Introduction
1Le système de santé des États-Unis est critiqué, notamment depuis le film SICKO du réalisateur américain Michael Moore, sorti en 2007. Pourtant, un système fondé sur le marché et la concurrence peut sembler idéal du point de vue de l’efficacité économique. Or, il rencontre d’importantes difficultés financières : les dépenses de santé s’élevaient à 15,3 % du produit intérieur brut (PIB), contre 11,1 % en France en 2005 [1], ce qui les positionne au niveau le plus élevé du monde et fait du financement de la santé un problème majeur. Ses résultats en termes d’équité et d’accès aux soins sont mauvais. En effet, l’absence de couverture santé universelle, dans un contexte économique difficile, aboutit à un nombre important de citoyens non assurés (15,3 % de la population en 2007 [2]). Il est évident qu’aucun système de santé ne peut se targuer d’appliquer la formule parfaite, tant en termes d’égalité de l’accès à des soins de qualité que d’efficacité économique. Mais mettre en évidence les faiblesses du système de santé américain, tout comme ses bonnes pratiques, notamment en termes de prévention, permet de réfléchir aux alternatives qui se présentent à lui et aux autres systèmes de santé, notamment français.
2Quelles sont donc les faiblesses de ce système, et quelles alternatives voit-on apparaître ? Pour répondre à cette question, il est nécessaire en premier lieu d’en étudier le fonctionnement, de la couverture à l’organisation des soins. Ensuite, il faudra en décrire les évolutions récentes, notamment avec l’élection de Barack Obama à la présidence du pays, qui promet une importante réforme du système de santé.
Un système de santé pluraliste et décentralisé
1 – La couverture santé
3Le système américain, libéral et fondé sur le marché, s’organise autour d’assurances privées souvent liées à l’emploi et d’une assurance maladie obligatoire, liée notamment à la vieillesse et aux faibles revenus. Cependant, ce système, qui n’est pas universel, échoue à couvrir l’intégralité de la population, dont une partie se retrouve sans assurance santé.
a – L’Assurance maladie privée
4Le système de santé des États-Unis, à l’inverse du système de santé français, s’organise en majeure partie autour d’assurances privées, facultatives et proposées par la plupart des employeurs à leurs salariés. Deux Américains sur trois sont couverts par une assurance privée liée à l’emploi [3], soit 177,4 millions d’Américains en 2007 [2]. Les prestations offertes peuvent varier d’une entreprise à l’autre, de telle sorte que les grandes entreprises proposent généralement une meilleure couverture.
5L’absence d’obligation d’affiliation à une assurance maladie témoigne de la volonté de préserver à tout prix la liberté de choix des citoyens, principe ancré dans l’histoire de ce pays de tradition libérale. L’État fédéral a toutefois institué une assurance santé limitée aux personnes âgées ou indigentes.
b – L’Assurance maladie publique
6Le système de santé des États-Unis prévoit une couverture de base, couvrant les gros risques pour les personnes âgées et les plus démunis. Ainsi, deux systèmes d’Assurance maladie obligatoire financés par l’impôt et les cotisations coexistent : Medicare pour les personnes de plus de 65 ans ou handicapées et Medicaid pour les familles aux faibles ressources. Au total, cela concerne 27 % de la population [3] soit 83 millions d’Américains selon le Bureau des statistiques des États-Unis [2].
7Medicare prend en charge une assurance hospitalisation obligatoire, financée par les cotisations des salariés et des employeurs, et une assurance médicale complémentaire facultative et payante, financée par l’État et les cotisations des affiliés.
8Medicaid, financée par les États et l’État fédéral, prend en charge certaines catégories de populations défavorisées, dont les critères d’éligibilité sont définis par des Federal Mandates [3].
c – La population non couverte par l’Assurance maladie
9Malgré les assurances santé privées liées à l’emploi et l’assurance maladie obligatoire garantie par l’État, une part de plus en plus importante de la population ne dispose d’aucune couverture médicale : 45 millions de personnes en 2009 et 54 millions en 2019 selon les prévisions [4]. La raison de cette augmentation est principalement la hausse des primes d’assurances, qui n’est pas suivie pour autant par une hausse suffisante des salaires. Ainsi, les non assurés sont pour la plupart des employés à bas salaire, auxquels les employeurs ne proposent pas d’assurance et qui ne sont pas non plus admissibles à l’assurance maladie publique. Par ailleurs, il peut être intéressant de noter qu’un quart de la population aurait droit à une assurance sans le savoir [5].
