Pôle Sud 2011/2 n° 35

Couverture de PSUD_035

Article de revue

Quel est le bon débit de l'eau ? Les régulations territoriales sur les usages de l'eau à l'épreuve de la DCE

Pages 59 à 75

Notes

  • [1]
    Assises régionales de l’eau, PACA, juin 2009. Président Chambre Régionale d’agriculture, PACA.
  • [2]
    La loi sur les milieux aquatiques (LEMA) 30/12/2006.
  • [3]
    SDAGE Adour-Garonne : « Maîtriser la gestion quantitative de l’eau dans la perspective du changement climatique. » SDAGE Rhône-Méditerranée : « Atteindre équilibre quantitatif en améliorant le partage de la ressource en eau et en anticipant l’avenir. »
  • [4]
    Grenelle de l’environnement, engagement n°117.
  • [5]
    « La reconquête du bon état des eaux et des milieux aquatiques. De l’état des eaux en 2009 aux objectifs 2015 », rapportage de la France à la Commission Européenne sur la mise en œuvre de la DCE, mars 2010. www.eaufrance.fr
  • [6]
    Ce que souligne le Conseil d’État en insistant sur le potentiel contentieux européen en la matière. Conseil d’État, L’eau et son droit, rapport public, juin 2010.
  • [7]
    L’étiage est la période de l’année où le débit d’un cours d’eau atteint son niveau le plus bas. Les débits ou niveaux d’objectif d’étiage est la valeur au-dessus de laquelle, il est considéré que l’ensemble des usages (activités, prélèvements, rejets, …) est en équilibre avec le bon fonctionnement du milieu aquatique.
  • [8]
    Dans cet article, la région sera envisagée d’abord en tant qu’unité territoriale et échelle d’analyse puis en tant que collectivité territoriale (le Conseil régional). Notamment, nous chercherons comment le Conseil régional, s’efforce de jouer un rôle dans le domaine de la gestion de l’eau, ce qui tend à transformer les systèmes de régulations locaux.
  • [9]
    La participation du grand public est limitée à la possibilité de donner son avis, par questionnaire, sur les projets de SDAGE. Les « habitants » ne participent pas aux structures locales.
  • [10]
    Les Départements ont investi 1,325 milliard d’euros en 2002 dans l’environnement, les deux tiers de cette dépense étant consacrés à l’eau (soit 883 M€) ; de leur côté, les Régions n’y consacrent que 18,2 % de leurs dépenses environnementales, soit 77 millions d’euros par an environ. IFEN (2005), Les dépenses d’environnement des Départements et des Régions (1996-2002), Les dossiers, n° 2, 24 p. Par ailleurs, les services techniques du Conseil régional sont réduits. En Poitou-Charentes, le service « Eau » est composé du chef de service et de trois agents, techniciens et secrétaire.
  • [11]
    Pour une présentation de ces enjeux territoriaux de la gestion de l’eau (Ghiotti, 2010).
  • [12]
    Depuis les années 2000, le terme « guerre de l’eau » revient de façon récurrente dans la presse locale.
  • [13]
    Pour un bilan, voir le rapport du Conseil d’État, op. cit.
  • [14]
    Décret du 29/4/94.
  • [15]
    Un « assec » désigne l’état d’une rivière ou d’un étang à sec.
  • [16]
    « Horizon 2015 : passer d’une gestion conjoncturelle (prévenir/gérer les crises) à une gestion structurelle (équilibre des milieux) », Préfecture de la région Poitou-Charentes, 29/09/09.
  • [17]
    Ministre de l’agriculture, clôture du colloque « Eau et agriculture : leçons d’une sécheresse », 1990.
  • [18]
    Entretien, chef du service irrigation, Chambre d’agriculture 16.
  • [19]
    Charente Libre 22/8/96.
  • [20]
    Entretien chef du service environnement, Chambre d’agriculture 17.
  • [21]
    Entretien, président du groupement des irrigants charentais.
  • [22]
    La naturalisation renvoie à « des stratégies de représentations qui fixent les distinctions sociales et les rendent pérennes. La naturalisation constitue donc une manière d’empêcher les changements de sens à travers un processus de clôture discursive et idéologique » (Hall, 1997).
  • [23]
    Le barrage sur la Trézence, longtemps porté par le Conseil général de Charente-Maritime (Grujard, 2003), dont la déclaration d’utilité publique a été « cassée » par le juge administratif au motif de l’absence de définition précise des objectifs visés en est un bon exemple. CE 22/10/03 Association SOS Rivières. Voir RJE 2/2004.
  • [24]
    Le financement de ces retenues est un enjeu majeur et (donc) assez peu transparent. Il est désormais prévu que le financement public soit plafonné à 70%. Depuis le début des années 1990, le Conseil de Poitou-Charentes est engagé dans le programme de financement des ouvrages visant le stockage de l’eau. Dans le CPER 2000-2006, le Conseil régional et l’État s’étaient engagés à hauteur de 6,10M€ chacun, montant auquel il faut ajouter le financement des Conseils généraux qui varie suivant le nombre de projets qui concernent le département ; ainsi la Charente-Maritime est traditionnellement un principal financeur. La fin de ce programme marque aussi la fin du « consensus » sur les retenues (infra). Depuis 2006, le Conseil régional ne finance plus (sauf exception) les retenues de substitution et dans son sillage, des Conseils généraux ont décidé de limiter leur contribution ; c’est notamment le cas du Conseil général des Deux-Sèvres, depuis 2008 et la victoire de la gauche aux cantonales (alors que le nombre de demandes de retenues est important dans ce qu’on nomme « le triangle d’or du maïs »). La répartition des financements dans la dernière convention illustre bien l’enjeu politique de ces ouvrages : État (12,5M€), FEADER (2Me), Vienne (700000€), Charente (1,3M€), Deux-Sèvres (1,5M€), Charente-Maritime (10M€).
  • [25]
    De l’ordre de 20% entre 2004 et 2008, Agreste 2010, DRAF Poitou-Charentes.
  • [26]
    Entretien, coordinateur Carg’eau.
  • [27]
    Entretien, président association Apieee.
  • [28]
    Le collectif Carg’eau est créé en 2005. Il rassemble principalement des APNE, des associations de pêcheurs et de consommateurs. Pour une analyse approfondie de l’évolution du rapport entre la coalition environnementaliste et de la coalition agricole (Mazeaud, 2011).
  • [29]
    SDAGE Rhône-Méditerranée, p. 22.
  • [30]
    Rapport de l’association des irrigants des régions méditerranéennes françaises (AIRMF). L’agriculture irriguée méditerranéenne, une source de richesse au cœur des enjeux du développement durable, septembre 2009.
  • [31]
    INRA, Synthèse Eau et agriculture, p. 63. L’AIRMF estime que 75 à 80 % de l’irrigation est réalisée grâce aux grandes retenues.
  • [32]
    Assises régionales de l’eau, PACA.
  • [33]
    La DCE prévoit trois motifs de dérogation à l’atteinte du bon état en 2015 : raisons économiques (coûts disproportionnés au regard des bénéfices attendus), techniques (pas de technique efficace connue ou temps de préparation et de réalisation trop long au regard de l’échéance de 2015) et les conditions naturelles (temps de réaction du milieu aux mesures prises).
  • [34]
    Circulaire du 30/06/08 relative à la résorption des déficits quantitatifs en matière de prélèvement d’eau et gestion collective des prélèvements d’irrigation.
  • [35]
    Ibid.
  • [36]
    Ibid.
  • [37]
    Charente Libre, 27/08/09.
  • [38]
    Étude accessible sur le site internet de la DREAL Poitou-Charentes.
  • [39]
    Vote des volumes prélevables, 11/01/10. La Commission locale du SAGE Boutonne met en ligne les compte-rendus des réunions : sage-boutonne.pagesperso-orange.fr
  • [40]
    Les premières mesures incitatives à l’arrêt de l’irrigation, dites mesures de « désirrigation », apparaissent au début des années 2000. Elles reposent sur le raisonnement suivant : l’irrigation a été subventionnée, son arrêt engendre une perte pour l’exploitant, il faut donc proposer des mesures financières pour inciter l’irrigant à cesser d’irriguer.
  • [41]
    Circulaire 2/06/10 relative à la résorption des déséquilibres quantitatifs en matière de prélèvements d’eau et gestion collective des prélèvements d’irrigation dans les bassins où l’écart entre le volume prélevé en année quinquennale sèche et le volume prélevable est supérieur à un seuil de l’ordre de 30 %. On retrouve cette opposition du monde agricole sur une large part du bassin Adour Garonne.
  • [42]
    Charente Libre, 1/8/10.
  • [43]
    Président de la Chambre d’agriculture. Charente Libre, 6/7/10.
  • [44]
    Entretien, responsable Eau, Chambre d’agriculture 16.
  • [45]
    Circulaire 3/08/10, op. cit.
  • [46]
    SDAGE Rhône-Méditerranée, pp. 178 et 91.
  • [47]
    Charente Libre, 1/6/10.
  • [48]
    C’est notamment le but de la création du collectif au nom explicite : « SOS, Eau Voleurs ! ».
  • [49]
    Ce que souligne notamment l’AIRMF, op. cit.
  • [50]
    L’indépendant, 21/12/10.
  • [51]
    L’indépendant, 8/03/08.
  • [52]
    C’est du moins l’analyse qu’en fait Stéphane Ghiotti (Montpellier journal, 22/06/10) et une critique généralement adressée au projet par ses opposants.
  • [53]
    À noter qu’on trouve des signes de cette « régionalisation » de la gestion de l’eau, à travers des opérations de mise en débat et d’aménagement, dans d’autres régions européennes confrontées à cette question, comme par exemple l’Andalousie.
  • [54]
    Loi du 13/08/04.
  • [55]
    Midi Libre, 1/09/08.
  • [56]
    La décision de suspendre, puis d’arrêter, le financement des retenues de substitution a été un facteur décisif de développement d’un « débat sauvage » sur les usages de l’eau (Mazeaud, 2011).
« Quelqu’un a parlé de la DCE, du bon état de nos eaux, du bon état des rivières. J’aimerais savoir ce que c’est que le bon état puisqu’à mon avis il n’est pas le même dans les différents pays européens [1]. »

