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Article de revue

Les modèles économiques des addictions

Pages 7 à 22

Introduction

1 Les rapports ministériels Roques (1998) et Maestracci (1999) sur la dangerosité des drogues et leurs modalités d’usage, les affaires de dopage et de toxicomanie dans les milieux sportifs de haut niveau, l’hyperconsommation de psychotropes et l’échec relatif de la loi de 1970, en France, représentent les signes avant-coureurs d’une remise en question salutaire de nos conceptions et pratiques face aux addictions. Nous allons être amenés à prendre en compte le fait que des addictions communes, quotidiennes, culturelles, comme l’alcoolisme et le tabagisme, ne sont pas moins dommageables pour l’individu et la société que les consommations d’héroïne, de cocaïne, d’amphétamines et autres drogues dites « dures ». La frontière, justement, entre drogues « dures » et « douces » est remise en question et nous devrons tirer la leçon de l’erreur qui consiste à rester centré sur le produit et la seule dialectique consommation-abstinence, au lieu de nous tourner vers la personne et ses environnements. Nous devrons très certainement aller au-delà des visions réductrices et interroger la pertinence de certains modèles médicaux de la toxicomanie qui veulent la réduire au seul rapport produit-cerveau suivant une métaphore « diabétique » (ou « de la dépression », selon son interprétation strictement pharmacologique). Dans cette nécessité, que nous aurons, à formuler de nouveaux modèles (Loonis, 1999,2001; Loonis, Peele, 2000; Loonis, Apter, 2000; Loonis, Apter, Sztulman, 2000) capables de prendre en compte la personne et ses environnements, les modèles économiques des addictions valent la peine d’être examinés.

Des micro aux macrothéories

2 Remettant en question tant les recherches sur l’animal que celles sur l’homme, Stanton Peele (1985) a depuis longtemps fait la démonstration que les addictions ne sont pas réductibles au strict rapport addictif entre un organisme et une substance (ou même une source de stimulations répétées). Les facteurs environnementaux ont une influence cruciale sur le comportement addictif, influence non seulement sur l’initialisation du comportement ou la tendance à la rechute, mais aussi sur le besoin compulsif de base à consommer une substance (Peele, Degrandpre, à paraître). Même du côté des neurobiologistes, les travaux sur la sensibilisation et la saillance incitatrice (incentive salience) de Robinson et Berridge (1993) mettent en lumière le rôle majeur des stimuli associés à la drogue comme facteurs de conditionnement et d’apprentissage, pouvant être pris en compte par les systèmes cérébraux de récompense et expliquer la plupart des phénomènes comportementaux liés aux addictions (craving, rechute, perte de contrôle, effet placebo…).

3 Pour Peele, la consommation de psychotropes chez l’homme dépend de plusieurs facteurs non biologiques : culturels, sociaux, situationnels, ritualistiques, développementaux, cognitifs et de personnalité. L’être humain n’est pas confronté aux drogues d’une façon mécanique, mais son rapport aux substances, comme aux activités compulsives à caractère addictif (boulimie, achats, travail, sexualité, jeux compulsifs…), est médiatisé par des variables de choix actifs, la liberté, la réversibilité des conduites, les valeurs et les autres motivations existentielles.

4 Plusieurs recherches ont permis de développer un modèle « d’économie comportementale » destiné à rendre compte de la consommation de substances psychoactives en tant que choix préférentiel, au même titre que n’importe quel autre choix de consommation (Bickel, DeGrandpre, Higgins, Hughes, 1990; Bickel, DeGrandpre, Higgins, 1993; Carroll, 1993; Hursch, 1993). Dans le cadre de ce modèle, sont pris en compte l’effort pour obtenir la drogue (travail accompli, coût) et les renforçateurs alternatifs (la possibilité de faire autre chose d’intéressant que de prendre de la drogue). Le rapport se trouve alors placé entre la drogue comme commodité économique et un organisme consommateur ayant une demande (qui est fonction du coût de la drogue) et une élasticité de sa consommation (selon le rapport disponibilité/coût des renforçateurs en compétition avec la drogue).

