Notes
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[1]
Face au « péril noir » interne et au « péril rouge » externe.
-
[2]
Pour mémoire, la puissance explosive de la bombe larguée au-dessus de la ville de Hiroshima le 6 août 1945 était d’environ 15 kt tnt et celle de la bombe larguée au-dessus de Nagasaki le 9 août d’environ 20 kt tnt.
-
[3]
« double track » selon certaines locutions diplomatiques.
-
[4]
Initiative de contre-prolifération initiée par les États-Unis (John Bolton à l’époque du premier mandat de George W. Bush) pour constituer un mécanisme souple de partage d’informations entre pays participants et d’interdiction de cargaisons jugées suspectes, en particulier en haute mer, grâce à des accords d’arraisonnement.
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[5]
La question de l’efficacité des sanctions multilatérales contre les États dits proliférants est débattue. Il s’agit également de se demander si les sanctions sont contre-productives quand leur renforcement s’accompagne d’une accélération des programmes nucléaires dans les pays visés. Le cas sud-africain au cours des années 1980 illustre plutôt l’idée de contre-productivité ; le cas iranien au cours des années 2000, l’idée d’efficacité.
-
[6]
Alors, la mise en œuvre du régime de sanctions fut jugée « alarmante » par le panel – Final Report of the Panel of Experts Submitted Pursuant to Resolution 2345 (2017), 5 mars 2018, S / 2018 / 171 ; le nouveau rapport du panel d’experts n’était pas encore publié au 12 septembre 2018.
-
[7]
« Remarks by President Trump and President Moon of the Republic of Korea in Joint Press Conference », WhiteHouse.org, 7 novembre 2017.
-
[8]
Les termes employés alors étaient « to de-escalate and return to the path of dialogue » (« Joint Statement by Secretary of State Rex Tillerson, Secretary of Defense James Mattis, Director of National Intelligence Dan Coats », State.gov, 26 avril 2017).
-
[9]
« South Korea’s New President : ‘Trump and I Have a Common Goal’ », Washington Post, 20 juin 2017.
-
[10]
À ce poste depuis mai 2017, Im Jong-seok, 51 ans, est un fervent soutien du processus d’engagement et de négociation avec la rpdc.
-
[11]
Cf. « Moon exhorte le Parlement à ratifier la déclaration de Panmunjom », French. YonhapNews.co.kr, 30 avril 2018.
-
[12]
« Shinzō Abe : Solidarity Against the North Korean Threat », New York Times, 17 septembre 2017.
-
[13]
La déclaration conjointe des deux Corées sur la dénucléarisation de la péninsule coréenne, signée le 20 janvier 1992 et entrée en vigueur le 19 février suivant, était sensiblement plus détaillée que le document de Singapour du 12 juin 2018 : le champ d’application fut précisé ; un mécanisme de vérification de l’accord fut prévu et détaillé.
-
[14]
Exercice dénommé « Freedom Guardian ». Cf. par exemple « U.S., South Korea Cancel Major War Game Planned for August », Wall Street Journal, 19 juin 2018.
-
[15]
« North Korea’s Kim Makes Another Trip to China. That Complicates Things for Trump », Washington Post, 19 juin 2018.
-
[16]
La ministre des Affaires étrangères sud-coréenne, Kang Kyung-wha, déclarait à des journalistes, le 18 juin 2018 : « Notre position est que les sanctions doivent rester en place jusqu’à ce que la Corée du Nord prenne des mesures significatives et substantielles en faveur de la dénucléarisation » (« Seoul Says North Korea Sanctions May Be Eased Before Full Denuclearisation », France24.com, 18 juin 2018).
-
[17]
Joint Comprehensive Plan of Action, 14 juillet 2015, conclu entre l’Iran et les « E3 + 3 » (Allemagne, France, Royaume-Uni, avec les États-Unis, la Chine et la Russie) pour garantir l’usage exclusivement civil du programme nucléaire iranien.
-
[18]
La question de la logique et de la cohérence des positions de l’administration Trump se pose néanmoins, et l’on ne peut désormais exclure que le traitement de la crise nord-coréenne contredise celui des programmes nucléaire et balistique iraniens.
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[19]
La stratégie dite de rééquilibrage (rebalance strategy) vers l’Asie-Pacifique prise par l’administration Obama et annoncée en 2011 à diverses reprises visait à démontrer aux alliés régionaux que les États-Unis s’engageaient à travailler au maintien de la sécurité et de la prospérité de la zone. La notion de rééquilibrage a généralement une forte connotation économique et commerciale. Sur le plan stratégique, l’objectif est de maintenir l’équilibre régional des rapports de force. Bien qu’ayant été formellement dénoncé par le président Trump, soucieux par principe de déconstruire patiemment l’œuvre de son prédécesseur, le rééquilibrage reste une ambition stratégique américaine face à l’affirmation des ambitions chinoises dans l’ensemble de la zone. Cf. par exemple Valérie Niquet, Isabelle Facon, Benjamin Hautecouverture, Sophie Boisseau du Rocher, Gilles Boquérat et Patrick Hébrard, Évolution des équilibres en zone Asie-Pacifique : quelles conséquences pour nos intérêts, quelles réponses et quels partenaires privilégier ?, FRStrategie.org, 9 octobre 2017.
