Couverture de PSY_013

Article de revue

Pages 5 à 17

Notes

  • [*]
  • [1]
    S. Freud, ?uvres complètes, Paris, puf, tome XI, 1998, p. 361, note 1.
  • [2]
    J. Lacan, « Préface à L?éveil du printemps », dans Autres écrits, Paris, Seuil, 2001, p. 563.
  • [3]
    On trouvera le mythe cosmogonique des Baruyas dans l'ouvrage de Maurice Godelier, La production des grands hommes, Paris, Fayard, 1982.
  • [4]
    Ferenczi dans Thalassa et Jones dans son article « Le matricide ».
  • [5]
    S. Freud, Lettres à Wilhem Fliess, Paris, puf, 2006, lettre du 8 février 1897, p. 294.
  • [6]
    J. Lacan, Écrits, Paris, Seuil, 1966, p. 843 : « [?] le sujet se réalise dans la perte où il a surgi comme inconscient, par le manque qu?il produit dans l'Autre [?] ».
  • [7]
    Rappelons qu?en 1886 Freud eut beaucoup de mal à imposer l'existence de l'hystérie masculine (cf. « Beobachtung einer hochgradigen Hemianästhesie bei einem hysterischen Manne » et « Uber männliche Hysterie, gehalten in der Gesellschaft der Arzte in Wien am 15.10 und 26.11.1886 ». On trouvera les références de ces deux articles non traduits en français dans I. Meyer-Palmedo et G. Fichter, Freud, Bibliographie mit Werkkonkordanz, S. Fischer, 1999.
  • [8]
    J. Lacan, Écrits, op. cit., p. 733.
  • [9]
    Notons que cette clinique, naissante, requiert, à la différence de celle de la cure, un dispositif associatif minimal : passant, passeurs, membres du jury ou du cartel. J?ai pris le soin, rapportant des éléments du témoignage de Marianne Lateule, de lui demander son aval, ce qu?elle a fait.
  • [10]
    Cela définit le symptôme comme marqueur originaire du non-rapport sexuel, puisque, grâce à lui, le sujet objecte à être à disposition de la volonté de jouissance de l'Autre (cf. P. Bruno et M.-J. Sauret, Une autre psychanalyse, Paris, apjl, 2006).
  • [11]
    J. Lacan, Autres écrits, op. cit., p. 557.
  • [12]
    J. Lacan, Le séminaire, Livre V, Les formations de l'inconscient, Paris, Seuil, 1998, p. 355.
  • [13]
    S. Freud, L?interprétation du rêve, dans ?uvres complètes, Paris, puf, tome IV, 2003, p. 182-184.
I
figure im1

1L?exploration du Pacifique s?est faite d?est en ouest. Il aurait fallu en effet, pour parcourir cet océan en partant de l'ouest, toucher et traverser la muraille de l'Amérique. C?est l'histoire des explorateurs marins qui a fixé cette orientation puisque, par ailleurs, les habitants des terres du Pacifique connaissaient celui-ci depuis toujours.

Urvater ou la Déesse blanche ?

2Le caractère contestable et contesté des thèses d?Atkinson sur la horde et le meurtre du père originaire (Urvater)[1] n?a pas conduit à discréditer durablement les conséquences proprement psychanalytiques qu?en tire Freud dans Totem et tabou. Dans L?homme Moïse et la religion monothéiste, vingt-cinq ans plus tard, Freud reprend d?ailleurs, à propos du meurtre de Moïse dont l'hypothèse lui a été soufflée par Sellin, la même explication que celle qu?il a donnée du meurtre originaire, celui-ci étant le prototype de celui-là. Pourtant, on ne peut manquer de constater deux ténus décalages d?une version à l'autre.

3D?une part, la continuité entre mâle dominant et père de la horde est relativisée. Le mâle dominant n?est pas le père, concept qui n?a aucun sens chez les primates. Ce n?est que chez les humains que « père » acquiert une signification grâce au symbolique, signification qui n?est d?ailleurs pas prédicable, note Freud, de la même façon que pour la mère. Il y a toujours un doute sur la paternité, et la découverte de l'adn ne peut empêcher quiconque de penser que la conception peut être la conséquence chez la femme d?une motion de désir qui ne concernait pas le père biologique. Quant à l'espoir que l'imagerie cérébrale nous livrerait le portrait du secret élu, on peut laisser rêver.

4D?autre part, un deuxième décalage concerne la qualification exclusive du père originaire comme père jouisseur. Certes, ce prédicat s?accorde bien à la description qu?en donne Freud, encore qu?on pourrait se demander pourquoi l'appétit sexuel de ce père n?englobe pas les fils eux-mêmes. En revanche, concernant Moïse, à part quelques traits de caractère contingents, rien ne permet de lui accoler l'épithète de jouisseur. Bien plutôt s?agit-il d?un désirant. Bien sûr, comme tout un chacun, il jouit, mais non à la manière totalisante du supposé père originaire. Il est en effet déjà d?une autre génération, celle des fils, et, si nous suivons Freud, le désir qui l'anime est celui de son souverain Akhenaton puisqu?il est de réussir l'entreprise où celui-ci avait échoué : la victoire du monothéisme.