5 Un tel modèle permet de poser de nouvelles questions intéressantes : dans quelle mesure la consommation de drogue est-elle affectée par son coût (le coût ne concerne pas seulement le prix de la drogue, mais l’effort total pour l’obtenir)? La demande de drogue peut-elle être élastique ? Est-ce que la disponibilité d’importantes récompenses alternatives peut déprécier la réponse de prise de drogue, chez l’animal comme chez l’homme ? Quel équilibre dose/coût un organisme peut-il réaliser en fonction du rapport force/coût des renforçateurs en compétition avec la drogue ? De très nombreuses recherches ont étudié les conséquences du coût sur la consommation. Qu’il s’agisse de drogues psychoactives, ou d’autres renforçateurs comme la nourriture, l’élévation du coût entraîne toujours une baisse de la consommation. Cet effet est produit aussi bien chez l’animal (singes, pigeons) que chez l’homme (Bickel, DeGrandpre, Higgins, Hugues, 1990; DeGrandpre, Bickel, Hugues, Layng, Badger, 1993; Goldberg, 1973 ; Harrigan, Downs, 1978; Peden, Timberlake, 1984).

6 En terme d’économie comportementale, la préférence pour tel ou tel renforçateur dépend des doses disponibles et du coût pour consommer; mais de plus, la présence de renforçateurs alternatifs conditionne le choix exclusif sur tel ou tel autre renforçateur. Cela signifie bien que la consommation de drogue et les activités addictives en général ne sont pas seulement sous la dépendance de facteurs internes prédisposants (comme l’excès de souffrance psychique), mais que l’engagement dans l’activité addictive dépend aussi des conditions dans lesquelles un individu est confronté à un dramatique manque de variété dans ses possibilités d’addictions de la vie quotidienne (Loonis, 1997,1998).

7 Anderson (1995) souligne la nécessité de passer des microthéories aux macrothéories en matière de toxicomanie. Les premières fonctionnent à partir de quatre arguments :

  1. une idéologie de discrimination socioéconomique (les valeurs culturelles du groupe social le plus économiquement dominant sont supérieures aux valeurs des groupes économiquement plus faibles);
  2. une hégémonie idéologique du contrôle individuel et social (la classe dominante – on dit aussi « favorisée » – met en avant et cherche à imposer ses valeurs individualistes de l’autocontrôle et un modèle moral);
  3. un cautionnement scientifique des idéologies (les addictions sont expliquées, par exemple, comme un apprentissage social, une perte du contrôle social, un manque de conformité ou de maturité sociales, les valeurs dépravées d’une sous-culture, ou encore comme une « maladie »);
  4. l’ensemble du système sous-tendu par les microthéories est confirmé et entretenu par une législation répressive et une stigmatisation des consommateurs visés dans les classes défavorisées.

8 Pour Anderson, dans le cadre de ce qu’il propose d’appeler les macrothéories, il faut considérer le développement des sous-cultures de la drogue comme des « solutions » à la marginalisation générée par la culture dominante et ses prescriptions normatives étroites. Il s’agit, pour un certain nombre de catégories de population, de résoudre les problèmes posés par une position de classe sociale et économique. Ces problèmes vont dépendre de l’environnement socioculturel qui va dicter des choix économiques en fonction des limites imposées par cet environnement. Le déclin économique, le chômage, la précarité, l’exclusion, les crises de vie liées à la jeunesse ou à d’autres étapes difficiles du parcours de vie, peuvent ainsi conduire à des aménagements hédoniques et de régulation psychique et émotionnelle, où les substances psychotropes et d’autres activités compulsives à caractère addictif pourront prendre une place stratégique majeure.

