Notes
-
[1]
Cet article a bénéficié des commentaires avisés de deux relecteurs anonymes, mais aussi de discussions éclairantes avec Florence Delmotte et Hugo Canihac. Qu’ils en soient remerciés ici.
-
[2]
European Commission (2017), Special Eurobarometer 464b on Europeans’ Attitudes Towards Security, Brussels, December 2017.
-
[3]
Conseil JAI (2010), Stratégie de sécurité intérieure pour l’Union européenne. Vers un modèle européen de sécurité, Luxembourg, Office des publications de l’Union européenne.
-
[4]
Pour une discussion critique sur la pertinence du 11 septembre 2001 comme date charnière en matière de politique de sécurité, voir Boswell (2007) et Bigo, Bonelli et Deltombe (2008).
Introduction
1 Présenté à l’origine comme un complément à la mise en œuvre du principe de la libre circulation des personnes dans un espace intégré sans contrôle aux frontières intérieures, le projet européen de sécurité intérieure s’est depuis imposé comme l’une des priorités politiques de l’Union [1]. Sa mise en œuvre figure en bonne place dans le traité de Lisbonne (TUE) qui énonce dans son article 3 que « [l]’Union offre à ses citoyens un espace de liberté, de sécurité et de justice sans frontières intérieures, au sein duquel est assurée la libre circulation des personnes, en liaison avec des mesures appropriées en matière de contrôle des frontières extérieures, d’asile, d’immigration ainsi que de prévention de la criminalité et de lutte contre ce phénomène ». De manière significative, cet engagement apparaît au second paragraphe de cet article consacré aux objectifs politiques de l’Union, soit immédiatement après celui dédié à la promotion de la paix et du bien-être des peuples, mais avant la référence au marché intérieur ou à la monnaie unique.
2 De la création du troisième pilier, à Maastricht, à la création du Corps européen de garde-frontières et de garde-côtes en 2016, de la mise en place d’un espace de liberté, de sécurité et de Justice (ELSJ) à l’adoption d’une Stratégie de sécurité intérieure pour l’Union européenne en 2010 et d’un Programme européen en matière de sécurité en 2015, les questions de sécurité, un temps marginales, occupent aujourd’hui le devant de la scène politique et médiatique européenne. Pour la Commission européenne, une telle évolution répond à un souhait des Européens. L’Eurobaromètre spécial Europeans’ Attitudes Towards Security réalisé en 2017 révèle ainsi que 91 % des Européens estiment que la coopération entre les autorités nationales de sécurité devrait être renforcée [2]. Même si l’on sait l’usage stratégique qui peut être fait des sondages Eurobaromètres dans la « fabrique officielle de l’opinon européenne » (Aldrin, 2011), ce résultat laisse peu de doute quant à la préoccupation des Européens pour les questions de sécurité. Sans doute, depuis les vagues d’attentats de ces dernières années et la crise migratoire de 2015, la sécurité intérieure représente-t-elle même l’une des facettes les plus visibles de l’action communautaire pour les citoyens.
3 Nous avons montré ailleurs (Duez, 2008) toutes les difficultés qu’engendre cette montée en puissance des thèmes de la sécurité et de la justice. Nous soulignions alors que faire de la sécurité intérieure l’une des priorités politiques de l’Union posait non seulement la question des limites des pouvoirs régaliens des États membres, mais aussi celle des capacités de l’UE à répondre aux attentes suscitées. Car en dépit d’un narratif dépolitisant souvent mobilisé par l’UE, en particulier par la Commission européenne et par les diverses agences en charge des questions de sécurité, le projet de sécurité intérieure tranche avec une vision technocratique de l’intégration européenne longtemps centrée sur les seuls enjeux économiques. Même embryonnaire, ce projet amorce aussi une nouvelle reconfiguration d’un processus socio-historique dans lequel l’offre publique de sécurité a constitué l’un des principaux ressorts du mouvement de centralisation des moyens coercitifs et de construction d’appareils bureaucratiques intégrés en Europe.
4 Sans aucunement postuler l’identité des phénomènes socio-historiques distincts que sont la formation des États-nations et l’intégration européenne, l’objectif de cet article est de montrer que le processus d’intégration européenne emprunte un parcours susceptible d’être éclairé par l’histoire longue de la formation et de la légitimation de l’ordre politique moderne. Dans la première partie, nous soulignons l’intérêt d’une sociologie historique de la construction européenne pour l’analyse des enjeux de sécurité intérieure. Nous montrons ensuite que l’engagement pris par les États membres de créer un futur « modèle européen de sécurité intérieure [3] », parce qu’il touche au noyau le plus essentiel des fonctions des États-nations européens, est un champ de recherche particulièrement riche pour qui veut comprendre la recomposition des équilibres politiques entre l’Union européenne et ses États membres.
1. De l’intérêt d’une sociologie historique du projet européen de sécurité intérieure
5 Les travaux consacrés à l’ELSJ se sont considérablement développés ces dernières années, suivant en cela les progrès de la coopération européenne en matière de sécurité et de justice. Cette coopération, qui est selon Jörg Monar « one of the fastest growing fields of EU » (Monar, 2012, 613), est à l’origine d’une recherche foisonnante et diversifiée. La plupart des travaux produits se caractérisent toutefois par une tendance à l’hyperspécialisation et peinent à prendre en compte la perspective du temps long.
1.1. Une recherche foisonnante
6 Rétrospectivement, nous pouvons dire que les recherches sur la sécurité intérieure européenne se sont déployées en deux temps. Dans un premier temps, les travaux des juristes spécialistes du cadre institutionnel JAI ont été dominants. Ces travaux, qui correspondaient à une période d’intense activité normative du Conseil de l’Union, couvrent alors tout le champ de la coopération JAI : coopération policière (Anderson et al., 1996 ; Chevallier-Govers, 1999), coopération judiciaire (Den Boer, 1997a ; De Kerchove et Weyembergh, 2000), asile et immigration (Hailbronner et Weil, 1999). Plus rarement, ils proposent les premières approches englobantes du champ de la sécurité intérieure européenne (Montain-Domenach, 1999 ; Barbe, 2002 ; Berthelet, 2003). Leur ambition est alors de reconstruire les étapes du développement du domaine JAI en présentant les mécanismes institutionnels et les instruments juridiques élaborés dans le cadre du troisième pilier. Ils entendent en évaluer la cohérence du point de vue du droit ainsi que la compatibilité avec les obligations internationales incombant aux États membres en matière de protection des droits fondamentaux.