1La Directive cadre européenne sur l’eau (DCE) fixe comme objectif le bon état écologique de l’eau à l’horizon 2015. Elle impose trois principes d’action : la gestion intégrée, la prise en compte de données environnementales et socio-économiques et la participation du public ; elle vise donc à articuler des logiques d’expertise et de gestion concertée à l’échelle des bassins hydrographiques. Selon la transposition française [2], ce sont les SDAGE (Schéma d’aménagement et de gestion des eaux) qui identifient les bassins en déficit quantitatif et définissent les mesures à prendre en fonction des spécificités de chaque bassin. En dépit de leurs différences hydrographiques, tous les SDAGE adoptés en 2010 ont fait de la gestion quantitative une orientation fondamentale [3], attestant ainsi de l’allégeance française aux objectifs et aux principes européens : il s’agit de « mettre en place une gestion quantitative de la ressource ajustée et modernisée en adaptant les prélèvements à la ressource » [4]. La DCE ne fait expressément référence au bon état quantitatif que pour ce qui concerne les eaux souterraines (le niveau des nappes) mais l’atteinte du bon état écologique des eaux de surface suppose aussi la garantie d’un débit minimal des cours d’eau : « Une masse d’eau en bon état, c’est une eau en qualité et en quantité suffisante pour assurer un fonctionnement durable des écosystèmes et satisfaire les usages [5] ». Or, si la qualité de l’eau peut se mesurer avec des indicateurs de l’état chimique relativement standardisés, le bon débit (ou niveau) de l’eau ne peut être défini a priori et varie selon les régimes hydrographiques [6].

2Un enjeu majeur de la concertation réside donc dans la définition des indicateurs de l’état du milieu et donc des critères de débit (ou de niveau) de l’eau en bon état : il s’agit d’une part de définir les débits ou les niveaux piézométriques d’objectif d’étiage qui assurent la continuité écologique [7], permettent la satisfaction de tous les usages et en premier lieu la vie aquatique, et d’autre part le débit de crise, c’est-à-dire celui où il est porté atteinte à la vie aquatique, où l’eau potable est menacée et où tous les prélèvements sont interdits. En ce sens, la DCE et sa transposition française, traduisent une tentative d’objectivation des besoins des rivières, et de ce point de vue une reconnaissance du caractère prioritaire du milieu. Cette notion de débit minimum, ou plutôt réservé, qui garantit un débit minimal nécessaire pour préserver la vie aquatique dans les cours d’eau existe dans la législation depuis la loi depuis 1984, mais force est de constater que « les rivières » ont encore aujourd’hui du mal à parler dans les négociations locales. Ainsi, un enjeu des programmes de mesures des SDAGE 2010-2015 et des mesures réglementaires prises en application de la LEMA est de maitriser la demande en eau pour l’ajuster à la ressource disponible dans le respect des besoins propres du milieu.

3À défaut de pouvoir dresser un bilan de la mise en œuvre de la DCE, une comparaison du processus en cours dans la région Poitou-Charentes et les régions méditerranéennes françaises (PACA et Languedoc-Roussillon) souligne le poids des régulations territoriales existantes [8]. D’une façon générale, si l’eau est depuis longtemps le terrain d’expérimentation d’une gestion à la fois participative et territorialisée, dans la pratique elle s’apparente davantage à une gestion négociée entre les usagers de l’eau dans le cadre de structures locales (SAGE, contrat de canal, de rivières) qu’à une gestion participative ouverte à tous [9]. Par ailleurs, l’approche intégrée ne dissout pas les régulations opérées dans le cadre des territoires politiques et administratifs. La mise en œuvre de la DCE est prise dans les rapports de force, les jeux politiques et stratégiques du territoire et interroge ainsi, au-delà des aspects techniques des modalités d’organisation de la gestion durable de l’eau, la dimension historique et politique des choix d’aménagement et de développement territorial. Alors que la directive pose comme principe la primauté de l’intérêt du milieu aquatique et de l’action sur la demande en eau, les usagers anciens, et notamment les acteurs du monde agricole, s’efforcent de s’affranchir des contraintes de la DCE en agissant sur la ressource en eau disponible. Or, nous le verrons, ces politiques de l’offre sont depuis longtemps mobilisées par les élus locaux pour consolider leur assise politique. Mais les contraintes nouvelles introduites par la DCE et la montée en puissance des Conseils régionaux, concourent à repolitiser le débat sur les enjeux territoriaux de l’eau.