10On voit donc bien ici la faiblesse d’un système fonctionnant sur la base d’assurances privées liées à l’emploi, non obligatoires pour l’employeur : les cotisations ne sont pas, comme en France par exemple, proportionnelles aux salaires. La hausse des primes d’assurance entraîne donc une augmentation du nombre de travailleurs non assurés et un désengagement des employeurs vis-à-vis de l’assurance santé.
2 – L’organisation des soins
11Les soins aux États-Unis sont organisés en majeure partie autour de réseaux intégrés. Ces compagnies privées, à la recherche de solutions pour faire face aux difficultés croissantes de financement, peuvent être vues comme des laboratoires en terme d’organisation des soins. On voit d’ailleurs que leurs expériences ne sont pas sans rappeler certaines pratiques françaises, comme le filtrage de l’accès aux soins spécialisés par le médecin traitant ou encore le conventionnement et les missions de prévention des professionnels de santé.
a – Les managed care organizations
12Les managed care organizations (MCO), modèle dominant aux États-Unis, sont des réseaux de soins coordonnés mis en place pour répondre aux préoccupations des employeurs face au coût de l’Assurance maladie et qui cumulent des fonctions d’assurance et de soins. Ils sont basés sur un partenariat entre financeurs et fournisseurs de soins [6], qui permet d’allouer les ressources de façon optimale. Les professionnels de santé concernés offrent ainsi des tarifs préférentiels en échange d’une fidélisation des clients. Les assurés membres de ces réseaux sont encouragés à consulter parmi ces professionnels conventionnés et l’accès aux soins spécialisés est souvent filtré par le médecin de famille, pour des raisons de maîtrise des dépenses.
13Il existe plusieurs modèles de MCO : les health maintenance organizations (HMO), les preferred providers organizations (PPO) ou encore les points-of-service plans (POS), qui contrôlent plus ou moins l’accès aux soins. De nouveaux modèles de HMO sont récemment apparus, comme les independant practice associations (IPA), qui passent contrat avec des groupes de praticiens tenant leur propre cabinet, rémunérés à l’acte ou par forfait per capita.
14Plus le choix du praticien est souple au sein des MCO (comme dans les PPO), plus ils sont coûteux pour l’assuré [7]. Certaines pratiques de ces organismes sont à souligner : le rassemblement dans un même lieu de professionnels pluridisciplinaires, l’importance particulière donnée aux soins préventifs ou encore l’intégration de réseaux spécialisés dans des maladies spécifiques. On voit donc bien qu’aux États-Unis, la coordination des soins et la prévention sont vues comme des solutions pour améliorer l’efficacité et la qualité du système de soins.
15Cependant, les PPO ont, aujourd’hui, pris l’avantage en raison de leur souplesse et de la plus grande liberté laissée au patient. En effet, les MCO, à l’origine d’une certaine insatisfaction des assurés et des professionnels de santé, notamment en raison de leur objectif affiché de réduction des dépenses, laissaient naître des doutes quant à la qualité des soins.
b – Le managed care : un rôle préventif important
16Le managed care obtient de bons résultats pour ses initiatives en matière de prévention et d’éducation pour la santé. En effet, il a développé le disease management, programme destiné aux patients souffrant de maladies graves et coûteuses et qui leur offre un suivi et un accompagnement personnalisé. L’objectif de ce système est d’apporter aux patients les réflexes préventifs qui leur permettront d’être autonomes dans la prise en charge de leur maladie. Pour cela, ceux-ci bénéficient d’un accompagnement les aidant à adopter un comportement adapté à leur maladie, tant dans l’observance des traitements [8] que dans le mode de vie. Le suivi est principalement réalisé par des infirmières et des professionnels de santé, par téléphone, en privilégiant le dialogue et la relation d’empathie avec le patient. Le disease management n’a pas encore fait l’objet de véritable évaluation dans la durée mais il est globalement considéré comme efficace, tant en termes sanitaires qu’économiques.
c – Les professionnels et les établissements de santé
17Les médecins aux États-Unis sont soumis à un contrôle de la part des financeurs de l’assurance maladie, auprès desquels ils doivent justifier les ordonnances qu’ils prescrivent à leurs patients. Ils ont également plus de frais que leurs équivalents français : ils doivent rembourser les emprunts contractés pour leurs études et ont également en charge de lourds frais de gestion. Ces raisons peuvent conduire les médecins à multiplier et à écourter les consultations afin de revaloriser leur rémunération, ce qui soulève des interrogations quant à la qualité des soins. De plus, le développement de la judiciarisation génère des tensions importantes dans les relations patients-médecins.