9 Si l’opposition entre classes socioéconomiques présente bien quelques pertinences en ce qui concerne l’usage extrême de drogues illicites, selon le point de vue de la MILDT (Mission Interministérielle de Lutte contre la Drogue et la Toxicomanie, France), nous sommes aussi confrontés aux « usages sociaux des substances psychoactives » (Maestracci, 1999). Les drogues remplissent de multiples fonctions (automédication, dopage, « sociabilité », etc.) qui vont bien au-delà de la résolution de problèmes de classe « défavorisée ». Bien que nos connaissances soient encore très partielles dans ces secteurs (en France), de nombreux indicateurs montrent que les consommations concernent aussi les groupes sociaux aisés, la clientèle courante des médecins généralistes, les usagers occasionnels de drogues « dures ». Alcool, tabac, anxiolytiques, antidépresseurs, hypnotiques représentent des consommations addictives qui ne s’expliquent pas simplement par l’appartenance de classe. Si les classes défavorisées ont leurs propres difficultés à régler à coup de consommations addictives, les classes plus favorisées ont aussi leurs propres malaises à gérer (comme le stress, l’insécurité professionnelle, les conflits familiaux, les exigences de la compétition socioprofessionnelle…), sans compter que les unes et les autres classes ne sont pas exemptes de recherches récréatives de sensations plus ou moins fortes, d’états de conscience modifiés. Mais ici comme ailleurs, les facteurs internes sont insuffisants à expliquer l’ampleur et la généralisation de ces comportements et nous devons nous tourner vers les conditions environnementales.

Les fondements des modèles économiques

10 Les modèles économiques des addictions se distinguent nettement des modèles médicaux, neurobiologiques ou centrés sur la structure de la personnalité, par le fait qu’ils considèrent que les forces motivationnelles ultimes résident dans le contexte environnemental du comportement (Rachlin, 1997). Autant les modèles médicaux et physiologiques prennent appui sur la cause efficiente (un stimulus entraîne une réponse), autant les modèles économiques sont basés sur la cause finale (le comportement est rattaché à un programme qui poursuit un but) ils sont en cela téléologiques, dans le cadre d’une fonction d’utilité économique, ou d’un processus d’ajustement comportemental.

11 Les théories du choix sont à la base des modèles économiques entendus comme un ensemble de jeux stratégiques qui prennent place dans la personne (Frank, 1996; Winston, 1980). Il s’agit d’appliquer aux addictions ce que les économistes formalisent et interprètent, au niveau des comportements de consommation en général, comme des jeux de conflits qui se jouent entre différentes parties psychiques d’une personne. Ce « conflit psychique » ne possède qu’une lointaine parenté avec la dynamique des instances psychiques freudiennes (ça, moi, surmoi). Aux yeux des économistes, nous avons plutôt affaire à des « jeux internes » joués par des aspects rationnels et conscients de la personne. Pour Winston (1980), un individu est confronté à tout moment à deux fonctions utilitaires alternatives, des polarités motivationnelles opposées entre lesquelles il doit choisir, conception qui rejoint notre concept de « dialectique comportementale » (Loonis, 1997). Lee (1988) en vient à parler d’un équilibre écologique entre un « bon soi » et un « mauvais soi », à l’instar de l’équilibre proie/prédateur; tout comme Loewenstein (1995) parle du conflit entre les « facteurs viscéraux » et les « facteurs d’intérêt personnel perçus ». Ainsi, en matière d’économie comportementale, l’objet d’étude central est la dialectique consommer/ne pas consommer, car cette dialectique est au cœur d’un système économique quel qu’il soit. À partir de là, les différents modèles économiques qui se sont penchés sur le phénomène d’addiction ont cherché à analyser les facteurs pouvant donner lieu au choix quasi exclusif de « consommer » (consommer une substance psychotrope, ou « consommer » une activité compulsive).

