Notes
-
[1]
Interrogée par Sérgio Chichava. Voir S. Chichava, Le « Vieux Mozambique ». Étude sur l’identité politique de la Zambézie, thèse de doctorat de science politique, Bordeaux, Université de Bordeaux IV/Institut d’études politiques de Bordeaux, 2007, p. 487.
-
[2]
Le texte publié ici est une version fortement réduite (merci à Luís de Brito !) et largement actualisée de l’original disponible sur <http://www.fasopo.org>. Il est le fruit de trois missions réalisées au Mozambique en 2006, 2007 et 2009, avec le soutien de l’Institut français d’Afrique du Sud, de l’Ambassade de France au Mozambique et dans le cadre d’une mission d’observation électorale.
-
[3]
Il n’est pas possible de détailler ici l’historiographie de ce débat. L’auteur a fait partie de ceux qui ont analysé le conflit comme étant devenu, au moins à partir du milieu des années 1980 (et sans doute avant), une guerre civile. Sur ce débat (et pour d’autres références bibliographiques), se reporter par exemple à deux articles publiés récemment par Politique africaine : M. Cahen, « À la recherche de la défaite. Notes sur une certaine historiographie de la “révolution” et de la “contrerévolution” au Mozambique et sans doute ailleurs », Politique africaine, n° 112, décembre 2008, p. 161-181 ; A. Dinerman, « Regarding Totalities and Escape Hatches in Mozambican Politics and Mozambican Studies », Politique africaine, n° 113, mars 2009, p. 187-210.
-
[4]
Sur les élections de 1994, voir B. Mazula (dir.), Moçambique : eleições, democracia e desenvolvimento, Maputo, Embaixada do Reino dos Paises Baixos, 1995 ; B. Mazula (dir.), Moçambique. Dados estatísticos do processo eleitoral 1994, Maputo, Secretariado técnico de administração eleitoral (STAE), 1998 ; M. Cahen, « “Dhlakama é maningue nice !” An Atypical Former Guerrilla in the Mozambican Electoral Campaign », Transformation. Critical Perspectives on Southern Africa, n 35, 1998, p. 1-48 ; L. de Brito, Cartografia eleitoral de Moçambique 1994, Maputo, Livraria Universitária, 2000 ; M. Cahen, « Mozambique : l’instabilité comme gouvernance ? », Politique africaine, n° 80, décembre 2000, p. 132-135 ; M. Cahen, Les Bandits. Un historien au Mozambique, 1994, Paris, Publications du Centre culturel Calouste Gulbenkian, 2002.
-
[5]
Le manque de transparence des opérations d’inscription électorale, d’organisation du scrutin et de dépouillement, ainsi que l’absence de publication des résultats détaillés (comme ceux de 1994 publiés en 1998) font peser un doute important sur la fiabilité des résultats électoraux. Une thèse assez largement répandue affirme que la Renamo avait bel et bien gagné l’élection présidentielle, mais non les législatives. Voir M. Cahen, « Mozambique : l’instabilité… », art. cit.
-
[6]
« General Election Results in Full », Mozambiquefile, n° 342, 2004, p. 4.
-
[7]
Sur l’analyse de la Renamo comme corps social guerrier, voir C. Geffray, La Cause des armes au Mozambique. Anthropologie d’une guerre civile, Paris, Karthala, 1990 ; M. Cahen, Mozambique, analyse politique de conjoncture 1990, Paris, Indigo Publications, 1990. Sur le concept de corps social, voir C. Meillassoux, « Du bon usage des classes sociales », in B. Schlemmer (dir.), Terrains et engagements de Claude Meillassoux, Paris, Karthala, 1998, p. 7-59.
-
[8]
Sur la démobilisation des appareils militaires mozambicains en 1993-1994, voir C. Messiant, « La paix au Mozambique : un succès de l’ONU », in R. Marchal et C. Messiant, Les Chemins de la guerre et de la paix. Fins de conflits en Afrique orientale et australe, Paris, Karthala, 1997, p. 49-106.
-
[9]
Pour plus de détails sur la trajectoire de la Renamo, voir C. Geffray, La Cause des armes…, op. cit. ; A. Vines, Renamo. Terrorism in Mozambique, Londres/Indianapolis, James Currey & Bloomington/ Indianapolis University Press, 1991 ; Human Rights Watch, Conspicuous Destruction. War, Famine and the Reform Process in Mozambique, New York, HRW, 1992 ; W. Finnegan, A Complicated War. The Harrowing of Mozambique, Berkeley, University of California Press, 1992 ; J. -C. Legrand, « Logique de guerre et dynamique de la violence en Zambézia, 1976-1991 », Politique africaine, n° 50, juin 1993, p. 88-104 ; M. Hall et T. Young, Confronting Leviathan. Mozambique since Independence, Londres, Hurst, 1997 ; M. Cahen, « “Entrons dans la nation ! ” Notes pour une étude du discours politique de la marginalité. Le cas de la Renamo du Mozambique », Politique africaine, n° 67, octobre 1997, p. 70-88 ;
C. L. Manning, « Constructing Opposition in Mozambique : Renamo as a Political Party », Journal of Southern African Studies, vol. 24, n° 1, 1998, p. 161-169 ; C. L. Manning, The Politics of Peace in Mozambique : Post-Conflict Democratization 1992-2000, Londres, Praeger, 2002, ; M. Cahen, Les Bandits…, op. cit. ; D. A. Robinson, Curse on the Land. A History of the Mozambican Civil War, thèse de doctorat d’histoire, Perth, University of Western Australia, 2006. -
[10]
Comme l’a montré Christian Geffray, les bases militaires de la Renamo avaient des liens avec les civils, par le biais des chefs traditionnels et de leurs milices, les mudjibas (ou mujeebas), mais il s’agissait uniquement de répondre aux besoins des bases et non de gestion des civils. Voir C. Geffray, La Cause des armes…, op. cit.
-
[11]
On n’entrera pas ici dans la discussion sur la nature traditionnelle ou coloniale desdits chefs.
-
[12]
Divers documents internes de la Renamo du début des années 1980, consultés par nous.
-
[13]
La Renamo est la section mozambicaine de l’Internationale chrétienne-démocrate.
-
[14]
Sur la composition ethnique des électorats de la Renamo et du Frelimo, voir M. Cahen, « Nationalisms and Ethnicities. Lessons from Mozambique », in E. Braathen, M. Bøås et G. Sæther, Ethnicity Kills ? The Politics of War, Peace and Ethnicity in Subsaharian Africa, Londres/New York, MacMillan/St. Martin’s Press, 2000, p. 163-187.
-
[15]
Une abondante littérature existe sur ces premières élections municipales pluralistes. Voir notamment E. Braathen et B. Viige Jørgensen, « Democracy with out People ? Local Government Reformand 1998 Municipal Elections in Mozambique », Lusotopie, vol. 5, 1998, p. 31-38 ; B. Lachartre, « Élections municipales et démocratisation au Mozambique », Politique africaine, n° 75, octobre 1999, p. 162-170 ; C. Serra (dir.), Eleitorado incapturável. Eleições municipais de 1998 em Manica, Chimoio, Beira, Dondo, Nampula e Angoche, Maputo, Livraria Universtária.
-
[16]
Les cas d’Angoche, d’Ilha de Moçambique et de Nacala Porto en 1998 sont analysés en détail par Domingos do Rosário, Les Mairies des “autres”. Une analyse politique, socio-historique et culturelle des trajectoires locales. Le cas d’Angoche, de l’Île de Moçambique et de Nacala Porto, thèse de doctorat de science politique, Bordeaux, Université Montesquieu Bordeaux IV/Institut d’études politiques de Bordeaux, 2009, p. 406-436.
-
[17]
Afonso Dhlakama n’a jamais caché que le temps consacré au travail parlementaire aurait par trop empiété sur le temps nécessaire au « contrôle du parti ». Entretien avec Afonso Dhlakama, Maputo, 12 septembre 2006.
-
[18]
Celui-ci créa son propre parti, le Partido democrático para o desenvolvimento (PDD, parti démocratique pour le développement), qui n’obtint aucune représentation parlementaire aux élections de 2004.
-
[19]
M. Cahen, « Mozambique : l’instabilité… », art. cit.
-
[20]
Sur les élections municipales de 2003 à Nacala, Ilha de Moçambique et Angoche, se reporter à D. do Rosário, Les Mairies…, op. cit.
-
[21]
En référence au nom du premier président de la République, Samora Machel.
-
[22]
Sur l’oubli volontaire du passé révolutionnaire à partir de 1990, allant croissant à partir de 1999, voir M. A. Pitcher, « Forgetting from Above and Memory from Below. Strategies of Legitimation and Struggle in Postsocialist Mozambique », Africa, vol. 76, n° 1, 2006, p. 88-112 ; A. Dinerman, « Independence Redux in Postsocialist Mozambique », Revista Relações Internacionais, n° 15, 2007, disponible en ligne sur <http://www.ipri.pt> ; A. Isaacman et C. Sneddon, Portuguese Colonial Intervention, Regional Conflict and Post-colonial Amnesia : Cahora Bassa Dam, Mozambique, 1965-2002, communication à la « Conférence on Lusophone Africa : Intersection between the Social Sciences », Cornell Institute for African Development, mai 2003. Il est à noter que ce tournant discursif ne renvoie pas nécessairement à un changement dans la culture politique du Frelimo, qui se voit toujours comme le seul vecteur de la nation et, logiquement, se veut le représentant de la totalité du pays.
-
[23]
S. Chichava, « Por quê Moçambique é pobre ? » Uma análise do discurso de Armando Guebuza sobre a pobreza, Maputo, IESE, 2009.
-
[24]
Entretiens avec David Aloni, Matola, 11 septembre et 23 octobre 2006, 13 septembre 2007 ; entrevue avec Francisco Sanamaria, Tete, 30 septembre 2006 ; entrevues avec Linette Olofsson, Maputo, 12 septembre 2006 et 17 septembre 2007.
