Notes
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[1]
Au Québec, le français est la langue d’usage (c’est-à-dire la plus souvent parlée à la maison) de 82,8 % de la population et l’anglais celle de 12,3 %, quelque 4,9 % ayant une autre langue d’usage. Ailleurs au Canada, le français est la langue d’usage de 3,6 % de la population et l’anglais celle de 88,6 %. Si l’on inclut le Québec, l’usage du français au Canada atteint 24,1 % et celui de l’anglais 68,9 %. Près de 90 % des francophones du Canada résident aujourd’hui au Québec. D’un recensement à l’autre, leur proportion diminue dans les autres provinces. À part le Nouveau-Brunswick, où ils constituent 31 % de la population, les francophones sont devenus marginaux dans chacune des autres provinces : à Terre-Neuve, en Saskatchewan, en Alberta et en Colombie-Britannique, ils représentent 1 % ou moins de la population ; à l’Île-du-Prince-Édouard, en Nouvelle-Écosse et au Manitoba, ils n’atteignent pas 3 % ; en Ontario, ils sont descendus à moins de 4 %.
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[2]
Dans le domaine des institutions publiques et administratives, l’idée qui avait prévalu lors de l’adoption de la Charte de la langue française était de faire du français la langue principale, ou parfois la seule langue, de la législation et de la réglementation, de la justice et de l’administration publique. Pour ce faire, on avait restreint – sans le supprimer totalement – le bilinguisme qui existait traditionnellement dans les institutions publiques québécoises. Ainsi, la loi prévoyait que les lois et les règlements ne seraient plus adoptés qu’en français, l’administration fournissant une traduction anglaise non officielle. De même, les jugements devaient être rédigés en français ou être accompagnés d’une version française dûment authentifiée et seule la version française du jugement était officielle. Ces dispositions ont été déclarées inconstitutionnelles par la Cour suprême du Canada en 1979, car incompatibles avec l’article 133 de la Loi constitutionnelle de 1867 qui impose l’usage du français et de l’anglais dans la rédaction des lois et des documents parlementaires, au Québec et au niveau des institutions fédérales canadiennes. Cet article permet, en outre, que l’anglais et le français soient utilisés, à volonté, dans les procédures écrites et dans les plaidoiries orales devant les tribunaux fédéraux et les tribunaux du Québec, ainsi que dans les débats du Parlement fédéral et de la législature du Québec. L’article 133 n’a pas été rendu applicable, en 1867, aux trois provinces anglophones existant à l’époque, si bien que leurs minorités francophones sont restées sans protection constitutionnelle. Cela s’explique par le rapport de force qui existait entre les francophones et les anglophones à l’échelle du Canada tout entier : les Canadiens anglais, majoritaires, se trouvaient en position de forcer le Québec à consentir certains droits à sa minorité anglophone ; les Canadiens français, minoritaires, n’ont pas réussi à obtenir les mêmes garanties en faveur des minorités francophones établies en dehors du Québec. Parmi les provinces admises dans la fédération après 1867, celles où les anglophones étaient majoritaires ne furent pas davantage assujetties au bilinguisme constitutionnel. Seul le Manitoba, créé en 1870, dont la population était composée à l’époque à peu près pour moitié de francophones et d’anglophones, se vit imposer des obligations équivalentes à celles de l’article 133. Cependant, une fois les anglophones devenus majoritaires, la législature manitobaine institua en 1890 l’unilinguisme des lois et des tribunaux, violant ainsi ses obligations constitutionnelles. Il fallut attendre 1979 pour que la Cour suprême rétablisse enfin les droits des francophones du Manitoba. Finalement, en 1982, le Nouveau-Brunswick a accepté de s’assujettir à des obligations constitutionnelles similaires à celles prévues dans l’article 133.
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[3]
Un des objectifs de la Loi 101 est de franciser la vie économique. Ainsi, les entreprises employant 50 personnes ou plus doivent adopter un programme de francisation ayant pour but la généralisation de l’utilisation du français à tous les niveaux de l’entreprise, ce qui comporte notamment la connaissance de cette langue chez les dirigeants et les membres du personnel, l’utilisation du français comme langue du travail et des communications internes, dans les documents de travail, les manuels, les catalogues et la publicité de l’entreprise, ainsi que dans les communications avec les fournisseurs, la clientèle et le public. Dans le domaine des relations de travail, la loi interdit d’exiger, pour l’accès à un emploi, la connaissance d’une langue autre que le français, à moins que l’employeur ne prouve que cette connaissance est nécessaire à l’accomplissement de la tâche. De même, un employeur ne peut congédier, mettre à pied, rétrograder ou déplacer un membre de son personnel pour la seule raison que celui-ci ne parle que le français ou qu’il ne connaît pas suffisamment une autre langue. Les employeurs doivent rédiger en français (et peuvent également rédiger dans une autre langue) les offres d’emploi ou de promotion et, de façon plus générale, les communications qu’ils adressent à leur personnel. La même règle s’applique pour les conventions collectives. Les entreprises d’utilité publique, les ordres professionnels et les membres de ceux-ci doivent faire en sorte que leurs services soient disponibles en français. Les avis, communications et imprimés destinés au public, y compris les titres de transport en commun, doivent être rédigés dans cette langue. Les ordres professionnels ne peuvent délivrer de permis qu’à des personnes qui ont du français une connaissance « appropriée à l’exercice de leur profession ». Les inscriptions sur un produit ou sur son emballage et sur un document accompagnant ce produit, y compris le mode d’emploi et les certificats de garantie, doivent être rédigées en français, mais peuvent être accompagnées d’une ou de plusieurs traductions, à condition que celles-ci ne l’emportent pas sur le français. Les catalogues, brochures, dépliants et autres publications de même nature doivent être rédigés en français, ainsi que les formulaires de demande d’emploi, les bons de commande, les factures, les reçus et les quittances. Les contrats d’adhésion et les contrats où figurent des clauses types imprimées doivent être rédigés en français, mais peuvent être rédigés dans une autre langue si c’est la volonté expresse des parties.