12 Les tentatives de modélisation économique des addictions ont longtemps souffert de nombreux défauts, au rang desquels leur caractère particulièrement simpliste et spéculatif. Par exemple, dans la théorie de l’addiction relative (Premack, 1965; Rachlin et al., 1981; Rachlin, Burkhard, 1978), le découpage entre activités de consommation dites « habituation au coût » (le coût est une fonction directe de la consommation) et « sensibilisation au coût » (le coût est une fonction inverse de la consommation) et la réduction du système à un simple jeu de substitution entre ces deux types d’états, ne prenait pas en compte toute la complexité des phénomènes de consommation (une activité de consommation n’est jamais exclusivement et définitivement de type « habituation » ou « sensibilisation » et des activités des deux types peuvent être simultanées, annulant les possibilités de substitution). De même, dans leur concept de « demande non élastique » (une demande de consommation qui devient insensible au coût), qui prend appui sur le phénomène de tolérance physiologique à une substance consommée, Stigler et Becker (1977) ignorent encore le caractère souvent « élastique » de la demande de drogue et sa sensibilité au coût (Peele, 1985; Rachlin, 1997).

13 Les modèles économiques de l’addiction ont commencé à devenir plus précis et réalistes lorsque les chercheurs ne sont plus restés centrés sur la cause efficiente du « coût » en terme d’habituation, sensibilisation ou insensibilisation, mais ont pris en compte l’aspect téléologique des comportements de consommation. Dans leur théorie dite « de l’addiction rationnelle », Becker et Murphy (1990) décrivent deux types de comportements de consommation, correspondant à deux visées téléologiques différentes :

  1. le consommateur qui prend en compte les conséquences futures de l’addiction et qui les met en balance avec l’utilité actuelle de cette consommation;
  2. le consommateur dit « myope » qui ne voit pas au-delà de l’utilité présente, qui va donc suivre la voie de la facilité, celle de l’addiction sans frein.

14 C’est à partir de ce retour aux théories du choix que les modèles économiques des addictions ont pu pleinement se développer.

Les modèles économiques des addictions

15 Herrnstein et Vaughan (1980) ont tout d’abord approfondi le concept « d’allocation comportementale » en montrant que les addictions sont marquées par l’augmentation de l’utilité locale (à court terme), au détriment de l’utilité globale (à long terme) de la consommation, ce phénomène étant appelé « mélioration » (ou « voie de la facilité » – primerose path – Herrnstein, Prelec, 1992). Par exemple, l’utilité « locale » peut conduire à boire pour obtenir divers effets positifs résultants de l’intoxication alcoolique, tandis que l’utilité « globale » peut conduire à modérer la consommation d’alcool afin de préserver la santé à long terme. C’est la tendance à privilégier l’utilité « locale » qui est appelée mélioration, elle entraîne les comportements de consommation addictive; la tendance inverse, appelée « maximisation » (Herrnstein, Loewenstein, Prelec, Vaughan, 1993), privilégiant l’utilité « globale » de la consommation (ses conséquences à long terme).

16 Les auteurs expliquent le phénomène de mélioration qui entraîne les addictions en faisant appel à des processus de restructuration cognitive. Par exemple, dans le cas des soldats américains toxicomanes au Vietnam, qui sont redevenus abstinents pour 88% d’entre eux dès leur retour aux États-Unis (Robins et al., 1974,1980), c’est la contrainte à percevoir leur vie de combattants sur le court terme qui a pu favoriser les tendances méliorantes addictivogènes, alors que le retour au pays a permis d’accéder à nouveau à une vision de la vie à long terme, générant une orientation comportementale maximisante antiaddictive. Pour les auteurs, il y aurait un besoin (qu’ils n’expliquent pas) à consommer des drogues et c’est simplement la perception de nature cognitive des perspectives existentielles à long terme qui pourrait freiner cette consommation. Un tel modèle pourrait expliquer les tendances à consommer des drogues dans les banlieues difficiles où le chômage, l’exclusion et l’absence de perspective temporelle (Nuttin, 1980) entraînent des attitudes méliorantes; mais il ne peut répondre au problème des consommations addictives, plus ou moins contrôlées, dans des couches sociales favorisées où les perspectives d’avenir ne sont pas absentes.