7 Un second temps est marqué par l’intérêt croissant des politistes pour la sécurité intérieure européenne, mais également de certains sociologues ou criminologues qui s’y intéressent plus indirectement au travers des pratiques de coopération policière transnationale (voir Sheptycki, 2005). Cet intérêt se développe parallèlement à la montée en puissance de la thématique dans l’agenda communautaire. Il correspond aussi à un passage progressif d’une activité européenne essentiellement normative et programmatique à des développements plus opérationnels. De ce point de vue, le traité d’Amsterdam et le Conseil européen extraordinaire de Tampere ont, à la fin des années 1990, représenté des jalons importants. Cette évolution sera en outre favorisée par l’effacement progressif du thème de l’asile – objet à l’époque très juridicisé et quelque peu confisqué par le droit (Joly, 1996 ; Carlier et Vanheule, 1997) –, par la préoccupation croissante pour l’immigration irrégulière au début des années 2000 et par le renouveau de la lutte contre le terrorisme transnational au lendemain du 11 septembre 2001.
8 Tenter de proposer une typologisation de l’ensemble des études de science politique consacrées à la politique européenne de sécurité intérieure serait forcément hasardeux. Ce n’est par ailleurs pas l’objet de cet article. D’autres s’y sont essayés. En 2017, Trauner et Ripoll Servent (2017) ont proposé dans The Routledge Handbook of Justice and Home Affairs Research, premier ouvrage du genre consacré à la sécurité intérieure européenne, un aperçu complet du sous-champ disciplinaire. Un an plus tôt, Bossong et Rhinard (2016, 7-17) choisissaient de classer les recherches existantes selon qu’elles examinent le système politique (polity), l’élaboration et la mise en œuvre des politiques (policies) ou encore la dimension extérieure de la coopération européenne (external dimension). Plus simplement, nous identifions quant à nous trois courants se distinguant par leurs approches théoriques, leurs méthodes et leur posture normative.
9 Un premier type de recherches a privilégié l’étude des modes de décision et des équilibres institutionnels propres au domaine JAI. Rejoignant les préoccupations des juristes, ces travaux se sont attachés à retracer les processus politiques ayant conduit à la création du troisième pilier, d’abord, à celle de l’ELSJ, ensuite. Monica Den Boer suivra par exemple l’évolution de la coopération Schengen (Den Boer, 1997b ; 2000). Malcolm Anderson s’intéressera quant à lui à la coopération policière et aux évolutions du concept de frontière consécutives à la mise en œuvre du principe de libre circulation des personnes (Anderson et Bort, 2001 ; Anderson et Apap, 2002). Enfin, développant des approches plus globales, Jörg Monar, Roland Bieber et Roger Morgan (Monar et Morgan, 1994 ; Bieber et Monar, 1995), Mitsilegas Valsamis et Wyn Rees (Mitsilegas, Monar et Rees, 2003), ou encore Wenceslas de Lobkowicz (2002) ont examiné le projet de sécurité intérieure en tant que tel plutôt qu’au travers du prisme d’un secteur précis de la coopération européenne.
10 Pour rendre compte du développement du champ européen de la sécurité intérieure, ces recherches mobilisent le plus souvent des grilles d’analyse néo-fonctionnalistes ou néo-institutionnalistes. Les néo-fonctionnalistes soulignent l’effet d’engrenage (spillover) enclenché par l’Acte unique et par l’achèvement du marché intérieur – perspective qui annonce la suppression des contrôles aux frontières intérieures et l’adoption des « mesures compensatoires » à la libre circulation des personnes. Ces auteurs pointent également le rôle moteur des crises politiques – sécuritaires ou migratoires – dans le maintien de la dynamique institutionnelle (Monar, 2001). Les néo-institutionnalistes ont pour leur part analysé comment des acteurs européens ou nationaux – DGs de la Commission, Secrétariat général du Conseil, groupes d’experts ou encore agences communautaires telles qu’Europol, Eurojust ou Frontex (voir Carrapiço et Trauner, 2013 ; Kaunert, Leonard et Occhipinti, 2015 ; Neal, 2009) – ont joué le rôle d’entrepreneurs supranationaux de politique publique (Kaunert, 2010 ; Ripoll Servent et Trauner, 2015). Nourri par la rapidité des évolutions institutionnelles dans le domaine JAI, ce courant de recherche est aujourd’hui encore très dynamique, comme en témoigne l’ouvrage récent de Christian Kaunert et Sarah Leonard (2018) consacré à la stratégie européenne pour l’ELSJ au-delà du programme de Stockholm.
11 Le second type de recherches s’est développé parallèlement au premier, notamment autour de Didier Bigo et de la revue Cultures et Conflits. Il a depuis fait florès. Ces recherches se distinguent des précédentes tant au point de vue de la méthode que de l’épistémologie. En termes de méthode, les tenants de ce second courant ambitionnent de jeter les bases d’une sociologie politique de l’international mettant l’accent sur l’entrecroisement des dynamiques locales et transnationales, ainsi que sur les liens qu’entretiennent ces dynamiques avec les conditions de stabilité de l’ordre international. Leur projet multidisciplinaire emprunte ses outils à la sociologie, à l’histoire, à l’anthropologie, au droit ou encore à la géographie. L’un des intérêts de cette approche tient à sa volonté d’interroger la distinction traditionnelle entre ordres politiques interne et externe (Bigo, 2006). Sur le plan épistémologique, les tenants de cette approche privilégient une sociologie constructiviste et critique s’inspirant, entre autres, des réflexions de Jacques Derrida, de Pierre Bourdieu, de Michel Foucault, de Giorgio Agamben ou de Bruno Latour. Rassemblés au sein du sous-champ des études critiques de sécurité, ces auteurs assument un projet émancipateur ou, au minimum, une analyse critique des relations internationales et de la sécurité (C.A.S.E. Collective, 2006). Plus récemment, ils ont été les promoteurs d’une approche néo-matérialiste – ou « practice turn » (Bueger, 2017, 132) – visant à dépasser le focus linguistique des recherches sur la sécuritisation. Ils intègrent désormais dans leurs travaux les aspects matériels de la sécurité – de la place des corps aux dispositifs technologiques – et mettent l’accent sur les pratiques quotidiennes des acteurs (voir Amicelle, Aradau et Jeandesboz, 2015).
12 En termes d’objets de recherche, les tenants des études critiques se sont beaucoup intéressés aux questions de migration et de mobilité, ainsi qu’aux pratiques de contrôles aux frontières. Ils ont par exemple examiné les relations entre contrôles aux frontières, biométrie et liberté (Bigo et Guild, 2005 ; Basaran 2011), la construction sociale d’une figure menaçante de l’altérité (Huysmans, 2006), ou encore la politique des visas (Infantino, 2019). Plus récemment, et à la faveur d’un retour à l’avant-plan de la problématique terroriste, les études critiques se sont penchées sur les pratiques de surveillance électronique des voyageurs (Bellanova et Duez, 2012 ; Fuster et Bellanova, 2013 ; Jeandesboz, 2016), sur la question de la (dé)radicalisation (Baker-Beall, Heath-Kelly et Jarvis, 2015), sur la lutte contre le financement des activités terroristes (de Goede et Wesseling, 2017), ou encore sur le nexus sécuritaire-humanitaire et le rôle des acteurs non étatiques dans le contexte de la gestion des frontières extérieures de l’Union (Pallister-Wilkins, 2017).
