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Article de revue

Adolescence et adoptions internationales : une nouvelle problématique ?

Pages 543 à 572

1L’adoption consiste à créer un lien de filiation entre deux personnes étrangères l’une à l’autre. Elle est, pour Michel Soulé, " le lieu idéal de projection des fantasmes communs de l’humanité " [53]. En effet, la question de l’adoption est révélatrice de notre mythologie concernant de nombreuses valeurs socioculturelles comme la famille, l’hérédité, la transmission au sein de la filiation, l’importance du nom et du prénom. Elle traduit notre idée et notre désir profond de ce que doit être un enfant pour une famille et une famille pour un enfant [10]. Les enfants adoptés vivent dans une situation que l’on pourrait qualifier d’expérimentale car il existe deux couples de parents : un biologique fournissant le patrimoine génétique et un légal assurant l’apprentissage socioculturel et les interactions émotionnelles de l’enfant. Ces situations représentent de ce fait une source infinie d’interrogations et de débats, notamment autour du thème de l’inné et de l’acquis.

2Ce travail se centre sur les questions soulevées au moment de l’adolescence chez les enfants adoptés, et plus spécifiquement chez les enfants issus d’adoptions internationales.

3Pourquoi se pencher sur le moment de l’adolescence ? Parce que l’adolescence des enfants adoptés est une période clé au cours de laquelle on observe parfois une irruption symptomatique brutale, polymorphe, souvent à type de passages à l’acte, contrastant avec les années d’enfance où " tout se passait bien ". Alors que l’adoption n’avait jamais semblé être un problème ni même un centre d’intérêt particulier pour l’enfant, brutalement, à l’adolescence, les questions de l’adoption et des origines reviennent au premier plan dans le discours de l’adolescent, des parents et des soignants.

4En outre, l’existence de pistes de réflexion spécifiques soulevées par les situations d’adoptions internationales par rapport aux adoptions nationales semble intéressante à explorer devant le nombre toujours croissant d’adoptions internationales, qui représentent actuellement les trois quarts des adoptions en France. Devant ce nouveau type d’adoption, les questions posées par la pratique de l’adoption ont évolué. En effet, il ne s’agit plus de débattre autour de la révélation de l’adoption, ou tout au moins pas en ces termes, car le secret n’est souvent plus possible. En revanche, d’autres thèmes ont émergé comme l’exposition au regard d’autrui, sans possibilité de dissimulation, de la différence d’apparence physique, les rapports qu’entretiennent les parents adoptifs et l’adolescent avec le pays d’origine, ainsi que les conditions parfois difficiles dans lesquelles se déroulent les adoptions internationales, susceptibles d’affecter le lien parents/enfant.

5C’est donc à partir de la clinique d’adolescents issus d’adoptions internationales et présentant des troubles psychopathologiques que s’est construit ce travail. Dans un premier temps, une réponse épidémiologique est brièvement apportée à la question de la présence ou non d’une augmentation de la prévalence des troubles psychopathologiques chez les adolescents issus d’adoptions internationales par rapport aux adolescents non adoptés. Puis la résonance entre problématique adolescente et adoption est explorée, qu’il s’agisse d’adoptions internationales ou nationales, cela afin d’aborder dans une troisième partie les interrogations spécifiques aux situations d’adoptions internationales, en lien notamment avec le thème de l’altérité. Un cas clinique sera développé et discuté.

EPIDÉMIOLOGIE

6La réponse à la question épidémiologique est apportée par une revue de la littérature internationale sur la prévalence des troubles du comportement à l’adolescence chez les enfants adoptés à l’étranger [27]. Les troubles du comportement externalisés, c’est-à-dire l’ensemble des conduites agies, constituent les symptômes psychiatriques les plus fréquents chez ces adolescents. Cependant, cela ne doit pas faire omettre les troubles à type d’inhibition et de retrait, qui sont également des signaux d’alerte.

7La revue de la littérature montre des résultats extrêmement contradictoires, puisqu’une partie des études conclut à une augmentation de la prévalence des troubles du comportement chez les adolescents issus d’adoptions internationales par rapport aux adolescents non adoptés [54] [55] [56] [25] [6] [9] [50] [37], l’autre partie des études concluant à une absence de différence significative entre les deux groupes [3] [1] [26] [13]. Une méta-analyse de 2003 conclut avec prudence à une légère augmentation de la prévalence des troubles, expliquée probablement par une étude hollandaise qui avait inclus un très grand nombre de sujets ayant subi des conditions de vie hostiles avant l’adoption [7].

8L’influence des conditions de vie avant l’adoption sur l’apparition de troubles à l’adolescence ressort en revanche nettement, le risque pour l’enfant d’avoir été confronté à des conditions de vie difficiles avant l’adoption étant d’autant plus grand que l’âge d’adoption est tardif [31].

9Enfin, pour des troubles identiques, les études ont montré que la probabilité de consulter en psychiatrie était supérieure pour les enfants adoptés par rapport aux enfants non adoptés [19] [28] [33] [44] [46] [49]. L’inquiétude des parents et des soignants vis-à-vis de ces enfants " potentiellement vulnérables " explique partiellement ce résultat [41] [57].

10Cependant, les résultats épidémiologiques, bien que nécessaires à connaître, ne sont que de peu d’utilité face à un cas singulier d’adolescent adopté. Ce travail tente d’extraire des pistes de réflexion psychopathologiques bien plus que de présenter des statistiques.

ADOLESCENCE ET ADOPTION, DEUX PROBLéMATIQUES EN RéSONANCE

11La notion de résonance entre la problématique de l’adolescence et celle de l’adoption est un point fondamental. Les questionnements propres à l’adolescence semblent acquérir une dimension fantasmatique amplifiée par la rencontre avec la réalité de l’adoption. D. Marcelli et A. Braconnier ont d’ailleurs parlé, à propos de la situation adoptive, d’" amplificateur fantasmatique " [39]. Trois thèmes caractéristiques de l’adolescence sont développés afin de mettre en évidence la façon dont des questions touchant de façon universelle les adolescents sont mises en exergue en cas d’adoption : le fantasme de l’étranger dans la maison, la quête des origines et l’attaque de la filiation.

Le fantasme de l’étranger dans la maison

12Cette expression de M. Soulé et J. Noël [53] pose une question fondamentale. Au moment de l’adolescence, les parents ont devant eux un adulte en devenir, un être avec sa sexualité propre, un individu qui s’oppose à eux et qui, pendant cette période, a besoin d’être différent d’eux. Face à ce personnage étrange, aux mœurs étonnantes, au langage si particulier, les parents doivent redéfinir leur parentalité. Dans le cas de l’adoption, cette impression d’enfant " étranger à soi ", que ressentent tous les parents, paraît être confirmée par la réalité, car, biologiquement parlant, cet adolescent est effectivement étranger. L’absence de ressemblance physique peut être un facteur supplémentaire d’étrangeté. La question sera alors d’incriminer ou non, au niveau fantasmatique, l’hérédité, les gènes de l’Autre. Accuser l’étranger permet de rejeter à l’extérieur (sur les parents biologiques) les mauvais instincts et pulsions, en particulier dans le domaine de la sexualité. Les fantasmes des parents sur les parents biologiques peuvent refléter l’émergence de craintes par rapport à l’hérédité pathologique : enfant du viol, de la prostitution, de l’inceste, de la violence, de la maladie mentale [17]. Ces fantasmes resurgissent au moment de l’adolescence avec le sentiment d’étrangeté et l’irruption de la sexualité.

