Notes
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[1]
ICG, L’Effet Mandela. Évaluation et perspective du processus de paix burundais, avril 2000. Voir aussi : HRW (Human Rights Watch), Burundi. La justice doit faire partie du processus de paix, avril 2000 ; HRW, Burundi. Vider les collines. Camps de regroupement au Burundi, juin 2000 ; S. R.Weissman (USIP), Preventing Genocide in Burundi. Lessons for International Diplomacy, juillet 1998 ; L. Reychler et al. (université de Leuven), Le Défi de la paix au Burundi. Théorie et pratique, Paris, L’Harmattan, 1999.
-
[2]
Voir J.-P. Chrétien, « Ethnicité et politique : les crises du Rwanda et du Burundi depuis l’Indépendance », Guerres mondiales et conflits contemporains, n° 181, Paris, PUF, printemps 1996, pp. 111-124.
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[3]
L. Saur, Influences parallèles. L’Internationale démocrate-chrétienne au Rwanda, Bruxelles, Luc Pire, 1998.
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[4]
En mai 1997 Burundi-Bureau justifie par exemple le massacre de 40 écoliers au petit séminaire de Buta en reprenant la thèse CNDD d’une prétendue « position militaire ».
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[5]
En outre frère du leader du Frodebu modéré, Augustin Nzojibwami !
-
[6]
Rappelons (car ce cliché a la vie dure) que le lobby de Bururi n’est pas un « groupe hima », que les Bahima sont présents dans toutes les régions du pays et que la plupart des leaders tutsi de Bururi sont de clans non hima.
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[7]
Voir J.-P. Chrétien, Le Défi de l’ethnisme. Rwanda et Burundi, 1990-1996, Paris, Karthala, 1997 ; et aussi J.-P. Chrétien, A. Guichaoua et G. Le Jeune, « La crise d’août 1988 au Burundi », Cahiers du CRA, n° 6, Afera-Karthala, 1989.
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[8]
Ces deux clauses sont étonnantes : vu l’absence actuelle de véritable front (contrairement à ce qui se présentait au Rwanda en 1993), la première permettrait aux mouvements rebelles de se constituer in extremis des zones dites « libérées » ; quant à l’amnistie, elle va à l’encontre du refus de l’impunité exprimé par ailleurs.
-
[9]
Contestés par les forces rebelles le 24 septembre.
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[10]
Une déclaration de l’Union européenne du 19 octobre va en ce sens.
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[11]
Le responsable de l’Afrique à Human Rights Watch, Peter Takirambudde. Le 16 août dernier, un éditorial du Monde évoquait la même analogie entre Burundi et Sierra Leone en dénonçant la nouvelle tendance internationale à prétendre régler les conflits à coups d’amnistie.
-
[12]
Comme dans la Constitution ougandaise de 1995, qui mentionne dans son préambule l’expérience de dix ans de guerre civile.
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[13]
L’État est empêtré dans la montée de la corruption liée à une économie de guerre et dans sa disqualification face aux ONG (en 1997 le budget total des ONG en activité au Burundi équivalait à 36 % du budget de l’État).
1Depuis que Nelson Mandela a obtenu la signature d’un accord le 28 août dernier, doit-on être optimiste pour le Burundi ? La guerre civile ouverte en octobre 1993 par le putsch qui a coûté la vie au président hutu Melchior Ndadaye et par les tueries systématiques de paysans tutsi qui ont suivi a connu une nouvelle virulence depuis juin 1999 : embuscades sur les routes, assassinats de cadres administratifs, attaques dans des quartiers périphériques de la capitale, tueries de Tutsi et représailles contre des Hutu. L’opinion publique attend toujours une justice réelle pour les putschistes comme pour les « génocidaires » de 1993. L’économie est dans le marasme le plus complet, à la suite du blocus imposé par les États de la région entre juillet 1996 et janvier 1999, la misère est à son comble, contrastant avec l’enrichissement des profiteurs du blocus (dans les pays voisins et au Burundi même), la scolarisation, la santé, la nutrition ont fait un bond en arrière de plus de dix ans, la démocratisation politique et l’ouverture ethnique amorcées depuis 1988 et qui semblaient triompher en 1992-1993 ont échoué, laissant un goût amer à une société sans perspective d’avenir claire. Le nombre des exilés a crû de manière significative dans tous les milieux et la fuite des cerveaux (médecins, professeurs, juristes, ingénieurs...) frappe un pays qui n’avait pratiquement jamais connu cela.
Un pion sur un échiquier régional
2La place accordée au Burundi par les partenaires extérieurs apparaît comme celle d’un cobaye de la conflict resolution, comme si l’échec majeur éprouvé au Rwanda devait être compensé par une réussite dans ce cas jugée plus flexible. L’ONG International Crisis Group (ICG) l’observe sans ambages dans son rapport d’avril dernier : la communauté internationale et la région « avaient dans l’esprit de faire du Burundi un laboratoire d’expérimentation pour les solutions africaines aux problèmes africains dans la région des Grands Lacs [1] ». Mais le désir de réussir à tout prix a fait oublier la complexité spécifique d’une situation historique.