13 Un troisième et dernier type de recherches se situe à mi-chemin entre les deux courants précédents et s’inscrit dans le tournant sociologique des études européennes (voir Favell et Guiraudon, 2011). Les tenants de cette approche intermédiaire rejoignent les études critiques dans la mesure où ils puisent abondamment dans les concepts et méthodes de la sociologie et de l’anthropologie, mais s’en distinguent sur la posture critique qu’ils ne revendiquent pas nécessairement. À l’inverse, ces auteurs se raccrochent explicitement aux auteurs néo-fonctionnalistes et néo-institutionnalistes qui affirment clairement leur positionnement dans le champ des études européennes. Dans ce troisième courant, nous pourrions situer les travaux de Virginie Guiraudon sur les pratiques de délégations des contrôles aux frontières vers les transporteurs (2002), sur l’européanisation dans le domaine de l’immigration et de l’asile (2010) ; ceux de Ma’ia Cros (2013) sur les réseaux d’experts transnationaux analysés au travers du concept de communauté épistémique ; ceux d’Andrew Geddes et Christina Boswell (2011), d’Adrian Favell (2014) ou encore d’Ettore Recchi (2015) qui, sans forcément aborder frontalement la question de la sécurité, développent une sociologie de l’immigration qui interroge les enjeux de la mobilité dans l’espace européen. Dans une optique à la fois plus microsociologique et plus inductive, certains travaux relevant de ce troisième courant s’inspirent quant à eux de la sociologie des organisations. Des chercheurs tels que Jacques de Maillard, Josselin Dravigny, Antoine Mégie ou encore Andy Smith étudient ainsi « comment les acteurs en position d’interdépendance poursuivent des stratégies spécifiques, entrent en concurrence, produisent des arrangements ponctuels » (Maillard et Smith, 2007, 28 ; Dravigny, Maillard et Smith, 2016).
14 Depuis les années 2000, les recherches consacrées à la sécurité intérieure européenne se sont donc multipliées et diversifiées. Toutes les recherches évoquées ci-dessus ont contribué à l’enrichissement des connaissances dans le domaine de la sécurité intérieure européenne. Si Jacques de Maillard et Andy Smith (2007, 9) décrivaient en 2007 le troisième pilier de l’Union comme « un espace d’action publique fragmenté et concurrentiel », nous pourrions dire que l’espace académique des études sur la sécurité intérieure européenne l’est aujourd’hui tout autant. En dépit de leurs indéniables qualités, la plupart des recherches que nous venons d’évoquer rencontrent toutefois deux limites. Premièrement, la multiplication des travaux s’accompagne d’une tendance à l’hyperspécialisation. Or, si ce haut niveau de spécialisation permet des études de cas approfondies, il a aussi pour conséquence une difficulté de ces recherches à replacer leur objet dans un tableau plus large de la sécurité intérieure européenne (Monar, 2016, 31). Deuxième écueil, la plupart des travaux tendent à opérer une sorte d’« écrasement historique ». La mise en histoire, même si elle est souvent présente, ne débute généralement que dans les années 1970 avec la coopération policière intergouvernementale, dans les années 1980 avec l’accord de Schengen, voire dans les années 1990 avec la création du troisième pilier de l’Union. Dans Polices en réseaux. L’expérience européenne (1996), Didier Bigo fait par exemple débuter l’histoire de la sécurité intérieure dans les années 1970, avec la formalisation progressive des échanges entre les services de police européens, singulièrement avec la création du groupe TREVI et des autres « clubs de policiers ». Dans leurs synthèses respectives, Jacqueline Montain-Domenach (1999), Wenceslas De Lobkowicz (2002) et Emmanuel Barbe (2002) faisaient de même. Cette délimitation a très peu évolué dans les travaux ultérieurs. La littérature la plus récente remonte rarement au-delà du 11 septembre 2001, comme si la coopération européenne en matière de sécurité avait acquis depuis lors une sorte d’évidence. Il ne serait plus nécessaire d’en interroger les causes et les ressorts, mais simplement de rendre compte de ses développements les plus actuels [4].
1.2. La question de l’histoire
15 Hyperspécialisation, sectorialisation, historicité limitée, telles sont les caractéristiques de la littérature sur la sécurité européenne qu’il convient non pas de corriger – une telle spécialisation est propre à la démarche scientifique – mais de compléter par d’autres perspectives. Notre propos n’est pas ici de critiquer ce qui existe, mais plutôt de souligner ce qui n’existe pas ou peu. Et ce qui manque aujourd’hui aux études sur la sécurité intérieure européenne, c’est une vision du temps long capable de réinscrire les trois ou quatre décennies de l’histoire de la sécurité européenne dans une réflexion plus large portant sur les mutations de l’exercice des fonctions régaliennes en Europe. Une telle réinscription dans la longue durée permettrait pourtant de penser de manière comparée – dans le temps et dans l’espace – et continue – en mettant à distance une vision postulant l’originalité radicale du processus d’intégration européenne – les configurations de pouvoir expérimentées en Europe au cours des siècles (Déloye, 2008b, 139). Elle permettrait d’identifier les points de convergence, mais aussi de divergence entre des processus de développement politique distincts, mais néanmoins comparables.
16 À cet égard, il convient de souligner d’emblée qu’au-delà du champ de la sécurité européenne qui nous intéresse ici, ce sont en réalité les études européennes dans leur ensemble qui, tout en ayant produit nombre d’études centrées sur l’histoire de l’intégration depuis 1945 ou 1957 (Milward, 1984 ; 2000 ; Moravcsik, 1998 ; Gerbet, 2007 ; van Middelaar, 2012 ; Dinan, 2014), offrent assez peu d’analyses intégrant une perspective du temps long, même si quelques travaux pionniers existent. Pensons par exemple aux recherches de Jytte Klausen et Louise Tilly (1997) consacrées aux dimensions sociale et historique de l’intégration européenne qui font débuter l’histoire de l’Europe au milieu du XIXe. L’ouvrage Restructuring Europe de Stefano Bartolini (2005), sur lequel nous revenons ci-dessous, inscrit quant à lui l’UE dans un mouvement de différenciation juridique, économique et culturelle amorcé il y a cinq siècles. Dans une perspective néo-wébérienne, Gérard Delanty et Chris Rumford (2005) développent quant à eux une théorie de la formation d’une « société européenne » mettant l’accent sur le parcours historique de ce continent et sur les fondements culturels de l’intégration européenne. Dans Formation of European Modernity (2013), Delanty poursuit cet effort en retraçant la genèse de l’idée d’Europe depuis l’Antiquité au départ d’une analyse des relations mouvantes entre États, sociétés et individus. Enfin, dans une perspective marxiste à la croisée de la sociologie, de l’histoire, de la philosophie et de la théorie politique, Perry Anderson (2011) choisit quant à lui de replacer l’intégration européenne dans le contexte du développement du néolibéralisme.
