Notes
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[*]
Économiste. Directeur du site http://www.africara.com.
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[1]
Biggs, Tyler, « … Africa can compete ! Exports opportunities and challenges for garments and home products in the US market », World Bank discussion papers, Africa Technical Department series, n° 242, 1994, Washington DC.
Biggs, Tyler, « …Africa can compete ! Exports opportunities and challenges for garments and home products in the European market », World Bank, 1996, Washington DC. -
[2]
Voir Kouloufoua, Jean-Gilbert-Jules ; « La culture matérielle d’Afrique noire dans les musées européens : Italie, France », Thèse soutenue à l’école d’anthropologie de Paris, 1982. Voir aussi entre autres travaux de cet auteur, Engelberg, Mveng ; L’Art et l’artisanat africains, éditions Clé, 1980, Yaoundé.
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[3]
Kluckhohn, Clyde ; Kroeber, Alfred Louis ; Culture, a critical review of concepts and definitions. Cambridge, published by the Museum, 1952.
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[4]
Laude, Jean ; La peinture française et l’« Art nègre » (1905-1914), p. 47, Editions Klincksieck, 1968, Paris. Voir aussi Présence Africaine 1950, p. 10-11.
-
[5]
Voir le compte rendu : « Joint Unesco/IBRD Seminar on the Social and Cultural Impacts of Tourism ; Impact of Tourism on Traditional Arts and Crafts and the Values Associated with them in some African countries south of Sahara », Washington, December 8-10, 1976.
-
[6]
Ezio, Bassani, 19th Century Airport Art, n° 2, February 1979, p. 35, African Arts.
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[7]
Source : Eurostat/comext. Chiffres en milliers d’euros. Ces chiffres sont des approximations, étant donné la difficulté de repérage des flux commerciaux d’art et d’artisanat africain dans les échanges internationaux.
-
[8]
Entretiens menés au salon professionnel Maison et Objet, Paris, 1999. Martial, Ze Belinga, Étude de la pénétration des produits artisanaux africains sur les marchés français et européens, Ministère français des Affaires étrangères, Janvier 2000.
-
[9]
Voir : Ze Belinga, Martial ; Mission d’étude sur l’offre ghanéenne d’exportation de produits artisanaux, Ministère français des Affaires étrangères, p. 11, Paris, 1999.
-
[10]
Voir Kathuria, Sanjay ; « Exportations indiennes : le défi chinois » ; Economie Prospective Internationale, n° 33, p. 37-55, 1987.
-
[11]
Entretiens menés au salon « Maison et Objet », septembre 1999, op. cit.
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[12]
Entretiens de l’auteur avec Mme Irma Adler, acheteuse espagnole au Salon International de l’Artisanat Africain de Ouagadougou, 1996
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[13]
Entretien avec le sociologue français Alain Quémin, Propos recueillis par René Lefort, « Art contemporain : l’illusion d’universalité », Le Courrier de l’Unesco ; octobre 2001.
-
[14]
Kuntz, Luci Iglesias, « À la recherche de l’art perdu », Le Courrier de l’Unesco, mars 1999.
Arts et artisanats africains, cette économie oubliée
1Les années 90 ont dévoilé des perspectives plutôt encourageantes pour les arts et artisanats africains, dans un monde apparemment acquis au relativisme culturel et à une quête même ambiguë de l’autre. Et on ne peut pas dire que ce soit une institution afrocentriste qui se soit permis le sacrilège, en terrain d’orthodoxie néo-libérale, à Bretton Woods, de commettre un plaidoyer explicite en faveur de l’intervention de l’État dans l’économie pour soutenir un secteur identifié à fort potentiel : l’artisanat africain. Cette entorse à la sacro-sainte croyance dans les tâches régaliennes de l’État à l’exclusion de l’économie devait provenir, en 1994 avec récidive en 1996, de… la Banque mondiale (!) qui publiait deux rapports consécutifs consacrés aux opportunités d’exportations des produits artisanaux africains sur les marchés américains et européens, le titre fort évocateur se voulant en rupture d’afro-pessimisme : Africa Can Compete [1] !.
2De fait peu de secteurs et de filières économiques auront été oubliés, méconnus, voire niés comme ceux de la production et des services des produits artisanaux. Il faut dire que l’économie dite de développement s’est trouvée de bonne heure emportée dans les préoccupations du prince, de sa cour, de leurs parrains, attendue sur des énoncés et une production scientifique ou supposée renvoyant à des questions admises nobles du développement. Les matières premières – pétrole, bois, diamants, or, coton, cacao, café… – sont un thème battu et rebattu, du point de vue des effets sur les producteurs, les États africains, sans nécessairement d’ailleurs trouver matière à innover pour sortir de la quadrature du cercle des déséquilibres commerciaux internationaux. Ici tout se passe comme si les matières premières chassaient les matières culturelles…
3Les paradigmes qui intègrent les arts et artisanats africains à leur objet se trouvent être traditionnellement l’anthropologie, l’ethnologie, l’esthétique, l’histoire de l’art ou encore la philosophie, produisant des débats autour de la conservation des savoir-faire anciens, les dimensions religieuses, mythiques et mystiques des objets d’art africain. Des philosophes africains et occidentaux, pris dans les tenailles d’un hégélianisme totalisant reproduisent des questionnements fastidieux sur l’existence d’un art africain.
4Alors que dans les années 1980 l’évidence tombait sous le sens que des pans entiers de l’activité économique des États africains échappaient non seulement à la mesure, mais simplement à la connaissance des modes de fonctionnement et d’expression d’une partie significative des populations actives ; devant les limites de la recherche obsessionnelle de la grande taille – dispendieux monopoles d’État – jusque-là perçue comme seule voie de salut économique, les analystes du développement reformataient progressivement leurs objets d’étude et objectifs. L’intérêt pour le secteur dit informel s’imposait ainsi, PME, PMI, TPE (très petite entreprise), entreprise familiale, artisanat et autres activités génératrices de revenus étaient introduits dans les nomenclatures des thématiques et projets de développement.
5La nécessité d’une prise en main du chantier de l’économie des arts et artisanats africains appartient donc à l’impératif de renversement d’une domination indue au sein des thématiques de développement conduisant à la négation d’acteurs et groupes sociaux producteurs et innovateurs au quotidien, au moins comparables à cette aune aux autres professionnels et acteurs contribuant à l’économie réelle.
6Il s’agit ici de privilégier les dimensions spécifiques de filières de production, de métiers et savoir-faire, de création d’emploi et de valeur, d’exportations, en somme d’une approche de développement, d’économie internationale mettant l’artisanat en rapport avec les autres secteurs de l’économie, saisi dans ses espaces référents, ruraux, urbains, international, envisagé sous l’angle de la croissance économique, de l’innovation, dans le contexte de globalisation.
7Notre perspective-objet s’attache principalement à l’artisanat, même si des aller et retour entre art et artisanat seront sollicités pour les besoins de l’argumentation, parce que, d’une part, les objets dits d’artisanat et d’art africains ne sont pas toujours séparés dans les flux économiques et canaux de distribution et se retrouvent dans des boutiques spécialisées comme dans des collections d’objets de valeur ; d’autre part, ces objets en principe segmentés en arts et artisanats appartiennent souvent à des conceptions esthétiques proches sinon semblables et des conditions de production identiques peuvent donner naissance à un objet d’art ou d’artisanat.