18Concernant les établissements de santé, les hôpitaux publics sont tenus d’assurer les urgences pour tous mais les services d’urgences ne sont que dans les grandes villes et ils sont saturés. De plus, ils rencontrent de graves difficultés financières, dues au nombre croissant de patients non assurés.
3 – Le financement
19Le financement constitue un des principaux problèmes rencontrés par le système de santé américain, l’absence de régulation de l’offre et de la demande de soins engendrant des dépenses de santé record auxquelles il faut faire face.
a – Les dépenses
20Les dépenses de santé représentent aux États-Unis 15,3 % du PIB (2005), ce qui les positionne au niveau le plus élevé du monde. Le vieillissement de la population, l’accroissement des maladies chroniques et les importants coûts administratifs alimentent l’augmentation continue des dépenses, tout comme l’investissement important dans l’innovation [9], enjeu de compétitivité sur la scène internationale. Mais s’il permet des économies dans certains domaines, l’investissement dans l’innovation reste une cause de surcoût important.
b – Les financeurs
21La majorité des financeurs de l’assurance maladie fait partie du secteur privé. Toutefois, la différence entre la part des dépenses publiques et celle des dépenses privées est faible. Ainsi 45,8 % des dépenses sont publiques, contre 54,2 % privées. Le financement public est assuré par les contributions de l’État fédéral (Medicare, Medicaid, anciens combattants et militaires), celles des États (Medicaid, hôpitaux psychiatriques) et celles des pouvoirs publics locaux (hôpitaux publics municipaux).
c – Le désengagement du secteur privé
22Face aux difficultés causées par la hausse des dépenses de santé, les entreprises ont augmenté leurs primes ou se sont progressivement désengagées de l’assurance santé. Ainsi, le nombre de salariés couverts au sein des entreprises est en baisse. Il est passé de 65 à 59 % entre 2001 et 2006 [9]. General Motors, numéro un de la distribution dans son secteur, et d’autres grands groupes, avaient manifesté leur mécontentement face à l’augmentation des dépenses de santé, et averti le gouvernement qu’ils n’avaient pas l’intention de « porter l’intégralité [de ce] fardeau » [9]. Cet avertissement a incité ce dernier à prendre des mesures fiscales, faisant porter la charge de l’augmentation des dépenses par l’État et les ménages. Mais les entreprises ont, malgré cette mesure, été conduites à augmenter leurs primes, à réduire le nombre de salariés éligibles à l’assurance santé ou à diminuer les garanties proposées, conduisant à une dégradation du système d’assurance maladie privé.
23On voit donc bien que la place importante laissée au secteur privé ne permet pas de surmonter les difficultés financières, humaines et sanitaires du système de santé, qui sont de plus amplifiées par les difficultés économiques actuelles. Une réforme en profondeur s’impose donc plus que jamais.
Les premiers pas vers la réforme du système de santé américain
24Le fédéralisme favorisant des initiatives originales de la part des États et les évolutions politiques récentes sont susceptibles de bouleverser le fonctionnement de l’assurance santé aux États-Unis.
1 – Initiatives et problèmes des États
a – Des initiatives positives de certains États
25Il semblerait que les initiatives pour tenter de remédier aux problèmes du système de santé américain partent des États. Une quinzaine d’entre eux a entamé des actions pour élargir l’accès à l’assurance maladie, dont le Vermont, le Maine et le Massachusetts, qui sont les seuls à être favorables à la mise en place d’une couverture universelle. Le Massachusetts a ainsi adopté un plan de protection santé universelle, le premier du pays, qui oblige les individus à souscrire à une assurance et les entreprises à en proposer une à partir du 1er juillet 2007 [10]. Une série de mesures coercitives et incitatives vient appuyer cette réforme. Même s’il s’agit d’un petit État, il pourrait servir de modèle. Les États du Wisconsin, de l’Illinois, du Colorado, du Nouveau-Mexique, de l’Oregon et de Washington pourraient également amorcer un changement. Ce dernier État, par exemple, a déjà annoncé son intention d’étendre la couverture santé à un certain nombre de non assurés. Le Nouveau-Mexique ou l’Arkansas incitent les petites entreprises à assurer leurs salariés. L’Illinois, le Tennessee et la Pennsylvanie ont mis en place une assurance pour tous les enfants. Ce sont souvent des fonds fédéraux qui sont destinés à financer ces réformes, mais aussi parfois les revenus provenant des taxes sur le tabac.
b – Des limites à la réforme : les cas du Massachusetts, de la Californie et du Texas
26Les initiatives des États ne suffisent pourtant pas à régler tous les problèmes, même à leur échelle. Bien que témoin d’un réel progrès, la réforme initiée dans le Massachusetts a encore du chemin à parcourir. Elle est, certes, parvenue à étendre la couverture santé de manière significative, mais les problèmes de coûts restent bien présents et l’accès aux soins primaires est encore difficile, même pour les personnes bénéficiant d’une assurance santé [11].
