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Article de revue

Europe : des grandes villes à croissance inégale

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Notes

  • [1]
    Cf. par ailleurs « Atlas géodémographique commenté », Population & Avenir, n° 701bis, janvier-février 2011.
  • [2]
    La source des délimitations des agglomérations des villes et de leur nombre d’habitants est le World Urbanization Prospects: The 2011 Revision.
  • [3]
    Instaurée en 1967.
  • [4]
    Bien entendu, les effets négatifs des gouvernances grecques des dernières décennies ne préjugent pas du futur.
  • [5]
    Sur les phénomènes migratoires, cf. Dumont, Gérard-François, Verluise, Pierre, Géopolitique de l’Europe, Paris, Sedes, 2009.
  • [6]
    Moriniaux, Vincent (direction), Les mobilités, Paris, Sedes, 2010.
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1A priori, les grandes villes[1] européennes les plus peuplées, celles comptant aux environs de 2 millions d’habitants ou plus, sont considérées comme les gagnantes de la mondialisation. En effet, ce processus devrait favoriser les grandes villes plurimillionnaires en nombre d’habitants qui, compte tenu de leur poids démographique, offrent aux entreprises à la fois de larges marchés et des connexions nombreuses, par exemple en matière aérienne. Or, la réalité ne confirme nullement ce postulat. L’accroissement démographique des grandes villes européennes a été très inégal, conduisant à proposer une typologie des évolutions.

Bruxelles : le bâtiment de la représentation de la Bavière.

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Bruxelles : le bâtiment de la représentation de la Bavière.

2Les plus fortes croissances démographiques pour la période 1975-2010, supérieures à 34 %, s’observent dans les agglomérations [2] des villes marquées par un changement géopolitique majeur. Cinq villes, toutes capitales politiques de leur pays ou, dans le cas de Barcelone, d’une région majeure, la Catalogne, étaient en 1975 dans le contexte d’une économie nationale relativement fermée, voire autarcique, ou parfois de nature plutôt corporatiste, comme dans la péninsule Ibérique. La fin des régimes autoritaires en Espagne et au Portugal puis l’éclatement soviétique ont ouvert Madrid, Kiev, Moscou, Barcelone et Lisbonne aux marchés internationaux. En outre, deux de ces villes, Kiev et Moscou, ont vu la fin des passeports internes à leur pays, qui limitaient l’émigration rurale.

Des croissances portées par des changements géopolitiques...

3Bien qu’avec une croissance moitié moindre, trois villes s’inscrivent aussi dans un changement géopolitique. La croissance d’Athènes se rattache à cette logique d’une capitale d’un pays ayant mis fin à la dictature [3] du régime des colonels en 1974 et dont le pays a intégré l’Union européenne en 1981 [4]. La croissance de Bucarest est inséparable du changement géopolitique intervenu en Roumanie et de l’adhésion de ce pays à l’Union européenne, qui s’est concrétisée le 1er janvier 2007. De même, la croissance de Berlin aurait été moindre si cette ville était restée enclavée dans ce pays communiste qu’était la République démocratique allemande (ou Allemagne de l’Est) et n’était pas redevenue la capitale politique de l’Allemagne réunifiée le 3 octobre 1990.

L’accroissement démographique des grandes villes européennes 1975-2010

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L’accroissement démographique des grandes villes européennes 1975-2010

4Un troisième type regroupe les deux villes les plus peuplées de l’Union européenne, Paris (+22,5 %) et Londres (+14,4 %) : leur attractivité économique doit beaucoup à leur masse démographique et leur attractivité migratoire internationale à leur fonction d’ancienne capitale d’un vaste empire colonial. S’y ajoute Bruxelles (+18,3 %) dont le rôle politique s’est considérablement accru, à la fois en raison des traités développant les services européens et des élargissements de l’Union européenne [5]. En conséquence, Bruxelles a pu attirer des sièges sociaux ainsi que des bureaux d’entreprises ou de régions européennes, à l’exemple de la représentation de la Bavière, située entre le Parlement européen et l’immeuble du Comité économique et social européen.

5Un troisième type de croissance, assez faible, concerne deux grands ports n’ayant pas le statut de capitale nationale : Naples et Saint-Pétersbourg. En dépit de la faible fécondité dans ces villes, leurs fonctions commerciales ont maintenu une certaine attractivité engendrant une croissance positive.

6Rome est la seule grande ville d’un cinquième type, enregistrant entre 1975 et 2010 une quasi-stagnation. Rome est en effet restée une ville administrative et touristique, sans diversifier son économie. Sa faible fécondité aurait même pu engendrer une décroissance qui n’a été empêchée que par l’arrivée de migrants internationaux [6].

…aux grandes villes en décroissance

7Enfin, trois grandes villes européennes ont enregistré entre 1975 et 2010 une diminution de la population de leurs agglomérations. À Birmingham et Manchester, cette diminution s’explique essentiellement par leur caractère de villes anciennement industrielles confrontées à des difficultés de reconversion. Pour Milan, il faut prendre en compte l’effet d’une très faible fécondité engendrant un faible nombre de naissances, d’où une baisse de la population malgré l’apport de l’immigration internationale.

8Cette typologie de l’évolution démographique des dix-sept grandes villes européennes, au cours d’un tiers de siècle, confirme la nécessité d’examiner finement l’urbanisation, dont l’intensité comme les modalités peuvent êtres fort différenciées.


Date de mise en ligne : 17/01/2013

https://doi.org/10.3917/popav.710.0003

Notes

  • [1]
    Cf. par ailleurs « Atlas géodémographique commenté », Population & Avenir, n° 701bis, janvier-février 2011.
  • [2]
    La source des délimitations des agglomérations des villes et de leur nombre d’habitants est le World Urbanization Prospects: The 2011 Revision.
  • [3]
    Instaurée en 1967.
  • [4]
    Bien entendu, les effets négatifs des gouvernances grecques des dernières décennies ne préjugent pas du futur.
  • [5]
    Sur les phénomènes migratoires, cf. Dumont, Gérard-François, Verluise, Pierre, Géopolitique de l’Europe, Paris, Sedes, 2009.
  • [6]
    Moriniaux, Vincent (direction), Les mobilités, Paris, Sedes, 2010.

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