5Ces deux remarques introduisent la mise au jour d?un malentendu servant à masquer une contradiction fondatrice, qui doit être considérée et préservée comme telle pour appréhender dialectiquement ce qu?il en est de la jouissance. L?Autre jouisseur ne pourrait ? conditionnel ? être que l'Autre identifié par Lacan comme le père réel, c?est-à-dire l'agent de la castration s?exceptant de la fonction phallique. Mais ce père est-il pour autant jouisseur ? Absolument pas, sinon dans son imagination, éventuellement, et surtout dans l'imagination de ceux et celles, soit tous et toutes, que la castration concerne. Concluons que, dans la structure, l'Autre jouisseur n?est jamais que barré, à lire : il n?y a pas d?Autre de l'Autre.

6Aucun savoir historique ou préhistorique ne peut donc mettre en échec la thèse freudienne du père originaire, qui vaut dès l'émergence du langage et qui résiste malgré un certain enrobage fantasmatique et une approximation conceptuelle. Reste que cette thèse ? là s?inscrit le malentendu ? ne doit pas être posée comme alternative à une autre conception dans laquelle l'Autre maternel serait le véritable Autre jouisseur. Pas plus que le père, la mère ne l'est. Mais, cet axiome une fois posé, il serait erroné de ne pas s?interroger sur le statut différentiel de la mère quant à la jouissance, pour autant que, de la même façon que le père réel induit le mythe mensonger d?un père jouisseur originaire, la mère induit le mythe, que les monothéismes ont tenté de gommer, d?une déesse-mère immunisée des conséquences de l'appartenance au langage parce qu?elle en serait l'auteure. N?étant ni anthropologue, ni archéologue, ni ethnologue, ni préhistorien, ni mythologue, etc., je n?ai pas les moyens de développer ce que je viens d?affirmer pour le mettre à l'épreuve de ces disciplines. Il m?est cependant permis de proposer le fil d?un questionnement.

7Lacan a relevé, comme on sait, la « Déesse blanche ». Il l'homologue à l'infini potentiel de l'énumération que nous ne commençons « qu?à savoir que c?est elle qui nous suspendra [2] ». Peu de choses sont connues de cette déesse sinon des éléments disséminés, dont Robert Graves a tenté, difficilement, la synthèse. Sans doute peut-on évoquer aussi les travaux de Frazer, et plus récemment de Marija Gimbutas. Cette dernière plaide pour une société initialement matristique, au paléolithique et au néolithique, organisation probablement liée à l'argument de la mater certissima. Mentionnons aussi, rapidement, les cosmogonies de certaines communautés dites encore premières : pour les Baruyas, par exemple, les hommes auraient été créés par les femmes [3]. Freud d?ailleurs, dans son Moïse, se fait l'objection qu?une déesse toute-puissante pourrait avoir précédé ce père originaire transformé, in fine, par le meurtre puis par la civilisation en Dieu unique. Ce à quoi il répond que la période matriarcale de l'histoire humaine, même si elle a précédé l'époque patriarcale que nous connaissons, n?est pas première. Cette controverse d?ordre apparemment historique est bien l'indice que Freud se refuse à voir la face féminine de Dieu, comme en témoigne aussi, indirectement, sa défiance à l'égard du « sentiment océanique » cher à Romain Rolland, mais qu?il n?en reste pas moins souterrainement tracassé par ce que j?appellerais le lien de la mère à la Chose.

8C?est donc moudre de l'eau, en reprenant le flambeau culturaliste, que de vouloir en finir avec une prétendue dogmatique paternelle de Freud. Comme je l'ai souligné, les élèves de Freud, en général, ne s?y sont pas risqués si ce n?est peut-être, timidement, Ferenczi et Ernest Jones [4]. Ce sont en effet des raisons sérieuses et légitimes qui expliquent ce noli tangere des psychanalystes à l'endroit de cette pièce centrale de Freud, à savoir que la structure est impensable sans le meurtre du père et sa répétition symbolique. Le meurtre du père permet de penser le statut langagier de l'humain et la contradiction qui en est au principe. Ce meurtre est celui de l'élément qui, s?il n?était pas tué, rendrait pour tous la jouissance vaine parce qu?elle ne serait possible que pour Un. Le principe borroméen lui-même, pas de deux sans trois, en dépend. Cela étant, si l'expérience psychanalytique part de ce trois, elle n?est pas sans revenir vers ce deux, sous réserve justement de savoir que ce deux n?est pas accessible à partir du un. Mettre au jour la jouissance de la mère derrière celle qui est imputée au père n?est donc pas hors champ de la psychanalyse, à condition de ne pas confondre la jouissance maternelle avec une jouissance primaire qui serait celle de la femme, ce qui reléguerait la jouissance phallique à n?être qu?une jouissance seconde. La jouissance phallique est structuralement première parce qu?elle est la conséquence incontournable du statut langagier de l'humain. Ce n?est qu?en second lieu que la limite intrinsèque à ce statut langagier pose la question d?une jouissance pas-toute phallique. Cette dernière relève de l'écart entre la sexuation, qui inscrit un être comme masculin ou féminin, et le mode de jouissance de cet être qui ne se décalque pas forcément sur ladite sexuation. Ni une ni deux, comme le dit Lacan à propos de la jouissance.

