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Global suburbanisms : governance, land, and infrastructure in the 21st century, Conseil de Recherche en Sciences Humaines du Canada, Grands Travaux de Recherche Concertés, 2010-2017, Chercheur principal : Roger Keil, York University.
1Cet article traite du développement et du réaménagement consécutif des territoires situés en périphérie urbaine ou dans ses alentours. Cet aménagement est caractéristique car dans ses phases initiales il se traduit généralement par la juxtaposition insolite d’une grande diversité de types d’utilisation du territoire, et parfois également de cultures et de formes de propriété foncière. Parce que la terre a bien plus de valeur dans le cadre d’une utilisation urbaine que dans celui d’une utilisation rurale, l’aménagement suburbain offre aux propriétaires terriens la possibilité de réaliser des profits exceptionnellement élevés. Les enjeux financiers sont très importants et partant, il ne fait aucun doute que le territoire suburbain constitue une source de conflits importante. C’est la terre, en tant que type de propriété, qui est le thème principal de cet article, mais sans oublier qu’une fois aménagée, elle est intimement liée aux bâtiments et autres types de « biens immobiliers ».
2Nous sommes parfaitement conscients du fait que le terme « suburbain » n’est pas employé partout, et que, même dans les régions dans lesquelles il est utilisé, il revêt généralement des sens différents (prenez par exemple sa définition en Amérique du Nord par rapport à sa définition en Europe). Dans cet article, nous considérerons que le terme « suburbain » qualifie toutes les zones qui sont ou se sont récemment trouvées dans, ou proche d’une périphérie urbaine en croissance. Cela inclut donc de nouvelles zones de banlieue à l’aménagement dispersé (encore appelées « exurb », périphérie urbaine, zones d’étalement urbain, ou zones périurbaines), des zones adjacentes à des territoires en développement continu (« grande banlieue ») et les espaces entre les deux qui ne s’intègrent pas forcément très bien dans le modèle urbain mono-centrique (Zwischenstadt, FlexSpace), ainsi que des zones plus anciennes et plus centrales (« proche banlieue ») susceptibles de faire l’objet d’un réaménagement. En ce sens, nous utilisons ce terme avec un fort prisme spatial.
3Cet article présente un référentiel d’analyse destiné à étudier l’idée largement partagée selon laquelle l’aménagement de la périphérie urbaine est propre à des lieux spécifiques et ne peut par conséquent faire l’objet d’une comparaison à l’échelle mondiale. Nous ne partageons pas cette opinion et nous proposons une méthode d’étude systématique des processus d’aménagement urbain. Bien que chaque développement soit, nous l’admettons, particulier, il reste possible d’étudier chacun d’entre eux en comparaison avec les autres. Dans notre article, nous commençons par présenter le contexte, puis nous proposons trois axes d’analyse : (i) les processus, (ii) les formes, et (iii) les politiques d’aménagement suburbain. Dans une certaine mesure, la différence entre ces éléments peut sembler arbitraire, mais leur distinction permet au moins de faciliter l’analyse.
4Le cadre de référence historique a bien plus d’impact sur le développement suburbain que le contexte immédiat propre au pays spécifique dans lequel il a lieu. En général, il y est à peine fait allusion, mais nous pouvons aborder la question ici. Une partie du développement suburbain est encadré par l’État, mais l’essentiel ne l’est pas (Ekers, Hamel & Keil, 2012). L’aménagement suburbain se fait aujourd’hui dans un contexte de pénétration irrégulière mais généralement inéluctable du marché du foncier, et de façon plus large, de la société, par les rapports de marché. Cette tendance s’appuie sur la propagation du droit foncier européen à travers le colonialisme (Powelson, 1988 ; Simpson, 1976 ; Sparkes, 2003). Elle est renforcée par un large éventail de facteurs souvent regroupés sous le terme « mondialisation » et parmi lesquels on trouve l’internationalisation des marchés de la finance et de l’emploi, l’articulation des politiques gouvernementales autour de l’efficience des marchés, ainsi que la difficulté croissante à définir les approches culturelles des modes de vie et de consommation souhaitables. Il s’agit également d’une période d’urbanisation rapide et continue, avec de nombreux pays qui opèrent et achèvent actuellement leur transition urbaine (Angel, 2012 ; Cohen, 2004). La croissance suburbaine est donc aujourd’hui importante et rapide, surtout dans les pays du Sud où elle se traduit essentiellement par un développement « informel » et quasi légal. Le caractère informel de ces développements affecte non seulement les aspects économiques du processus, mais aussi ses aspects politiques, influençant à fois les stratégies des promoteurs immobiliers et celles des gouvernements. Lorsque l’informalité est suffisamment courante, elle peut devenir un mode de gouvernance à part entière.
5L’urbanisation galopante est une tendance mondiale aux dimensions nationales. Elle est façonnée par les politiques des gouvernements sur le processus d’urbanisation : celles-ci affectent en effet la régulation de l’exode rural ainsi que la gestion des régions métropolitaines (Campanella, 2008 ; Davis, 2006 ; Wu, 2015). Les conceptions culturelles de la vie à la campagne, en ville ou en banlieue, souvent dépendantes de la classe sociale et du sexe, ainsi que la nature du contexte politique dans lequel l’aménagement a lieu, sont d’autres facteurs locaux dont l’impact peut être considérable, bien qu’indirect.
Typologie des facteurs ayant un impact sur l’aménagement du territoire suburbain
6Différents types de facteur influencent directement le développement suburbain. Nous en avons identifié neuf : le régime foncier, la structure de propriété, le droit foncier, la relation à l’implantation existante, les bénéfices issus des (ré)aménagements du territoire, le financement de l’aménagement, les bénéfices pour les administrations, l’organisation géographique des administrations locales ainsi que l’environnement biophysique spécifique dans lequel a lieu l’aménagement.