Un autre Rwanda ?
3Tout se passe comme si, depuis 1994, on envisageait, en guise d’issue partagée, un « Burundi hutu » face à un « Rwanda tutsi », en figure inversée de la situation antérieure. Cette tendance apparaît dans une formulation que résume ICG à propos de la maladresse supposée purement diplomatique des propos agressifs tenus à Arusha en février 2000 par Nelson Mandela contre le régime de Buyoya : il avait « critiqué les Tutsi, alors que ce sont eux qui ont tout à céder ». Si le retour à la paix au Burundi est vu en termes de concessions unilatérales d’un camp ethnique à l’autre, laissant supposer qu’il n’y a pas de torts partagés, d’engagements réciproques forts et aussi de subdivisions et de recoupements plus subtils des intérêts, le processus en cours ne peut que buter sur l’inquiétude ou le scepticisme. Les quotas ethniques évoqués dans les négociations pour le nouveau Burundi sonnent étrangement comme un retour au modèle de la république hutu rwandaise sous Habyarimana.
4Le rapprochement avec la situation rwandaise est évidemment incontournable. On observe dans les deux cas un écho permanent des événements du pays voisin [2], mais plutôt sous la forme d’un chassé-croisé depuis les années 50. Le Burundi part d’une situation où le clivage hutu-tutsi ne jouait pas un rôle décisif, en fonction de ses héritages tant anciens que coloniaux. C’est au fil des crises que la vie politique et, progressivement de haut en bas, tout le corps social ont été touchés par une ethnisation de plus en plus virulente au profit d’une couche dirigeante tutsi. Au Rwanda, l’antagonisme était extrême à la fin des années 50 ; il a inspiré l’idéologie du régime républicain au profit d’une bourgeoisie hutu, et c’est à la fin des années 80 qu’une nouvelle génération prend conscience des limites de cette obsession et du blocage qu’elle représente sur la voie de la démocratisation. C’est donc au moment où le Rwanda secouait le fétichisme ethnique que le Burundi s’est mis à songer à une solution « démocratique » à la rwandaise. Le parti Frodebu, vainqueur aux élections de juin 1993, était parcouru de courants contradictoires sur ce plan, mais son arrivée au pouvoir a été menée par beaucoup de leaders formés dans le Rwanda de Habyarimana et a été en outre aiguillonnée en sous-main par le parti ultra-ethniste Palipehutu. Si bien que le Burundi s’est peu ou prou retrouvé à la case départ de la « révolution sociale » rwandaise : l’ouverture politique et le rééquilibrage « ethnique » de la société ont été menés en toute méconnaissance de l’échec du régime rwandais. Paradoxes d’une démocratisation nécessaire piégée par une histoire régionale et empêtrée dans le repliement ethniste.
5Ce mélange de changement et de régression explique ces situations déroutantes où l’on voit des participants au génocide du Rwanda en 1994 se présenter en tenants de la démocratie au Burundi en 2000 et en « combattants de la liberté » (pour reprendre une expression discutable de Nelson Mandela).
Géopolitique régionale et réseaux internationaux
6Depuis le printemps de 1996 (donc avant le retour de Buyoya au pouvoir) s’est cristallisée une concertation régionale des États de l’Afrique centrale et orientale. Dix sommets sur le Burundi ont eu lieu de juin 1996 à août 2000. Ils accompagnent l’action du médiateur, d’abord Julius Nyerere, choisi en mars 1996 à l’issue des réunions du Caire et de Tunis initiées par la fondation Carter, puis Nelson Mandela, choisi lors du 8e sommet en décembre 1999. À l’arrière plan, ce que l’on appelle la « communauté internationale » est présente, moralement et aussi financièrement : l’Union européenne, les États-Unis, l’OUA, l’Onu elle-même suivent l’évolution des choses. Il est significatif de voir, quatre jours après le décès de Nyerere en octobre 1999, se tenir à New York une réunion restreinte de huit envoyés spéciaux d’instances internationales concernées pour discuter de l’avenir de la médiation au Burundi. Mais cette ébauche de tutelle internationale ne doit pas cacher les intérêts particuliers qui font du Burundi un enjeu et pas seulement un pupille.