13C’est souvent lorsque le deuil de la transmission génétique n’est pas fait que surgit le reproche du patrimoine génétique étranger. M. Soulé et P. Lévy-Soussan soulignent les conséquences de ce sentiment d’étrangeté sur les processus de filiation imaginaire et d’identifications : il est extrêmement difficile d’inscrire un enfant dans le mandat transgénérationnel, dans l’histoire familiale, s’il n’existe pas de reconnaissance mutuelle et d’identifications réciproques [51] [53]. Le risque est alors celui du clivage comme mécanisme de défense pour les parents. On pourrait l’exprimer de la façon suivante : " Je sais bien que je suis son père mais quand même, il nous en fait tellement voir que je me demande si cela peut être dû à ses origines. À quel point est-ce mon enfant ? " [14].

14En outre, le problème de la stérilité est réactualisé de façon menaçante lorsque l’adolescent devient lui-même capable de procréer.

15Le travail psychique des parents nécessaire à l’instauration de la filiation imaginaire, déjà sollicité au moment de l’adoption, est donc à nouveau mobilisé à l’adolescence. Cependant, ce thème de l’étranger, du différent, peut aussi être pensé comme un élément nécessaire pour que s’établisse un lien de filiation où l’enfant n’est pas uniquement un prolongement narcissique. En effet, pour respecter l’individualité de l’enfant, il faut injecter un petit peu de cette altérité. Cette question se pose pour tout parent, qui doit voir l’altérité dans son enfant sans y voir l’étrangeté.

La quête des origines

16L’adolescence est la période du questionnement sur les origines. Elle marque également le moment où la procréation devient physiquement possible. Le désir d’enfant et la possibilité de s’imaginer parent à son tour soulèvent, pour les adolescents adoptés, la question de la transmission de facteurs génétiques inconnus. De même, la réaction du partenaire à l’annonce du statut d’adopté peut être source d’inquiétude. Pour Winnicott, c’est à l’adolescence que les enfants commencent à s’intéresser à l’hérédité. " En particulier, le besoin apparaît de savoir que répondre à l’ami(e) qui poserait une question difficile " [59].

17En cas d’adoption, ce questionnement se heurte donc à des éléments inconnus, ce vide pouvant être extrêmement douloureux. Quel est le désir ou absence de désir qui est à l’origine de ma conception ? À quels groupe, communauté, religion appartiennent mes parents géniteurs ? Quelle est l’histoire familiale qui m’a été transmise ? Chez l’adolescent adopté, la quête des origines peut prendre la forme d’une recherche des parents biologiques. Winnicott rappelle qu’ " il est très naturel qu’un adolescent cherche à découvrir tout ce qu’il y a à découvrir sur les parents véritables [...]. Il est certainement dans l’ordre des choses qu’un être humain cherche à connaître le commencement " [59].

18Cette question de la recherche des origines chez les enfants adoptés suscite de nombreux débats. Les auteurs se rejoignent sur le caractère mortifère du non-dit qui touche à la question des origines [18], c’est-à-dire sur les conséquences néfastes pour l’enfant lorsque ses parents choisissent de maintenir secret son statut d’adopté. En revanche, les points de vue s’opposent sur l’intérêt pour l’enfant de connaître l’identité de ses parents biologiques. La position de Michel Soulé est très ferme et concerne le cas précis de la quête des origines par l’enfant adopté au moment de l’adolescence : la revendication de connaître quelque chose de ses " vrais parents " joue un rôle dans le conflit entre l’adolescent et ses parents adoptifs et est une défense dans les conflits de la crise d’identité qu’aucune information n’a le pouvoir de résoudre [52]. Il place cette quête des origines au moment de l’adolescence au cœur du conflit œdipien et du processus de séparation/individuation propre à l’adolescence. À un niveau plus général, M. Soulé et P. Lévy-Soussan critiquent le " droit aux origines " : " Le droit aux origines, dans son aspect idéologique et militant, peut tenir place de droit-écran, au sens freudien de souvenir-écran, c’est-à-dire maintenir à distance les conflits inconscients, les interrogations réflexives, au profit d’une interrogation projective. Cela permet de maintenir au-dehors du psychique la problématique individuelle de l’origine, devenue par là même un fait social " [36].

19G. Delaisi de Parseval prend position d’une manière différente. Toute la richesse et l’originalité de son propos se situent autour de l’idée de " droit à l’histoire " et non pas de " droit aux origines ". Quel que soit son parcours de vie et la façon dont on a été conçu puis mis au monde, le droit de pouvoir retracer son histoire sans mensonges ni dissimulations est primordial. Son propos concerne donc toutes les filiations particulières (procréation médicalement assistée dont les techniques deviennent de plus en plus complexes, adoption) et n’est pas spécifique au moment de l’adolescence. Elle affirme qu’ " une saine éthique de la reproduction suppose de pouvoir connaître ceux qui vous ont donné la vie (les parents de naissance) et de reconnaître également l’exercice de la parentalité chez ceux qui vous ont élevé. On peut rêver pour notre pays d’un droit qui serait en accord avec la vérité psychique " [18] (p. 208-209).

20Il est intéressant de constater que l’adoption plénière n’existe pas dans les pays anglo-saxons, qui ont uniquement gardé l’adoption simple. La position française, qui consiste d’une certaine manière à annuler au niveau juridique ce qui s’est passé avant l’adoption, est assez spécifique. Elle accrédite l’idée d’un enfant " vierge de tout passé ", d’un " enfant palimpseste ". Sur le nouvel acte de naissance est en effet inscrit : " né de " suivi du nom des parents adoptifs, ce qui, à proprement parler, est un mensonge. La proposition de S. Marinopoulos que soit écrit " fils ou fille de " et non pas " né de " n’a pas, pour l’instant, été retenue [40].

21Pour P. Ferrari, le secret quasi absolu qui pèse sur la personne des géniteurs en France peut être vécu comme un interdit de connaître la vérité sur la filiation et constituer un obstacle pour la fantasmatisation sur la filiation [21].