7Ces travaux doivent être compris dans le contexte d’un projet de recherche plus large, financé par le gouvernement canadien, qui s’intéresse à la suburbanisation à l’échelle mondiale. [1] Dans ce projet, nous avançons l’idée que le développement suburbain est un phénomène mondial, et qu’il faut donc l’étudier à l’échelle mondiale, malgré les différences et spécificités liées à la zone géographique dans laquelle il a lieu. Bien que nous croyions que la question du territoire soit fondamentale dans la définition des processus de développement suburbain, nous proposons ici un référentiel permettant de rendre opérationnelle une étude mondiale du développement suburbain. Le référentiel que nous proposons est donc censé permettre l’analyse des processus de développement suburbain sous toutes ses formes et toutes ses expressions : du modèle nord-américain de lotissement résidentiel constitué de maisons toutes identiques aux bidonvilles, des tours d’habitation aux favelas.
Le régime foncier
8Les modalités du contrôle des terres et les personnes qui en sont chargées constituent sans doute le facteur contextuel dont l’influence sur le développement suburbain est la plus importante (Doebele, 1987 ; Kim, 2011 ; Payne, 2002 ; Watson, 2009). En l’espèce, l’égalité hommes / femmes en matière de droit à la propriété est un enjeu très souvent négligé (Baruah, 2012 ; Varley, 2007). Le contrôle est généralement défini en termes de propriété, et plus spécifiquement de « propriété foncière ». Les droits de propriété déterminent qui a accès à la terre, et qui en est exclu : ils caractérisent ainsi une relation interpersonnelle (Krueckeberg, 1995). Les propriétaires ou les locataires peuvent être l’un ou l’autre des organes de l’État, mais aussi des particuliers, ou des entreprises privées.
9Dans tous les régimes fonciers, on trouve une forme de propriété communautaire (Bruce, 1988 ; Sparkes, 2003). Dans la plupart des régions du monde, la propriété foncière implique une combinaison variable de droits, de responsabilités et de modes de gouvernance et engendre ainsi une diversité de types de propriété collective ou individuelle. Les formes communautaires de propriété sont souvent considérées comme « traditionnelles », mais ces traditions sont parfois récentes (Krueckeberg, 1999). De façon révélatrice, elles sont en recul, et on les retrouve plus couramment en zone rurale, tandis qu’elles ont été largement délogées des zones urbaines. Concernant le sujet qui nous intéresse, c’est dans les zones de périphérie urbaine / suburbaine que la juxtaposition de différentes formes de propriété est la plus frappante et que la substitution des formes « traditionnelles » de propriété est la plus importante (Razzaz, 1994). Les tensions et les conflits qui en résultent sont l’une des caractéristiques les plus marquantes de la zone suburbaine. Dans ce contexte, une question cruciale se pose : peut-on vendre une terre détenue collectivement, et si oui, dans quelles circonstances ? Des situations de « pluralisme juridique », avec tous les chevauchements et les contradictions que cela implique, pourraient ainsi apparaître là où la propriété communautaire persiste.
10Un nouveau type de propriété communautaire est récemment apparu sous la forme de projets connus aux États-Unis sous le nom de Common Interest Developments (CIDs) (McKenzie, 2011 ; Sparkes, 2003 ; Glasze, Webster & Frantz, 2006), et dont l’équivalent en France est appelé « copropriété divise ». Dans ces projets, chaque propriétaire détient la propriété privée d’une unité individuelle tandis que les équipements collectifs sont détenus et gérés de façon conjointe. Les condominiums ainsi que les maisons de ville et les maisons individuelles situés dans des ensembles résidentiels protégés sont les exemples les plus répandus de ces nouveaux projets. L’ampleur de ce phénomène, sa nature et son importance stratégique future pour la gouvernance restent mal comprises.
La propriété foncière
11Qui contrôle la terre, et dans quelle mesure ce contrôle est-il dispersé ? Nous en savons étonnamment peu sur ces sujets (Goodchild & Munton, 1988), et dans les périodes de transition, la propriété peut être floue (Ho, 2001 ; Jenkins, 2009). La propriété peut être fortement concentrée dans les mains des pouvoirs publics, ou presque autant concentrée dans les mains du secteur privé souvent sous la forme de biens immobiliers occupés par leur propriétaire, ou, éventuellement, de copropriétés indivises de type CID (Sorensen, 2001).
Le droit foncier
12Quelles sont les limitations au contrôle conféré par la propriété, et qui les définit ? De telles limitations peuvent faire partie intégrante de certaines formes de propriété traditionnelle et collective et peuvent être exercées collectivement par des copropriétaires. Dans le cas de formes de propriété provenant d’Europe et/ou de colonies européennes de peuplement, les limitations sont typiquement définies par un organe de l’État, généralement au niveau local (Watson, 2009).
13La nature et la portée de la réglementation peuvent grandement varier (Evans, 2004), même entre des pays dont les traditions légales et culturelles sont très proches (Brown, Phillips & Roberts, 1981 ; Clawson, 1971 ; Hall et al., 1973). À titre d’exemple, un contrôle très élémentaire, communément appelé « zonage », consiste à réglementer le type d’utilisation qu’il peut être fait de la terre. D’autres contrôles portent sur les densités, ou encore sur les méthodes de construction et les matériaux.
L’implantation urbaine existante
14L’étendue et la nature de l’implantation urbaine antérieure, tant au sein de la zone construite qu’au-delà, est un aspect distinct mais associé à la propriété foncière dans les zones périurbaines en croissance. Au sein de la zone construite, la densité de l’implantation existante influe sur la possibilité que la croissance de population puisse être logée sans progression de l’expansion géographique. Sur le principe, il est possible d’atteindre des densités extrêmement élevées, mais les normes culturelles ainsi que les lois régissant l’occupation ou l’utilisation des sols définissent en général des limites bien inférieures. Autour de certaines villes, il arrive que la réattribution de terrains à la construction de nouveaux logements ait lieu dès la première phrase d’aménagement suburbain (Leaf, 2011 ; McGee, 1991). Le développement suburbain empiète généralement sur des terres agricoles sur lesquelles se trouvent des villages et des petites villes : dans ces zones, les habitants de longue date et les nouveaux résidents suburbains doivent apprendre à vivre ensemble, et les résultats sont imprévisibles. Par conséquent, il est fréquent que les habitants actuels s’opposent à la périurbanisation.