7La Tanzanie a accueilli l’essentiel des sommets régionaux et des rencontres de négociateurs burundais à Mwanza en avril-juin 1996, puis à Arusha entre décembre 1996 et août 2000. L’administration de la médiation, menée par le juge Mark Bomani, dans le cadre de la fondation Nyerere, n’a pas été modifiée sous le mandat de Mandela. Pour ce pays pauvre, difficilement sorti des pesanteurs de son ancienne dictature socialisante, mais auréolé du prestige d’ancien leader de la Ligne de front contre l’apartheid, ce rôle diplomatique a des avantages moraux, financiers, éventuellement militaires. À plusieurs reprises depuis juin 1996 la Tanzanie est apparue comme un gendarme potentiel de la crise burundaise. À Dar es-Salaam, dans le cadre des rivalités politiques internes entre l’ancien parti unique CCM et l’opposition, certains n’hésitent pas à évoquer l’ancienne grande Tanzanie, celle de la Deutsch-Ostafrika sous protectorat allemand, incluant le Burundi et le Rwanda. Un lobby pro-hutu existe, illustré par des propos virulents tenus autrefois par le ministre des Affaires étrangères Kikwete ou par le secrétaire général du CCM, l’ancien Premier ministre Malecela. Certes, des intérêts locaux bien placés ont couvert une contrebande non négligeable vers le Burundi en plein embargo, notamment celle du carburant, mais à plusieurs reprises des incidents de frontière ont éclaté entre forces militaires des deux pays, et l’administration de la région de Kigoma a manifestement fermé les yeux sur les attaques menées depuis la série de camps de réfugiés hutu situés à 20 ou 30 kilomètres de la frontière burundaise : ce fut le cas durant le deuxième semestre de 1997, alors que les rebelles des FDD s’y étaient repliés du Zaïre après la chute du régime Mobutu, et de nouveau depuis juin 1999 où un afflux d’éléments FDD venus du Congo a généré des attaques dans l’est et le centre du pays. Encore en octobre 2000 des troupes tanzaniennes ont été déployées sur la frontière burundaise, sous prétexte de protéger les camps de réfugiés.
8D’autre part, on ne peut traiter la question burundaise en oubliant les déchirements du Congo. ICG le notait bien dans son rapport d’avril : « On peut douter que le petit Burundi réussisse seul le pari de la paix dans une région où tous les conflits internes se sont exportés en RDC. » Même observation le 16 août dernier dans le Berliner Tageszeitung sous la plume avertie de Dominic Johnson : « Tous les terrains de crise s’articulent les uns aux autres et un échec à un endroit engendre des crises dans les autres […] selon une spirale de la violence. » De fait, depuis juillet 1998, les FDD (représentant environ 15000 hommes) dirigées par Jean-Bosco Ndayikengurukiye, en rupture avec son ancien patron Léonard Nyangoma, ont rejoint les forces de Kabila dans le cadre de la deuxième guerre du Congo et elles ont reçu des soutiens matériels du Zimbabwe. Les accords de Lusaka de juillet 1999 les ont en principe disqualifiées, mais la non-application de ces accords garde toute son actualité au désir de Kabila de les utiliser pour déstabiliser le Rwanda par le sud. Enfin, le conflit congolais a renforcé les liens entre rébellions burundaise et rwandaise.
9Cela conduit à réfléchir sur l’attitude de l’Ouganda et du Rwanda. Ces deux pays ont appliqué en son temps l’embargo de manière souple. Yoweri Museveni, qui reprochait à Pierre Buyoya d’avoir hâtivement introduit le multipartisme en 1992 et qui n’oubliait pas l’aide apportée jadis à son mouvement (la NRA) par l’ancien président Bagaza, a une préférence pour ce dernier. Cela étant, l’armée burundaise est intervenue au Sud-Kivu depuis la fin d’août 1998 et a étendu son contrôle sur la rive sud-ouest du lac Tanganyika. Elle représente donc un élément du dispositif des forces rebelles au pouvoir de Kabila et, à ce titre, elle ne peut échapper à la sollicitude de ses alliés de fait, Rwanda et Ouganda, comme l’attestent la commission mixte burundo-rwandaise de juillet 1999 et les visites de Buyoya à Kigali et à Kampala en septembre suivant. Cependant, les rapports ne sont pas simples, contrairement à ce que suggèrent les slogans sur le projet d’« empire hima », censé unir diaboliquement les dirigeants des trois pays. Les relations des Burundais avec les Tutsi rwandophones du Sud-Kivu dits « Banyamulenge » sont bien plus cordiales que celles assurées de gré ou de force par les Rwandais, qui les instrumentalisent. Surtout, depuis l’été 1999, les affrontements entre Rwandais et Ougandais en région de Kisangani ont rendu la position du Burundi délicate, mais finalement l’ont plutôt avantagée, les deux frères ennemis ayant tendance à courtiser ce partenaire. Cela a été sensible lors des pourparlers ultimes tenus à Arusha le 28 août dernier.
10La situation régionale est donc loin d’être figée sur des clivages simples, mais à tout moment des drames mal contrôlables peuvent éclater. En effet l’atmosphère générale est lourde de passions ethniques qui atteignent la dimension d’un racisme continental opposant « Bantous » et « Nilotes », selon la logomachie qui envahit aujourd’hui les médias congolais.
11Reste l’Afrique du Sud à qui l’on attribuerait volontiers le rôle de nouveau parrain de la région, en fonction de sa pénétration commerciale et financière et du prestige personnel de Nelson Mandela. Mais cette influence est évidemment contestée par le Congo de Kabila et par le Zimbabwe. Museveni se réserve toujours, malgré ses ennuis au Congo et en Ouganda même, le rôle de nouvelle autorité morale de la région après la mort de Nyerere. Enfin, il n’est pas sûr que les positions idéologiques de Mandela et les positions politiques du gouvernement de son successeur soient automatiquement alignées.