8L’angle du rapport des arts et artisanats à l’international sera privilégié, car il englobe des logiques économiques opérant localement et hors des économies domestiques, d’où une représentativité accrue, et une richesse d’enseignements évidente.
9Par ailleurs dans une approche diachronique du rapport aux sociétés dominantes, occidentales, les premiers contacts et classifications des objets africains ne faisaient pas de différence stricte entre art et artisanat d’Afrique, la découverte d’approches socio-plastiques autres passant au premier plan, cette distinction n’interviendrait, à peine systématisée, que plus tard.
10Il est par conséquent plus juste et plus rigoureux d’envisager des objets de la culture matérielle [2], les produits d’arts et d’artisanats africains appartenant à l’ensemble plus vaste de la culture matérielle au sens de artéfacts et pas de mentifacts [3].
11Les arts et artisanats africains, globalement, sont donc à l’intersection entre produits typiques d’une culture, articles traduisant des techniques, des savoir-faire liés à un corpus de connaissances, de croyances, de coutumes… ; intersection entre culture matérielle et caractère esthétique, à côté d’autres déterminations possibles de l’objet fabriqué. Ils peuvent être reconnus de l’extérieur – marché, collectionneur, expert…– pour leur caractère typique qui entre souvent dans les argumentaires de valorisation économique, c’est notoirement le cas pour la demande africaine-américaine de produits du continent des origines par exemple.
12Schématiquement les objets d’art circulent dans les collections privées, publiques, les galeries, les musées et se trouvent encore sur des sites anciens ou contemporains de production ou de collection comme les chefferies traditionnelles…
13Les objets d’artisanat appartiennent de plus en plus à l’univers de la grande distribution ou de la distribution spécialisée, s’intégrant dans deux segments de marché : les produits d’intérieur – arts de la table, décoration, vannerie, textile d’ameublement… – et les produits personnels allant des bijoux, aux textiles d’habillement, maroquinerie, etc.
14Notre réflexion portera sur la tâche d’objectiver l’attractivité internationale des arts et artisanats africains et les enjeux d’émergence économique que ce secteur recèle. Nous mettrons ensuite en exergue les déséconomies d’échelle, de structuration et d’appuis sectoriels qui handicapent le passage de l’attractivité à l’émergence. Enfin, les échanges internationaux des produits des arts et artisanats africains seront restitués au cadre générique des échanges marchands et non marchands dominant l’économie mondiale contemporaine, ce que l’on pourrait appeler une régulation prédatrice ou un environnement de prédation globalisée.
15Les limites de notre développement outre les va-et-vient entre arts et artisanats – que nous préciserons autant que faire se pourra tout en étant sur une problématique axiale de l’artisanat – renvoient à l’état des lieux des données relatives au secteur qui nous concerne.
16Trois caractéristiques limitent fondamentalement les études sur les arts et artisanats africains :
17– La fragmentation des données en sources hétérogènes : nationales, internationales, ONG… Ces sources proviennent de différentes méthodologies elles-mêmes non homogènes, enquêtes quantitatives, qualitatives, nomenclatures de produits différentes selon les pays…
18– L’incomplétude des informations, due à l’absence d’une codification internationale standard distinguant les produits artisanaux des produits industriels dans les échanges internationaux (Organisation Mondiale des Douanes), menant à une sous-estimation structurelle des échanges.
19– Les déficiences d’enregistrement des données, expliquées par un fort volant d’échanges non déclarés et des erreurs d’enregistrement.
Attractivité internationale et enjeux d’émergence
20On peut distinguer sur la longue période allant du xve siècle à l’époque contemporaine, une attractivité et une séduction puissantes exercées par l’esthétique africaine sur le reste du monde. Naturellement la vigueur de la culture matérielle africaine n’a pas attendu les explorateurs portugais, le Ghana, le Mali, Kongo, Zimbabwe, la Nubie et l’Égypte antique sont d’éminents témoins des conceptions plastiques africaines et de leur réception et influence dans le monde antique et pré-colonial. Cependant, l’état des lieux des arts et artisanats africains contemporains en réfère davantage aux bouleversements engendrés par la conquête du monde par les Européens, les Portugais d’abord, suivis par les autres puissances de l’époque.
Curiosités ethnologiques, art nègre, produit ethnique
21Envisageant les objets d’art africain dans la perspective d’une hégémonie européenne puis occidentale, en notant que les artéfacts africains étaient déjà répandus dans le monde par voie d’échanges dans les usages symboliques, fonctionnels, les commerces intra-africains ou avec le reste du monde, on pourrait reconstituer la traversée des arts et artisanats africains entre le xve et le xxe siècle. Quelques traits saillants de cette évolution situeront la problématique.
Des curiosités ethnologiques à l’art nègre et ses influences en Europe
22Lorsqu’au xve siècle les Portugais vont à l’assaut du reste du monde et que la chrétienté se donne pour mission de réduire les idolâtres, païens et autres hérétiques, les héros de ces aventures sont loin de se douter de la destinée incroyable de leurs butins de guerre. C’est en effet par les pillages, vols et saccages que vont se constituer les trophées des aventuriers explorateurs, trophées rapportés de leurs périlleux voyages et qui servaient un temps, comme les esclaves, de preuves, de pièces à conviction montrant que les navigateurs avaient bien touché les côtes africaines.
23De là, les armoires contenant des objets bizarres, curieux, des lointaines contrées, que les navigateurs ramenaient et commençaient à stocker, collectionner avec plus ou moins de soins. On pense à des voyageurs célèbres comme le prince Henri dit le Navigateur ou l’anglais Hawkings. Aventuriers, voyageurs, négriers, explorateurs sont donc involontairement une impulsion décisive à cet intérêt porté vers les peuples sinon peuplades difficiles à qualifier, mais dont les artéfacts interrogeaient déjà : fétiches, régates, masques…Les cabinets de curiosités font alors office de musées imaginaires.
24Dès le xvie siècle, les Portugais qui venaient de connaître Benin dans l’actuel Nigeria s’engageaient dans des échanges commerciaux avec cette partie de l’Afrique, ils constituaient leurs premières collections d’objets africains dont certains fabriqués sur commande…On parlerait plus tard d’art afro-portugais.
25Seulement le contexte du procès d’impérialisme s’était doté d’une weltanschauung de légitimation stimulante jusqu’à la mystique civilisatrice. Les artéfacts africains pillés, arrachés, confisqués, parfois échangés, s’inscrivent de fait dans des rapports asymétriques qui feront naître les qualificatifs d’art sauvage, puis d’art colonial.
26L’intérêt et la curiosité des initiés faisant son chemin, les sculptures, masques, fétiches africains commençaient à se répandre en Europe, en provenance de différentes régions d’Afrique. On parlait de plus en plus d’Art nègre, expression qui allait faire florès et culminer dans le premier quart du xxe siècle. Cet art longtemps envisagé par les observateurs européens et de façon quelque peu fantasmatique comme un art des origines, celui de très probables balbutiements révélateurs des premiers stades de l’art par lesquels l’Européen même aurait pu tâtonner, était rangé dans la catégorie confortable des Arts primitifs. Arts d’Afrique et d’Océanie notamment.
