvant entrer dans la suite chronologique qu’il constituait : c’est ainsi que bien des pièces d’une importance majeure ont été oubliées, remisées dans les combles et sont demeurées inconnues des chercheurs jusqu’à une date toute récente. Il en allait ainsi d’un mémoire manuscrit de Pierre de Carcavi, rédigé vers le début des années 1680… et annoté de la propre main de Jean-Baptiste Colbert (ill. 6) !

6

Pierre de Carcavi, « Mémoire pour Monseigneur sur la graveure des médailles du Cabinet du roy », s.d. [vers 1680]

6

Pierre de Carcavi, « Mémoire pour Monseigneur sur la graveure des médailles du Cabinet du roy », s.d. [vers 1680]

Mémoire écrit de la main de Nicolas Clément, annoté de celle de Colbert. L’annotation de Colbert porte sur la mise en page du livre en projet : « Ceci doibt estre consulté et mis en délibération avec quelques personnes que je choisirai. Mon premier sentiment est, ainsy que je l’expliquai dernièrement, de commencer par les plus anciennes, les mettre ensemble, de quelque grandeur qu’elles soient, et faire toujours suivre les médailles par le discours sans y mettre de confusion ny faire un discours de suitte dont il faille aller chercher les médailles à la fin ou au commencement. » Le ministre prône donc l’insertion des images dans le texte.
BNF, Monnaies, Médailles et Antiques, 1 ACM SUP 6-20

8Régulièrement augmentées des documents produits par les directeurs successifs, les archives du département n’étaient cependant ni classées, ni cotées. Quelques historiens les ont connues et utilisées cependant [14]. La description systématique des fonds a été entreprise il y a une quinzaine d’années [15]. Un inventaire des archives administratives et un catalogue des manuscrits ont été réalisés et mis en ligne en 2004 [16]. Grâce au recrutement d’un chercheur associé, l’inventaire des archives a été poursuivi pour la tranche chronologique 1880-1917 [17]. Tout récemment, c’est le fonds dans son ensemble qui a été classé et coté, les fonds d’origine privée étant définitivement distingués des archives propres du département.

9Quatre séries ont été formées :

  • ACM (archives administratives) ;
  • ACM SUP (supplément) ;
  • ACM Fi (Fonds figurés) ;
  • APM (Archives d’origines privée).
Tandis qu’ACM, héritage des classements de Chabouillet, forme une série continue unique, disposée en ordre chronologique, la série ACM SUP est distribuée en cinq sous-séries :
  • 1 ACM (pièces n’ayant pu entrer dans le classement chronologique) ;
  • 2 ACM (archives des expositions) ;
  • 3 ACM (archives du Congrès international de numismatique) ;
  • 4 ACM (registres des autorisations d’acquisition, des acquisitions, des échanges, des dons) ;
  • 5 ACM (fichiers du département).
ACM Fi a également été subdivisée en sous-séries, qui correspondent aux différents supports :
  • 1 ACM Fi (dessins) ;
  • 2 ACM Fi (planches gravées et estampes) ;
  • 3 ACM Fi (plaques de verre et photographies).
Dans la série APM, chaque fonds d’origine privée forme une sous-série :
  • 1 APM (archives d’Ernest Babelon) ;
  • 2 APM (archives d’Anatole de Barthélemy) ;
  • 3 APM (archives de Jacques de Morgan), etc.
La volumétrie de l’ensemble reste modeste : les archives propres du département tiennent dans 150 cartons, des origines à la fin du xxe siècle ; le fonds comporte en outre plus de 250 catalogues manuscrits des collections du département et plusieurs dizaines de catalogues de collections privées. Quant aux fonds privés classés, ils sont répartis dans 300 cartons environ.

7

Dessin de la monture du Grand Camée de France

7

Dessin de la monture du Grand Camée de France

BNF, Monnaies, Médailles et Antiques

10Un premier état des fonds a été rédigé, qui donne une vue synoptique d’un dépôt composite où voisinent dessins du xviie siècle, fichiers et papiers d’érudits [18]. Beaucoup reste à faire cependant, en particulier pour décrire avec précision les fonds privés des xixe et xxe siècles.

8

Le Grand Camée dans sa monture

8

Le Grand Camée dans sa monture

BNF, Monnaies, Médailles et Antiques

11L’intérêt de ces manuscrits et de ces archives ne tient pas à leur volume, somme toute peu considérable, mais à leur voisinage avec les objets qu’ils décrivent. Le département des Monnaies, Médailles et Antiques est un des rares lieux où culture intellectuelle et culture matérielle peuvent être étudiées de concert. Il y est possible de rapprocher les monnaies et les médailles que Louis XIV a eues sous les yeux des tablettes où il les a fait placer, des catalogues qu’il en a fait rédiger, des dessins qu’il en a fait dessiner… et même des aiguilles d’or avec lesquelles il maniait ses précieuses collections. Les étiquettes anciennes placées dans les médailliers, les catalogues et les fichiers manuscrits, les vieux « livres de médailles » ou « livres d’antiquités » permettent de suivre la destinée de telle monnaie ou de tel objet parfois sur plusieurs siècles, en retraçant aussi bien leur passage d’une collection dans une autre que les interprétations successives auxquelles ils ont donné lieu.

12Archives de papier et « archives métalliques » forment ainsi un ensemble d’une puissante originalité, à l’image de ce département héritier des anciens cabinets de curiosités, où se maintient l’unité primitive entre bibliothèque et musée.