Les matrices territoriales de la gestion de l’eau

4Il peut sembler paradoxal de prendre la région comme échelle d’analyse des politiques de l’eau : le principe de gestion de l’eau par bassin versant est intégré dans le droit français depuis près de trente ans et parmi les collectivités locales, le Conseil régional ne dispose pas de compétence spécifique et est un moindre financeur que les départements [10]. Néanmoins, l’échelle régionale, qui permet d’envisager les effets du découpage par bassin versant et les régulations opérées dans le cadre des territoires politiques et administratifs offre ici une opportunité intéressante de comparaison. D’un coté, Poitou-Charentes, bien qu’appartenant à deux bassins (Loire Bretagne et Adour Garonne) aux caractéristiques hydrographiques différentes donne à voir une « unité » du point de vue du « problème » de manque d’eau. De l’autre, les régions Languedoc Roussillon et Provence Alpes Cotes d’Azur sont des unités territoriales cohérentes historiquement et géographiquement : elles relèvent pour l’essentiel du bassin Rhône Méditerranée et l’accès à l’eau y constitue depuis des siècles un enjeu majeur en termes socio-économiques et d’aménagement du territoire. Par ailleurs, l’échelle régionale devient, à la faveur de la montée en puissance des Conseils régionaux sur la thématique, une échelle de gestion de l’eau, ce qui, sans chercher à trancher le débat entre les tenants de la départementalisation et ceux de la régionalisation de l’eau [11], nous invite à réfléchir aux effets de cette intervention nouvelle sur la définition des problèmes et la sélection des acteurs et des instruments de la politique de l’eau.

Poitou-Charentes : « la guerre de l’eau [12] » aura-t-elle lieu ?

5De façon inattendue c’est en Poitou-Charentes, moins exposée à la sécheresse que la question de la ressource en eau est problématique et conflictuelle depuis de nombreuses années. Depuis 1999, en France cinq départements ont connu un arrêté de limitation des usages de l’eau tous les ans, parmi eux les quatre départements qui forment la région Poitou-Charentes [13]. La quasi-totalité du territoire régional est classée en Zone de Répartition des Eaux (ZRE) qui est un signal fort de la reconnaissance du déséquilibre ressource demande en eau [14]. En raison de l’enjeu constitué par les assecs [15] répétés en été sur l’ensemble du territoire régional, une plateforme régionale de gestion de l’eau, co-présidée par le préfet de région et le président du Conseil régional, a été mise en place pour compenser le handicap d’une gestion coupée en deux bassins et harmoniser les mesures de gestion entre les départements.

6Ainsi, Poitou-Charentes est longtemps restée relativement hermétique aux mesures de gestion par bassin. La mise en œuvre des SAGE a été très lente et difficile notamment sur les bassins les plus conflictuels : un SAGE a même été cassé au tribunal administratif suite aux recours d’Association de protection de la nature et de l’environnement (APNE). La région est du reste un principal pourvoyeur de contentieux en matière de gestion de l’eau : les arrêtés cadre, les arrêtés de restriction, les autorisations de création de retenues de substitution sont fréquemment l’objet d’un recours en annulation devant le tribunal administratif. L’importance du contentieux administratif souligne qu’en pratique l’eau reste principalement gérée par des mesures de police, prises sous pressions des groupes locaux et sous contrôle juge administratif. Comme le note le préfet de région, ces dispositifs de gestion conjoncturelle sont devenus des outils de gestion structurelle [16].

7Pourquoi cette situation en Poitou-Charentes alors que la région, contrairement au bassin méditerranéen ne manque pas a priori de ressources en eau ? En fait, la région connaît un déséquilibre ressource-demande en eau en été principalement dû aux prélèvements agricoles, et notamment à la culture du maïs, qui requiert de l’eau en abondance au moment ou les débits sont naturellement les plus bas, en période d’étiage. Ce n’est pas la région française où l’irrigation est la plus importante mais elle s’y est développée de façon tardive et anarchique – principalement à travers des autorisations individuelles – dans les années 1980-1990, où déjà « on [voyait déjà] mal comment cette région pourrait avoir une politique de gestion raisonnée de ses ressources en eau [17] ». Technique de soutien à la production encouragée par la Pac et l’État, l’irrigation s’y est développé avec le soutien des Ddaf (Direction départementale de l’Agriculture et de la Forêt) qui attribuent les autorisations de forage et de prélèvements, des Chambres d’agriculture qui apportent une expertise technique aux agriculteurs et avec le soutien financier des collectivités locales (Conseil régional et Conseils généraux). En ce sens, la gestion quantitative de l’eau est devenue une catégorie d’intervention publique à travers l’organisation des prélèvements en eau pour l’irrigation ; historiquement, c’est un volet parmi d’autres d’une politique agricole cogérée, archétype du modèle du néo-corporatisme à la française ( Jobert, Muller, 1987).

8Ainsi les arrêtés cadre qui fixent le niveau des seuils de déclenchement des alertes et des arrêts de prélèvements font l’objet d’une « négociation bien rôdée [18] » entre l’État et les irrigants.

9Depuis les années 1990, des APNE critiquent les seuils et les mesures servant de base à la gestion de l’eau par les services de l’État, et dénoncent le « laxisme » des préfets et les effets néfastes de la maïsiculture : « Irriguer le plus longtemps possible tel est l’objectif que semble s’être donné les pouvoirs publics. C’est grave pour le milieu et grave pour les années prochaines [19] ». En réponse aux assèchements répétés les irrigants s’engagent avec les chambres d’agriculture, dès les années 1990, dans la pose de compteurs individuels et une gestion dite volumétrique. Bien qu’il se présente sous les traits de la neutralité scientifique, cet instrument résulte ici d’abord d’un processus de négociation dans lequel ne sont inclus que des acteurs à forte « proximité cognitive » (Granjou, Garin, 2006) ; le système de valeurs qu’ils partagent les conduit à évacuer des options alternatives en privilégiant l’exploration des voix articulant impératif agricole et prise en compte du déficit en eau. En ce sens, « la gestion volumétrique, ça a été un petit peu l’autogestion de la profession [20] ». Elle permettait aux irrigants de mieux maitriser l’accès à la ressource en eau tout en « [gagnant] en lisibilité vis-à-vis de l’opinion publique [21] ». Par cet effort de rationalisation ils accréditent leur (bonne) volonté à l’égard de l’effort collectif de gestion de l’eau. Toutefois, si la gestion volumétrique est présentée comme mesure de gestion favorable au milieu, en pratique elle constitue surtout le moyen de continuer à irriguer et de s’affranchir d’un système horaire peu satisfaisant pour le milieu et pour les cultures : si la gestion volumétrique consiste bien à mesurer les volumes prélevés réalisés sur les bassins, le point de départ n’est en revanche pas tant la ressource disponible que la ressource nécessaire à l’irrigation ; du reste, les niveaux d’autorisations de prélèvement sont supérieurs aux volumes effectivement prélevés (en raison notamment des mesures de restriction des prélèvements). La gestion volumétrique va néanmoins contribuer à « naturaliser » le déficit en eau [22].

10En effet, au cours de cette mise en technique, l’irrigation est définie comme un usage de l’eau au même titre que le milieu, l’eau potable et les loisirs : les choix politiques et sociaux à l’origine de l’irrigation sont invisibilisés. Cette dépolitisation de l’irrigation permet de justifier la réalisation d’importantes et coûteuses opérations d’aménagement, comme les barrages ou les retenues de substitution : alors que ces ouvrages visent d’abord à la poursuite de l’irrigation sur le territoire, cet objectif est dilué dans une définition plus large de l’intérêt général intégrant les bénéfices pour le milieu ou les loisirs de tels projets. Or, dans cette région rurale où le poids socio-économique de l’irrigation est important, apporter un soutien financier à ces aménagements relève d’un travail de captation et d’entretien de clientèles locales qui permet aux élus locaux d’assurer leur implantation politique ; le cas du barrage sur la Trézence, longtemps soutenu par le Conseil général de Charente-Maritime en est un bon exemple (Grujard, 2003) [23].