27Il fallut pourtant que l’avant-garde des artistes créateurs européens, littérateurs et plasticiens à la recherche de nouvelles sources d’inspirations thématiques et techniques aux fins de dépasser le fond gréco-latin vu et revu par les artistes de la Renaissance, tombât sur des sculptures africaines en circulation dans les métropoles européennes pour que sonne la reconnaissance de l’Art nègre dans l’élite intellectuelle européenne. Le départ était donné pour de nouvelles orientations de l’art occidental : impressionnisme, fauvisme, cubisme, puisaient dans l’art africain, chaque artiste et courant en fonction de ses besoins propres, les emprunts étant à l’arrivée plus ou moins visibles dans les œuvres finies. Une telle reconnaissance dans un contexte colonial sans concession, n’allait pas sans quelques incidents et maladroites dénégations, comme le très controversé « l’Art nègre ? Connais pas ! » de Pablo Picasso [4].
28Du côté africain, l’offre pré-coloniale de produits domestiques – en particulier de produits à forte valeur esthétique de la culture matérielle parmi lesquels les productions d’art et d’artisanat – subissait en s’adaptant les transformations radicales amenées par la donne coloniale et son emprise sur le temporel et le spirituel africains. La perte d’emprise des royautés et pouvoirs locaux dont dépendait une partie significative de la production tendait à assécher lentement mais sans alternative l’offre qualifiée en travail traditionnel sommée de s’adapter aux nouveaux usages professionnels, à l’école nouvelle, à l’irruption d’une vie citadine inédite.
29Par ailleurs les religions dites monothéistes à prétention révélées investissaient dans le maillage du continent, recherchant un monopole quasi militaire du rapport des humanoïdes noirs avec dieu, …mais par l’unique voix autorisée du Blanc. Les cadres superstructurels, religieux, spirituels d’une frange importante de la production matérielle s’effondraient avec la christianisation et l’islamisation [5]. Frappée d’anomie, cette société et son art tâtonnaient sur les restes d’un art de cour qui s’était historiquement vu complété par des productions à vocation sociales, économiques, esthétiquement inspirées.
30Ces mutations brutales qui coupaient les artéfacts africains d’une partie de leurs sources idéologiques – religions, cosmogonies… – administratives – administration royale, clanique… – et même économique – demande royale, domestique, régionale africaine – laissaient en stagnation les productions traditionnelles, y compris l’artisanat à demande domestique ou régionale. Au contraire l’art dit d’aéroport pouvait se développer au contact des touristes et voyageurs curieux à l’endroit d’une plastique africaine et d’une conception esthétique qui, à certains égards, différaient fondamentalement des œuvres européennes [6].
De la consécration d’un produit ethnique, l’objet d’artisanat africain
31La reconnaissance des emprunts à l’art africain par l’avant-garde européenne s’est longtemps trouvée enfermée entre une aliénation culturelle profonde des peuples colonisés et ex-colonisés incapables d’apprécier les produits de l’esthétique africaine, et les conceptions intellectuelles dominantes d’une Europe civilisatrice et initiatrice de toutes inventions.
32Mais le xxe siècle de la Triade – Europe, États-Unis, Japon – allait, en silence et à mesure de l’élévation du niveau de vie des pays industrialisés, du fait de l’architecture intérieure de la croissance des économies, et de l’écologie comportementale motrice des sociétés de consommation, importer de plus en plus d’objets d’art et d’artisanat en provenance d’Afrique. Les arts et artisanats africains sortaient du regard exclusif de l’avant-garde européenne, des milieux d’experts et de conservation culturelle, se destinant désormais à des comportements transactionnels populaires.
33Les marchés populaires des grandes capitales occidentales, puis des villes moyennes allaient devenir les canaux de distribution plus ou moins expérimentaux d’un engouement croissant du grand public pour les produits d’ailleurs. Il n’en fallait pas davantage pour que les grandes enseignes et distributeurs spécialisés flairent un nouveau segment du marché, à côté du mainstream, mais suffisamment actif et consistant en puissance pour justifier des stratégies commerciales et promotionnelles d’ampleur.
34Les années 80 et 90 vont pousser la popularisation des artisanats d’ailleurs, ceux des peuples extra-européens, probablement à leur maximum, au moins à des niveaux jamais égalés. L’artisanat africain fait figure de « catégorie-vedette » parmi les récents succès de produits d’ailleurs rebaptisés produits ethniques, avec les produits d’Asie et d’Amérique latine.
35Tant sur les marchés européens qu’américains, peut-être plus du côté nord-américain du fait d’une demande spécifique afro-américaine, l’art et l’artisanat africains re-conditionnés sous les étiquettes de produits ethniques, voire afrocentriques ou authentiques, jouissent depuis les années 80 d’une énorme notoriété.
36Les performances qualitatives des produits africains sont appréciables à l’aune de la notoriété des clients et prescripteurs de l’artisanat africain. Nombre de grands magasins européens et américains, à réputation mondiale ont distribué ponctuellement ou dans leurs lignes de produits « maison » des articles africains. En Angleterre les prestigieux Harrods et Liberty ou autres Conran shop donnent la réplique à leurs homologues français, les Galeries Lafayette, le Printemps, Hermès, la Redoute, importateurs et distributeurs de produits africains de qualité supérieure. En France, des exportations africaines transitent par le Club Med. En Espagne, l’artisanat africain a gagné sa reconnaissance en entrant dans les rayons de Galerias, distributeur national de premier plan, d’autres boutiques de second plan explosent sur ce marché.
37Sur les marchés nord-américains, l’artisanat africain se trouve sur une palette très large de distribution depuis le segment de l’art proprement dit avec une multiplication de galeries, jusqu’aux grandes surfaces nationales : K-Mart, JC Penney… De gros importateurs et grossistes, comme Pier One, ont depuis des décennies travaillé avec des destinations telles que le Kenya ou le Ghana.
38Les magazines européens et américains spécialisés dans la décoration intérieure accordent une attention grandissante aux articles africains, de même que la publicité (en France notamment) se sert des décorations africaines ou d’inspiration africaine pour créer des univers originaux. Les mêmes tendances s’observent dans les décors ou costumes de certains films français et américains.
39Dans la confection, des stylistes africains se sont fait une notoriété par leur faculté à réactualiser, adapter ou restituer l’esthétique, les motifs africains dans la haute couture contemporaine ou dans le prêt-à-porter. Les Abraham (Liberia), Alphadi (Niger), Angibel (Côte d’Ivoire), feu Chris Seydou ou autres sont des noms connus dans le stylisme pour l’apport africain qu’ils injectent dans la création occidentale.
40Le djembe, variété de tambour très répandue en Afrique avec une infinité de nuances esthétiques et acoustiques, illustre par son succès la cote actuelle des produits de l’art et de l’artisanat africains. Son adoption internationale avec son ethnonyme sénégalais et nom commercial « djembe » reconnu dans quasiment tous les pays occidentaux, est un tour de force que beaucoup de spécialistes du marketing envieraient à cet énorme et inattendu succès commercial.
41Pour que Pepsi, Bayer, Danone arrivent à implanter le nom commercial d’un produit dans l’univers évoqué d’un marché potentiel, il faut de gigantesques campagnes publicitaires qui se comptent en millions de dollars… Avec infiniment moins, jouant d’une espèce de bouche à oreille ou de marketing viral, le djembe soutient aujourd’hui une notoriété comparable à celle des produits des multinationales !
