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Article de revue

Les machines à sous en France : orientations étatiques et addiction au jeu

Pages 117 à 152

Notes

  • [1]
    Ainsi que le rappelle l’auteur, ce jeu « consiste à propulser et à faire circuler des billes en acier dans un billard vertical afin de produire des combinaisons gagnantes, où le joueur peut être comparé à “Sisyphe roulant sa pierre d’impiété” et où la chance du gain reste plus qu’hasardeuse » (« Japon : le marché du hasard » – In Futuribles, 231, mai 1998).
  • [2]
    « Las Vegas au pays de Don Quichotte » – In Courrier International, 491, 30 mars-5 avril 2000.
  • [3]
    Dépêche AFP Général, International, 21 février 2002.
  • [4]
    Cf. Fabrice Nodé-Langlois : « Moscou veut s’attaquer à ses bandits manchots », in Le Figaro, 17 mars 2006.
  • [5]
    Intitulé « Les relations entre les collectivités locales et les casinos », le paragraphe 1 du chapitre V du rapport public de la Cour des comptes pour l’année 2001 (Éditions des Journaux Officiels, deuxième partie, observations des juridictions financières, janvier 2002) souligne l’importance de l’essor qu’ont récemment connu les casinos français du fait de l’implantation des machines à sous dans leurs enceintes. Publié en 2002, le rapport parlementaire « Les jeux de hasard et d’argent en France : l’État croupier, le Parlement croupion ? » du sénateur François Trucy dresse un constat identique (Sénat, JO, Rapport n° 223, session ordinaire de 2001-2002, annexe au procès-verbal de la séance du 13 février 2002).
  • [6]
    Chiffres du service « audit » de la Sous-Direction des Courses et des Jeux (Direction Centrale des Renseignements Généraux).
  • [7]
    Le Produit Brut des Jeux des casinos est constitué du Produit Brut des jeux de tables traditionnels et de celui des machines à sous. Il représente la somme que tous les casinos encaissent après avoir redistribué les gains aux joueurs, mais avant les différentes taxations dont elles font l’objet.
  • [8]
    Sur ce point, cf. le rapport n° 3320 fait par le député Didier Migaud au nom de la commission des finances de l’Assemblée nationale sur le projet (n° 3262) de loi de finances pour 2002, Assemblée nationale, JO, 11e législature, 11 octobre 2001, p. 169-175.
  • [9]
    Cf. notamment Nathalie Conte et Christine Lagoutte, « La guerre des casinos », in Le Figaro, 8 juin 1998, et Pascal Ceaux, « Les casinos tentent de conquérir le centre des grandes villes », in Le Monde, 17 septembre 1999.
  • [10]
    Propos d’Armelle Achour repris dans l’article de Jean-Michel Decugis : « Les nouveaux drogués du jeu », in Le Point, 28 juin 2002.
  • [11]
    Cf. Jean-Michel Normand, « “Accros” aux machines à sous », in Le Monde, 16 avril 2003.
  • [12]
    « SOS joueurs », in Le Républicain Lorrain, 13 janvier 2006.
  • [13]
    Actuellement chef de service, Centre médical Marmottan à Paris.
  • [14]
    Psychiatre, Centre hospitalier, Jury-les-Metz.
  • [15]
    Revue Psychotropes, vol. 11, n° 2, 2005.
  • [16]
    Pour justifier son entreprise de prohibition, la préfecture de Police de Paris se réfère au contenu des deux premiers articles d’une loi adoptée le 21 mai 1836 dont l’objet était de préciser certaines dispositions de l’article 410 du Code pénal établissant une interdiction générale et absolue en matière de jeux publics. À la même époque, la préfecture de Police de Paris évoque aussi régulièrement l’Ordonnance n° 25 du 20 juillet 1894 qui, rédigée par le préfet de Police Lépine, visait à bannir certaines formes de jeux. Sur cette question et, plus généralement, sur la réglementation relative au jeu en France depuis l’Ancien Régime, cf. notamment l’ouvrage de Henri Bigeard (avocat à la Cour d’appel de Paris), intitulé De la réglementation des jeux publics par l’autorité municipale, Angers, G. Grassin Imprimeur-Éditeur, 1911, p. 18-42.
  • [17]
    Cette tolérance est notamment prévue dans une circulaire du 22 juin 1909 que le ministre de l’Intérieur Georges Clémenceau adresse à tous les préfets, au préfet de Police de Paris ainsi qu’au Gouverneur général de l’Algérie. Elle est même rapidement « légalisée » par le Parlement lorsqu’il adopte l’article 39 de la loi de finances du 8 avril 1910.
  • [18]
    Cette question est notamment au cœur d’une proposition de loi présentée par Joseph Pourquery de Boisserin (député radical-socialiste du Vaucluse) en 1913, cf. JO, Chambre des députés, proposition n° 2709, 10e législature, session de 1913, annexe au procès-verbal de la séance du 14 mai 1913.
  • [19]
    Cf. JO du 1er septembre 1937, p. 10054. Avec ce décret, l’utilisation de toutes ces machines peut, dorénavant, comme pour les loteries, faire l’objet des sanctions prévues par les articles suivants du Code pénal : article R. 30-5° (contravention du fait de l’installation des appareils), article 410 (peines frappant le propriétaire de l’appareil et celui qui le met à disposition du public dans son établissement) et 405 (délit d’escroquerie dans le cas où le mécanisme de l’appareil a été intentionnellement « truqué »).
  • [20]
    « Les machines à sous semblaient un lointain souvenir sauf en quelques endroits où des tolérances plus ou moins occultes les laissaient exercer leur charme. On en vit un bon nombre sur Bordeaux, sur Marseille et en Dordogne, affirmant leur légalité suite à un arrêt du Conseil d’État du 21 février 1944 et à un jugement du tribunal de Bordeaux du 30 avril 1945 qui allaient en leur faveur », ibid., p. 14.
  • [21]
    Article de Didier Lemaire : « “Jackpots” : interdiction totale », in Le Parisien du 21 avril 1983.
  • [22]
    Rapport n° 1479, Assemblée nationale, JO, seconde session ordinaire de 1982-1983, annexe au procès-verbal de la séance du 5 mai 1983, p. 2.
  • [23]
    Au début des années 1980, ce processus est notamment renforcé par la baisse du prix d’achat de ces machines. En mai 1983, Gérard Houteer signale qu’il se situerait « aux environs de 18 000 francs pour un jackpot et de 12 000 francs pour un poker-vidéo », cf. Assemblée nationale, JO, débats, deuxième séance du 6 mai 1983, p. 945.
  • [24]
    Au Sénat : Francis Palmero (question n° 32598 au JO du 18 janvier 1980 et question écrite n° 5410 au JO du 20 avril 1982) ; Henri Caillavet (question n° 4402 au JO du 18 février 1982) et Paul Girod (question n° 6443 au JO du 11 juin 1982). À l’Assemblée nationale : Jean-Paul Planchou (question n° 4969 au JO du 9 novembre 1981) ; Jean Le Gars (question n° 12748 au JO du 19 avril 1982) ; Gabriel Kaspereit (question n° 12880 au JO du 19 avril 1982 et question n° 16651 au JO du 5 juillet 1982) ; Jean-Claude Dessein (question n° 14683 au JO du 24 mai 1982) ; Georges Mesmin (question n° 15604 au JO du 7 juin 1982) et Jean Rigal (question n° 16896 au JO du 5 juillet 1982).
  • [25]
    « L’assassinat de Michel Bajard, placier de machines pour le milieu lyonnais ; l’exécution de Zerbini sur le parking du casino de Bandol : il était placier dans la région marseillaise. À Draguignan, il y a un an, une fusillade a éclaté (sans faire de victimes) dans les rues entre placiers locaux et “collègues” venus de Marseille. À Lyon, encore, une société d’exploitation de machines a été victime d’un attentat à l’explosif. » (In Le Parisien, 21 avril 1983.)
  • [26]
    « Le préfet a pris, vendredi dernier, un arrêté prohibant l’exploitation des machines “fonctionnant au moyen d’un enjeu et reposant sur l’adresse et le hasard”. M. Gaston Deferre, le député maire, a pris à son tour un arrêté municipal allant dans le même sens. Par ailleurs, quinze inculpations pour infraction à la législation des jeux ont été prononcées la semaine dernière, visant le gérant d’une société de location de ces machines à sous et des patrons de bars où ces jeux étaient installés. » (Thierry de Cabarrus : « Les “Las Vegas” de quartier », in Le Parisien, 28 février 1980.)
  • [27]
    Question écrite n° 10041 publiée au JO du 10 février 1983.
  • [28]
    « En plus de ces inconvénients évidents sur le plan social, cette activité fructueuse a bien évidemment intéressé le milieu qui y trouve une source de financement présentant peu de risques. C’est ainsi que des revendeurs et exploitants peu scrupuleux établissent leur empire sur les débits de boissons, en y imposant, souvent par la menace, ces appareils à parties multiples. De nombreux règlements de compte peuvent en effet être attribués à la lutte d’influence pour le contrôle des machines à sous. » (Sénat, JO, débats, séance du 15 juin 1983, p. 1633.)
  • [29]
    Le premier parlementaire à s’être inquiété de cette situation est Gabriel Kaspereit (député RPR de la septième circonscription de Paris), comme le montre cet extrait de sa question écrite n° 16932 publiée au JO du 2 juin 1979 dans laquelle il « rappelle à M. le ministre de l’Intérieur qu’il l’avait saisi par lettre, dès le 22 juin 1977, du problème posé par la réapparition en France de “machines à sous” qui sont mises à la disposition du public dans certains débits de boissons. Cette situation est préoccupante car elle constitue une violation des dispositions […] qui proscrivent l’installation dans les lieux publics de tout appareil distributeur d’argent ou de jetons de consommation. Informé par lettres des 22 juillet 1977 et 19 juin 1978 de ce que les services du ministère de l’Intérieur avaient mis ce problème à l’étude, l’auteur de la présente question apprenait le 4 octobre 1978 que de nouveaux délais d’examen s’avéraient nécessaires, le contrôle de l’importation des appareils en cause devant être étudié dans le cadre des accords existant entre les différents pays de la Communauté européenne ».
  • [30]
    Quelques mois plus tard, le député socialiste du Calvados Louis Mexandeau soutiendra d’ailleurs les revendications de ces exploitants d’appareils de jeu qui s’estiment lésés, cf. sa question écrite n° 16140 posée au ministre de l’Intérieur et publiée au JO du 12 mai 1979.
  • [31]
    Pour une critique de cette mesure fiscale présentée comme néfaste car n’établissant aucune distinction entre les communes rurales et urbaines, cf. notamment la question orale posée au ministre de l’Économie et des Finances par le sénateur RPR du Doubs Louis Souvet, JO, Sénat, séance du 15 octobre 1982, p. 4580-4581.
  • [32]
    Cf. sa question écrite n° 6443 au JO du 11 juin 1982.
  • [33]
    JO, Sénat, débats, séance du 30 juin 1983, p. 2161.
  • [34]
    Proposition de loi n° 173, Sénat, JO, première session extraordinaire de 1982-1983, rattachée pour ordre au procès-verbal de la séance du 21 décembre 1982.
  • [35]
    Cf. Assemblée nationale, JO, septième législature, seconde session ordinaire de 1982-1983, annexe au procès-verbal de la séance du 22 avril 1983.
  • [36]
    Cf. notamment le rapport n° 1125 fait sur cette proposition de loi par la commission des lois constitutionnelles de l’Assemblée nationale, Assemblée nationale, JO, sixième législature, seconde session ordinaire de 1978-1979, annexe au procès-verbal de la séance du 13 juin 1979.
  • [37]
    « Au ministère de l’Intérieur, on affirme que ce n’est pas du ressort de la police des courses et des jeux. Composée de 75 fonctionnaires, cette dernière a déjà assez de travail avec le contrôle de 168 casinos et de tous les hippodromes. C’est donc à la police municipale et aux maires d’agir en fonction des situations locales », peut-on lire dans Le Parisien du 28 février 1980, op. cit.
  • [38]
    « Mais comment réagir ? Le flagrant délit dans ce domaine relève du rêve. Seule une modification de la loi – interdisant totalement les machines à sous ou, au contraire, les autorisant sans restriction – pourrait changer les choses. En attendant, les policiers ne peuvent que déclencher des opérations “coup-de-poing” un peu au hasard, ici ou là, et sans espérer faire “sauter la caisse”. » Rédigées dans le journal L’Aurore en juillet 1981 (article intitulé « Haro sur les “jackpots” »), ces quelques lignes seront, par la suite, particulièrement bien illustrées par les propos du député communiste des Hauts-de-Seine Guy Ducoloné qui, à l’Assemblée nationale, mettront en évidence l’ampleur de l’inefficacité des actions conduites par les forces de l’ordre dans la capitale : « L’existence du flagrant délit nécessite le constat du versement illicite des gains. Or la pratique policière et les statistiques judiciaires ont montré l’inadéquation d’une telle exigence. C’est ainsi qu’aucune infraction n’a été constatée sur les 2 730 contrôles opérés en 1982 par la brigade des jeux de Paris. À l’évidence, la maille du filet est trop large. » (Assemblée nationale, JO, débats, séance du 6 mai 1983, p. 947.)
  • [39]
    Cf. JO, 13 juillet 1983, p. 2154.
  • [40]
    En dehors de quelques exceptions accordées à certaines communes disposant déjà d’un casino, l’ouverture et l’exploitation de ces établissements situés dans des stations classées balnéaires, thermales ou climatiques ont été autorisées, à titre dérogatoire aux dispositions du Code pénal interdisant les jeux de hasard, par la loi du 15 juin 1907. Cf. JO du 16 juin 1907.
  • [41]
    Cet amendement des sénateurs Pierre Salvi et Richard Pouille s’inspirait lui-même d’une initiative prise peu de temps auparavant par Bernard Marie, député-maire de Biarritz, devant la commission des finances de l’Assemblée nationale. Cf. Sénat, JO, débats, séance du 29 mai 1980, p. 2201. L’idée d’implanter les machines à sous dans les casinos avait aussi été évoquée par le syndicat regroupant les propriétaires de ces établissements dans un livre blanc publié en 1979.
  • [42]
    Alors président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République de l’Assemblée nationale, Raymond Forni avait précisé en mai 1983 « qu’il ne verrait pas, quant à lui, de grave inconvénient à l’installation des machines à sous dans les casinos ». Quelques jours plus tard, cette prise de position contraire à l’avis de cette commission lui inspirera le commentaire suivant : « La commission a tranché et, bien entendu, je m’inclinerai. Mais certains d’entre nous considèrent que le trouble risque d’être plus grand pour l’ordre public si la suppression est totale sur l’ensemble du territoire national que si l’on maintient une soupape de sécurité dans les casinos. »
  • [43]
    Assemblée nationale, JO, débats, deuxième séance du 22 juin 1983, p. 2997.
  • [44]
    Sénat, JO, débats, séance du 27 juin 1983, p. 2007.
  • [45]
    L’installation des machines à sous dans l’enceinte des casinos est encore présentée comme salutaire car elle permettrait d’éviter que les mineurs y aient accès.
  • [46]
    Le dépôt de bilan du casino d’Hendaye est notamment décrit comme la dramatique conséquence de la conjonction de ces deux phénomènes, cf. Sénat, JO, débats, séance du 27 juin 1983, p. 2010.
  • [47]
    Cf. Sénat, JO, débats, séance du 29 mai 1980, p. 2202.
  • [48]
    « Il existe, dans les territoires d’outre-mer, un casino qui est autorisé à exploiter les machines à sous : c’est le casino Royal-Nouméa. Le produit des jeux s’y élève à dix-huit millions d’anciens francs, dont plus de neuf millions, c’est-à-dire la moitié, ont été réalisés au moyen des machines à sous. » (Sénat, JO, débats, séance du 15 juin 1983, p. 1638.)
  • [49]
    Cf. Sénat, JO, débats, séance du 30 juin 1983, p. 2152.