11En dépit du consensus noué, à la faveur des financements croisés des retenues de substitution [24], entre les représentants du monde agricole, les services de l’État et les élus locaux pour maintenir la pratique de l’irrigation sur le territoire régional, le classement en ZRE a provoqué l’arrêt des nouvelles autorisations d’irriguer. Et compte tenu des mesures répétées d’interdiction de prélèvement en été, les agriculteurs ont cherché à s’adapter en cultivant des plantes moins gourmandes en eau, ce qui a entrainé la diminution des surfaces de maïs irrigué [25]. Ce que font valoir aujourd’hui les irrigants pour faire reconnaitre les assecs comme des caractéristiques du milieu naturel, et non les résultats de prélèvements excessifs. À l’inverse, un enjeu majeur pour les APNE est de mettre en évidence l’excès de prélèvement, et partant de là la non représentativité des seuils. En effet, si ces mesures de débit et de niveau sont supposés représenter les rivières, ils sont d’abord le produit d’une négociation locale dans laquelle les asymétries de positions et de ressources sont importantes : « [Les seuils, les indicateurs ils ont été définis] arbitrairement, ils sont issus de la négociation. On pourrait employer le mot « pifométrie » des choses comme ça. (…) Voilà les seuils ils ont été négociés sur les piézomètres. Alors déjà que ces piézomètres là ils ne sont pas forcément très représentatifs des rivières qui leurs sont associées, ça donne des résultats aberrants [26]. » Et, les APNE peinent à faire reconnaitre les besoins du milieu face aux intérêts institués du milieu agricole. C’était du reste un objectif des constats d’huissiers qu’une association locale a fait réaliser tous les étés pour faire attester de l’impact des prélèvements agricoles sur le débit des rivières [27].

12Le rapport de forces entre la coalition agricole dominante et la coalition environnementaliste a évolué : un symbole est la constitution du collectif CARG’EAU « Collectif associatif régional qui se donne pour objectif que les rivières coulent toute l’année [28] ». En rassemblant des acteurs autrefois marginalisés et isolés, la constitution de ce collectif a permis la mutualisation des ressources et des compétences et la reconnaissance de leur expertise du milieu aquatique ; ils ont ainsi pu proposer de nouveaux indicateurs sur l’état des rivières et formuler des propositions pour une meilleure gestion des prélèvements. Dans ce contexte, la DCE est une ressource nouvelle pour ces acteurs qui tentent, depuis des années, de faire reconnaître les besoins des rivières et une contrainte pour les services de l’État et les irrigants qui se voient imposer une obligation de résultat concernant le bon état de l’eau, et donc le respect des besoins du milieu.

La « culture des conflits d’usage » des régions méditerranéennes

13Le paradoxe est que dans les régions méditerranéennes, pourtant plus exposées à la sécheresse, ces mesures administratives de gestion du déséquilibre ressource-demande en eau sont très peu développées. Les premières ZRE apparaissent en 2003 et ne concernent qu’une petite partie du territoire ; c’est finalement la DCE qui va conduire au développement de ces mesures de gestion administrative. Comment l’expliquer ? Les régions méditerranéennes sont marquées par de très fortes variations de la ressource en eau : l’alternance « trop d’eau, pas assez d’eau » caractérise le régime de la plupart des cours d’eau (Ghiotti et Rivière-Honegger, 2009). Ainsi, un enjeu majeur pour les acteurs locaux a été de faire reconnaître dans le SDAGE cette spécificité des cours d’eau méditerranéens : « Les cours d’eau du bassin dits méditerranéens (…) se caractérisent notamment par une très forte variabilité saisonnière (étiages d’été sévères et crues extrêmes) qui se traduit par une dynamique fluviale évoluant par crises. Ce fonctionnement particulier justifie la nécessité d’ajuster ou de compléter les référentiels préconisés pour qualifier le bon état écologique [29] ».

14De façon plus ancienne, face à l’aléa constitué par l’inégale répartition de l’eau dans le temps et dans l’espace, les populations locales ont cherché à accroître la disponibilité de la ressource en améliorant son accessibilité par de multiples ouvrages majeurs (aqueducs romains, canaux des Wisigoths, grands ouvrages hydrauliques depuis les années 1960, etc.) qui ont contribué à façonner les paysages mais aussi à développer une culture de l’eau.

15En raison de cette difficulté historique à maîtriser la ressource en eau, et donc du coût de l’eau, l’irrigation concerne principalement des productions à forte valeur ajoutée ; contrairement aux grandes cultures du bassin Adour-Garonne. Surtout, face à la nécessité d’aménager l’accès à l’eau, les agriculteurs se sont organisés collectivement en Association Syndicale Autorisée, si bien que 75% des exploitations irrigables le sont à partir de réseaux collectifs (contre 40% dans les autres régions métropolitaines [30]). Ainsi, à la différence de Poitou-Charentes, les régions méditerranéennes françaises connaissent, depuis toujours, les structures de gestion collective de la rareté de l’eau, au point qu’on puisse y voir là le signe d’« une culture des conflits d’usage » (Léonard, 2001). En ce sens, ces régions présentent une « matrice territoriale » entendue comme « ensemble de dispositions acquises au fil du temps, formant un « cadre social » dans lequel se structure l’action des personnes » (Demoustier, 2007) organisée autour de l’aménagement de l’accès à l’eau.

16Cet effort de sécurisation de l’approvisionnement en eau connait un essor dans les années 1950 avec les grandes sociétés d’aménagement régional : la Société Canal de Provence et la société Bas-Rhône Languedoc. Ces grandes opérations d’aménagement sont inscrites dans la tradition d’une « culture » méditerranéenne de gestion de la rareté de l’eau par l’action sur la ressource. Dans les faits, elles sont le produit des négociations, des compromis entre l’État aménageur et les notables locaux, et doivent en partie leur réussite à l’impulsion politique des élus locaux (notamment du maire de Marseille G. Defferre dans le cas de la SCP). En d’autres termes, ces grands ouvrages relèvent autant d’une logique « d’aménagement » (celle des ingénieurs de l’État) que d’une logique de « ménagement » du territoire ; qui consiste à faire avec les contraintes et les opportunités locales (Marié, 1992). Ainsi, si « [le premier objet de ces aménageurs coloniaux] a été de faire de la mise en valeur agricole dans le Midi de la France, c’est-à-dire de « coloniser à l’hydraulique » des terres arides ou faiblement arrosées, ou encore à soustraire à la monoculture de la vigne », ces sociétés ont très vite été amenées, avec plus moins de succès, à élargir leur champ d’activité (ville, industries), en particulier pour la SCP » (Marié, 2003).

17Grâce aux transferts d’eau depuis le Rhône ou la Durance réalisés par ces sociétés régionales, la majeure partie des régions méditerranéennes françaises ne craint pas la sécheresse ; même si la répétition des sécheresses exceptionnelles entre 2002 et 2007 a confronté certains bassins plus fragiles, car moins approvisionnés en eau, à la pénurie d’eau. Cela explique notre paradoxe : alors qu’en Poitou-Charentes, la ressource en eau utilisée est totalement endogène, elle est pour une large part exogène dans les régions méditerranéennes [31].