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[4]
Depuis la fin des années 1960, la politique fédérale en matière de langue et de minorités s’articule autour de trois axes : le bilinguisme des lois, de la réglementation et des tribunaux fédéraux et la prestation de services bilingues aux usagers des services publics fédéraux là où la demande le justifie ; la représentation équitable des francophones dans la fonction publique fédérale et la reconnaissance de leur droit d’y travailler dans leur langue ; l’octroi de subventions aux provinces pour les inciter à promouvoir l’usage des langues officielles, principalement en ce qui concerne l’éducation dans la langue de la minorité anglophone ou francophone et l’enseignement de la langue officielle seconde. La politique de bilinguisme dans les services publics fédéraux découle de la Loi sur les langues officielles adoptée en 1969, dont une nouvelle version est entrée en vigueur en 1989. La politique linguistique fédérale a eu un succès réel, mais partiel. La capacité institutionnelle de l’administration fédérale de fonctionner en français est aujourd’hui nettement meilleure qu’elle ne l’était dans les années 1960. D’autre part, il est encore aujourd’hui très difficile de se faire servir en français dans les services publics fédéraux ailleurs qu’au Québec, dans la région d’Ottawa, au Nouveau-Brunswick et dans certaines régions de l’Ontario, comme en témoignent les nombreuses plaintes déposées auprès du Commissaire aux langues officielles. Les exigences de bilinguisme dans la fonction publique ont provoqué le mécontentement d’un grand nombre d’anglophones unilingues qui ont vu diminuer leurs chances d’être engagés ou promus comme fonctionnaires. De façon plus générale, cette politique n’a pas réussi à endiguer de façon nette le phénomène d’anglicisation des minorités francophones hors Québec.
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[5]
Le Nouveau-Brunswick et l’Ontario ont adopté des attitudes inspirées, à des degrés divers, de la politique de bilinguisme officiel de l’État fédéral. Cela s’explique par la démographie : dans ces deux provinces, voisines du Québec, les francophones ont encore une importance numérique significative, soit en chiffres absolus, soit en termes relatifs. Au Nouveau-Brunswick, ils sont 217 000 (plus de 31 % de la population) et en Ontario 350 000 (près de 4 % de la population). C’est le Nouveau-Brunswick qui est allé le plus loin dans la voie du bilinguisme officiel. Dès 1969, le Parlement provincial a adopté une Loi sur les langues officielles, directement inspirée de la loi fédérale. Dans le cas de l’Ontario, la politique de bilinguisme officiel est allée moins vite et moins loin ; elle a consisté à adopter progressivement des mesures qui améliorent le système scolaire francophone et instaurent le bilinguisme des lois, ainsi qu’une certaine forme de bilinguisme judiciaire et administratif dans les régions où sont concentrés les francophones. Certaines de ces mesures ont été réunies dans la Loi de 1986 sur les services en français. Dans les sept autres provinces, aux extrémités est et ouest du pays, la politique de bilinguisme officiel fait l’objet d’une réticence plus ou moins prononcée, voire d’un véritable rejet. Là encore, les attitudes s’expliquent par la démographie : dans ces régions du Canada, les francophones ne sont que très faiblement représentés (3,7 % de la population en moyenne) et, de plus, ils sont en voie d’assimilation linguistique. Dans les provinces de l’Ouest, les francophones ne constituent même pas la principale minorité ; ils sont inférieurs en nombre à d’autres groupes linguistiques, comme les Allemands, les Ukrainiens et, plus récemment, en Colombie-Britannique, les Chinois. Le Manitoba constitue un cas à part ; même si les francophones représentent maintenant à peine 3 % de la population (31 000 personnes), la province est assujettie – pour des raisons historiques – à des dispositions constitutionnelles qui instaurent le bilinguisme parlementaire, législatif et judiciaire.