L?assujettissement hystérique

9L?hystérie est une forme d?assujettissement bien repérée dans la psychanalyse. « Assujettisement » désigne le mode de composition du fantasme propre à chaque sujet. Dans le cas de l'hystérie, la matrice de ce fantasme, selon Freud, est, de façon privilégiée mais non exclusive, un fantasme originaire de séduction par le père. Bien entendu, l'abandon, le 21 septembre 1897, de la neurotica, c?est-à-dire de la thèse selon laquelle tout père serait pervers (on sait maintenant que Freud considérait alors ainsi son père [5]), est ce qui explique pourquoi Freud parle de fantasme.

10Cependant, ce fantasme de séduction d?une part n?est pas réservé à l'hystérique (on le trouve dans la névrose obsessionnelle), d?autre part n?est pas réductible à une affabulation. Il est bien plutôt une articulation des coordonnées de la réalité subjective et de sa structure grammaticale. Il situe l'origine de la libido dans une passion qu?elle aurait eu à supporter de la part de son père ou qu?il aurait eu à supporter de la part de sa mère. Ce croisement indique, d?emblée, la surdétermination de ce fantasme par le complexe d??dipe, mais recouvre la phase antérieure du montage, dans laquelle la mère occupe pour les deux sexes une place prépondérante en tant que séductrice, réelle cette fois. La cure devra reconstruire cette phase pour se forer une issue. Dans les deux cas, séduction par le père ou par la mère, Freud considère que les allégations d?une séduction par l'adulte masquent l'activité autoérotique infantile. Enfin, l'hystérique homme devra trier ce qu?il en est de la séduction de la mère comme femme et de la mère comme mère.

11L?assujettissement est un concept lacanien. Il répond à l'exigence de rejeter l'hypothèse d?une innéité phylogénétique dans l'origine du fantasme et se fonde sur la définition psychanalytique du sujet : le sujet est un fait de langage et il est fait du langage. L?assujettissement n?est cependant pas sans rapport avec la séduction. Se-ducere, le mot latin comporte le suffixe se, qui indique une séparation, et le verbe ducere, « conduire ». Séduire, c?est conduire à l'écart. Notons que le substantif correspondant à ducere est dux, le chef. Si, cependant, la séduction n?est pas l'assujettissement, et si celui-ci n?est pas la finalité de celle-là dans une conception téléologique dont se garde la psychanalyse, il n?est pas incongru de dire que, dans les deux moments qui constituent l'assujettissement, à savoir, si l'on s?en tient à l'état des lieux que nous présente « Position de l'inconscient » en 1964 [6], l'aliénation et la séparation, cette origine résonne.

12Ces remarques préalables valent pour les deux sexes. Si l'hystérie chez l'homme est plus rare, elle n?est pas exclue [7]. Eu égard à elle, il faut souligner ce que Freud a mis en lumière avec le cas Haizmann, soit une féminisation du père, dont le motif initial, comme la conséquence, est de désactiver le père comme agent de la castration. Chez la femme, cette désactivation a lieu, Freud l'a épinglée d?emblée avec Dora, grâce à l'impuissance (Unvermögen) imputée au père. Cette désactivation reste bien entendu l'accomplissement du souhait que recèle le fantasme, puisque pour les deux sexes l'action castratrice du père a bien eu lieu, et qu?elle a opéré, dans des proportions évidemment variables, avec pour résultat de contenir la toute-puissance maternelle. On peut le vérifier plus aisément chez la femme : l'application qu?elle met à soutenir le désir prétendument absent du père est bien le gage qu?elle donne et se donne pour indiquer qu?un père qui ne serait que castré ne fait pas son affaire et, en même temps, le moyen de faire accroire et de se faire accroire que c?est d?elle que dépend que le père soit ou non agent de la castration. Chez l'homme, la haine pour le père, qui est surdéterminée comme le constate Freud dans l'article qu?il consacre à Dostoïevski et au parricide, vise à éliminer cet agent indésirable de la castration, mais l'ambivalence de ce v?u est clairement lisible dans la séquence crime-punition. Cette séquence ressuscite le père pour punir le fils de l'avoir tué. On peut de même repérer comment l'addiction de Dostoïevski au jeu se déroule dans un cycle jeu-repentir-jeu, dans lequel le repentir est le moyen pour pécher de nouveau. Dans ce scénario, la deuxième femme de Dostoïevski comporte un signifiant paternel qui en fait le témoin de la récidive et du parjure.

Le rien

13Si nous cherchons, dans la palette des déclinaisons possibles qu?offrent les cures d?hystériques, spécialement femmes, ce qui pourrait valoir pour épure, disons que l'énonciation la plus probante, qui parcourt comme un fil rouge le cours de la cure, et qui est là dès le début, est celle-ci : « À quoi bon faire une analyse si c?est pour découvrir que je ne suis rien ! » Cette épure révèle le fond du fantasme : l'hystérique serait virtualisé(e), réduit(e) à rien par le désir de l'Autre. C?est là une vue unilatérale du langage (qui rapproche l'hystérique du savant, dans ce sens où lui aussi rêve de virtualiser le monde). Cette conception est nourrie par une définition rebattue, celle du mot comme « meurtre de la chose ». Cette définition reste vraie, mais à condition de ne pas faire l'impasse sur ceci que le langage a une matérialité qui fait qu?il n?est pas que chair d?ange. Le mot, en ce sens, fait ex-sister la chose en la tuant. De cette matérialité du signifiant qui donne à son corps son incarnation, l'hystérique ne veut rien savoir parce que l'incarnation est traduite comme équivalant au fait de succomber à ce que l'Autre désire du sujet. Précisons que ce désir de l'Autre est identifié à la volonté de jouissance de celui-ci, faute que l'Autre soit barré. Ce refus du sujet hystérique serait de bon droit si c?était le cas, mais cette dette dont il se croit débiteur et qu?il refuse alors d?honorer n?est dette que pour autant que, ne voulant pas lâcher cet Autre, il le crédite d?être le potier de son désir et, à ce titre, son propriétaire, son bailleur et son créancier.