Les bénéfices issus des (ré)aménagements du territoire
15La terre dédiée à des usages urbains est presque toujours plus profitable que celle dédiée à l’agriculture : la conversion de terres à des fins urbaines est ainsi associée à une hausse importante de la valeur foncière (Dunkerley, 1983). La réaffectation d’une terre située en zone urbaine d’un usage (par exemple industriel) à un autre (par exemple résidentiel) peut également engendrer une augmentation de valeur. La plus-value peut bénéficier, selon différentes combinaisons, à des agences publiques (par exemple via des impôts sur les plus-values, des recettes ou des droits d’enregistrement) ou à des agents privés, qu’ils soient vendeurs ou acheteurs fonciers (Alterman, 2012 ; Jacobs & Paulsen, 2009). L’équilibre entre les bénéfices réalisés par ces différents groupes dépend de plusieurs éléments, et notamment des attitudes vis-à-vis du territoire, du secteur privé et de l’État, ainsi que du pouvoir de l’État. Les conflits et les luttes autour de la répartition du profit issu des (ré)aménagements du territoire peuvent jouer un rôle déterminant dans la concrétisation ou non de l’aménagement et influencer les modalités de sa réalisation (Brown, Phillips & Roberts, 1981 ; Hsing, 2010 ; Wu & Shen, 2013 ; Blais, 2010 ; Evans, 2004).
Le financement de l’aménagement
16Tout aménagement du territoire, quelle qu’en soit l’échelle, nécessite d’importants capitaux. La valeur d’une terre située à proximité d’un centre urbain est généralement très élevée. L’acquisition de terrains, ne serait-ce que pour un petit projet résidentiel de quelques dizaines de lots à bâtir, représente un investissement conséquent, et les promoteurs doivent en général prévoir un investissement à peu près équivalent pour les infrastructures. Il faut une route même pour le plus modeste des lotissements.
17Par conséquent, les promoteurs ont généralement recours à un important effet de levier. Aussi la disponibilité de moyens financiers peut-elle avoir un impact significatif sur la progression de l’aménagement ainsi que sur la forme qu’il revêt : des ressources financières limitées peuvent ralentir le développement, ou pousser à la création de lotissements mal desservis par les services publics urbains (McBride & French, 2011). Les sources de financement peuvent également avoir leur importance. En effet, les prêteurs, et surtout les grandes institutions de prêt, ont tendance à privilégier le financement de programmes d’aménagement standards, et ont ainsi un impact considérable sur les décisions prises (Haila, 1991 ; Leinberger, 2009).
Les finances publiques
18Nous nous intéressons ici à la forme, et plus particulièrement au socle financier des administrations locales. Les compétences des communes sont parfois définies par les constitutions nationales (comme aux États-Unis) mais il est plus fréquent qu’elles soient encadrées par les niveaux supérieurs de l’administration (comme au Canada et au Royaume-Uni). Ceci a un impact sur la probabilité que leur organisation géographique ne reflète l’expansion de l’implantation suburbaine. Néanmoins, étant donné que les villes rivalisent pour attirer les investissements en maintenant les impôts locaux à des niveaux faibles, elles dépendent généralement de transferts de fonds des niveaux supérieurs de l’administration. En matière de gouvernance urbaine, l’échelon administratif critique est celui juste au-dessus de la commune. La relation entre ces deux niveaux de l’administration et les considérations sociales exprimées à chacun de ces niveaux ont un impact considérable sur la réglementation du développement suburbain.
19Souvent, le budget des administrations locales repose au moins en partie sur les impôts fonciers de leur circonscription : généralement une taxe foncière ou un droit d’enregistrement. La taxe foncière encourage les administrations locales à proposer un cadre réglementaire permettant de maintenir ou d’accroître la valeur du foncier en imposant des restrictions sur les développements immobiliers, ou en favorisant des réaménagements avec des niveaux de densité plus élevés. Les taxes sur les cessions immobilières (droits d’enregistrement) encouragent quant à elles les administrations locales à pousser à l’augmentation du volume de transactions immobilières, y compris via la spéculation pure et simple ou les réaménagements. Dans tous les cas cités, les revenus des administrations locales dépendent ainsi de la bonne santé des marchés immobiliers locaux ; celles-ci sont donc particulièrement susceptibles de chercher à promouvoir le développement suburbain.
20La limitation des revenus fiscaux et du capital humain à disposition influent sur la capacité des administrations à gérer et à réglementer le foncier (Benjamin, 2008 ; Hsing, 2010 ; Logan & Molotch, 1987 ; Mattingly, 1993). Elle influe sur la capacité de l’État à établir et à maintenir des systèmes de gestion foncière, notamment des systèmes d’enregistrement foncier et cadastral à des fins fiscales, à faire appliquer les règlements de zonage et les restrictions relatives à la construction et à la densité, et à payer suffisamment ses employés pour qu’ils soient davantage en position de résister aux pots-de-vin des promoteurs immobiliers (Doebele, 1987).
L’organisation géographique des autorités municipales
21Il existe un grand nombre de configurations et il est difficile de généraliser. Il arrive fréquemment que la zone urbaine soit mal délimitée : dans cette situation, le développement suburbain s’étend au-delà des limites de la ville, en particulier dans les cas de villes en expansion rapide. Dans la mesure où aucune forme d’administration n’a l’autorité légale ou la capacité financière pour mettre en place une infrastructure ou piloter la croissance de ces zones, cette situation aboutira à un développement incontrôlé et à un mitage du territoire. Dans les zones contrôlées par des résidents établis opposés à toute implantation nouvelle, le développement suburbain sera inhibé ou redirigé ailleurs. Néanmoins, selon les sources de financement des autorités municipales, et selon leur attitude envers la spéculation foncière, certaines banlieues peuvent au contraire activement promouvoir le développement suburbain. Une fragmentation des autorités municipales aura un impact bien plus important dans les pays où les autorités locales sont inviolables, mais les contradictions qui pourraient en découler seront plus facilement résolues là où les compétences des autorités locales sont limitées ou conditionnelles, cependant les autorités provinciales ou nationales pourraient hésiter à passer outre les autorités locales ou à les fusionner, pour des questions politiques.