42À un degré moindre, le succès du jeu de stratégie connu internationalement sous le nom ivoirien d’awalé, awori au Ghana, songo au Cameroun est très parlant. Adapté au Japon, adopté aux États-Unis et en Europe, ce produit poursuit sa marche sur les marchés occidentaux de produits éducatifs, ludiques, de décoration selon le dosage incorporé entre intensité esthétique et fonctionnelle.
43De plus en plus de salons professionnels d’objets de décoration, cadeaux, souvenirs, produits d’ailleurs font appel à l’artisanat africain pour remplir leurs stands, qu’il s’agisse des foires internationales comme « Tendence » à Francfort, « Maison et Objet » à Paris, et leurs émules de Birmingham, ou même pour des manifestations commerciales de moindre importance dans des villes moyennes d’Europe et d’Amérique.
44D’un point de vue quantitatif, malgré l’état embryonnaire des données statistiques, quelques repérages peuvent permettre de se faire une idée relativement objective de la place des produits ethniques africains sur les marchés des produits de décoration, de cadeaux et souvenirs, d’objets personnels…
45L’UE importe environ pour 6,4 milliards d’euros de produits d’artisanat en dehors de son espace économique à la fin des années 90. En incluant les importations intra-communautaires, la demande totale d’importations de l’UE se monte à plus de 10 milliards d’euros, absorbée à plus de 60 % par la France (13,3 %), l’Allemagne (22,6 %) et l’Angleterre (26,6 %). Les produits artisanaux sont un lieu potentiel d’émergence des exportations africaines, les taux de pénétration (accroissement des importations européennes) traduisent sans ambiguïté cette réalité.
46Pour 6 pays représentatifs, Burkina Faso, Sénégal, Côte d’Ivoire, Ghana, Kenya, Madagascar, le taux de croissance annuel moyen des importations européennes de 26,1 % entre 1990 et 1998, dans une période très affectée par la récession économique, le chômage et la concurrence internationale renseigne sur le sentier d’expansion de l’offre africaine.
47Ces performances quantitatives de l’offre africaine sont appréciables à l’exemple des progressions annuelles moyennes des exportations malgaches (+96 %), ghanéennes (+41,2 %), sénégalaises (+21,6 %) entre 1990 et 1998. La Côte d’Ivoire et le Burkina Faso font plus que doubler leurs exportations vers l’Europe en 9 années… Ces taux de croissance sont pour la plupart supérieurs aux taux de pénétration des autres exportables africains sur les marchés internationaux [7].
48Notons la présence de nombreux sites de commerce en ligne qui vendent des produits d’arts et artisanats africains, en Afrique, en Europe, aux États-Unis.
49Les spécialistes des marchés d’objets d’artisanat et d’art avancent un faisceau d’explications pour rendre compte de cet engouement pour les produits ethniques en général et pour les produits africains en particulier.
50En effet les grandes mutations sociétales de ces dernières décennies ont augmenté la propension européenne et américaine à consommer des produits d’ailleurs. Les voyages à travers les autres cultures – tourisme et séjours professionnels – les médias qui diffusent des images de paysages, peuples et traditions non-occidentales, une revalorisation de la nature et de la conscience écologique créent un environnement d’ouverture culturelle propice à la variété des produits. La fréquentation de populations d’origines diverses concourt à cette transformation de l’univers des possibles du consommateur.
51Les comportements individuels démontrent une saturation par rapport aux productions de masse de l’industrie, une quête d’image favorable de soi, de personnalisation d’un style de vie par des objets. Par leurs caractères de différences culturelles, de « faits-main », de pièces uniques, de matières naturelles, les produits africains s’inscrivent harmonieusement dans les nouvelles attentes de consommation ; chargés d’histoires et de tradition, polyvalents et polysémiques à la fois ludiques, décoratifs, et créatifs, ils contribuent à donner du sens, de la convivialité, du lien et une esthétique originale au quotidien.
52Ces éléments, sur lesquels repose l’intérêt pour l’artisanat africain tel que les professionnels l’ont confirmé [8], interfèrent avec les tendances démographiques de vieillissement de la population. Elles redonnent toute son importance à l’intérieur des maisons et appartements, stimulant le marché des produits de décoration et accessoires de maison. La redécouverte d’un cadre de vie convivial et d’individus moins attachés aux marques et stéréotypes socioculturels nourrit la demande d’artisanat. Les grandes transformations économiques liées à la globalisation des économies supportent la diffusion et la banalisation des produits d’origine étrangère sur les marchés de la Triade, les produits ethniques.
53Un segment particulier de la demande de produits africains authentiques mérite d’être signalé, la demande afro-américaine. En progression constante depuis les années 70, elle est animée par la philosophie héritière des mouvements de nationalisme noir et de retour aux sources. Aux antipodes d’une doxa d’élites, elle s’exprime par la recherche devenue structurelle d’objets d’origine africaine, rapprochant les afro-descendants de leur continent d’origine. Ici le « made in Africa » ou « sourced from Africa » (en provenance d’Afrique) est très prisé.
54Ces éléments mettant en avant les performances qualitatives et quantitatives de l’offre africaine d’art et d’artisanat sur les marchés internationaux soutiennent le diagnostic d’une attractivité forte et séculaire des produits authentiques de la culture matérielle africaine. En amont de ses performances qui ne sont qu’un reflet ou un ensemble de résultats d’un foisonnement productif, au creux des statistiques de pénétration internationale, un potentiel de développement économique probablement unique et pourtant délaissé par les acteurs de la Lutte contre la Pauvreté…
Potentiel de développement économique et de mobilité sociale
55Les filières de production des arts et artisanats africains recèlent par leur énorme attractivité internationale et par l’articulation de ce secteur avec les autres secteurs productifs et de services, un potentiel quasiment inexploré d’émergence économique et de régénération sociale.
56Compte tenu de l’intensité du secteur en main-d’œuvre et en savoir-faire, l’impact sur le niveau de l’emploi se trouve être structurellement important. Outre le rapport loin d’être négligeable en devises – des exportateurs africains affichent des chiffres d’affaires export de l’ordre de 400 à 600 000 dollars l’an [9] – les effets d’entraînement sur l’ensemble des filières sont substantiels. Tous les services liés au commerce international, transports locaux, internationaux, assurances, logistique, services financiers etc. sont concernés. Les grandes commandes américaines au Kenya ou au Ghana, ont été, pour les acteurs africains, artisans, intermédiaires, banques…, l’occasion d’apprendre les pratiques les plus avancées des instruments du commerce international.
57Ces effets d’apprentissages sont d’une grande efficacité car ils touchent directement, dans la pratique, des publics sensibles dans la mesure où ils manipulent de la modernité dans la nécessité même de leur existence professionnelle et sociale. Ainsi des artistes, artisans, courtiers se familiarisent-ils progressivement au marketing, à la promotion internationale des produits par les salons professionnels, les foires internationales, les rencontres avec des professionnels d’autres pays et continents.