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[6]
Au référendum de 1980, la question portait sur un simple mandat de négocier, assorti d’un engagement de soumettre les résultats des éventuelles négociations à un deuxième référendum. Malgré le caractère très timoré de la question, les indépendantistes subirent une nette défaite (40,4 % de oui, 59,6 % de non, le taux de participation étant de 86 %). Le 30 octobre 1995, un deuxième référendum, portant sur l’accession du Québec à la souveraineté, accompagnée d’une offre de partenariat économique au Canada, s’est soldé par des résultats très serrés : 49,44 % de oui et 50,56 % de non (le taux de participation ayant été de 93,48 %). Le Parti québécois a de nouveau remporté les élections en 1998 et promis d’organiser un autre référendum sur la souveraineté dans les années à venir.
1Les conflits linguistiques qui existent au Canada et, en particulier, au Québec, viennent de ce que chacun des deux principaux groupes en présence – les francophones et les anglophones – constitue soit une majorité, soit une minorité, selon le lieu et le niveau politique où l’on se place. Les francophones sont majoritaires au Québec, où ils constituent près de 83 % de la population, mais ils sont minoritaires dans chacune des neuf autres provinces et dans l’ensemble politique canadien, où ils ne représentent plus que 24 % de la population. Inversement, les anglophones sont minoritaires au Québec, mais majoritaires partout ailleurs au Canada [1].
Défense et promotion de la langue française
2 À la fin des années 1960, deux phénomènes caractérisaient la situation sociolinguistique du Québec : la désaffection des immigrants « allophones » (ni francophones ni anglophones) à l’égard de l’école française, d’une part ; l’infériorité du français par rapport à l’anglais et la position subordonnée des francophones dans la vie économique et sociale, d’autre part. À partir de là, les objectifs de la politique linguistique québécoise s’imposaient d’eux-mêmes : amener les immigrants à fréquenter l’école française plutôt que l’école anglaise ; rehausser le statut des francophones dans la vie économique ainsi que le prestige et l’utilité de la langue française, de façon à inciter les non-francophones à l’apprendre et à l’utiliser, pour qu’elle devienne la « langue commune » (ou langue de contact) entre les divers groupes linguistiques. Ces deux objectifs ont été poursuivis, de façon plus ou moins systématique et cohérente, par les gouvernements qui se sont succédé au Québec depuis 1970 : en 1974, le gouvernement libéral (partisan du maintien du Québec au sein du Canada) a fait adopter la Loi sur la langue officielle (ou Loi 22) ; en 1977, le gouvernement du Parti québécois (indépendantiste) a fait voter la Charte de la langue française (ou Loi 101).
3 La Loi 101 régit le statut des langues dans trois secteurs principaux : les institutions publiques et administratives, la vie économique et commerciale et, enfin, l’éducation publique. Dans ces trois domaines, la loi a pour objectif de rehausser le statut du français et, pour y parvenir, elle limite les droits ou privilèges traditionnels des anglophones. Les deux langues étant en situation de vive concurrence, il faut, pour avantager l’une, quelque peu désavantager l’autre. En outre, comme la force d’attraction, l’utilité économique et le prestige de l’anglais sont supérieurs à ceux du français, le renforcement de celui-ci suppose que la loi lui confère certains « avantages comparatifs » sur l’anglais, en lui reconnaissant un rôle prépondérant, parfois même exclusif, dans certains domaines de la vie sociale et économique. Enfin, il est apparu, à partir des années 1960, que le bilinguisme institutionnel alors en place avait des effets pernicieux : non seulement il entraînait la dégradation de la langue française (emprunts, traductions, calques, etc.), mais surtout il favorisait l’unilinguisme des anglophones, leur permettant ainsi de maintenir leur position économique et sociale dominante.
4 La législation linguistique québécoise résulte d’un choix sciemment opéré entre les deux grandes philosophies qui existent en matière d’aménagement linguistique : le principe de territorialité et le principe de personnalité. En vertu du premier, tous ceux qui habitent un territoire donné doivent utiliser la langue officielle de ce territoire dans leurs rapports avec les autorités publiques et pour l’éducation de leurs enfants à l’école publique (en revanche, dans les rapports privés et pour l’école privée, la liberté linguistique devrait rester entière). L’application de ce principe se caractérise donc par le fait que les individus ne peuvent pas choisir la langue de leurs contacts avec les autorités publiques ou celle de l’instruction de leurs enfants à l’école publique. Selon de nombreux sociolinguistes, la solution territoriale est celle qui assure le mieux la stabilité et la sécurité des communautés linguistiques, en séparant les langues en présence et en offrant à chacune d’elles un espace sur lequel elle jouit d’un monopole ou, du moins, d’une nette prédominance. Cette solution territoriale a, par exemple, été adoptée en Suisse et en Belgique et le Québec essaie d’en appliquer certains éléments avec la Loi 101.