-
[25]
En effet, comme le reconnaît le Conseil constitutionnel lui-même, depuis le recensement de 1999 (7099105 électeurs), les actualisations n’ont fait qu’ajouter de nouveaux inscrits (1298155 nouveaux électeurs en 2003, 1245971 en 2004), sans que les morts ou ceux qui avaient déménagé et s’étaient inscrits ailleurs ne soient radiés… Le taux d’abstention « réel » s’élèverait à 56,4 % pour les deux scrutins simultanés.
-
[26]
Dont André Matsangaissa, fondateur de la Renamomort au combat en 1979, et Afonso Dhlakama sont respectivement originaires.
-
[27]
« Gazalândia » (Gazaland) fait référence à l’ancien empire nguni du Gaza, présent sur l’essentiel de la partie sud du Mozambique du premier tiers du xixe siècle à 1895. Les Changanes, qui ont formé le cœur du Frelimo, sont considérés comme les héritiers des Ngunis et donc de l’empire de Gaza, c’est-à-dire d’un État loin de pouvoir représenter l’ensemble des Mozambicains d’aujourd’hui.
-
[28]
Rappelons que la Renamo avait, en 2003, remporté à Beira, Angoche, Ilha de Moçambique et Nacala à la fois la présidence du conselho et de l’assembleia municipal, tandis qu’à Marromeu elle avait remporté la présidence du conselho mais pas la majorité à l’assembleia.
-
[29]
Dans la tradition juridique portugaise, la municipalité est dotée de deux structures : un exécutif (conselho municipal) et une assemblée « législative » (assembleia municipal).
-
[30]
La population urbaine de longue date de l’ancien sultanat, quine s’est jamais vraiment mélangée avec les Macuas installés plus tardivement dans la ville.
-
[31]
J. Hanlon, « Decentralisation. Controversy over MT 7 mn for District Job Creation », Mozambique Political Process Bulletin, n° 34, 6 juillet 2007, p. 6-7 ; S. Cadete Forquilha, Reformas de descentralização e redução da pobreza num contexto de Estado neo-patrimonial. Um olhar a partir dos Concelhos Locias e OILL em Moçambique, communication à la iie conférence de l’Instituto de estudos sociais e económicos, Maputo, 22-23 avril 2009.
-
[32]
Entrevue avec Daviz Mbepo Simango, Maputo, 12 septembre 2007.
-
[33]
Sérgio Chichava considère qu’Afonso Dhlakama savait pertinemment que Simango passerait outre et que Pereira obtiendrait un piètre résultat – les écartant ainsi tous deux d’une seule et même manœuvre. Voir S. Chichava, Eneas Comiche e Daviz Simango : porque « cairam » ?, Maputo, IESE, 2008.
-
[34]
D. do Rosário, Les Mairies…, op. cit., p. 547.
-
[35]
Correspondances électroniques de Linette Olufsson (participante au congrès fondateur et membre du Conseil national), 13 et 14 mars 2009 ; dépêche de l’Agence Lusa, 12 mars 2009.
-
[36]
Sur les raisons historiques de la bipolarisation politique au Mozambique, voir M. Cahen, « Lutte armée d’émancipation anticoloniale ou mouvement de libération nationale ? Processus historique et discours idéologique. Le cas des colonies portugaises, et du Mozambique en particulier », Revue historique, n° 637, 2006, p. 113-138.
-
[37]
Voir infra pour l’aspect non significatif de ce pourcentage très réduit.
-
[38]
La loi n’a pas été modifiée suite à la naissance du MDM. La CNE et les CDE incluent des délégués des partis ayant une représentation parlementaire. Or si nombre de députés de la Renamo étaient passés au MDM à la fin de la législature, ils ont continué à être considérés comme députés Renamo, privant ainsi le MDM d’observateurs dans les CDE et la CNE.
-
[39]
Les certificats de résidence nécessaires au dépôt des candidatures ne sont parfois « pas parvenus à temps » aux candidats du MDM. Ce parti a sans doute souffert de ce problème également en raison de sa faible préparation interne, mais la Renamo aussi a eu des candidats non conformes.
-
[40]
Un parti (Parti de la liberté et du développement) créé quelques semaines avant les élections et qui n’était même pas encore légalisé (statuts non publiés au Journal officiel) a ainsi pu présenter des listes dans presque toutes les provinces, n’ayant eu aucune difficulté à y trouver des candidats munis de certificats de résidence.
-
[41]
Cette expression chronologiquement correcte (1977-1992) a été forgée par l’Église catholique dans une optique de réconciliation, afin de ne pas avoir à choisir entre les concepts de « guerre de déstabilisation » (ourdie par l’apartheid, etc.) et « guerre civile » (nourrie par une révolte interne).
-
[42]
S. Chichava, Movimento democrático de Moçambique (MDM) : uma nova força política na democracia moçambicana ?, à paraître.
-
[43]
Les taux officiels d’abstention aux élections présidentielle et législatives sont respectivement de 55,4 % et 55,6 %, effectivement moindres que ceux, officiels également, de 2004 (63,6 et 63,7 %). Toutefois, la différence réelle est peut-être moindre puisque le taux de 2004 serait, selon J. Hanlon, de 56,4 % (voir note 25).
-
[44]
Le nombre d’inscrits est passé de 9 142 151 en 2004 à 9 871 949 en 2009 (+8 %) ; celui des votants, de 3 329 167 en 2004 à 4 406 093 en 2009 (+ 32,3 %).
-
[45]
Son score en valeur absolue passe de 998 059 voix en 2004 à 650 679 en 2009 (- 34,8 %).
-
[46]
Le score national du MDM aux législatives (3,9 %) n’a pas de signification, puisque ce parti a été exclu du scrutin dans les trois quarts des provinces.
-
[47]
Simango obtient près de 26 % des voix pour tout le district et la majorité absolue à Beira (nous n’avons pu obtenir le résultat définitif que pour cette ville).
-
[48]
Les Macuas sont le principal groupe ethnique du pays (environ 35 % de la population) et se sentent souvent méprisés par le Frelimo et les « gens du sud », n’ayant qu’assez faiblement participé à la lutte armée anticoloniale. De par la loi, les partis doivent avoir leur siège social dans la capitale, mais cela n’impose pas au lider d’y résider.
-
[49]
Voir notamment le communiqué de la Mission d’observation électorale de l’Union européenne sur des fraudes dans 71 districts : « A MOE UE observou numerosas irregularidades durante o apuramento sem que, no entanto, estas afectem significativamente os resultados », Maputo, 18 novembre 2009. Voir le rapport final sur <http://www.eueom-mozambique.eu/PT/Final_Report.html>. Voir également Mozambique Political Process Bulletin, Maputo, CIP-AWEPAA, n° 44, 11 janvier 2010, qui synthétise les divers rapports de missions d’observation.
-
[50]
Le candidat présidentiel du Frelimo avait obtenu en 1994, 1999 et 2004 respectivement 53,3 %, 52,3 % et 63,7 % des suffrages.
-
[51]
Des ordinateurs servant au recensement électoral étaient inutilisables faute de chargeurs, mais cela semble s’être produit plus dans le nord que dans le sud, etc.
-
[52]
Voir supra et M. Cahen, « L’instabilité… », art. cit.
-
[53]
« Grupo de 16 deputados desafia publicamente Afonso Dhlakama », Canal Moz, 5 février 2010.
-
[54]
Ali est né au Niassa, dans le nord. Son arrivée au plus haut poste de l’État constituerait de ce point de vue une première.
« Je ne suis pas allée voter parce qu’à chaque fois que nous votons, nous entendons que la Renamo a perdu. Personne dans ma famille n’est allé voter à cause de cela. [...] Si je vais voter, mon vote est donné à une autre personne, non à la personne pour qui j’ai voté [...] notre vote ne vaut rien. »
1La Resistência nacional de Moçambique (Résistance nationale du Mozambique, Renamo) a fait couler beaucoup d’encre [2]. Sa genèse n’est pas séparable du contexte géopolitique des années 1975-1991, quand l’Afrique du Sud raciste et la Rhodésie étaient les plus puissants voisins de la République populaire du Mozambique, dont le parti unique, dit « Parti Frelimo » (Frente de libertação de Moçambique, Front de libération du Mozambique), s’est réclamé officiellement du marxisme-léninisme à partir de 1977. La question était alors de savoir si les rebelles de la Renamo constituaient seulement le « bras régional de l’apartheid » (hypothèse expliquant leur violence et les destructions systématiques d’infrastructures) ou si l’organisation insurgée était aussi un appareil utilisé par des segments de la population pour se protéger d’un État paternaliste autoritaire voulant moderniser sa paysannerie de force, sans réels avantages sociaux pour elle. Bref, avait-on seulement affaire à une guerre de déstabilisation externe, ou à une véritable guerre civile [3] ?
2Ce débat a été globalement clos par le résultat des élections d’octobre 1994, suite aux accords de paix signés à Rome le 4 octobre 1992 entre le gouvernement mozambicain et la Renamo. Cette dernière n’avait certes pas remporté les élections [4], mais elle avait indéniablement arraché une victoire de légitimation : comment expliquer, si elle n’était qu’un ramassis de « bandits armés » sans base sociale, qu’elle ait réussi à obtenir la majorité absolue des voix dans les régions les plus peuplées du pays, y compris dans des zones qu’elle n’avait jamais occupées militairement et où sa capacité d’intimidation de la population était faible ? Si la Renamo avait poursuivi son chemin vers la stabilisation d’un grand parti d’opposition, le doute sur sa nature n’aurait plus existé. Cependant, depuis son score impressionnant de 1999 (47,7 % à l’élection présidentielle [5]), elle n’a cessé de perdre du terrain lors des élections présidentielle et législatives (2004) comme locales (2003, 2008-2009), dans un contexte de fortes tensions internes souvent nourries par sa propre présidence, à tel point que l’on peut se demander si tout cela ne viendrait pas de son origine qui serait militaire, voire externe, et non politique et interne. Des commentateurs ont ainsi écrit que la population se détachait de la Renamo car, le danger de guerre étant maintenant éloigné, les électeurs pouvaient en quelque sorte reprendre leur liberté et donc s’éloigner des anciens rebelles : « C’est le vote de la Renamo [et non du Frelimo] qui s’est effondré […] La conclusion est inévitable – la faible participation est un phénomène lié à la Renamo. Ce sont les électeurs de la Renamo qui ont refusé d’aller aux bureaux de vote. Le Frelimo a mobilisé le cœur de son électorat, pas la Renamo [6] ». On verra que ce n’est pas si simple.