  • [50]
    Cf. Sénat, JO, débats, séance du 30 juin 1983, p. 2163.
  • [51]
    Sénat, JO, débats, séance du 29 mai 1980, p. 2203.
  • [52]
    Ibid. p. 2204.
  • [53]
    Cf. notamment l’intervention de Georgina Dufoix, Sénat, JO, débats, séance du 15 juin 1983, p. 1639.
  • [54]
    Cf. Sénat, JO, débats, séance du 27 juin 1983, p. 2010-2011.
  • [55]
    Assemblée nationale, JO, débats, deuxième séance du 22 juin 1983, p. 2998. Ce type de discours se rapproche beaucoup de ceux mis en avant par certains hommes politiques à partir de 1913 pour réclamer la suppression des machines redistribuant des jetons de consommation. Ainsi, comme le soulignait par exemple à cette époque Jean-Joseph Molle (député de l’Hérault inscrit au groupe de l’Union républicaine socialiste), très nombreux sont les individus qui « jouent de petites sommes, mais ils n’en arrivent pas moins, par des mises répétées, à perdre leur salaire et le pain de leur famille », JO, débats, Chambre des députés, séance du 22 mai 1913, p. 1512.
  • [56]
    « Lorsque l’on mesure le degré d’anonymat des salles, où des rangées de joueurs, dans une solitude totale – les images de films sur Las Vegas en portent témoignage – se contentent de presser un bouton pour rechercher une combinaison gagnante, on ne peut que s’inquiéter, et regretter – est-ce de la nostalgie ? – le climat de grande sociabilité de nos anciens cafés. D’un point de vue culturel, les modes de loisir ne sont pas neutres, et les jeux de hasard véhiculent une idéologie individualiste qui n’a d’autres valeurs que l’argent. Dès lors, ce projet de loi a une portée considérable puisqu’il sous-tend une volonté de construire une société de solidarité propice à l’enrichissement humain. » (Intervention du député des Hauts-de-Seine Guy Ducoloné, Assemblée nationale, JO, débats, deuxième séance du 6 mai 1983, p. 946-947.)
  • [57]
    « À compter du 1er janvier 1988, l’ensemble des dispositions applicables aux communes classées stations balnéaires, thermales ou climatiques sont étendues aux villes ou stations touristiques constituant la ville principale d’une agglomération de plus de 500 000 habitants et participant pour plus de 40 %, le cas échéant avec d’autres collectivités territoriales, au fonctionnement d’un centre dramatique national, d’un orchestre
    national et d’un théâtre d’opéra présentant en saison une activité régulière d’au moins vingt représentations lyriques », JO, 6 janvier 1988, p. 216. Cette disposition résulte de l’adoption d’un amendement déposé par Dominique Perben et Pierre Mazeaud qui ne fera l’objet d’aucune véritable discussion au Parlement. Dominique Perben se contente de déclarer : « Il s’agit d’autoriser certaines grandes villes qui font un effort dans le domaine culturel et dans le domaine de leur promotion à bénéficier d’un label qui, je le signale, n’a pas de conséquence financière sur les dotations communales ». Quant à lui, le ministre chargé des collectivités locales précise : « Cet amendement est effectivement neutre, en particulier au regard de la dotation touristique. C’est pourquoi le Gouvernement s’en remet à la sagesse de l’Assemblée », Assemblée nationale, débats, JO., 1re séance du 16 décembre 1987, p. 7511.
  • [58]
    Comme le précise par exemple Léonce Deprez (député du Pas-de-Calais apparenté UDF) dans sa proposition de loi n° 512 tendant à modifier certaines dispositions relatives aux casinos autorisés dont l’examen conduira à l’adoption de la loi du 5 mai 1987, Assemblée nationale, JO, huitième législature, première session ordinaire de 1986-1987, annexe au procès-verbal de la séance du 4 décembre 1986.
  • [59]
    Ainsi, dans un rapport rédigé au nom de la commission des lois constitutionnelles de l’Assemblée nationale, Henri Cuq (député RPR de l’Ariège) souligne : « Au cours des quinze dernières années, le Produit Brut total des Jeux de casinos a diminué de 19,6 % en francs constants, enregistrant même, au cours du dernier exercice comptable de 1985-1986, achevé au 31 octobre, une baisse historique de 14,1 %. Une analyse financière récente de la police des jeux montre que six casinos sont soumis à une procédure de redressement judiciaire, tandis qu’un casino sur trois a des difficultés financières et est susceptible de se trouver à court terme en état de cessation de paiement. » (Assemblée nationale, Rapport n° 565, JO, huitième législature, première session ordinaire de 1986-1987, annexe au procès-verbal de la séance du 17 décembre 1986.)
  • [60]
    Sénat, rapport n° 190, JO, huitième législature, seconde session ordinaire de 1986-1987, annexe au procès-verbal de la séance du 22 avril 1987.
  • [61]
    Sénat, débats, JO, séance du 28 avril 1987, p. 507.
  • [62]
    Ibid., p. 509.
  • [63]
    Cet article prévoit que l’État calculera dorénavant son prélèvement non plus sur 75 % mais sur 65 % du Produit Brut des Jeux des casinos. Sur les débats qui entourent le vote de cette disposition, cf. Assemblée nationale, débats, JO, troisième séance du 11 décembre 1986, p. 7560-7561.
  • [64]
    Cf. sur ce point le paragraphe IV de l’article 15 de la loi n° 86-1019 du 9 septembre 1986 consacrée à la lutte contre la délinquance et la criminalité.
  • [65]
    Cf. JO, Assemblée nationale, Rapport n° 565, op. cit.
  • [66]
    Créée en 1934, cette commission composée d’élus et de hauts fonctionnaires a pour mission de se prononcer sur les demandes d’autorisation et de renouvellement de jeux dans les casinos afin d’éclairer les décisions du ministre de l’Intérieur.
  • [67]
    « Aujourd’hui on nous demande de discuter une proposition de loi signée par : M. Léonce Deprez, maire du Touquet ; Mme Louise Moreau, maire de Mandelieu ; M. Olivier Guichard, maire de La Baule ; M. Jacques Lacarin, maire de Vichy ; M. Arthur Paecht, maire de Bandol ; M. Emmanuel Aubert, maire de Menton […] On croyait que les groupes de pression n’entraient plus dans l’hémicycle […]. On voit, à l’évidence, qu’ils sont ici présents et que vous en êtes, messieurs de la droite, les dignes représentants. C’est lamentable pour l’image de la représentation nationale. » (Assemblée nationale, débats, JO, 1re séance du 17 décembre 1986, p. 7721.)
  • [68]
    Ibid., p. 7722.
  • [69]
    Sénat, débats, JO, séance du 28 avril 1987, p. 514.
  • [70]
    Assemblée nationale, proposition de loi n° 112 tendant à interdire les jeux de hasard dans les casinos, neuvième législature, session de droit en application de l’article 12 de la constitution, annexe au procès-verbal de la séance du 6 juillet 1988.
  • [71]
    Cf. Sénat, débats, JO, séance du 28 avril 1987, p. 506.
  • [72]
    Ibid., p. 512.
  • [73]
    Assemblée nationale, débats, JO, 1re séance du 17 décembre 1986, p. 7726.
  • [74]
    Ibid.
  • [75]
    Assemblée nationale, débats, JO, 1re séance du 17 décembre 1986, p. 7723.
  • [76]
    Ibid., p. 7724.
  • [77]
    Sénat, débats, JO, séance du 28 avril 1987, p. 514.
  • [78]
    Assemblée nationale, débats, JO, 1re séance du 17 décembre 1986, p. 7727.
  • [79]
    Ibid., p. 7727-7728.
  • [80]
    Bien que longue, la liste suivante n’est cependant pas exhaustive :
    • Stéphane Marchand : « Machines à sous : la bataille du “Var West” », in Le Figaro, 27 juillet 1997 ;
    • Marc Pivois : « Abus coupables de machines à sous », in Libération, 3 mai 1998 ;
    • Marc Pivois : « Les bandits manchots au bistro », in Libération, 12 juillet 1998 ;
    • Christophe Cornevin : « Les lucratives combines des jeux clandestins », in Le Figaro, 6 octobre 1998 ;
    • « Des machines à sous fleurissent sur les trottoirs de Paris et dans les villes de province », in Le Figaro, 4 mai 1999 ;
    • Pascal Ceaux : « La guerre des machines à sous dans le milieu marseillais », in Le Monde, 17 septembre 1999 ;
    • Michel Henry : « Les gros sous et gros bras du “Chinois” de Marseille », in Libération, 16-17 octobre 1999 ;
    • François Caviglioli : « Les martyrs du bingo », in Le Nouvel Observateur, 24 février 2000 ;
    • « Machines à sous clandestines », in Le Figaro, 16 novembre 2001 ;
    • François Vignolle et Frédéric Vézard : « Le lieutenant du Belge tenait les machines à sous », in Le Parisien, 4 décembre 2002.
  • [81]
    L’utilisation de ces « distributeurs de confiserie » avait été tolérée par la loi n° 86-1019 du 9 septembre 1986. Les fraudes dont ils faisaient l’objet seront notamment dénoncées par les fabricants et exploitants des jeux d’amusement (cf. la question écrite n° 3352 posée par Georges Gruillot, Sénat, JO du 28 octobre 1993 et la question écrite n° 3521 posée par Jean Pourchet, Sénat, JO du 4 novembre 1993). Ces protestations conduiront le gouvernement à mettre fin à la dérogation dont bénéficiaient ces appareils par la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995 d’orientation et de programmation relative à la sécurité.
  • [82]
    « La section judiciaire de la Sous-Direction des Courses et Jeux de la Direction centrale des renseignements généraux mène différentes actions contre des réseaux d’exploitation illégale de machines à sous dans les débits de boisson. En 1997, son activité a été marquée par le démantèlement de plusieurs réseaux d’appareils de jeux de hasard prohibés, placés de manière clandestine dans des débits de boisson, dans le cadre d’enquêtes sur commission rogatoire : 280 machines à sous de type distributeurs alimentaires ont été saisies en juin et juillet de cette même année à Marseille et à Paris ; mise sous scellés de 60 bingos (appareils ressemblant à des flippers et exploités comme des machines à sous) dans les départements du Gard, du Vaucluse et des Bouches-du-Rhône ; saisine en liaison avec le service des douanes de Lyon de 160 machines à sous exploitées dans les bars à Lyon et dans la région Rhône-Alpes et arrestation des membres du réseau. En 1998, 205 bingos en provenance d’Espagne ont été saisis et le traitement de ce dossier, en collaboration avec la police judiciaire de Lille, a abouti à l’arrestation de membres du milieu lillois exploitant un réseau de machines à sous clandestines. Par ailleurs, dans le cadre d’une étude récente consacrée à la répression des machines à sous depuis 1995, la section judiciaire de la Sous-Direction des Courses et des Jeux a tenté de centraliser des indicateurs statistiques, non exhaustifs mais utiles à une connaissance générale du phénomène. Il en ressort que de 1995 à 1998 inclus, les actions menées par les différentes administrations concernées (douanes, gendarmerie, police) ont permis la saisie de 4 760 appareils. » (Extrait de la réponse fournie par le ministère de l’Intérieur à la question n° 30206 posée par le député Thierry Mariani, Assemblée nationale, JO, 26 juillet 1999, p. 4596-4597.)
  • [83]
    Cf. notamment les articles de presses suivants :
    • « 300 000 joueurs pathologiques en France », in Les Échos, 28 mai 1999 ;
    • « Une sorte de placement à risque », in Le Figaro, 17 janvier 2000 ;
    • Christian Bucher, « Extension du domaine de la dette », in Le Figaro, 15 février 2000 ;
    • Michaël Hajdenberg, « Jouer avec le jeu, une pathologie à l’étude », in Libération, 29 décembre 2003 ;
    • « Le budget des Français consacrés aux jeux d’argent a doublé en 25 ans », in Le Monde, 13 mai 2005.
  • [84]
    N° 70, septembre 2001.
  • [85]
    Le bureau de cette association est composée des membres suivants : « J.-P. Martignoni-Hutin (président), C. Bucher (vice-président), M. Valleur (vice-président) et Matthieu Vincent Beautsar (avocat qui assume la fonction de secrétaire trésorier).
  • [86]
    Cf. l’article de J.-P. Martignoni-Hutin, C. Bucher, M. Valleur et M. V. Beautsar, « La nécessité d’une réelle politique des jeux », Les Échos, 26 décembre 2003 et J.-P. Martignoni-Hutin, « Un observatoire pour une politique des jeux », Espaces, n° 210, décembre 2003.
  • [87]
    Propos recueillis dans Jean-Michel Décugis, « Joueurs en observation », Le Point, 21 novembre 2003.
  • [88]
    Propos publiés dans Marc Payet, « Un observatoire pour les fous du jeu », Le Parisien, 25 novembre 2003.
  • [89]
    « Les fondateurs sont convenus que la création par les pouvoirs publics d’un observatoire reprenant les missions qui sont actuellement dévolues à l’Observatoire des jeux emportera de plein droit sa dissolution. »
  • [90]
    Entretien avec Marc Valleur, hôpital Marmottan, 22 mars 2006.
  • [91]
    Le 5 janvier 2006 a été conclu entre le ministre de l’Intérieur Nicolas Sarkozy et « Casinos de France » et « Casinos modernes de France » un « protocole sur la promotion du jeu responsable » imposant les contrôles d’identité à l’entrée des casinos français. Cependant, il existe encore une « contrepartie » au volet « contrôle d’identité » prévu dans cet accord. En effet, l’État s’engage à supprimer le droit de timbre dont les joueurs devaient jusqu’alors s’acquitter pour pouvoir pénétrer dans les salles de jeux traditionnels. Du fait de cette suppression, ces salles pourront donc dorénavant ne plus être séparées de celles où sont installées les machines à sous. De plus, l’accord
    comporte aussi d’autres dispositions favorables aux casinos : allègement des démarches administratives pour les autorisations de jeu, assouplissement concernant l’organisation générale des établissements, possibilité de création de nouveaux jeux et adaptation du matériel.
  • [92]
    Décret n° 2006-174 du 17 février 2006 relatif à l’organisation et à l’exploitation des jeux de loterie autorisés par l’article 136 de la loi du 31 mai 1933 et par l’article 48 de la loi n° 94-1163 du 29 décembre 1994 et modifiant le décret n° 78-1067 du 9 novembre 1978, JO, 18 février 2006.
  • [93]
    Cf. notamment sur ce point Renée Carton, « Dealer honteux », Le Quotidien du médecin, 24 février 2006. Cf. aussi J.-P. Martignoni-Hutin qui s’interroge sur la sincérité de cette initiative étatique dans « France : le gouvernement met en place des règles pour encadrer les activités de la Française des jeux », http://www.toxicoquebec.com/actus/index.php?2006/04/09/1113-france-le-gouvernement-met-en-place-des-regles-pour-encadrer-les-activites-de-la-francaise-des-jeux.
  • [94]
    Pour une réflexion sur le décret du 17 février 2006 comme réponse à l’arrêt Gambelli, cf. notamment : http://www.droit-technologie.org/pda/actualite.asp?actu_id=1171.
  • [95]
    J.-P. Martignoni-Hutin rappelle qu’en 2004 devait se tenir au Sénat un colloque intitulé « Quelle politique pour les jeux d’argent et de hasard en France ? », mais qu’il a été annulé du fait du refus des représentants de la Française des Jeux et du Paris Mutuel Urbain d’y participer, in Psychotropes, op. cit., p. 77-78.
  • [96]
    L’Expansion souligne par exemple qu’en 2004, sur les deux milliards d’euros de chiffre d’affaires engendrés par le Rapido, « Bercy a récolté quelques 380 millions d’euros », « Le Rapido : un succès qui inquiète Bercy », 14 avril 2005.
  • [97]
    Cf. notamment : Jean-Michel Decugis : « Rapido : l’effet casino à portée de bistro » (Le Figaro, 21 avril 1999) ; Bernard Stiegler : « “Rapido”, l’assommoir contemporain » (Le Monde diplomatique, août 2000) ; Julien Félix et Henri Haget : « Les possédés du rapido » (L’Express, 9 mai 2005).
  • [98]
    Interview de Christophe Blanchard-Dignac : « Les règles du jeu », Les Échos, 13 mars 2006.