14Autrement dit, pour ce sujet, tout mot est ce qui le tue comme sujet. Cette néantisation serait certes contredite par le fait qu?il parle, mais il pare l'objection en faisant de sa parole une parole vide. L?hystérique est donc la prêtresse ou le prêtre d?une parole vide et, si Dora quitte Freud, c?est moins pour son erreur d?interprétation que parce que ce dernier a l'audace ou l'outrecuidance de penser que, quand Dora parle, elle dit quelque chose. C?est d?ailleurs toujours du fantasme de séduction qu?il est possible d?extraire ce qui fait le c?ur de la vindication hystérique (qui peut être dissimulée ou ouvertement virulente) contre le père qui séduit sa fille puis la laisse tomber, et, dans un plan antérieur, contre la mère, première séductrice, qui n?a pas tenu sa promesse de garantir à sa fille un gain libidinal indépendant de la loi de castration, loi qui s?impose du fait de l'inscription dans le langage. Là s?ente la figure de l'autre femme, celle qui pourrait se substituer, par son savoir, à l'ignorance et l'impéritie maternelles.

15Faisons, à ce niveau, deux remarques à la fois conclusives et anticipatrices. Il arrive qu?un sujet hystérique rêve de sa mort, ou plus exactement de sa disparition. N?est-ce pas ainsi accomplir le désir d?être le propre agent de son annihilation, afin de faire que celle-ci ne soit pas le produit de l'Autre préalable ? On peut en déduire que, pour le sujet mélancolique, chez lequel la fonction du père réel serait désactivée, l'impossibilité d?un tel accomplissement par le rêve pourrait donner lieu à un passage à l'acte. L?autre remarque concerne l'anorexie : n?a-t-elle pas, dans l'hystérie, le statut d?une fonte phallique, c?est-à-dire d?un amenuisement du corps imaginairement phallicisé ? Dans ce cas, il s?agirait de contrecarrer une identification à l'être phallique qui, tout en lui offrant un recours contre une sujétion annihilante à la volonté de jouissance de la mère, l'obligerait, exclusivement, au chaussoir phallique.

Indétermination

16Nous sommes partis du rien. Ce rien est l'objet auquel le sujet se réduirait s?il ne se vouait à résister à sa passivation par l'Autre. L?hystérique se leurre de pouvoir, par ce culte du rien, se dérober comme objet ou plus précisément ne laisser aux mains de l'Autre qu?une dérisoire queue de lézard. Sur le plan de la sexuation, ce culte a pour condition une indétermination. Il ou elle « fait l'homme », c?est-à-dire s?identifie symboliquement, par un symptôme dont le noyau est un trait unaire prélevé sur le père, au masculin, mais ce « faire l'homme » dissimule une indétermination quant au sexe qui consiste dans le fait qu?il ou elle ne reconnaît qu?un seul sexe, qu?on a ou pas. L?hystérique fait du phallus un emblème unisexe et transforme ainsi la castration en un algorithme binaire.

17La castration, qui requiert un moins préalable pour les deux sexes (ne pas être le phallus maternel), est ainsi dénaturée. Enfin et surtout, l'hystérique fait l'impasse sur le fait que la castration ne saurait à elle seule constituer le régime de la différence sexuelle. Ce dernier point, qui a été formalisé par Lacan, est d?une certaine façon présent chez Freud négativement puisque, selon lui, l'obstacle à l'assomption de la castration est le même chez les deux sexes.

18On peut donc traduire la formule de Lacan « l'hystérique fait l'homme » par : l'hystérique ne veut rien savoir du pas-tout phallique et enferme la féminité dans la mascarade conjuguée à la privation. Cette formule « faire l'homme » a en outre une autre portée si on la complète par « qui porte le phallus ». Pourquoi ? Parce que, pour ne pas régresser en deçà de la castration de la mère et succomber irrémédiablement à sa séduction, l'hystérique pose le phallus non seulement comme ce qui fait obstacle à sa propre disparition comme sujet (vécue imaginairement comme absorption dans le corps maternel), mais aussi corrélativement comme le seul lieu de jouissance. La jouissance de l'hystérique est la jouissance du phallus. Cette équation se traduit ainsi pour la femme : sachant ne pas pouvoir l'avoir, elle l'est. C?est d?ailleurs en faisant état de cette identification imaginaire au phallus que Lacan élabore sa première théorie de la frigidité [8]. Il s?agit en effet de prévenir l'orgasme, soit ce qui conduit à la détumescence de l'organe censé faire jouir. D?où le fantasme d?un phallus qui ne débande jamais, qu?elle incarne au prix de la frigidité ou qu?elle exige du partenaire. Cette localisation du jouir dans le phallus tumescent est probablement, en dehors même de la frigidité, ce qui fait du corps phallicisé de la femme hystérique un corps vulnérable à diverses symptomatisations. Pour ne citer que Dora, rappelons qu?au terme de sa relation avec Freud, ayant appris que celui-ci venait d?être nommé professeur associé, elle développe, comme accusé de réception de ce message, une névralgie faciale. En ce sens, « faire l'homme », c?est fabriquer l'espèce animale qui aurait le privilège de jouir, quintessence du gorille, de l'ours et du loup. De la même façon que Don Juan, le « macho » ne serait-il pas un mythe féminin, stupidement relayé par les hommes, victimes du syndrome du corbeau ?