22Autour de ce débat, il semble donc important de distinguer un niveau individuel d’un niveau collectif et idéologique : devant un cas singulier d’adolescent demandant ou mettant en acte la recherche de ses parents biologiques, le contexte de la relation unique entre cet adolescent et ses parents adoptifs est la clé pour comprendre cette demande. Il n’est alors pas question du droit à connaître ses parents biologiques, mais bien plutôt du sens que prend pour l’adolescent cette quête à ce moment précis de sa vie, sens qui sera différent pour chacun.

L’attaque de la filiation

23Dans le cas d’adolescents adoptés, la puberté projette l’adolescent dans d’insolubles problèmes de filiation qui posent la question de la place qu’il occupe. Cette attaque de la filiation, caractéristique de l’adolescence, entre en résonance avec la réalité de l’adoption : est-ce que cette filiation, malgré l’absence de la réassurance du biologique, est réellement la leur ? Ces adolescents vont tester la solidité, l’inébranlabilité de la filiation. Winnicott soulignait que " les enfants ont davantage besoin de leurs parents que d’être aimés ; ils ont besoin que quelque chose subsiste lorsqu’ils sont détestés et même détestables ". Cela est particulièrement vrai pour les enfants adoptés.

24Les identifications à l’adolescence peuvent être rendues plus complexes du fait du dédoublement des imagos parentales : identifications aux parents adoptifs mais également aux représentations des parents biologiques. Le questionnement identitaire exacerbé qui en découle peut favoriser également l’attaque de la filiation.

25Mais d’autres questionnements propres à l’adolescence résonnent également d’autant plus lorsque l’enfant est adopté. On peut en retenir trois :

  • Le processus de séparation est l’un de ces thèmes, l’adolescence étant, pour P. Blos, le deuxième temps du processus de séparation/individuation [8]. Cette séparation que représente l’adolescence peut être complexe, parents adoptifs et enfants adoptés ayant déjà été confrontés à d’autres séparations, d’autres pertes.
  • Dans le cas de l’adoption, il peut exister une peur de transgresser l’interdit de l’inceste du fait de l’absence d’une " conviction de la filiation " [22]. Pour Winnicott [59], l’absence de la réassurance du biologique fragilise le support de l’interdit de l’inceste.
  • Enfin, la question de l’estime de soi, centrale à l’adolescence, doit être abordée dans le cas de l’adoption avec la réalité de l’abandon initial, source d’une atteinte narcissique.

26La réalité externe que représente le fait d’être adopté vient rencontrer et amplifier la réalité psychique, c’est-à-dire les questionnements propres à tout adolescent. À l’idée de résonance entre la problématique de l’adolescence et celle de l’adoption, s’ajoutent, dans les cas d’adoptions internationales, d’autres pistes de réflexion, émergeant de la symptomatologie et du discours des adolescents adoptés à l’étranger.

LES ADOPTIONS INTERNATIONALES

27L’adoption internationale a comme spécificité la rencontre de la différence au sein de la filiation. Cette dimension de l’étranger pénètre au cœur de l’intime et du familier. Étymologiquement, le mot " étranger " veut dire : " qui est extérieur, donc qui n’est pas connu, qui n’est pas familier ". " Étrange " et " étranger " ont la même origine. Meursault, le personnage principal de L’Étranger de Camus, est condamné à mort pour le crime qu’il a commis, mais aussi pour son trop d’altérité, qui le rend incompréhensible et monstrueux. L’altérité, la différence caractérisent l’adoption internationale. Le rapport de l’adolescent avec un pays, une culture qui ne sont pas les siens, mais qui se rappellent sans cesse à l’adolescent à travers sa propre image dans le miroir et dans le regard des autres, voire par la confrontation au racisme, est au cœur des réflexions à propos de l’adoption internationale.

28Une autre piste de réflexion est également développée : l’influence du vécu des parents adoptifs au cours de leur parcours pour obtenir leur enfant sur la construction du lien parents/enfant. En effet, ce qui s’est joué dans ces phases précoces de l’adoption peut resurgir au moment de l’adolescence.

Une adoption " visible ". Altérité et étrangeté

29Dans la majorité des cas d’adoptions internationales, les différences d’apparence physique montrent la différence d’origine. L’enfant issu d’une adoption internationale est porteur d’altérité. C’est véritablement à l’adolescence que la différence d’aspect physique s’impose à l’enfant. L’enfant pense tout d’abord qu’en grandissant il deviendra comme ses parents. Un enfant a la notion de sa couleur de peau vers 7 ans et comprend la signification de l’adoption vers 8-12 ans [7]. Mais c’est souvent à l’adolescence qu’il s’en préoccupe. La constatation que sa peau, son corps restent différents de ceux de ces parents est un élément important de la compréhension de l’adoption. C’est un signal fort, qui prend sens pour l’enfant. Les différences physiques évidentes entre l’enfant et ses parents entraînent des regards dans la rue, des questions permanentes et rendent visible, publique, la faillite du pouvoir de fécondation des parents [58].

30En outre, leur apparence " étrangère " expose au racisme les adolescents adoptés à l’étranger. La confrontation au racisme et la difficulté d’établir une identité culturelle et une estime de soi satisfaisantes à l’adolescence sont des facteurs explicatifs potentiels de troubles ou d’une souffrance à l’adolescence [13] [20], d’autant plus pour un adolescent adopté qui ne s’était jamais pensé, défini ou perçu comme un étranger. Or, contrairement à des familles migrantes où les enfants peuvent s’appuyer sur les réactions de leurs parents face à des expériences similaires, les enfants adoptés peuvent avoir le sentiment de ne pas pouvoir partager cette expérience douloureuse avec leurs parents.

31Ce problème soulève également la question de l’origine du racisme [4]. Freud définit " l’inquiétante étrangeté " comme ce qui remonte au depuis-longtemps-connu, qui devait rester secret et qui refait surface par effraction [24]. Dans ce texte, Freud montre que " l’autre, c’est mon propre inconscient ". Les racines du racisme se situent donc dans notre rapport à notre propre altérité [4]. Si le moi projette hors de lui ce qu’il éprouve en lui-même de dangereux pour en faire un double étranger et démoniaque [34], l’autre ne sera que l’ensemble de ces projections. O. Mannoni introduit la dimension relationnelle du racisme : l’impossibilité à penser notre altérité [38].

32Un autre point en lien avec la " visibilité " de l’adoption est le vécu des parents adoptifs face à la différence physique de leur enfant, qu’ils peuvent redouter. On constate d’ailleurs que les pays d’Asie, d’Europe ou d’Amérique sont privilégiés dans le choix des futurs parents. L’adoption d’un enfant du Maghreb ou d’Afrique reste aux yeux de beaucoup d’adoptants plus difficile [48]. Les parents justifient souvent leur choix d’une nationalité par une attirance ou une connaissance plus particulière d’un pays, un souci d’intégration de l’enfant, la liberté auprès des écoles et de l’entourage de révéler ou non l’adoption [48]. Mais la visibilité de l’adoption soulève avant tout la question de l’étranger et de l’étrangeté. L’écart entre enfant imaginaire et enfant réel, selon l’expression de S. Lebovici [35], peut être particulièrement important dans les adoptions internationales, du fait de l’âge de l’enfant, de sa couleur de peau, de son passé, qui ne sont pas ceux imaginés par les parents.