58Le secteur de l’artisanat rendu plus tonique par des politiques appropriées prépare ainsi à une meilleure culture industrielle, au-delà des produits typiques de la culture matérielle. Symptomatiquement les pays qui ont été historiquement de grands exportateurs de produits artisanaux, l’Inde et la Chine – qui dans les années 80 évaluaient à environ 1/5e la part de l’artisanat dans leurs exportations totales – sont aujourd’hui des pays industrialisés [10].
59À la différence d’un certain nombre de produits de rente sans articulation avec les économies domestiques, l’artisanat entretient des liens génétiques avec les autres secteurs de l’économie. Avec le secteur primaire, l’agriculture et l’économie rurale par le fait qu’une proportion importante d’artisans évoluent dans un environnement rural et mènent parallèlement des activités agricoles ou d’autres services. De plus l’artisanat produit des outils pour l’économie agricole et rurale plus généralement.
60À l’instar des synergies entre l’artisanat et le tourisme, le tourisme fournissant une demande presque naturelle et captive à l’artisanat local (souvenirs, cadeaux,…) en retour un artisanat florissant renforçant le capital de séduction et de compétitivité d’une destination touristique. Jouant sur les arguments culturels, sur la beauté des sites, et à la fois sur une tradition artisanale bien établie et reconnue, des pays comme le Maroc, le Sénégal, le Ghana manifestent avec un succès relatif ces synergies entre l’artisanat et les autres secteurs des services.
61L’émergence de l’économie des arts et artisanats africains porte en elle des attendus inestimables d’amélioration de la productivité des économies africaines en contribuant à la diversification d’économies cristallisées sur quelques secteurs lucratifs. L’augmentation du nombre des activités productives et rentables pourrait limiter l’investissement collectif dans la recherche effrénée des rentes, revenus et niveaux de vie coûteux sans activités productrices, par la sémiotique économique qu’elle génère – signe que des activités autres que rentières sont possibles voire gagnantes.
62De plus le gain d’articulation et d’intégration économique, favorisé par un secteur enraciné culturellement et économiquement dans le tissu des activités domestiques – économie rurale, urbaine, régionale – tout en étant performant à l’international, est susceptible d’effets positifs sur la productivité globale une fois cette filière lancée sur une croissance soutenue.
63La dimension de mobilité sociale potentielle que renferme l’artisanat africain est centrale dans le débat sur l’exclusion des arts et artisanats des politiques économiques nobles du développement. De fait les activités des arts et artisanats sont rarement investies par des individus appartenant à des groupes sociaux richement dotés en capital économique, en capital culturel officiel – diplômes universitaires – occupant des positions sociales valorisantes…
64Pourtant on observe facilement dans la plupart des enquêtes que des effets de survie et même de mobilité sociale sont fréquents dans ce secteur. On parlera des effets de survie ou de reproduction de position initiale malheureusement les plus nombreux encore, faute d’une demande permanente, faute d’une amélioration de la capacité d’adaptation aux exigences des marchés.
65Le représentant de la société de commerce équitable Andines nous révélait lors d’entretiens réalisés au salon professionnel parisien « Maison et Objet » qu’une famille entière d’artisans touareg au Niger avait construit une maison grâce aux revenus générés par une commande pour un distributeur européen [11]. Une commande aura pu changer la vie d’une famille d’artisans en touchant à l’un des aspects cruciaux de la pauvreté, l’accès au logement et en l’occurrence à la propriété situant ces artisans-producteurs à un niveau plus élevé de conditions matérielles durables. Cet exemple n’est pas isolé.
66Un cas documenté de mobilité sociale et de stimulation de l’économie rurale est illustré par l’expérience de 500 villageoises, fabricantes de paniers tissés au Botswana, qui soutiennent les activités et la vie de 5 000 personnes, maris, enfants, collatéraux participants à la production.
67Les secteurs de l’artisanat et de l’art africains manifestent une autre qualité toute particulière qui dialogue avec la capacité des sociétés africaines et les milieux défavorisés à s’approprier la modernité. Très tôt les artistes et artisans africains vivant sur le continent, même localisés loin des grandes villes ont saisi l’intérêt des télécommunications. Certains artisans-exportateurs obligent leurs contre-maîtres à investir dans des téléphones portables pour accroître leur réactivité aux différentes spécifications des donneurs d’ordre, corrections, défauts, rajouts, délais…
68Nos entretiens ont révélé une utilisation professionnelle efficiente des outils tels que les téléphones, téléphones portables, télécopies et courriers électroniques pour certains. Cette propension à l’appropriation des NTIC est remarquable et distincte des effets de démonstrations et consommations ostentatoires courantes dans les milieux aisés. Il y a donc des effets externes positifs dans la pratique des arts et artisanats qui débordent sur des secteurs socio-économiques hautement sensibles dans le rapport social générique à la modernité vue comme efficience.
69Enfin, le possible de l’apparition d’un groupe social en dehors ou faiblement relié aux secteurs de rentes et de focalisation sociale – matières premières énergétiques, postes à revenus formels et informels dans les administrations centrales ou locales… – est de nature à modifier une structuration sociale, des habitus de captation. L’autonomisation ne serait-ce que partielle d’un champ socio-économique nouveau ou indépendant des réseaux d’accumulation illégitimes projetterait un discours sociologique propice à la stimulation d’activités endormies, enfouies ou en peine d’expansion.
70Les arts et artisanats africains saisis d’un point de vue économique, démontrent comme on l’a vu une attractivité internationale structurelle sur la longue durée, et abritent un énorme potentiel d’émergence économique sectoriel à effets de développement très probables. Ces secteurs, de surcroît, sont des possibles de mobilité sociale, d’appropriation de la modernité et de restructuration des rapports entre groupes sociaux dominants et dominés au profit des acteurs productifs et des innovateurs. Pourtant ils demeurent largement en deçà des attentes que leur potentiel laisserait envisager.
Dés économies d’échelle, de structuration et d’appuis sectoriels
71Les arts et artisanats africains devraient pouvoir trouver une demande locale, régionale et internationale pour leur pleine expansion. Mais c’est surtout le rapport à l’international qui montre les difficultés structurelles de ces secteurs à suivre les courants d’échange internationaux, l’échelle de production et ses exigences.
Les handicaps de l’échelle de production et de la structuration des artisans
72Par définition et historiquement l’artisanat c’est la petite ou moyenne taille, la production pour des besoins principalement locaux, le reste étant souvent résiduel. Il est donc normal qu’il ne puisse pas spontanément s’adapter aux demandes émanant des grands distributeurs qui ciblent des marchés de milliers, de millions de clients.
73Très tôt par conséquent des handicaps structurels d’échelle sont apparus dans le rapport de l’artisanat à l’économie contemporaine globalisée.
74– L’incapacité à répondre à des commandes de volumes importants – à l’échelle des marchés internationaux. Un pays comme le Vietnam exporte vers l’UE à peu près 19 fois plus de produits d’artisanat que le Burkina Faso, le Sénégal, la Côte d’Ivoire, le Ghana, le Kenya et Madagascar réunis (avec toutes les réserves d’usage connaissant les problèmes d’évaluation quantitative de ces secteurs). Le rapport est presque le même pour les exportations thaïlandaises et indonésiennes qui concurrencent les produits africains sur les marchés occidentaux.