19On saisit là, in vivo, la contradiction constituante de l'hystérie. D?un côté, le père est mort et désactivé, de l'autre il est le seul, en tant que phallophore, à jouir. La figure du séducteur prédateur se redessine sous la fallace du père impuissant, mais, de toute façon, la femme-qui-saurait reste encore, comme joker, à l'abri de toute entame.

De la fin

20La cure permet de déplier les différentes strates du palimpseste où s?inscrit l'histoire du sujet. Le problème posé par la fin est de savoir comment le sujet cesse de se lire comme un personnage de roman pour se découvrir comme l'écrivain, dès le début, du récit qui faisait pour elle ou lui « destin » et non « vie », pour emprunter ces deux mots au titre de l'extraordinaire roman de Vassili Grossman (Vie et destin).

21Si le concept d?assujettissement a une pertinence, c?est parce qu?il comporte une cartographie qui autorise non le repérage a priori mais la reconnaissance a posteriori de la coupure décisive à partir de laquelle l'envers du plan est accessible, c?est-à-dire le trouage de la réalité par le réel. Ce trouage consiste donc en une externalisation de ce qui a été prélevé dans l'Autre pour créditer le sujet du manque par lequel il est inscrit dans le langage et qui élève ce manque à la cause du désir. Cette externalisation de l'objet a dévalorise ledit objet en le faisant choir hors de la comptabilité de l'Autre comme du Un. Ajoutons que cette opération finale divise le sujet en divisant l'Autre. La castration, jusqu?alors jouie comme manque, devient perte.

22Concrètement, la fin s?inaugure dans un tournant où le père retrouve sa place comme agent de la castration et se trouve ainsi en mesure de séparer, dans un deuxième tour, le sujet de l'Autre maternel. La clinique de la passe peut ici nous aider à cerner la spécificité de ce deuxième tour [9]. Je retiendrai le témoignage de Marianne Lateule, dont j?extrais ce point d?Archimède que constitue le moment où, alors qu?elle a repris une deuxième tranche d?analyse sans le dire à son mari, elle lève ce secret en lui disant qu?elle a repris son analyse au moment même où il est inutile de le faire puisque, cette analyse reprise, elle est en train de la conclure. Ce faisant, elle réhabilite son mari dans sa fonction paternelle d?agent de la castration et l'assume comme tel même si, de son père, le mari n?est que le tenant-lieu. Il en découle du coup que la vocation qui était la sienne de soutenir le désir d?un père supposé sans désir dévoile sa vacuité. Le désir de l'Autre ne prouvant plus l'existence d?un Autre qui désirerait à sa place, elle ne peut désormais s?identifier à un Autre qui désirerait à la place de son père. Elle sort du discours de l'hystérique sans pour autant entrer dans celui du maître.

23Qu?en est-il chez l'homme ? La configuration est différente. La haine surdéterminée à l'égard du père est l'indice d?une volonté que le père en rabatte sur son désir (par la féminisation du père dans le cas Haizmann). Que devient alors le soutien du désir du père ? Du fait de la concurrence ?dipienne, ranimer le désir du père comporte le risque de réorienter celui-ci vers la mère, au point de soustraire celle-ci comme objet au fils. Sans doute pourrait-on faire la même remarque à propos de la fille, à ceci près que ladite réorientation comporterait le risque qu?elle soit délaissée par le père. Mais, dans la mesure où la fille croit pouvoir à son gré faire désirer ou non le père, elle peut se convaincre de disposer d?un interrupteur au cas où le circuit père-mère se rétablirait. Dans le cas du fils, cet interrupteur existe aussi, mais dans quelles conditions peut-il fonctionner ? Quand un homme hystérique soutient le désir du père, ce désir peut se porter soit sur sa femme, la mère du sujet, et dans ce cas l'homme hystérique est dépossédé de ce qu?il considère comme son objet, la mère, soit sur lui-même, le fils, et dans ce cas le risque est d?être traité par le père comme une femme, risque qui n?a évidemment pas le même sens pour la fille. Dans aucun des deux cas, l'homme hystérique ne peut donc choisir de soutenir sans hésiter le désir du père, et c?est ce qui rend sa cure difficile. Comment en effet renoncer à se faire l'Autre qui commande le désir du père, qui est l'entrée dans la voie qui permettra de restituer au père sa fonction d?agent de la castration, dans la mesure où il ne peut être renoncé à une position qui n?a jamais été choisie ?