33E. Quin est journaliste. Elle a adopté une petite fille cambodgienne et raconte son expérience dans un livre. Elle analyse ainsi son désir d’adopter un enfant asiatique : " Est-ce un caprice ? Je désire un enfant asiatique. Parce que j’ai moi-même les yeux étirés, à moins que ce ne soit en souvenir d’un séjour au Vietnam, où je m’étais sentie chez moi [...]. J’aurais voulu pouvoir crier : de n’importe quelle couleur, il sera le mien ! Je me fiche bien qu’il soit jaune, noir, blanc ou vert à pois roses, pourvu qu’il ait besoin de moi ! Mais si je mets à l’épreuve ma vision du monde, qui me semblait jusqu’à présent dénuée de racisme, je découvre tapissée sur le pourtour de mon inconscient une triste polypose d’angoisses viscérales. Je ne saurais pas surmonter ma fascination équivoque devant le Grand Autre, le Fondamentalement Différent, la face antipodique de ma blancheur. Je ne pourrais pas élever un enfant noir sans appréhender les regards interrogateurs ou entendus. Je les provoquerais. La couleur de l’enfant m’aveuglerait, ferait écran [...]. Adopter un enfant noir, c’est aller au bout du voyage vers l’autre. L’Asie, par contre, c’est l’altérité sans risques " [45].

34Il est fondamental de pouvoir travailler avec les futurs parents adoptifs sur les fantasmes et projections qu’ils peuvent avoir devant cet " Autre Fondamentalement Différent ", comme le décrit E. Quin [45]. Il ne s’agit pas d’accuser les parents adoptifs de racisme, mais de prendre conscience des limites singulières de chacun. Quel type de différence risque de faire blocage dans l’appropriation psychique de l’enfant par ses parents ? Cela peut être un élément de l’histoire de l’enfant, mais également un type de couleur de peau ou une autre caractéristique physique.

35Le fantasme de l’étranger dans la maison ainsi que la difficulté des identifications réciproques peuvent être d’autant plus amplifiés dans le cas des adoptions internationales du fait de cette apparence physique trop porteuse d’altérité, s’il y a eu échec ou achoppement dans l’instauration de la filiation imaginaire.

36Cependant, la " visibilité " de l’adoption empêche que la différence ne soit niée ou annulée, puisqu’elle est portée par la réalité externe. Il s’agit donc probablement à la fois d’une richesse et d’une source possible de souffrance.

Le rapport à la " culture d’origine " : un conflit identitaire ?

37Le rapport au pays d’origine est complexe : certains adolescents préfèrent l’ignorer totalement, alors que d’autres éprouvent le besoin de se rendre dans ce pays, d’en apprendre la langue ou de se rapprocher de ses coutumes et de sa communauté. Le rapport avec le double réseau de références parentales, parents biologiques et parents adoptifs, semble sous-tendre cette attitude vis-à-vis du pays d’origine. La quête des origines et le désir de se rapprocher de la culture du pays d’origine doivent alors être compris dans un contexte de questionnement identitaire, de réappropriation par ces adolescents d’une part de leur vie, mais aussi dans le lien avec les parents adoptifs qui est interrogé et testé.

38Une étude suédoise [13] montre que le questionnement identitaire, constant à l’adolescence, est mis en exergue dans les situations d’adoptions internationales. Son sentiment d’appartenance et son identité sont ceux du pays où il vit, mais cet adolescent peut être vu comme un migrant, un étranger dans le regard des autres. Il est alors confronté à un paradoxe majeur : celui d’être vu comme un étranger sans pouvoir s’identifier en aucune façon à cette culture qu’on lui attribue. En effet, la culture d’origine est un concept purement théorique lorsque l’adolescent vit depuis sa petite enfance dans sa famille adoptive. Cela peut entraîner une difficulté à établir une identité culturelle. Soulignons que la notion de " culture d’origine " doit être utilisée avec la plus grande prudence car ces adolescents ont la même culture que leurs parents adoptifs, d’autant plus que l’adoption a été plus précoce, et ce terme donne à la " culture " un substratum biologique et génétique, comme si elle pouvait être portée par le morphotype ou la couleur de peau !

39Du côté des parents adoptifs, les attitudes vis-à-vis du pays d’origine de l’enfant sont là aussi très diverses : certains vont s’intéresser à la langue, à la culture, à l’alimentation du pays, décorer eux-mêmes la chambre de l’enfant avec des objets du pays. On peut imaginer que ce rapprochement probablement ambivalent avec le pays d’origine complique la possibilité pour les parents de parler de cet enfant en lien avec leurs relations avec leurs propres parents, c’est-à-dire inscrits dans l’histoire familiale. Mais cela peut aussi témoigner du désir de ne pas annuler les premiers mois de vie de leur enfant, de l’inscrire dans une histoire. Enfin, l’intérêt que portent les parents adoptifs au pays d’origine de l’enfant peut avoir comme fonction de symboliser que l’enfant ne vient pas de " nulle part ", d’un trou. Les parents sont en effet confrontés à l’inconnu autour de l’origine de leur enfant, du " non-accessible " de son histoire, et à la relation fantasmatique avec les parents géniteurs, ces " autres parents projetant leur ombre sur la chambre d’enfant " (S. Fraiberg [23]).

40Le rapport de l’adolescent avec son pays d’origine témoigne d’une difficulté à trouver sa place dans la filiation (inscription dans les générations, axe vertical). Les affiliations (inscription dans des groupes, axe horizontal) vont alors jouer un rôle fondamental [42] [43]. Et inversement, pour que les affiliations soient possibles et non menaçantes, notamment les liens avec la culture d’origine, il faut que l’adolescent soit inscrit irrévocablement dans la filiation avec sa famille adoptive. Pour des adolescents adoptés à l’étranger, un groupe d’appartenance, support des identifications, peut être la communauté de leur pays d’origine, ce qui soulève la question des affiliations des adolescents issus d’adoptions internationales avec des adolescents issus d’histoires de migrations. Ces affiliations permettraient de se réapproprier la culture du pays d’origine. Elles peuvent également être un recours lorsque l’adolescent est confronté au racisme.

41Le paradoxe pour l’adolescent adopté à l’étranger est d’avoir l’apparence physique d’un enfant de migrant, sans en avoir l’histoire ni la famille. La différence avec les pairs est donc à deux niveaux : différence de couleur de peau, mais également différence avec les enfants de migrants par leur milieu familial. Cette double différence peut être à l’origine de difficultés d’identifications et d’affiliations.