1Crise de prolifération régionale intéressant quelques spécialistes des affaires nucléaires au début des années 1990, le contentieux nucléaire nord-coréen est devenu en un quart de siècle une crise stratégique qui occupe les gouvernements et les opinions publiques du monde entier. L’intérêt médiatique pour le sommet de Singapour du 12 juin 2018 entre les dirigeants américain et nord-coréen a témoigné de l’ampleur prise par cet enjeu de sécurité internationale.
2Largement qualifié d’historique, le sommet de Singapour pose un nouveau jalon dans l’histoire nucléaire contemporaine. C’est l’occasion de faire un point sur l’ampleur du programme nucléaire offensif nord-coréen ainsi que sur les efforts déployés par la communauté internationale pour y mettre un terme. Face à la mise en œuvre d’une volonté implacable du clan au pouvoir à Pyongyang, les efforts diplomatiques collectifs déployés depuis 1993 n’ont pas permis d’enrayer la nucléarisation de la politique de sécurité de la République populaire démocratique de Corée (rpdc). Il s’agit désormais d’un État possesseur de l’arme nucléaire face auquel les options politiques sont limitées.
3Pour l’avenir, la question nucléaire nord-coréenne est double : dans quelles conditions le monde est-il capable de vivre avec un État nucléaire supplémentaire en Asie du Nord-Est ? Comment la planète nucléaire se remettrait-elle de cet échec collectif ?
La marche à la bombe
4L’année 2017 a vu le régime nord-coréen tester plus de vingt engins balistiques de portées diverses, y compris intercontinentale, et conduire un essai nucléaire souterrain de plus de 150 kilotonnes d’équivalent en trinitrotoluène (kt tnt). Se faisant, le pays est entré dans le club très fermé des États possesseurs de l’arme nucléaire, fruit d’une politique d’acquisition d’environ quarante années.
Histoire d’une détermination
5Il n’est pas facile de dater précisément l’origine de la volonté nord-coréenne de se doter de l’arme nucléaire. Plusieurs faits peuvent néanmoins être établis avec certitude : la décision fut prise par le premier dirigeant du pays, le leader historique Kim Il-sung, au début des années 1980 au plus tard. Elle fut reprise par son fils Kim Jong-il, puis par son petit-fils Kim Jong-un. Il s’agit donc d’une histoire d’au moins quarante ans, sinon davantage. C’est la constance de ce choix sécuritaire qui frappe avant tout et qu’il convient de garder à l’esprit quand on analyse ou commente l’actualité récente : jusqu’à ce jour, la détermination de la famille Kim fut implacable. Aucun autre exemple dans l’histoire nucléaire depuis le début des années 1940 n’illustre une telle détermination sur une durée aussi longue et jalonnée d’autant d’obstacles.
6Pour mémoire, le programme nucléaire nord-coréen date du début des années 1950, initié avec le soutien de l’Union soviétique. Le régime se dota d’un réacteur de recherche soviétique irt-2000 à l’orée des années 1960 et chercha à acquérir la technologie de retraitement du plutonium durant la décennie suivante. Mais c’est véritablement au cours des années 1980 que le programme s’étendit de manière autonome : extraction de l’uranium, complexe de production du combustible, réacteur nucléaire de 5 mégawatts, centres de recherche et développement furent alors lancés. État partie au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (tnp) comme État non doté en 1985, la rpdc signa avec l’Agence internationale pour l’énergie atomique un accord de garanties généralisées en 1992 au titre duquel son programme nucléaire serait l’objet d’inspections régulières. Mais, en juin 1994, Pyongyang cessa de coopérer avec les inspecteurs de l’agence de Vienne, initiant la première « crise » nucléaire nord-coréenne, avant de se retirer du tnp en janvier 2003 en invoquant le droit au retrait stipulé par l’article x du traité. Depuis lors, le pays a conduit six essais nucléaires souterrains : en 2006, 2009, 2013, 2016 (deux essais) et 2017. De l’extraction à l’assemblage des charges, on estime à plus de vingt-cinq le nombre de sites connus liés au programme nucléaire nord-coréen.
7Associé à ce programme, le lancement d’un programme balistique nord-coréen fut décidé par Kim Il-sung en 1965, qui prit forme sur le plan industriel dans les années 1980 sur la base de conceptions soviétiques puis chinoises : missiles de courte et moyenne portées d’abord, puis, à partir de la fin des années 1980, missiles de portée intermédiaire. Le développement d’un missile intercontinental fut lancé au milieu de la décennie suivante.
Pour quoi faire ?