24Dans ce menuet des affinités électives, il y a cependant un background, soit un processus qui se déroule en dessous de celui que je viens d?évoquer et qui en commande l'issue. Ce processus concerne la relation à la mère. Faisons d?abord une mise au point : la mère est castrée mais, division (Spaltung) oblige, la reconnaissance de sa castration est recouverte, dans la névrose, par un démenti (dans l'aire duquel se manifestent les traits pervers de la névrose). Ce qui est visée par la cure, c?est une relecture de cette division. Il s?agit non plus d?un écartèlement entre reconnaissance et démenti, insoluble à ce niveau (cf. le roc de la castration), mais, nous venons de le voir, de l'externalisation de l'objet a. Qu?est-ce à dire ? L?objet prélevé sur l'Autre au moyen du manque dont l'Autre me fait émerger s?avère n?être ni de l'Autre, ni du sujet, ce qui le fonde comme réel.

25Aucun Autre n?a inventé le langage. Mieux, par une opération qui semble impliquer une réversibilité du temps, le langage s?invente à partir de la parole. Nul Dieu ne peut prétendre à ce savoir dont il serait crédité d?avoir conjoint création du langage et création du réel. Mais la question rebondit : serait-ce une déesse ? L?expérience psychanalytique nous apprend que ce processus en background peut se décrire comme la chute de la supposition de savoir imputée à la mère. Cela implique que l'analysant accepte que la mère occupe cette place. Quand ce n?est pas le cas, il faut d?abord que se construise cette figure de l'autre femme, celle-qui-saurait. La plupart du temps, il s?agit de renouer, derrière la mère qui a frustré l'enfant et spécialement la fille en désirant au-delà d?eux, avec la maman de l'amour. Cette maman de l'amour est celle de la suppléance au rapport sexuel qui n?existe pas. C?est une maman castrée, à la différence de la mère qui aurait consigné le phallus, empêché sa ronde nomade et monopolisé le savoir. Il faut ici bien articuler la séquence en cause : la maman de l'amour a existé au départ, sauf dans des cas extrêmes, et elle a été alors supposée savoir ; dans un deuxième temps, elle est critiquée et refoulée comme agent de la frustration ; enfin, troisième temps qui concerne un moment décisif, et pas toujours atteint, dans la cure analytique, elle fait retour comme ayant été la maman de l'amour, mais ce qui a changé, par rapport au premier temps, c?est qu?elle peut alors être désupposée savoir.

26Marianne Lateule, pour reprendre son précieux témoignage, fait état d?un rêve survenu à la fin de sa cure : sa mère aurait enlevé et mangé deux enfants. Par ce rêve, elle se décolle, en l'accomplissant, de son propre désir de mère. Deux événements surviennent dans ce même laps de temps : elle prend la décision d?obliger son fils à quitter le giron familial et sa fille quitte la maison. Comment dire mieux cette séparation d?avec la mère, celle qu?elle a et celle qu?elle est ? Certains écrivains, comme Henry James dans sa nouvelle « L?auteur de ?Beltraffio? » (1884) ou Elfride Jelinek dans Lust (1989), ont osé aborder la face abrupte de cette double séparation, à savoir l'infanticide, qui, même à être traité sous sa forme symbolique et fictive, reste un des impensables de la culture. C?est pourtant en ce point que culmine l'amour maternel, ou l'amour, plus simplement, sans prédicat, parce qu?il consiste à ne pas voler à l'enfant sa traversée de la castration. Il est vrai que mentaliser son enfant, voire un enfant, aux prises avec les épreuves les plus dures qu?on a soi-même subies (et traversées) et se projeter dans sa peau dans ce moment imaginé constituent le noyau insécable de la résistance.

27Entre le processus qui aboutit à l'habilitation du père comme agent de la castration (je ne dis pas réhabilitation, car, si le père a été d?emblée castrateur, il n?a pas été, dans ce premier tour, assumé comme tel) et le processus de désupposition de l'Autre maternel, il y a une série de croisements jusqu?à ce que survienne, de façon toujours inattendue, le réglage qui permet, sur fond de désupposition de l'Autre maternel, l'assomption de la fonction d?exception dévolue au père. Ce réglage est la conséquence d?un troisième événement qui est le constat que l'analyste, quel qu?il soit, ne possède pas la clé du désir, tout simplement parce qu?une telle clé n?existe pas plus que la serrure qu?elle est censée ouvrir. Quand cette triple conjonction advient, l'analysant(e) se retrouve accepter de se plier à la fonction phallique pour autant que s?y plier, c?est simultanément découvrir la limite de son règne. Aucun sujet ne peut contenir dans le champ d?exercice du phallus, dont son symptôme lui a déjà permis de traverser, sans le savoir, la frontière [10].