Le parcours des parents adoptant à l’étranger et ses conséquences dans la construction du lien parents/enfant

42Les adoptions d’enfants en France se font selon un cadre légal strict et assez similaire d’une adoption à l’autre. Mais le nombre de nourrissons adoptables en France a diminué de façon très importante et les parents ayant un désir d’enfant se tournent spontanément vers les adoptions internationales. Or on ne peut pas parler de la spécificité des adoptions internationales sans aborder le parcours que réalisent les parents adoptifs pour obtenir leur enfant. Bien que les différences d’expériences entre les parents soient considérables, certains thèmes reviennent : rôle des associations, voyages dans le pays, visites des orphelinats, attente pour les papiers, premières rencontres avec l’enfant dans un contexte parfois difficile, influencées par le mauvais état physique du bébé ou par l’impossibilité pour cet enfant d’aller immédiatement vers ses parents en raison ou non de carences précoces, transmission parfois absente de la part des personnes s’étant occupées de l’enfant autour de sa singularité et de son histoire, etc. Cependant, le vécu des parents est très différent en fonction du pays d’origine et de son mode de fonctionnement, du vécu précoce de l’enfant, de l’accompagnement présent.

43Ces considérations semblent s’éloigner de la question de l’adolescence qui fait l’objet de ce travail, mais seulement en apparence. En effet, ce que les parents ont vécu au moment de l’adoption est tellement présent dans leur psychisme, a tellement influencé les représentations qui se sont construites autour de l’enfant, qu’au moment de l’adolescence et de ses conflits on retrouve un lien entre les symptômes de l’adolescent et le récit des parents sur le moment de l’adoption. Le lien parents/enfant, testé à l’adolescence, s’est construit en fonction du vécu réciproque des parents et de l’enfant dans ces premiers moments. Il n’est pas rare que des parents adoptifs venant consulter pour leur enfant de 14-15 ans reviennent spontanément sur l’histoire de l’adoption et fassent des liens entre ce qu’ils avaient perçu de leur bébé et les troubles actuels. Et, réciproquement, l’adolescent vient interroger par ses symptômes ce qui est resté en souffrance lors des phases précoces de l’adoption, non élaboré.

44L’altérité de l’enfant constitue certes une piste de réflexion, à la fois du côté des parents dans la difficulté d’inscrire leur enfant dans la filiation imaginaire et surtout du côté des adolescents dans l’exacerbation du questionnement identitaire. Mais ce parcours des parents adoptifs, parfois semé d’expériences difficiles, est une réalité spécifique de l’adoption internationale, qui joue probablement un rôle fondamental dans la construction de la parentalité. Les représentations qui se construisent alors autour de l’enfant seront déterminantes au moment de l’adolescence.

45Une autre question soulevée par le parcours des parents adoptifs et spécifique aux adoptions internationales est le coût de l’adoption. L’investissement financier au moment de l’adoption est un élément de réalité, puisque les parents doivent souvent verser, sous forme de dons, des sommes importantes d’argent soit à l’orphelinat, soit à une administration. Les pratiques sont cependant extrêmement diverses en fonction des pays : la somme versée varie, mais également les modalités de paiement. Il peut s’agir d’une somme déterminée à l’avance ou à " négocier ", versée directement dans le pays ou, au contraire, à l’organisme autorisé pour l’adoption (OAA). Dans bien des cas, il s’agit d’une somme inaccessible pour de nombreux parents. Dans certaines filières mal encadrées, l’argent a infiltré le processus d’adoption, donnant lieu à des dérives où des versements officieux d’argent facilitent et accélèrent l’adoption. Le film Holly Lola (2004) décrit de façon frappante cette réalité. Cette réalité ne doit pas être occultée car elle fait entrer le processus de l’adoption dans un type de lien particulier : un contrat marchand. Le double sens de l’expression " enfant à tout prix " met en lien place du financier et désir d’enfant [47]. Les fantasmes de vol d’enfant de la part des parents adoptifs peuvent être amplifiés par cette apparence d’achat d’un enfant. L’argent peut également devenir une modalité d’échange au sein du système familial, à travers laquelle se cristallisent et s’expriment les conflits dans les moments de crise, notamment au moment de l’adolescence. L’adolescent adopté, dans un contexte d’attaque de la filiation, peut alors interroger durement cette réalité : certains adolescents parlent du prix qu’ils ont coûté, d’autres accusent leurs parents adoptifs, souvent d’un milieu aisé, de les avoir achetés à leur famille biologique, plus démunie [47]. Il est tout à fait probable que ces discours de l’adolescent soient en lien avec une difficulté d’inscription dans la filiation imaginaire. L’aspect financier est un support potentiel à travers lequel peut s’exprimer ce conflit à l’adolescence dans les cas d’adoptions internationales.

SITUATION CLINIQUE : VANESSA

46Un cas clinique va illustrer certains de ces points de réflexion et permettre d’ouvrir la discussion.

47Vanessa est une jeune fille de 17 ans, même si elle en paraît 12 ou 13. Elle est hospitalisée dans un service de psychiatrie après une tentative de suicide médicamenteuse. Vanessa avait déjà été hospitalisée à deux reprises dans ce service après une première tentative de suicide par prise médicamenteuse et des automutilations à type de scarifications et phlébotomies. Ces données cliniques ont été recueillies lors d’un suivi psychiatrique, qui a duré quatre ans.

Récit de l’adoption

48Vanessa a été adoptée à l’âge de 11 mois en Tha ïlande. Le désir d’adoption venait de la mère. Le père serait stérile mais très peu d’explorations ont été faites et l’adoption n’a été précédée d’aucune tentative de procréation médicalement assistée. Le couple avait déjà adopté un autre enfant, une fille, deux ans auparavant, également originaire de Tha ïlande mais n’appartenant pas à la même fratrie.

49Le père raconte qu’il s’est rendu seul en Tha ïlande. À l’orphelinat, il a été confronté à un spectacle d’horreur. Il a été extrêmement impressionné par le nombre important d’enfants en mauvaise santé ou handicapés, leurs conditions de vie, l’absence de jeux, le peu de présence des adultes. Il a immédiatement été attiré par Vanessa, alors âgée de 7 mois. Ce bébé a semblé le reconnaître et a cessé de pleurer lorsqu’il est passé devant le lit. Le père décrit le même fantasme de reconnaissance pour la sœur de Vanessa. Vanessa avait été placée dès sa naissance à l’orphelinat et les parents n’ont aucune information sur les parents géniteurs.

50Vanessa présentait une otite purulente qui s’est aggravée lors du voyage en avion. Le père semble avoir été marqué par le mauvais état physique de ce bébé qui avait " un écoulement noir de l’oreille " inquiétant. Il s’accuse vivement de l’avoir emmenée avant de l’avoir fait soigner. Vanessa a d’ailleurs une surdité unilatérale partielle séquellaire secondaire à cet épisode.