L’environnement biophysique
22Les modalités et la nature de la croissance suburbaine influent sur et sont influencées par les spécificités du cadre physique de la ville (McGregor, Simon & Thompson, 2006). Certaines contraintes biophysiques limitent les directions dans lesquelles peut s’effectuer la croissance urbaine, c’est le cas par exemple des plans d’eau ou des terrains montagneux. De tels paramètres biophysiques peuvent affecter de façon conséquente la disponibilité de terrains constructibles, la valeur des terres et les densités de population. La disponibilité d’eau potable et la facilité / le coût de l’élimination des déchets peuvent constituer une contrainte significative. Une terre basse est potentiellement vulnérable à une montée des eaux tandis qu’un versant de colline peut être sujet à des glissements de terrain.
23En prenant en compte ces facteurs, nous arguons que l’analyse de l’aménagement suburbain, comme de tout aménagement urbain, doit prendre en compte les formes de propriété foncière, les structures spécifiques de propriété, l’occupation existante du territoire, les modalités de planification et de réglementation foncière ainsi que les acteurs en charge, les profits issus des modifications de l’usage de la terre, les formes et les sources de financement de l’aménagement suburbain, le captage de revenus fonciers par les autorités locales, la structure administrative territoriale, ainsi que toute caractéristique biophysique spécifique du paysage. Dans la section qui suit, nous aborderons les processus, les configurations et les politiques d’aménagement du territoire.
Les processus de développement suburbain
24Les influences contextuelles n’entrent en jeu que dans la mesure où les villes grandissent et sont, de ce fait, confrontées à des problématiques d’aménagement ou de réaménagement. C’est le cas de la plupart des villes, en raison de l’accroissement naturel de la population, de l’exode rural ou de la redéfinition de leurs frontières, mais aussi dans certains cas, du fait de l’immigration. Il y a très peu de pays où la vitesse et la forme du développement suburbain sont pilotées par l’État. Dans la plupart des cas, le développement suburbain est issu d’un processus de marché.
25Il serait trompeur de parler, au singulier, du « marché du foncier ». Les marchés naissent de la rencontre entre des vendeurs et des acheteurs dans un contexte de supervision extérieure et d’application réglementée d’accords. Dans la plupart des marchés, les acheteurs et les vendeurs se réunissent dans un lieu physique donné : une bourse, une foire commerciale, ou, tout simplement, une place de marché. Les marchés fonciers ne fonctionnent pas de cette manière, notamment parce que le territoire est « immobile » (Evans, 2004). Ce n’est jamais la terre elle-même qui est vendue, mais seulement des droits d’usage de cette terre. Le bien lui-même ne peut être transporté, mais la surface aménageable peut être modifiée par le biais de montages réglementaires sur la hauteur maximale autorisée (à la hausse comme à la baisse) ; les acheteurs et les vendeurs se rencontrent dans des lieux variés, parfois sur les sites eux-mêmes. Le fonctionnement et la réglementation du marché foncier est propre à chaque lieu à plein de niveaux différents : dans certains endroits, une forte proportion des ventes sont arrangées par des intermédiaires (agents), dans d’autres cette proportion est très faible ; dans certains endroits, l’occupation des sols, la vente et l’aménagement du territoire sont strictement et rigoureusement réglementés, ailleurs, ce n’est pas le cas. Les marchés du foncier sont plus locaux, plus divers à l’échelle locale, et plus influencés par les autorités que ceux de tout autre bien (Bertaud, 2010).
26Le fonctionnement du marché du foncier suburbain est le produit de trois facteurs : (i) la capacité des autorités à réglementer le marché ; (ii) le rythme de la croissance urbaine, et dans une certaine mesure, sa source ; et (iii) la répartition de l’emploi.
Le contrôle étatique : l’informalité des marchés
27L’un des principaux éléments qui différencie les marchés fonciers entre eux tient à la nature et à l’ampleur de leur informalité (Roy, 2005). Nous caractérisons d’« informel » tout développement non conforme sur un ou plusieurs aspects aux réglementations foncières : cela inclut notamment les cas d’occupation illégale mais aussi les cas d’occupation irrégulière ou les « lotissements-pirates ». À des degrés variés, on retrouve ce type de développement partout, y compris dans les pays du Nord (Ward, 1999). La distinction entre marchés fonciers formels et informels est aussi une notion fluide, qui évolue dans le temps : en effet, ce qui est considéré comme étant informel peut changer. D’un côté, de nouvelles réglementations peuvent être introduites qui rendent des peuplements jusqu’alors acceptables illégaux, et donc susceptibles d’être évacués et rasés. De l’autre, des peuplements informels peuvent être améliorés et voir des services urbains se déployer en leur sein, tandis que leur tenure et leur zonage peuvent être acceptés et « régularisés ».
28La relation entre les peuplements formels et informels peut-être très étroite. Tous les types d’entrepreneurs peuvent être actifs sur les deux marchés, soit parce qu’ils cherchent à servir différentes catégories d’acheteurs, soit parce qu’ils cherchent à se diversifier, ou encore parce que la rentabilité relative des deux marchés varie. De la même façon, des résidents peuvent passer de peuplements formels à des peuplements informels et réciproquement, poussés par la recherche d’une plus grande sécurité foncière ou du fait d’opportunités d’investissement dans des zones informelles de peuplement qu’ils s’attendent à voir régularisées.