II

De la névrose au discours

28C?est ici qu?un certain coup de force de Lacan intervient. Il consiste à faire de l'hystérie, « type clinique » relevant de la névrose, un discours. Le mathème avec lequel il écrit ce discours situe le sujet hystérique à la place du commandement :

figure im2

29Examinons ce mathème pour nous intéresser à cette adresse du sujet hystérique, à savoir le maître (S1), en tant qu?autre. La cure dure tant que le sujet s?obstine à emprisonner l'analyste à cette place, qui coagule le père et le maître et refoule, sous S1, l'origine du savoir (S2). C?est ce qui explique qu?en toute bonne foi, quand l'hystérique se pose la question de se séparer de son être générationnel (fils ou fille de?) pour assumer son être pulsionnel, la dépendance à l'Autre maternel n?est pas interrogée. L?impuissance du père, qui compromet la séparation avec l'être générationnel, est palliée non par le rétablissement du père dans ses droits, mais par la substitution de l'hystérique au maître. Si nous suivons la chorégraphie rotative des discours, elle ou il va se retrouver, en tant qu?agent du discours, en fonction de S1. C?est ce qui arrive à Dora, après être arrivé à Bertha Pappenheim, dite Anna O., et l'ironie péremptoire qui s?avère marquer la conduite de certaines femmes (et hommes) analystes confirme cette erreur de station.

30En revanche, si nous écrivons le discours de l'analyste, nous déduisons que le maître (S1) ne produit aucun savoir (S2), à cause de la barrière de la jouissance :

figure im3

31Le savoir sur lequel l'agent du discours se fonde est définitivement articulable comme conditionné par la récusation de tout rapport qui pourrait écrire la conjonction sexuelle.

32Quel est le gain de cette homologation discursive de l'hystérie, sinon d?indiquer que l'analysant hystérique est le prototype de tout analysant ? « Fin de l'analyse chez l'hystérique » est un pléonasme. Il n?y a de fin de l'analyse que pour un sujet occupant cette place de commandement dans le discours, que ce soit de veine ou d?artifice. Pour être encore plus carré, disons qu?aucune névrose n?est analysable si elle n?est reconfigurée dans le discours hystérique.

33C?est selon une rotation progrédiente que le sujet se retrouve à la place d?agent du discours analytique, ce qui ne signifie pas qu?il va nécessairement choisir de devenir analyste. Cette rotation, pour aboutir, suppose une mutation dans le transfert. C?est au niveau de ce ou cette « troisième » qu?est l'analyste que peut se résoudre l'entre-deux hommes de l'hystérique femme (entre père et partenaire) et l'entre-deux femmes (entre mère et partenaire) de l'hystérique homme. Ce « troisième » se doit de n?être ni impuissant ni puissant. C?est la condition de son éventuelle efficace. Autrement dit, souris quand on le veut oiseau, oiseau quand on le veut souris. Cette capacité, pour n?être pas une simulation, implique a minima que le désir qui l'anime ait renoncé à être finalisé dans un rapport qui réaliserait la conjonction sexuelle. Qui plus est cependant, le lieu de ce positionnement n?est plus l'arène phallique. La castration qui universellement opère est là non plus pour diffracter ou unifier le sujet, mais pour le diviser. On voit que l'hystérique, en restant dans l'indétermination, préserve positivement cette fois la chance de quitter l'arène phallique pour rencontrer sa féminité. Elle la rencontrera (mais lui aussi) non dans un féminisme rageur et vengeur, encore moins dans une féminitude de bonne élève démone à ses heures, mais dans ce non-lieu où la jouissance est sans étalon. Il faut bien dire que, là encore, Lacan a offert une solution avec le pas-tout.

Le retour de la bouchère

34Reste un dernier problème, que j?introduis par une citation : « Que les types cliniques relèvent de la structure, voilà qui peut déjà s?écrire quoique non sans flottement. Ce n?est certain et transmissible que du discours hystérique [?]. Il n?y a pas de sens commun de l'hystérique, et ce dont joue chez eux ou elles l'identification, c?est la structure, et non le sens comme ça se lit bien dans le fait qu?elle porte sur le désir, c?est-à-dire le manque pris comme objet, pas sur la cause du manque [11]. » Lacan confirme ainsi qu?une opération sur la structure, soit une psychanalyse, n?est envisageable qu?à transformer les névroses (réservons le cas des psychoses) en discours. Cela ne veut pas dire cependant qu?il y ait un sens commun de l'hystérique. Pour argumenter cette remarque, Lacan excipe d?un exemple, celui du rêve de la « belle bouchère », dont on sait qu?il l'a choisi comme paradigme du désir insatisfait, en particulier dans sa leçon de séminaire du 30 avril 1958 [12]. Ce désir insatisfait est la solution du sujet, ou de l'hystérique, au fait que la demande d?amour, si elle était satisfaite, soumettrait le sujet au désir de l'Autre. Or, il faut que ce désir de l'Autre (donner à sa femme du caviar, pour le mari boucher) soit barré (je ne veux pas du caviar que je désire, dit la bouchère) pour que le sujet puisse reconnaître son propre désir, mais seulement en tant qu?insatisfait. Voilà le b.a.ba du désir : il ne peut venir que de l'Autre et de ce fait il ne peut être approprié que par le refus préalable de sa satisfaction, sans quoi le sujet serait à disposition de l'Autre, non plus de son désir, comme je l'ai déjà noté, mais de sa volonté de jouissance. On saisit alors l'antinomie entre « le manque comme objet » et « la cause du manque ». La cause du manque est contingente. Dans le rêve, il est dû au fait que « toutes les boutiques sont fermées » parce que c?est dimanche. Mais, demain, les boutiques seront ouvertes, etc. Le manque comme objet, c?est le manque causé dans l'Autre par le refus d?être satisfait par lui (pas de caviar).