8La question de la motivation de la famille Kim à nucléariser la politique de sécurité et de défense du régime a longtemps été traitée avec une relative légèreté en Occident. Au début du siècle, les Kim étaient souvent considérés comme des dictateurs irrationnels désireux de monnayer le soutien économique de leur pays. C’est la détermination de Kim Jong-un et l’inscription de la Corée du Nord comme État nucléaire dans la révision constitutionnelle de 2012 qui contraignirent les observateurs à tenter de comprendre une telle obstination. La « loi pour le renforcement du statut de puissance nucléaire de la rpdc » de 2013 a transposé en droit interne le statut nucléaire du pays. En l’absence de doctrine réellement constituée, il faut encore aujourd’hui s’en tenir à des hypothèses.
9D’abord, la réflexion nord-coréenne sur l’arme nucléaire a mûri avec l’avancement des programmes et des technologies. En cela, la Corée du Nord ressemble à tous les États possesseurs dont les doctrines se sont affinées avec l’élargissement de la panoplie de moyens à disposition. Ensuite, l’objectif d’acquisition de l’arme nucléaire est devenu intrinsèquement lié au régime dynastique lui-même. L’arme nucléaire en est donc perçue comme la garantie. Cette garantie s’exerce face aux menaces internes et externes, comme en son temps l’arme nucléaire sud-africaine [1]. Par ailleurs, il ne semble pas que le régime distingue bien la notion de dissuasion conventionnelle et la notion de dissuasion nucléaire, qui en est encore le prolongement. En outre, l’idée selon laquelle le régime aurait adopté une doctrine d’escalade asymétrique a été très discutée depuis 2012, et s’appuie sur un nombre significatif d’éléments objectifs : développements tactiques, infériorité conventionnelle, manque de capacités de représailles assurées, en particulier.
10Cela étant dit, depuis 2015 au moins, le développement du programme semble également indiquer une volonté d’assurer la survivabilité de l’arsenal et une capacité de seconde frappe (composante maritime, missiles mobiles).
L’exacerbation des programmes
11On peut dater au premier essai nucléaire en 2006 l’affirmation nord-coréenne officielle de vouloir se doter de l’arme nucléaire. Alors, la finalité des programmes liés à la maîtrise du cycle du combustible fut révélée au reste du monde. La crise nucléaire, ouverte en 1993, entrait de plain-pied dans une phase d’accélération destinée à aboutir. Par souci de simplification, on entend souvent que Kim Jong-il fut le père du programme nucléaire et son fils celui du programme balistique. Cette simplification ne correspond pas à la réalité. La progression des programmes balistique et nucléaire fut constante depuis l’origine, avec des résultats qui se sont accélérés depuis la fin des années 2000 et dont la précipitation en 2017 ne fut rien d’autre que la conséquence d’un choix politique de temporalité.
12En tirant, le 3 juillet 2017, un missile Hwasong-14 (kn-20) à deux étages depuis le site de Kusong, au nord-ouest du pays, le régime testait pour la première fois un missile de portée intercontinentale. L’engin vola sur 950 kilomètres avec un apogée de 2 800 kilomètres. Un nouvel essai d’un même missile réalisé trois semaines plus tard, le 29 juillet, confirma l’avancement de ce programme : trajectoire allongée à 1 000 kilomètres, apogée de 3 800 kilomètres, temps de vol de quarante-sept minutes, lancement nocturne. Il est désormais raisonnable de penser que le Hwasong-14 pourra avoir une portée maximale comprise entre 9 000 et 10 400 kilomètres. Pour mémoire, le régime procéda également, le 29 août suivant, au tir d’essai d’un missile Hwasong-12 (kn-17) depuis un site proche de la capitale. L’engin, de portée intermédiaire, parcourut 2 700 kilomètres au-dessus du Japon, atteignant un apogée approximatif de 550 kilomètres.
13Parallèlement, le programme nucléaire progressa à un rythme accéléré : deux essais souterrains réalisés au cours de l’année 2016 accréditèrent la maîtrise par les ingénieurs nord-coréens de la technologie de la bombe à fission (bombe A). L’essai du 3 septembre 2017 provoqua une secousse sismique dont la magnitude a été estimée à 6,1 par l’Organisation du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires et le système norvégien Norsar. Par comparaison, les essais de janvier et septembre 2016 avaient provoqué des secousses sismiques d’une magnitude de 4,8 et de 5,1 respectivement. Même si l’équivalence en puissance explosive est réputée incertaine, il est estimé que l’essai du 3 septembre 2017 correspond à une puissance de plus de 200 kt tnt. En tout état de cause, il s’agit certainement d’une puissance supérieure à 100 kt tnt [2]. Qu’il s’agisse d’une bombe à fission-fusion (bombe H) ou d’un engin à fission exalté, comme ce fut sans doute le cas de l’explosion de septembre 2016, le sixième essai de la rpdc indiqua une progression remarquable du programme nucléaire militaire.