51Le prénom de Vanessa a été choisi par la mère avant même le départ du père en Tha ïlande. Cependant ses parents l’appellent par son prénom tha ïlandais, qui est en fait son deuxième prénom sur ses papiers d’identité.

Éléments biographiques

52Vanessa vit avec ses deux parents dans la maison familiale, sa sœur étant partie de la maison il y a deux ans. Vanessa était scolarisée en seconde dans un lycée professionnel mais ne va plus au lycée et est en rupture de scolarité depuis plusieurs mois. Avant l’adolescence, Vanessa est décrite comme une petite fille modèle, sans histoires, ayant un niveau scolaire assez moyen et s’intégrant assez peu au groupe de ses pairs. Actuellement, elle a peu d’activités de loisir, fait occasionnellement de la photo et est très solitaire.

Histoire récente des troubles

53Vers l’âge de 16 ans, de façon brutale, apparaît une symptomatologie à type de passages à l’acte, que les parents présentent comme une irruption, un coup de tonnerre, un changement radical par rapport à l’état antérieur. Suite à un désaccord avec sa mère, Vanessa fait une tentative de suicide médicamenteuse en prenant une dizaine de comprimés d’antalgiques. Ces prises impulsives de médicaments dans des contextes conflictuels se répètent, Vanessa recherchant dans ces moments " le sommeil, l’oubli ", sans exprimer explicitement de désir de mort. Les automutilations sont fréquentes. Elles ont toujours lieu dans la maison familiale, également après des conflits.

54Vanessa explique que seuls la douleur physique ou le sommeil la soulagent dans ces situations de conflit, intolérables pour elle. Le corps est constamment attaqué, critiqué, dévalorisé. L’intolérance à la frustration de Vanessa est mise en avant par les parents.

55En outre, on observe un rapprochement fusionnel avec sa mère, ainsi qu’une angoisse de séparation. Vanessa refuse de la quitter, même pour des vacances, et évoque sa peur qu’il arrive quelque chose à ses parents.

56Au niveau de la scolarité, les différents projets d’orientation professionnelle (changement d’établissement, internat) sont mis en échec avec à chaque fois un passage à l’acte entraînant retour au domicile et abandon du projet. Les passages à l’acte paraissent être un moyen de ne pas être abandonnée.

57Lorsque Vanessa est hospitalisée dans un contexte de crise après avoir fait une tentative de suicide médicamenteuse, son discours est incohérent et difficilement compréhensible, elle ne répond pas à nos questions et se balance d’avant en arrière dans un mouvement pseudo-autistique. Ce tableau d’entrée catastrophique disparaît rapidement, en deux jours, pour laisser place à une adolescente en grande souffrance mais cohérente et calme.

58Parallèlement à cette explosion symptomatique, Vanessa se met à s’intéresser à sa " culture " d’origine, veut apprendre le tha ïlandais, partir en Tha ïlande. Elle décore sa chambre avec des objets asiatiques, tourne ses centres d’intérêt vers la culture asiatique et la communauté asiatique.

59En outre, elle se met à grossir avec une hyperphagie boulimique et atteint rapidement un surpoids important. Ce surpoids semble s’intégrer dans l’identification aux parents adoptifs, qui présentent également une obésité. Il existe d’ailleurs un très net " air de famille " entre Vanessa et ses parents adoptifs.

Environnement familial actuel

60Il existe un conflit majeur entre les parents. Les parents sont en désaccord sur une explication possible des symptômes de Vanessa : pour le père, Vanessa souffre d’une " maladie ", elle n’est pas responsable. La question de la maladie " héritée de l’autre " se pose. Les fantasmes au sujet des parents biologiques resurgissent, fantasme de la maladie mentale héréditaire, de la mère biologique délinquante, prostituée. Pour la mère, Vanessa fait preuve de " mauvaise volonté " et cherche à les " mettre à bout ". La mère oscille entre rejet et fusion vis-à-vis de Vanessa.

61Il est à noter que la sœur de Vanessa, qui est de deux ans son aînée, a pris une direction totalement inverse de celle de Vanessa, tant sur le plan physique (très mince et féminine) que sur le plan social : elle est bien insérée professionnellement. Elle a quitté à 17 ans le domicile familial et vit actuellement en concubinage. En outre, elle témoigne d’un désintérêt total pour sa " culture " d’origine.

DISCUSSION

62Ce cas clinique suscite de nombreuses interrogations et pistes de réflexion. La question du diagnostic est mise de côté, car ce n’est pas l’angle sous lequel est abordé ici ce cas clinique.

Attaque du corps

63Ce corps que Vanessa attaque et mutile a un double statut : à la fois moyen d’expression de la vie interne et héritage des parents [30]. Cela se complexifie encore pour les adolescents adoptés à l’étranger comme Vanessa car le corps est tout à la fois l’héritage des parents biologiques et le témoin de la différence avec les parents adoptifs. Ce corps est héritage des parents biologiques car il renvoie à l’origine, à la lignée, au nom, au désir des parents vis-à-vis de soi [11] et est le substitut des objets parentaux [32]. Mais il est également témoin de la différence car l’enfant issu d’une adoption internationale, lorsque celle-ci est visible comme c’est le cas pour Vanessa, porte une touche particulière d’altérité inscrite dans son corps. Cette différence d’apparence physique avec les parents adoptifs peut accentuer la difficulté des identifications réciproques et la reconnaissance mutuelle. Le fantasme de l’étranger dans la maison peut être amplifié pour les parents. En attaquant ce corps si encombrant, Vanessa traduit un questionnement identitaire et une difficulté à trouver sa place dans la filiation. Elle attaque ainsi à la fois les traits transmis par les parents biologiques et l’altérité incarnée par la différence d’apparence physique avec les parents adoptifs. É. Kestemberg rappelle que, dans tous les cas, le corps est sollicité quand la problématique identificatoire est au premier plan. L’adolescent revendique le droit à le maîtriser ou à le détruire pour maintenir une identité défaillante [32]. L’acte suicidaire est aussi l’affirmation d’une identité en négatif, d’une désappartenance, d’une rupture [15].

64Un autre moyen de combattre cette différence est de créer, souvent inconsciemment, du même. Vanessa a " adopté " une apparence physique identique à celle de ses parents à travers ce surpoids, comme une tentative pour se faire reconnaître par ses parents. La ressemblance physique étonnante de Vanessa avec ses parents adoptifs rappelle un phénomène souvent observé chez les enfants adoptés : le mimétisme de ces enfants, créant du familier, du connu [5].

65D’autre part, les automutilations que réalise Vanessa peuvent être décrites comme blessure de la peau, premier lieu d’échange avec autrui définissant la limite entre le dedans et le dehors, enveloppe contenante protégeant l’intégrité de l’individu. Les scarifications peuvent, comme les tatouages, représenter la permanence de la trace comme ancrage dans l’histoire et permettre de se réapproprier son corps, la marque étant un signe d’appartenance au groupe et de rupture avec le monde antérieur [30]. L’enveloppe-prothèse que représente la peau est encore plus importante lorsque l’enfant n’a pas intériorisé le holding maternel [2], dans le cas de carences précoces, par exemple.