35Ce qui est à souligner maintenant, c?est que cette dialectique boucher/bouchère, demande d?amour/insatisfaction du désir n?opère que par la médiation d?une identification. C?est Freud d?abord, dans son analyse du rêve, qui livre cette clé [13]. Il livre une première interprétation : le sens du rêve est de ne pas engraisser l'amie qui, si elle était moins maigre, pourrait rivaliser avec la belle bouchère auprès de son mari, qui aime bien l'amie, mais aussi les « beaux derrières ». Le deuxième niveau d?interprétation passe par la prise en compte de l'identification de la belle bouchère à son amie, à son amie en tant qu?insatisfaite. Ce choix identificatoire suppose que l'amie ne soit pas, aux yeux du mari, indifférente. Le souhait fait ainsi d?une pierre deux coups : identification à une femme qui plaît au mari, identification à cette même femme en tant qu?insatisfaite puisque, sans dîner, elle ne grossira pas et ne pourra conquérir le mari. Lacan, reprenant l'analyse de Freud, fait remarquer que tel est bien, dans ce rêve, le paradigme de l'exquisité hystérique qui, dans la vie de veille, s?exprime par un jeu à résonance érotique : la belle bouchère adore le caviar mais refuse que son mari lui en offre pour pouvoir le taquiner (racine de l'accusation, pas toujours imméritée, de la pingrerie du mari). Cet amour du caviar a d?ailleurs un pendant chez l'amie, qui ferait des folies pour du saumon. Or, du saumon (cf. le début du rêve), la belle bouchère, justement, en a. La boucle est bouclée.

36Reste un troisième niveau, qui est à la fois le plus masqué et le plus évident. Ce rêve mettrait en échec la théorie de Freud concernant le rêve comme accomplissement de désir. Ce troisième niveau dénude le discours sous la névrose : mise en échec du maître. Mais, derrière le maître, est-ce le père (Urvater) ou la mère (Déesse blanche) ? Sans doute, l'autre femme, celle qui sait, n?est telle que parce qu?elle est élue par le père (cf. madame K.), mais, cette condition une fois remplie, elle est bien la vraie incarnation du sujet supposé savoir, celle que la castration, paradoxalement, complète en lui ôtant l'organe symbolique qui est la marque non d?un pouvoir, sinon dans l'errement imaginaire, mais d?un impouvoir sur la jouissance absolue. Cette algèbre (moins par moins égale plus) est le secret du discours hystérique et ce n?est qu?à être révélé, par le processus de la cure, qu?il peut produire la division de La femme. La La.

Notes

  • [*]
  • [1]
    S. Freud, ?uvres complètes, Paris, puf, tome XI, 1998, p. 361, note 1.
  • [2]
    J. Lacan, « Préface à L?éveil du printemps », dans Autres écrits, Paris, Seuil, 2001, p. 563.
  • [3]
    On trouvera le mythe cosmogonique des Baruyas dans l'ouvrage de Maurice Godelier, La production des grands hommes, Paris, Fayard, 1982.
  • [4]
    Ferenczi dans Thalassa et Jones dans son article « Le matricide ».
  • [5]
    S. Freud, Lettres à Wilhem Fliess, Paris, puf, 2006, lettre du 8 février 1897, p. 294.
  • [6]
    J. Lacan, Écrits, Paris, Seuil, 1966, p. 843 : « [?] le sujet se réalise dans la perte où il a surgi comme inconscient, par le manque qu?il produit dans l'Autre [?] ».
  • [7]
    Rappelons qu?en 1886 Freud eut beaucoup de mal à imposer l'existence de l'hystérie masculine (cf. « Beobachtung einer hochgradigen Hemianästhesie bei einem hysterischen Manne » et « Uber männliche Hysterie, gehalten in der Gesellschaft der Arzte in Wien am 15.10 und 26.11.1886 ». On trouvera les références de ces deux articles non traduits en français dans I. Meyer-Palmedo et G. Fichter, Freud, Bibliographie mit Werkkonkordanz, S. Fischer, 1999.
  • [8]
    J. Lacan, Écrits, op. cit., p. 733.
  • [9]
    Notons que cette clinique, naissante, requiert, à la différence de celle de la cure, un dispositif associatif minimal : passant, passeurs, membres du jury ou du cartel. J?ai pris le soin, rapportant des éléments du témoignage de Marianne Lateule, de lui demander son aval, ce qu?elle a fait.
  • [10]
    Cela définit le symptôme comme marqueur originaire du non-rapport sexuel, puisque, grâce à lui, le sujet objecte à être à disposition de la volonté de jouissance de l'Autre (cf. P. Bruno et M.-J. Sauret, Une autre psychanalyse, Paris, apjl, 2006).
  • [11]
    J. Lacan, Autres écrits, op. cit., p. 557.
  • [12]
    J. Lacan, Le séminaire, Livre V, Les formations de l'inconscient, Paris, Seuil, 1998, p. 355.
  • [13]
    S. Freud, L?interprétation du rêve, dans ?uvres complètes, Paris, puf, tome IV, 2003, p. 182-184.
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