17 Aux côtés de ces travaux prenant en compte le temps long, d’autres recherches relèvent explicitement d’une socio-histoire ou d’une sociologie historique de l’intégration européenne, mais n’optent pas pour autant pour une étude de la longue durée. Très présents dans le champ francophone, ces travaux développent le plus souvent une sociologie des élites transnationales centrée sur les acteurs de l’Union européenne et sur l’« Eurocratie » (Georgakakis, 2012 ; Kauppi et Rask Madsen, 2013). Cette sociologie des agents et des groupes qui évoluent dans l’espace institutionnel européen a donné lieu à de multiples projets prosopographiques consacrés à des catégories professionnelles ou à des groupes sociaux européanisés : journalistes, fonctionnaires et haut-fonctionnaires européens et nationaux, parlementaires, juristes, économistes, etc. (voir par exemple Baisnée, 2002 ; Rowell et Mangenot, 2010 ; Cohen et Knudsen, 2012 ; Vauchez, 2013 ; Fertikh, 2016 ; Canihac, 2019). Ces auteurs expriment une préoccupation pour un « constructivisme empiriquement fondé » (Rowell et Mangenot, 2010, 10) s’appuyant sur les méthodes de la sociologie. Signalons au passage que quelques recherches de ce type existent dans le champ de la sécurité intérieure européenne. Michel Mangenot (2006) a par exemple analysé la création d’Eurojust en termes de « jeux institutionnels » résultant des interactions bruxelloises entre fonctionnaires, magistrats et ministres, tandis qu’Antoine Mégie s’est attelé à la « généalogie de la coopération judiciaire européenne » (Mégie, 2006). Par leur démarche et leur intérêt pour la sociologie des champs de Bourdieu, ces deux auteurs rejoignent certains tenants des études critiques de sécurité, en particulier l’ambition de Didier Bigo d’établir une cartographie du champ de la sécurité intérieure à travers une sociologie des professionnels de la sécurité.
18 De manière quelque peu schématique, les deux types d’approches que nous venons de présenter, les approches plutôt macrosociologiques de Stefano Bartolini, Louise Tilly, Gérard Delanty ou Chris Rumford, d’une part, et les perspectives plus microsociologiques inspirées de la sociologie des champs de Pierre Bourdieu, d’autre part, correspondent peu ou prou à deux sous-disciplines distinctes. Le premier courant relèverait plutôt d’une sociologie historique qui vise à comprendre l’évolution de phénomènes macrosociaux tout en se libérant des présupposés normatifs de la philosophie de l’histoire (Déloye, 2003). Le second courant relèverait plutôt d’une sociologie historique plus empirique, moins portée vers la longue durée, voire d’une socio-histoire. Cette dernière aurait emprunté aux historiens leur définition du travail empirique fondé sur l’étude des archives et aux sociologues le projet d’une étude des relations de pouvoir au sein d’un champ donné (Noiriel, 2006). Nous ne rentrerons pas ici plus avant dans cette distinction entre sociologie historique et socio-histoire. Retenons simplement que les deux approches se placent l’une comme l’autre au confluent de l’histoire et de la sociologie, même si leurs méthodes, leur socle empirique, leur ampleur historique et l’importance qu’elles accordent à la démarche comparatiste diffèrent.
19 Malgré l’existence de ces recherches en études européennes soucieuses d’historiciser leur propos, il nous semble que le constat posé par Yves Déloye en 2006 conserve aujourd’hui encore toute sa pertinence : « Parce qu’elle adopte souvent une grille théorique neuve, favorable à une certaine inflation conceptuelle (gouvernance, intergouvernementalisme, post-nationalisme, post-étatisme...), la science politique de l’Europe accorde une place marginale à l’historicité – certes récente – du processus de construction européenne » (Déloye, 2006, 5). Et, nous le disions d’emblée, ce qui est vrai des études européennes en général l’est également des études portant sur les questions de sécurité. Il manque à ce jour dans la bibliothèque idéale des européanistes une histoire complète et raisonnée du projet européen de sécurité intérieure qui replacerait ce dernier dans la longue durée. La plupart des travaux existants reviennent sur les principaux jalons de la coopération en matière JAI, depuis les premières formes de la coopération policière et judiciaire dans un contexte pré-communautaire jusqu’à la mise en place progressive de l’ELSJ, mais envisagent rarement une mise en perspective plus large. Pourtant, le champ de la sécurité intérieure européenne se prête particulièrement bien à une telle mise en perspective historique. Plus encore que le marché intérieur ou que la structuration du système politico-institutionnel européen, l’ELSJ met en cause les fonctions essentielles de l’État dans la mesure où la sécurité constitue le bien public par excellence, celui sans lequel tous les autres ne peuvent être envisagés.
2. Sécurité intérieure européenne et transformations de l’ordre politique européen : esquisse d’un agenda de recherche
20 La construction européenne ne s’opère pas dans un espace historiquement vierge, mais à la suite et aux côtés d’autres trajectoires historiques s’inscrivant dans la longue durée : celles de la formation des États-nations, mais aussi de la constitution d’autres organisations internationales qui préexistent à l’UE ou coexistent avec elle. Ces grandes évolutions historiques ne s’opèrent toutefois pas hors-sol. Elles se manifestent dans l’évolution de pratiques et de relations sociales bien réelles qu’il est possible d’étudier. Parce qu’elle touche aux fonctions les plus fondamentales des États-nations européens, la coopération européenne dans le domaine de la sécurité intérieure est un terrain fécond pour étudier cette articulation entre les niveaux macro et micro dans le cadre de la recomposition de l’ordre politique en Europe.
2.1. Concilier l’étude des évolutions macro et micro-structurelles
21 L’opposition entre la perspective « macro » de la sociologie historique, parfois critiquée pour son manque d’ancrage empirique, et l’approche plus « micro » de la socio-histoire, « tournée vers l’étude de problèmes empiriques précis » (Noiriel, 2008), tend à faire oublier que les deux démarches gagnent à être combinées. Toute la sociologie de Norbert Elias tend précisément à montrer l’utilité d’une telle articulation. Dans Über den Prozess der Zivilisation, publié en français en deux volumes séparés – La Civilisation des mœurs (1973) et La dynamique de l’Occident (1975) – Elias entend relier l’évolution des comportements humains en Europe occidentale depuis le Moyen Âge, qu’il étudie au départ des manuels de savoir-vivre et des traités d’étiquettes, à l’émergence d’une aristocratie de cour, puis à la naissance de l’État. Dans La civilisation des mœurs, Elias montre tout d’abord comment le développement de diverses formes d’« autocontrôles » (retenue, réserve, pudeur, etc.) s’opère parallèlement au renforcement des interdépendances fonctionnelles entre les individus. Dans La dynamique de l’Occident, il établit ensuite un lien entre cette évolution des structures mentales et celle des structures politiques. Il propose une sociogenèse de l’État absolutiste français qui lie le renforcement des autocontrôles au processus de monopolisation de la violence par l’État en cours de formation.