3Le présent article cherche à démontrer que le militarisme de la Renamo est certes une cause importante de ses difficultés mais ne saurait remettre en cause sa nature de parti politique et que, parallèlement, le renforcement du Frelimo ne saurait être surestimé, bien qu’il dispose de l’arme redoutable du néopatrimonialisme. Il s’agira aussi de montrer que le possible effondrement de la Renamo n’ouvre pas pour autant la voie à un renforcement durable du parti au pouvoir, ni à l’émergence d’une troisième force. En revanche, il n’est plus exclu qu’une « nouvelle Renamo » apparaisse, sur les mêmes bases sociales. L’étonnante bipolarisation de la vie politique mozambicaine n’en serait alors pas vraiment modifiée, même si le jeu politique pourrait s’engager dans une nouvelle dynamique.
Le temps des espoirs
4La Renamo a été un exemple réussi de transformation d’un corps social guerrier [7] en parti civil, l’illustration d’un processus de civilisation au sens littéral du terme. En effet, même si on peut défendre la thèse selon laquelle, dès le départ et malgré le contrôle de ses sponsors, la Renamo était porteuse de certaines valeurs politiques, il ne fait aucun doute qu’elle n’était pas une structure politico-militaire comme le furent (ou le sont encore) de nombreuses guérillas latino-américaines ou, en Afrique, le FLN algérien, l’UPC camerounaise, le PAIGC capverdien-guinéen, le Frelimo mozambicain, le MPLA, le FNLA ou l’Unita angolais, le FPLE érythréen, etc., c’est-à-dire des groupements politiques préexistants décidant, à une étape de leur histoire, de passer à la lutte armée (fût-ce en passant par une scission avec un mouvement antérieur refusant ce choix). La Renamo est née comme appareil militaire, et a pourtant réussi à entrer dans le jeu politique en 1992-1994, ce que l’Unita angolaise a échoué à réaliser totalement en 1991-1992. Très vite, dans les localités, les districts, les provinces, les militaires furent marginalisés au profit des civils, et ce pour deux raisons.
5Premièrement, il se produisit une décomposition rapide de la structure militaire des deux camps, les soldats voulant d’abord et avant tout rentrer chez eux, craignant par-dessus tout de devoir s’engager dans la « nouvelle armée unifiée » prévue par les accords de paix [8]. Du côté de la Renamo, ce processus fut accéléré en raison de la faiblesse du soutien sud-africain qui n’avait pas abouti à la genèse d’une forte structure militaire professionnalisée : raptés ou volontaires, les soldats de la Renamo n’avaient nullement envie de rempiler et voulaient obtenir rapidement le subsídio de démobilisation et de réintégration offert par l’Opération des Nations unies au Mozambique (Onumoz), seuls les hauts gradés souhaitant rester en fonction.
6Néanmoins, s’il n’y avait eu que cette raison, la Renamo se serait totalement écroulée. Or il y a toujours eu une petite composante civile clandestine : sans même parler des évadés des camps de rééducation du Frelimo qui formèrent le noyau initial des opérationnels, il y eut dans certaines régions, dès 1977 dans de rares cas et surtout au milieu des années 1980, de petites cellules clandestines de la Renamo dans les villes du centre et du nord du pays [9]. Mais ce fut surtout après son développement en 1985-1986 que la rébellion créa une véritable administration civile séparée de ses bases militaires [10]. Or c’est cet appareil civil formé de responsables de provinces et de régions, de responsables du ravitaillement, de professeurs, d’infirmiers, d’agents de renseignements et de « chefs traditionnels [11] », qui apparut au grand jour en 1992-1993 et devint la colonne vertébrale du parti, seule la direction centrale restant de manière prédominante d’origine militaire.
7En interne, les documents de la Renamo parlent systématiquement du « parti Renamo » dès les années 1980, en un mimétisme saisissant du discours du Frelimo transformé lors de son iiie congrès de 1977 en Partido Frelimo, et signe d’un effort important d’autolégitimation [12]. Si le Partido Renamo devint vraiment civil, le poids des anciens militaires, qui imaginaient la vie politique comme la poursuite de la vie militaire par d’autres moyens, reste prégnant au sein de sa direction. La mentalité interne de la Renamo demeure ainsi très militariste. La Renamo n’est pas un parti où les militants prennent des initiatives locales ou régionales mais où tout un chacun « está à espera de orientações » (« est dans l’attente de directives » ).
8Il existe néanmoins une tension permanente entre les aspirations de la base et l’orientation politique de la direction. En effet, la Renamo se situe plutôt à droite [13]mais les aspirations de sa base sociale, telles qu’elles s’expriment lors des centaines de meetings des campagnes électorales – développement des communautés paysannes, défense de la terre contre les concessions obtenues par de hauts fonctionnaires bien placés, véritable pluralisme politique, fin de la fusion parti-État, fin des abus policiers, promotion sociale et des cultures africaines, attention plus grande aux questions de « démocratie interethnique », etc. –, on s’aperçoit très vite qu’il s’agit d’un ensemble d’attentes qui pourraient être qualifiées dans d’autres contextes politiques comme étant « de gauche ». La contradiction est demeurée béante entre ces aspirations populaires fortes et l’incapacité politique du principal parti d’opposition à les traduire sur le plan politique. Lors des deux premières élections générales (1994 et 1999), malgré des problèmes organisationnels et politiques déjà patents, la Renamo fut dépassée par cette intense volonté de changement de larges secteurs de la population qui l’ont utilisée, quoi qu’elle dise et fasse, comme un outil pour chasser le groupe au pouvoir.
9Les élections de 1994 ont définitivement réglé le débat sur le « banditisme armé ». L’expression « bandits armés » était apparue suite à l’indépendance du Zimbabwe (1980), que le pouvoir considérait comme devant « logiquement » mener à l’asphyxie des rebelles. Ceux-ci étaient désormais, dans leur grande majorité, basés de manière permanente au Mozambique et de nombreux chefs traditionnels étaient passés de leur côté. La Renamo était sans conteste un groupe interne et qualifier ses combattants de « contre-révolutionnaires » serait revenu à reconnaître qu’une lutte politique était à l’œuvre à l’intérieur du pays, ce qui était inconcevable pour le Frelimo, se voulant le parti de tout le peuple. Il s’agissait donc, selon les mots du pouvoir, de « bandits » et de « hordes ». Même pendant les négociations de Rome, ces vocables ne changèrent pas, et ils ne furent abandonnés progressivement qu’après les accords de paix (4 octobre 1992), ressortant cependant périodiquement dans le feu des polémiques. Quand un parti obtient 35 % des voix, on ne peut cependant plus nier qu’il bénéficie d’une véritable assise sociale et qu’il s’agit d’un phénomène politique. Les élections de 1994 furent donc pour la Renamo une formidable victoire de légitimation. À l’inverse de ce qui fut bien souvent écrit, l’électorat de la Renamo était en outre moins concentré ethniquement que celui du Frelimo [14], ce qui se vit confirmé par les bons scores obtenus par la Renamo lors des élections de 1999. Celles-ci permirent en outre de contenir des conflits internes puisqu’il y eut un nombre non négligeable de postes de députés à distribuer.
10En juin 1998, la Renamo, en particulier sa présidence, commit une erreur politique majeure en boycottant les premières élections municipales pluralistes du pays [15]. Il y avait certainement de bonnes raisons de les boycotter – leur limitation à 33 cidades (villes) et vilas (bourgs) au lieu d’élections locales généralisées, l’absence de nouveau recensement électoral et une simple actualisation de celui de 1994, l’absence de garantie institutionnelle, etc. – mais la Renamo était assurée de conquérir plusieurs villes (y compris la seconde agglomération du pays, Beira) et de former ainsi une strate de cadres moyens pour la gestion publique tout en créant les bases de son propre clientélisme. Une victoire, même relative, l’aurait mise en excellente posture pour les élections de 1999. Des processus de désignation interne avaient eu lieu dans de nombreuses villes et des candidatures avaient parfois déjà été publicisées en 1998 mais ces processus avaient aussi mis au jour de nombreuses tensions. Celle entre dirigeants issus de la lutte armée et tenant l’appareil partisan mais pas forcément reconnus par la mouvance urbaine de la Renamo et les filhos da terra (enfants du pays), civils, urbains, plus prestigieux et issus de diverses trajectoires (familles côtières des anciens sultanats, lignages de l’intérieur plus tardivement venus sur la côte, etc.) provoqua même des démissions du parti [16].