18Or, cette « culture méditerranéenne », ou plus exactement les régulations territoriales qui la sous-tendent, est aujourd’hui confrontée aux mutations du territoire. Le tourisme, la croissance démographique se traduisent par le développement de nouveaux usages de l’eau, une pression accrue sur la ressource et une urbanisation nouvelle qui induit l’évolution des pratiques agricoles et de l’identité des clientèles politiques locales. Dans ce sens, la mise en œuvre de la DCE, et donc la reconnaissance et la satisfaction des besoins des milieux, s’inscrit dans un contexte d’accroissement des pressions sur la ressource et de mise à l’épreuve des régulations territoriales. Si tous les acteurs continuent à s’accorder sur les spécificités du climat méditerranéen, sur l’idée que la sécurisation de la ressource est une condition de l’aménagement et du développement de ces régions et sur l’importance de la gestion collective du manque d’eau, certains font valoir que jusqu’à présent ce sont « les milieux qui en ont payé le prix » et donc que l’enjeu de la DCE est aussi de « cesser de vivre au-dessus de [ses] moyens hydriques [32] ». En d’autres termes, qu’il s’agit de remettre au premier plan, la question du coût, écologique et économique, de la ressource en eau évacuée au cours des négociations entre l’État et ses alliés locaux.

La mise en œuvre de la DCE : du rapprochement des modes de gestion des bassins en déficit quantitatif à la mise en débat des choix politiques régionaux

19Les bassins en déficit quantitatif identifiés dans les SDAGE concernent la quasi-totalité du territoire des régions Poitou-Charentes et Languedoc-Roussillon et le tiers du territoire de la région PACA. Pour chacune des masses d’eau concernées (eau de surface ou eaux souterraines), le SDAGE établit les mesures à prendre et, le cas échéant, expose les motifs du report à 2017 ou 2021 de l’atteinte de l’objectif du bon état. Dans ces bassins, le classement en ZRE constitue un préalable à toute demande de dérogations au bon état quantitatif en 2015 [33], ce qui tend au rapprochement des modes de gestion du déficit quantitatif. Les mesures se déclinent selon trois dimensions : des actions visant la connaissance de la ressource en eau, des actions visant à réduire la demande en eau et à répartir de façon concertée la ressource en eau entre les différents usages, et si nécessaire des programmes de création ou de transfert de ressource.

De la gestion de crise à la gestion concertée et structurelle de l’eau : connaissance de la ressource et maîtrise de la demande

20La ligne de la transposition de la DCE est clairement mise en avant : « Il n’est plus envisageable de continuer, pour la gestion des aspects quantitatifs, d’utiliser les modalités de gestion de crise (…) alors même que l’application de ces modalités ne doit être envisagée que lors d’épisodes climatiques exceptionnels [34]. » Dans les bassins en déficit quantitatif, l’objectif fixé est l’atteinte d’une gestion équilibrée des ressources en eau : « Une ressource en eau fait l’objet d’une gestion quantitative équilibrée lorsque, statistiquement, huit années sur dix en moyenne, les volumes et débits maximums autorisés ou déclarés dans cette ressource, quels qu’en soit leurs usages (irrigation, alimentation en eau potable, …), peuvent en totalité être prélevés dans celle-ci tout en garantissant le bon fonctionnement des milieux aquatiques correspondants. La garantie de bon fonctionnement peut s’observer par le respect des débits ou niveaux piézométriques d’objectifs, lorsqu’ils existent, le cas échéant inscrits sous forme de Débit d’Objectif d’Etiage (DOE) ou de piézométrie d’objectif d’étiage (POE) dans les SDAGE ou les SAGE. [35] » Pour atteindre cet objectif, doivent être déterminés les volumes prélevables, à savoir « le volume que le milieu est capable de fournir dans des conditions écologiques satisfaisantes, c’est-à-dire qu’il est compatible avec les orientations fondamentales fixées par le schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux et, le cas échéant, avec les objectifs généraux et le règlement du schéma d’aménagement et de gestion des eaux » [36]. Ainsi un préalable à toute action est la définition du bon débit de l’eau, à savoir le débit nécessaire au maintien de la vie aquatique. En ce sens, la détermination de ces volumes constitue l’instrument du passage à une gestion structurelle des ressources en eau, c’est-à-dire à une autorisation de volumes de prélèvements compatibles avec la disponibilité : les volumes autorisés doivent être inférieurs aux volumes disponibles au plus tard le 31/12/2014. Comme le rappellent les responsables d’une APNE de Poitou-Charentes : « On passerait enfin d’une autorisation de “volumes demandés” à une autorisation de “volumes disponibles” » [37]. Or, jusqu’à présent le volume de référence n’était pas tant le volume prélevable que le volume nécessaire à l’irrigation : les volumes effectivement prélevés, bien qu’inférieurs aux volumes autorisés restaient très supérieurs à ce que peut supporter le milieu.

21Ce processus de définition des volumes prélevables puis de la répartition par usage de la ressource disponible s’efforce d’articuler une logique scientifique d’objectivation des ressources en eau et une logique de gestion concertée des ressources dans le cadre des structures locales (contrats de rivières, contrats de canaux, SAGE, etc). Dans les régions méditerranéennes, les études sur les volumes prélevables ont été entamées fin 2009 dans les premiers bassins et doivent s’achever en 2012. Elles ont majoritairement été opérées sous la responsabilité des structures de gestion locale ; ce qui peut être vu comme un signe de la tradition méditerranéenne de gestion collective de l’eau. Néanmoins il s’agira d’observer localement comment s’opèrent les négociations sur le volume réservé au milieu et sur la répartition du volume prélevable entre les usages car, dans les bassins les plus déficitaires, la ressource disponible ne permettra pas le maintien des prélèvements existants.

22En Poitou-Charentes, le processus est plus avancé. Une enquête réalisée par le BRGM entre 2007-2010 a défini scientifiquement les volumes prélevables qui ont ensuite été soumis à la concertation pour opérer la répartition de ces volumes selon les usages [38]. Alors que tous les bassins sont concernés, seule une Commission locale de l’eau a accepté la responsabilité de ces études ; les autres ont été conduites sous la responsabilité des services de l’État et de l’agence de l’eau. Le suivi des négociations opérées dans cette commission locale de l’eau révèle toute la difficulté à objectiver les besoins du milieu, et donc la ressource disponible ; les APNE dénonçant notamment des « volumes virtuels non identifiés », calculés non en fonction de ce que peut supporter le milieu mais en fonction de ce dont a besoin l’irrigation [39]. En dépit de la colère des associations locales, on peut noter que les volumes prélevables proposés, s’ils sont supérieurs aux volumes disponibles définis par le BRGM, sont très nettement inférieurs à ceux qui sont aujourd’hui prélevés dans le bassin. À l’échelle de la région, le respect de ces volumes engendrerait une très forte diminution de l’irrigation allant de 5 à 70 % dans les bassins les plus déficitaires. Une fois ces volumes définis, la loi prévoit l’atteinte à l’équilibre par la réduction progressive des volumes autorisés jusqu’à l’ajustement aux volumes prélevables au plus tard le 31 décembre 2014. Pour éviter l’apparition d’un système « premier demandeur, premier servi », l’administration organise la mise en place, en substitution du système des autorisations individuelles simplifiées, d’un organisme unique qui, sur la base d’une autorisation pluriannuelle avec étude d’impact, sera chargé de répartir les volumes autorisées ; elle vise l’instauration d’une gestion collective de l’irrigation.