14Le régime nord-coréen a peut-être aujourd’hui la capacité de produire plusieurs dizaines de têtes nucléaires de plus de 100 kilotonnes. Les estimations du nombre de têtes disponibles restent à ce jour très vagues, allant d’une vingtaine à plus de soixante. Si l’on couple cette capacité à la maîtrise de la technologie des missiles balistiques de courte et moyenne portées, et que l’on suppose, avec nombre d’analystes américains, une capacité à assembler têtes et vecteurs, la Corée du Sud ainsi qu’une grande partie du Japon peuvent désormais être dits vulnérables à une attaque nucléaire nord-coréenne.
L’échec de la diplomatie
15À ce jour, aucune option militaire contre le programme nucléaire nord-coréen n’a été adoptée ou mise en œuvre. À la marge, des activités de contre-prolifération furent menées pour tâcher de ralentir les programmes et de limiter les activités proliférantes de Pyongyang à l’extérieur des frontières du pays depuis 2003. L’approche de la communauté internationale fut toujours diplomatique, privilégiant deux voies : la négociation directe et l’imposition d’un régime de sanctions en particulier économiques. Cette double approche [3] a échoué.
Vingt-cinq années de négociations
16Si l’on considère que les premières négociations nucléaires avec Pyongyang débutèrent après la menace nord-coréenne de quitter le tnp en 1993-1994, cela fait vingt-cinq ans en 2018 que le pays se tient avec le reste des États du monde dans une situation précontentieuse ou contentieuse s’agissant de son programme nucléaire. Le format de négociation a évolué ; il fut multilatéral et bilatéral, impliquant les seuls États de la région nord-est asiatique ou d’autres États ou groupements d’États à l’extérieur de la zone.
17Depuis le début des années 1990, les États-Unis et la rpdc menèrent cinq grands cycles de négociation visant à mettre un terme aux programmes nucléaire et balistique de Pyongyang :
- les pourparlers menant à l’accord-cadre (agreed framework) de 1994 ;
- les négociations bilatérales sur le programme balistique de 1996 à 2000 ;
- les pourparlers à Six de 2003 à 2009 ;
- les négociations conduisant à l’accord (Leap Day Agreement) du 29 février 2012 ;
- les négociations secrètes sur la tenue d’un sommet entre les dirigeants américain et nord-coréen au printemps 2018 depuis la fin de l’hiver 2017-2018.
18Par ailleurs, des canaux moins formels permirent un dialogue rarement interrompu entre États-Unis et Corée du Nord depuis le début des années 1990.
19Le schéma de ces divers processus peut être décomposé en une alternance d’exacerbation de tensions, de crise, de phase de dialogue puis de négociation, de conclusion d’un accord, de violation de cet accord par la Corée du Nord, de relance des tensions. En l’absence de signes tangibles d’une volonté nord-coréenne de revenir sur la conduite du programme nucléaire militaire, aucun dirigeant américain n’avait accepté avant Donald Trump de rencontrer son homologue à Pyongyang.
Peut-on étrangler Pyongyang ?
20La décision d’assortir de sanctions multilatérales, sous l’autorité du Conseil de sécurité des Nations unies, la diplomatie de négociation avec Pyongyang remonte au premier essai nucléaire du régime en 2006. Cette décision fut suivie collectivement par les États de l’Union européenne, qui mirent en œuvre une politique de sanctions autonomes. Depuis lors, le régime de sanctions est régulièrement renforcé, épousant assez exactement l’augmentation du rythme des essais balistiques et nucléaires. Cette politique collective n’a pas permis de ralentir le rythme des programmes ; la question de son efficacité reste posée.
21La politique multilatérale de sanctions économiques contre les programmes nucléaire et balistique de la rpdc fut initiée par la résolution 1718 du Conseil de sécurité des Nations unies, le 14 octobre 2006. Ce premier instrument fut adopté à l’unanimité en réponse au premier essai nucléaire du régime. Il impose un embargo sur les armes, un gel des avoirs et une interdiction de voyager aux personnes impliquées dans le programme nucléaire. Par la suite, le régime multilatéral de sanctions s’étoffa : la résolution 1874 du 6 décembre 2009 étendit l’embargo sur les armes et demanda aux États d’empêcher la fourniture de services financiers susceptibles de contribuer aux activités proliférantes de Pyongyang, alors qu’un panel d’experts fut mis en place pour assister le comité des Nations unies chargé du suivi du régime de sanctions ; la résolution 2087 du 22 janvier 2013 précisa le régime ; la résolution 2094 du 3 juillet 2013 innova par l’adjonction de sanctions financières ciblées, y compris le blocage des transferts en espèces, et ouvrit une liste d’articles de luxe dont l’importation est depuis prohibée. Suivirent les résolutions 2270 du 2 mars 2016 en réponse à l’essai nucléaire du 6 janvier 2016, 2321 du 30 novembre 2016, 2356 du 2 juin 2017, 2371 du 5 août 2017 et 2375 du 11 septembre 2017. Ce dernier texte poursuit résolument le renforcement du régime de sanctions : les exportations de textile en provenance du pays sont interdites, tout comme ses importations de gaz, alors que ses importations de produits pétroliers raffinés sont limitées. La résolution 2375 interdit aussi l’accueil de nouveaux travailleurs nord-coréens expatriés, les co-entreprises, et renforce les dispositions relatives aux inspections des navires en haute mer, un levier utilisé de manière collective depuis le lancement de l’Initiative de sécurité contre la prolifération (dit psi, selon son acronyme en anglais) par les États-Unis en 2003 [4].