5 Le principe de personnalité, lui, permet aux individus de choisir entre deux ou plusieurs langues pour leurs rapports avec les autorités publiques et l’éducation de leurs enfants à l’école publique. Il exige donc le bilinguisme (ou multilinguisme) de l’État et du système éducatif public. Le principe de personnalité peut s’appliquer sur l’ensemble du territoire étatique ou, plus fréquemment, sur les seules parties de celui-ci où les minorités atteignent un certain seuil démographique. Sur le plan sociolinguistique, cette solution maintient le contact et la concurrence entre les langues en présence et permet donc à la langue la plus forte de concurrencer la plus vulnérable. Le principe de personnalité et son corollaire, le bilinguisme institutionnel, trouvent une certaine application au niveau des institutions fédérales canadiennes et, dans une moindre mesure, en Ontario, au Nouveau-Brunswick et au Manitoba. Évidemment, cela n’entraîne aucune menace pour la langue anglaise, qui prédomine partout en dehors du Québec.
Les droits de la minorité anglophone
6 Dans chacun des trois grands secteurs mentionnés, la politique linguistique québécoise a été partiellement battue en brèche. Un certain nombre de dispositions de la Loi 101 ont été invalidées par les tribunaux à la suite d’actions intentées par des membres de la minorité anglophone du Québec et, le plus souvent, financées et encouragées par le gouvernement fédéral. Les réactions les plus vives ont été provoquées par les dispositions de la Loi 101 relatives à l’affichage commercial et à l’éducation [2].
7 À l’origine, la Loi 101 prescrivait que, sauf pour quelques exceptions, l’affichage public et la publicité commerciale devaient être uniquement en français. Ces exigences ont été considérées par la Cour suprême du Canada comme incompatibles avec la liberté d’expression garantie par la Charte canadienne des droits et libertés contenue dans la Loi constitutionnelle de 1982 (arrêt Ford de 1988). Dans des constatations déposées le 31 mars 1993, le Comité des droits de l’homme des Nations unies, institué en application du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, est arrivé à la même conclusion : les dispositions de la Loi 101 sur l’affichage et les raisons sociales violaient la liberté d’expression garantie à l’article 19 du Pacte. À la suite de cette double condamnation, le gouvernement du Québec a fait adopter en 1993 une modification à la Loi 101 qui instituait un nouveau régime dans lequel l’affichage public et la publicité commerciale pouvaient désormais être à la fois en français et dans une ou plusieurs autres langues, pourvu que le français y figure « de façon nettement prédominante ».
8 Dans le domaine de la langue d’enseignement, la Loi 101 comportait, également à l’origine, une règle communément appelée « clause Québec », selon laquelle n’étaient admissibles à l’école publique anglaise – primaire et secondaire – que les enfants (ainsi que leurs frères et sœurs cadets) dont l’un des parents avaient lui-même reçu, au Québec, son enseignement primaire en anglais. En pratique, cette règle avait pour effet d’exclure de l’école publique anglaise les immigrants, quelle que soit leur origine, y compris ceux dont la langue maternelle ou usuelle était l’anglais ; les francophones du Québec eux-mêmes ; les Canadiens des autres provinces venant s’établir au Québec, à moins qu’une entente de réciprocité n’ait été conclue entre le Québec et leur province d’origine ou que celle-ci n’offre des services comparables aux francophones qui y résidaient. Cette dernière conséquence a immédiatement été considérée comme inacceptable par les autorités fédérales, car contraire au principe de libre circulation et de libre établissement des personnes sur le territoire de la fédération. Pourtant, à l’époque où la Loi 101 a été adoptée, rien dans la Constitution canadienne ne s’opposait à ce genre de législation. Le gouvernement fédéral a donc fait adopter, en 1982, l’article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés qui contient une disposition incompatible avec la réglementation québécoise. Deux ans plus tard, la Cour suprême a déclaré celle-ci inopérante. Mais cela n’a rien changé au fait que les immigrants allophones (et les francophones eux-mêmes) doivent fréquenter l’école française. De ce point de vue, la Loi 101 continue d’atteindre son but. Il semble cependant que la fréquentation de l’école française ne soit pas suffisante pour franciser durablement les immigrants. Ceux-ci s’établissent en très grande majorité à Montréal et la proportion des élèves allophones est devenue si importante dans de nombreuses écoles françaises de la métropole que celles-ci voient leur capacité d’intégration des nouveaux venus sensiblement diminuer. Cette situation est le résultat non seulement des niveaux d’immigration élevés de ces dernières années, mais aussi de l’exode massif des classes moyennes francophones vers les banlieues de Montréal. Or c’est principalement à Montréal que va se jouer l’avenir linguistique et culturel de la société québécoise. En outre, la francisation des immigrants dépend également de leur insertion dans les activités économiques qui, à Montréal, continuent de se dérouler en grande partie en anglais.