17 Heyman (1996) va développer davantage le modèle économique des addictions par l’analyse de leur caractère paradoxal : d’un côté, et suivant le modèle médical, les addictions sont définies comme une perte de contrôle comportemental (APA, 1996; OMS, 1994), elles sont involontaires; d’un autre côté, des données expérimentales et d’enquêtes montrent que des facteurs de risque liés aux conséquences négatives des addictions peuvent entraîner une consommation contrôlée ou une abstinence (Peele, 1985), les addictions étant alors considérées comme volontaires. Ainsi, la question des attitudes méliorantes ou maximisantes s’inscrit-elle au cœur d’une controverse dont la résolution est essentielle pour comprendre les addictions. Pour Heyman, ce n’est pas le produit qui fait l’addiction, mais ce sont les conditions dans lesquelles se trouve un individu et qui font qu’il aura tendance à privilégier les valeurs locales (mélioration) ou les valeurs générales (maximisation). En d’autres termes, la perte de contrôle, le passage de l’addiction dans le registre de l’involontaire, ne sont pas tant l’effet aversif de l’addiction elle-même (perturbations cérébrales, réponse au manque, effets de conditionnement, de sensibilisation incitative), que l’effet de conditions environnementales (sociales, économiques, existentielles) qui accroissent l’intérêt de l’individu pour des satisfactions à court terme, diminuent en même temps l’intérêt pour des activités et des satisfactions alternatives à l’addiction et conduisent à négliger ses conséquences négatives à long terme.

Discussion

18 Les modèles économiques des addictions présentent un certain intérêt pour avoir souligné cette dialectique assez fondamentale qui marque les comportements humains, entre mélioration et maximisation, dialectique que l’on retrouve de façon plus ou moins équivalente dans de nombreux modèles (voir tableau I), qu’il s’agisse des deux principes du fonctionnement mental (Freud, 1911), des jeux internes que Frank (1996) a finalement repris de Platon, de l’addiction rationnelle (Becker, Murphy, 1990), de la dialectique comportementale (Loonis, 1997), de la recherche de sensations fortes (Zuckerman, 1994) ou des états métamotivationnels dans la théorie du renversement (Apter, 1982).

Tableau 1:

Synoptique de la dialectique fondamentale du comportement

Tableau 1:
Tableau 1: Synoptique de la dialectique fondamentale du comportement humain (mélioration-maximisation) selon différents modèles. Modèles Les deux principes du fonctionnement mental (FREUD, 1911) Les jeux internes de (FRANK, 1996) et Platon La théorie de l’addiction rationnelle de (BECKER, MURPHY, 1990) La dialectique comportementale de (LOONIS, 1997) Le Sensation Seeking de (ZUCKERMAN, 1994) La théorie du renversement d’états psychologiques de (APTER, 1982) Mélioration Principe de plaisir Agent «Appétit» Consommateur «myope» Motivation Grand chercheur de sensation (HSS) État paratélique Maximisation Principe de réalité Agent «Raison» Consommateur prévoyant Antimotivation Petit chercheur de sensation (LSS) État télique

Synoptique de la dialectique fondamentale du comportement

19 Cependant, les modèles économiques présentent aussi de nombreuses limitations. Le choix théorique, qui consiste à prétendre créer un modèle uniquement basé sur la cause finale et qui conduit à ne tenir compte que des buts et des conséquences de l’action et des seuls facteurs environnementaux, nous paraît bien arbitraire et réducteur et amener à négliger des facteurs internes importants dans le champ des addictions (la souffrance psychique, les conditionnements et apprentissages, les adaptations neurobiologiques). Dans tout système il y a circularité et continuité entre cause efficiente et cause finale : la cause efficiente modifie les conditions d’état du système, tandis que la cause finale représente l’état que doit atteindre le système par son comportement programmé, le programme étant mis en route (cause finale), parce que l’état a changé (cause efficiente).