12On ne peut terminer ce tour d’horizon de l’échiquier des partenaires de la crise burundaise sans évoquer les forces qui s’y sont fortement impliquées hors d’Afrique, notamment sur le plan idéologique :
- les réseaux chrétiens-sociaux belges, implantés essentiellement en Flandre, incarnés par des ONG liées au parti CVP et qui ont déterminé les positions de l’Internationale démocrate-chrétienne dans les années 90 [3]. Ils agissent par des périodiques, des bourses d’études, des activités caritatives, mais aussi du lobbying politique. Il ne faut pas oublier que, dans son agenda initial, le médiateur Julius Nyerere s’est rendu à Bruxelles en mai 1996 où il a rencontré longuement une coordination des représentants de ce réseau d’ONG structurées à l’époque en un cartel intitulé « Action Burundi » et qui militait sans nuances pour une intervention étrangère en faveur du Frodebu. Leur influence a été affaiblie par l’alternance politique actuelle en Belgique ;
- des réseaux implantés en Rhénanie et qui, à l’instar des précédents, sont surtout en phase avec des milieux chrétiens nostalgiques de l’ancien régime rwandais (un partenariat actif existait entre le Land de Rhénanie-Palatinat et le Rwanda sous Habyarimana). Ils s’expriment surtout à travers le site Internet Burundi-Bureau, édité par l’association Aktion-Courage en allemand, français et néerlandais. Il est géré par des réfugiés burundais liés étroitement au CNDD, y compris l’ancien ambassadeur à Bonn Albert Mbonerane, récemment proposé à Arusha par cette formation pour gérer la transition [4] ;
- un réseau protestant abritant au Danemark l’équipe dirigeante du parti Palipehutu depuis les années 70 et qui s’est signalé en avril 1994 par son attitude négationniste à l’égard du génocide rwandais.
Un conflit « politico-ethnique » démultiplié
13Parallèlement aux violences sélectives qui sèment périodiquement la mort dans le pays, les négociations elles-mêmes ont contribué à mettre en scène le duel « interethnique », notamment à partir de mai 1999 quand Julius Nyerere favorisa la cristallisation des « groupes » à base ethnique, le G7 hutu, auquel répondit le G8 (puis le G10) tutsi. Le discours musclé de Mandela a apparemment suivi la même logique et, lors de la signature de l’accord du 28 août 2000, on voit les formations à dominante tutsi (l’Uprona de Buyoya, de petits partis et le Parena de Bagaza) se mettre d’accord sur des réserves.
Les cibles et les victimes
14Cela étant, la situation burundaise n’a pas la limpidité d’une bande dessinée. Historiquement, les torts sont éminemment partagés : ni ange ni démon, chaque composante peut se reprocher des crimes au cours de toutes les crises qui se succèdent de 1965 à 1993, avec deux moments tragiques de passage au génocide, en mai-juin 1972 contre les Hutu, en octobre 1993 contre les Tutsi. Mais on ne peut opposer sans nuances deux blocs homogènes. Le Burundi n’a pas connu le clivage officiel du Rwanda et l’antagonisme a toujours été ressenti comme honteux. Les liens entre Hutu et Tutsi restent nombreux au sein de cette société meurtrie, mais pas totalement disloquée, et les divisions sont également très réelles au sein de chaque prétendue « communauté ».
15Les leaders et la majorité des députés du « parti tutsi » Uprona sont des Hutu (pour les deux fractions de ce parti scindé depuis octobre 1998, ailes Rukingama et Mukasi). La majorité des victimes des forces rebelles sont ces derniers temps des Hutu, pillés, malmenés ou tués quand ils refusent de contribuer à leur action. De nombreux cadres administratifs hutu se font tuer. Près de 40% des soldats sont d’ores et déjà des Hutu et, parmi les 27 élèves officiers de l’Iscam victimes de la rébellion en août dernier, 5 étaient des Hutu. Lors des massacres qui ont suivi la mort du président Ndadaye en octobre 1993 au titre de la « colère populaire », des familles entières ont été tuées aussi en milieu hutu parce qu’un de leurs membres appartenait à l’armée ou au parti Uprona.
16Les forces rebelles, quant à elles, sont réparties en trois formations au moins : le FNL, issu du Palipehutu, dans l’ouest du pays, les FDD issues du CNDD dans l’est et le centre, le Frolina au sud. Durant l’été 1997, les maquisards FNL ont terrorisé des populations de la province de Bubanza ralliées aux FDD. Plus récemment, en février 2000, le même FNL a massacré des miliciens rwandais qui avaient rejoint ses rangs. Par ailleurs, il y a la scission entre le CNDD dirigé par Léonard Nyangoma et les FDD menées par Jean-Bosco Ndayikengurukiye (un ancien officier de l’armée [5]) depuis 1998. La même division entre « politiques » et « militaires » existe au Palipehutu, où le vieux leader Étienne Karatasi n’est plus suivi par Kossan Kabura. Enfin, le Frodebu a éclaté en deux tendances également depuis 1998, les uns acceptant le « partenariat » avec le président Buyoya (la tendance d’Augustin Nzojibwami), les autres restant fidèles au leader en exil, le docteur Jean Minani, président d’un éphémère gouvernement à Kigali en octobre 1993.