22L’essai balistique de la rpdc réalisé mardi 28 novembre 2017 depuis Sain-ni, dans le Pyongan du Sud, au centre-ouest du pays, relança le débat récurrent sur l’efficacité des sanctions multilatérales. Il est un fait que onze années de sanctions multilatérales contre la rpdc ont vu les programmes nucléaire et balistique du pays progresser avec une constance et une régularité telles que personne ne peut raisonnablement affirmer aujourd’hui que la politique de sanctions a produit un effet significatif sur la nucléarisation du régime [5].
23Il n’y a pas de hasard en la matière : plus de 80 % du commerce nord-coréen est réalisé avec le voisin chinois. Si la Corée du Nord n’a pu être étranglée par le régime multilatéral de sanctions en vigueur, c’est que sa pratique de contournement et d’évasion est éprouvée et que l’essentiel du commerce avec la Chine perdure ainsi qu’avec d’autres pays de la région et nombre de pays africains. Le dernier rapport de mise en œuvre publié le 5 mars 2018 par le panel d’experts du comité des Nations unies le confirme sans nommer les partenaires commerciaux de Pyongyang [6].
Perspectives
24La tournure que prit l’avancée du programme nucléaire au cours de l’été 2017 fit craindre une confrontation militaire entre Pyongyang et Washington. Au contraire, suivant un schéma alors déjà classique, le leader nord-coréen profita de l’ordre du jour régional de l’hiver pour lancer une offensive diplomatique qui prit d’abord la forme d’une participation aux Jeux olympiques d’hiver de 2018, puis d’une reprise du dialogue intercoréen, enfin de l’organisation d’un sommet bilatéral au plus haut niveau avec les États-Unis. Il s’agit bien en miroir d’une exacerbation de la phase diplomatique après une exacerbation de la séquence de crise, selon une temporalité qui ne doit là encore rien au hasard.
Retour sur la première moitié de l’année 2018
25Si l’on postule, avec la très grande majorité des commentateurs du sommet de Singapour, que ce dernier fut un événement historique dont il s’agit de se féliciter en observant la suite avec prudence, il n’est pas inutile de reprendre l’enchaînement des actions et réactions qui y conduisirent.
26Pour mémoire, la fin de l’année 2017 fut très retenue de la part de la Corée du Nord en comparaison des événements de l’été précédent.
27La proposition nord-coréenne d’une rencontre bilatérale au plus haut niveau avec les États-Unis dans le courant de l’année 2018 fut présentée à Washington par la République de Corée dans la foulée de la diplomatie olympique de Pyongyang au cours des Jeux olympiques d’hiver. Vue depuis les États-Unis, la volonté de l’administration Trump de reprendre un dialogue structuré avec Pyongyang avait fluctué au cours de l’année passée.
28Dans un tweet du 30 août 2017, le président américain se plaignait de ce que les États-Unis parlent avec la Corée du Nord depuis vingt-cinq ans sans résultat. « Parler n’est pas la réponse ! » clamait-il alors. Dans un autre tweet, le 1er octobre 2017, Donald Trump estimait que la volonté de son secrétaire d’État de l’époque, Rex Tillerson, de négocier avec le leader nord-coréen était une « perte de temps ». Au mois de novembre 2017, le même président Trump déclarait pourtant depuis Séoul : « Je crois vraiment qu’il est raisonnable pour la Corée du Nord de revenir à la table [des négociations] et de conclure un accord qui soit bon pour la Corée du Nord et pour le monde [7]. » En outre, l’approche américaine dite de pression maximale sensément adoptée par l’administration en place s’était vu fixer dès le printemps 2017 l’objectif de reprendre le dialogue avec Pyongyang [8]. On se souvient par ailleurs que le candidat Trump n’avait pas écarté l’idée d’une rencontre directe avec le leader nord-coréen, même si l’hypothèse avait des airs de provocation.
29Du côté des alliés régionaux des États-Unis, le tableau fut contrasté. En République de Corée, le président Moon Jae-in a revendiqué depuis son arrivée au pouvoir la volonté de reprendre le dialogue avec le Nord, en l’ajoutant « au menu actuel de sanctions et de pression », formulant ainsi une double approche classique d’incitation et de coercition [9]. À la suite du sommet intercoréen de Panmunjeom, le 27 avril 2018, le président Moon annonça qu’il s’impliquerait dans le succès de la rencontre avec les États-Unis alors que le comité préparatoire du sommet intercoréen dirigé par le secrétaire général du bureau présidentiel, Im Jong-seok [10], devait être transformé en comité spécial pour l’application de la déclaration de Panmunjeom [11]. Au Japon, la volonté de dialogue fut peu partagée durant l’année 2017, le Premier ministre Abe Shinzō nourrissant a contrario le scepticisme du président américain dans la foulée des essais nucléaires et balistiques de l’été [12].