11Le boycott fut de fait imposé par le président de la Renamo, Afonso Dhlakama, certes en raison de ses doutes sur l’honnêteté du scrutin mais aussi par crainte de l’expression de ces bases locales ayant leurs propres objectifs civils, indépendants de ceux de l’appareil, et, en cas de victoire, de l’émergence de pouvoirs locaux internes potentiellement dangereux pour son leadership. Le cas de Beira a dû peser lourd dans la décision, le maire de cette ville pouvant devenir plus important que le président du parti. Le « contrôle » de ce dernier est en effet resté une préoccupation permanente d’Afonso Dhlakama qui, pour cette raison, ne s’est lui-même jamais présenté aux élections [17]. Pourtant, comme on le verra, c’est cette crainte même qui a renforcé les mouvements centrifuges au sein de la Renamo. Le mécontentement interne, certes voilé en raison d’une présidence encore incontestée, fut en tout cas aiguillonné par la frustration des candidats devenus boycotteurs par simple discipline de parti. En tout état de cause, si le taux d’abstention fut de 85,13 %, ce ne fut évidemment pas seulement en raison de l’appel au boycott de la Renamo et des autres petits partis d’opposition, mais du fait de l’incompréhension de la population vis-à-vis de ces élections fort partielles. La Renamo ne put ainsi pas exploiter le camouflet pourtant reçu par le pouvoir, élu dans toutes les municipalités avec d’écrasantes majorités exprimées par 15 % des votants.
12Les élections de 1999 ont constitué un point culminant pour la Renamo : aux législatives, son score passa de 37,78 % à 38,81 % et, à la présidentielle, de 33,7 % à 47,7 %. Pourtant, les problèmes organisationnels de la campagne électorale furent considérables, celle-ci commençant tardivement, avec d’incessants changements d’itinéraires et beaucoup moins d’argent qu’en 1994. La Renamo n’avait pas renforcé son organisation locale, mais sa faiblesse institutionnelle n’était pas encore perçue par l’électorat ni par nombre de cadres pour lesquels les difficultés venaient toujours du sabotage du Frelimo qui cherchait à les « acheter ». Ce dernier n’avait pas encore beaucoup avancé dans sa politique de récupération des régulos (chefs traditionnels), même si quelques cas défrayaient déjà la chronique. Surtout, la population utilisa la Renamo comme un instrument de changement social, presque indépendamment de ce qu’était ce parti. L’image de Dhlakama, l’ancien chef de guerre, avait décisivement changé dans le pays : il était réellement devenu le « chef alternatif » possible.
13Durant cette campagne de 1999, la Renamo garda le même discours « anticommuniste », déjà surréaliste en 1994. En effet, où étaient les « communistes » ? Le Frelimo n’était-il pas devenu le parti naturel des secteurs les plus modernes du capitalisme mozambicain ? Même après 1994, le discours « anticommuniste » garda une certaine efficacité auprès de la base car le Frelimo n’avait pas du tout profité de sa victoire lors des premières élections pluralistes pour « ouvrir socialement » le pouvoir – ce que fait plus assidûment l’actuel président Armando Guebuza depuis 2004. Ces mêmes « communistes » qui avaient pris le pouvoir en 1975 n’étaient-ils pas encore aux commandes du pays ?
Le temps des défaites
14Ces élections de 1999 ont provoqué au sein du pouvoir de grandes craintes qui scellèrent certainement l’avenir politique de Joaquim Chissano. On ne saura sans doute jamais si ce sont la désorganisation volontaire du recensement électoral et la fraude qui assurèrent la victoire du Frelimo et de son candidat présidentiel, mais de larges secteurs de la population furent en tous les cas convaincus que la Renamo avait gagné.
15Néanmoins, cette dernière, contrairement à ce qui venait de se passer dans la grande île voisine de Madagascar, s’avéra incapable de mener campagne uniquement pour le recomptage des voix. La présidence de la Renamo s’enlisa dans des négociations « semi-secrètes » pour le « partage des gouverneurs » (la Renamo étant censée recevoir les gouvernorats des provinces où elle était majoritaire), puis pour une simple participation aux conseils d’administration des entreprises privatisées. Face à une base survoltée qui avait besoin de résultats, cette orientation mena à une impasse et aboutit à des accusations de corruption contre le numéro 2 du parti chargé des négociations, Raúl Domingos [18], et à son expulsion finale. Cela mena aussi, alors que Dhlakama n’avait aucun résultat concret à offrir à sa base, aux manifestations tardives de l’automne 2000, très violemment réprimées par le pouvoir au prétexte que l’autorisation n’en avait pas été demandée à temps. Le Frelimo montra là ce dont il était capable pour rester au pouvoir [19], mais force est de constater qu’il n’a pas souvent eu besoin par la suite de répéter ce type de répression pour affirmer son hégémonie.
16Les conséquences politiques de l’échec de 1999 et de la répression des manifestations de fin 2000 ont été considérables dans la mouvance de la Renamo. Le sentiment s’est diffusé que, quoi qu’il arrive, le Frelimo resterait toujours au pouvoir et que le vote était donc un acte civique inutile.
17En 2003, pour la première fois, la Renamo participa aux élections municipales. La première conséquence en fut que les quelques listes « indépendantes » de citoyens, qui s’étaient formées en 1998 en profitant du vide produit par le boycott de l’opposition et qui pouvaient peut-être préfigurer l’émergence d’une troisième force, n’ont pas reconduit leur tentative ou ont obtenu des scores marginaux. La bipolarisation est redevenue quasi parfaite. En dépit de quelques belles victoires, telles qu’à Nacala (le grand port du nord, 57 %), Beira (la seconde ville du pays, 53,43 %), Ilha de Moçambique (la ville mythique de la vieille créolité, 53,16 %) ou encore Angoche (l’ancien sultanat swahili, 52,60 %), auxquelles on peut ajouter la victoire de justesse à Marromeu (50,01 %), ces élections ont toutefois été décevantes pour la Renamo [20]. De nombreuses cidades ou vilas qu’elle pouvait raisonnablement conquérir lui échappèrent, à l’image de Mocimboa da Praia (gagnée par le Frelimo avec 51,07 %), Nampula (57,09 % pour le Frelimo), Monapo (50,75 %) ou Quelimane (52,56 %). Certaines interventions arbitraires de la présidence de la Renamo dans le choix des candidats locaux ont semé trouble et division, comme à Quelimane, capitale de la Zambézie pourtant acquise et qui ne fut finalement pas gagnée.
La catastrophe de 2004
18Suite aux craintes suscitées par les résultats de 1999, le Frelimo ne laissa rien au hasard pour la campagne électorale des élections présidentielle et législatives de 2004. Armando Guebuza avait été désigné comme candidat et secrétaire général du parti, et il organisa méthodiquement le quadrillage du pays. Si le slogan central de la campagne fut « Frelimo, la force du changement », Guebuza sut le mobiliser en usant d’un mélange étonnant entre accents « machelistes [21] » et déni de la mémoire révolutionnaire [22]. Il rappela que, bien que ses parents fussent originaires de Catembe (localité proche de Maputo et majoritairement ronga), il était lui-même né à Murrupula, dans la province septentrionale de Nampula, et y était resté jusqu’à l’âge de… cinq ans. Il se présenta ainsi comme le « candidat du nord » et accorda une attention soutenue à la promotion d’un plus grand nombre de cadres originaires de ces régions. Il participa même à une cérémonie d’invocation des esprits dans la région – geste impensable quelques années plus tôt pour un dirigeant du parti « anti-obscurantiste ». L’un des axes centraux de la campagne fut la lutte contre la pauvreté, dont la Renamo fut naturellement présentée comme responsable en raison de la guerre. Cet axe permettait aussi d’aller au-devant de reproches sur le grand décalage entre la capitale et le reste du pays, en particulier les provinces du centre et du nord. Hisser ainsi la pauvreté au rang de grande cause nationale [23] constitua aussi une réponse habile pour attirer, dans une optique d’union sur des projets concrets, des électeurs hésitants fatigués par l’absence de perspective du côté de l’opposition. Naturellement, les moyens de l’État furent mis à la disposition du parti au pouvoir, ce qui facilita la conversion des chefs traditionnels auparavant favorables à la Renamo.
19En comparaison, la campagne de la Renamo commença très tardivement et se révéla incohérente dans son organisation, sans aucun renouvellement du discours « anticommuniste » et émaillée d’incessantes interventions de la direction centrale dans le choix des directions provinciales et des candidats à la députation. Cette dernière question fut très sensible : les élections internes permettaient de définir l’ordre de la liste des candidats au sein de chaque province, mais ces listes étaient ensuite envoyées à Maputo pour accord et revinrent souvent méconnaissables, avec en tête des personnalités proches du président qui avaient été classées en dernier par les militants [24]. Ces changements furent la cause de nombreuses rancœurs, divisions locales et d’un regain de rumeurs, les non-élus considérant forcément que les élus l’avaient été uniquement en raison de leur proximité au pouvoir présidentiel. Les ambitions furent d’autant plus aiguisées qu’un député gagne environ 700 euros par mois payés par l’État, tandis qu’un délégué provincial ne touche que 33 euros versés par la Renamo.
20Même si des points forts d’implantation renamiste ont subsisté, les résultats furent globalement catastrophiques pour la Renamo. Le Frelimo obtint respectivement aux élections législatives et à l’élection présidentielle 62,03 % et 63,74 % des suffrages reconnus valides, la coalition Renamo-Union électorale recueillant seulement 29,73 % et 31,74 % des voix. Une chose au moins fut confirmée : l’inexistence de toute base sociale pour une « troisième force ».
Le déclin inégal des deux partis de la guerre civile
21L’autre grande donnée du scrutin de 2004 fut le taux inégalé d’abstention lors d’une élection nationale (63,58 % et 63,66 % aux élections présidentielle et législatives, contre 30,49 % et 31,91 % en 1999, et 12,60 % et 12,58 % en 1994). Le taux d’abstention étant calculé sur la base du nombre de citoyens recensés, la valeur de tels pourcentages mérite toutefois discussion [25]. Pour avoir une idée plus précise du phénomène, il faut mesurer le nombre des voix en valeur absolue, c’est-à-dire le nombre d’électeurs qui ont effectivement voté pour l’un des deux partis et son candidat présidentiel. On mesure alors que le renforcement du Frelimo n’est dû qu’à l’effondrement de la Renamo : si Armando Guebuza obtient en 2004 un score relatif bien meilleur (63,7 % des suffrages exprimés reconnus valides) que celui de Joaquim Chissano en 1999 (52,3 %), il n’empêche que le même Guebuza ne reçoit que 85,71 % des voix qu’avaient obtenues son prédécesseur, et moins de 76,10 % de celles que ce dernier avaient obtenues en 1994.