66La notion de Moi-peau a été décrite par D. Anzieu à partir de l’homologie entre les fonctions du moi et celles de l’enveloppe corporelle [2]. Cette limite entre le dedans et le dehors, le soi et le non-soi, est également la toute première enveloppe visible par l’autre. Cette enveloppe, malmenée et attaquée à l’adolescence, mais représentant aussi protection, contenant et pare-excitation, a comme spécificité, dans les cas d’adoptions visibles, de marquer la différence et d’exposer au regard d’autrui une filiation particulière. De nos cinq sens, c’est la vue qui affirme cette différence d’apparence physique. La dimension scopique dévoile le statut d’adopté de ces adolescents sans qu’ils aient la possibilité de le dissimuler. Or, à l’adolescence, le besoin de pouvoir dissimuler ce que l’on est, de passer inaperçu, de garder un secret, est fondamental. P. Aulagnier, dans son texte : " Le droit au secret, condition pour pouvoir penser " [12], a insisté sur la fonction du secret, accentuée à l’adolescence, et sur l’importance vitale de pouvoir garder des pensées secrètes. Le regard d’autrui est déterminant dans la construction du sentiment identitaire de l’adolescent.

Quête des origines

67Vanessa est très attirée par tout ce qui concerne son pays d’origine : la langue et la communauté tha ïlandaises, la décoration et les objets provenant de Tha ïlande, et souhaite aller visiter ce pays. Cette " culture " incarne non seulement son origine mais aussi son altérité. Lorsque l’on interroge Vanessa sur son intérêt pour la Tha ïlande, elle parle de sa curiosité vis-à-vis de ses parents géniteurs et de son souhait de trouver qui ils sont. La recherche des parents géniteurs se confond et prend la forme d’un intérêt pour le pays et la culture d’origine.

68Comment comprendre cette quête des origines de la part de Vanessa ? Nous avons vu dans la première partie de ce travail que l’on peut mettre en lien la recherche des parents biologiques à l’adolescence avec le conflit œdipien qui existe avec les parents adoptifs. La demande que fait Vanessa à ses parents d’aller retrouver ses parents biologiques se comprend alors comme une expression particulière du conflit. Elle teste ainsi la capacité de ses parents à supporter ses attaques. Cette quête des origines peut aussi être le masque que revêt une angoisse d’abandon, angoisse que le bouleversement de l’adolescence fait resurgir. La réalité externe, c’est-à-dire l’existence d’un autre couple parental, sert alors de support à travers lequel s’expriment ce conflit intrapsychique et cette angoisse.

69Dans le cas de Vanessa, une autre hypothèse peut être développée. En effet, le fait que leur fille appartienne à un ailleurs est très présent dans le discours et les représentations des parents : la mère fait finalement le choix de l’appeler par son prénom tha ïlandais, alors que celui-ci n’est que son deuxième prénom. Elle prépare ses filles à d’éventuelles insultes racistes qui risquent d’arriver. Le père accompagne Vanessa lorsqu’elle souhaite rencontrer des Tha ïlandais vivant en France, sans pouvoir l’aider à mettre un sens sur cette demande. On peut alors imaginer que la recherche des origines peut aussi être motivée, pour Vanessa, par le sentiment d’être étrangère à ses parents. Ce sont alors les fantasmes des parents adoptifs, dissimulés au-delà du récit, qui peuvent éclairer l’origine de ce sentiment d’étrangeté. Quelque chose empêche une inscription harmonieuse dans la filiation. Les raisons peuvent en être multiples : la présence de fantômes dans la chambre d’enfants [23], l’impossibilité d’accepter ce trop d’altérité et de faire sien cet enfant si différent, un vécu traumatique au moment de la rencontre avec l’enfant à l’orphelinat, l’existence d’un fantasme de rapt de l’enfant qui s’inscrit alors dans la théorie des origines. Cette ambivalence inconsciente des parents est mise en acte par l’adolescent, à travers sa recherche des parents biologiques. Il pointe ainsi les fantasmes et la souffrance des parents adoptifs.

70La réflexion autour de la quête des origines peut donc être pensée à la fois à partir du complexe d’Œdipe et des fantasmes parentaux. En complexifiant encore la réflexion autour de la quête des origines, on peut également considérer que l’adolescent adopté à l’étranger pointe et met en actes les questions que soulève la pratique de l’adoption internationale : le droit de connaître la vérité sur ses origines et son histoire, la dimension géopolitique (parents de pays riches adoptant dans des pays pauvres), la question philosophique du pouvoir que prend la société de donner un enfant à un couple.

71Enfin, un autre point de réflexion s’appuie sur une problématique centrale à l’adolescence : l’articulation entre réalité interne et réalité externe, telle que l’a décrite Ph. Jeammet [29]. L’objet externe joue le rôle d’organisateur du monde interne. Dans le cas de Vanessa, la quête des origines pourrait être comprise comme le recours à la réalité externe, d’autant plus investie lorsque la réalité interne est conflictuelle, menaçante ou défaillante. Les représentations fantasmées des parents biologiques jouent alors le rôle d’espace psychique élargi [29], dans la mesure où ils vont servir de support aux projections. Une part des fonctions psychiques de l’adolescent est cédée à ces objets externes.

Question de la dette

72La question de la dette est centrale dans les familles adoptives : dette de l’enfant adopté vis-à-vis de ses parents adoptifs pour lui avoir fait quitter des conditions de vie difficiles, mais également dette des parents adoptifs vis-à-vis de l’enfant et vis-à-vis des parents géniteurs pour leur avoir permis d’accéder à la parentalité. Dans le cas de Vanessa, le choix du bébé qu’a dû faire le père à l’orphelinat rend la question de la dette d’autant plus prégnante. Vanessa souligne la culpabilité qu’elle ressent d’avoir " pris la place à d’autres bébés " et la chance dont elle a pu bénéficier par rapport aux autres enfants qui sont restés dans l’orphelinat. (Ce sentiment est accentué par la présence, à la maison, de la photo d’une autre petite fille, prise à l’orphelinat. On avait, en effet, demandé au père de choisir un autre bébé si l’adoption n’aboutissait pas avec Vanessa, et le père a gardé les deux photos, celle avec Vanessa et celle avec l’autre bébé.) Il s’agit donc bien d’une élection pour Vanessa, qui fut le bébé choisi, dette qui peut être lourde à porter. Le danger est alors celui d’une dette insolvable. Cette élection semble néanmoins fragile, car, si Vanessa a été choisie et donc élue, elle était également remplaçable : n’importe quel autre bébé aurait pu être choisi à sa place.