20 Ainsi, Herrnstein et Prelec (1992) sont bien en peine d’expliquer ce besoin initial de prendre des drogues qui reste pour eux une donnée irréductible. Il est correct de dire que les soldats américains au Vietnam, du fait d’une perspective temporelle réduite, avaient tendance à adopter une attitude méliorante; mais cela reste insuffisant puisque seuls 20% d’entre eux se sont addictés (contre 1% avant le départ à la guerre). La souffrance psychique liée au stress du combat et du danger de mort, l’éloignement du milieu familial, les conditions de vie difficiles et éprouvantes, ont pu représenter les causes efficientes de la solution addictive (renforcées par les facilités d’approvisionnement et la tolérance de la hiérarchie militaire). À l’inverse, en plus de l’ouverture de la perspective temporelle, la baisse de la souffrance psychique doit aussi être prise en compte pour expliquer les rémissions addictives consolidées après le retour à la vie civile (diminution du stress, soutien social et familial).

21 La question du caractère volontaire ou involontaire des addictions est au centre de la problématique traitée par les modèles économiques et c’est ce qui fait tout leur intérêt, face aux modèles médicaux qui réduisent les addictions au seul pôle involontaire, éludant complètement la question de la volonté. Les modèles économiques reprennent, en le modernisant, le découpage platonicien entre « Appétit » et « Raison ». Ce faisant, ces modèles ont mis à l’écart le troisième terme que proposait ce même Platon : la « Passion ». La faiblesse des modèles économiques est qu’ils ne prennent pas en compte les aspects passionnels des choix humains, la force des émotions, de la souffrance psychique et la recherche d’états psychologiques particuliers. Les consommations addictives ne peuvent être réduites à l’opposition « en prendre/ne pas en prendre », mais doivent être envisagées aussi au regard de recherches volontaires d’états altérés de conscience. La passion représente ainsi une voie de synthèse dans une dialectique qui resterait sans cela indécidable.

22 Alors, les drogues : involontaires ou volontaires ? Si la consommation de drogue est involontaire (une « maladie » ?), alors pourquoi observe-t-on une capacité de contrôle de la consommation en fonction de facteurs économiques de coût ? Si la consommation de drogue est volontaire, alors pourquoi observe-t-on les pertes de contrôle dramatiques et les rechutes à long terme en l’absence de tout symptôme de manque ? Pour Heyman (1996), l’addiction se définit à cet instant où le consommateur veut arrêter – essaie d’arrêter – mais n’y parvient pas. McCauley (1996), souligne cependant que la difficulté d’une telle définition provient du fait que beaucoup de comportements, et plus particulièrement les comportements du quotidien, correspondent à cette définition, sans être pour autant considérés comme des addictions. Non sans humour, McCauley cite sa propension à tambouriner des doigts sur la table, celle à regarder la télévision tous les soirs, à jouer au loto ou à boire de l’alcool à certaines heures. Et bien que ces comportements habituels aient un coût, doit-on les considérer comme des addictions ?

23 Si l’on suit la réponse d’Heyman (1996) à ce problème, prenant appui sur les modèles économiques, il renvoie l’ambiguïté de la réponse à ce que l’on peut considérer comme deux « états » du système humain : 1) dans l’état de mélioration, la consommation donne l’impression d’un comportement (maladif) involontaire, avec perte de contrôle et tendance à la rechute; 2) dans l’état de maximisation, la consommation donne au contraire l’impression d’un comportement volontaire, avec contrôle d’une recherche du plaisir ou du soulagement à court terme. Cette réponse en terme d’états, états psychologiques, est corroborée par la théorie du renversement de Michael J. Apter (1982,1989): les êtres humains vivent en permanence des alternances entre les deux pôles de paires d’états psychologiques opposés, qui présentent une force « métamotivationnelle », au sens où ces états psychologiques se superposent aux motivations « classiques » pour déterminer leur interprétation à ce niveau dit métamotivationnel. Nous sommes face à ce que l’on pourrait appeler une « psychologie des états » (Loonis, 2001) qui explique, par exemple, que la motivation « classique » à absorber des nutriments pour la sustentation physiologique puisse être interprétée au niveau métamotivationnel comme recherche d’aliments, confection de plats et de repas (la cuisine, les recettes), partage du repas, et donner lieu, sur ce même niveau métamotivationnel, à des troubles psychiques comme la boulimie ou l’anorexie, qui renvoient bien aux problèmes du volontaire/ involontaire, du contrôle ou de la perte de contrôle.