1Ces dernières décennies, les jeux d’argent se sont très fortement développés dans de nombreux pays, au point de représenter une part significative des emplois de loisirs, d’alimenter de manière non négligeable le budget des États et de contribuer activement à l’essor de pans entiers du tissu économique local. Ce phénomène ne concerne pas seulement l’Amérique du Nord où il se manifeste de façon paroxysmique (Thompson, 2001 ; Lyman Mason & Nelson, 2001). Au Japon, le chercheur Thierry Ribault (1998) constatait que le seul jeu du « pachinko » fournissait en 1998 pas moins de 340 000 emplois et constituait « un des plus importants secteurs de service marchand du pays » [1]. L’Europe n’échappe pas au phénomène. Ainsi, publiant des extraits d’un article paru dans le journal Tiempo, le Courrier International faisait état, en 2000, d’un projet visant à ériger dans la région espagnole de la Manche une ville entièrement dédiée au jeu sur le modèle de Las Vegas [2].

2Avec le développement des jeux d’argent se trouve posée la question cruciale de la posture des autorités. Par exemple, dans un contexte où se sont amplifiées les critiques « dénonçant la place croissante de l’argent facile dans la mentalité grecque », le gouvernement hellène a décidé, au début de l’année 2002, de prohiber sur l’ensemble du territoire tous les jeux électroniques exploités dans les lieux publics afin d’éviter leur éventuel « détournement » en jeux d’argent [3].

3Du fait du succès qu’elles rencontrent partout où elles ont été implantées, les machines à sous constituent une source particulière de préoccupations pour les instances étatiques. Ainsi, depuis peu, elles sont au cœur d’un vaste débat portant sur le jeu et ses incidences, auquel prennent part nombre d’acteurs influents du champ politique russe et qui s’articule autour de thèmes d’importance comme le crime organisé, la morale ou l’addiction [4].

4Qu’en est-il en France ? Depuis que les pouvoirs publics ont décidé d’autoriser l’introduction des machines dans les casinos en 1987, le fonctionnement de ces établissements de jeux a été bouleversé [5]. La fréquentation des salles de machines à sous a augmenté considérablement au détriment de celle des salles de jeux traditionnels. Ainsi, sur la période 1987-2001, le nombre annuel d’entrées dans les salles de jeux traditionnels est passé de 2 266 429 à 2 651 207 alors que, pour les salles de machines, il a connu une progression fulgurante : de 1 698 680 à 66 205 449 [6]. De plus, ce phénomène s’est accompagné d’une croissance phénoménale du Produit Brut des Jeux des casinos [7] : grâce aux machines à sous, le chiffre d’affaires des casinos a été progressivement amené à dépasser ceux de la Française des Jeux et du Paris Mutuel Urbain [8]. Enfin, un processus de concentration accrue du secteur des casinos s’est dessiné au profit de groupes sans cesse plus puissants se livrant une sévère concurrence [9].

5Parallèlement, l’addiction au jeu s’est développée à mesure que se renforçait l’extension du parc des machines à sous des casinotiers. Au cours des années 1990, ce phénomène a commencé à faire l’objet d’analyses de plus en plus précises en France. Ainsi, en 1993, dans le rapport Les joueurs dépendants. Une population méconnue en France rédigé pour le compte du Credoc à partir de l’analyse de la situation de plus de 200 joueurs ayant pris contact avec son association « Sos joueurs », Armelle Achour-Gaillard (1993) mettait en exergue certaines spécificités relatives aux machines à sous en matière d’addiction. Elle pointait notamment que les femmes s’adonnaient plus volontiers que les hommes à ce type de jeu de manière exclusive.

6Neuf ans plus tard, cette psychologue, tout en reconnaissant la difficulté d’élaborer un portrait type du joueur pathologique, indiquait que beaucoup de points évoqués dans son étude initiale s’étaient révélés être des « constantes » : dépression, délinquance, interdiction bancaire, tentatives de suicide, etc. [10] Autant de problèmes qu’elle estimait être en majeure partie liés aux machines à sous. En effet, sur les 1 274 demandes d’aide enregistrées par « SOS joueurs » en 2002, près des deux tiers concernaient une dépendance vis-à-vis de ce type de jeu [11]. Une proportion qui, en 2006, ne semble pas avoir varié si l’on s’en tient à ses déclarations : « Plus de 66 % des demandes d’aide concernent les machines à sous, 23 % les PMU et 16 % les Rapido [12]. »

7En 1997, la publication aux Presses Universitaires de France par les psychiatres Marc Valleur [13] et Christian Bucher [14] d’un « Que-sais-je ? » intitulé Le jeu pathologique a constitué une autre étape importante dans le processus ayant conduit certains chercheurs à mettre en lumière le lien entre machines à sous et conduites addictives. En effet, le tableau exhaustif dressé par ces deux auteurs sur la ludopathie montre clairement combien se pose tout particulièrement, avec les machines à sous, la question de la « dépendance ». Tout d’abord parce que ces appareils renvoient à une faible socialisation : « Le caractère solitaire de cette pratique est une cause possible de ses abus, et montre l’importance des lieux du jeu, comme espace de socialisation, et de pratiques différentes » (p. 17). Ensuite parce qu’avec les machines à sous, les casinos « tendent à s’ouvrir au plus grand nombre » (p. 19). Enfin, parce que « l’acquittement d’un droit d’entrée dans les casinos ne concerne pas l’accès aux salles de jeux comportant les machines à sous » (p. 115).

8À la suite de la publication de son ouvrage Ethnologie des machines à sous, le sociologue Jean-Pierre Martignoni-Hutin (2000) s’est aussi montré très actif, dans le champ français des recherches en sciences sociales, pour rattacher la question de l’addiction aux machines à sous à la problématique plus générale du « jeu compulsif ». De ce point de vue, les lignes directrices de sa pensée sont bien synthétisées dans l’article « Que peut apporter la sociologie dans le débat sur le jeu compulsif ? » qu’il a publié en 2005 dans la revue Psychotropes[15].

9Tout d’abord, l’auteur y invite à une « déconstruction de l’objet “jeu compulsif” ». Selon lui, il est en effet absolument indispensable d’engager des recherches qui prendraient en considération la manière dont une pluralité d’acteurs de nature différente contribuent à l’émergence d’une définition de cet objet : casinotiers et autres opérateurs ludiques, pouvoirs publics (élus, ministre de l’Intérieur, sous-direction des courses et des jeux, etc.), chercheurs, sphère médiatique, etc.

10J.-P. Martignoni-Hutin insiste aussi sur la nécessité de faire progresser le savoir afin de mieux pouvoir conceptualiser la notion de jeu problématique. C’est ici une entreprise transdisciplinaire qui est préconisée en vue de favoriser le croisement des diverses approches scientifiques en la matière et de « tester » leur pertinence sur des objets d’étude concrets.

11La troisième priorité dégagée consisterait à initier des études sur la manière dont les psychiatres, psychologues et autres acteurs intervenant dans la prise en charge des joueurs en difficulté contribuent concrètement dans leur activité quotidienne à produire des données sur le jeu pathologique. Enfin, c’est à une vaste enquête sur la prévalence au jeu qu’appelle de ses vœux le sociologue. Susceptible de porter sur certains types particuliers de jeu comme les machines à sous, une telle démarche devrait aussi s’intéresser plus globalement à tous les opérateurs de jeu et aux multiples aspects de formes de jeu jusqu’alors peu investies par les sciences humaines : cybercasinos, jeux boursiers, etc.

12En outre, J.-P. Martignoni-Hutin se prononce en faveur de recherches articulées autour de récits de vie de joueurs et réclame la mise en œuvre d’enquêtes empiriques portant sur certains sujets à propos desquels les connaissances font aussi cruellement défaut : la gestion du fichier national des interdits de casinos, par exemple.

13Retracées ici à grands traits, les incidences engendrées par la décision étatique d’introduire les machines à sous dans les casinos ont donc été décisives en matière de développement du jeu addictif parce qu’elle a contribué à faire croître significativement l’offre de jeu légale sur le territoire. Cette décision ne s’est toutefois pas imposée aisément et sans susciter de vives controverses politiques dont la nature est souvent méconnue. Un retour sur le passé s’avère indispensable afin de retracer les conditions ayant présidé à son émergence. Cette démarche généalogique permet de souligner les enjeux sociaux, économiques et politiques ou encore technologiques auxquels renvoie la question de l’exploitation des machines à sous en France depuis la fin des années 1970. Elle permet aussi de mieux comprendre la position changeante de l’État face à ces appareils. Cette dernière, sous-tendue à certaines époques par des impératifs divergents, n’est pas dénuée d’ambiguïté et contraste avec la posture inflexible des pouvoirs publics vis-à-vis d’autres pratiques addictives, « plus classiques », que sont les usages de stupéfiants.

1970 / 1980 : « nouvelle donne »

14Au début du xxe siècle apparaissent en France les premiers appareils automatiques. Face à ce nouveau phénomène, l’attitude adoptée par les autorités est, jusqu’à la période qui précède la Seconde Guerre mondiale, fluctuante. Les mesures que les pouvoirs publics sont amenés à édicter pour le réglementer trahissent leurs hésitations. Certes, l’interdiction de l’exploitation des machines à sous est très tôt proclamée [16]. Cependant, une tolérance est consentie pour les machines redistribuant des jetons qui peuvent donner lieu à une consommation d’alcool sur les lieux où ils ont été délivrés [17]. Ce n’est qu’avant la guerre 1914-1918 que prendra forme un courant politique favorable à la prohibition de tous les types de distributeurs automatiques [18]. Ce principe ne sera pourtant définitivement décrété qu’en 1937. En effet, Marx Dormoy adoptera, sous le troisième cabinet Chautemps, un décret-loi en date du 31 août 1937 qui mettra un terme définitif à l’exploitation de toutes les machines dont le fonctionnement repose sur l’adresse ou le hasard, quelles que soient les modalités de redistribution adoptées [19].

15Contrairement au premier tiers du xxe siècle, les trente glorieuses constituent une période durant laquelle la question de l’exploitation des machines à sous préoccupe peu les pouvoirs publics car elle ne représente plus qu’un épiphénomène [20]. Il faut attendre les premières années de la décennie 1970 pour voir apparaître sur le territoire français de nouvelles formes de machines. L’implantation sans cesse croissante de ces appareils à parties multiples est perçue comme une réelle menace par l’État car nombre d’entre eux sont convertis en véritables machines à sous. De plus, de multiples indices montrent que leur exploitation est en grande partie tombée sous la coupe du « milieu ». Les pouvoirs publics peuvent toutefois être directement tenus pour responsables de cette évolution qui les oblige à prendre des mesures appropriées.

Des « jeux de café » transformés en machines à sous

16À la fin des années 1970 commencent à être utilisées en France des machines dont la conception est désormais rendue possible grâce aux progrès technologiques réalisés dans les domaines de la micro-informatique, de la vidéo et de l’électronique : flippers, mais aussi « jackpots » et « vidéo-pokers ». Ces appareils peuvent être actionnés à l’aide de pièces et disposent d’un compteur qui permet d’afficher un chiffre correspondant à une quantité de parties susceptibles d’être rejouées gratuitement. Présentés comme de simples jeux de divertissement, certains d’entre eux vont cependant rapidement voir leur fonction initiale détournée et être transformés en véritables machines à sous.

17Un article [21] publié dans Le Parisien du 21 avril 1983 décrit précisément comment s’effectue cette « transformation » :

18

« Un bar d’immigrés, quelque part en Seine-Saint-Denis. Ce pourrait être dans le Val-d’Oise ou dans certains quartiers de Paris […]. Ali est là devant le « jackpot » entouré de deux ou trois coreligionnaires. Il vient de changer à la caisse deux billets de 100 francs contre des pièces de 10 francs qu’il introduit nerveusement dans la fente idoine. Appuyer sur des touches, voir tourner des rouleaux, réappuyer, le jeu deviendrait vite ennuyeux s’il n’y avait pas l’espoir d’une contrepartie financière. Bien en évidence sur la machine, une affichette stipule qu’il s’agit uniquement d’un “appareil d’amusement”. Pourtant, Ali s’obstine. Le stock de pièces s’amenuise dans sa main. L’avant-dernière ! Soudain, les lumières clignotent, un petit bruit répétitif crépite. Le visage du joueur s’illumine : le compteur marque trois cents ! Il appelle le patron qui vérifie et hoche la tête. La main d’Ali passe derrière la machine, appuie sur un petit bouton et le compteur retombe à zéro. L’heureux gagnant passe à la caisse du bar et le cafetier lui donne trois billets de 100 francs. Il a eu de la chance cette fois, mais la veille il avait “laissé huit cents balles dans cette s… de machine” ».

19Les juteux profits que procure un tel stratagème aux personnes qui possèdent ces machines ou bien les installent dans leur café expliquent leur essor formidable en quelques années.

20Évoquant ce phénomène, un rapport [22] de mai 1983, rédigé par Gérard Houteer (député socialiste de la Haute-Garonne) au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République de l’Assemblée nationale, soulignera d’ailleurs son ampleur :

21

« Un nombre important d’appareils automatiques d’un type nouveau, servant de base à des jeux d’argent, ont été récemment mis en place dans des établissements accessibles au public et, en particulier, dans les débits de boissons. Ces “appareils à parties multiples” […] étaient au nombre d’environ 15 000 en décembre 1981 et de 35 000 en décembre 1982. Au cours des trois premiers mois de l’année 1983, on a enregistré la mise en place de 20 000 appareils supplémentaires, ce qui porte à environ 55 000 le nombre de machines actuellement en service […]. D’après les informations recueillies par votre rapporteur auprès du ministère de l’Intérieur, ce secteur d’activité aurait eu, en 1982, un chiffre d’affaires estimé à 9 ou 10 milliards de francs en enjeux. […] Quant au produit des jeux pour les propriétaires et les exploitants des machines, il est estimé à plus de 4 milliards de francs pour 1982. […] Chaque machine procurant une recette mensuelle moyenne évaluée à 10 000 francs en 1982. »

22Comme au début du xxe siècle, le processus d’implantation sans cesse plus massive de ces nouvelles machines tend à prendre forme sans être régulé par l’État [23]. Ce dernier ne fixe aucunement le taux de redistribution de ces appareils. De plus, les énormes sommes d’argent qu’ils génèrent lui échappent. Ce sont autant de problèmes qui, à partir du début des années 1980, commencent de plus en plus à être soulevés par de nombreux parlementaires de tendances politiques différentes. Sur la période allant de 1980 à 1982, une dizaine de questions écrites posées au ministre de l’Intérieur par des parlementaires visent à dénoncer le caractère inquiétant de l’accroissement du parc de ces machines [24].

Une activité sous l’emprise du grand banditisme

23À ces problèmes s’en greffe un autre de taille : des faits divers relatés par la presse paraissent confirmer que certaines personnalités influentes du « milieu » se sont reconverties dans l’exploitation des « jackpots » et se livrent une sévère concurrence afin de monopoliser cette activité très lucrative.