27En Californie, le gouverneur républicain, Arnold Schwarzenegger, avait lancé en janvier 2007 un plan d’Assurance maladie pour tous, devant concerner 6,5 millions de personnes. Mais le texte n’a pas été approuvé par le Sénat [12], ce qui montre bien les difficultés du système à évoluer vers plus d’équité.
28Le Texas, quant à lui, reste un État symptomatique des problèmes du système de santé américain. Malgré quelques efforts en 2007 avec une nouvelle loi étendant la couverture obligatoire à 127 000 nouveaux enfants [10], les petites entreprises texanes renoncent de plus en plus à offrir à leurs employés une couverture maladie, et les subventions nationales et locales se montrent insuffisantes. De plus, les assureurs ont tendance à baisser leurs taux de remboursement.
29Ainsi, les États se montrent conscients des problèmes du système de santé et sont sensibles aux inégalités d’accès aux soins. Cependant, une réforme efficace du système de santé demande une forte volonté politique mais aussi des moyens importants, que les budgets des États ne peuvent supporter. Malgré tout, ils jouent le rôle de laboratoires en matière de politique de santé et pourraient impulser, à terme, une réforme plus ambitieuse, que seul le niveau fédéral est en mesure de mener avec succès.
2 – Une réforme nécessaire et voulue au niveau fédéral
30Si les initiatives des États montrent une volonté de changement plutôt consensuelle, la réforme est également voulue au niveau de l’État fédéral. En effet, elle s’est précisée à l’occasion des débats lors de l’élection présidentielle de 2008 et dans les intentions du nouveau Président de la République démocrate, Barack Obama.
a – Le débat à l’occasion des élections présidentielles
31La question du système de santé américain a été un enjeu décisif des élections de novembre 2008. Les différentes parties prenantes au débat, que ce soient les dirigeants, les employeurs, les employés, les médecins ou les groupes de consommateurs, s’accordent sur le fait que le système actuel souffre de graves problèmes humains et financiers. Mais ce sont bien deux visions différentes de la société qui se sont affrontées à l’occasion de l’élection : une vision libérale, qui considère que la dérégulation du marché de la santé dynamise l’économie de ce secteur et une vision sociale, qui prône la solidarité et l’accès de tous à la santé quelle que soit la condition sociale.
32Côté Républicain, le candidat John Mc Cain soutenait une vision libérale, dans laquelle la place de l’État est réduite au minimum. D’autre part, parmi les mesures qu’il proposait, on peut citer la rémunération des professionnels de santé en fonction de la performance et de la qualité des soins [13], une meilleure information du « consommateur » ou encore la promotion des nouvelles technologies dans le domaine de la santé. Le patient est ici vu comme un consommateur qui doit pouvoir choisir parmi les offres qui lui sont proposées.
33Les candidats Démocrates, Hillary Clinton et Barack Obama, défendaient l’idée d’un système de santé universel et solidaire basé à la fois sur une forte intervention de l’État régulateur et un secteur privé dynamique. L’axe central de leur programme était d’étendre la couverture maladie au plus grand nombre et d’améliorer la qualité des soins tout en développant une stratégie de maîtrise des coûts.
34Hillary Clinton souhaitait instaurer, à l’instar de la réforme du Massachusetts, une assurance maladie obligatoire pour tous avec un financement global de 110 milliards de dollars par an (soit environ le double de celui prévu par Barack Obama) [13]. Il est possible d’attribuer l’échec de ce programme, beaucoup plus ambitieux que celui d’Obama, au fait que la culture américaine n’est pas encore prête à investir autant pour la solidarité nationale et aussi à l’action des lobbies des assureurs privés.