23Ces nouveaux impératifs ont déclenché une véritable « guerre de l’eau ». L’année 2010 a été marquée, alors même que la pluviométrie était plutôt importante, par des manifestations des irrigants et des partisans de la « désirrigation » [40]. La violence de l’opposition du monde agricole, et l’enjeu économique de l’irrigation des grandes cultures a provoqué l’intervention du ministère qui a décidé, dans les bassins les plus déficitaires (où l’écart entre le volume prélevé en année quinquennale sèche et le volume prélevable est supérieur à un seuil de l’ordre de 30 %), « d’adapter certaines des dispositions qui leur sont appliquées afin d’assurer un retour effectif à l’équilibre ». Ainsi le délai de mise en place de l’organisme unique de gestion collective a été repoussé au 1er janvier 2012 et celui de la mise en cohérence des volumes autorisés aux volumes prélevables a été reporté au 31 décembre 2017 [41].

La politique de l’offre : entre dépendance au sentier et usages politiques de l’accès à l’eau

24Un enjeu majeur de ce report réside dans la relance du plan « bassines » : une attente des irrigants est que les mesures de diminution des prélèvements soient associées à la mise en place de retenues de substitution jugées indispensables à l’atteinte du bon état. « On veut pouvoir continuer à irriguer et construire des réserves de substitution. C’était la contrepartie promise en 2004 contre la réduction des prélèvements.» [42] « Et ceux qui nous font perdre des années au tribunal administratif, le font au détriment du milieu car tant que les bassines ne sont pas utilisées, on prélève dans le milieu. » [43]

25Comme l’évoque ici le président de la chambre d’agriculture, les projets de retenue de substitution sont systématiquement attaqués devant le tribunal administratif par les APNE locales, instituant ainsi un « véritable moratoire de fait » [44]. Afin d’éviter de voir les projets retardés, les services de l’État, en complément du financement, ont développé un « accompagnement actif des porteurs de projet de retenue » de façon à « améliorer en amont la qualité des dossiers proposés » [45], et donc à éviter qu’ils soient cassés pour des motifs de forme. Cette intervention des services de l’État en faveur des ouvrages de sécurisation de la ressource en eau demandés par les acteurs agricoles met en évidence que face à la nécessité de satisfaire les besoins du milieu et ceux des autres usagers, une fois le calcul des besoins et des ressources effectué, « la solution est naturellement de desserrer la contrainte d’offre en créant de la ressource plutôt que d’agir sur la demande » (Marcant, 2006).

26Sur ce point, les textes de la DCE et des SDAGE sont pourtant clairs : une action concertée pour maitriser de la demande doit précéder toute action sur la ressource. Dans le bassin Rhône-Méditerranée, il s’agit d’une question cruciale, le territoire a déjà été façonné par les ouvrages destinés à approvisionner les habitants et les agriculteurs en eau et un objectif de la DCE est de limiter les effets de l’homme sur les milieux pour restaurer la continuité écologique des cours d’eau et éviter leur artificialisation.

27Ainsi le SDAGE n’admet la mobilisation de nouvelles ressources de substitution que « lorsque cela constitue un complément indispensable pour l’atteinte de l’objectif de bon état de toutes les masses d’eau concernées et dans le respect de l’objectif de non dégradation ». En d’autres termes, il s’agit de procéder à « une analyse des conséquences positives en terme de sécurisation des usages et de moindre pression sur les ressources des secteurs desservis, mais aussi des impacts négatifs sur les milieux naturels sollicités par ces transferts (prélèvements et discontinuité créés par les ouvrages)» [46]. Or, en situation de pénurie, il est difficile d’organiser le partage de la ressource entre les différents usages et plus encore de faire reconnaitre l’intérêt du milieu face aux enjeux politiques et économiques du développement agricole ou urbain.

28En pratique, en Poitou-Charentes, les services de l’État et les irrigants sont confrontés à la distorsion entre deux référentiels sectoriels déterminés au niveau européen : le référentiel agricole véhiculé par la PAC et le référentiel environnemental de la politique de l’eau véhiculé notamment par la DCE 2000. Pour les services de l’État et les représentants du monde agricole, confrontés à cette injonction contradictoire – pression pour l’atteinte du bon état écologique de l’eau et soutien à l’irrigation – et tenus par leurs engagements antérieurs, la création de ressource en eau « fait figure de solution optimale, voire de solution nécessaire et incontournable ; elle se présente sous les traits d’une irréversibilité technique, c’est-à-dire comme le produit de choix antérieurs sur lesquels il parait impossible de revenir et qui ont par ailleurs contribué à déterminer les choix futurs » (Barthe, 2006). Ce que dénoncent du reste leurs opposants : « La profession agricole et la chambre d’agriculture ont toujours poussé à irriguer plus. Ce sont eux les principaux responsables de l’impasse dans laquelle sont aujourd’hui les irrigants.

29Ce modèle n’a souvent plus de justification économique. Souvent même, il coûte à la collectivité au travers de financements qui ont subventionné les équipements, la culture et maintenant les réserves » [47]. En ce sens, la mise en œuvre de la DCE contribue ici à rouvrir le débat sur la politique agricole régionale et les coûts pour la collectivité de la maïsiculture. Alors que depuis des années, les irrigants mettent en avant les bénéfices territoriaux de l’agriculture irriguée (en termes d’emplois, d’aménagement) et les bénéfices pour le milieu et l’ensemble des autres usages des retenues de substitution, les APNE rabattent elles systématiquement le coût de ces ouvrages, financés en majeure partie par de l’argent public, sur le bénéfice de quelques irrigants qui verraient ainsi leur revenu stabilisé grâce à l’irrigation [48]. Elles s’efforcent de montrer que ce qui est présenté comme une réponse technique à une question d’usage raisonné de l’eau – stocker l’eau en hiver quand elle est excédentaire – résulte de l’ancienneté des relations entre le milieu agricole et les services de l’État et d’une volonté de poursuivre la production du maïs irrigué tout en prenant en compte les enjeux environnementaux.

30Dans le bassin méditerranéen, les agriculteurs font valoir que respecter le débit réservé prévu par la LEMA entrainerait l’arrêt de tout prélèvement dans certains cours d’eau et donc la fin de l’irrigation [49]. Ainsi en Languedoc-Roussillon, face à la pression exercée pour réduire les prélèvements, les irrigants revendiquent aussi la création de retenues : « Restreindre l’accès à cette nappe revient à restreindre l’agriculture. (…) Si le monde agricole accepte l’idée de débit minimum et de partage de la ressource, il prône, face à un certain environnement réglementaire, la mise en place de retenues collinaires » [50]. À travers ces ouvrages, il s’agit de s’affranchir de la contrainte liée au besoin des milieux en augmentant artificiellement la ressource en eau ; le cas des vastes transferts interbassins des régions méditerranéennes le reflète davantage encore.

31Si, les agriculteurs des Pyrénées-Orientales demandent la création de retenues collinaires, c’est que contrairement à leurs voisins, eux n’ont pas accès aux ressources du Rhône. C’est du reste l’enjeu du vaste projet Aqua Domitia de prolongement du Rhône vers l’Aude pour sécuriser l’approvisionnement en eau du Languedoc Roussillon. Selon les représentants de la compagnie BRL, chargée de la réalisation, « ce projet est le résultat de la démarche Aqua 2020 [ndlr : une démarche prospective], [il] permet à la fois de faire face à la croissance démographique mais aussi de répondre aux objectifs fixés par la directive européenne sur l’eau à savoir le bon état écologique des rivières et des nappes, certaines étant menacées par l’accroissement des prélèvements [51] ». Mais, on peut aussi rapporter la réalisation de ce projet au besoin d’entretenir, voire de coloniser, des clientèles politiques [52].

Vers une régionalisation et une politisation de la gestion de l’eau ?