29L’ampleur du développement de peuplements informels dépend de la capacité et de la volonté des autorités à faire appliquer les réglementations qu’elles ont adoptées ou, dans certains cas, héritées d’un passé colonial (Gilbert, 1990 ; Roy, 2009). Il y a eu des exemples choquants de peuplements illégaux évacués et rasés par les autorités, et d’évictions réalisées dans une logique de marché et permises ou encouragées par l’État (Durand-Lasserve, 2006). Ces dernières années, les agences gouvernementales ont plutôt tendance à chercher à reloger au moins une partie des populations qu’elles déplacent. Mais en général, elles ne parviennent à aider qu’une minorité de personnes, et les lotissements de réinstallation des populations sont généralement situés dans des zones excentrées, très loin des bassins d’emploi. La capacité de l’État à reloger les populations déplacées dépend notamment de ses ressources, tant financières que techniques (Jenkins, 2000 ; Mattingly, 1993). Un cercle vicieux peut s’instaurer : le manque de contrôle diminue la capacité des autorités à générer des revenus en réduisant l’assiette fiscale, ce qui influence en retour leur aptitude à appliquer l’imposition et la réglementation foncières. Dans de telles situations, la volonté des autorités, et plus particulièrement celle des politiciens et des fonctionnaires concernés, à appliquer les réglementations officiellement en vigueur peuvent être mises en cause (Gilbert, 1990). En effet, l’existence de développements informels encourage la corruption, le népotisme et le clientélisme et peut également en dépendre (Roy, 2003).
Le rythme et la source de la croissance
30Le rythme de croissance de la zone urbaine est un facteur déterminant du volume de développement suburbain et également, de façon moins évidente, de la prééminence des questions suburbaines dans les débats à l’échelle locale et nationale. Une croissance rapide aura tendance à excéder la capacité des organismes officiels, tant privés que publics, à fournir une infrastructure de base, à épuiser les ressources financières publiques à disposition, ou à surpasser la capacité des autorités à appliquer les règles existantes en matière de développement foncier. Par ailleurs, une forte augmentation de la demande en logements et en terres est susceptible de conduire à une forte inflation des prix, ce qui peut perturber les équilibres politiques et sociaux de diverses façons, sans parler de l’impact que cela peut avoir sur la légitimité du gouvernement. N’importe lequel de ces phénomènes, et évidemment leur combinaison, aura pour résultat la prolifération de développements périphériques informels et probablement dispersés. Enfin, la hausse généralisée de la valeur de la terre induite par ce phénomène conduira également à des pressions accrues pour l’organisation d’opérations de réaménagement à des densités supérieures dans les quartiers urbains et suburbains existants.
31Un grand nombre de développements périphériques non réglementés ont eu lieu, à la fois dans un passé récent et dans un passé plus distant (de Boek, 2012 ; Harris, 1996 ; Turner, 1967). Ces développements périphériques prennent souvent la forme de bidonvilles (encore qualifiés de favelas, gecekondus, bustees, taudis périurbains, etc.) parce que la majorité des migrants ont des revenus relativement faibles. Dans certaines grandes villes en croissance rapide, on observe cependant la présence de lotissements non conformes (c’est-à-dire « irréguliers ») habités par des ménages à revenus moyens et élevés.
32L’origine de la croissance de la population urbaine et suburbaine a également un impact sur le marché foncier (Champion, 2007 ; Harris, 2010 ; Wu, 2015 ; Palen, 1995 ; Saunders, 2010 ; Szirmai, 2011). Habituellement, les migrants venus des campagnes ont peu d’économies et des revenus faibles, et leurs liens à la ville peuvent n’être que temporaires (Leaf, 2009). En revanche, quand de nouveaux habitants arrivent des villes, ils sont en général plus riches, ont davantage d’économies, sont attachés de façon permanente aux marchés urbains du travail (Goddard, 2012) et ils trouvent généralement un logement dans le secteur formel des zones à faible densité où les logements sont occupés par leurs propriétaires.
La géographie de l’activité économique
33Jusqu’ici, les analyses se sont fondées sur l’hypothèse que le noyau urbain constituait de loin la principale source d’emplois. C’est de moins en moins le cas. Est-il possible de formuler de grandes généralisations sur les effets de la localisation des centres d’emplois sur le processus de développement suburbain ?
34On peut s’attendre à deux types d’effets. Le premier tient aux mouvements de population entrante et sortante. S’il y a des emplois suburbains, les migrants d’origine rurale peuvent considérer un logement en zone suburbaine comme une option permanente plutôt que comme un arrêt intermédiaire avant une installation en ville. En même temps, ces emplois permettront à un éventail plus large de citadins de s’installer en périphérie. En effet, la présence d’emplois ouvriers en zone suburbaine donne lieu à l’apparition de banlieues ouvrières. Dans de telles situations, un ensemble suburbain encore plus divers aura tendance à se développer, et les contrastes entre les processus de marchés fonciers et les types de banlieues, associés aux migrants entrants et sortants, s’atténueront.
35La géographie de l’emploi joue un autre rôle, plus important encore, bien que fortement tributaire de la nature et de l’étendue du contrôle exercé par les autorités sur l’usage du foncier. Les emplois en zone suburbaine favorisent en effet une configuration plus décentralisée de l’habitat, avec des densités résidentielles et des prix du foncier plus faibles (Bertaud, 2010 ; Champion, 2007 ; Phelps, Wood & Valler, 2010). Ils permettent également de réduire la pression en faveur du réaménagement des quartiers dans les banlieues anciennes et les centres villes.
36En ayant à l’esprit ces trois aspects du processus de développement suburbain, l’étude du développement suburbain dans toute zone urbaine en croissance se devrait de répondre aux questions suivantes : quelle est l’importance du développement informel, et quelle(s) forme(s) prend-il ? Quel est le rythme de la croissance suburbaine, et d’où viennent les nouveaux résidents ? Où travaillent les nouveaux habitants des zones suburbaines ? Quelles sont les formes et les sources des financements utilisés (promoteurs, personnes privées) ? Qui construit les banlieues (promoteurs immobiliers, personnes privées) ?
Configurations et formes des peuplements suburbains
37Le développement suburbain n’est qu’une partie d’un processus plus étendu d’urbanisation et doit être compris comme tel. Concrètement, toutes les parties d’une région métropolitaine en croissance sont en situation de transition mais généralement, la nature et le rythme de ces transitions varient (McManus & Ethington, 2007 ; Phelps, Wood & Valler, 2010). Ceci mène à l’apparition de différentes configurations spatiales (Hoyt, 1971). Il convient cependant de souligner que l’observation des cartes successives de la surface bâtie d’à peu près chaque ville moderne révèle un vaste mouvement, parfois vraiment frappant, d’expansion périphérique dans la plupart des directions possibles, même si ce mouvement peut devenir plus complexe en présence de multiples centres d’emploi. Nous proposons d’étudier ces configurations selon trois approches.