22La Renamo, de son côté, si l’on se fonde sur l’analyse de l’élection présidentielle, perdit plus de 40 % de son électorat « originel » de 1994 et plus de 53 % de celui de sa forte poussée de 1999. Il s’agissait donc d’une authentique défaite touchant toutes les provinces, à commencer par les bastions renamistes historiques : rien qu’en Zambézie et Nampula (les deux provinces les plus peuplées), la Renamo perdit plus de 25 % de son électorat de 1994. La marginalisation s’accentua aussi dans les « provinces hostiles » à la Renamo dans le sud. Le déclin fut marqué dans les deux provinces centrales (Manica et Sofala [26]), ce qui montre une fois de plus que l’ethnicité n’est qu’un facteur parmi d’autres de l’identité politique. Il ne fait donc aucun doute que la Renamo s’effondra plus que le Frelimo ne recula, ce qui assura à ce dernier une victoire en termes relatifs. Il n’en reste pas moins que, de 1994 à 2004, de moins en moins d’électeurs votaient pour ces deux partis. Si la victoire d’Armando Guebuza fut donc politiquement légitime et exprima l’hégémonie de son parti sur la société politique du pays, elle ne fut pas fondée sur un renforcement de l’assise sociale de cette hégémonie. La situation était en fait, du côté du Frelimo, plus fragile qu’il n’y paraissait.
23La Renamo jouait dorénavant son existence, comme l’ont confirmé les élections locales de 2008-2009. Côté Frelimo, la situation était plus confortable, la victoire en termes relatifs masquant l’effritement de son assise sociale. Le nombre absolu de ses électeurs allait remonter lors des élections générales suivantes (28 octobre 2009), en raison même du développement de ses pratiques clientélistes (cf. infra). La politique du Frelimo alla désormais chaque fois davantage dans le sens de la construction d’une situation hégémonique : chaque jour, dans toutes les localités, le parti montrait à tout un chacun (fonctionnaires, chefs traditionnels, paysans, vendeuses du secteur informel, commerçants, jeunes des ONG nationales, etc.) qu’il n’y avait pas d’avenir politique, économique, social et professionnel en dehors de ses rangs. Il représentait à lui seul l’unité nationale, d’autant plus qu’une attention plus soutenue était désormais accordée aux notabilités du nord et du centre, remettant partiellement en cause l’image d’un État-Frelimo exclusivement sudiste (« Gazalândia » [27]).
L’éradication municipale et la naissance du Movimento democrático de Moçambique
24La direction de la Renamo plaça beaucoup d’espoir dans les élections provinciales qui, selon la constitution, devaient avoir lieu en 2007. Non seulement elles lui offriraient des élections générales intermédiaires avant les élections législatives et présidentielle de 2009 (les municipales de 2008 n’ayant lieu que dans 43 communes), mais elles contraindraient aussi les gouverneurs des provinces où la Renamo serait majoritaire à tenir compte de l’avis de la majorité, ce qui viendrait amputer leur pouvoir discrétionnaire. Enfin, la Renamo espérait un subsídio électoral (subvention publique), comme pour les élections générales. Un problème surgit cependant : suite aux problèmes d’inscription sur les listes électorales que les élections de 2004 avaient mis en évidence, tout le monde s’accordait sur le fait qu’il fallait réaliser un nouveau recensement. La nouvelle Commission nationale électorale formée en juin 2007 décida que les élections auraient donc lieu en janvier 2008 (pendant la saison des pluies…). Rapidement, la communauté internationale décréta qu’elle ne les financerait pas, ni ne les observerait. En octobre 2007, le recensement avait pris un tel retard que les deux partis durent finalement se rendre à l’évidence. Le 16 novembre 2008, fut promulguée une révision constitutionnelle repoussant les élections provinciales à 2009 (en même temps que les élections législatives et présidentielle). Les élections municipales de 2008 n’en devinrent que plus cruciales pour la Renamo [28].
25Les élections municipales de novembre 2008 mériteraient à elles seules une analyse spécifique. On n’indiquera ici que quelques éléments. Lors de la campagne électorale de 2003, la Renamo avait promis de nombreux emplois en cas de victoire. Ce parti se positionnait ainsi dans un cadre clientéliste similaire à celui du Frelimo. Les mairies n’ayant guère d’autonomie financière, et encore moins quand elles sont d’opposition, le nombre d’« emplois » effectivement octroyés fut cependant très réduit et concerna les plus proches collaborateurs dumaire, à savoir les vereadores (adjoints au maire) du conselho municipal, tandis que les élus à l’assembleia municipal [29] ne recevaient presque rien. Cela entraîna parfois des scissions locales, comme à Angoche, où la « Renamo 1 », principalement représentative des Cotis [30], et la « Renamo 2 » devinrent ennemies au point que la seconde s’allia au Frelimo. Les mairies de la Renamo se heurtèrent en outre à un adversaire redoutable et multiforme : les gouvernements de district, dont le poids fut renforcé par le Frelimo [31]. Ainsi, là où la mairie était renamiste, l’administrateur de district du Frelimo exerça un véritable gouvernement parallèle, assumant des compétences municipales telles que la levée des impôts, les taxes de marché, la gestion des écoles, etc., lui permettant de s’attribuer toutes les réalisations normalement dévolues à la mairie.
26Il n’y a en fait qu’à Beira que les choses se passèrent de manière sensiblement différente, sans doute avant tout en raison des qualités du maire, Daviz Mbepo Simango, et de l’importance de la ville, qui permettait de dégager des ressources plus conséquentes. Lemaire, aidé par son aura grandissante, réussit également à capter des aides internationales. Sa relation avec Afonso Dhlakama restait exécrable, mais il était extrêmement prudent, jouant le jeu d’une loyauté sans faille envers son parti [32].
27Cependant, au moment où le « vote des militants » devait désigner les candidats à la mairie pour les élections de 2008, une « assemblée », réunie le 28 août, écarta Daviz Mbepo Simango au profit de Manuel Pereira, un membre historique du parti, brouillé de longue date avec Dhlakama mais qui n’avait pas joué de rôle important depuis que la ville était passée à la Renamo [33]. Ce fut sans doute l’erreur majeure d’Afonso Dhlakama, car cela provoqua une véritable révolte des militants et de l’électorat renamiste de Beira – dénommée par certains la « Révolution du 28 août ». Manuel Pereira ne put pas faire campagne et passa une bonne partie du temps réfugié à Maputo. Plus grave, cela ouvrit la voie à de nombreux passages à l’opposition interne. La cheffe du groupe parlementaire Maria Moreno, le chef-adjoint Luís Trinta (ancien delegado de Nampula), le porte-parole Eduardo Namburete, Manuel Araujo (un député au blog fort visité), Ismael Mussa, Linette Olufsson et de nombreux autres s’affichèrent publiquement en soutien à la campagne de Simango, contre l’orientation imposée par la présidence du parti. Simango fut exclu peu après par la direction nationale et se présenta comme indépendant au scrutin du 19 novembre.
28Le résultat des municipales de 2008-2009 fut désastreux, la Renamo étant écrasée par la puissante machine électorale mais aussi par le grand soin que mit le Frelimo à choisir ses candidats locaux. À Angoche par exemple, le Frelimo laissa les instances locales choisir un Coti d’une grande famille islamo-créole, consensuel largement au-delà de l’électorat habituel du parti et qui obtint le soutien de la « Renamo 2 » de la ville [34]. À Ilha de Moçambique, ce fut sans surprise l’administrateur du « district-doublon », qui avait réalisé nombre de travaux au nom de l’État (et donc du Frelimo), qui fut choisi comme candidat. Les deux remportèrent le scrutin.
29La Renamo, traumatisée par ses divisions, dans l’attente du matériel de propagande qui devait arriver de la capitale pendant que partout les sections locales du Frelimo passaient à une campagne active, ne résista nulle part, sauf, du point de vue de sa base électorale, à Beira et, partiellement, à Nacala, les deux villes où les maires appliquèrent la politique la plus autonome vis-à-vis de la direction du parti. Elle perdit en effet la totalité de ses municipalités : Angoche, Ilha de Moçambique, Marromeu furent gagnées par le Frelimo au premier tour (19 novembre) et Nacala au second tour (11 février 2009), alors que Beira était gagnée dès le premier tour par Simango désormais candidat indépendant. Le seul maire ayant résisté au Frelimo avait été exclu de la Renamo.
30Un saut qualitatif avait été franchi : tout le monde savait désormais que la Renamo, après sa défaite cuisante de 2004 et son éradication municipale en 2008, courait à la déroute en 2009. Si certains hauts cadres souvent critiques restèrent prudents, ne relayant pas, par exemple, les appels à un congrès, un grand nombre – telle Maria Moreno, démise de ses fonctions de cheffe du groupe parlementaire le 5 mars 2009 – franchirent le pas, faisant publiquement pression sur Daviz Mbepo Simango pour qu’il annonce la création d’un nouveau parti. Ce fut chose faite les 5,6 et 7 mars 2009 avec le lancement, à Beira, du Movimento democrático de Moçambique (MDM), en présence de 357 délégués venus, selon les responsables, de la totalité des 128 districts [35]. La grande majorité des membres poussèrent Simango à se présenter à l’élection présidentielle dès 2009. De fait, on voit mal quelle autre décision il aurait pu prendre pour imposer le nouveau parti face au Frelimo et à la Renamo.