73La question posée par l’enfant au moment de l’adolescence est alors : " Me choisiraient-ils à nouveau, vont-ils m’aimer encore, malgré les changements qui se produisent en moi ? " Cela marque une différence avec l’enfant " biologique ", dont l’existence n’est pas justifiée par ce qu’il est. On retrouve, là encore, la réassurance du biologique, des liens du sang.

74Enfin, la dette du père vis-à-vis de Vanessa transparaît à travers la culpabilité qu’il éprouve pour ne pas avoir fait soigner immédiatement l’oreille de Vanessa. Le récit du père montre une adhésion à une réalité violente qui marque Vanessa de l’image d’une enfant fragile, handicapée et envers laquelle le père a une dette ; le handicap physique (la surdité) de Vanessa représentant de plus l’héritage du pays d’origine et de sa misère (otite non soignée). Ces premières impressions ont des conséquences majeures sur les représentations que le père développe à propos de Vanessa, représentations dont l’impact se manifeste notamment au moment de l’adolescence, au moment de l’émergence des troubles : celle-ci est présentée comme une enfant malade, dont il faut s’occuper.

Relations de fratrie

75Les deux sœurs s’opposent radicalement sur plusieurs points : Vanessa présente un surpoids majeur comme ses parents, vit avec eux, ne travaille pas, est en rupture de scolarité et s’intéresse à tout ce qui touche à la Tha ïlande. À l’opposé, la sœur de Vanessa est féminine et très mince, est partie de la maison à 17 ans, travaille, vit en concubinage et témoigne d’un profond désintérêt pour son pays d’origine.

76Cette répartition des rôles et des fonctions au sein de la fratrie lorsqu’il y a plusieurs enfants adoptés est fréquemment décrite. Dans les situations où les parents adoptent deux enfants nés dans un pays étranger, A.-M. Crine et S. Nabinger ont fréquemment observé une polarisation, une sorte de clivage entre les enfants, l’un venant incarner l’enfant parfait, l’autre l’enfant difficile [16]. Cela ne se vérifie pas tout à fait dans ce cas, où Vanessa est l’enfant à problèmes mais proche de ses parents et sa sœur, l’enfant qui a réussi mais qui délaisse la famille. Rappelons aussi les différences de prénom : les parents appellent Vanessa par son prénom tha ïlandais et sa sœur par un prénom français. Enfin, s’il a été possible aux parents de se reconnaître dans l’aînée, qui a été adoptée à l’âge de 4 mois, cela a été plus difficile pour Vanessa, qui arrivait malade, âgée de presque 1 an.

77Dans le cas de plusieurs enfants adoptés à l’étranger dans une même famille, la fratrie partage un vécu commun ; le paradoxe identitaire est peut-être une aide précieuse sur un plan thérapeutique avec les adolescents adoptés.

78Lorsque l’on aborde la question de l’adoption, le risque est la fascination par cette singularité de l’histoire individuelle, cet élément biographique particulier. Or il est fondamental de ne pas réduire la psychopathologie d’un adolescent à son statut d’adopté et de ne pas rejeter à l’extérieur – en l’occurrence, sur l’appartenance à un ailleurs – la responsabilité des troubles, en perdant de vue le vécu subjectif et la réalité psychique. Cependant, nier cette histoire et cette réalité qui transparaissent dans le matériel clinique nous priverait de pistes de réflexion essentielles.

79Cette réflexion sur la question de l’adoption internationale peut être envisagée selon deux axes : l’axe de la filiation et celui des affiliations.

  • Sur l’axe filiatif, l’adoption permet de réfléchir sur l’importance de la filiation imaginaire et juridique lorsque la filiation biologique est absente. L’adoption internationale pose également la question de l’étranger, que l’on peut éluder lorsque cela concerne le monde extérieur (racisme) mais pas lorsque l’étranger est son enfant. Le caractère international de l’adoption semble être en soi un facteur d’amplification fantasmatique. En effet, toutes les adoptions posent la question du patrimoine génétique étranger, mais la problématique de l’altérité et de l’étranger est particulièrement mise en exergue dans les cas d’adoptions internationales. Le champ de réflexion ouvert est celui du rapport à la différence, différence qui s’immisce dans ce qu’il y a de plus intime, la filiation. Les parents adoptifs sont confrontés à un paradoxe : pour que l’inscription dans la filiation imaginaire soit possible, cette différence doit s’effacer pour laisser place au même, à la ressemblance, à la reconnaissance mutuelle. Et, pourtant, le déni de la différence d’apparence physique et de cette première appartenance à un autre pays, de ce premier paragraphe dans le récit de leur vie, risque d’être source de souffrance pour l’enfant.
  • L’adoption internationale pose également la question des affiliations et des enjeux transculturels dans l’établissement de l’identité et des identifications des adolescents. Cette appartenance au pays d’origine s’impose à l’adolescent à travers le regard posé sur lui, regard le qualifiant d’étranger, se basant sur sa différence d’apparence physique et faisant fi de son ressenti propre. Dans une société où l’apparence étrangère est presque banale mais classe néanmoins les adolescents en groupes, en minorités, séparés par des frontières bien peu perméables, l’adolescent adopté à l’étranger se retrouve malgré lui à une intersection toute particulière : inscrit sur un axe vertical de la filiation dans sa famille adoptive, il se retrouve, sur l’axe horizontal des affiliations, assimilé aux étrangers, aux migrants. Source d’une richesse infinie, cette multiplicité d’affiliations peut être aussi source de souffrance. Tel un enfant de migrants, l’adolescent adopté à l’étranger invente et construit son identité en puisant dans les identifications et les affiliations de deux mondes. À la différence de l’enfant de migrants, la culture du pays d’origine est le plus souvent un concept théorique et abstrait lorsque l’enfant a été adopté jeune. En revanche, être vu comme l’autre, comme l’étranger, a des répercussions dans la construction identitaire, même si les parents ont permis une inscription indélébile dans la filiation imaginaire. Ce deuxième monde est alors celui de l’étranger, continent non défini si ce n’est par l’altérité, inscrite dans le corps. La spécificité de l’adoption internationale existe donc également à travers ces enjeux affiliatifs. Les enjeux filiatifs et affiliatifs sont indissociablement liés, puisque l’inscription irrévocable de l’enfant adopté dans sa famille, et donc sur l’axe filiatif, est la condition permettant aux différentes affiliations de s’intriquer de façon souple et sans heurts.

80Les adolescents adoptés, en mettant en lien leurs symptômes et des questions comme la connaissance des origines, l’inscription dans la filiation ou le rapport à l’étranger, sont une source d’enrichissement infinie pour la psychiatrie des adolescents, adoptés ou non.

81Printemps 2006

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Mots-clés éditeurs : Psychopathologie, Adolescence, Enjeux transculturels, Adoption internationale

Date de mise en ligne : 01/04/2007.

https://doi.org/10.3917/psye.492.0543

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