22 À notre connaissance, et à l’exception de quelques études dédiées à la perception de l’intégration européenne par les citoyens (voir par exemple Duchesne et al., 2013 ; Delmotte, Van Ingelgom et Mercenier, 2017), ce type d’articulation n’existe pas ou très peu dans le champ des études européennes. En termes de research design, cette démarche revient selon nous à faire se rencontrer la sociologie historique de l’intégration européenne d’un Stefano Bartolini, d’une part, et, d’autre part, les approches dites sociologiques de l’européanisation et, par extension, certaines recherches relevant des études critiques de sécurité. Revenons brièvement sur les apports des deux termes de cette relation.
23 Dans Restructuring Europe (2005), ouvrage qui constitue sans doute l’exemple le plus abouti d’une sociologie historique dans le champ des études européennes, Stefano Bartolini entend montrer que la nouveauté politique de l’intégration européenne procède moins d’une révolution copernicienne que d’un long processus de redéfinition des frontières territoriales et fonctionnelles des États-nations européens. Loin d’être sui generis, l’intégration européenne s’inscrit dans un mouvement historique de modification progressive de la nature même des États-nations et, plus largement, du politique. Pour Bartolini (2005, 116), « […] the experience of nation-state formation offers a useful analytical framework for a theory of regional integration ». De cette continuité découle la possibilité de se saisir de l’objet européen en mobilisant des outils classiques des sciences sociales, ceux originellement développés pour étudier le fait politique national. Dans la lignée de la sociologie historique comparée de Rokkan (1996 ; 2009[1970]) et de Hirschman (1995[1970]), à laquelle il emprunte sa boîte à outils conceptuelle, Bartolini affirme que, pour être pleinement compris, les développements récents de l’intégration européenne doivent être situés dans le contexte de la succession des étapes du développement politique et économique qui façonnent depuis le XVIe siècle la configuration historique européenne (Bartolini, 2005, 116 et ss.). Comme le résume Yves Déloye (2008a, 313-314), chez Bartolini, « […] l’intégration européenne doit être analytiquement étudiée à partir des catégories conceptuelles forgées pour rendre compte de l’émergence et de la consolidation des États-nations européens et doit être pensée historiquement dans le prolongement de ces derniers ». Étudier l’intégration européenne dans le temps long revient donc à la placer à la suite des recherches – historiques, sociologiques, juridiques et de science politique – consacrées aux transformations de la figure de l’État plutôt que dans un récit d’unification politique qui trouverait son origine dans des racines culturelles, religieuses ou sociales communes aux Européens.
24 Si nous partageons le souci de Bartolini pour une recherche qui replace l’intégration européenne dans le contexte des évolutions politiques, économiques et sociales qui ont marqué le continent européen, ses travaux se caractérisent toutefois par une vision linéaire de l’histoire et par un stato-centrisme qui mériterait d’être relativisé par la prise en compte d’autres formes d’intégration transnationale (Kott, 2011 ; Patel, 2013). Bartolini estime en effet que les processus de formation des États-nations et d’intégration européenne s’inscrivent dans le temps comme une série d’étapes qui se succèdent les unes aux autres. Pour lui, l’intégration européenne constituerait la sixième étape du processus de formation des États-nations européens (Bartolini, 2005, 363 et ss.). Elle serait la conséquence – pour ainsi dire inéluctable – d’une inadéquation croissante entre les défis transnationaux nés de la globalisation et la prééminence de l’État-nation comme niveau d’organisation économique et politique. L’explication d’ensemble est convaincante, mais elle manque d’assise empirique. Elle n’explique par ailleurs pas vraiment pourquoi le chemin pris est celui de l’Union européenne telle que nous la connaissons plutôt qu’un autre type de configuration historique et politique.
25 C’est pourquoi il nous semble que la sociologie historique de l’intégration européenne aurait intérêt à approfondir son dialogue avec les études sur l’européanisation, singulièrement les approches sociologiques de l’européanisation. Ces approches visent en effet à étudier les transformations des États membres et la structuration du champ européen au travers des relations de pouvoirs, de concurrence, de résistance ou encore des « usages de l’Europe » (Jacquot et Woll, 2004). Portant sur des cas d’études précis, ces analyses révèlent souvent les pesanteurs historiques, institutionnelles et sociales qui orientent, freinent ou accélèrent les processus de transformation et d’adaptation à l’intégration européenne. La définition de l’européanisation proposée par Claudio Radaelli, qui n’est pas lui-même le principal représentant des approches sociologiques, atteste de cette volonté de penser l’intégration européenne au sens large – c’est-à-dire tant dans ses dimensions ascendantes que descendantes – au-delà des seules structures juridico-institutionnelles. Pour Radaelli, l’européanisation est en effet envisagée comme : « Processes of (a) construction, (b) diffusion, and (c) institutionalization of formal and informal rules, procedures, policy paradigms, styles, ‘ways of doing things’, and shared beliefs and norms which are first defined and consolidated in the making of the EU public policy and politics and then incorporated in the logic of domestic discourse, identities, political structures, and public policies » (Radaelli, 2003, 30). À la différence d’autres définitions de l’européanisation qui insistent plutôt sur l’impact de l’intégration européenne sur les structures institutionnelles et sur les politiques publiques nationales (Ladrech, 1994 ; Cowles, Caporaso et Risse, 2001), la définition de Radaelli conçoit l’européanisation comme un processus social et politique, et non comme un simple résultat. Elle souligne l’importance des règles formelles, mais aussi des règles informelles, des croyances et des discours. Elle met en exergue la dimension cognitive de l’européanisation et nous pousse à étudier les pratiques quotidiennes des acteurs. Ces préoccupations rejoignent celles de la socio-histoire ou des études critiques de sécurité que nous évoquions précédemment.
26 Toute la difficulté du dialogue entre les approches micro et macro de la sociologie historique de l’Europe réside bien évidemment dans l’articulation entre des perspectives généralisantes mettant l’accent sur le temps long et l’historicité plus réduite des études consacrées à l’européanisation de l’espace politique et social européen. Car ce que la première perspective apporte en termes de synthèse et de profondeur historique implique souvent de sacrifier ce que chérit la seconde, à savoir l’étude de problèmes empiriques concrets. Pour dépasser ce genre de contradictions, Hans-Jörg Trenz suggère par exemple de recourir à la sociologie de la structuration d’Anthony Giddens qui permet d’éviter simultanément une forme de déterminisme social qui repose sur l’idée de la permanence et de la toute-puissance des structures sociales, et l’idée d’une autonomie totale des acteurs sociaux (Trenz in Favell et Guiraudon, 2011, 201-202).