9 Par ailleurs, certaines dispositions de la Charte canadienne des droits et libertés, qui n’ont pas de contenu linguistique explicite, présentent pour la Loi 101 un danger potentiel qu’il est difficile d’évaluer. La Charte canadienne garantit la liberté d’expression, de circulation et d’établissement et le droit à l’égalité, dispositions qui possèdent un contenu linguistique « implicite », dans la mesure où les tribunaux peuvent en faire découler par interprétation le droit des individus d’utiliser la langue de leur choix en certaines circonstances. Il s’agit de droits principalement « négatifs », qui mettent à la charge des autorités publiques une obligation d’abstention plutôt que d’action. Ils permettent donc à leurs bénéficiaires de contester et, le cas échéant, de faire invalider des mesures étatiques qui limitent la sphère d’autonomie des individus. Par conséquent, ils permettront aux anglophones du Québec d’attaquer la validité des dispositions de la Loi 101 qui restreignent le libre choix linguistique dans des activités comme le commerce, les relations de travail et l’affichage publicitaire. De telles dispositions sont cependant nécessaires au Québec dans la mesure où la libre concurrence linguistique s’y révèle favorable à l’anglais et, si on la laisse suivre son cours, aboutira à la disparition du français de certains champs d’activité. Des commerçants anglophones du Québec ont déjà réussi à faire invalider les dispositions de la Loi 101 relatives à l’affichage et aux raisons sociales en se fondant sur la liberté d’expression commerciale. Dans l’avenir, en faisant appel au droit à l’égalité, d’autres pourront contester les dispositions de la Loi 101 qui confèrent à la langue française un statut prépondérant par rapport aux autres langues, ou, en invoquant la liberté de circulation et d’établissement, celles qui exigent la connaissance du français par les membres des ordres professionnels [3].
10 La Charte canadienne continuera donc à fournir aux anglophones du Québec les moyens de s’attaquer à de nombreuses dispositions de la Loi 101 qui constituent pour eux des « irritants ». Une réconciliation entre la majorité francophone et la minorité anglophone supposerait pour celle-ci d’accepter que la sauvegarde de la position du français au Québec (le droit collectif des francophones) justifie la limitation du libre choix linguistique individuel. Les anglophones du Québec ne réclament-ils pas eux-mêmes, en tant que collectivité minoritaire, des droits collectifs : leurs propres écoles, leurs propres services sociaux et de santé ?
Convergences et divergences d’intérêts des communautés francophones
11 Après la création de la fédération canadienne en 1867, les francophones ont longtemps espéré faire triompher une interprétation « dualiste » du Canada, fondée sur le principe de l’association égale entre deux « peuples fondateurs ». Cette théorie de la « dualité » peut donner lieu à deux interprétations. La première, à contenu essentiellement linguistique, oppose les Canadiens anglophones aux Canadiens francophones ; la seconde, à connotation plus politique, oppose le Québec français au Canada anglais. Dans le premier cas, il s’agit d’une dualité pancanadienne, dans laquelle le Québec ne représente qu’une fraction du Canada français ; dans le deuxième, le Québec peut prétendre constituer à lui seul une des deux parties qui composent le pays et, par conséquent, revendiquer une certaine forme de parité politique avec le reste du Canada. Ces deux interprétations de la « dualité » entraînent évidemment des conséquences constitutionnelles et linguistiques très différentes, voire antagonistes.
12 La « vision pancanadienne » amène les Québécois à vouloir maximiser leur participation au pouvoir central, et à réclamer, dans le cadre des institutions fédérales, l’égalité linguistique (sous la forme du bilinguisme) d’un bout à l’autre du Canada. Dans une pareille stratégie, qui lie la survivance du français à l’établissement d’institutions bilingues et biculturelles partout au Canada, les intérêts des Québécois francophones et des communautés francophones des autres provinces coïncident en grande partie.
13 En revanche, la « vision québécoise » pousse le Québec à réclamer un maximum d’autonomie provinciale, c’est-à-dire la décentralisation des pouvoirs. Dans la mesure où les institutions centrales perdent de l’influence, l’intérêt pour les Québécois d’y être fortement représentés décroît également, en même temps qu’augmente leur désir d’exercer plus de pouvoirs dans le cadre des institutions politiques provinciales. Sur le plan linguistique, le terrain où se joue le sort du français n’est plus le Canada tout entier, mais le Québec, et l’objectif poursuivi n’est plus le bilinguisme, mais la primauté de la langue française. Celle-ci ne pouvant résulter du jeu naturel de la libre concurrence des langues, défavorable au français en Amérique du Nord, l’État québécois devra légiférer pour imposer l’usage du français et restreindre celui de l’anglais. Dans cette deuxième vision, les francophones du Québec auront tendance à se désintéresser du sort du français en dehors de leurs frontières ; leur stratégie deviendra même incompatible avec les intérêts des francophones hors Québec dans la mesure où, d’une part, elle consistera à limiter l’intervention linguistique de l’État fédéral et, d’autre part, elle amènera le Québec à chercher à diminuer le bilinguisme sur son territoire, ce qui servira de prétexte aux provinces anglophones pour faire la sourde oreille aux revendications de leurs minorités francophones.