Pourquoi le sommet de Singapour fut un échec
30Attendu comme l’événement inédit qu’il serait quoi qu’il advienne – aucun président américain n’ayant jamais accepté de rencontrer en tête-à-tête un dirigeant nord-coréen –, le sommet de Singapour fut un échec à trois titres :
- d’abord, il satisfit une demande nord-coréenne insistante. Pour Kim Jong-un, ce tête-à-tête avec un président américain fut un succès politique en tant que tel.
- Ensuite, la rencontre de Singapour se traduisit par un accord vide de substance sur le plan nucléaire, les deux États s’engageant simplement à « travailler à la dénucléarisation complète de la péninsule coréenne ». Ce syntagme indique une obligation de moyen et non de résultat s’agissant d’une notion – la dénucléarisation – qui n’est définie nulle part et dont le champ d’application est totalement ouvert. Il n’y a donc aucune raison de penser que la Corée du Nord tiendra une promesse qu’elle n’a, au sens propre, pas faite. Pour mémoire, le premier engagement du régime à la dénucléarisation date de janvier 1992 [13], engagement qu’il avoua, en 2002, avoir violé en conduisant un programme clandestin d’enrichissement de l’uranium.
- Enfin, dans ces conditions, le sommet de Singapour a en réalité ouvert la voie à une reconnaissance de fait du statut nucléaire de la Corée du Nord en rompant l’isolement du pays pour un temps indéterminé. Si ce sommet fut historique, il le fut malheureusement peut-être à la manière des accords de Munich de septembre 1938.
31Afin de donner corps à l’engagement du président américain à Singapour consistant à fournir au leader nord-coréen des garanties de sécurité en échange d’un processus de dénucléarisation indéfini, le Pentagone annonçait le 17 juin 2018 qu’un important exercice militaire bilatéral avec la République de Corée devant se tenir au cours de l’été serait annulé [14]. La semaine précédente, le secrétaire d’État, Mike Pompeo, affirmait, lors d’une conférence de presse donnée à Pékin en compagnie de son homologue chinois Wang Yi, que les États-Unis comme la Chine « reconnaissaient que le régime de sanctions en place à ce jour le resterait jusqu’à ce que la dénucléarisation fût accomplie [15] ». Mais un tel engagement n’a aucune chance d’être respecté par la Chine comme par la Russie ou par d’autres pays de la région en l’absence d’une définition de ce qu’est la dénucléarisation de la péninsule. Or de définition il n’y a toujours pas à ce jour, et l’on voit mal que la notion fût précisée au point qu’elle puisse être dite accomplie par les États-Unis. Au contraire, enclencher un processus en ce sens pour le régime nord-coréen permettra aux alliés et partenaires du pays, Russie et Chine en tête, sinon de mettre un terme à la mise en œuvre des sanctions, en tout cas d’en alléger le fardeau. Du reste, la République de Corée elle-même a déjà fait savoir que, pour ce qui la concerne, les sanctions resteraient en place tant que le voisin du Nord n’aurait pas fait de progrès significatif dans le sens de la dénucléarisation. Il s’agit bien d’une définition de l’obligation a minima, et de toute façon très différente de l’interprétation donnée par le secrétaire d’État américain [16].
Trois scénarios pour l’avenir
32La mise en œuvre de l’accord de Singapour va ouvrir une nouvelle séquence de négociation d’abord bilatérale, puis possiblement trilatérale (avec la République de Corée). Sans présumer de l’aboutissement de cette séquence, trois scénarios sont envisageables qui sont diversement probables : la mise en œuvre d’une dénucléarisation assortie d’un calendrier qui permette un aboutissement dans les quinze années à venir ; un blocage suivi d’une résurgence de la crise avec un risque militaire élevé ; la suspension du programme nucléaire nord-coréen et l’entrée dans une phase de reconnaissance de fait du pays comme État nucléaire assorties de mesures d’encadrement.
33Le premier scénario est le moins probable. Quelle que soit la volonté du leader nord-coréen d’alléger les sanctions contre l’économie du pays, cette volonté ne peut aller jusqu’à l’abandon d’un arsenal constitué au prix d’un effort sur trois générations au terme duquel l’État nord-coréen est désormais constitutionnellement un État nucléaire. Sauf à transformer son régime en une démocratie libérale, l’option de la dénucléarisation complète, vérifiable et irréversible n’est pas réaliste. Par ailleurs, la sortie des États-Unis de l’accord nucléaire conclu avec l’Iran en juillet 2015 [17], au motif de son insuffisance sur le plan du champ d’application de l’accord (programme balistique non traité) comme sur celui de sa vérification (menées iraniennes clandestines), empêche désormais Washington, en toute logique [18], d’accepter à court terme un accord avec Pyongyang dont la substance et la portée ne seraient pas plus contraignantes. Or un tel accord sera inacceptable pour la partie nord-coréenne.