27 Sans forcément nous référer à Giddens, nous dirions quant à nous qu’il convient d’aborder la question de la nature de l’ordre politique européen à frais nouveaux en reprenant la notion de « formation d’un centre politique » – notion apte à rendre compte des spécificités du procès de concentration du pouvoir à l’œuvre au sein de l’UE (Déloye, 2006, 315) – tout en s’attachant à étudier ce processus par l’entremise des idées, des dispositifs concrets et des pratiques sociales au travers desquels il se manifeste. Une telle démarche n’est envisageable qu’au prix d’une ouverture de la science politique vers d’autres disciplines : l’histoire et la sociologie, bien évidemment, mais aussi l’anthropologie, l’économie, la démographie ou encore la géographie. Elle suppose d’accepter une diversité et une asymétrie des sources et des méthodes. Les quelques décennies qui nous séparent du traité de Rome ne peuvent être étudiées de la même manière que l’époque féodale. À cet égard, le travail du politiste reposera inévitablement sur celui des historiens ou des spécialistes de sociologie comparée de l’Europe. Les travaux déjà cités de Norbert Elias, de Charles Tilly et de Perry Anderson (1974) sur la centralisation étatique, ceux de Stein Rokkan sur les structures partisanes, ceux de Gøsta Esping-Andersen (1999) sur la pluralité des formes de l’État social, ceux de Barrington Moore (1993) sur la relation entre classes sociales et régimes politiques, ceux de Theda Skocpol sur les révolutions (1985), ou encore ceux de Sydney Tarrow sur les mouvements sociaux et la « politique du conflit » (Tarrow et Tilly, 2015) constitueront autant de références précieuses. Elles seront utilement complétées par les recherches des spécialistes de l’histoire sociale européenne qui ont étudié l’émergence des réseaux transnationaux européens (Kaiser, Leucht et Rasmussen, 2009), les mutations des relations industrielles (Crouch, 2000) ou encore la formation d’une « société européenne » (Kaelble, 1988).
2.2. Étudier la sécurité comme un processus de transformations sociales et politiques
28 Le champ de la sécurité intérieure est un terrain fertile pour développer une recherche de sociologie historique de l’intégration européenne à la croisée des approches macro et micro. Premièrement, il ressort de la liste des travaux que nous venons d’établir que les liens entre les fonctions de sécurité et l’autorité politique occupent déjà une place importante dans les réflexions des sociologues et des historiens. Deuxièmement, nous avons vu que les études sur la sécurité européenne ont atteint une certaine maturité et comptent aujourd’hui des études de cas empiriquement solides. Enfin, troisièmement, les fonctions de sécurité sont par nature un objet de choix pour qui s’intéresse aux mutations de l’ordre politique européen. Dans leur cartographie des recherches consacrées à la sécurité intérieure européenne, Bossong et Rhinard estiment d’ailleurs : « One important reason scholars have been drawn to the analysis of EU internal security cooperation is the constitutional implications of the field for the nature and direction of the EU as a polity. Cooperation generates fundamental questions regarding the normative and conceptual elements of what the EU ‘is’ as a political construction, and what it means for European society more broadly » (2016, 11).
29 Étudier les développements de l’Europe de la sécurité intérieure ne peut s’envisager sans interroger la revendication multiséculaire des autorités politiques modernes à assurer seules la sécurité des biens et des personnes sur un territoire donné. Car, faut-il le rappeler, la prétention de l’autorité politique à monopoliser les fonctions de sécurité est, du moins chez Max Weber, ce qui distingue la forme moderne de l’organisation politique de toutes les formes d’organisation politique précédentes. Pour Weber, « [l]’État est cette communauté humaine, qui à l’intérieur d’un territoire déterminé […], revendique pour elle-même et parvient à imposer le monopole de la violence physique légitime » (Weber, 2003a[1919], 118). Dans Économie et société, Weber se détache de la figure de l’État en mobilisant le concept de « groupement politique », mais la proposition analytique reste la même : « […] un groupement de domination […] est un groupement politique [politischer Verband] lorsque et tant que son existence et la validité de ses règlements sont garanties de façon continue à l’intérieur d’un territoire géographique déterminable par l’application et la menace d’une contrainte physique de la part de la direction administrative » (Weber, 2003b[1922], 97). L’autorité politique est conçue comme une « entreprise politique de caractère institutionnel » revendiquant avec succès, dans l’application de ses règlements, le monopole de la contrainte physique légitime.
30 Lesté de cette sociologie wébérienne, comment appréhender le développement de la sécurité intérieure européenne ? Faut-il y voir, dans une logique quelque peu téléologique, l’embryon d’un futur « État européen » amené à revendiquer pour lui-même ce que les États membres ont revendiqué avant lui avec succès ? L’UE rejoue-t-elle le procès de la monopolisation de la contrainte légitime et du State building ? Ou bien l’UE marque-t-elle au contraire l’entrée dans une nouvelle ère dans laquelle la définition même de l’autorité politique se trouverait réévaluée et libérée de toute relation à l’offre publique de sécurité ? La position du chercheur en science sociale ne peut que le pousser à ne pas choisir entre les deux termes de l’alternative. Prédire aujourd’hui le chemin qu’empruntera l’Europe relève de la pure conjecture. Plutôt que de trancher entre les deux branches de l’alternative, nous suggérons de nous départir du déterminisme qui a longtemps caractérisé les études européennes pour privilégier une réflexion en termes de processus qui conçoit l’intégration européenne comme un ensemble de transformations sociales et politiques à la fois non-linéaires et sans telos. Appréhender la sécurité intérieure européenne sous cet angle nous invite à comparer dans le temps et dans l’espace les pratiques européennes contemporaines afin d’y déceler les convergences comme les divergences avec d’autres formes d’organisation du politique – pré-étatiques, étatiques ou internationales – mais aussi avec d’autres régions du monde, par exemple les modèles de sécurité américain ou chinois.
31 À cet égard, le fait que la coopération en matière de sécurité se soit développée dans des domaines régaliens mais selon des modalités originales pourrait alimenter l’idée d’une rupture radicale avec le passé. La coopération européenne serait alors perçue comme post-étatique, post-nationale, voire « post-coercitive » dans la mesure où l’usage de la violence physique y aurait été remplacé par des modes de gestion des désordres publics plus « doux » centrés sur les échanges d’informations. À l’inverse, il pourrait être défendu que l’intégration n’a pas substantiellement changé les relations entre États et sécurité. Les traités successifs n’ont-ils pas ménagé des clauses de sauvegarde prémunissant les États membres des empiètements européens sur leurs fonctions régaliennes ? L’article 4 par. 2 du Traité de Lisbonne (TUE) ne précise-t-il pas que l’Union « respecte les fonctions essentielles de l’État, notamment celles qui ont pour objet d’assurer son intégrité territoriale, de maintenir l’ordre public et de sauvegarder la sécurité nationale » ? Comme souvent, tant l’hypothèse de la rupture radicale que celle de la parfaite continuité peinent à convaincre. Car comme le souligne Sandra Lavenex (2015), les développements JAI révèlent moins une succession de moments de ruptures que la transformation perpétuelle de l’équilibre subtil entre les logiques intergouvernementale et supranationale.