24 Pour Heyman (1996), les comportements involontaires (même si on les considère comme des comportements appris, conditionnés) ne représentent pas une absence de choix, mais plutôt une incapacité à établir des moyens pratiques pour restreindre des intérêts à court terme. Cette idée sous-entendrait qu’aucun comportement appris, conditionné, donc de l’ordre de la « maladie », n’est jamais absolument irrésistible. Il y a toujours moyen de contrôler de tels comportements et les addictions représentent davantage l’échec de ces moyens, plutôt qu’un effet unilatéral du conditionnement, de la « maladie ». Bien entendu, il ne s’agit pas ici de renouer avec une vision moraliste des addictions comme mauvaise (ou faiblesse de la) volonté, comme péché ! Car c’est à ce niveau qu’entrent en jeu les états métamotivationnels. C’est dans l’état méliorant (paratélique de Apter, orienté sur le présent et la recherche d’activation) que l’individu perd ses moyens de contrôle, mais il peut à tout moment les retrouver en passant dans l’état maximisant (télique d’Apter, orienté sur le futur et les buts à atteindre – du grec télos: « loin », « but »).

25 Shizgal (1996) nous propose l’expérience imaginaire suivante : on est pris dans la dernière ligne droite d’un projet important que l’on veut absolument réaliser, on saute un repas et la nourriture continue à être éclipsée quelque temps au profit de ce projet qui pourrait avoir une influence décisive sur notre carrière. Puis, soudain, on se retrouve confronté à l’odeur d’un plat familier, ou même simplement à l’idée de nourriture. Aussitôt notre attention se fixe sur la volonté de trouver quelque chose à manger, la pensée quitte inexorablement le projet et se fixe sur l’icimaintenant. Le stimulus incitateur a renversé complètement notre cadre de référence. De telles expériences sont le lot quotidien de nos vies : incitations à manger, à avoir une activité sexuelle, à se détendre, à bouger, à penser à des choses plaisantes… mais aussi : à allumer une cigarette, à se servir un petit verre, à allumer la télévision… Tous ces phénomènes sont semblables à ceux qui sont observés concernant l’effet des stimuli associés à la drogue comme déclencheurs du manque (Stewart, De Wit, Eikelboom, 1984).

26 Si d’un côté on observe les effets addictifs des drogues, on observe par ailleurs que les mêmes drogues délivrées dans certains contextes ne donnent pas lieu à addiction, par exemple la morphine délivrée, même à fortes doses, dans un contexte de soin médical (Zinberg, 1974). De nombreuses études ont pu montrer que, quel que soit le mode d’administration, la cocaïne ou d’autres psycho-stimulants ne sont pas spécialement, ni inévitablement addictifs pour l’être humain (Erickson, 1993). Aussi, qu’il s’agisse de substances psychoactives réputées « à risque addictif » ou de n’importe quelle autre source de stimulation de la vie quotidienne, nous constatons que les phénomènes de contrôle/perte de contrôle dépendent davantage des états psychologiques des individus (en lien avec les contextes et environnements de consommation) que de la nature des sources de consommation ellesmêmes.