14 Historiquement, ces deux visions de la dualité ont toujours coexisté au Québec et elles coexistent encore aujourd’hui, mais entre 1867 et le début des années 1960 c’est en grande partie la première vision qui a prévalu. À partir du début des années 1960 (période que l’on a appelée la « Révolution tranquille »), la « vision québécoise » a progressivement supplanté la « vision canadienne » (mais sans la faire totalement disparaître). En matière constitutionnelle, cela a amené les Québécois à réclamer systématiquement l’attribution au Québec des nouveaux pouvoirs jugés nécessaires à son développement culturel, social et économique. En matière linguistique, la politique québécoise a consisté dès lors à faire du français la langue « commune » de tous les Québécois, y compris les non-francophones, et l’on a donc cherché à réduire le bilinguisme existant dans tous les domaines de la société québécoise, ce qui a nécessité de limiter le droit au libre choix linguistique, notamment en matière de langue d’enseignement et de langue du travail, du commerce et des affaires.
15 Les effets de ce changement de la politique québécoise sur les francophones hors Québec ont été en grande partie positifs. En effet, aux revendications québécoises qui ont commencé à menacer l’unité nationale, et que l’on analysait encore comme visant une certaine forme d’égalité au niveau pancanadien, le gouvernement canadien a répondu, à partir de 1969, en adoptant un programme destiné à augmenter la présence des francophones et de la langue française dans les institutions fédérales, en même temps qu’il s’est engagé dans diverses actions de promotion des minorités francophones [4]. Tous ces développements ont évidemment été très favorables aux francophones hors Québec, plus d’ailleurs qu’aux Québécois francophones. C’est également à partir de 1969 que le Nouveau-Brunswick et, plus tard, l’Ontario ont commencé à mettre sur pied une politique de bilinguisme plus ou moins inspirée de la politique fédérale [5]. À partir de 1976, lorsque la menace de la séparation du Québec s’est concrétisée davantage, le gouvernement fédéral a pu s’appuyer sur l’argument de l’unité nationale pour convaincre les provinces anglophones d’améliorer la situation scolaire de leur minorité francophone et, en 1982, lors de l’adoption de la Loi constitutionnelle, d’inscrire dans celle-ci l’article 23 garantissant les droits à l’instruction en anglais ou en français. Par conséquent, les revendications du Québec pour plus d’autonomie, voire pour la souveraineté, ont indirectement permis aux francophones d’obtenir des gains impensables encore au début des années 1960.
16 Cependant, la montée de l’autonomisme – puis de l’indépendantisme – au Québec a également provoqué une rupture certaine entre les Québécois francophones et les communautés francophones du reste du Canada. Les divergences se sont encore accentuées à partir de 1976 avec l’accession au pouvoir du Parti québécois et l’organisation de deux référendums en 1980 et en 1995 sur la séparation du Québec [6]. Les francophones hors Québec ont alors fort bien compris qu’une éventuelle sécession du Québec les laisserait dans une situation de très grande vulnérabilité, en faisant disparaître aux yeux des Canadiens anglais la principale raison justifiant les politiques de bilinguisme.
17 Le Canada anglais a reproché au Québec d’avoir commencé à limiter les droits de sa minorité anglophone au moment même où le statut juridique des francophones hors Québec bénéficiait d’une certaine amélioration, en Ontario, au Nouveau-Brunswick ainsi qu’au niveau des institutions fédérales. Cependant, les droits des anglophones du Québec, même limités par la Loi 101, demeurent encore considérables par rapport à ceux reconnus aux francophones dans la plupart des autres provinces. En outre, les francophones, même s’ils sont en situation de majorité au Québec, constituent une minorité en perte d’influence au niveau du Canada tout entier. Tous les efforts consentis par les autorités fédérales et certaines provinces pour améliorer le sort des minorités francophones hors Québec n’ont pas réussi à freiner le taux d’assimilation de ces groupes. Même au Québec, où près de 90 % des francophones du Canada sont désormais concentrés, le fait français n’est pas à l’abri des menaces, puisque les immigrants continuent en grande partie de s’assimiler à la communauté anglophone. ?
Notes
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Au Québec, le français est la langue d’usage (c’est-à-dire la plus souvent parlée à la maison) de 82,8 % de la population et l’anglais celle de 12,3 %, quelque 4,9 % ayant une autre langue d’usage. Ailleurs au Canada, le français est la langue d’usage de 3,6 % de la population et l’anglais celle de 88,6 %. Si l’on inclut le Québec, l’usage du français au Canada atteint 24,1 % et celui de l’anglais 68,9 %. Près de 90 % des francophones du Canada résident aujourd’hui au Québec. D’un recensement à l’autre, leur proportion diminue dans les autres provinces. À part le Nouveau-Brunswick, où ils constituent 31 % de la population, les francophones sont devenus marginaux dans chacune des autres provinces : à Terre-Neuve, en Saskatchewan, en Alberta et en Colombie-Britannique, ils représentent 1 % ou moins de la population ; à l’Île-du-Prince-Édouard, en Nouvelle-Écosse et au Manitoba, ils n’atteignent pas 3 % ; en Ontario, ils sont descendus à moins de 4 %.