32Au-delà de la controverse sur ses usages politiques, ce projet illustre le poids des jeux politiques et stratégiques dans les politiques de gestion de l’eau et la montée en puissance des Conseils régionaux sur ce terrain [53]. En complément de leur compétence traditionnelle dans le domaine de l’aménagement du territoire, PACA et Languedoc-Roussillon se sont appuyées sur leur compétence nouvelle de gestion des sociétés d’aménagement régional (BRL et SCP) [54] pour développer des démarches participatives et/ou prospectives visant à identifier les mesures à prendre pour anticiper les mutations du territoire et du climat tout en s’adaptant aux contraintes nouvelles introduites pas la DCE.

33En Languedoc-Roussillon, on peut penser que la démarche prospective Aqua 2020 visait d’abord à légitimer le projet « Aqua Domitia », symbole d’une volonté du Conseil régional de « maîtriser l’eau [55] » et, aussi, de desserrer la contrainte que la DCE exerce sur les usages de l’eau. À travers cette démarche, la région tente de se faire reconnaître comme « la puissance publique de référence en matière de gestion durable de la ressource en eau sur son territoire » (Citeau, Chazot, 2008). L’ambition est partagée par le Conseil régional PACA qui revendique le consensus territorial pour assumer un rôle de « chef de file » en la matière ; c’est le sens de la concertation régionale « SOURSE (Schéma d’orientation pour une utilisation raisonnée et solidaire de la ressource en eau) » initié en 2009 avec l’organisation d’Assises régionales de l’eau.

34En Poitou-Charentes aussi, le Conseil régional, qui ne dispose pourtant pas de compétence spécifique en la matière, a investi la thématique. Ici encore, le choix a été fait de la démarche participative : deux majorités politiques distinctes ont successivement organisé (en 2000 et 2002 puis en 2004) des forums sur l’eau. Suite à l’alternance de 2004, la nouvelle équipe politique a décidé de remettre à plat la politique régionale de gestion de l’eau, arrêté de subventionner les retenues de substitution et apporté son soutien au APNE pour procéder aux relevés d’assecs. Les enjeux politiques sont forts. La nouvelle équipe s’est faite élire avec le soutien des Verts et de la Confédération paysanne, et les irrigants ne sont pas clairement leur clientèle politique. La (re)politisation de l’irrigation, qui se traduit par la rupture du consensus sur le soutien financier et technique à l’irrigation et le soutien de ses opposants, est ici décisive [56]. Par son action, le Conseil Régional a contribué à faire évoluer le rapport de forces entre la coalition agricole dominante et les APNE, et partant de là, favorisé la mise en cause des logiques sectorielles, et l’entrée en crise de l’ajustement entre les référentiels agricoles et environnementaux qu’est supposée assurer la politique de l’offre en eau ; ce qui a permis de poser la question de la réversibilité des choix agricoles productivistes.

35À travers ce changement d’échelle réapparait la dimension proprement politique de la politique publique de gestion de l’eau. En effet, bien que les partisans de l’action sur l’offre, en s’efforçant de naturaliser le déficit en eau – « la région a soif » – et en rappelant, avec l’aide de la presse locale, le bénéfice pour la population de ces aménagements historiques contribuent à techniciser, et partant de là, à dépolitiser, l’action sur l’offre en eau, ce sont bien des questions politiques qui sont posées à travers les modalités d’atteinte du bon état de l’eau : comment gérer et à quel prix la multiplication des usages du territoire et de la ressource en eau, dans un contexte de pression climatique, écologique et démographique ? En ce sens, sur la base de la mise en œuvre de la DCE ce sont aussi les choix agricoles et d’aménagement du territoire qui doivent être discutés ; ce qui pose aussi la question des limites de la pertinence du bassin versant comme échelle de débat et du rôle des régions sur ce terrain. Car, après tout, il n’est pas impossible que ce changement d’échelle inattendu contribue à repolitiser des enjeux dépolitisés au cours de leur mise en technique.

Bibliographie

Références / References

  • Barthe Y., Le pouvoir d’indécision : la mise en politique des déchets nucléaires, Paris, Economica, 2006.
  • Citeau J.-M., Chazot S., « Aqua 2020 : une démarche prospective sur l’eau unique en France », Techniques sciences méthodes, génie urbain génie rural, n° 9, 2008.
  • Demoustier D., « L’économie sociale et solidaire et le développement local », in Chopart J.-N. et al. (dir.), Les dynamiques de l’économie sociale et solidaire, Paris, La Découverte, 2007.
  • Ghiotti S., Rivière-Honegger A., « Eaux sous “pressions” et développement des territoires périurbains en Méditerranée occidentale (Languedoc-Roussillon). La vigne, le Sphaeromide raymondi et les piscines », Norois, n° 2, 2009.
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  • Marié M., « La formation d’un modèle aménagiste de l’eau. Démocratie, société et communauté de l’eau en Provence », in Drain M. (dir.), Politiques de l’eau en milieu méditerranéen : le cas de la péninsule ibérique, Alicante, Universidad de Alicante, 2003.
  • Mazeaud A., « Au-delà de la concertation. Les sélections informelles de la gestion de l’eau en Poitou-Charentes », in Le Naour G., Massardier G. (dir.), De si petits mondes ? De la sélection des acteurs dans l’action publique, Paris, LGDJ, 2011, à paraître.