31Le Mozambique tenait-il enfin sa « troisième force », entre Frelimo et Renamo ? Les événements ultérieurs semblent avoir infirmé cette hypothèse. Il ne semble pas y avoir de base sociale pour l’émergence d’une troisième force au Mozambique, et ce en raison de plusieurs données historiques : la longue marginalisation des élites issues du premier âge de la colonisation, situées dans la partie nord du pays et incapables de retrouver une dynamique propre ; l’extrême polarisation économique, mais aussi intellectuelle, dans la seule capitale située à l’extrême sud ; la forte « occupation » de l’imaginaire national par le Frelimo [36].
32Cela ne signifie pas que le MDM ne pouvait pas réussir mais qu’il ne le pourrait que s’il devenait lui-même le lieu d’expression de la base sociale de la Renamo, cette « coalition des marginalités » qui n’ont jamais trouvé place dans la « nation » du Frelimo. Toutefois, cette nécessité, au moins dans un premier temps, ne lui permettrait que de mordre marginalement sur la base sociale populaire (urbaine comme rurale) du Frelimo. Côté « rebelle », il s’agirait alors d’un simple changement de direction politique, passant de la Renamo au MDM, pour le même ensemble de forces sociales.
33Avec des scores relatifs sans cesse croissants mais des votes déclinants en valeur absolue, le Frelimo savait, au cours du premier mandat d’Armando Guebuza (2004-2009), que son hégémonie restait fragile. Il lui fallait absolument faire remonter le nombre de ses électeurs. Pratiquant désormais la fusion parti État à un niveau auparavant inégalé et profitant de la meilleure santé économique d’un pays vivant en paix depuis dix-sept ans, le Frelimo s’engagea dans la bataille avec des atouts incomparables face à une opposition désormais divisée.
Octobre 2009, les deux défaites de l’opposition
34Le 28 octobre 2009 eurent lieu simultanément les élections présidentielle, législatives et provinciales. Le résultat fut sans appel : le Frelimo devint plus que jamais un parti ultra-hégémonique (74,7 % des voix aux élections législatives et 75,2 % à l’élection présidentielle) ; la Renamo subit une nouvelle et sévère défaite (17,7 % et 16,3 %) ; le MDM réussit une modeste percée dans le paysage politique (3,9 % [37] et 8,6 %) quelques mois seulement après sa fondation.
35Comme on pouvait le prévoir, le MDM avait mordu principalement sur l’électorat de la Renamo, mais il est difficile de savoir dans quelle mesure. Le fait que les scores cumulés des deux partis en 2009 (respectivement 21,6 % et 24,9 % aux élections législatives et présidentielle) n’atteignent même pas ceux de la Renamo en 2004 (29,7 % et 31,7 %) signifie que l’émergence du MDM n’a pas suffi à compenser la poursuite du déclin de la Renamo. Le MDM n’a pas réussi son pari de devenir, dès sa première participation aux élections, le premier parti d’opposition en plaçant son candidat présidentiel Daviz Mbepo Simango devant Afonso Dhlakama, candidat de la Renamo depuis 1994.
36Premièrement, l’alliance de fait entre le Frelimo et la Renamo – d’aucuns parlent désormais du « Frenamo » – a considérablement gêné l’activité du jeune parti : violences contre ses militants de la part de la Renamo, absence de délégués du MDM dans les Commissions électorales nationales (CNE) et de district (CDE) [38] mais surtout exceptionnelle rigueur de la Commission nationale électorale dans l’examen de la conformité des listes de candidatures MDM aux législatives [39] (la même CNE témoignant d’une grande souplesse envers celles de la Renamo et d’autres partis d’opposition [40]). Si la candidature présidentielle de Daviz Mbepo Simango a été homologuée, son parti a été exclu des élections législatives dans sept provinces sur onze (plus les deux circonscriptions extérieures d’Afrique et d’Europe/reste du monde) et des élections provinciales dans la plupart des districts. Deuxièmement, le fait que le MDM soit le premier parti civil important de l’histoire du Mozambique – les autres n’ont jamais dépassé le stade groupusculaire – lui a paradoxalement nui. Dans les quartiers des périphéries urbaines et en brousse, tout le monde sait ce que sont le Frelimo et la Renamo, et qui sont Armando Guebuza et Afonso Dhlakama, en raison du souvenir de la « Guerre des Seize ans [41] » qui reste politiquement structurant. Simango était virtuellement inconnu dans la majeure partie du pays. Nos observations personnelles à Nampula (la capitale du Nord) le confirment : dans le Bairro central (quartier central, celui où vit l’élite), le candidat du Frelimo était très majoritaire, mais les votes en faveur de l’opposition se sont principalement portés vers le candidat du MDM. À la périphérie de la ville, il y avait encore quelques votes en faveur de Simango, déjà loin derrière Afonso Dhlakama. Enfin, dans les districts de brousse, le MDM était tout simplement inexistant, même là où il présentait des candidats aux élections provinciales. Troisièmement, le MDM n’a pas réussi à développer un discours politique novateur et alternatif. Comme les deux autres partis, il voulait promouvoir la jeunesse, remédier aux déséquilibres régionaux, lutter contre la corruption ; comme la Renamo, il revendiquait la fin de la fusion État-parti [42].
37Globalement, le MDM n’a pas réussi à remobiliser les abstentionnistes : si le taux d’abstention a un peu baissé [43], le nombre absolu des votants a crû de 32,3 % [44] et c’est le Frelimo qui en a profité. Le score de ce dernier est passé de 2004226 voix en 2004 à 2974627 en 2009 (+ 48,4 %) et a concentré à lui seul 90 % de la croissance du nombre de votants. Pour sa part, Afonso Dhlakama, quoique perdant encore plus d’un tiers de son électorat de 2004 [45] et passant de 31,74 % à 16,3 % des suffrages validés, devança largement Daviz Simango (8,6 % [46]) – condition essentielle pour éviter un ralliement massif des cadres moyens au MDM.
38Avec un résultat si modeste, on pouvait douter de la capacité de survie du MDM. Pourtant, son excellente tenue au cœur des plus grandes villes – le cœur du Frelimo, là où habite la petite classe moyenne mozambicaine mérite d’être soulignée. À Maputo, ville « ethniquement hostile », le MDM obtint près de 15 % des voix et trois de ses huit députés, ce à quoi aucun parti d’opposition n’était parvenu depuis les débuts du pluralisme. Les résultats (législatifs ou présidentiels) dans les autres grandes villes –même sans parler de Beira [47], la ville dont Simango est le maire – sont venus signaler cette même tendance naissante : une petite partie, purement urbaine, de l’électorat du Frelimo passe désormais à l’opposition, ce qu’elle n’aurait jamais pu faire si cela avait impliqué de voter pour la Renamo.
39Cependant, s’il y a là un danger potentiel pour le Frelimo, une autre « réalité massive » s’impose : ce n’est pas cette « morsure » sur l’électorat du Frelimo qui peut provoquer, seule, l’essor du MDM. Ce dernier doit capter la base sociale paysanne de la Renamo, reconstituant à son profit la bipolarisation traditionnelle de la vie politique mozambicaine. La combinaison de la captation d’une minorité urbaine « historiquement frelimiste » et d’un progrès de l’implantation paysanne pourrait avoir des conséquences considérables si le MDM sait lui donner corps par l’émergence d’un discours et d’une culture politiques alternatifs.
40De son côté, Afonso Dhlakama a réagi à sa nouvelle défaite comme les fois précédentes, dénonçant un résultat issu de la fraude. Au cours des mois antérieurs au scrutin, il avait adopté une stratégie régionale, si ce n’est ethnique, en décidant de diriger son parti à partir de Nampula, la capitale du nord, au cœur du pays macua [48]. Il ne fit campagne pratiquement que dans cette région – tactique dont on peut dire qu’elle échoua largement – et dans une désorganisation plus marquée encore que les fois précédentes. Le recul de son score ne présente pas de spécificités régionales, étant presque proportionnel à l’implantation antérieure de la Renamo (à l’exception de l’humiliation subie dans la province de Sofala – province d’origine de la rébellion – dans laquelle le Frelimo a obtenu de justesse la majorité absolue). De fait, il n’y a plus une seule province où Dhlakama et son parti obtiennent plus de 50 % des voix, même si l’avancée du Frelimo est encore freinée en Zambézie (40,8 % pour le Frelimo contre 38,8 % pour la Renamo).
41La plupart des observateurs reconnaissent l’importance de la fraude [49], sans qu’elle ait pour autant pu inverser les résultats. Joseph Hanlon affirme qu’Armando Guebuza a gagné les élections avec 65 % « réels », et non 75,2 % des voix, mais, même ainsi, il s’agit du meilleur pourcentage jamais obtenu par un candidat présidentiel du Frelimo [50]. Une autre fraude, non pointée par des missions électorales arrivées trop tard, a consisté à sous-recenser les électeurs des régions du nord qui votent plutôt en faveur de l’opposition [51]. Mais la principale raison de l’excellent pourcentage du Frelimo et de son candidat présidentiel réside d’abord dans leur pratique néopatrimoniale systématique de fusion du parti et de l’État et de l’incapacité de la Renamo à s’y opposer. À chaque fois qu’une œuvre est réalisée par l’État ou par une ONG (qui doit être autorisée par ce dernier) – école, pont, puits, dispensaire, etc. –, c’est le dirigeant local du Frelimo, systématiquement présent avec son drapeau, qui fait un discours décrivant cette offrande supplémentaire d’Armando Guebuza et du Frelimo au peuple, tandis que les partis d’opposition ne peuvent pas participer officiellement à la cérémonie. Le vote n’exprime donc pas tant l’adhésion que l’allégeance. La Renamo est incapable de lutter contre ce néopatrimonialisme, car cela exigerait d’elle un fonctionnement quotidien refusant la sélectivité inévitable du clientélisme. Or non seulement elle ne fonctionne que lors des campagnes électorales, mais elle avait elle-même cherché à développer son propre clientélisme dans les mairies qu’elle détenait de 2003 à 2008. Dresser le droit contre la faveur est donc étranger à sa culture politique et à son fonctionnement interne.