24Le 1er septembre 1981, le journal Le Parisien décrit avec précision deux assassinats qui, survenus à quelques mois d’intervalle dans la capitale et dans les Hauts-de-Seine, ont été perpétrés, selon un modus operandi identique, à l’encontre de « truands » impliqués dans la fabrication et la diffusion des machines à sous. Intitulé « Un nouvel épisode sanglant de la guerre des machines à sous », l’article rédigé par Alain Blanchet et Christian Chardon s’achève ainsi :

25

« Pour s’assurer des bénéfices colossaux garantis sans grand effort, toute une organisation s’est mise en place avec des sociétés fantômes et des gérants hommes de paille. Par ailleurs, des repris de justice en tout genre, braqueurs ou proxénètes reconvertis, ont trouvé par ce biais le moyen d’acquérir un semblant de virginité légale. Les voilà devenus placiers, livreurs, installateurs, représentants de ces entreprises de machines à sous. Comme tous ne travaillent pas pour le même patron, les rivalités forcément s’aiguisent. Et comme on a gardé le réflexe prompt et le goût des verdicts sans appel, cela peut se terminer par une exécution en règle. »

26Ces règlements de compte provoqués par les convoitises que suscite le marché des machines à sous ne semblent pas circonscrits à la seule région parisienne. Un autre article paru deux ans plus tard dans le même quotidien le confirme. Il répertorie une longue série d’exactions commises dans d’autres villes françaises [25]. Le même jour, l’article « Les jackpots hors jeu » de Jean-Charles Reix publié dans Le Figaro fait d’ailleurs aussi allusion au cas de la Corse où le « nombre de morts est considérablement plus élevé » et à celui du Nord de la France qui « n’a pas été épargné ». Ce phénomène ne laisse pas les autorités insensibles. À Marseille, les pouvoirs publics décident d’agir localement dès la fin du mois de février 1980 en interdisant ces appareils [26].

27Pourtant, ce n’est qu’à partir de 1983 que la classe politique nationale commence véritablement à s’indigner. Au début de cette année, le sénateur du Lot-et-Garonne Henri Caillavet (radical de gauche rattaché au groupe de la gauche démocratique) interpelle le Premier ministre Pierre Mauroy pour lui demander d’enrayer le développement des machines à sous, qui « profite de plus en plus à la pègre, d’aucuns proxénètes trouvant dans cette substitution des avantages scandaleux » [27]. Quatre mois plus tard, Georgina Dufoix (secrétaire d’État auprès du ministre des Affaires sociales et de la Solidarité, chargée de la famille) reconnaît d’ailleurs officiellement que ces agissements représentent un facteur déterminant ayant motivé le gouvernement socialiste à rédiger un projet de loi destiné à proscrire l’usage de ces appareils [28].

Les choix de l’État contestés : autorisation d’importation et « vignette Fabius »

28À l’instar des premières décennies du xxe siècle qui avait vu les machines à sous proliférer du fait d’un principe de tolérance dont bénéficiaient de la part des autorités les machines redistribuant des jetons de consommation, la situation du début des années 1980 s’explique en grande partie par certaines décisions des pouvoirs publics.

29Paru dans le journal L’Aurore du 31 janvier 1979, un article de François Robert intitulé « Le jackpot… c’est du billard » évoque de manière très détaillée l’une des deux principales raisons expliquant pourquoi les autorités peuvent être tenues responsables de la prolifération des machines à sous. On peut y lire :

30

« Jusqu’en 1973, pas de problèmes, l’administration des douanes annihilait aux frontières toutes velléités d’importation. Il y eut des procès, cela alla jusqu’à la Cour de cassation et finalement l’interdiction d’achat des appareils à l’étranger fut levée. Car la loi, boiteuse, n’interdisait en fait que le seul fonctionnement mais non pas l’importation et implicitement non plus l’installation des appareils [29]. »

31Cet article indique ensuite que cette évolution a été particulièrement dommageable puisque nombre d’individus en ont profité pour se procurer des machines à l’étranger (notamment au Luxembourg et en Belgique où elles furent interdites à partir de 1974) et les installer dans la plupart des régions françaises. De la sorte, ils ont habilement pu contourner le dispositif législatif en vigueur et sont parvenus à tromper les autorités ou même parfois à bénéficier de leur complaisance :

32

« Les exploitants, en amalgamant les machines à sous aux machines d’amusement, acquittaient aux municipalités, qui ferment souvent les yeux, le montant des vignettes obligatoires et la taxe sur les spectacles. Et le tour est joué bien que la loi de 1937 reste toujours en vigueur. »

33Et cet article de conclure en mettant en évidence non seulement le « manque à gagner » qu’occasionne pour l’État un tel phénomène mais en insistant également sur celui, vigoureusement dénoncé par le représentant de leur syndicat, qu’il cause aux exploitants d’appareils automatiques :

34

« Cela nous fait une concurrence déloyale et insupportable. L’État ne peut plus longtemps fermer les yeux sur un trafic qui le lèse et s’exerce au vu et au su de tout le monde […]. Faudra-t-il qu’un jour nous allions en commandos, casser ces machines qui nous font tant de tort et qu’on veut ignorer puisqu’elles n’ont pas de fonctionnement légal [30] ? »

35L’adoption de l’article 33 de la loi de finances pour 1982 (loi n° 81-1160 du 30 décembre 1981) constitue le second facteur ayant favorisé le développement considérable des machines à sous. En effet, souhaitant accroître les ressources du Trésor public grâce à la manne que représentent les machines automatiques, le ministre de l’Économie et des Finances du gouvernement socialiste nouvellement mis en place parvient à obtenir du Parlement qu’elles soient soumises à l’impôt. Couramment désignée sous l’appellation « vignette Fabius », la taxe d’État alors instituée est fixée entre 1 000 et 1 500 francs pour les flippers [31]. Elle impose aussi, à hauteur de 5 000 francs par an, tous les appareils « dont le fonctionnement repose sur le hasard et qui distribuent notamment des jetons d’amusement ou peuvent donner lieu à des parties gratuites multiples ».

36Le ministère de l’Économie et des Finances indiquera qu’il lui était possible de taxer certaines activités réprimées par la loi (le cas de la prostitution étant, à cet égard, présenté comme particulièrement significatif) sans porter sur celles-ci un quelconque jugement éthique. Il fera aussi valoir que les termes de l’article 33 de sa loi de finances faisaient explicitement référence aux appareils automatiques et non pas à leur éventuelle exploitation à d’autres fins. Néanmoins, force est de constater que sa mesure, souvent considérée comme une reconnaissance semi-officielle des machines à sous, incitera beaucoup de cafetiers à les installer dans leur établissement.

37Fustigeant, en juin 1982, les conséquences néfastes engendrées par l’application de la loi de finances de 1982, le sénateur de l’Aisne Paul Girod (groupe du rassemblement démocratique social européen), membre de la commission supérieure des jeux, accusera le Gouvernement d’avoir procédé à une légalisation de fait des « jackpots » [32]. Un an plus tard, il réitéra ses critiques en dénonçant cette fois, avec davantage de virulence, l’hypocrisie des méthodes de la direction générale des impôts :

38

« À partir du moment où un article particulier du code général des impôts taxe une activité, il me paraît facile d’admettre qu’un esprit non juridique puisse faire une assimilation et penser que ce qui est taxé est légal. Il faut dire que la direction générale des impôts a été très loin dans l’assimilation de son rôle à celui des services de l’État car, dans la circulaire qui a été envoyée au mois de février 1982 aux contrôleurs fiscaux qui ont à s’occuper de cette affaire, figure un alinéa dont la nature va laisser le Sénat un peu rêveur : “L’imposition de la taxe annuelle d’État de cette catégorie d’appareils résulte de la seule constatation de leur existence”. Jusque-là, il n’y a rien d’anormal. “Elle ne dispense pas le service” – c’est donc un ordre ! – “d’en signaler l’existence aux autorités de police […]”. Autrement dit, dans des documents administratifs officiels, la direction générale des impôts n’hésite pas une seule seconde à prescrire à ses agents de procéder au recensement exhaustif, précis et complet des appareils visés qui se trouvent ici ou là, puis, ensuite – elle sait tellement bien que les appareils sont illégaux – à leur intimer l’ordre, une fois l’argent recouvré, bien entendu – ne laissons rien se perdre ! – de se précipiter immédiatement au premier poste de police venu pour faire traîner le malheureux cafetier qu’on vient de taxer devant les tribunaux pour détention d’une machine illégale ! [33] »

39Entre-temps, Louis Souvet, sénateur RPR du Doubs, déposera également une proposition de loi qui, s’attachant à remédier à ce problème, sera ainsi motivée :

40

« Il y a une contradiction de droit évidente entre l’article 410 du Code pénal et la loi de finances pour 1982. En effet, la fiscalisation des machines à sous les légalise, mais le Code pénal les interdit. En conséquence, de deux choses l’une : ou bien la loi pénale est changée, ou bien la loi fiscale est abrogée. Il paraît difficile, sinon impossible, de changer la loi pénale. Il faut donc abroger la loi fiscale. La perte des recettes qui en résulterait pourrait être compensée par une majoration de la taxe sur les alcools importés [34]. »

1983 : réaffirmer la prohibition

41Les mesures que fait adopter le gouvernement socialiste le 12 juillet 1983 « durcissent » certaines dispositions du décret-loi du 31 août 1937 pris sous le Front populaire. Elles n’obtiennent cependant pas l’assentiment de l’ensemble de la classe politique. L’opposition parlementaire du centre et de droite s’y oppose surtout : elle se prononce alors en faveur de l’introduction des machines à sous dans les casinos. Son initiative est néanmoins vigoureusement combattue par le Gouvernement et les groupes majoritaires à l’Assemblée nationale qui s’attachent à en dénoncer le caractère inopportun et dangereux.

L’adoption de la loi du 12 juillet 1983

42Déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale en avril 1983, le projet de loi n° 1454 cosigné par Pierre Mauroy (Premier ministre) et Gaston Deferre (ministre de l’Intérieur) entend interdire certains appareils de jeux [35]. Ce texte fait notamment suite à une initiative prise, durant la législature précédente, par Jean-Pierre Pierre-Bloch (député UDF de la vingt-septième circonscription de Paris) dont la proposition de loi n° 758 envisageait de sanctionner plus sévèrement la tenue de jeux de hasard sur la voie publique en durcissant les peines fixées par l’article 410 du Code pénal [36]. En soumettant ce projet de loi à l’approbation des parlementaires, l’ambition du Gouvernement est de pallier les insuffisances du décret-loi pris en août 1937 dont l’application s’avère désormais extrêmement délicate.

43D’une part, l’installation des appareils à parties multiples dans certains cafés ne constitue pas à elle seule une infraction susceptible de tomber sous le coup de l’incrimination prévue par ce décret car ces machines sont présentées comme de simples divertissements ne procurant aucune pièce ou aucun jeton aux joueurs qui s’y adonnent. En effet, la Cour de cassation a reconnu ce principe en affirmant que les autorités n’étaient pas habilitées à réprimer l’usage des appareils automatiques au seul motif que ceux-ci pourraient éventuellement donner lieu à remboursement en argent des chiffres affichés sur leur compteur résultant d’une convention de jeu passée entre le tenancier et le joueur.

44D’autre part, du fait de la position adoptée par le juge suprême, le seul moyen de pouvoir rendre effectives les sanctions prévues par le décret de 1937 consiste à apporter la preuve qu’une telle convention de jeu a bien été conclue. Or, pour les pouvoirs publics, cette condition est particulièrement contraignante car elle les oblige à constater systématiquement le flagrant délit.

45Déjà rendu difficile par leur miniaturisation que permet le développement des nouvelles technologies, le contrôle des machines à sous par les services de la police nationale, dont la compétence en la matière a parfois pu être niée par le ministère de l’Intérieur lui-même [37], s’avère donc le plus souvent impossible à cause de l’obligation d’établir le flagrant délit [38].

46C’est donc pour éviter la paralysie des agents de police dans l’exercice de leur mission répressive que le gouvernement socialiste décidera d’interdire non seulement l’installation mais aussi l’importation, la fabrication, la détention, la mise à disposition de tiers et l’exploitation dans les lieux publics de tous les appareils reposant sur le hasard et procurant des avantages directs ou indirects en nature, même sous forme de parties gratuites. Après de longues semaines de discussion, son projet abrogeant les dispositions du décret d’août 1937 est adopté par le Parlement et devient la loi n° 03-628 du 12 juillet 1983 [39]. Ce texte prévoit en outre la saisie des machines par les officiers de police judiciaire et leur éventuelle destruction sur décision du juge qui, de surcroît, pourra ordonner la fermeture des établissements les ayant hébergés.

L’évocation d’une solution alternative : implanter les machines à sous dans les casinos

47Le risque de voir péricliter certaines entreprises françaises fabricant des appareils automatiques ou encore le trop court délai imparti aux débitants pour se séparer des machines à sous installées dans leurs établissements constituent quelques-uns des griefs formulés par l’opposition à l’encontre du projet de loi n° 1454 lors des débats qui conduisent à l’adoption de la loi du 12 juillet 1983. Cependant, les plus vives polémiques vont surtout être occasionnées par sa proposition visant à autoriser l’implantation des machines à sous dans les casinos [40].

48Sous la précédente législature, cette idée avait déjà été suggérée par Pierre Salvi (sénateur centriste du Val-d’Oise) et Richard Pouille (sénateur de la Meurthe-et-Moselle rattaché au groupe des républicains et indépendants) dans un amendement qu’ils déposèrent afin de modifier la proposition de loi n° 758 par laquelle Jean-Pierre Pierre-Bloch (UDF) préconisait, en juin 1979, de correctionnaliser l’infraction que constitue la tenue des jeux de hasard [41]. À partir du début des années 1980, l’opposition parlementaire (centre et droite) la reprend à son compte et s’attache à mettre en évidence le caractère original d’une telle mesure qui, selon elle, devrait permettre au Gouvernement de résoudre plus efficacement le problème de la prolifération des machines à sous auquel il est confronté.

49S’appuyant sur le jugement favorable qu’elle a pu susciter de la part de l’influent député socialiste Raymond Forni [42], Charles Millon (député UDF de l’Ain) s’adressera par exemple ainsi à Georges Lemoine (alors secrétaire d’État auprès du ministre de l’Intérieur chargé des départements et territoires d’outre-mer) :

50

« Il ne s’agit nullement de porter un jugement moral sur le jeu, car je ne crois pas que ce soit l’objet du débat. Pour certains, c’est une passion, pour d’autres une distraction, pour d’autres, enfin, un vice. En toute hypothèse, c’est une réalité, et nous ne sommes pas là pour la nier. Au demeurant, le législateur en a pris acte depuis des années puisqu’il a organisé dans des enceintes que l’on appelle casinos l’exercice des jeux de hasard, pour répondre à des besoins […]. Vous allez, d’un trait de plume, interdire les machines à sous dans les casinos français, sur tout le territoire français. Les conséquences de cette interdiction ? Une exploitation clandestine, que vous ne pourrez contrôler, alors que les casinos auraient pu exploiter ces machines à sous de manière régulière […]. Vous verrez que, dans quelques mois ou quelques années, vous aurez des problèmes en raison de l’exploitation clandestine de machines à sous sur tout le territoire, que ce soit dans certains débits de boissons ou dans certains cercles de jeux qui se créeront de manière tout à fait discrète, sinon secrète. […] Ne craignez-vous pas, à l’instar de M. Forni, que la suppression totale des machines n’aboutisse à une situation pire que la situation actuelle ? [43] »

51Cet argument consistant à faire valoir les avantages inhérents à l’installation des machines à sous dans les casinos est également mis en avant par d’autres élus du centre et de droite qui sont alors majoritaires au Sénat. Entérinée par la commission des lois de cette chambre, leur position est résumée par Guy Petit, sénateur des Pyrénées-Atlantiques (Union des républicains et indépendants) :

52

« Une telle solution aurait notamment le mérite de circonscrire le problème à moins de cent cinquante établissements de jeux, et donc d’en faire un moindre mal, beaucoup plus aisément contrôlable qu’en outre elle canaliserait en partie les besoins des joueurs [44]. »

53Toutefois, au-delà de ces considérations qui insistent sur l’impératif d’ordre public [45], l’introduction des machines à sous dans les casinos est surtout présentée comme indispensable par l’opposition pour des raisons d’ordre économique. Soulignant l’importance de la « crise » traversée par les casinos du fait de la désaffection des jeux de table traditionnels ou encore du prélèvement excessif dont ils font l’objet de la part de l’État [46], elle voit en cette mesure l’opportunité de redynamiser l’ensemble de ce secteur d’activité en déclin.