17Du côté tutsi, l’unanimité n’est pas plus de règle. Les groupes favorables à la politique de partenariat et de négociation de Buyoya apparaissent comme minoritaires face à la méfiance de nombreux Tutsi. L’Uprona de Charles Mukasi trouve écho dans les associations de lutte contre le génocide AC-génocide-Cirimoso, présidée par le professeur Venant Bamboneyeho, et PA (Puissance d’autodéfense) Amasekanya, fondée en 1995 par Diomède Rutamuceru, qui commémorent le 21 de chaque mois les victimes du génocide de 1993 (notamment les collégiens de Kibimba brûlés vifs le 21 octobre). Leurs manifestations se sont souvent heurtées à la police et leurs leaders ont effectué plusieurs séjours en prison.
18Face aux tentatives de rapprochement des modérés à l’ombre de Buyoya, on observe des calculs d’alliance des extrêmes (tutsi et hutu) sous l’égide de l’ancien président Bagaza, exilé en Ouganda depuis 1998, chacun pensant tirer son épingle du jeu. Les crispations ethniques peuvent donc répondre à des logiques très différentes : tribalismes fondés sur des calculs politiques ou ethnismes inspirés par la peur. Ces logiques se retrouvent enchevêtrées dans chacune des entreprises de regroupement destinées en principe à reconstruire la vie nationale. La convention de gouvernement de septembre 1994 s’est effondrée sous l’effet des extrémismes, mais aussi des doubles langages des parties contractantes. Le « partenariat » mis en place en juin 1998 ne fonctionne guère mieux. Mis en difficulté par la logique des « groupes » G7 et G8 en 1999, il a resurgi d’une certaine façon avec la « Convergence nationale pour la paix et la réconciliation », renégociée entre Uprona et Frodebu (tendances Rukingama et Nzojibwami) en octobre 1999 pour se trouver confrontée à partir de décembre à l’Anac (Alliance nationale pour le changement) bricolée entre Bagaza et Minani.
19Cependant, à l’occasion de la signature de l’accord d’Arusha, on a vu s’exprimer aussi une solidarité des responsables de l’intérieur face aux leaders en exil. Les parlementaires du Frodebu, toutes tendances confondues, se retrouvèrent pour refuser l’éventualité d’être remplacés par des élus partis en exil depuis 1994. D’autre part, les responsables politiques, quels qu’ils soient, ont du mal à dissimuler leur méfiance à l’égard des revendications virtuelles des maquisards et de leurs cadres.
20Il faut enfin souligner un autre clivage susceptible de compliquer la situation (ou au contraire de lui donner plus de flexibilité ?), celui des « régionalismes », qui déchire le pays depuis la fin des années 60 de manière presque aussi grave que le clivage dit « ethnique ». Le pouvoir est dominé sans conteste depuis 1971 par des groupes tutsi issus de la province méridionale de Bururi. Ce lobby, auquel ont appartenu les trois présidents militaires (Micombero, Bagaza et Buyoya), contrôle la majorité des officiers ainsi que des secteurs importants du monde des affaires et de la vie politique. Le changement de 1993 avec l’élection de Ndadaye représentait un tournant sur le plan ethnique, mais aussi sur le plan régional, le nouveau président étant de la commune de Nyabihanga, au centre du pays. Les événements de 1993 et des années suivantes peuvent aussi se déchiffrer selon cette grille (comme au Rwanda avec l’antagonisme entre Nord et Sud) : les responsables du putsch étaient clairement des éléments durs du Sud. Les Tutsi du nord, du centre et de l’est du pays se plaignent des lenteurs de l’armée lors des massacres d’octobre 1993. Les éléments dits « tutsi extrémistes », tels les jeunes qui organisèrent les « journées ville morte » à Bujumbura en 1994-1995 ou les militants des associations antigénocidaires, sont majoritairement issus de ces régions éprouvées.
21Ce contentieux est assez grave pour qu’à plusieurs reprises des leaders du Frodebu aient tenté de les opposer à l’armée. Mais la question régionaliste se retrouve aussi dans les rangs des formations hutu avec l’existence, tant au Frodebu légal que dans les rangs du CNDD, d’un lobby du Sud, dont les principaux leaders viennent de la commune de Songa. Ce groupe s’est rendu célèbre autant par son activité financière et commerciale que par son activisme politique. Les scissions des formations hutu reposent en partie sur ce clivage. Pour couronner le tout, un décompte des origines régionales des délégués aux négociations d’Arusha, toutes formations confondues, fait apparaître que près des deux tiers sont originaires de Bururi. Cela amène nombre de Burundais, tutsi ou hutu, à se demander s’il est de bon augure que l’avenir de leur pays soit réglé de la sorte par leurs compatriotes issus d’une seule province [6].