Notes

  • [1]
    Assises régionales de l’eau, PACA, juin 2009. Président Chambre Régionale d’agriculture, PACA.
  • [2]
    La loi sur les milieux aquatiques (LEMA) 30/12/2006.
  • [3]
    SDAGE Adour-Garonne : « Maîtriser la gestion quantitative de l’eau dans la perspective du changement climatique. » SDAGE Rhône-Méditerranée : « Atteindre équilibre quantitatif en améliorant le partage de la ressource en eau et en anticipant l’avenir. »
  • [4]
    Grenelle de l’environnement, engagement n°117.
  • [5]
    « La reconquête du bon état des eaux et des milieux aquatiques. De l’état des eaux en 2009 aux objectifs 2015 », rapportage de la France à la Commission Européenne sur la mise en œuvre de la DCE, mars 2010. www.eaufrance.fr
  • [6]
    Ce que souligne le Conseil d’État en insistant sur le potentiel contentieux européen en la matière. Conseil d’État, L’eau et son droit, rapport public, juin 2010.
  • [7]
    L’étiage est la période de l’année où le débit d’un cours d’eau atteint son niveau le plus bas. Les débits ou niveaux d’objectif d’étiage est la valeur au-dessus de laquelle, il est considéré que l’ensemble des usages (activités, prélèvements, rejets, …) est en équilibre avec le bon fonctionnement du milieu aquatique.
  • [8]
    Dans cet article, la région sera envisagée d’abord en tant qu’unité territoriale et échelle d’analyse puis en tant que collectivité territoriale (le Conseil régional). Notamment, nous chercherons comment le Conseil régional, s’efforce de jouer un rôle dans le domaine de la gestion de l’eau, ce qui tend à transformer les systèmes de régulations locaux.
  • [9]
    La participation du grand public est limitée à la possibilité de donner son avis, par questionnaire, sur les projets de SDAGE. Les « habitants » ne participent pas aux structures locales.
  • [10]
    Les Départements ont investi 1,325 milliard d’euros en 2002 dans l’environnement, les deux tiers de cette dépense étant consacrés à l’eau (soit 883 M€) ; de leur côté, les Régions n’y consacrent que 18,2 % de leurs dépenses environnementales, soit 77 millions d’euros par an environ. IFEN (2005), Les dépenses d’environnement des Départements et des Régions (1996-2002), Les dossiers, n° 2, 24 p. Par ailleurs, les services techniques du Conseil régional sont réduits. En Poitou-Charentes, le service « Eau » est composé du chef de service et de trois agents, techniciens et secrétaire.
  • [11]
    Pour une présentation de ces enjeux territoriaux de la gestion de l’eau (Ghiotti, 2010).
  • [12]
    Depuis les années 2000, le terme « guerre de l’eau » revient de façon récurrente dans la presse locale.
  • [13]
    Pour un bilan, voir le rapport du Conseil d’État, op. cit.
  • [14]
    Décret du 29/4/94.
  • [15]
    Un « assec » désigne l’état d’une rivière ou d’un étang à sec.
  • [16]
    « Horizon 2015 : passer d’une gestion conjoncturelle (prévenir/gérer les crises) à une gestion structurelle (équilibre des milieux) », Préfecture de la région Poitou-Charentes, 29/09/09.
  • [17]
    Ministre de l’agriculture, clôture du colloque « Eau et agriculture : leçons d’une sécheresse », 1990.
  • [18]
    Entretien, chef du service irrigation, Chambre d’agriculture 16.
  • [19]
    Charente Libre 22/8/96.
  • [20]
    Entretien chef du service environnement, Chambre d’agriculture 17.
  • [21]
    Entretien, président du groupement des irrigants charentais.
  • [22]
    La naturalisation renvoie à « des stratégies de représentations qui fixent les distinctions sociales et les rendent pérennes. La naturalisation constitue donc une manière d’empêcher les changements de sens à travers un processus de clôture discursive et idéologique » (Hall, 1997).
  • [23]
    Le barrage sur la Trézence, longtemps porté par le Conseil général de Charente-Maritime (Grujard, 2003), dont la déclaration d’utilité publique a été « cassée » par le juge administratif au motif de l’absence de définition précise des objectifs visés en est un bon exemple. CE 22/10/03 Association SOS Rivières. Voir RJE 2/2004.
  • [24]
    Le financement de ces retenues est un enjeu majeur et (donc) assez peu transparent. Il est désormais prévu que le financement public soit plafonné à 70%. Depuis le début des années 1990, le Conseil de Poitou-Charentes est engagé dans le programme de financement des ouvrages visant le stockage de l’eau. Dans le CPER 2000-2006, le Conseil régional et l’État s’étaient engagés à hauteur de 6,10M€ chacun, montant auquel il faut ajouter le financement des Conseils généraux qui varie suivant le nombre de projets qui concernent le département ; ainsi la Charente-Maritime est traditionnellement un principal financeur. La fin de ce programme marque aussi la fin du « consensus » sur les retenues (infra). Depuis 2006, le Conseil régional ne finance plus (sauf exception) les retenues de substitution et dans son sillage, des Conseils généraux ont décidé de limiter leur contribution ; c’est notamment le cas du Conseil général des Deux-Sèvres, depuis 2008 et la victoire de la gauche aux cantonales (alors que le nombre de demandes de retenues est important dans ce qu’on nomme « le triangle d’or du maïs »). La répartition des financements dans la dernière convention illustre bien l’enjeu politique de ces ouvrages : État (12,5M€), FEADER (2Me), Vienne (700000€), Charente (1,3M€), Deux-Sèvres (1,5M€), Charente-Maritime (10M€).
  • [25]
    De l’ordre de 20% entre 2004 et 2008, Agreste 2010, DRAF Poitou-Charentes.
  • [26]
    Entretien, coordinateur Carg’eau.
  • [27]
    Entretien, président association Apieee.
  • [28]
    Le collectif Carg’eau est créé en 2005. Il rassemble principalement des APNE, des associations de pêcheurs et de consommateurs. Pour une analyse approfondie de l’évolution du rapport entre la coalition environnementaliste et de la coalition agricole (Mazeaud, 2011).
  • [29]
    SDAGE Rhône-Méditerranée, p. 22.
  • [30]
    Rapport de l’association des irrigants des régions méditerranéennes françaises (AIRMF). L’agriculture irriguée méditerranéenne, une source de richesse au cœur des enjeux du développement durable, septembre 2009.
  • [31]
    INRA, Synthèse Eau et agriculture, p. 63. L’AIRMF estime que 75 à 80 % de l’irrigation est réalisée grâce aux grandes retenues.
  • [32]
    Assises régionales de l’eau, PACA.
  • [33]
    La DCE prévoit trois motifs de dérogation à l’atteinte du bon état en 2015 : raisons économiques (coûts disproportionnés au regard des bénéfices attendus), techniques (pas de technique efficace connue ou temps de préparation et de réalisation trop long au regard de l’échéance de 2015) et les conditions naturelles (temps de réaction du milieu aux mesures prises).
  • [34]
    Circulaire du 30/06/08 relative à la résorption des déficits quantitatifs en matière de prélèvement d’eau et gestion collective des prélèvements d’irrigation.
  • [35]
    Ibid.
  • [36]
    Ibid.
  • [37]
    Charente Libre, 27/08/09.
  • [38]
    Étude accessible sur le site internet de la DREAL Poitou-Charentes.
  • [39]
    Vote des volumes prélevables, 11/01/10. La Commission locale du SAGE Boutonne met en ligne les compte-rendus des réunions : sage-boutonne.pagesperso-orange.fr
  • [40]
    Les premières mesures incitatives à l’arrêt de l’irrigation, dites mesures de « désirrigation », apparaissent au début des années 2000. Elles reposent sur le raisonnement suivant : l’irrigation a été subventionnée, son arrêt engendre une perte pour l’exploitant, il faut donc proposer des mesures financières pour inciter l’irrigant à cesser d’irriguer.
  • [41]
    Circulaire 2/06/10 relative à la résorption des déséquilibres quantitatifs en matière de prélèvements d’eau et gestion collective des prélèvements d’irrigation dans les bassins où l’écart entre le volume prélevé en année quinquennale sèche et le volume prélevable est supérieur à un seuil de l’ordre de 30 %. On retrouve cette opposition du monde agricole sur une large part du bassin Adour Garonne.
  • [42]
    Charente Libre, 1/8/10.
  • [43]
    Président de la Chambre d’agriculture. Charente Libre, 6/7/10.
  • [44]
    Entretien, responsable Eau, Chambre d’agriculture 16.
  • [45]
    Circulaire 3/08/10, op. cit.
  • [46]
    SDAGE Rhône-Méditerranée, pp. 178 et 91.
  • [47]
    Charente Libre, 1/6/10.
  • [48]
    C’est notamment le but de la création du collectif au nom explicite : « SOS, Eau Voleurs ! ».
  • [49]
    Ce que souligne notamment l’AIRMF, op. cit.
  • [50]
    L’indépendant, 21/12/10.
  • [51]
    L’indépendant, 8/03/08.
  • [52]
    C’est du moins l’analyse qu’en fait Stéphane Ghiotti (Montpellier journal, 22/06/10) et une critique généralement adressée au projet par ses opposants.
  • [53]
    À noter qu’on trouve des signes de cette « régionalisation » de la gestion de l’eau, à travers des opérations de mise en débat et d’aménagement, dans d’autres régions européennes confrontées à cette question, comme par exemple l’Andalousie.
  • [54]
    Loi du 13/08/04.
  • [55]
    Midi Libre, 1/09/08.
  • [56]
    La décision de suspendre, puis d’arrêter, le financement des retenues de substitution a été un facteur décisif de développement d’un « débat sauvage » sur les usages de l’eau (Mazeaud, 2011).
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