34Le deuxième scénario est possible bien que peu probable. Le président américain comme le leader nord-coréen ont besoin de conforter le succès diplomatique et politique du sommet de Singapour à court et moyen termes : une solution militaire n’étant pas envisageable, le président Trump peut difficilement reconnaître son échec en mettant un terme prématuré au processus de négociation qui vient d’être relancé.
35Le troisième scénario est le plus probable. Les programmes nucléaire et balistique nord-coréens seront sans doute suspendus, un mécanisme de vérification sera très probablement mis en place, « le travail vers la dénucléarisation » sera mis en œuvre selon un ou plusieurs formats. En attendant, des mesures d’encadrement seront sans doute décidées qui permettront de rétablir une dose de confiance et de sécurité sur la péninsule. Le périmètre de la suspension et de l’encadrement des forces nucléaires nord-coréennes donnera certainement lieu à des controverses qui ne seront pas indépassables dans les années à venir. Ce scénario équivaut en réalité à la reconnaissance de fait de la Corée du Nord comme État nucléaire dans l’objectif reporté d’un désarmement quand les conditions régionales de sécurité l’autoriseront.
Quelques enseignements en guise de conclusion
36En attendant que les scénarios ici proposés se précisent, il est d’ores et déjà nécessaire de tirer quelques enseignements de l’affaire nucléaire nord-coréenne après le sommet de Singapour : y a-t-il une solution alternative crédible à la double approche diplomatique menée depuis 2006 ? Quel serait le prix à payer d’une Corée du Nord reconnue comme État nucléaire de fait ? Comment les positions des grandes puissances en Asie-Pacifique ont-elles été affectées ou risquent-elles de l’être ?
Les alternatives à la double approche
37On sait qu’en temps de crise les puissances manquent rarement de rappeler que « toutes les options sont sur la table ». Cette expression, qui vaut menace en semblant rappeler innocemment la spécificité du métier de planificateur militaire, est régulièrement employée par les États-Unis au fil des provocations et événements divers. Mais l’option militaire, qui conduirait à un désastre sur le théâtre coréen, n’est pas la seule solution alternative à la double approche diplomatique envers Pyongyang. La poursuite de l’isolement du pays dans la lignée de la « patience stratégique » initiée par l’administration Obama après l’échec du Leap Day Agreement de 2012 reste une option théorique, même si elle a désormais peu de chance d’être ravivée. C’est dommage : bien que modeste, cette approche était prudente et à même d’accroître avec le temps l’isolement du pays, ce qui aurait pu conduire ce dernier à chercher à négocier en position de faiblesse relative réelle.
Accepter la Corée du Nord comme État nucléaire
38Se résoudre à reconnaître la Corée du Nord comme État nucléaire de fait est à la fois possible et risqué. Possible parce que le sommet de Singapour a ouvert cette voie, parce que la sortie du pays du tnp date désormais de plus de quinze ans et que la communauté des États parties au tnp a eu le temps de s’y accoutumer, parce qu’il est probable que la communauté internationale n’a plus d’autre choix raisonnable pour le moment. Risqué parce que ce serait une nouvelle brèche ouverte dans l’autorité de la norme mondiale de non-prolifération nucléaire, parce que cette exception temporaire relancerait le débat nucléaire chez les voisins du pays, parce que cette reconnaissance de fait pourrait se traduire par une reconnaissance définitive, elle-même source de nouveaux risques et dangers pour l’équilibre régional et mondial.
Une « bataille » dans la nouvelle « guerre » du Pacifique
39Crise de prolifération au tournant du xxe siècle, l’affaire nucléaire nord-coréenne est devenue une crise stratégique, ce qui implique des mouvements dans la répartition de la puissance en Asie-Pacifique. Du reste, tout observateur attentif du sujet comprend que Pyongyang est un enjeu de puissance dans un triangle stratégique peu stable entre les États-Unis, la Chine et, dans une moindre mesure à ce jour, la Russie.
40L’affirmation probablement en cours de la Corée du Nord comme État possesseur de l’arme nucléaire, qu’elle soit reconnue comme telle de facto ou de jure, installerait durablement le pays en tant que pièce du dispositif asiatique émergent contre l’exercice de la « primauté » stratégique américaine (American primacy) dans la région.
41En cela, Donald Trump, avec le sommet de Singapour, a peut-être fait perdre aux États-Unis cette nouvelle bataille de Corée dans cette non moins nouvelle guerre du Pacifique qui se joue entre la volonté de puissance chinoise et la volonté de conservation de la primauté américaine prônée par la « stratégie de rééquilibrage » [19] des intérêts américains en Asie. À suivre.
Notes
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[1]
Face au « péril noir » interne et au « péril rouge » externe.
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[2]
Pour mémoire, la puissance explosive de la bombe larguée au-dessus de la ville de Hiroshima le 6 août 1945 était d’environ 15 kt tnt et celle de la bombe larguée au-dessus de Nagasaki le 9 août d’environ 20 kt tnt.