22Donc, comme dans la plupart des guerres civiles, si les cibles réelles sont politiques (les détenteurs du pouvoir ou leurs compétiteurs), les victimes sont des civils pris comme des cibles de substitution plus faciles à atteindre. Les dizaines de milliers de paysans tutsi (et hutu) massacrés en guise de « vengeance » de la mort de Ndadaye, pour « accompagner celui-ci dans sa tombe » (selon un slogan du moment), ont peut-être été les boucs émissaires d’une « colère populaire », plus sûrement (vu l’organisation des massacres) les otages délibérés d’une politique consistant à viser un « pouvoir tutsi » en y impliquant globalement tous les Tutsi et en exerçant ainsi, en principe, une pression intolérable sur les dirigeants. De même, dans leurs représailles, les forces armées à dominante tutsi, confrontées à des groupes de tueurs insaisissables, ont pris très souvent en otage toute la population hutu d’un secteur considéré comme « rebelle », et les massacres étaient alors conçus comme une punition collective destinée à faire réfléchir les leaders hutu. On est au cœur de la dimension qui ouvre sur les génocides. On en retrouve l’esprit évidemment dans les regroupements de populations entrepris par l’armée pour réduire la rébellion en 1997-1998 et de nouveau entre septembre 1999 et le printemps de 2000.
23L’embargo aussi a visé des « cibles » à travers des victimes innocentes. La régression sanitaire, scolaire, agricole, l’extension du chômage en ville, la hausse vertigineuse des prix, tout cela a frappé durement la masse rurale, mais aussi la petite bourgeoisie urbaine. Un euro valait 382 francs burundais en septembre 1997, il en vaut 819 en juin 2000. Plus concrètement, imaginons le niveau de vie d’un instituteur qui, en juin dernier, reçoit un salaire mensuel d’environ 20 000 FBu et qui doit payer 500 FBu pour un kilo de riz ou pour une bouteille de bière. Seuls se sont enrichis quelques dizaines de spéculateurs. Les résultats sociopolitiques de l’embargo ont donc été largement contre-productifs, nourrissant la misère, les fossés sociaux et le terreau de tous les extrémismes. Sa levée en janvier 1999, non suivie d’une reprise réelle des coopérations, n’a eu pour le moment presque aucun effet. Il est étonnant que le pays ne soit pas tombé dans un chaos encore plus grave.
Syndrome socioracial à la rwandaise
24Le Burundi est confronté au même syndrome socioracial que le Rwanda : les Hutu et les Tutsi seraient, d’une part, deux peuples naturellement distincts, avec des origines radicalement différentes, l’un étant autochtone et l’autre envahisseur ; d’autre part, les Hutu se trouvant majoritaires auraient légitimement le droit d’exclure les Tutsi de l’ensemble des responsabilités du pays, et le projet démocratique est coextensif à cette idée. Tel est le modèle clairement résumé à Kigali en 1993 par l’expression hutu power, le pouvoir du « peuple majoritaire [7] ».
25Tout marche ensuite selon les arguments majoritaires ou sécuritaires, pour justifier les pires violences. La vie politique se poursuit depuis les années 60 à coups de procès d’intention, de prédictions a priori qui finissent par prendre corps, de « propagandes en miroir » attribuant à l’autre ce que l’on concocte, de provocations où précisément les cibles ne sont pas les victimes. La population civile devient chaque fois un bouclier humain voué à la position de victime, pour mieux dénoncer ensuite l’autre camp et légitimer une nouvelle vague de massacres. La recherche de mises en scène macabres se manifeste aux approches de chaque échéance politique (négociations, remaniements gouvernementaux…) et de chaque visite de personnalités étrangères : les armes à feu se font alors entendre, les cadavres sont étalés, etc. La dernière occasion d’observer ce phénomène fut à la mi-juin 2000, lorsque Nelson Mandela s’est rendu sur place et en particulier à Gitega, au centre du pays : sa venue a été précédée et accompagnée d’une vague d’attaques rebelles précisément en province de Gitega, comme un message à bon entendeur.