75– L’irrégularité de la qualité, qui a trois manifestations courantes : la différence entre les échantillons et les commandes expédiées, la baisse de la qualité des articles avec l’accroissement des volumes, le manque d’uniformité des articles. L’effet de ciseaux entre les volumes et la qualité ressortit à la faiblesse de la productivité et à l’inefficacité de l’organisation de la filière d’amont en aval. Un ordre de grande taille modifie souvent les filières d’approvisionnement, le rythme de travail, et exige un préfinancement rapide.
76– Les délais de livraison demeurent trop longs et aléatoires, ils expliquent, avec les prix et l’incapacité à répondre à des commandes de masse, une bonne partie des réseaux asiatiques de production d’imitation de produits africains. Le problème des délais est de l’ordre de la production et de la livraison. Il comporte donc une entrée infrastructurelle irréductible à l’artisanat.
77– L’insuffisante adaptation des produits est patente dans les choix de couleurs présentées dans les foires, les designs, les tailles, les conditionnements ne sont pas toujours mis au format des usages, de la culture, de la mode des marchés visés. Les distributeurs tentent d’accroître leur collaboration avec les artisans pour adapter les produits à des clientèles choisies, les résultats de ces démarches sont positifs mais dans l’ensemble insuffisants.
78La structuration des artisans et le degré de professionnalisation autour des productions d’artisanat expliquent largement les handicaps soulevés : volumes, qualité, adaptation, délais… En effet les artisans sont souvent isolés ou esseulés, ils ne peuvent pas individuellement et sur la base de leur productivité unique répondre aux commandes internationales.
79De plus les questions de promotion internationale, de surface financière pour pré-financer les commandes ou assurer une visibilité nationale et à plus forte raison internationale ne se posent pas à l’échelle d’un artisan isolé, fût-il très doué pour son art. Une mutualisation des coûts est indispensable.
80Il en va de même des questions de renforcement du capital humain par des formations en marketing, commerce, gestion, designs, ne serait-ce qu’au niveau des bases. Sur ces insuffisances se greffent aussi des lacunes marketing : positionnement des produits, développement des gammes, déclinaisons diverses, ….
81Le déficit de structuration et de professionnalisation des filières pour l’heure sous-optimales pèse lourdement sur les performances des secteurs d’artisanat, il représente un élément sensible dans l’amélioration des performances des filières.
82Il semble bien que de plus en plus d’agences de développement et de coopération aient saisi en partie l’intérêt d’un soutien aux artisans, soit pour leur savoir-faire, soit parce qu’ils sont identifiés en situation de pauvreté, informels… Examinons de façon synthétique ces appuis sectoriels.
Efficience limitée des appuis sectoriels nationaux et internationaux
83Une chose est certaine c’est qu’un secteur qui n’est pas reconnu à sa juste valeur de contribution actuelle et potentielle à la richesse collective ne risque pas de faire l’objet d’attentions et d’expertises particulièrement poussées. Les appuis à l’artisanat demeurent un aspect très anecdotique sinon capillaire des politiques économiques et des programmes de coopération. Les principaux acteurs de soutien à l’artisanat, les États, les OPI ou organisations de promotion des importations en provenance des PED qui sont en général plus ou moins des services spécialisés des agences de coopération, les organes spécialisés du système ONU – Unesco, Onudi, Centre du Commerce International (Cnuced/Omc) – ont progressivement mis en place un ensemble d’actions en faveur de l’artisanat.
84Les stratégies des OPI nous donnent un aperçu représentatif des outils de soutien à l’artisanat africain. Ces modèles se distinguent les uns des autres par leur relative complétude (contenus), leur relative intensité dans le temps, et l’identité des pays bénéficiaires.
Stratégies d’appui des OPI
85Les paradigmes d’actions européens, dont le programme EACH – European-African Cooperation for Handicrafts – est une référence, sont généralement construits sur deux grandes composantes, pour les programmes les plus complets :
86– Une composante « offre », dont le but est de renforcer la capacité et la valeur de la production sur toute la filière. L’assistance technique est centrale à cette composante, consistant à la formation et un perfectionnement des capacités productives des artisans, et l’initiation aux fondamentaux du marketing, du management de l’export.
87– Une composante « demande » consistant à financer l’essentiel des frais de participation aux foires des entreprises sélectionnées, bénéficiaires d’une promotion auprès des distributeurs européens, par mailing, presses spécialisées, rencontres offreurs/acheteurs. Les groupes-cibles sont souvent des associations, coopératives, entreprises privées sélectionnées sur des critères d’efficacité, de qualité des produits, de crédibilité et de motivation des acteurs candidats.
88De 1996 à 1999, le programme EACH, aujourd’hui arrêté, était un programme de 3,5 millions d’euros. Sa finalité était de présenter sur les plus grandes foires européennes de produits d’intérieur, cadeaux, artisanats, bijoux… les offres adaptées de 6 pays africains : le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, le Ghana, le Kenya, la Namibie, le Zimbabwe.
89En amont l’assistance technique – développement des produits, formation au commerce international – préparait les artisans à la participation optimale aux foires, puis l’appui aux artisans dans la réponse aux commandes. Ce programme était assorti de la mise à disposition d’informations commerciales aux exportateurs, et d’une prospection par mailing envoyés à des détaillants.
90On peut citer également l’IEPP (Integrated Exports Promotion Programme) du CBI (Centre for the Promotion of Imports from Developing Countries, Pays-Bas), programme de promotion des exportations des PED assez abouti dans sa structure. Ces deux modèles de promotion apparaissent comme les plus complets dotés des volets offre et demande dans des agencements différents, avec apparemment une grande sélectivité des produits et des bénéficiaires pour l’IEPP.
91Plusieurs organismes européens et agences de coopération interviennent ou sont intervenus dans la promotion de l’artisanat, sur l’une ou l’autre composante des appuis, voire sur les deux, avec toutefois une moindre intensité que EACH ou l’IEPP : la Coopération française, Lux-développement, etc. Nombre d’agences de coopérations bilatérales interviennent directement ou par ONG interposées sur le renforcement de l’offre. Les coopérations suisse, danoise, allemande via l’ONG Protrade…sont souvent dans cette configuration de soutien.
92Des programmes internationaux émanent d’institutions telles que l’Unesco qui a mis sur pied un « plan décennal de développement de l’artisanat dans le monde : 1990-1999 », pour servir de catalyseur à l’échelle internationale des stratégies nationales. Une logique de préservation culturelle y côtoie une approche de plus en plus économique certes un peu tardive.
93Le Centre du Commerce International est une des têtes de proue du développement de l’artisanat ; il publie des études de marché, des guides stratégiques pour appuyer l’offre des PED.
94Les politiques nationales tendent à soutenir l’offre dans sa structuration – créations de chambres de commerce et de métiers, villages artisanaux, actions réglementaires… – et son accès aux marchés nationaux –foires nationales – internationaux – aide à la participation aux foires internationales… Des organismes spécifiques de promotion d’exportations existent également (Ghana, Kenya, Uganda…)
Les limites des stratégies d’appui à l’artisanat
95Dans l’ensemble on ne peut pas dire ces programmes aient des effets quantitatifs notables ni même un impact qualitatif – changement des comportement – durables du fait de l’architecture des appuis et leur profil temporel discontinu et limité.
96Les limites de l’action des OPI, notamment à partir d’une expérience impliquant six pays africains et l’Union Européenne, le programme EACH, peuvent être résumées en un schéma simple. Elles tiennent à l’architecture des programmes, aux déséconomies de l’atomicité des soutiens, à la relative exogénéité des actions de promotion : déficits conceptuels et politiques.