35Barack Obama, quant à lui, souhaitait instaurer une assurance maladie obligatoire pour les enfants tout en obligeant les employeurs à participer, au minimum, au financement de l’assurance maladie de leurs salariés. En matière de maîtrise des dépenses, le développement de la prévention, des nouvelles technologies, de la coordination des soins dans le domaine des maladies chroniques ou encore le contrôle des dépenses de médicaments [13] devraient permettre, selon lui, de faire des économies. La qualité des soins pourrait être renforcée notamment par le biais du développement de la formation continue des professionnels de santé.
b – La réforme impulsée par le Président Barack Obama
36L’élection du Président Obama fait naître de nombreux espoirs en ce qui concerne l’amélioration du système de santé américain. Mais avant d’arriver à une couverture maladie universelle, pour des soins de qualité et à un coût abordable, certains compromis doivent avoir lieu, avec des acteurs au poids non négligeable : les puissants lobbies, qui « veulent s’assurer que les changements à venir leur profitent » [14], les Républicains, qui ne veulent pas aller jusqu’à une « nationalisation du système de santé » [15] et enfin les Américains eux-mêmes, qui ne sont pas forcément prêts à sacrifier leurs libertés individuelles sur l’autel de la solidarité nationale. Dans ce contexte, le nouveau président engage la réforme avec une forte volonté de dialogue avec la nation. Dès décembre 2008, il a lancé des consultations publiques [14]. Il a organisé, le 5 mars 2009, un Forum à la Maison Blanche [16] réunissant un large éventail de parties prenantes (citoyens américains, membres du Congrès, entreprises, universités, etc.) afin de débattre sur le sujet. Le 26 mars 2009, une « discussion en ligne » [17] publique s’est tenue depuis la Maison Blanche. Barack Obama cherche à sensibiliser les Américains, mais aussi les élus, sur les menaces certaines que les dépenses de santé font peser sur l’économie du pays. Cependant, il souhaite conserver le principe du système de santé actuel basé sur des assurances privées via l’employeur, tout en investissant « 900 milliards de dollars sur dix ans » [18] pour transformer le marché de l’assurance de manière à le rendre plus accessible en y introduisant notamment une assurance santé de caractère public, en concurrence avec les assurances privées. Le débat sur le contenu de cette réforme est actuellement en cours et il y aurait beaucoup à en dire. Mais là n’est pas l’objet du présent article, qui propose une description du système de santé américain dans son fonctionnement actuel.
Conclusion
37Les problèmes que connaît le système de santé des États-Unis sont importants et relativisent ceux que peuvent rencontrer d’autres pays, plus petits. Ils peuvent être attribués à la taille, à la démographie comme au fédéralisme, autant de paramètres rendant plus difficile l’instauration d’un système cohérent et efficace économiquement. Mais la solution choisie d’abandonner le secteur bien particulier de la santé au hasard du marché n’a-t-elle pas pour effet de stimuler la consommation de soins et de produits de santé? La hausse des dépenses de santé est la principale cause évoquée de déséquilibre et elle conduit les compagnies d’assurance à augmenter leurs primes, ce qui entraîne une augmentation du nombre de non assurés. De plus, dans le contexte économique actuel et avec la montée du chômage, continuer à investir dans un système d’assurances privées liées à l’emploi est un pari risqué, surtout si c’est l’État qui doit combler les déséquilibres auxquels s’expose le secteur privé. Ne faut-il donc pas préférer un système solidaire qui protège les assurés des caprices du marché tout en s’inspirant des expériences du secteur privé dans le domaine de la maîtrise des coûts ? Certaines pratiques, comme le disease management, par exemple, permettraient de trouver des solutions à la hausse des dépenses tout en améliorant la santé de la population et la qualité des soins. La Sécurité sociale française expérimente actuellement un programme de ce type, appelé SOPHIA [19], qui fait l’objet d’une évaluation.
38Mais il est clair qu’il existe autant de systèmes de santé que de cultures différentes à travers le monde et que la solution miracle n’existe pas. Il est, en revanche, nécessaire de s’inspirer des pratiques qui ont démontré leur efficacité pour avancer dans la recherche de solutions. D’où l’importance de développer les connaissances au niveau international dans le domaine de la politique de santé (tableau I).
Analyse comparée des systèmes de santé américain et français, selon les données de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et l’Organisation mondiale de la santé (OMS)
Analyse comparée des systèmes de santé américain et français, selon les données de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et l’Organisation mondiale de la santé (OMS)
Bibliographie
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Mots-clés éditeurs : États-Unis, managed care organizations, réforme domaine santé, health maintenance organizations, libéralisme, Medicare, Medicaid
Mise en ligne 01/12/2011
https://doi.org/10.3917/pos.404.0309