54Cette mesure est considérée par nombre d’élus de droite comme d’autant plus légitime que les casinos étrangers en bénéficient déjà et font ainsi une concurrence « déloyale » à ceux établis sur le territoire national. C’est la raison pour laquelle, dès 1979, la commission des lois du Sénat avait soutenu l’amendement rédigé par les sénateurs Pierre Salvi et Richard Pouille en tentant de démontrer combien la légalisation des machines à sous dans la principauté de Monaco était préjudiciable aux établissements de jeux français [47]. Par la suite, cette idée sera de nombreuses fois reprise et le sénateur Guy Petit évoquera même, pour montrer à quel point les machines à sous seraient profitables aux casinos de l’hexagone, l’exception que constitue un des casinos situé en Nouvelle-Calédonie [48].

55De plus, l’instauration des machines à sous dans les casinos apparaît bénéfique à l’opposition parlementaire d’alors non seulement en raison des sommes conséquentes que l’État pourrait en tirer en instituant une taxation appropriée mais aussi parce que beaucoup d’industries françaises de fabrication d’appareils automatiques profiteraient directement de la création de ce nouveau marché. Si le gouvernement socialiste refuse de faire ce choix, indique par exemple Jacques Larché (sénateur de la Seine-et-Marne, Union des républicains et indépendants), ce sont entre 150 et 300 personnes de plus qui risquent de se retrouver au chômage [49].

56Enfin, le caractère potentiellement « immoral » d’une telle solution est systématiquement nié. Le sénateur de l’Aisne Paul Girod dénoncera notamment :

57

« … le caractère relativement ridicule de l’argument selon lequel on va encourager le vice en laissant les machines à sous dans des endroits où l’on peut jouer au baccarat, à la roulette ou à d’autres jeux de hasard, protégés, encadrés, contrôlés par la police des jeux, tous lieux où il est difficile d’imaginer que le grand banditisme ou le “milieu” puisse mettre la main sur ces appareils [50]. »

L’intransigeance gouvernementale

58En 1980, le gouvernement de Raymond Barre s’était déjà opposé à l’adoption de l’amendement des sénateurs Pierre Salvi et Richard Pouille. Au sénateur Guy Petit qui, durant les débats à la Chambre Haute, laisse supposer que son contenu suscite l’approbation de certains ministres, Jean-Paul Mourot (secrétaire d’État auprès du ministre de la Justice) répond alors avec fermeté :

59

« N’opposez pas les membres du Gouvernement les uns aux autres. J’ai eu connaissance, bien entendu, de la lettre que vous a adressée M. le ministre de l’Intérieur ; il ne prend aucun engagement. Ne me dites pas non plus que M. Papon, ministre du Budget, vous a donné un certain nombre d’assurances. Il existe une solidarité gouvernementale, et vous le savez mieux que quiconque. Soyez alors assuré que tous les membres du Gouvernement souhaitent, à l’heure actuelle, qu’on n’introduise pas en France, en quelque lieu que ce soit, ces machines à sous [51]. »

60Durant la discussion article par article de la proposition de la loi n° 454 modifiant certaines dispositions relatives aux jeux de hasard, ce secrétaire d’État abordera de nouveau ce sujet et explicitera d’ailleurs le principal motif justifiant cette prise de position collégiale des ministres :

61

« En outre, monsieur Guy Petit, vous ne me proposez rien. Vous dites au Gouvernement que vous comprenez parfaitement la difficulté de contrôler ces quelque 20 000 machines – c’est une estimation – introduites clandestinement sur le territoire national et qui fonctionnent à l’heure actuelle. Vous proposez simplement d’en introduire d’autres en les plaçant dans des lieux, où, selon vous, elles seraient mieux contrôlées. Je vous l’accorde, mais qu’adviendra-t-il des 20 000 machines qui ont été introduites en France ? Vous l’avez dit vous-même, c’est là que se situe le problème et nous devrions d’abord régler cette difficulté avant de voir s’il est possible de faire quelque chose d’un point de vue global [52]. »

62Bien qu’ayant changé de tendance politique, le nouveau Gouvernement mis en place à partir du 21 mai 1981 tient le même discours que celui l’ayant précédé. Défendue avec force par l’opposition d’alors, l’idée d’implanter des machines à sous dans les casinos ne lui apparaît aucunement souhaitable. Cette idée s’oppose en effet à sa volonté d’engager une réflexion générale sur la question de la place du jeu en France qui, conduite à des fins de « clarification », suppose temporairement le « gel » de toute prise de décision en la matière [53].

63L’évaluation des multiples problèmes que risquerait d’engendrer la mise en place de ces appareils dans les casinos est aussi à l’origine de l’hostilité exprimée par le gouvernement dirigé par Pierre Mauroy. Secrétaire d’État auprès du ministre de l’Intérieur chargé de la sécurité publique, Joseph Franceschi en expose la nature : l’emprise éventuelle du « milieu » sur les sociétés exploitant les casinos ; l’implantation massive des machines à sous dans les plus grands des casinos qui déséquilibrerait l’ensemble du secteur à leur profit ; l’impossibilité pour les autorités de s’opposer à des demandes accrues d’ouverture de nouveaux établissements ou encore l’importation d’une énorme quantité de machines à sous en provenance de la Communauté européenne qui, difficilement contrôlable par les services douaniers, contribuerait à alimenter significativement les salles de jeux clandestines [54].

64En outre, les réticences du Gouvernement sont quelquefois justifiées par des considérations qui ne sont pas sans rappeler celles des autorités en place sous le Front populaire. Les propos tenus par Georges Lemoine (secrétaire d’État auprès du ministre de l’Intérieur, chargé des Dom-Tom) le montrent de manière significative :

65

« Il faut éviter une tentation trop forte qui risque de mettre en péril les ressources déjà maigres de nombre de foyers. Ce seul argument suffit à motiver la suppression totale [55]. »

66Soutenant l’action du gouvernement socialiste, certains députés communistes n’hésitent d’ailleurs pas en faire l’éloge en soulignant combien sa détermination à faire prévaloir des valeurs à leurs yeux fondamentales est salutaire [56].

67Le caractère incompatible des points de vue défendus par l’opposition et le Gouvernement sur la question de l’introduction des machines à sous dans les casinos explique la difficulté que ce dernier éprouvera à imposer son projet de loi n° 1454. Bien qu’initialement voté par l’Assemblée nationale, ce texte fera l’objet d’une obstruction systématique de la part de la majorité sénatoriale. Cependant, le Gouvernement se montrera particulièrement déterminé à ne rien lui concéder et mobilisera toutes les subtilités de la procédure législative pour imposer ses choix : après avoir rejeté le compromis résultant des conclusions établies par une Commission mixte paritaire, il décidera d’utiliser le vote bloqué sur l’ensemble de son texte et de le faire adopter en quatrième lecture par la seule Chambre basse.

Le « revirement » de 1987-1988

68Votée par la nouvelle majorité issue des élections législatives de mars 1986, la loi n° 87-306 du 5 mai 1987 va autoriser l’implantation des machines à sous dans les casinos. Huit mois plus tard, le Parlement favorisera la diffusion de ces machines en introduisant, dans le titre VI (« Dispositions relatives au financement des collectivités locales à vocation touristique ») de la loi du 5 janvier 1988 d’amélioration de la décentralisation, un article 57 qui permet, sous certaines conditions, aux casinos de s’implanter au cœur des plus grandes cités françaises [57].

69Ces textes constituent le contre-pied des dispositions précédemment mises en vigueur par les dirigeants socialistes. Reprenant nombre d’arguments qu’ils avaient déjà évoqués en 1983, le premier gouvernement de cohabitation et la majorité parlementaire qui le soutient s’efforcent surtout, en 1986-1987, d’ériger la mise en place des machines à sous dans les casinos au rang d’enjeu vital pour le pays. Ayant déjà fait l’objet de quelques réflexions lors des débats qui ont conduit à l’adoption de la loi de juillet 1983, la dimension éthique à laquelle renvoie cette mesure va alors véritablement être placée au cœur d’une vive polémique opposant la droite et la gauche. En effet, les élus socialistes et communistes insisteront essentiellement sur l’aspect immoral de la disposition qu’envisagent de rendre effective le Gouvernement et sa majorité parlementaire. Face aux critiques formulées par l’opposition qui s’articulent autour de ce thème, la principale stratégie du gouvernement et de la majorité consistera à mettre en évidence les contradictions flagrantes existant entre les propos et les actes de leurs détracteurs.

Des machines à sous dans l’intérêt de la France

70Comme sous la législature précédente, les membres du nouveau gouvernement de Jacques Chirac et les parlementaires UDF-RPR s’évertuent à mettre en évidence la « crise » aiguë que traverse toujours le secteur des casinos en France. Les mêmes facteurs sont, de manière récurrente, évoqués en vue de l’expliquer : la concurrence étrangère sans cesse davantage exacerbée (car nombre de pays voisins viennent d’accepter l’exploitation des machines à sous dans leurs casinos : Espagne, Belgique, Grande-Bretagne et Allemagne [58]), le décalage grandissant entre les aspirations de la clientèle et les types de jeux disponibles dans les casinos de l’hexagone, l’aspect désuet de la réglementation et de la législation française en matière de jeu ou encore le prélèvement trop important effectué par l’État sur le Produit Brut des Jeux.

71Pour montrer la gravité des difficultés économiques dont pâtissent les casinos installés sur le territoire national, certains parlementaires de la majorité n’hésitent pas à se livrer à une minutieuse entreprise de comptabilité [59]. Un constat alarmiste identique est établi par Paul Girod dans un rapport réalisé pour le compte de la commission des lois constitutionnelles du Sénat. Ce dernier contient notamment un tableau qui, produit à l’appui de la démonstration de son auteur, présente des données détaillées illustrant la baisse sensible de la fréquentation des casinos sur la période allant de 1983 à 1986 [60].

72Cette récession de l’activité des casinos est présentée comme particulièrement inquiétante puisque le travail d’environ dix mille personnes en dépend directement. Cependant, comme le souligne Yves Galland (ministre délégué auprès du ministre de l’Intérieur, chargé des collectivités locales) devant les sénateurs, la nécessité d’agir pour remettre à flot les casinos n’est pas uniquement motivée par la priorité que représente la préservation de ces emplois :

73

« La proposition de loi qui vous est présentée vise à rétablir la situation d’un secteur important pour l’industrie touristique et la balance des paiements de notre pays […]. Porter remède à ce secteur d’activité apparaît pour le moins souhaitable car il dégage un volume d’affaires de 2 milliards de francs […] ; il est étroitement lié à l’industrie touristique des stations balnéaires, thermales et climatiques ; il constitue, enfin, une source de devises – plus de 700 millions en 1986 – qui ne doit pas être négligée [61]. »

74De nombreux élus UDF-RPR partagent la même analyse, tel l’ancien ministre de l’Intérieur Christian Bonnet (alors sénateur du Morbihan, Union des républicains et indépendants) qui déclare :

75

« Ainsi, qu’il s’agisse du plan social – créer des emplois plutôt qu’en supprimer – du plan fiscal – prélèvement de l’État et prélèvement des communes – ou de l’entrée de devises, l’intérêt de notre pays consiste à aligner notre législation sur celle de dix sur onze de nos partenaires de la Communauté [62]. »

76Au regard de l’ensemble de ces arguments, l’idée d’implanter des machines à sous dans les casinos est donc, selon le Gouvernement et la majorité parlementaire, pleinement justifiée dans l’intérêt même de la France. Complétant la baisse de la taxation étatique sur les casinos qui résulte du vote de l’article 27 de la loi de finances pour 1987 [63], cette mesure est considérée comme d’autant plus légitime que des circonstances favorables sont désormais censées pleinement jouer en faveur de son application. D’une part, en septembre 1986, le Gouvernement a déjà partiellement levé l’interdiction des machines à sous en autorisant, sous certaines conditions, leur usage dans les fêtes foraines [64]. D’autre part, le problème de l’exploitation illicite de ces appareils dans les cafés semble en grande partie résolu [65] :

77

« Selon les renseignements recueillis, dans les quatre mois qui ont suivi la publication de la loi du 12 juillet 1983, plus de 95 % des appareils (pokers vidéos et machines à rouleaux) ont été retirés des bars. Seule une exploitation marginale subsiste entraînant l’intervention des services de police ou de gendarmerie et la saisie des appareils. Les exploitants des débits de boisson concernés font alors l’objet d’une fermeture de leur établissement par les commissaires de la République, indépendamment des poursuites judiciaires engagées. Il est à noter que la Direction des douanes exerce un contrôle très strict sur les machines importées, y compris sur les pièces détachées. »

78De surcroît, les effets indésirables que pourrait engendrer la mise en place des machines à sous dans les casinos font l’objet d’un discours systématique d’euphémisation dont le contenu insiste sur les nombreux « garde-fous » qui entoureront la mise en œuvre d’une telle mesure. Tout d’abord, les sociétés qui vendront ou assureront la maintenance de ces machines seront impérativement soumises à l’agrément du ministère de l’Intérieur. Ensuite, leur autorisation d’exploitation nécessitera un avis favorable émis par la Commission supérieure des jeux [66]. Enfin, les établissements souhaitant les mettre à la disposition du public ne pourront y recourir que s’ils administrent déjà un autre jeu admis par la loi. En outre, ils devront les acquérir à l’état neuf et appliquer un taux de redistribution qui sera strictement contrôlé par les autorités.