Conclusion

27 Bien qu’il ne faille pas perdre de vue la nature toxique (tant au niveau cérébral que physiologique en général) de la plupart des substances psychotropes, lorsqu’elles sont consommées de façon fréquente et sur le long terme, on ne peut pas feindre d’ignorer l’ensemble de nos besoins de stimulations, de soulagement, nos recherches d’états psychologiques particuliers, d’états de conscience modifiés. L’histoire de l’humanité est traversée de part en part, en tous lieux et en tous temps, par les consommations psychotropes et/ou les pratiques à effets psychotropes (jeûnes, ascèses, mortifications, danses, rituels…). Un comportement n’est jamais entièrement volontaire ou involontaire, il n’est jamais non plus déterminé de façon univoque et à un seul niveau logique (ce serait oublier tout l’apport de la psychanalyse et la surdétermination de l’Inconscient; mais aussi l’apport des sciences cognitives qui montrent comment les croyances des individus entraînent des comportements apparemment hors de contrôle).

28 On assiste aux États-Unis (et on en voit les prémices en France) à un étrange mouvement paradoxal : ces fumeurs qui s’adonnent librement et volontairement au tabagisme durant des années (sur la base des multiples renforcements positifs liés à cette consommation), mais qui plus tard, parce qu’ils ont un cancer, vont faire un procès aux fabricants de cigarettes, voyant tout à coup le tabac comme un renforcement négatif (effet du manque) qui les aurait rétrospectivement contraints. Étrangement, dans cette affaire, lorsque le renforcement est perçu comme positif, l’individu se prétend libre et volontaire; mais s’il perçoit à un autre moment l’aspect de renforcement négatif de sa pratique addictive, alors il prétendra ne plus être libre et agir au-delà de sa volonté. Attendant réparation des conséquences de cette emprise, nos fumeurs veulent tout simplement le beurre et l’argent du beurre ! Cet exemple vaut pour toutes les addictions. Les individus commencent à boire et faire des excès alcooliques pour le bien que cela leur procure sur le coup (état méliorant) et à ce niveau, dans cet état, personne ne se dira pris dans une compulsion irrépressible, chacun se sentira libre de consommer et typiquement réduire autoritairement les consommations d’alcool dans certaines circonstances festives est très mal reçu. Par contre, dix ou quinze années plus tard, au moment d’une brutale prise de conscience (dans l’état maximisant) des méfaits de l’alcoolisation excessive sur la santé, les mêmes individus vont-ils attaquer en justice les viticulteurs ? N’assiste-t-on pas là au petit jeu classique de l’autotromperie déresponsabilisante qui peut servir à justifier beaucoup de nos dérapages comportementaux ? A-t-on oublié si vite les leçons du locus of control (Rotter, 1966), de la dissonance cognitive (Festinger, 1957), des restructurations cognitives en tous genres (Bandura, 1980) qui servent si bien nos illusions ? Ou encore, veut-on réduire l’être humain au dysfonctionnement de ses systèmes dopaminergiques ?

29 La leçon que l’on peut sans doute tirer de cet examen des modèles économiques des addictions suggère que nous arrêtions de voir les addictions comme des « maladies » et que nous commencions à les envisager comme des comportements naturels de consommation qui peuvent parfois déraper. Ainsi, le discours de prévention trouverait plus d’efficacité (car il aurait plus de cohérence) à laisser tomber les affirmations péremptoires à propos de la dangerosité des drogues et à davantage montrer comment les drogues peuvent être dangereuses dans certaines conditions d’usage; quand et sous quelles circonstances le contrôle que la plupart des gens exercent sur leurs comportements potentiellement addictifs, peut échouer; et comment, sous certaines circonstances, ceux qui sont devenus des addictés sont capables de reprendre le contrôle d’eux-mêmes (Orford, 1985,1996).
Reçu en mai 1999

Bibliographie

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Mots-clés éditeurs : Addiction, Économie, Environnement, èle

https://doi.org/10.3917/psyt.072.0007

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