32 La sécurité intérieure européenne se trouve enchâssée entre des souverainetés étatiques « obstinées » (Bickerton, 2012, 39) et un espace transnational – l’ELSJ – en développement. D’un côté, le parcours historique de l’UE ne suit pas le processus socio-historique de formation de l’État-nation tel qu’il a été reconstruit par Norbert Elias. Le processus de monopolisation des moyens de la coercition et de la fiscalité qui est considéré par Elias comme « absolument général », ce qui l’amène à parler d’une « loi du monopole » (Elias, 1975, 13), reste difficile à identifier à l’échelon européen. Les moyens de la coercition et de la fiscalité ont même été singulièrement moins touchés par l’intégration européenne que les autres domaines de compétences des États membres. D’un autre côté, le fonctionnement des agences Europol, Eurojust et Frontex, de même que la mise sur pied de systèmes d’échange d’informations tels que le Système d’information Schengen (SIS), ont transformé les modes d’action dans le champ de la sécurité et induit de nouvelles logiques de collaboration, mais aussi de concurrence, entre des enceintes nationales, européennes et internationales. La création de ces agences et outils a modifié les manières de travailler et façonné de nouveaux cadres cognitifs partagés par les professionnels de la sécurité.
33 À titre d’exemple, dans sa contribution à ce numéro spécial, Agathe Piquet rappelle que les modalités de la création d’Europol traduisaient dès le départ une volonté des États membres de promouvoir une forme de coordination politique en matière de coopération policière via un organe entièrement contrôlé par les États. Europol était alors conçu uniquement dans une fonction de soutien aux services de police nationaux, sans qu’il soit possible de constater un quelconque transfert de pouvoir. De fait, les agents d’Europol sont toujours démunis de pouvoirs exécutifs. Ils ne peuvent ni procéder à des interpellations ni mener des interrogatoires dans les États membres. Le règlement Europol de 2016 a par la suite transformé l’Office européen de police en une agence européenne financée par le budget communautaire et pour partie contrôlée par le Parlement européen et la Cour de Justice. Les types de criminalités relevant du champ de compétences de l’agence ont été élargis tandis que ses capacités opérationnelles et ses ressources se trouvaient renforcées. Mais cette évolution du cadre juridique au sein duquel se déploie l’activité d’Europol ne reflète qu’une partie des transformations à l’œuvre. En adoptant une approche plus sociologique, Agathe Piquet montre aussi comment, au-delà des cadres institutionnels, les pratiques quotidiennes des acteurs travaillant au sein d’Europol ont contribué à créer des solidarités entre des fonctionnaires issus de différents États.
34 Ce travail sociologique rejoint les réflexions récentes de Didier Bigo (2018) sur l’émergence de « guildes transnationales », c’est-à-dire de « groupes transnationaux liés par une forme de solidarité attachée à leur travail quotidien, à des savoir-faire et des savoirs spécifiques qui transcendent souvent les différences nationales » (Bigo, 2018, 1). Cette réflexion en termes de transnationalisation des réseaux d’acteurs permet de relativiser l’opposition binaire entre ères des souverainetés nationales et espace transnational. Elle met aussi en évidence tant les nouveautés que les constantes de la coopération policière sur la longue durée. Elle permet par exemple de souligner qu’Europol participe d’une institutionnalisation progressive de réseaux informels de coopération policière qui préexistent en réalité non seulement à Europol, mais également aux Communautés européennes (Bigo, 1996 ; Fijnaut, 2015). La coopération policière internationale se serait de tous temps exercée sur le mode de relations bilatérales et informelles avant de se structurer au début du XXe siècle au sein de la Commission internationale de police criminelle (CIPC), ancêtre de l’Organisation internationale de police criminelle (OIPC) mieux connue sous le nom d’INTERPOL. Dans une perspective comparable, Mathieu Deflem (2002, 21-27) soulignait déjà que la coopération policière internationale s’est développée à partir du moment où les forces de polices nationales se sont constituées en structures bureaucratiques relativement autonomes par rapport à leur centre politique national respectif. De ce point de vue, Europol représente donc une forme de coopération policière parmi d’autres et il importe de comprendre comment et pourquoi elle a été amenée à occuper la place qui est la sienne à l’heure actuelle.
35 Un second exemple de l’utilité d’une approche croisant les perspectives sociologiques avec une prise en compte du temps long est l’action de l’UE dans le domaine de la gestion des frontières extérieures de l’Union. L’activité de l’UE en ce domaine est une conséquence directe de la mise en œuvre, depuis Schengen, de la libre circulation des personnes dans un espace européen sans frontières intérieures. Elle découle de la distinction opérée entre les frontières intérieures – celles qui séparent les États membres entre eux – et les frontières extérieures – celles qui séparent le territoire des États membres du reste du monde. Dans une perspective de longue durée, l’on peut souligner que la gestion des frontières européennes illustre bien les processus de dé-différenciation qui caractérisent l’intégration européenne. Là où la formation des États-nations a répondu à une logique de différenciation croissante – sur les plans juridique, économique, politique, social et culturel – entre les systèmes nationaux européens, l’intégration européenne a opéré un mouvement inverse de dé-différenciation. Elle a disjoint les frontières économiques, administratives et culturelles qui s’étaient progressivement superposées (Bartolini, 2005, 375), et elle a ouvert des espaces transnationaux qui concurrencent aujourd’hui ceux institutionnalisés par les États : espace économique à travers le marché intérieur, espace juridique à travers le droit communautaire et son interprétation par la Cour de Justice, espace monétaire à travers la monnaie unique et la Banque centrale européenne, espace transnational de la sécurité, enfin, à travers la mise en place de l’ELSJ.
36 Dans cette optique, la mise en place de l’ELSJ pose, dans la longue durée, la question de la permanence ou non de la superposition entre souveraineté et territoire national. Car si la décision d’accepter l’entrée d’un individu sur le territoire d’un État membre – qu’il s’agisse d’un citoyen européen ou d’un ressortissant d’un pays tiers – reste de jure une compétence régalienne de cet État, la suppression des contrôles systématiques aux frontières intérieures revient de facto à laisser à un autre État membre la décision quant à cet accès. Nous avons montré ailleurs (Duez, 2018) que les tensions récentes entre certains États membres et la Commission européenne sur la question de la durée et des modalités du rétablissement des contrôles aux frontières intérieures après les attentats de Paris de 2015 témoignent de ce qui est en jeu, à savoir une compétition pour la monopolisation de ce que John Torpey (1998) appelle les « moyens de la circulation légitime ». Il s’agit d’établir qui est en droit de décider qui peut être mobile, entrer et sortir de l’Union ou circuler sur le territoire des États membres, et qui ne le peut pas ; et qui est en droit de veiller au respect de cette distinction.
37 Mais, ici aussi, la compétition pour la monopolisation des moyens de la circulation légitime ne peut être réduite à une concurrence entre les États membres et les institutions européennes dont les résultats se manifesteraient ex post sous des formes institutionnelles juridiquement consacrées par le droit européen. Une approche plus sociologique permet de nouveau de décentrer le regard du chercheur et d’examiner tant les évolutions structurelles qui expliquent les innovations institutionnelles que les pratiques sociales qui les précèdent et les accompagnent. Elle permet de comprendre les systèmes de représentations, les idéologies, les discours, les relations de pouvoirs ou encore les dispositifs technologiques logés au cœur de la gestion intégrée des frontières extérieures.