97Les problèmes d’architecture des actions de support touchent au profil temporel des assistances – durées et agencements des types d’appui – et à leur composition.
98Il faudrait une longue période pour que l’assimilation de l’assistance technique – formations, séminaires…– se répercute de façon durable sur les savoir-faire endogènes. Et la participation aux foires produit des effets en général au bout de la 3e participation signe de crédibilité des acteurs… Ce devrait être une base minimale pour la durée de tels programmes.
99L’incomplétude des programmes en limite généralement la portée. Des programmes exclusivement tournés sur la demande (foires) risquent de mettre sur le marché des produits de qualité médiocre et des quantités insuffisantes. À l’inverse, le risque encouru d’un manque de motivation et d’adhésion est grand lorsque le programme porte uniquement sur l’amélioration du rendement de l’offre sans perspective de ventes pour les artisans participants. Cette démotivation est entretenue par le manque à gagner que représentent des heures de formation prises sur d’autres activités rémunératrices.
100Il serait cohérent de prévoir des ressources de préfinancement des exportations lorsque des commandes sont passées aux artisans consécutivement à une action promotionnelle. La difficulté d’accès au crédit étant un phénomène largement documenté – micro-crédit – cette composante apparaît naturelle.
101L’atomicité des soutiens menés isolément par les agences de développement nationales et internationales produit des déséconomies et une déperdition de ressources. Nombre de consultants ont reconnu offrir les mêmes expertises tour à tour pour différentes organisations, souvent au bénéfice de pays voisins. Le regroupement des programmes de promotion de l’artisanat, par métiers compatibles serait l’occasion d’une économie sur les coûts de promotion et de prospection.
102La relative exogénéité des programmes ou leur déficit d’auto-émergence tend à biaiser la perception des bénéficiaires. Ou les appuis sont perçus comme provenant d’une loterie (hasard) ou ils sont perçus, du fait de leurs discontinuités, césures et arrêts inattendus, comme discrétionnaires. Des situations d’aléa moral risquent de survenir, matérialisées par des stratégies opportunistes ou un manque d’adhésion.
103Il est probable qu’un recours accru aux consultants locaux apporte un surcroît d’efficacité à l’assistance technique. Leur immersion au cœur des préoccupations des artisans et exportateurs est susceptible de leur donner une justesse de ton et de niveau dans les stages de formation.
104Enfin il apparaît qu’une professionnalisation des appuis soit indispensable et que des concepts de promotion et d’évaluation robustes, innovants répondent à la puissance d’émergence des produits d’artisanat. Cela revient, à peu de choses près, à la reconnaissance préalable des artisanats et de l’art comme secteur économique –non-exclusif – au même titre que d’autres activités productives…
Artisanats africains et régulation prédatrice globale
105Les performances quantitatives et qualitatives des arts et artisanats africains se heurtent comme nous l’avons vu à des handicaps d’échelle de production et de structuration que les instruments et concepts de soutiens sectoriels peinent à lever. Plus encore les produits esthétiques de la culture matérielle africaine évoluent sous une régulation, un environnement international de politiques économiques et de pratiques marchandes qui traduisent une homologie avec la famille des prédations typiques de la globalisation économique.
Rationnements publics néo-libéraux et échanges asymétriques
106Les arts et artisanats africains accusent l’impact depuis l’orée de la décennie 80 et jusqu’à ce jour, des politiques économiques néo-libérales bien connues. Elles préconisent comme unique mode de sortie de crise la stabilisation macro-économique, sous-entendue la réduction drastique des budgets de soutien à l’économie, et de l’autre côté la libéralisation. Le train de mesures invariant va donc de la réduction des déficits à la remise au secteur privé – les grandes entreprises occidentales essentiellement – des activités contrôlées par la puissance publique, autrement dit, ce sont les plans d’ajustement structurel, les PAS.
107Les PAS interfèrent dans l’économie des arts et artisanats de façon directe, par la baisse des budgets alloués à la culture, et aux produits de la culture matériels répartis dans différentes nomenclatures ministérielles : culture, tourisme et artisanat, commerce extérieur, construction… Ces baisses limitent les efforts de structuration des artistes et artisans, leurs moyens de création, de promotion, d’investissement. Même les commandes publiques pour des monuments et bâtiments officiels se raréfient, ce qui prive de moyens d’existence les créateurs.
108Ces rationnements touchant aux produits artisanaux et artistiques révèlent le statut des arts et artisanats dans la vision néo-libérale en Afrique, et celle des gouvernements africains par rapport à leur culture matérielle. Or les commandes d’État ont traditionnellement une place importante dans le développement du secteur de l’art et de l’artisanat.
109D’une façon indirecte mais tout aussi redoutable dans la détérioration de l’environnement africain de la création, la massification des pauvres, chômeurs, compressés et autres comprimés économiques, déverse une quantité énorme d’acteurs parasites sur l’offre et la vente des produits d’arts et d’artisanat. C’est le terrain fertile de l’art d’aéroport dans son aspect le moins esthétique et déontologique. Les rebus des PAS s’improvisent, artisans-débrouillards, intermédiaires douteux, opportunistes de tout genre. La qualité y perd avec une massification incontrôlée, et l’image des arts et artisanats africains s’en trouve écornée.
110La structure des échanges marchands concernant les arts et artisanats africains est caractérisée par une grande asymétrie de pouvoir et d’informations entre acteurs africains et occidentaux. Peu d’acteurs occidentaux peuvent identifier les artisans et artistes créatifs et crédibles, et l’offre africaine se trouve en contact avec un petit nombre de détaillants, grossistes, importateurs, distributeurs. Ce petit nombre des acheteurs-connaisseurs est en situation d’oligopole sur son marché aval (vente), il peut donc manipuler les prix et dispose d’informations dont la partie africaine ne dispose pas. D’où des pratiques commerciales souvent très risquées, reconnues par les acteurs occidentaux [12], émanant des exportateurs et artisans qui vendent à découvert – paiements partiels ou complets après livraison, absence de contrat – pis qui ne maîtrisent pas les prix, le partage des gains…
111Une stratégie compensatrice consiste à utiliser le marché des touristes à la fois comme prix d’ancrage des prix à l’exportation – le prix export est basé sur le prix aux touristes lui-même toujours supérieur au prix aux acheteurs locaux – et comme marché captif à très forte marge. Les pays peu touristiques ne peuvent malheureusement s’offrir une telle stratégie, de plus, selon la Banque mondiale, 55 % des dépenses des touristes occidentaux s’adressent aux produits importés de leurs pays d’origine…
112Le cadre général au sein duquel évoluent les produits d’art et d’artisanat africains, qu’il s’agisse des politiques néo-libérales nommées plans d’ajustement structurel, ou des configurations oligopolistiques et asymétriques des transactions commerciales, participent d’une régulation prédatrice qui laissent les artisans et artistes dans la pauvreté, alors que les distributeurs, les acteurs de taille importante tirent des profits significatifs de la créativité africaine.