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Dans le domaine des institutions publiques et administratives, l’idée qui avait prévalu lors de l’adoption de la Charte de la langue française était de faire du français la langue principale, ou parfois la seule langue, de la législation et de la réglementation, de la justice et de l’administration publique. Pour ce faire, on avait restreint – sans le supprimer totalement – le bilinguisme qui existait traditionnellement dans les institutions publiques québécoises. Ainsi, la loi prévoyait que les lois et les règlements ne seraient plus adoptés qu’en français, l’administration fournissant une traduction anglaise non officielle. De même, les jugements devaient être rédigés en français ou être accompagnés d’une version française dûment authentifiée et seule la version française du jugement était officielle. Ces dispositions ont été déclarées inconstitutionnelles par la Cour suprême du Canada en 1979, car incompatibles avec l’article 133 de la Loi constitutionnelle de 1867 qui impose l’usage du français et de l’anglais dans la rédaction des lois et des documents parlementaires, au Québec et au niveau des institutions fédérales canadiennes. Cet article permet, en outre, que l’anglais et le français soient utilisés, à volonté, dans les procédures écrites et dans les plaidoiries orales devant les tribunaux fédéraux et les tribunaux du Québec, ainsi que dans les débats du Parlement fédéral et de la législature du Québec. L’article 133 n’a pas été rendu applicable, en 1867, aux trois provinces anglophones existant à l’époque, si bien que leurs minorités francophones sont restées sans protection constitutionnelle. Cela s’explique par le rapport de force qui existait entre les francophones et les anglophones à l’échelle du Canada tout entier : les Canadiens anglais, majoritaires, se trouvaient en position de forcer le Québec à consentir certains droits à sa minorité anglophone ; les Canadiens français, minoritaires, n’ont pas réussi à obtenir les mêmes garanties en faveur des minorités francophones établies en dehors du Québec. Parmi les provinces admises dans la fédération après 1867, celles où les anglophones étaient majoritaires ne furent pas davantage assujetties au bilinguisme constitutionnel. Seul le Manitoba, créé en 1870, dont la population était composée à l’époque à peu près pour moitié de francophones et d’anglophones, se vit imposer des obligations équivalentes à celles de l’article 133. Cependant, une fois les anglophones devenus majoritaires, la législature manitobaine institua en 1890 l’unilinguisme des lois et des tribunaux, violant ainsi ses obligations constitutionnelles. Il fallut attendre 1979 pour que la Cour suprême rétablisse enfin les droits des francophones du Manitoba. Finalement, en 1982, le Nouveau-Brunswick a accepté de s’assujettir à des obligations constitutionnelles similaires à celles prévues dans l’article 133.
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Un des objectifs de la Loi 101 est de franciser la vie économique. Ainsi, les entreprises employant 50 personnes ou plus doivent adopter un programme de francisation ayant pour but la généralisation de l’utilisation du français à tous les niveaux de l’entreprise, ce qui comporte notamment la connaissance de cette langue chez les dirigeants et les membres du personnel, l’utilisation du français comme langue du travail et des communications internes, dans les documents de travail, les manuels, les catalogues et la publicité de l’entreprise, ainsi que dans les communications avec les fournisseurs, la clientèle et le public. Dans le domaine des relations de travail, la loi interdit d’exiger, pour l’accès à un emploi, la connaissance d’une langue autre que le français, à moins que l’employeur ne prouve que cette connaissance est nécessaire à l’accomplissement de la tâche. De même, un employeur ne peut congédier, mettre à pied, rétrograder ou déplacer un membre de son personnel pour la seule raison que celui-ci ne parle que le français ou qu’il ne connaît pas suffisamment une autre langue. Les employeurs doivent rédiger en français (et peuvent également rédiger dans une autre langue) les offres d’emploi ou de promotion et, de façon plus générale, les communications qu’ils adressent à leur personnel. La même règle s’applique pour les conventions collectives. Les entreprises d’utilité publique, les ordres professionnels et les membres de ceux-ci doivent faire en sorte que leurs services soient disponibles en français. Les avis, communications et imprimés destinés au public, y compris les titres de transport en commun, doivent être rédigés dans cette langue. Les ordres professionnels ne peuvent délivrer de permis qu’à des personnes qui ont du français une connaissance « appropriée à l’exercice de leur profession ». Les inscriptions sur un produit ou sur son emballage et sur un document accompagnant ce produit, y compris le mode d’emploi et les certificats de garantie, doivent être rédigées en français, mais peuvent être accompagnées d’une ou de plusieurs traductions, à condition que celles-ci ne l’emportent pas sur le français. Les catalogues, brochures, dépliants et autres publications de même nature doivent être rédigés en français, ainsi que les formulaires de demande d’emploi, les bons de commande, les factures, les reçus et les quittances. Les contrats d’adhésion et les contrats où figurent des clauses types imprimées doivent être rédigés en français, mais peuvent être rédigés dans une autre langue si c’est la volonté expresse des parties.