26Or, les deux médiateurs successifs ont adhéré à la mise en scène sans nuances de l’opposition ethnique en termes de majorité et de minorité, de peuple combattant pour sa liberté et de féodaux ou de groupe militaro-financier accroché au pouvoir (voir les déclarations de Mandela à Arusha en février et en août, à Bujumbura en juin). Le débat entre ethnicité et citoyenneté est béant. La ligue de défense des droits de l’homme Iteka le rappelait le 21 juin dernier, après la visite de Nelson Mandela à la prison de Bujumbura, où il avait traité des suspects de crimes contre l’humanité de « prisonniers politiques » : « Accepter des crimes comme mode de revendication politique reviendrait en fin de compte à légitimer la nature et la logique des crimes commis depuis quatre décennies au Burundi et à perpétuer à jamais le contentieux. »
Un processus de paix accéléré : acteurs et perspectives
27Ce qui a frappé tout le monde, c’est la hâte avec laquelle Nelson Mandela a tenu à régler la question. L’accord a été signé au forceps, sous une pression internationale intense, le médiateur ayant réussi à convaincre les grandes puissances de la nécessité d’accélérer des pourparlers qui n’avaient déjà que trop coûté. Il a porté sur un texte élaboré en juillet par les bureaux de la médiation à Arusha, qui n’était en fait qu’une compilation des résultats (encore partiels) obtenus par les cinq commissions des négociations. Après des pourparlers sans fin où on passait le temps à régler les questions du passé le plus lointain à la place des historiens, on a assisté à un marathon de quelques jours, voire de quelques heures, débouchant sur des signatures dans la confusion et avec des réserves dans la nuit du 26 au 29 août, sans que les branches armées elles-mêmes aient encore signé (malgré une nouvelle rencontre à Nairobi le 20 septembre).
Les acteurs de la négociation
28Après Nyerere, l’homme de la Ligne de front, l’espoir mis en Mandela, le vainqueur de l’apartheid, était légitime. C’est maintenant un homme âgé qui joue son jeu personnel, parallèlement au travail des bureaux d’Arusha. Il a manifestement calqué sur le Burundi la situation sud-africaine en faisant tenir aux Tutsi le rôle des Blancs (voir son discours du 21 février 2000). Mais, à partir de son intervention, la négociation au sens strict a cédé le pas à des démarches croisées auprès de lui pour quêter son appui.
29La facilitation tanzanienne a donc poursuivi son travail selon la ligne tracée par Nyerere, et elle a joué un rôle décisif dans la rédaction du texte diffusé en juillet 2000 en comblant les vides qui restaient sur des secteurs essentiels de la négociation. Les conseillers sud-africains du nouveau médiateur et les présidents (de nationalités diverses) des cinq commissions ne semblent pas être réellement intervenus dans cette rédaction. En outre, comme le notait International Crisis Group dans son rapport d’avril dernier, les Burundais sont kirundophones et francophones, la facilitation est en majorité swahilophone et anglophone, obstacle structurel à la qualité des dialogues.
30Les négociateurs burundais étaient composés de 19 « parties », à savoir le gouvernement et l’Assemblée nationale, et 17 formations politiques : l’Uprona (tendance Rukingama), le Frodebu (tendance Minani), les deux formations rebelles CNDD et Palipehutu, le Parena de Bagaza, et 12 autres petits partis (Abasa, Anadde, Av-intwari, Inkinzo, Pit, PL, PP, PRP, PSD, Raddes et RPB). La plupart de ces factions, pro- ou antigouvernementales, tournent autour d’une ou deux personnalités de Bujumbura et n’ont pratiquement recueilli aucun suffrage lors des élections de 1993. Les mauvaises langues disent que l’allocation per diem de 150 dollars (le salaire mensuel d’un universitaire est d’environ 100 dollars à Bujumbura) faisait d’Arusha un lieu très rentable. Ce que l’on appelle la société civile est absente de ces pourparlers.
Les accords et leurs lacunes
31Le texte s’ordonne selon les travaux des cinq commissions.
- Nature du conflit et des responsabilités, demande d’une Commission internationale d’enquête judiciaire et projet de Commission nationale pour la vérité et la réconciliation.
- Démocratie et bonne gouvernance : principes d’une nouvelle Constitution reconnaissant les trois entités ethniques (Bahutu, Batutsi, Batwa), Parlement subdivisé en une Assemblée nationale et un Sénat de deux délégués par province issus chacun de l’une des deux principales ethnies, exécutif dirigé par un président flanqué de deux vice-présidents d’ethnies et de partis différents, réforme de la justice, correction des déséquilibres au sein de la fonction publique, création d’un ombudsman, période de transition de trente-six mois (dont six mois de mise en place), avec un corps législatif provisoire élargi chargé d’élaborer la Constitution, un exécutif chapeauté par un président et un vice-président et enfin une Commission de suivi internationale qui exercerait une tutelle étroite sur le pays.
- Paix et sécurité pour tous : réforme de l’armée à raison de 50 % pour chaque ethnie, intégration des combattants de la rébellion, épuration des éléments responsables de crimes de guerre, présence d’une force de paix étrangère, procédure de désengagement par cantonnement des forces des deux camps, en commençant par l’armée gouvernementale et en prévoyant l’entrée au Burundi des combattants de l’opposition, amnistie pour les crimes commis lors du conflit [8].
- Reconstruction et développement : catalogue de projets économiques, commençant par le sort de tous les sinistrés.
- Garanties pour l’application de l’accord de paix : définition de la Commission de suivi, émanant de pays amis choisis par les deux camps et de trois instances internationales, l’Onu, l’OUA et l’Initiative régionale de paix.