Prédation par la domination occidentale et l’industrie de l’imitation
113La persévérance des logiques de domination et d’une vision sur-valorisante des œuvres occidentales, cachée derrière les proférations du relativisme culturel contribue à limiter l’audience, l’activité de promotion et les retours économiques aux artistes non occidentaux. À titre d’illustration, l’art contemporain et son illusion d’universalité tendent à conforter des relations de centre à périphéries [13]. Les arts africains, est-européens ou asiatiques, parfois en vogue, dépassent rarement le statut d’« arts Kleenex », comme interdits de mainstream, les classements réputationnels, la composition des collections privées et publiques, les achats des grands musées, etc. confirmant une nette domination de l’Amérique suivie de l’Europe. Ces préjugés qui fabriquent des lieux de notoriété, occidentaux, et une valorisation économique pèsent sur les œuvres africaines.
114Mais rien probablement ne fait plus de mal aux artistes et artisans africains que leur consécration négative par l’imitation de masse connue et documentée dans une certaine mesure. Les motifs, design, formes, modèles, masques, sculptures… africains font l’objet d’une économie de l’imitation de masse notamment asiatique – Indonésie, Vietnâm… – voire sud-américaine.
115Cette imitation tire sa source de la notoriété et de l’attractivité des artéfacts africains, et de l’incapacité de l’offre africaine à approvisionner les marchés internationaux dans le respect des pratiques usuels : volumes, délais, conformité des articles au prototype, réactivité, outils du commerce international, identification des acteurs – artistes, artisans, exportateurs… D’où une demande excédentaire, non satisfaite qui va rechercher et fabriquer une offre d’imitation. En effet bien souvent les détaillants ou importateurs européens proposent des modèles africains à leurs filières asiatiques qui les recopient au mieux, l’Afrique devenant un fournisseur international paupérisé de modèles.
116Cette imitation massive prospère en jouxtant des marchés clandestins, pillages, vols d’antiquités, pièces rares et objets d’art africains de grande valeur. Les collections privées et publiques occidentales étant les bénéficiaires en dernier ressort de ces pillages.
117L’industrie internationale de l’imitation des objets africains authentiques relève de l’absence ou de la difficulté de protection de la propriété africaine apparemment pour des raisons techniques – les motifs n’appartiennent pas toujours à un individu, mais parfois à des ethnies et groupes ethniques – mais assurément aussi par volonté.
118L’augmentation du trafic international des œuvres d’art quant à lui ressortit à un arsenal de mesures éthiques et juridiques internationales, consistant à relever les législations nationales et internationales au niveau des trafics illicites dont les sommes sont si importantes que les instances mondiales veuillent s’en préoccuper comme des trafics d’armes ou de stupéfiants. La nécessité de répertorier les objets, au moins les plus exposés est de plus en plus admise [14].
119Les logiques de prédation à l’œuvre dans l’économie internationale des arts et artisanats africains agissent depuis les politiques locales diligentées par les institutions de Bretton Woods, FMI, Banque mondiale prolongées par l’OMC, qui contribuent à amoindrir la capacité de l’État à agir sur les secteurs des arts et artisanats, laissant libre cours à une régulation privée au profit des grandes institutions, firmes et cercles dominants occidentaux. La massification de la pauvreté a ainsi généré une offre de survie dans l’artisanat, au détriment de la qualité, de l’éthique, et sans résoudre sur le fond les difficultés de conditions matérielles.
120La valorisation des œuvres occidentales au détriment des productions qui traversent les espaces de notoriété comme des modes furtives maintient une distribution des revenus et de prestige au détriment des artistes, artisans, arts et artisanats non occidentaux. La prédation sur les droits de propriété africains réussit à capter les revenus potentiels africains dans les segments de l’offre où la notoriété et une certaine reconnaissance sont au crédit de l’Afrique.
121L’attractivité internationale et séculaire des arts et artisanats africains, on ne peut plus objectivée, butte donc sur ses limites structurelles et sur les faiblesses plus ou moins volontaires des institutions nationales et internationales d’assistance à des secteurs à fort potentiel d’émergence économique et de mobilité sociale. Elle se trouve captive des rets d’une mondialisation qui, en trompe-l’œil, veut s’ouvrir à une distribution de notoriété et de richesse au prorata des seules œuvres sanctionnées par le marché, alors que des mécanismes de conservation et de captation sont une trame de fond défiant les clivages traditionnels privé, public, officiel, officieux, légal, illégal…
Notes
-
[*]
Économiste. Directeur du site http://www.africara.com.
-
[1]
Biggs, Tyler, « … Africa can compete ! Exports opportunities and challenges for garments and home products in the US market », World Bank discussion papers, Africa Technical Department series, n° 242, 1994, Washington DC.
Biggs, Tyler, « …Africa can compete ! Exports opportunities and challenges for garments and home products in the European market », World Bank, 1996, Washington DC. -
[2]
Voir Kouloufoua, Jean-Gilbert-Jules ; « La culture matérielle d’Afrique noire dans les musées européens : Italie, France », Thèse soutenue à l’école d’anthropologie de Paris, 1982. Voir aussi entre autres travaux de cet auteur, Engelberg, Mveng ; L’Art et l’artisanat africains, éditions Clé, 1980, Yaoundé.
-
[3]
Kluckhohn, Clyde ; Kroeber, Alfred Louis ; Culture, a critical review of concepts and definitions. Cambridge, published by the Museum, 1952.
-
[4]
Laude, Jean ; La peinture française et l’« Art nègre » (1905-1914), p. 47, Editions Klincksieck, 1968, Paris. Voir aussi Présence Africaine 1950, p. 10-11.
-
[5]
Voir le compte rendu : « Joint Unesco/IBRD Seminar on the Social and Cultural Impacts of Tourism ; Impact of Tourism on Traditional Arts and Crafts and the Values Associated with them in some African countries south of Sahara », Washington, December 8-10, 1976.
-
[6]
Ezio, Bassani, 19th Century Airport Art, n° 2, February 1979, p. 35, African Arts.
-
[7]
Source : Eurostat/comext. Chiffres en milliers d’euros. Ces chiffres sont des approximations, étant donné la difficulté de repérage des flux commerciaux d’art et d’artisanat africain dans les échanges internationaux.
-
[8]
Entretiens menés au salon professionnel Maison et Objet, Paris, 1999. Martial, Ze Belinga, Étude de la pénétration des produits artisanaux africains sur les marchés français et européens, Ministère français des Affaires étrangères, Janvier 2000.
-
[9]
Voir : Ze Belinga, Martial ; Mission d’étude sur l’offre ghanéenne d’exportation de produits artisanaux, Ministère français des Affaires étrangères, p. 11, Paris, 1999.
-
[10]
Voir Kathuria, Sanjay ; « Exportations indiennes : le défi chinois » ; Economie Prospective Internationale, n° 33, p. 37-55, 1987.
-
[11]
Entretiens menés au salon « Maison et Objet », septembre 1999, op. cit.
-
[12]
Entretiens de l’auteur avec Mme Irma Adler, acheteuse espagnole au Salon International de l’Artisanat Africain de Ouagadougou, 1996
-
[13]
Entretien avec le sociologue français Alain Quémin, Propos recueillis par René Lefort, « Art contemporain : l’illusion d’universalité », Le Courrier de l’Unesco ; octobre 2001.
-
[14]
Kuntz, Luci Iglesias, « À la recherche de l’art perdu », Le Courrier de l’Unesco, mars 1999.