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Depuis la fin des années 1960, la politique fédérale en matière de langue et de minorités s’articule autour de trois axes : le bilinguisme des lois, de la réglementation et des tribunaux fédéraux et la prestation de services bilingues aux usagers des services publics fédéraux là où la demande le justifie ; la représentation équitable des francophones dans la fonction publique fédérale et la reconnaissance de leur droit d’y travailler dans leur langue ; l’octroi de subventions aux provinces pour les inciter à promouvoir l’usage des langues officielles, principalement en ce qui concerne l’éducation dans la langue de la minorité anglophone ou francophone et l’enseignement de la langue officielle seconde. La politique de bilinguisme dans les services publics fédéraux découle de la Loi sur les langues officielles adoptée en 1969, dont une nouvelle version est entrée en vigueur en 1989. La politique linguistique fédérale a eu un succès réel, mais partiel. La capacité institutionnelle de l’administration fédérale de fonctionner en français est aujourd’hui nettement meilleure qu’elle ne l’était dans les années 1960. D’autre part, il est encore aujourd’hui très difficile de se faire servir en français dans les services publics fédéraux ailleurs qu’au Québec, dans la région d’Ottawa, au Nouveau-Brunswick et dans certaines régions de l’Ontario, comme en témoignent les nombreuses plaintes déposées auprès du Commissaire aux langues officielles. Les exigences de bilinguisme dans la fonction publique ont provoqué le mécontentement d’un grand nombre d’anglophones unilingues qui ont vu diminuer leurs chances d’être engagés ou promus comme fonctionnaires. De façon plus générale, cette politique n’a pas réussi à endiguer de façon nette le phénomène d’anglicisation des minorités francophones hors Québec.
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Le Nouveau-Brunswick et l’Ontario ont adopté des attitudes inspirées, à des degrés divers, de la politique de bilinguisme officiel de l’État fédéral. Cela s’explique par la démographie : dans ces deux provinces, voisines du Québec, les francophones ont encore une importance numérique significative, soit en chiffres absolus, soit en termes relatifs. Au Nouveau-Brunswick, ils sont 217 000 (plus de 31 % de la population) et en Ontario 350 000 (près de 4 % de la population). C’est le Nouveau-Brunswick qui est allé le plus loin dans la voie du bilinguisme officiel. Dès 1969, le Parlement provincial a adopté une Loi sur les langues officielles, directement inspirée de la loi fédérale. Dans le cas de l’Ontario, la politique de bilinguisme officiel est allée moins vite et moins loin ; elle a consisté à adopter progressivement des mesures qui améliorent le système scolaire francophone et instaurent le bilinguisme des lois, ainsi qu’une certaine forme de bilinguisme judiciaire et administratif dans les régions où sont concentrés les francophones. Certaines de ces mesures ont été réunies dans la Loi de 1986 sur les services en français. Dans les sept autres provinces, aux extrémités est et ouest du pays, la politique de bilinguisme officiel fait l’objet d’une réticence plus ou moins prononcée, voire d’un véritable rejet. Là encore, les attitudes s’expliquent par la démographie : dans ces régions du Canada, les francophones ne sont que très faiblement représentés (3,7 % de la population en moyenne) et, de plus, ils sont en voie d’assimilation linguistique. Dans les provinces de l’Ouest, les francophones ne constituent même pas la principale minorité ; ils sont inférieurs en nombre à d’autres groupes linguistiques, comme les Allemands, les Ukrainiens et, plus récemment, en Colombie-Britannique, les Chinois. Le Manitoba constitue un cas à part ; même si les francophones représentent maintenant à peine 3 % de la population (31 000 personnes), la province est assujettie – pour des raisons historiques – à des dispositions constitutionnelles qui instaurent le bilinguisme parlementaire, législatif et judiciaire.
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Au référendum de 1980, la question portait sur un simple mandat de négocier, assorti d’un engagement de soumettre les résultats des éventuelles négociations à un deuxième référendum. Malgré le caractère très timoré de la question, les indépendantistes subirent une nette défaite (40,4 % de oui, 59,6 % de non, le taux de participation étant de 86 %). Le 30 octobre 1995, un deuxième référendum, portant sur l’accession du Québec à la souveraineté, accompagnée d’une offre de partenariat économique au Canada, s’est soldé par des résultats très serrés : 49,44 % de oui et 50,56 % de non (le taux de participation ayant été de 93,48 %). Le Parti québécois a de nouveau remporté les élections en 1998 et promis d’organiser un autre référendum sur la souveraineté dans les années à venir.