42Après les élections, Dhlakama a une nouvelle fois déclaré qu’il déclencherait une « révolution populaire » si elles n’étaient pas annulées et tenues à nouveau. L’effet de cette énième déclaration à l’identique a été pathétique. Aucune manifestation populaire n’a été appelée, à l’inverse de 2000 [52]. Dhlakama a interdit à ses députés d’accepter leur investiture mais cela lui a valu, le 5 février 2010, la révolte supplémentaire de seize parlementaires qui l’ont publiquement défié [53]. La crise du parti va de toute évidence connaître de nouveaux rebondissements. La seule victoire de Dhlakama est d’avoir obtenu un meilleur score que celui du MDM, lui permettant probablement de se présenter encore une fois en 2014, contrariant ainsi l’essor du premier parti civil important de l’histoire politique du pays.
43Le Frelimo dispose de plus des deux tiers des sièges au parlement et pourrait donc modifier à sa guise la constitution, permettant à Armando Guebuza de se présenter une troisième fois. Il n’est pas certain, cependant, que lui-même y soit favorable. La récente nomination au poste de Premier ministre de Aires Ali, ancien ministre de l’Éducation et de la Culture, ami de longue date de Guebuza mais de treize années son dauphin, pourrait marquer la préparation d’un passage de relais générationnel et d’un habile recentrage géopolitique [54]. Trop d’éléments manquent cependant pour prédire, même à moyen terme, l’évolution politique du pays : par exemple, quels seront les effets de la crise internationale actuelle sur le néopatrimonialisme du parti État-nation ? Quels seront les effets des émeutes urbaines qui risquent d’éclater si le gouvernement pratique l’augmentation « électoralement différée » du prix de l’essence et donc des transports urbains ?
44Le Frelimo, issu de la guerre paysanne de 1964-1974, peut encore gagner les élections de 2014 mais, au-delà, on ne sait s’il suivra l’exemple du Parti révolutionnaire institutionnel mexicain qui, né indirectement en 1929 de la révolution zapatiste de 1910, se maintint grâce à un clientélisme généralisé et ne perdit le pouvoir que soixante-dix ans plus tard, ou si les élections de 2014, qui verront probablement la fin de la direction politique de la génération fondatrice du Frelimo, constitueront un moment dangereux pour ce parti, confronté à un Daviz Mbepo Simango devenu un dirigeant alternatif crédible, le pays entrant dès lors dans une zone de turbulences.
Notes
-
[1]
Interrogée par Sérgio Chichava. Voir S. Chichava, Le « Vieux Mozambique ». Étude sur l’identité politique de la Zambézie, thèse de doctorat de science politique, Bordeaux, Université de Bordeaux IV/Institut d’études politiques de Bordeaux, 2007, p. 487.
-
[2]
Le texte publié ici est une version fortement réduite (merci à Luís de Brito !) et largement actualisée de l’original disponible sur <http://www.fasopo.org>. Il est le fruit de trois missions réalisées au Mozambique en 2006, 2007 et 2009, avec le soutien de l’Institut français d’Afrique du Sud, de l’Ambassade de France au Mozambique et dans le cadre d’une mission d’observation électorale.
-
[3]
Il n’est pas possible de détailler ici l’historiographie de ce débat. L’auteur a fait partie de ceux qui ont analysé le conflit comme étant devenu, au moins à partir du milieu des années 1980 (et sans doute avant), une guerre civile. Sur ce débat (et pour d’autres références bibliographiques), se reporter par exemple à deux articles publiés récemment par Politique africaine : M. Cahen, « À la recherche de la défaite. Notes sur une certaine historiographie de la “révolution” et de la “contrerévolution” au Mozambique et sans doute ailleurs », Politique africaine, n° 112, décembre 2008, p. 161-181 ; A. Dinerman, « Regarding Totalities and Escape Hatches in Mozambican Politics and Mozambican Studies », Politique africaine, n° 113, mars 2009, p. 187-210.
-
[4]
Sur les élections de 1994, voir B. Mazula (dir.), Moçambique : eleições, democracia e desenvolvimento, Maputo, Embaixada do Reino dos Paises Baixos, 1995 ; B. Mazula (dir.), Moçambique. Dados estatísticos do processo eleitoral 1994, Maputo, Secretariado técnico de administração eleitoral (STAE), 1998 ; M. Cahen, « “Dhlakama é maningue nice !” An Atypical Former Guerrilla in the Mozambican Electoral Campaign », Transformation. Critical Perspectives on Southern Africa, n 35, 1998, p. 1-48 ; L. de Brito, Cartografia eleitoral de Moçambique 1994, Maputo, Livraria Universitária, 2000 ; M. Cahen, « Mozambique : l’instabilité comme gouvernance ? », Politique africaine, n° 80, décembre 2000, p. 132-135 ; M. Cahen, Les Bandits. Un historien au Mozambique, 1994, Paris, Publications du Centre culturel Calouste Gulbenkian, 2002.
-
[5]
Le manque de transparence des opérations d’inscription électorale, d’organisation du scrutin et de dépouillement, ainsi que l’absence de publication des résultats détaillés (comme ceux de 1994 publiés en 1998) font peser un doute important sur la fiabilité des résultats électoraux. Une thèse assez largement répandue affirme que la Renamo avait bel et bien gagné l’élection présidentielle, mais non les législatives. Voir M. Cahen, « Mozambique : l’instabilité… », art. cit.
-
[6]
« General Election Results in Full », Mozambiquefile, n° 342, 2004, p. 4.
-
[7]
Sur l’analyse de la Renamo comme corps social guerrier, voir C. Geffray, La Cause des armes au Mozambique. Anthropologie d’une guerre civile, Paris, Karthala, 1990 ; M. Cahen, Mozambique, analyse politique de conjoncture 1990, Paris, Indigo Publications, 1990. Sur le concept de corps social, voir C. Meillassoux, « Du bon usage des classes sociales », in B. Schlemmer (dir.), Terrains et engagements de Claude Meillassoux, Paris, Karthala, 1998, p. 7-59.
-
[8]
Sur la démobilisation des appareils militaires mozambicains en 1993-1994, voir C. Messiant, « La paix au Mozambique : un succès de l’ONU », in R. Marchal et C. Messiant, Les Chemins de la guerre et de la paix. Fins de conflits en Afrique orientale et australe, Paris, Karthala, 1997, p. 49-106.
-
[9]
Pour plus de détails sur la trajectoire de la Renamo, voir C. Geffray, La Cause des armes…, op. cit. ; A. Vines, Renamo. Terrorism in Mozambique, Londres/Indianapolis, James Currey & Bloomington/ Indianapolis University Press, 1991 ; Human Rights Watch, Conspicuous Destruction. War, Famine and the Reform Process in Mozambique, New York, HRW, 1992 ; W. Finnegan, A Complicated War. The Harrowing of Mozambique, Berkeley, University of California Press, 1992 ; J. -C. Legrand, « Logique de guerre et dynamique de la violence en Zambézia, 1976-1991 », Politique africaine, n° 50, juin 1993, p. 88-104 ; M. Hall et T. Young, Confronting Leviathan. Mozambique since Independence, Londres, Hurst, 1997 ; M. Cahen, « “Entrons dans la nation ! ” Notes pour une étude du discours politique de la marginalité. Le cas de la Renamo du Mozambique », Politique africaine, n° 67, octobre 1997, p. 70-88 ;
C. L. Manning, « Constructing Opposition in Mozambique : Renamo as a Political Party », Journal of Southern African Studies, vol. 24, n° 1, 1998, p. 161-169 ; C. L. Manning, The Politics of Peace in Mozambique : Post-Conflict Democratization 1992-2000, Londres, Praeger, 2002, ; M. Cahen, Les Bandits…, op. cit. ; D. A. Robinson, Curse on the Land. A History of the Mozambican Civil War, thèse de doctorat d’histoire, Perth, University of Western Australia, 2006. -
[10]
Comme l’a montré Christian Geffray, les bases militaires de la Renamo avaient des liens avec les civils, par le biais des chefs traditionnels et de leurs milices, les mudjibas (ou mujeebas), mais il s’agissait uniquement de répondre aux besoins des bases et non de gestion des civils. Voir C. Geffray, La Cause des armes…, op. cit.
-
[11]
On n’entrera pas ici dans la discussion sur la nature traditionnelle ou coloniale desdits chefs.
-
[12]
Divers documents internes de la Renamo du début des années 1980, consultés par nous.
-
[13]
La Renamo est la section mozambicaine de l’Internationale chrétienne-démocrate.
-
[14]
Sur la composition ethnique des électorats de la Renamo et du Frelimo, voir M. Cahen, « Nationalisms and Ethnicities. Lessons from Mozambique », in E. Braathen, M. Bøås et G. Sæther, Ethnicity Kills ? The Politics of War, Peace and Ethnicity in Subsaharian Africa, Londres/New York, MacMillan/St. Martin’s Press, 2000, p. 163-187.
-
[15]
Une abondante littérature existe sur ces premières élections municipales pluralistes. Voir notamment E. Braathen et B. Viige Jørgensen, « Democracy with out People ? Local Government Reformand 1998 Municipal Elections in Mozambique », Lusotopie, vol. 5, 1998, p. 31-38 ; B. Lachartre, « Élections municipales et démocratisation au Mozambique », Politique africaine, n° 75, octobre 1999, p. 162-170 ; C. Serra (dir.), Eleitorado incapturável. Eleições municipais de 1998 em Manica, Chimoio, Beira, Dondo, Nampula e Angoche, Maputo, Livraria Universtária.
-
[16]
Les cas d’Angoche, d’Ilha de Moçambique et de Nacala Porto en 1998 sont analysés en détail par Domingos do Rosário, Les Mairies des “autres”. Une analyse politique, socio-historique et culturelle des trajectoires locales. Le cas d’Angoche, de l’Île de Moçambique et de Nacala Porto, thèse de doctorat de science politique, Bordeaux, Université Montesquieu Bordeaux IV/Institut d’études politiques de Bordeaux, 2009, p. 406-436.