La « morale » au centre de l’affrontement gauche/droite

79Affiché par ceux qui soutiennent l’idée d’introduire les machines à sous dans les casinos autorisés, l’objectif de défense des intérêts supérieurs du pays dissimulerait en réalité d’autres desseins moins nobles : ceux de puissants lobbies ayant trouvé un relais utile auprès de certains représentants de la nation qui sont également maires de communes où existe un casino. Ainsi, en décembre 1986, le député Jean-Pierre Michel le déplore au nom du groupe socialiste de l’Assemblée nationale [67]. Ce député de la Haute-Saône exprime aussi sa crainte de voir l’introduction des machines à sous dans les casinos gangrener ce secteur d’activité par le grand banditisme car l’exploitation de ces appareils a jusqu’alors régulièrement été à l’origine d’une multitude de pratiques délinquantes et criminelles. Il voit encore dans ces appareils un danger car, selon lui, leurs caractéristiques intrinsèques incitent surtout la frange de la population qui dispose des revenus les plus modestes à y jouer, au risque de fragiliser davantage sa situation déjà précaire [68] :

80

« Celle-ci sera plus attirée par les machines à sous, car c’est plus simple, que par les jeux traditionnels de casino : boule, jeux de cartes, baccara, etc. […]. On fait appel à cette clientèle au moment où ses revenus sont en baisse. On lui dit : “Vos revenus sont en baisse. Vous êtes peut-être au chômage. Le pain on vous le donne à peine, mais on va vous donner des jeux ! Allez donc jouer dans les casinos !” […] On se croirait revenu au Bas-Empire romain ! […] Tout cela me paraît de très mauvaise politique et – si tant est que ce mot puisse être prononcé ici – tout à fait immoral par rapport à la situation de nos concitoyens. »

81À la Chambre Haute, ce dernier argument mettant l’accent sur les méfaits liés à la démocratisation des machines à sous sera repris et développé par Robert Laucournet, sénateur socialiste de la Haute-Vienne :

82

« Vous allez compenser une perte de ressources émanant d’une clientèle fortunée et d’une présence étrangère moindre par des ressources émanant d’une clientèle moyenne et modeste. Ce principe nous paraît éminemment immoral et sans justification sérieuse [69]. »

83Les critiques émanant des parlementaires communistes sont encore plus acerbes. Cet extrait de l’exposé des motifs d’une proposition de loi, qu’ils s’empresseront de déposer sur le bureau de l’Assemblée nationale dès le nouveau changement de majorité survenu en 1988, résume un des aspects essentiels de leur position :

84

« Les députés communistes sont opposés aux jeux de hasard, lorsque ceux-ci s’insèrent dans l’exploitation du rêve. Tel est bien le cas des jeux implantés dans les casinos, dont le mythe renvoie à une existence oisive et dorée [70]. »

85En 1986, cet argument est surtout exposé par la sénatrice des Hauts-de-Seine Jacqueline Fraysse-Cazalis qui dénonce sans ménagement l’initiative du Gouvernement [71] :

86

« Vous encouragez les activités ludiques et le boursicotage […]. Ce petit texte d’apparence anodine encourage les activités les plus viles où l’argent est joué, gâché et blanchi autant que de besoin […]. Alors que votre société se révèle incapable de donner un emploi à chacun, d’épanouir l’individu dans la connaissance et le travail utile, vous tentez d’accréditer l’idée selon laquelle il serait possible de prospérer, voire de s’enrichir non pas en travaillant mais en jouant […]. Décidément, ce texte n’est défendable ni sur le plan politique, ni sur le plan économique, ni sur le plan moral ».

87Son collègue, le sénateur de la Moselle Paul Souffrin, le reprend à son compte pour montrer à quelles aberrations peut, selon lui, conduire le culte de l’argent roi [72] :

88

« On a parlé de rentrées de devises à propos des casinos. Je suis d’une région frontalière avec le Luxembourg et la République Fédérale d’Allemagne. Au Luxembourg, à deux pas de chez moi, le casino qui se trouve dans la ville de Mondorf fait rentrer des devises. Toutefois, il existe d’autres sources de devises, aussi bien au Luxembourg qu’en République Fédérale d’Allemagne dont nous ne bénéficions pas en France : je pense aux Eros centers par exemple. Voulez-vous que nous en installions en France ? Cela ferait également rentrer des devises ? Vous rendez-vous compte du niveau auquel vous placez la morale ? »

89Insistant, quant à lui, sur le caractère scandaleux de dispositions destinées à défendre les intérêts des patrons de casino alors même que des mesures jugées beaucoup plus urgentes devraient être prises pour réduire les inégalités sociales, Paul Chomat, député communiste de la Loire, conclura ainsi son intervention [73] :

90

« Il existe une morale politique, que bafoue le cynisme de cette proposition. Il est indigne de l’Assemblée nationale française de discuter d’un tel texte alors que des millions de gens connaissent les plus grandes difficultés d’existence. »

91Son opinion sera partagée par un autre membre de son groupe politique, Daniel Le Meur (député de l’Aisne), qui, une fois de plus, rappellera [74] :

92

« Pour des raisons de morale, les députés communistes sont hostiles à l’extension des lieux d’implantation et des activités des casinos. »

93Pour parer ces critiques, le Gouvernement et la majorité s’appliqueront à dénoncer le caractère intenable de la position dans laquelle se trouvent ceux qui les énoncent. Ainsi, le député UDF Léonce Deprez s’étonnera de voir le groupe socialiste de l’Assemblée nationale s’opposer à des mesures visant à dynamiser le secteur touristique français par la relance de l’activité des casinos alors que certains de ses membres ont pu être amenés localement à prendre des initiatives allant dans ce sens. Le cas de Christian Goux (alors député socialiste du Var) sera cité : maire de Bandol, il avait pris la décision de procéder à la réouverture du casino de cette ville « en insistant sur l’aspect économique qu’un casino revêt pour une station et sur la nécessité de permettre au casino de Bandol de vivre » [75].

94Le ministre Yves Galland soulignera, quant à lui, le caractère spécieux de l’argumentation socialiste stigmatisant les dangers que risqueraient d’occasionner les machines à sous pour les citoyens les moins nantis. Il fustigera notamment toute l’hypocrisie des propos du député Jean-Pierre Michel en lui rappelant que les gouvernements de Pierre Mauroy et de Laurent Fabius avaient laissé proliférer une quantité considérable de jeux en France auxquels s’adonne régulièrement cette catégorie de la population [76] :

95

« Le 8 octobre 1981, le pari-quinté est devenu hebdomadaire alors qu’il était d’une fréquence beaucoup plus irrégulière ; le 3 janvier 1982, le pari-super couplé s’est transformé en pari trio urbain ; le 18 septembre 1985 a été créé le pari Derby […]. Dans le domaine des loteries […] on a assisté les 7 et 10 mars 1984 à l’organisation du premier tirage du loto national et à la création du bonus ; le 30 juin 1984, à la création du super bonus ; les 17 et 19 avril 1985, aux premiers tirages d’un loto sportif […] lequel a connu peu de succès, ce qui a entraîné sa modification en concours de pronostics de football ; et le 11 septembre 1985, au premier tirage de la loterie instantanée qui s’appelle également tac-o-tac. Aussi, monsieur Michel, en matière de jeux, de loterie, de courses de chevaux, qui s’adresse à la clientèle moyenne en particulier, il est des leçons de morale qu’il faut donner avec précaution et en tout cas pas à ce Gouvernement. »

96Afin de faire ressortir le caractère paradoxal du point de vue défendu par Jacqueline Fraysse-Cazalis, c’est encore Louis Virapoullé (sénateur UDF de la Réunion) qui lui indiquera : « Le plus grand fabricant de machines à sous de France métropolitaine est un conseiller municipal communiste [77]. » À l’Assemblée nationale, le discours moralisateur du député communiste Paul Chomat sera surtout condamné par Louise Moreau, député-maire de Mandelieu, qui s’ingéniera à montrer combien les bénéfices dégagés par les casinos situés sur la Côte d’Azur profitent de manière directe ou indirecte aux familles les plus démunies [78] :

97

« Grâce à mon casino, j’ai pu l’année dernière, payer trois semaines de vacances à quarante enfants de ma commune […]. Dans une petite ville comme Bandol, le prélèvement sur les jeux au bénéfice de la commune est de 280 millions de centimes et le loyer payé par le casino de 60 millions de centimes, soit au total 340 millions de centimes. Le budget total de la commune est de 1,2 milliard de centimes. Si le casino n’existait plus, il faudrait augmenter les impôts locaux de 30 % ».

98Il convient enfin de signaler que le Front national ne restera pas neutre dans ce débat. Les élus du parti de Jean-Marie Le Pen soutiendront l’action du Gouvernement en prenant le soin de préciser, par la voix du député des Alpes-Maritimes Albert Peyron [79] :

99

« En ce qui concerne la moralisation de ces machines à sous, il vaut mieux, à notre avis, réglementer pour pouvoir contrôler, plutôt que de laisser ce secteur dans l’ombre à la merci de quelques bandes organisées. Force est de constater que, si la prostitution avait été réglementée et contrôlée, nous n’aurions pas connu l’épidémie de Sida que subit actuellement notre pays […]. Si l’on veut moraliser, il nous paraîtrait plus urgent, pour notre part, de commencer par moraliser la vie publique […]. Dans une société qui prend en charge l’infanticide dans le ventre des mères, l’objection de moralité est très mal venue. »

Conclusion

100Lors des débats parlementaires qui se sont déroulés au cours des années 1980, une idée a souvent été évoquée : la mise en place des machines à sous dans les casinos constituerait un moyen de mieux contrôler celles qui, implantées dans d’autres lieux, sont utilisées d’une manière illicite.

101Force est de constater que l’adoption de la loi du 5 mai 1987 n’a aucunement fait cesser l’exploitation des machines à sous clandestines et n’a pas permis aux services étatiques de contenir plus aisément leur essor. Relatant les saisies régulières dont ces appareils font l’objet ainsi que les malversations auxquelles ils donnent lieu sur l’ensemble du territoire, une multitude d’articles publiés ces dernières années dans la presse nationale en apporte la preuve [80].

102S’attachant à juguler la progression de ce phénomène (en 1995, il a par exemple interdit l’usage des « distributeurs de confiserie » qui étaient fréquemment détournés de leur vocation pour être employés comme de véritables machines à sous [81]), le ministère de l’Intérieur livre d’ailleurs certains chiffres qui permettent d’évaluer son ampleur [82].

103Dans le même temps, les médias se sont de plus en plus fait l’écho des analyses développées sur l’addiction au jeu par A. Achour, M. Valleur, C. Bucher et J.-P. Martignoni-Hutin qui insistaient sur les caractéristiques intrinsèques des machines à sous et mettaient en garde contre les effets nocifs générés par la massification et la démocratisation de ces appareils [83]. Certains de ces acteurs ont même décidé d’inciter l’État à agir. En effet, le 25 juin 2001, une initiative a été prise par J.-P. Martignoni-Hutin et C. Bucher : la publication dans Les Échos d’un « manifeste » qui, intitulé « Prolifération des jeux d’argent, misère de la recherche », appelait à la création d’un Observatoire national des pratiques ludiques. Quelques mois plus tard, cette initiative s’est accompagnée de la publication d’un second article dans la revue Cahier Espaces[84] : « Pour la création d’un observatoire national des pratiques ludiques ». Cet article au contenu similaire à celui du texte de juin 2001 était signé par les mêmes auteurs, mais aussi par M. Valleur et F. Freundlich (historien travaillant sur le jeu).

104La promotion d’un tel Observatoire avait pour objectif de sensibiliser les pouvoirs publics sur la nécessité de mettre en place en France une politique des jeux. Aux yeux de ses promoteurs, l’instauration de cet Observatoire apparaissait impérative non seulement en raison de l’extension du parc des machines à sous des casinotiers mais aussi, plus généralement, du fait du succès grandissant rencontré par un nombre croissant de jeux de hasard (y compris sur internet) susceptibles d’engendrer de multiples conséquences préjudiciables pour les individus s’y adonnant. L’idée suggérée aux autorités était donc d’œuvrer en faveur de la création d’une telle institution qui aurait été amenée à devenir le véritable pivot d’une politique des jeux en initiant des recherches, en contribuant à la diffusion de données objectives ou encore en conduisant des actions de nature préventive.

105Malgré l’importance des questions qu’elle soulevait et des enjeux auxquels elle entendait s’intéresser, cette démarche n’a pas produit l’effet escompté par ses initiateurs. Seul le sénateur Trucy en cautionnera le principe dans son rapport de 2002 intitulé Les jeux de hasard et d’argent en France : l’État croupier, le Parlement croupion ?, mais son soutien n’aura aucune incidence concrète. Face à l’absence de réaction forte de la part des instances étatiques, J.-P. Martignoni-Hutin, C. Bucher et M. Valleur n’ont cependant pas renoncé à leur projet. Afin de réaffirmer leur détermination et d’inciter les autorités à prendre en considération leurs revendications, ils ont, de manière très symbolique, constitué, en septembre 2003, une association portant le nom d’« Observatoire des jeux » [85]. L’objectif affiché de cette association visait, une nouvelle fois, à contribuer à l’émergence et à la conduite d’une véritable politique des jeux [86] en interpellant les pouvoirs publics. J.-P. Martignoni-Hutin indiquera que, devant la passivité de l’État, cet Observatoire visait à « combler une lacune et relancer un débat qui tarde trop à s’organiser » [87]. M. Valleur tiendra le même discours : accusant l’État de « n’avoir rien vu venir » en matière de dépendance au jeu, il précisera que la création de cet Observatoire avait pour but de « susciter son intérêt sur un sujet qu’il délaisse » [88]. D’ailleurs, les membres de l’association avaient, de manière délibérée, veillé à rédiger ses statuts de manière à responsabiliser les autorités et à les pousser à agir [89]. De l’aveu même de M. Valleur :

106

« Ce qui devait être quelque chose de déclaratif et susciter une étincelle a échoué… L’Observatoire des jeux existe toujours, mais son appellation est pompeuse car c’est actuellement une structure creuse [90]. »

107Selon lui, il ne serait pourtant pas difficile de poursuivre les objectifs ayant sous-tendu la création de l’Observatoire des jeux s’il existait une réelle volonté politique prenant la forme d’une impulsion et d’une coordination à l’échelon interministériel.

108Force est cependant de constater que, du fait de cette absence de coordination gouvernementale, les réponses publiques tardives apportées au problème du jeu compulsif s’opèrent de manière sectorisée. Ainsi, alors que le ministère de l’Intérieur œuvre en faveur de l’instauration des contrôles d’identité à l’entrée des salles des machines à sous des casinos [91], le ministère de l’Économie vient, dans un décret de février 2006 [92], de renforcer les contraintes pesant sur la Française des Jeux en lui imposant « d’encadrer la consommation de jeux afin de prévenir les phénomènes de dépendance » et en instituant un « comité consultatif pour la mise en œuvre de la politique d’encadrement des jeux et du jeu responsable » [93]. Ce décret a notamment été adopté en vue de faire face à l’arrêt Gambelli (2003) de la Cour européenne de justice qui subordonne la restriction étatique de l’offre de jeu en provenance de pays tiers à la mise en œuvre d’une politique de canalisation du jeu [94].

109Si ce décret marque une réelle évolution dans la mesure où l’État reconnaît pour la première fois que les casinos (et en particulier les machines à sous) ne sont plus les seuls à être concernés par des mesures relatives à l’addiction, il ne constitue pas forcément une étape décisive vers un traitement coordonné de cet enjeu par les pouvoirs publics tant les rapports entre les différents opérateurs de jeux se sont « tendus » ces dernières années.