Une perspective concentrique
38La méthode la plus répandue d’étude des configurations spatiales des villes est de partir d’une perspective concentrique, un modèle basé sur les études de Von Thünen sur le lien entre les loyers des terres agricoles et les coûts de transport (Sinclair, 1967). Ce modèle a été utilisé, en combinaison avec les théories sur l’écologie humaine, pour l’analyse des structures sociales urbaines à Chicago. Il repose sur l’hypothèse d’un centre urbain unique autour duquel la croissance a lieu, formant ainsi quatre couronnes identifiables. La première couronne, c’est-à-dire la zone extérieure la plus lointaine, contient un mélange d’usages fonciers ruraux et urbains (McGregor, Simon & Thompson, 2006 ; Simon, 2008). La juxtaposition de ces usages fonciers est généralement incongrue et interpelle l’observateur, et la proportion de terres réaffectées à d’autres usages est souvent élevée. Cette zone peut être qualifiée de zone « en devenir suburbain ». La deuxième couronne, ou zone suburbaine lointaine, est une zone de développement urbain plus ou moins continu, où l’urbanisation était encore très récemment discontinue ou « mitée ». Elle correspond à ce que la plupart des experts occidentaux qualifieraient de zone de développement « suburbain ». La troisième couronne, ou zone suburbaine proche, est une zone de développement urbain continue (Hanlon, 2010). Étant données les pressions considérables en faveur de réaménagements à des densités encore plus élevées auxquelles elle est soumise, cette zone peut être qualifiée de zone « en devenir urbain ». La quatrième couronne correspond au centre-ville lui-même, elle est donc indéniablement « urbaine ».
Une approche sous l’angle de l’économie politique
39La deuxième approche utilisée pour étudier les configurations spatiales se fonde sur une approche néo-marxiste du territoire. Elle permet d’expliquer les limites du modèle concentrique, non seulement dans les cas où la topographie des lieux bloque tout simplement le développement, mais aussi dans les situations où les comportements spéculatifs entraînent des distorsions du modèle idéal de distribution des loyers du foncier (Harvey, 1985). L’idée de la valeur d’usage par opposition à la valeur d’échange, quand elle est combinée avec une lecture critique de la production sociale d’espace à travers la notion de mode de vie, nous permet de comprendre pourquoi les peuplements suburbains sont hybrides et ne suivent pas les schémas prévisibles des modèles centre-périphérie, même s’il y a de multiples centres et sous-centres (Zukin, 1991). Ce modèle explique les schémas de développement urbain via les logiques de reproduction des classes et d’accumulation du capital.
Une analyse visuelle
40La troisième approche proposée pour l’étude des configurations spatiales est empirique et s’intéresse à la diversité du bâti. Elle repose sur l’hypothèse que les zones urbanisées ont des centres multiples dont l’ampleur et les caractéristiques diffèrent, au sein desquels de nouveaux centres prennent forme, où des usages différents se confrontent de façon historiquement relativement novatrice, et où de prestigieux bureaux côtoient des paysages agricoles. Au cours des deux dernières décennies, les chercheurs en urbanisme ont tenté de définir ces nouvelles formes urbaines avec de nouveaux termes : technoburb (Fishman, 1987), edge city (« ville-lisière ») (Garreau, 1991), exopolis (Soja, 1992), FlexSpace (Lehrer, 1994), inbetween city (« ville d’entre-deux ») (Sieverts, 2003) et metroburbia (Knox, 2008). Tous ces termes sont issus d’un contexte nord-américain ou européen mais ont également été utilisés pour décrire des schémas de développement dans d’autres régions du monde.
41Il n’y a pas que les usages qui varient largement, le bâti revêt également des formes très diverses – des bâtiments de faible hauteur aux constructions de grande hauteur, des logements individuels aux logements collectifs, de l’auto-construction aux projets de promoteurs privés, des villas de luxe sur de grands terrains aux lotissements à forte densité, du formel à l’informel, de l’utilisation de matériaux naturels aux matériaux industriels, des logements purement fonctionnels aux demeures richement décorées. La plupart du temps, plusieurs de ces formes urbaines se côtoient, même si l’on retrouve souvent une forme dominante. Dans les contextes où les règlements d’urbanisme et les pratiques sont plus informels, le degré de diversité sera généralement supérieur à celui des zones strictement réglementées. À l’échelle mondiale, les nouveaux espaces urbains situés au pourtour des villes sont généralement constitués d’un éventail relativement large de formes urbaines.
42Ces trois approches des configurations et des types de nouvelles formes (sub)urbaines constituent une méthode exploratoire dont le but est de développer un langage systématique permettant de décrire les nouvelles formes urbaines à la périphérie des villes et de faire avancer la conceptualisation de cette nouvelle forme urbaine, en se fondant à la fois sur des études empiriques et sur des recherches théoriques. Cette méthode pose les questions suivantes : à quelle vitesse les transitions de développement ont-elles lieu dans chacune des zones suburbaines ? Quels usages des sols y trouve-t-on ? Quelle y est la diversité des formes construites ? Quelles sont les formes construites dominantes ? Y a-t-il des couches d’histoire différentes dans l’environnement bâti et, si oui, lesquelles ? Y a-t-il des espaces collectifs et si oui, de quel type ? Quel est le ratio entre espaces individuels, espaces collectifs, et espaces dédiés aux entreprises ? Quelle forme d’infrastructure y trouve-t-on ? Quels types d’aménagements y trouve-t-on ?
Enjeux liés à la planification
43Beaucoup de problématiques de développement urbain prennent source dans les processus et les schémas de développement suburbaine identifiés plus haut. Le changement des usages du territoire dans des contextes de croissance urbaine, la décentralisation de l’activité économique et l’émergence d’une classe moyenne consommatrice ont eu lieu à l’échelle mondiale au cours des deux dernières décennies, avec pour conséquence le fait que les villes se retrouvent souvent entourées d’une ceinture de centres commerciaux, d’usines, de centres logistiques et d’ensembles résidentiels de maisons individuelles en expansion. Cette section passe en revue quatre aspects de la planification urbaine : la politique publique, l’administration foncière, la planification de l’utilisation des sols ou aménagement du territoire, et les codes et règlements en matière de construction.