Date de mise en ligne : 01/02/2010

https://doi.org/10.3917/rbnf.031.0043

Notes

  • [1]
    L’auteur remercie pour leur aide M. Michel Amandry, directeur du département des Monnaies, Médailles et Antiques, Mme Mathilde Avisseau-Broustet, conservateur en chef, et M. Didier Rivals.
  • [2]
    Dans le « Journal des acquisitions du Cabinet des médailles du roy commancé le 25 octobre 1689 » (Rés. Ms 00001 PAR BN (1689 F)), on trouve à la date du 6 novembre 1690 la mention suivante : « Le livre du Père Noris, théologien du grand-duc, De epochis Syromacedonum, imprimé à Florence en 1689. Envoyé en feuilles par l’autheur. / Dans la bibliothèque du Cabinet des médailles. » Enrico Noris (1631-1704) fut directeur de la Bibliothèque vaticane en 1692 et cardinal en 1695.
  • [3]
    Un mémoire du 15 mai 1720 constate que le régent avait autorisé la vente de volumes se trouvant déjà dans la Bibliothèque du roi. Cette vente rapporta la somme de 6 000 livres (Archives du département, 1 ACM 62).
  • [4]
    La cote actuelle est : Rés. 65100 MEC 8°.
  • [5]
    La bibliothèque de Gros de Boze était particulièrement importante et bien fournie en ouvrages de numismatique et d’érudition : le catalogue de vente dressé en 1753, peu avant sa mort, comptait 2 723 articles (Catalogue des livres du cabinet de M. de Boze, Paris, Martin, Guérin, Delatour, 1753). Une seconde vente eut lieu l’année suivante après le décès de l’académicien (Catalogue des livres provenans de la bibliothèque de feu M. de Boze, dont la vente sera indiquée par affiches, Paris, Gabriel II Martin, 1754). Il en allait de même pour celle de l’abbé Barthélemy, mise en vente cinq ans après sa mort. Le catalogue de la vente compte 1 485 numéros, dont 541 pour l’histoire et les antiquités (Catalogue des livres de la bibliothèque de feu l’abbé Barthélemy, Paris, Bernard et Thuret, an IX-1800).
  • [6]
    La préface initiale avait été mal reçue. Les exemplaires comportant la préface imprimée sont les 65 du tirage de tête ; ceux comportant une préface manuscrite appartiennent au reste du tirage, et la préface y a été insérée pour satisfaire la curiosité des amateurs (Médailles sur les principaux événemens du règne de Louis le Grand, Paris, Imprimerie royale, 1702 (Rés. 31120 MED Fol. (1702)). L’exemplaire des Médailles porte l’estampille de la bibliothèque du Prytanée, celle de la Bibliothèque du roi à Compiègne et une ancienne cote du département des Imprimés. Il était encore à Compiègne en 1884.
  • [7]
    Le fichier des catalogues de vente du département est en cours de rétroconversion. Celle du fichier des monographies devrait intervenir en 2009-2010.
  • [8]
    C’est ce qu’a fait Christian Edmond Dekesel en composant ses bibliographies numismatiques des xvie et xviie siècles : Bibliotheca nummaria : bibliography of 16th century numismatic books, Londres, Spink, 1997 ; Bibliography of 17th century numismatic books, Londres, Spink & son / Crestline (Ohio), Kolbe, 2003.
  • [9]
    La seule différence entre ces deux ensembles tient à leur mode de conservation : les archives, conservées dans des cartons depuis le xixe siècle, forment un ensemble autonome, tandis que les manuscrits constituent une section de la réserve de la bibliothèque.
  • [10]
    Conservées aux Archives nationales dans les sous-séries O1 (Maison du roi) et F17 (Instruction publique).
  • [11]
    Elles ont été exploitées par M. Fabrice Charton, pour une thèse de l’EHESS en cours : « De la Petite Académie à l’Académie des inscriptions et belles-lettres (1663-1743) : une institution et des gens de lettres au service du Prince », sous la direction de Christian Jouhaud.
  • [12]
    La Grande Question d’Occident. Le Rhin dans l’histoire, Paris, E. Leroux, 1916-1917. Les notes de Babelon figurent sous les cotes 1 APM 40 à 44.
  • [13]
    Catalogue général et raisonné des camées et pierres gravées de la Bibliothèque impériale, suivi de la description des autres monuments exposés dans le Cabinet des médailles et antiques, Paris, J. Claye, 1858.
  • [14]
    Citons par exemple : Henri Omont, Missions archéologiques françaises en Orient au xviie et xviiie siècles, Paris, Imprimerie nationale, 1902 ; Antoine Schnapper, Collections et collectionneurs dans la France du xviie siècle, I. Le Géant, la Licorne et la Tulipe : histoire et histoire naturelle, Paris, Flammarion, 1988, II. Curieux du Grand Siècle : œuvres d’art, Paris, Flammarion, 1994.
  • [15]
    Entre 1990 et 1996 à l’occasion de la préparation de deux études sur l’histoire du Cabinet et les numismates français : Thierry Sarmant, Le Cabinet des médailles de la Bibliothèque nationale, 1661-1848, Paris, École des chartes, 1993 ; La République des médailles : numismates et collections numismatiques à Paris du Grand Siècle au siècle des Lumières, Paris, Honoré Champion, 2003.
  • [16]
    Sur le site associatif <archivesmonetaires.org>.
  • [17]
    Inventaire rédigé par Mlle Felicity Bodenstein, qui poursuit une thèse de doctorat sur « Le Cabinet des médailles de la Bibliothèque nationale de 1848 à 1924 », sous la direction du professeur Barthélemy Jobert.
  • [18]
    État général des fonds d’archives du département des Monnaies, Médailles et Antiques de la Bibliothèque nationale de France, par Aurélie Lavillonnière, sous la direction de Thierry Sarmant, en préparation.

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