110En effet, ces opérateurs sont entrés dans une concurrence féroce en termes de parts de marché et les conflits d’intérêts qui les opposent semblent peu propices à l’émergence d’une solution négociée en matière de prévention du jeu pathologique [95] impliquant forcément des « concessions » contraires à leurs logiques financières dont profite aussi directement l’État [96]. Ainsi, si les casinotiers (mais aussi la presse [97]) ont, de manière récurrente, stigmatisé les effets délétères d’un jeu comme le Rapido développé par la Française des Jeux, le directeur de cette dernière rappelle qu’il ne joue qu’un rôle mineur dans la croissance du chiffre d’affaire de cette entreprise et précise : « La question de la dépendance est désormais posée. Nous ne l’observons pas de manière statistique. Le comportement moyen du joueur est raisonnable [98]. »

Bibliographie

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Mots-clés éditeurs : politique, histoire, pouvoirs publics, jeu pathologique, législation, France

Mise en ligne 01/01/2008

https://doi.org/10.3917/psyt.133.0117

Notes

  • [1]
    Ainsi que le rappelle l’auteur, ce jeu « consiste à propulser et à faire circuler des billes en acier dans un billard vertical afin de produire des combinaisons gagnantes, où le joueur peut être comparé à “Sisyphe roulant sa pierre d’impiété” et où la chance du gain reste plus qu’hasardeuse » (« Japon : le marché du hasard » – In Futuribles, 231, mai 1998).
  • [2]
    « Las Vegas au pays de Don Quichotte » – In Courrier International, 491, 30 mars-5 avril 2000.
  • [3]
    Dépêche AFP Général, International, 21 février 2002.
  • [4]
    Cf. Fabrice Nodé-Langlois : « Moscou veut s’attaquer à ses bandits manchots », in Le Figaro, 17 mars 2006.
  • [5]
    Intitulé « Les relations entre les collectivités locales et les casinos », le paragraphe 1 du chapitre V du rapport public de la Cour des comptes pour l’année 2001 (Éditions des Journaux Officiels, deuxième partie, observations des juridictions financières, janvier 2002) souligne l’importance de l’essor qu’ont récemment connu les casinos français du fait de l’implantation des machines à sous dans leurs enceintes. Publié en 2002, le rapport parlementaire « Les jeux de hasard et d’argent en France : l’État croupier, le Parlement croupion ? » du sénateur François Trucy dresse un constat identique (Sénat, JO, Rapport n° 223, session ordinaire de 2001-2002, annexe au procès-verbal de la séance du 13 février 2002).
  • [6]
    Chiffres du service « audit » de la Sous-Direction des Courses et des Jeux (Direction Centrale des Renseignements Généraux).
  • [7]
    Le Produit Brut des Jeux des casinos est constitué du Produit Brut des jeux de tables traditionnels et de celui des machines à sous. Il représente la somme que tous les casinos encaissent après avoir redistribué les gains aux joueurs, mais avant les différentes taxations dont elles font l’objet.
  • [8]
    Sur ce point, cf. le rapport n° 3320 fait par le député Didier Migaud au nom de la commission des finances de l’Assemblée nationale sur le projet (n° 3262) de loi de finances pour 2002, Assemblée nationale, JO, 11e législature, 11 octobre 2001, p. 169-175.
  • [9]
    Cf. notamment Nathalie Conte et Christine Lagoutte, « La guerre des casinos », in Le Figaro, 8 juin 1998, et Pascal Ceaux, « Les casinos tentent de conquérir le centre des grandes villes », in Le Monde, 17 septembre 1999.
  • [10]
    Propos d’Armelle Achour repris dans l’article de Jean-Michel Decugis : « Les nouveaux drogués du jeu », in Le Point, 28 juin 2002.
  • [11]
    Cf. Jean-Michel Normand, « “Accros” aux machines à sous », in Le Monde, 16 avril 2003.
  • [12]
    « SOS joueurs », in Le Républicain Lorrain, 13 janvier 2006.
  • [13]
    Actuellement chef de service, Centre médical Marmottan à Paris.
  • [14]
    Psychiatre, Centre hospitalier, Jury-les-Metz.
  • [15]
    Revue Psychotropes, vol. 11, n° 2, 2005.
  • [16]
    Pour justifier son entreprise de prohibition, la préfecture de Police de Paris se réfère au contenu des deux premiers articles d’une loi adoptée le 21 mai 1836 dont l’objet était de préciser certaines dispositions de l’article 410 du Code pénal établissant une interdiction générale et absolue en matière de jeux publics. À la même époque, la préfecture de Police de Paris évoque aussi régulièrement l’Ordonnance n° 25 du 20 juillet 1894 qui, rédigée par le préfet de Police Lépine, visait à bannir certaines formes de jeux. Sur cette question et, plus généralement, sur la réglementation relative au jeu en France depuis l’Ancien Régime, cf. notamment l’ouvrage de Henri Bigeard (avocat à la Cour d’appel de Paris), intitulé De la réglementation des jeux publics par l’autorité municipale, Angers, G. Grassin Imprimeur-Éditeur, 1911, p. 18-42.
  • [17]
    Cette tolérance est notamment prévue dans une circulaire du 22 juin 1909 que le ministre de l’Intérieur Georges Clémenceau adresse à tous les préfets, au préfet de Police de Paris ainsi qu’au Gouverneur général de l’Algérie. Elle est même rapidement « légalisée » par le Parlement lorsqu’il adopte l’article 39 de la loi de finances du 8 avril 1910.
  • [18]
    Cette question est notamment au cœur d’une proposition de loi présentée par Joseph Pourquery de Boisserin (député radical-socialiste du Vaucluse) en 1913, cf. JO, Chambre des députés, proposition n° 2709, 10e législature, session de 1913, annexe au procès-verbal de la séance du 14 mai 1913.
  • [19]
    Cf. JO du 1er septembre 1937, p. 10054. Avec ce décret, l’utilisation de toutes ces machines peut, dorénavant, comme pour les loteries, faire l’objet des sanctions prévues par les articles suivants du Code pénal : article R. 30-5° (contravention du fait de l’installation des appareils), article 410 (peines frappant le propriétaire de l’appareil et celui qui le met à disposition du public dans son établissement) et 405 (délit d’escroquerie dans le cas où le mécanisme de l’appareil a été intentionnellement « truqué »).
  • [20]
    « Les machines à sous semblaient un lointain souvenir sauf en quelques endroits où des tolérances plus ou moins occultes les laissaient exercer leur charme. On en vit un bon nombre sur Bordeaux, sur Marseille et en Dordogne, affirmant leur légalité suite à un arrêt du Conseil d’État du 21 février 1944 et à un jugement du tribunal de Bordeaux du 30 avril 1945 qui allaient en leur faveur », ibid., p. 14.
  • [21]
    Article de Didier Lemaire : « “Jackpots” : interdiction totale », in Le Parisien du 21 avril 1983.
  • [22]
    Rapport n° 1479, Assemblée nationale, JO, seconde session ordinaire de 1982-1983, annexe au procès-verbal de la séance du 5 mai 1983, p. 2.
  • [23]
    Au début des années 1980, ce processus est notamment renforcé par la baisse du prix d’achat de ces machines. En mai 1983, Gérard Houteer signale qu’il se situerait « aux environs de 18 000 francs pour un jackpot et de 12 000 francs pour un poker-vidéo », cf. Assemblée nationale, JO, débats, deuxième séance du 6 mai 1983, p. 945.
  • [24]
    Au Sénat : Francis Palmero (question n° 32598 au JO du 18 janvier 1980 et question écrite n° 5410 au JO du 20 avril 1982) ; Henri Caillavet (question n° 4402 au JO du 18 février 1982) et Paul Girod (question n° 6443 au JO du 11 juin 1982). À l’Assemblée nationale : Jean-Paul Planchou (question n° 4969 au JO du 9 novembre 1981) ; Jean Le Gars (question n° 12748 au JO du 19 avril 1982) ; Gabriel Kaspereit (question n° 12880 au JO du 19 avril 1982 et question n° 16651 au JO du 5 juillet 1982) ; Jean-Claude Dessein (question n° 14683 au JO du 24 mai 1982) ; Georges Mesmin (question n° 15604 au JO du 7 juin 1982) et Jean Rigal (question n° 16896 au JO du 5 juillet 1982).
  • [25]
    « L’assassinat de Michel Bajard, placier de machines pour le milieu lyonnais ; l’exécution de Zerbini sur le parking du casino de Bandol : il était placier dans la région marseillaise. À Draguignan, il y a un an, une fusillade a éclaté (sans faire de victimes) dans les rues entre placiers locaux et “collègues” venus de Marseille. À Lyon, encore, une société d’exploitation de machines a été victime d’un attentat à l’explosif. » (In Le Parisien, 21 avril 1983.)
  • [26]
    « Le préfet a pris, vendredi dernier, un arrêté prohibant l’exploitation des machines “fonctionnant au moyen d’un enjeu et reposant sur l’adresse et le hasard”. M. Gaston Deferre, le député maire, a pris à son tour un arrêté municipal allant dans le même sens. Par ailleurs, quinze inculpations pour infraction à la législation des jeux ont été prononcées la semaine dernière, visant le gérant d’une société de location de ces machines à sous et des patrons de bars où ces jeux étaient installés. » (Thierry de Cabarrus : « Les “Las Vegas” de quartier », in Le Parisien, 28 février 1980.)
  • [27]
    Question écrite n° 10041 publiée au JO du 10 février 1983.
  • [28]
    « En plus de ces inconvénients évidents sur le plan social, cette activité fructueuse a bien évidemment intéressé le milieu qui y trouve une source de financement présentant peu de risques. C’est ainsi que des revendeurs et exploitants peu scrupuleux établissent leur empire sur les débits de boissons, en y imposant, souvent par la menace, ces appareils à parties multiples. De nombreux règlements de compte peuvent en effet être attribués à la lutte d’influence pour le contrôle des machines à sous. » (Sénat, JO, débats, séance du 15 juin 1983, p. 1633.)
  • [29]
    Le premier parlementaire à s’être inquiété de cette situation est Gabriel Kaspereit (député RPR de la septième circonscription de Paris), comme le montre cet extrait de sa question écrite n° 16932 publiée au JO du 2 juin 1979 dans laquelle il « rappelle à M. le ministre de l’Intérieur qu’il l’avait saisi par lettre, dès le 22 juin 1977, du problème posé par la réapparition en France de “machines à sous” qui sont mises à la disposition du public dans certains débits de boissons. Cette situation est préoccupante car elle constitue une violation des dispositions […] qui proscrivent l’installation dans les lieux publics de tout appareil distributeur d’argent ou de jetons de consommation. Informé par lettres des 22 juillet 1977 et 19 juin 1978 de ce que les services du ministère de l’Intérieur avaient mis ce problème à l’étude, l’auteur de la présente question apprenait le 4 octobre 1978 que de nouveaux délais d’examen s’avéraient nécessaires, le contrôle de l’importation des appareils en cause devant être étudié dans le cadre des accords existant entre les différents pays de la Communauté européenne ».
  • [30]
    Quelques mois plus tard, le député socialiste du Calvados Louis Mexandeau soutiendra d’ailleurs les revendications de ces exploitants d’appareils de jeu qui s’estiment lésés, cf. sa question écrite n° 16140 posée au ministre de l’Intérieur et publiée au JO du 12 mai 1979.
  • [31]
    Pour une critique de cette mesure fiscale présentée comme néfaste car n’établissant aucune distinction entre les communes rurales et urbaines, cf. notamment la question orale posée au ministre de l’Économie et des Finances par le sénateur RPR du Doubs Louis Souvet, JO, Sénat, séance du 15 octobre 1982, p. 4580-4581.
  • [32]
    Cf. sa question écrite n° 6443 au JO du 11 juin 1982.
  • [33]
    JO, Sénat, débats, séance du 30 juin 1983, p. 2161.
  • [34]
    Proposition de loi n° 173, Sénat, JO, première session extraordinaire de 1982-1983, rattachée pour ordre au procès-verbal de la séance du 21 décembre 1982.
  • [35]
    Cf. Assemblée nationale, JO, septième législature, seconde session ordinaire de 1982-1983, annexe au procès-verbal de la séance du 22 avril 1983.
  • [36]
    Cf. notamment le rapport n° 1125 fait sur cette proposition de loi par la commission des lois constitutionnelles de l’Assemblée nationale, Assemblée nationale, JO, sixième législature, seconde session ordinaire de 1978-1979, annexe au procès-verbal de la séance du 13 juin 1979.
  • [37]
    « Au ministère de l’Intérieur, on affirme que ce n’est pas du ressort de la police des courses et des jeux. Composée de 75 fonctionnaires, cette dernière a déjà assez de travail avec le contrôle de 168 casinos et de tous les hippodromes. C’est donc à la police municipale et aux maires d’agir en fonction des situations locales », peut-on lire dans Le Parisien du 28 février 1980, op. cit.
  • [38]
    « Mais comment réagir ? Le flagrant délit dans ce domaine relève du rêve. Seule une modification de la loi – interdisant totalement les machines à sous ou, au contraire, les autorisant sans restriction – pourrait changer les choses. En attendant, les policiers ne peuvent que déclencher des opérations “coup-de-poing” un peu au hasard, ici ou là, et sans espérer faire “sauter la caisse”. » Rédigées dans le journal L’Aurore en juillet 1981 (article intitulé « Haro sur les “jackpots” »), ces quelques lignes seront, par la suite, particulièrement bien illustrées par les propos du député communiste des Hauts-de-Seine Guy Ducoloné qui, à l’Assemblée nationale, mettront en évidence l’ampleur de l’inefficacité des actions conduites par les forces de l’ordre dans la capitale : « L’existence du flagrant délit nécessite le constat du versement illicite des gains. Or la pratique policière et les statistiques judiciaires ont montré l’inadéquation d’une telle exigence. C’est ainsi qu’aucune infraction n’a été constatée sur les 2 730 contrôles opérés en 1982 par la brigade des jeux de Paris. À l’évidence, la maille du filet est trop large. » (Assemblée nationale, JO, débats, séance du 6 mai 1983, p. 947.)
  • [39]
    Cf. JO, 13 juillet 1983, p. 2154.
  • [40]
    En dehors de quelques exceptions accordées à certaines communes disposant déjà d’un casino, l’ouverture et l’exploitation de ces établissements situés dans des stations classées balnéaires, thermales ou climatiques ont été autorisées, à titre dérogatoire aux dispositions du Code pénal interdisant les jeux de hasard, par la loi du 15 juin 1907. Cf. JO du 16 juin 1907.
  • [41]
    Cet amendement des sénateurs Pierre Salvi et Richard Pouille s’inspirait lui-même d’une initiative prise peu de temps auparavant par Bernard Marie, député-maire de Biarritz, devant la commission des finances de l’Assemblée nationale. Cf. Sénat, JO, débats, séance du 29 mai 1980, p. 2201. L’idée d’implanter les machines à sous dans les casinos avait aussi été évoquée par le syndicat regroupant les propriétaires de ces établissements dans un livre blanc publié en 1979.
  • [42]
    Alors président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République de l’Assemblée nationale, Raymond Forni avait précisé en mai 1983 « qu’il ne verrait pas, quant à lui, de grave inconvénient à l’installation des machines à sous dans les casinos ». Quelques jours plus tard, cette prise de position contraire à l’avis de cette commission lui inspirera le commentaire suivant : « La commission a tranché et, bien entendu, je m’inclinerai. Mais certains d’entre nous considèrent que le trouble risque d’être plus grand pour l’ordre public si la suppression est totale sur l’ensemble du territoire national que si l’on maintient une soupape de sécurité dans les casinos. »
  • [43]
    Assemblée nationale, JO, débats, deuxième séance du 22 juin 1983, p. 2997.
  • [44]
    Sénat, JO, débats, séance du 27 juin 1983, p. 2007.
  • [45]
    L’installation des machines à sous dans l’enceinte des casinos est encore présentée comme salutaire car elle permettrait d’éviter que les mineurs y aient accès.
  • [46]
    Le dépôt de bilan du casino d’Hendaye est notamment décrit comme la dramatique conséquence de la conjonction de ces deux phénomènes, cf. Sénat, JO, débats, séance du 27 juin 1983, p. 2010.
  • [47]
    Cf. Sénat, JO, débats, séance du 29 mai 1980, p. 2202.