32Comme le disait déjà en avril l’ONG ICG, « ce n’est que récemment que les vraies questions ont commencé à être abordées ». La plupart n’ont pas été résolues :
- l’absence de cessez-le-feu et la poursuite des activités militaires dans les camps de réfugiés, ce qui entretient automatiquement des positions ethniques extrêmes [10] ;
- la question de l’impunité et l’occultation de l’hypothèque du génocide, qui rappellent l’accord sans issue en Sierra Leone. Human Rights Watch écrivait en mars 2000 : « Une amnistie au Burundi est la direction qu’il ne faut pas prendre […]. Comment peut-il y avoir le moindre espoir de justice et d’ordre […] si des crimes de cette importance sont laissés impunis. Si une paix est concoctée sans justice pour le Burundi, cela sera ressenti dans toute la région [11] » ;
- l’absence d’accord finalisé sur les principes de relance d’une démocratisation qui tienne compte de trente ans d’expériences dramatiques [12] fondées sur une réduction de la citoyenneté au schéma de la majorité ethnique. L’horlogerie institutionnelle à la belge ou la libanaise tient certes compte du pluralisme de naissance inscrit maintenant dans la société, mais sans réelle percée conceptuelle. C’est, dit-on à Bujumbura, « mêler de la pâte fraîchement cuite à de la pâte réchauffée » (guhakurira ku bwaraye) ;
- le flou concernant la réforme de l’armée, en particulier le sort des 30 à 40% de Hutu figurant déjà dans cette armée par rapport aux combattants rebelles à intégrer ;
- le contenu de la période de transition et la nature de la tutelle extérieure, compte tenu du caractère hypothétique d’une intervention étrangère sur le plan de l’ordre public ;
- la reconstruction économique et financière d’un pays sinistré et la recherche de logiques plus performantes que le seul « développement rural intégré [13] » ;
- la remise en confiance, matérielle et morale, de la société civile.
Notes
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[1]
ICG, L’Effet Mandela. Évaluation et perspective du processus de paix burundais, avril 2000. Voir aussi : HRW (Human Rights Watch), Burundi. La justice doit faire partie du processus de paix, avril 2000 ; HRW, Burundi. Vider les collines. Camps de regroupement au Burundi, juin 2000 ; S. R.Weissman (USIP), Preventing Genocide in Burundi. Lessons for International Diplomacy, juillet 1998 ; L. Reychler et al. (université de Leuven), Le Défi de la paix au Burundi. Théorie et pratique, Paris, L’Harmattan, 1999.
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[2]
Voir J.-P. Chrétien, « Ethnicité et politique : les crises du Rwanda et du Burundi depuis l’Indépendance », Guerres mondiales et conflits contemporains, n° 181, Paris, PUF, printemps 1996, pp. 111-124.
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[3]
L. Saur, Influences parallèles. L’Internationale démocrate-chrétienne au Rwanda, Bruxelles, Luc Pire, 1998.
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[4]
En mai 1997 Burundi-Bureau justifie par exemple le massacre de 40 écoliers au petit séminaire de Buta en reprenant la thèse CNDD d’une prétendue « position militaire ».
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[5]
En outre frère du leader du Frodebu modéré, Augustin Nzojibwami !
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[6]
Rappelons (car ce cliché a la vie dure) que le lobby de Bururi n’est pas un « groupe hima », que les Bahima sont présents dans toutes les régions du pays et que la plupart des leaders tutsi de Bururi sont de clans non hima.
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[7]
Voir J.-P. Chrétien, Le Défi de l’ethnisme. Rwanda et Burundi, 1990-1996, Paris, Karthala, 1997 ; et aussi J.-P. Chrétien, A. Guichaoua et G. Le Jeune, « La crise d’août 1988 au Burundi », Cahiers du CRA, n° 6, Afera-Karthala, 1989.
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[8]
Ces deux clauses sont étonnantes : vu l’absence actuelle de véritable front (contrairement à ce qui se présentait au Rwanda en 1993), la première permettrait aux mouvements rebelles de se constituer in extremis des zones dites « libérées » ; quant à l’amnistie, elle va à l’encontre du refus de l’impunité exprimé par ailleurs.
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[9]
Contestés par les forces rebelles le 24 septembre.
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[10]
Une déclaration de l’Union européenne du 19 octobre va en ce sens.
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[11]
Le responsable de l’Afrique à Human Rights Watch, Peter Takirambudde. Le 16 août dernier, un éditorial du Monde évoquait la même analogie entre Burundi et Sierra Leone en dénonçant la nouvelle tendance internationale à prétendre régler les conflits à coups d’amnistie.
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[12]
Comme dans la Constitution ougandaise de 1995, qui mentionne dans son préambule l’expérience de dix ans de guerre civile.
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[13]
L’État est empêtré dans la montée de la corruption liée à une économie de guerre et dans sa disqualification face aux ONG (en 1997 le budget total des ONG en activité au Burundi équivalait à 36 % du budget de l’État).