Les politiques publiques
44Depuis la Seconde Guerre mondiale, le développement suburbain est considéré comme un objectif des politiques publiques. Il a été encouragé à travers la coordination de la planification foncière avec les investissements dans les infrastructures, et plus particulièrement dans les infrastructures transport. Il a ainsi pris la forme d’habitations destinées à une classe moyenne émergente propriétaire, et généralement financées par la dette (Florida & Feldman, 1988). À partir des années 1990, dans la plupart des pays, les politiques et la planification urbaine sont passées d’approches welfaristes de mise à disposition de logements à une dépendance principale aux marchés privés. Un nombre croissant de pays réalisent des investissements significatifs dans les infrastructures de transport pour soutenir la décentralisation économique et administrative. Mais en parallèle, ils adoptent des approches facilitant la pénétration des marchés dans la gestion du territoire suburbain, ont recours aux partenariats publics-privés, et favorisent particulièrement le développement de vastes ensembles résidentiels ainsi que de « villes nouvelles » par des promoteurs immobiliers (Bloch et al, 2013).
L’administration foncière
45Les régimes d’administration foncière constituent un prérequis fondamental pour le développement de marchés fonciers efficients et pour un aménagement du territoire efficace (Enermark, 2009). En effet, ils fournissant l’infrastructure sociale, légale, économique et technique nécessaire à l’activité des urbanistes, des gestionnaires et des administrateurs urbains. Les régimes d’administration foncière ont quatre composantes interdépendantes, à savoir la gestion de la propriété foncière, la valeur du foncier, ses usages et son développement. Ils offrent l’infrastructure fondamentale nécessaire à la valorisation et à la taxation foncière, ainsi qu’à la planification de l’utilisation des sols, et ils définissent les procédures et les règles d’enregistrement des transferts de droits fonciers et jouent donc un rôle crucial dans la réussite de la mise en œuvre de politiques foncières suburbaines. Dans certains pays, les régimes fonciers et la propriété foncière sont bien définis, en général sur la base de la franche tenure ou de la tenure à bail, et sont soutenus par des systèmes d’administration foncière disposant de ressources abondantes et de personnel compétent, qui protègent de façon efficace les droits de propriété formels. Dans d’autres, à l’inverse, ces systèmes légaux ne reflètent pas la diversité des régimes fonciers socialement organisés en dehors du cadre juridique formel (Blomley, 2004) ; il s’ensuit que les systèmes d’administration foncière ne reflètent (ou ne reconnaissent) pas la diversité des régimes fonciers formels, informels et hybrides qui sont omniprésents dans beaucoup d’endroits dans le monde. Par conséquent, les administrations locales sont souvent incapables de garantir aux populations urbaines la sécurité d’occupation de leur logement, et c’est un problème encore plus marqué au sein des populations défavorisées (Lombard, 2012).
L’aménagement du territoire
46Les systèmes modernes d’aménagement du territoire ont été diffusés à de nombreux pays à travers la colonisation et la mondialisation. Les systèmes de planification modernes se fondent, par convention, sur un plan directeur qui repose lui-même généralement sur des régimes de contrôle très stricts du développement urbain, et notamment sur des normes de zonage, dont la portée s’étend de l’utilisation des sols à la hauteur, au volume, et à la densité des bâtiments. Là où les capacités institutionnelles nécessaires à la mise en œuvre de telles réglementations existent, les villes se développent généralement de façon ordonnée, conformément aux cadres de planification urbaine en vigueur, notamment en ce qui concerne la maîtrise de leur expansion territoriale (Jenks & Burgess, 2000). Ceci a été possible grâce à la mise en place de mesures supplémentaires telles que des limites géographiques à l’expansion urbaine. Mais dans les pays où les capacités institutionnelles et la décentralisation de l’autorité sont limitées, et où l’urbanisation et l’expansion urbaine ont lieu à un rythme très soutenu, les règlements d’aménagement en vigueur ont été submergés au point d’être désormais inefficaces (Angel et al., 2011). Dans de telles conditions, les plans d’utilisation des sols et les réglementations foncières sont largement ignorées ou contournées tant par les promoteurs opérant dans le cadre formel que par les occupants informels. Un plan d’aménagement détaillé a néanmoins lieu de façon symbolique sous l’égide de l’État, mais la responsabilité de la planification est de plus en plus laissée entre les mains des promoteurs privés, qui ont leurs propres intérêts économiques. Les communes suburbaines sont de plus en plus nombreuses à utiliser des cadres déréglementés de planification comme instrument concurrentiel pour attirer les promoteurs, favorisant ainsi l’apparition de configurations spatiales non coordonnées et disjointes d’« étalement » urbain.
47Le paradigme dominant en matière de planification et de gestion de l’expansion urbaine consiste à contrer l’« étalement », dans une logique de développement durable des villes, en promouvant un format de ville compacte, délimitée, contenue et à forte densité (Calthorpe, 1993 ; UN Habitat, 2009). Certains auteurs ont néanmoins avancé des arguments remettant en cause la pertinence de ces stratégies d’endiguement dans le cas de dynamiques de croissance spécifiques de villes en expansion et en urbanisation rapide, ils encouragent plutôt une approche consistant à « faire de la place » pour de nouveaux habitants urbains en préparant le foncier, l’infrastructure et les services nécessaires en amont du peuplement (Angel et al., 2011). Il est important d’attirer l’attention sur le fait que dans ces discours, les développements suburbains sont généralement qualifiés d’« étalement », c’est-à-dire de schémas d’expansion urbaine spatiale à faible densité. En réalité, de récentes études tendent à démontrer que dans un grand nombre de pays en voie de développement, ce concept simpliste d’« étalement » n’est pas pertinent, parce que les dynamiques très complexes de croissance (sub)urbaine engendrent une grande diversité de niveaux de densité, une juxtaposition de différents usages du territoire et de divers types de résidences, ainsi qu’au développement de formes urbaines polynucléaires (Bloch et al., 2013). Le terme d’« étalement urbain » mérite ainsi qu’on lui accorde une plus grande attention pour garantir l’élaboration de politiques appropriées (Brown, 2014).