  • [48]
    « Il existe, dans les territoires d’outre-mer, un casino qui est autorisé à exploiter les machines à sous : c’est le casino Royal-Nouméa. Le produit des jeux s’y élève à dix-huit millions d’anciens francs, dont plus de neuf millions, c’est-à-dire la moitié, ont été réalisés au moyen des machines à sous. » (Sénat, JO, débats, séance du 15 juin 1983, p. 1638.)
  • [49]
    Cf. Sénat, JO, débats, séance du 30 juin 1983, p. 2152.
  • [50]
    Cf. Sénat, JO, débats, séance du 30 juin 1983, p. 2163.
  • [51]
    Sénat, JO, débats, séance du 29 mai 1980, p. 2203.
  • [52]
    Ibid. p. 2204.
  • [53]
    Cf. notamment l’intervention de Georgina Dufoix, Sénat, JO, débats, séance du 15 juin 1983, p. 1639.
  • [54]
    Cf. Sénat, JO, débats, séance du 27 juin 1983, p. 2010-2011.
  • [55]
    Assemblée nationale, JO, débats, deuxième séance du 22 juin 1983, p. 2998. Ce type de discours se rapproche beaucoup de ceux mis en avant par certains hommes politiques à partir de 1913 pour réclamer la suppression des machines redistribuant des jetons de consommation. Ainsi, comme le soulignait par exemple à cette époque Jean-Joseph Molle (député de l’Hérault inscrit au groupe de l’Union républicaine socialiste), très nombreux sont les individus qui « jouent de petites sommes, mais ils n’en arrivent pas moins, par des mises répétées, à perdre leur salaire et le pain de leur famille », JO, débats, Chambre des députés, séance du 22 mai 1913, p. 1512.
  • [56]
    « Lorsque l’on mesure le degré d’anonymat des salles, où des rangées de joueurs, dans une solitude totale – les images de films sur Las Vegas en portent témoignage – se contentent de presser un bouton pour rechercher une combinaison gagnante, on ne peut que s’inquiéter, et regretter – est-ce de la nostalgie ? – le climat de grande sociabilité de nos anciens cafés. D’un point de vue culturel, les modes de loisir ne sont pas neutres, et les jeux de hasard véhiculent une idéologie individualiste qui n’a d’autres valeurs que l’argent. Dès lors, ce projet de loi a une portée considérable puisqu’il sous-tend une volonté de construire une société de solidarité propice à l’enrichissement humain. » (Intervention du député des Hauts-de-Seine Guy Ducoloné, Assemblée nationale, JO, débats, deuxième séance du 6 mai 1983, p. 946-947.)
  • [57]
    « À compter du 1er janvier 1988, l’ensemble des dispositions applicables aux communes classées stations balnéaires, thermales ou climatiques sont étendues aux villes ou stations touristiques constituant la ville principale d’une agglomération de plus de 500 000 habitants et participant pour plus de 40 %, le cas échéant avec d’autres collectivités territoriales, au fonctionnement d’un centre dramatique national, d’un orchestre
    national et d’un théâtre d’opéra présentant en saison une activité régulière d’au moins vingt représentations lyriques », JO, 6 janvier 1988, p. 216. Cette disposition résulte de l’adoption d’un amendement déposé par Dominique Perben et Pierre Mazeaud qui ne fera l’objet d’aucune véritable discussion au Parlement. Dominique Perben se contente de déclarer : « Il s’agit d’autoriser certaines grandes villes qui font un effort dans le domaine culturel et dans le domaine de leur promotion à bénéficier d’un label qui, je le signale, n’a pas de conséquence financière sur les dotations communales ». Quant à lui, le ministre chargé des collectivités locales précise : « Cet amendement est effectivement neutre, en particulier au regard de la dotation touristique. C’est pourquoi le Gouvernement s’en remet à la sagesse de l’Assemblée », Assemblée nationale, débats, JO., 1re séance du 16 décembre 1987, p. 7511.
  • [58]
    Comme le précise par exemple Léonce Deprez (député du Pas-de-Calais apparenté UDF) dans sa proposition de loi n° 512 tendant à modifier certaines dispositions relatives aux casinos autorisés dont l’examen conduira à l’adoption de la loi du 5 mai 1987, Assemblée nationale, JO, huitième législature, première session ordinaire de 1986-1987, annexe au procès-verbal de la séance du 4 décembre 1986.
  • [59]
    Ainsi, dans un rapport rédigé au nom de la commission des lois constitutionnelles de l’Assemblée nationale, Henri Cuq (député RPR de l’Ariège) souligne : « Au cours des quinze dernières années, le Produit Brut total des Jeux de casinos a diminué de 19,6 % en francs constants, enregistrant même, au cours du dernier exercice comptable de 1985-1986, achevé au 31 octobre, une baisse historique de 14,1 %. Une analyse financière récente de la police des jeux montre que six casinos sont soumis à une procédure de redressement judiciaire, tandis qu’un casino sur trois a des difficultés financières et est susceptible de se trouver à court terme en état de cessation de paiement. » (Assemblée nationale, Rapport n° 565, JO, huitième législature, première session ordinaire de 1986-1987, annexe au procès-verbal de la séance du 17 décembre 1986.)
  • [60]
    Sénat, rapport n° 190, JO, huitième législature, seconde session ordinaire de 1986-1987, annexe au procès-verbal de la séance du 22 avril 1987.
  • [61]
    Sénat, débats, JO, séance du 28 avril 1987, p. 507.
  • [62]
    Ibid., p. 509.
  • [63]
    Cet article prévoit que l’État calculera dorénavant son prélèvement non plus sur 75 % mais sur 65 % du Produit Brut des Jeux des casinos. Sur les débats qui entourent le vote de cette disposition, cf. Assemblée nationale, débats, JO, troisième séance du 11 décembre 1986, p. 7560-7561.
  • [64]
    Cf. sur ce point le paragraphe IV de l’article 15 de la loi n° 86-1019 du 9 septembre 1986 consacrée à la lutte contre la délinquance et la criminalité.
  • [65]
    Cf. JO, Assemblée nationale, Rapport n° 565, op. cit.
  • [66]
    Créée en 1934, cette commission composée d’élus et de hauts fonctionnaires a pour mission de se prononcer sur les demandes d’autorisation et de renouvellement de jeux dans les casinos afin d’éclairer les décisions du ministre de l’Intérieur.
  • [67]
    « Aujourd’hui on nous demande de discuter une proposition de loi signée par : M. Léonce Deprez, maire du Touquet ; Mme Louise Moreau, maire de Mandelieu ; M. Olivier Guichard, maire de La Baule ; M. Jacques Lacarin, maire de Vichy ; M. Arthur Paecht, maire de Bandol ; M. Emmanuel Aubert, maire de Menton […] On croyait que les groupes de pression n’entraient plus dans l’hémicycle […]. On voit, à l’évidence, qu’ils sont ici présents et que vous en êtes, messieurs de la droite, les dignes représentants. C’est lamentable pour l’image de la représentation nationale. » (Assemblée nationale, débats, JO, 1re séance du 17 décembre 1986, p. 7721.)
  • [68]
    Ibid., p. 7722.
  • [69]
    Sénat, débats, JO, séance du 28 avril 1987, p. 514.
  • [70]
    Assemblée nationale, proposition de loi n° 112 tendant à interdire les jeux de hasard dans les casinos, neuvième législature, session de droit en application de l’article 12 de la constitution, annexe au procès-verbal de la séance du 6 juillet 1988.
  • [71]
    Cf. Sénat, débats, JO, séance du 28 avril 1987, p. 506.
  • [72]
    Ibid., p. 512.
  • [73]
    Assemblée nationale, débats, JO, 1re séance du 17 décembre 1986, p. 7726.
  • [74]
    Ibid.
  • [75]
    Assemblée nationale, débats, JO, 1re séance du 17 décembre 1986, p. 7723.
  • [76]
    Ibid., p. 7724.
  • [77]
    Sénat, débats, JO, séance du 28 avril 1987, p. 514.
  • [78]
    Assemblée nationale, débats, JO, 1re séance du 17 décembre 1986, p. 7727.
  • [79]
    Ibid., p. 7727-7728.
  • [80]
    Bien que longue, la liste suivante n’est cependant pas exhaustive :
    • Stéphane Marchand : « Machines à sous : la bataille du “Var West” », in Le Figaro, 27 juillet 1997 ;
    • Marc Pivois : « Abus coupables de machines à sous », in Libération, 3 mai 1998 ;
    • Marc Pivois : « Les bandits manchots au bistro », in Libération, 12 juillet 1998 ;
    • Christophe Cornevin : « Les lucratives combines des jeux clandestins », in Le Figaro, 6 octobre 1998 ;
    • « Des machines à sous fleurissent sur les trottoirs de Paris et dans les villes de province », in Le Figaro, 4 mai 1999 ;
    • Pascal Ceaux : « La guerre des machines à sous dans le milieu marseillais », in Le Monde, 17 septembre 1999 ;
    • Michel Henry : « Les gros sous et gros bras du “Chinois” de Marseille », in Libération, 16-17 octobre 1999 ;
    • François Caviglioli : « Les martyrs du bingo », in Le Nouvel Observateur, 24 février 2000 ;
    • « Machines à sous clandestines », in Le Figaro, 16 novembre 2001 ;
    • François Vignolle et Frédéric Vézard : « Le lieutenant du Belge tenait les machines à sous », in Le Parisien, 4 décembre 2002.
  • [81]
    L’utilisation de ces « distributeurs de confiserie » avait été tolérée par la loi n° 86-1019 du 9 septembre 1986. Les fraudes dont ils faisaient l’objet seront notamment dénoncées par les fabricants et exploitants des jeux d’amusement (cf. la question écrite n° 3352 posée par Georges Gruillot, Sénat, JO du 28 octobre 1993 et la question écrite n° 3521 posée par Jean Pourchet, Sénat, JO du 4 novembre 1993). Ces protestations conduiront le gouvernement à mettre fin à la dérogation dont bénéficiaient ces appareils par la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995 d’orientation et de programmation relative à la sécurité.
  • [82]
    « La section judiciaire de la Sous-Direction des Courses et Jeux de la Direction centrale des renseignements généraux mène différentes actions contre des réseaux d’exploitation illégale de machines à sous dans les débits de boisson. En 1997, son activité a été marquée par le démantèlement de plusieurs réseaux d’appareils de jeux de hasard prohibés, placés de manière clandestine dans des débits de boisson, dans le cadre d’enquêtes sur commission rogatoire : 280 machines à sous de type distributeurs alimentaires ont été saisies en juin et juillet de cette même année à Marseille et à Paris ; mise sous scellés de 60 bingos (appareils ressemblant à des flippers et exploités comme des machines à sous) dans les départements du Gard, du Vaucluse et des Bouches-du-Rhône ; saisine en liaison avec le service des douanes de Lyon de 160 machines à sous exploitées dans les bars à Lyon et dans la région Rhône-Alpes et arrestation des membres du réseau. En 1998, 205 bingos en provenance d’Espagne ont été saisis et le traitement de ce dossier, en collaboration avec la police judiciaire de Lille, a abouti à l’arrestation de membres du milieu lillois exploitant un réseau de machines à sous clandestines. Par ailleurs, dans le cadre d’une étude récente consacrée à la répression des machines à sous depuis 1995, la section judiciaire de la Sous-Direction des Courses et des Jeux a tenté de centraliser des indicateurs statistiques, non exhaustifs mais utiles à une connaissance générale du phénomène. Il en ressort que de 1995 à 1998 inclus, les actions menées par les différentes administrations concernées (douanes, gendarmerie, police) ont permis la saisie de 4 760 appareils. » (Extrait de la réponse fournie par le ministère de l’Intérieur à la question n° 30206 posée par le député Thierry Mariani, Assemblée nationale, JO, 26 juillet 1999, p. 4596-4597.)
  • [83]
    Cf. notamment les articles de presses suivants :
    • « 300 000 joueurs pathologiques en France », in Les Échos, 28 mai 1999 ;
    • « Une sorte de placement à risque », in Le Figaro, 17 janvier 2000 ;
    • Christian Bucher, « Extension du domaine de la dette », in Le Figaro, 15 février 2000 ;
    • Michaël Hajdenberg, « Jouer avec le jeu, une pathologie à l’étude », in Libération, 29 décembre 2003 ;
    • « Le budget des Français consacrés aux jeux d’argent a doublé en 25 ans », in Le Monde, 13 mai 2005.
  • [84]
    N° 70, septembre 2001.
  • [85]
    Le bureau de cette association est composée des membres suivants : « J.-P. Martignoni-Hutin (président), C. Bucher (vice-président), M. Valleur (vice-président) et Matthieu Vincent Beautsar (avocat qui assume la fonction de secrétaire trésorier).
  • [86]
    Cf. l’article de J.-P. Martignoni-Hutin, C. Bucher, M. Valleur et M. V. Beautsar, « La nécessité d’une réelle politique des jeux », Les Échos, 26 décembre 2003 et J.-P. Martignoni-Hutin, « Un observatoire pour une politique des jeux », Espaces, n° 210, décembre 2003.
  • [87]
    Propos recueillis dans Jean-Michel Décugis, « Joueurs en observation », Le Point, 21 novembre 2003.
  • [88]
    Propos publiés dans Marc Payet, « Un observatoire pour les fous du jeu », Le Parisien, 25 novembre 2003.
  • [89]
    « Les fondateurs sont convenus que la création par les pouvoirs publics d’un observatoire reprenant les missions qui sont actuellement dévolues à l’Observatoire des jeux emportera de plein droit sa dissolution. »
  • [90]
    Entretien avec Marc Valleur, hôpital Marmottan, 22 mars 2006.
  • [91]
    Le 5 janvier 2006 a été conclu entre le ministre de l’Intérieur Nicolas Sarkozy et « Casinos de France » et « Casinos modernes de France » un « protocole sur la promotion du jeu responsable » imposant les contrôles d’identité à l’entrée des casinos français. Cependant, il existe encore une « contrepartie » au volet « contrôle d’identité » prévu dans cet accord. En effet, l’État s’engage à supprimer le droit de timbre dont les joueurs devaient jusqu’alors s’acquitter pour pouvoir pénétrer dans les salles de jeux traditionnels. Du fait de cette suppression, ces salles pourront donc dorénavant ne plus être séparées de celles où sont installées les machines à sous. De plus, l’accord
    comporte aussi d’autres dispositions favorables aux casinos : allègement des démarches administratives pour les autorisations de jeu, assouplissement concernant l’organisation générale des établissements, possibilité de création de nouveaux jeux et adaptation du matériel.
  • [92]
    Décret n° 2006-174 du 17 février 2006 relatif à l’organisation et à l’exploitation des jeux de loterie autorisés par l’article 136 de la loi du 31 mai 1933 et par l’article 48 de la loi n° 94-1163 du 29 décembre 1994 et modifiant le décret n° 78-1067 du 9 novembre 1978, JO, 18 février 2006.
  • [93]
    Cf. notamment sur ce point Renée Carton, « Dealer honteux », Le Quotidien du médecin, 24 février 2006. Cf. aussi J.-P. Martignoni-Hutin qui s’interroge sur la sincérité de cette initiative étatique dans « France : le gouvernement met en place des règles pour encadrer les activités de la Française des jeux », http://www.toxicoquebec.com/actus/index.php?2006/04/09/1113-france-le-gouvernement-met-en-place-des-regles-pour-encadrer-les-activites-de-la-francaise-des-jeux.
  • [94]
    Pour une réflexion sur le décret du 17 février 2006 comme réponse à l’arrêt Gambelli, cf. notamment : http://www.droit-technologie.org/pda/actualite.asp?actu_id=1171.
  • [95]
    J.-P. Martignoni-Hutin rappelle qu’en 2004 devait se tenir au Sénat un colloque intitulé « Quelle politique pour les jeux d’argent et de hasard en France ? », mais qu’il a été annulé du fait du refus des représentants de la Française des Jeux et du Paris Mutuel Urbain d’y participer, in Psychotropes, op. cit., p. 77-78.
  • [96]
    L’Expansion souligne par exemple qu’en 2004, sur les deux milliards d’euros de chiffre d’affaires engendrés par le Rapido, « Bercy a récolté quelques 380 millions d’euros », « Le Rapido : un succès qui inquiète Bercy », 14 avril 2005.
  • [97]
    Cf. notamment : Jean-Michel Decugis : « Rapido : l’effet casino à portée de bistro » (Le Figaro, 21 avril 1999) ; Bernard Stiegler : « “Rapido”, l’assommoir contemporain » (Le Monde diplomatique, août 2000) ; Julien Félix et Henri Haget : « Les possédés du rapido » (L’Express, 9 mai 2005).
  • [98]
    Interview de Christophe Blanchard-Dignac : « Les règles du jeu », Les Échos, 13 mars 2006.
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