-
[17]
Afonso Dhlakama n’a jamais caché que le temps consacré au travail parlementaire aurait par trop empiété sur le temps nécessaire au « contrôle du parti ». Entretien avec Afonso Dhlakama, Maputo, 12 septembre 2006.
-
[18]
Celui-ci créa son propre parti, le Partido democrático para o desenvolvimento (PDD, parti démocratique pour le développement), qui n’obtint aucune représentation parlementaire aux élections de 2004.
-
[19]
M. Cahen, « Mozambique : l’instabilité… », art. cit.
-
[20]
Sur les élections municipales de 2003 à Nacala, Ilha de Moçambique et Angoche, se reporter à D. do Rosário, Les Mairies…, op. cit.
-
[21]
En référence au nom du premier président de la République, Samora Machel.
-
[22]
Sur l’oubli volontaire du passé révolutionnaire à partir de 1990, allant croissant à partir de 1999, voir M. A. Pitcher, « Forgetting from Above and Memory from Below. Strategies of Legitimation and Struggle in Postsocialist Mozambique », Africa, vol. 76, n° 1, 2006, p. 88-112 ; A. Dinerman, « Independence Redux in Postsocialist Mozambique », Revista Relações Internacionais, n° 15, 2007, disponible en ligne sur <http://www.ipri.pt> ; A. Isaacman et C. Sneddon, Portuguese Colonial Intervention, Regional Conflict and Post-colonial Amnesia : Cahora Bassa Dam, Mozambique, 1965-2002, communication à la « Conférence on Lusophone Africa : Intersection between the Social Sciences », Cornell Institute for African Development, mai 2003. Il est à noter que ce tournant discursif ne renvoie pas nécessairement à un changement dans la culture politique du Frelimo, qui se voit toujours comme le seul vecteur de la nation et, logiquement, se veut le représentant de la totalité du pays.
-
[23]
S. Chichava, « Por quê Moçambique é pobre ? » Uma análise do discurso de Armando Guebuza sobre a pobreza, Maputo, IESE, 2009.
-
[24]
Entretiens avec David Aloni, Matola, 11 septembre et 23 octobre 2006, 13 septembre 2007 ; entrevue avec Francisco Sanamaria, Tete, 30 septembre 2006 ; entrevues avec Linette Olofsson, Maputo, 12 septembre 2006 et 17 septembre 2007.
-
[25]
En effet, comme le reconnaît le Conseil constitutionnel lui-même, depuis le recensement de 1999 (7099105 électeurs), les actualisations n’ont fait qu’ajouter de nouveaux inscrits (1298155 nouveaux électeurs en 2003, 1245971 en 2004), sans que les morts ou ceux qui avaient déménagé et s’étaient inscrits ailleurs ne soient radiés… Le taux d’abstention « réel » s’élèverait à 56,4 % pour les deux scrutins simultanés.
-
[26]
Dont André Matsangaissa, fondateur de la Renamomort au combat en 1979, et Afonso Dhlakama sont respectivement originaires.
-
[27]
« Gazalândia » (Gazaland) fait référence à l’ancien empire nguni du Gaza, présent sur l’essentiel de la partie sud du Mozambique du premier tiers du xixe siècle à 1895. Les Changanes, qui ont formé le cœur du Frelimo, sont considérés comme les héritiers des Ngunis et donc de l’empire de Gaza, c’est-à-dire d’un État loin de pouvoir représenter l’ensemble des Mozambicains d’aujourd’hui.
-
[28]
Rappelons que la Renamo avait, en 2003, remporté à Beira, Angoche, Ilha de Moçambique et Nacala à la fois la présidence du conselho et de l’assembleia municipal, tandis qu’à Marromeu elle avait remporté la présidence du conselho mais pas la majorité à l’assembleia.
-
[29]
Dans la tradition juridique portugaise, la municipalité est dotée de deux structures : un exécutif (conselho municipal) et une assemblée « législative » (assembleia municipal).
-
[30]
La population urbaine de longue date de l’ancien sultanat, quine s’est jamais vraiment mélangée avec les Macuas installés plus tardivement dans la ville.
-
[31]
J. Hanlon, « Decentralisation. Controversy over MT 7 mn for District Job Creation », Mozambique Political Process Bulletin, n° 34, 6 juillet 2007, p. 6-7 ; S. Cadete Forquilha, Reformas de descentralização e redução da pobreza num contexto de Estado neo-patrimonial. Um olhar a partir dos Concelhos Locias e OILL em Moçambique, communication à la iie conférence de l’Instituto de estudos sociais e económicos, Maputo, 22-23 avril 2009.
-
[32]
Entrevue avec Daviz Mbepo Simango, Maputo, 12 septembre 2007.
-
[33]
Sérgio Chichava considère qu’Afonso Dhlakama savait pertinemment que Simango passerait outre et que Pereira obtiendrait un piètre résultat – les écartant ainsi tous deux d’une seule et même manœuvre. Voir S. Chichava, Eneas Comiche e Daviz Simango : porque « cairam » ?, Maputo, IESE, 2008.
-
[34]
D. do Rosário, Les Mairies…, op. cit., p. 547.
-
[35]
Correspondances électroniques de Linette Olufsson (participante au congrès fondateur et membre du Conseil national), 13 et 14 mars 2009 ; dépêche de l’Agence Lusa, 12 mars 2009.
-
[36]
Sur les raisons historiques de la bipolarisation politique au Mozambique, voir M. Cahen, « Lutte armée d’émancipation anticoloniale ou mouvement de libération nationale ? Processus historique et discours idéologique. Le cas des colonies portugaises, et du Mozambique en particulier », Revue historique, n° 637, 2006, p. 113-138.
-
[37]
Voir infra pour l’aspect non significatif de ce pourcentage très réduit.
-
[38]
La loi n’a pas été modifiée suite à la naissance du MDM. La CNE et les CDE incluent des délégués des partis ayant une représentation parlementaire. Or si nombre de députés de la Renamo étaient passés au MDM à la fin de la législature, ils ont continué à être considérés comme députés Renamo, privant ainsi le MDM d’observateurs dans les CDE et la CNE.
-
[39]
Les certificats de résidence nécessaires au dépôt des candidatures ne sont parfois « pas parvenus à temps » aux candidats du MDM. Ce parti a sans doute souffert de ce problème également en raison de sa faible préparation interne, mais la Renamo aussi a eu des candidats non conformes.
-
[40]
Un parti (Parti de la liberté et du développement) créé quelques semaines avant les élections et qui n’était même pas encore légalisé (statuts non publiés au Journal officiel) a ainsi pu présenter des listes dans presque toutes les provinces, n’ayant eu aucune difficulté à y trouver des candidats munis de certificats de résidence.
-
[41]
Cette expression chronologiquement correcte (1977-1992) a été forgée par l’Église catholique dans une optique de réconciliation, afin de ne pas avoir à choisir entre les concepts de « guerre de déstabilisation » (ourdie par l’apartheid, etc.) et « guerre civile » (nourrie par une révolte interne).
-
[42]
S. Chichava, Movimento democrático de Moçambique (MDM) : uma nova força política na democracia moçambicana ?, à paraître.
-
[43]
Les taux officiels d’abstention aux élections présidentielle et législatives sont respectivement de 55,4 % et 55,6 %, effectivement moindres que ceux, officiels également, de 2004 (63,6 et 63,7 %). Toutefois, la différence réelle est peut-être moindre puisque le taux de 2004 serait, selon J. Hanlon, de 56,4 % (voir note 25).
-
[44]
Le nombre d’inscrits est passé de 9 142 151 en 2004 à 9 871 949 en 2009 (+8 %) ; celui des votants, de 3 329 167 en 2004 à 4 406 093 en 2009 (+ 32,3 %).
-
[45]
Son score en valeur absolue passe de 998 059 voix en 2004 à 650 679 en 2009 (- 34,8 %).
-
[46]
Le score national du MDM aux législatives (3,9 %) n’a pas de signification, puisque ce parti a été exclu du scrutin dans les trois quarts des provinces.
-
[47]
Simango obtient près de 26 % des voix pour tout le district et la majorité absolue à Beira (nous n’avons pu obtenir le résultat définitif que pour cette ville).
-
[48]
Les Macuas sont le principal groupe ethnique du pays (environ 35 % de la population) et se sentent souvent méprisés par le Frelimo et les « gens du sud », n’ayant qu’assez faiblement participé à la lutte armée anticoloniale. De par la loi, les partis doivent avoir leur siège social dans la capitale, mais cela n’impose pas au lider d’y résider.
-
[49]
Voir notamment le communiqué de la Mission d’observation électorale de l’Union européenne sur des fraudes dans 71 districts : « A MOE UE observou numerosas irregularidades durante o apuramento sem que, no entanto, estas afectem significativamente os resultados », Maputo, 18 novembre 2009. Voir le rapport final sur <http://www.eueom-mozambique.eu/PT/Final_Report.html>. Voir également Mozambique Political Process Bulletin, Maputo, CIP-AWEPAA, n° 44, 11 janvier 2010, qui synthétise les divers rapports de missions d’observation.
-
[50]
Le candidat présidentiel du Frelimo avait obtenu en 1994, 1999 et 2004 respectivement 53,3 %, 52,3 % et 63,7 % des suffrages.
-
[51]
Des ordinateurs servant au recensement électoral étaient inutilisables faute de chargeurs, mais cela semble s’être produit plus dans le nord que dans le sud, etc.
-
[52]
Voir supra et M. Cahen, « L’instabilité… », art. cit.
-
[53]
« Grupo de 16 deputados desafia publicamente Afonso Dhlakama », Canal Moz, 5 février 2010.
-
[54]
Ali est né au Niassa, dans le nord. Son arrivée au plus haut poste de l’État constituerait de ce point de vue une première.