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[3]
« double track » selon certaines locutions diplomatiques.
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[4]
Initiative de contre-prolifération initiée par les États-Unis (John Bolton à l’époque du premier mandat de George W. Bush) pour constituer un mécanisme souple de partage d’informations entre pays participants et d’interdiction de cargaisons jugées suspectes, en particulier en haute mer, grâce à des accords d’arraisonnement.
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[5]
La question de l’efficacité des sanctions multilatérales contre les États dits proliférants est débattue. Il s’agit également de se demander si les sanctions sont contre-productives quand leur renforcement s’accompagne d’une accélération des programmes nucléaires dans les pays visés. Le cas sud-africain au cours des années 1980 illustre plutôt l’idée de contre-productivité ; le cas iranien au cours des années 2000, l’idée d’efficacité.
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[6]
Alors, la mise en œuvre du régime de sanctions fut jugée « alarmante » par le panel – Final Report of the Panel of Experts Submitted Pursuant to Resolution 2345 (2017), 5 mars 2018, S / 2018 / 171 ; le nouveau rapport du panel d’experts n’était pas encore publié au 12 septembre 2018.
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[7]
« Remarks by President Trump and President Moon of the Republic of Korea in Joint Press Conference », WhiteHouse.org, 7 novembre 2017.
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[8]
Les termes employés alors étaient « to de-escalate and return to the path of dialogue » (« Joint Statement by Secretary of State Rex Tillerson, Secretary of Defense James Mattis, Director of National Intelligence Dan Coats », State.gov, 26 avril 2017).
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[9]
« South Korea’s New President : ‘Trump and I Have a Common Goal’ », Washington Post, 20 juin 2017.
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[10]
À ce poste depuis mai 2017, Im Jong-seok, 51 ans, est un fervent soutien du processus d’engagement et de négociation avec la rpdc.
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[11]
Cf. « Moon exhorte le Parlement à ratifier la déclaration de Panmunjom », French. YonhapNews.co.kr, 30 avril 2018.
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[12]
« Shinzō Abe : Solidarity Against the North Korean Threat », New York Times, 17 septembre 2017.
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[13]
La déclaration conjointe des deux Corées sur la dénucléarisation de la péninsule coréenne, signée le 20 janvier 1992 et entrée en vigueur le 19 février suivant, était sensiblement plus détaillée que le document de Singapour du 12 juin 2018 : le champ d’application fut précisé ; un mécanisme de vérification de l’accord fut prévu et détaillé.
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[14]
Exercice dénommé « Freedom Guardian ». Cf. par exemple « U.S., South Korea Cancel Major War Game Planned for August », Wall Street Journal, 19 juin 2018.
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[15]
« North Korea’s Kim Makes Another Trip to China. That Complicates Things for Trump », Washington Post, 19 juin 2018.
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[16]
La ministre des Affaires étrangères sud-coréenne, Kang Kyung-wha, déclarait à des journalistes, le 18 juin 2018 : « Notre position est que les sanctions doivent rester en place jusqu’à ce que la Corée du Nord prenne des mesures significatives et substantielles en faveur de la dénucléarisation » (« Seoul Says North Korea Sanctions May Be Eased Before Full Denuclearisation », France24.com, 18 juin 2018).
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[17]
Joint Comprehensive Plan of Action, 14 juillet 2015, conclu entre l’Iran et les « E3 + 3 » (Allemagne, France, Royaume-Uni, avec les États-Unis, la Chine et la Russie) pour garantir l’usage exclusivement civil du programme nucléaire iranien.
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[18]
La question de la logique et de la cohérence des positions de l’administration Trump se pose néanmoins, et l’on ne peut désormais exclure que le traitement de la crise nord-coréenne contredise celui des programmes nucléaire et balistique iraniens.
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[19]
La stratégie dite de rééquilibrage (rebalance strategy) vers l’Asie-Pacifique prise par l’administration Obama et annoncée en 2011 à diverses reprises visait à démontrer aux alliés régionaux que les États-Unis s’engageaient à travailler au maintien de la sécurité et de la prospérité de la zone. La notion de rééquilibrage a généralement une forte connotation économique et commerciale. Sur le plan stratégique, l’objectif est de maintenir l’équilibre régional des rapports de force. Bien qu’ayant été formellement dénoncé par le président Trump, soucieux par principe de déconstruire patiemment l’œuvre de son prédécesseur, le rééquilibrage reste une ambition stratégique américaine face à l’affirmation des ambitions chinoises dans l’ensemble de la zone. Cf. par exemple Valérie Niquet, Isabelle Facon, Benjamin Hautecouverture, Sophie Boisseau du Rocher, Gilles Boquérat et Patrick Hébrard, Évolution des équilibres en zone Asie-Pacifique : quelles conséquences pour nos intérêts, quelles réponses et quels partenaires privilégier ?, FRStrategie.org, 9 octobre 2017.