Les codes et règlements en matière de construction
48Les codes de construction jouent un rôle essentiel dans la mise en œuvre de politiques et de plans d’aménagement du territoire. Il en existe deux types. Les codes normatifs définissent les types de matériaux de construction utilisables et indiquent comment les composants peuvent être fabriqués. Les codes relatifs à la qualité définissent quant à eux des objectifs spécifiques à atteindre. L’existence de tels codes de construction est censée permettre de garantir que les bâtiments construits sont structurellement sûrs, sains et salubres, surtout en ce qui concerne la sécurité incendie, et ils sont désormais une composante importante des stratégies de réduction des risques de catastrophe et d’adaptation aux changements climatiques (Johnson, 2011).
49Dans beaucoup de pays en voie de développement, même en l’absence de plans d’utilisation des sols ou de zonage utilisables, les codes de construction ont souvent encore une influence considérable sur le processus formel de construction et, dans certains cas, plus encore que les systèmes de planification eux-mêmes. Les populations urbaines défavorisées sont souvent contraintes de construire dans des lotissements informels, lesquels sont souvent sous-desservis et situés sur des territoires marginaux et à risque (Satterthwaite et al., 2009). En conséquence, de nombreuses administrations locales sont enfermées dans un cercle vicieux : les politiques de planification et les codes de construction restreignent en effet l’accès aux marchés fonciers formels, favorisant ainsi la prolifération des solutions informelles et réduisant l’assiette fiscale nécessaire pour mettre en œuvre une politique d’aménagement adéquate et investir dans l’infrastructure et les services urbains, ce qui sape finalement aussi bien les objectifs d’aménagement de court terme que ceux de long terme.
50Sur la base de l’analyse ci-dessus, les questions suivantes doivent être posées : la position officielle en matière de politique urbaine sur la suburbanisation est-elle proactive ou réactive ? Quels sont les systèmes d’aménagement du territoire en place et dans quelle mesure sont-ils adaptés aux dynamiques spécifiques de la croissance suburbaine ? Comment l’État se positionne-t-il par rapport aux autres acteurs politiques et économiques qui prennent part au processus de développement suburbain ? Dans quelle mesure les composantes des systèmes d’administration foncière (régime foncier, valorisation foncière, utilisation des sols et développement urbain) peuvent-elles être mises en œuvre ? Dans quelle mesure les codes de construction reflètent-ils leur contexte social, économique et culturel ? Quels sont les effets prévus et imprévus des politiques d’aménagement et des codes de construction sur l’aménagement du territoire, en particulier en ce qui concerne l’équité socio-environnementale et la viabilité environnementale dans un contexte de changement climatique ?
En guise de conclusion : vers un cadre comparatif
51Il est évident que la nature du développement suburbain est différente dans chaque aire urbaine, dans chaque pays, et plus généralement à travers les grandes régions du monde. La question est de savoir si elle est différente au point qu’il soit inutile de chercher à effectuer des comparaisons en les étudiant toutes au sein d’un même cadre de référence. Ce qui suit est une rapide tentative préliminaire d’utilisation du référentiel défini en amont pour couvrir certains des éléments les plus importants de la diversité mondiale en termes d’aménagement suburbain. Il serait possible d’utiliser ce référentiel pour comparer l’aménagement suburbain dans deux villes, pays, ou régions, quels qu’ils soient. Dans le cas présent, nous ne faisons que quelques brefs commentaires sur le Nord et le Sud.
52Un certain nombre des « contextes » et des « processus » d’aménagement suburbain sont souvent considérés comme des caractéristiques distinctives de l’urbanisation dans les pays du Sud, en voici les principales : une urbanisation rapide d’un ou de plusieurs types d’informalités du marché ; des administrations locales fragiles, affaiblies par différentes formes de corruption ; une vaste implantation de populations à faibles revenus en périphérie urbaine ; l’intégration récente de nombreux villages dans des zones urbaines en expansion rapide ; une juxtaposition suburbaine de différentes formes de régimes fonciers, entraînant généralement l’érosion de la forme la plus « traditionnelle » de propriété de chaque endroit ; en général, les banlieues sont l’un des lieux principaux de pénétration et d’expansion du capitalisme de marché.
53Il est vrai que si l’on compare Toronto ou Leipzig à Lagos ou Cochabamba, des différences substantielles apparaîtront entre le premier et le second groupe de villes sur chacun de ces critères. Mais il y a deux réserves importantes à cela. En premier lieu, quasiment toutes les divergences importantes sont des divergences de degré et non de nature, même si certains pourraient avancer que dans certains cas, des divergences de degré constituent des différences de nature. En second lieu, les villes occidentales sont passées, il n’y a pas si longtemps que cela, par des processus et des configurations d’aménagement suburbain très similaires à ceux que l’on observe dans les pays en développement. Elles ont remis en cause les systèmes antérieurs de régime foncier. En d’autres termes, s’il est possible de comparer les formes passées et présentes d’aménagement suburbain dans toute ville occidentale – ce que la plupart des experts admettraient – alors il doit également être possible de faire de telles comparaisons aujourd’hui à l’échelle internationale. Si l’on admet que de telles comparaisons sont possibles, il convient peut-être d’ouvrir sur le débat sur la question de leur utilité et des enseignements qui en ressortiraient.
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Mots-clés éditeurs : suburbanisation, cadre comparative, territoire, aménagement du territoire
Date de mise en ligne : 20/07/2015
https://doi.org/10.3917/psud.042.0063Notes
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[1]
Global suburbanisms : governance, land, and infrastructure in the 21st century, Conseil de Recherche en Sciences Humaines du Canada, Grands Travaux de Recherche Concertés, 2010-2017, Chercheur principal : Roger Keil, York University.