38 Dans une perspective du temps long, il s’agira par exemple d’étudier l’impact de la globalisation et des révolutions technologiques – évolution des modes de transport et des moyens de communication – sur les pratiques européennes et, ce, afin d’identifier la singularité, ou l’absence de singularité, des réponses de l’UE. Il devient alors possible de montrer jusqu’à quel point le projet de « smart borders » européennes – ou frontières intelligentes –, même s’il présente certaines spécificités, s’inscrit dans un mouvement global, initié aux États-Unis, visant à concilier l’accroissement et l’accélération des mobilités transnationales, d’une part, et, d’autre part, l’exigence d’un niveau élevé de sécurité. Les smart borders s’inscrivent alors à la suite d’autres dispositifs de sécurité et de contrôle qui, du sauf-conduit de l’Ancien Régime au visa biométrique, se sont succédé comme autant de réponses aux enjeux politiques et sociaux de leur époque (Noiriel, 1991 ; Torpey, 1998 ; Salter, 2003 ; Crettiez et Piazza, 2006 ; Mau, 2012, 11-24).
39 Dans une perspective plus micro, le regard sociologique permet en outre de relativiser la centralité des États dans la gestion des mobilités en signalant les pratiques de délégation des contrôles vers le secteur privé, qu’il s’agisse des transporteurs (Guiraudon, 2002), des entreprises spécialisées dans la gestion des centres de rétention (Bosworth, 2014) ou encore dans l’examen des demandes de visa (Infantino, 2017). Il permet alors de pointer l’émergence à l’échelle mondiale d’une « industrie migratoire » (Gammeltoft-Hansen et Nyberg Sorensen, 2013), dont les contours ne se limitent pas au continent européen. Il nous invite à examiner les pratiques européennes à l’aune du processus historique de négociation, entre acteurs publics et privés, des capacités de contrôle des mobilités humaines. Une entrée non plus sociologique mais anthropologique permet également de décaler l’analyse vers le parcours des migrants eux-mêmes (Andersson, 2014) ou bien vers les interactions entre citoyens mobiles et agents de sécurité (Leese et Koenigseder, 2015). Enfin, parce qu’il permet d’appréhender les relations entre les dispositifs matériels et leurs opérateurs humains, le regard sociologique permet de comprendre comment les technologies – outils de visualisation, systèmes de détection et de communication – utilisées quotidiennement par les agents en charge de la surveillance des frontières influencent les interactions transnationales entre ces derniers et contribuent, indépendamment d’un quelconque choix stratégique, à construire les problèmes publics et les réponses qu’il convient de leur apporter (Duez et Bellanova, 2014).
Conclusion
40 Penser l’intégration européenne « avant et en dehors de la seule construction communautaire » (Déloye, 2008b, 137) tout en étant sensible aux pesanteurs du passé construites dans la longue durée qui est celle des États-nations européens (Delmotte, 2008), voilà donc l’objectif d’une sociologique historique de la sécurité intérieure européenne. Un tel projet suppose de réaffirmer la valeur heuristique des cadres conceptuels de la sociologie politique, et notamment de la sociologie politique de l’État, pour analyser la sécurité intérieure européenne. Au-delà, il suppose aussi d’ouvrir plus généreusement le travail des politistes à l’histoire, l’anthropologie, l’économie ou la géographie. Une telle démarche ne signifie pas pour autant que l’UE doive être considérée comme un ordre politique étatique en devenir. À l’inverse, cela ne signifie pas non plus qu’il faut considérer a priori que l’UE ne poursuivra pas son mouvement d’intégration pour former à terme un « centre politique ». La question du devenir de l’Europe reste fondamentalement ouverte. Revenir à la sociologie historique de l’État pour étudier l’Europe ne consiste pas à prendre l’État comme modèle de référence pour étudier l’Union, mais à considérer que ces deux réalités – l’ordre étatique et l’ordre supranational – ne doivent pas être opposées mais pensées ensemble.
41 L’objectif de cet article n’était pas de proposer un premier exemple de sociologie historique du champ de la sécurité intérieure européenne. Il s’agissait plutôt de souligner la pertinence heuristique de cette approche qui viendrait combler un vrai manque, et d’inviter les chercheuses et les chercheurs à ne pas réduire l’histoire de l’intégration européenne à la période ouverte par la signature du traité de Rome. Car six décennies sont finalement peu de chose au regard de la lenteur des changements sociopolitiques qui président à la formation des ordres politiques, étatiques ou non. La sociologie historique invite également les européanistes à ne pas réfléchir en termes d’opposition – ontologique, historique ou fonctionnelle – entre États-nations et Union européenne, mais plutôt à les envisager comme participant d’un même processus de transformation sociale de l’ordre politique européen. Parce qu’ils touchent au noyau le plus dur de la souveraineté des États membres, les enjeux de sécurité représentent des objets de choix pour une telle démarche.
Bibliographie
Bibliographie
- Aldrin, Philippe (2011), « Les Eurobaromètres entre science et politique. Retour sur la fabrique officielle de l’opinion européenne », in Daniel Gaxie, Nicolas Hubé, Marine de Lassalle et Jay Rowell (dir.), L’Europe des Européens. Enquête comparative sur les perceptions de l’Europe, Paris, Economica, p. 27-47.
- Amicelle, Anthony, Aradau, Claudia et Jeandesboz, Julien (2015), “Questioning security devices: Performativity, resistance, politics”, Security Dialogue, vol. 46 (4), p. 293-306.
- Anderson, Malcolm et al. (1996), Policing the European Union, Oxford, Oxford University Press.
- Anderson, Malcolm et Apap, Joanna (eds) (2002), Police and Justice Co-operation and the New European Borders, The Hague/ London/ New York, Kluwer Law International.
- Anderson, Malcolm et Bort, Eberhard (2001), The Frontiers of the European Union, Basingstoke, Palgrave.
- Anderson, Perry (1974), Passages From Antiquity to Feudalism, Londres, New Left Books.
- Anderson, Perry (2011), Le Nouveau Vieux Monde. Sur le destin d’un auxiliaire de l’ordre américain, Marseille, Agone.
- Andersson, Ruben (2014), Illegality, Inc. Clandestine Migration and the Business of Bordering Europe, Oakland, University of California Press.
- Baisnée, Olivier (2002), « Les journalistes accrédités auprès de l’Union européenne : correspondants à l’étranger ou généralistes spécialisés ? », Réseaux, vol. 111, p. 101-162.
- Baker-Beall, Christopher, Heath-Kelly, Charlotte et Jarvis, Lee (eds) (2015), Counter-radicalisation: Critical perspectives, Oxon/New York, Routledge.
- Barbe, Emmanuel (2002), Justice et affaires intérieures dans l’Union européenne. Un espace de liberté, de sécurité et de justice, Paris, La Documentation française.
- Bartolini, Stefano (2005), Restructuring Europe. Centre Formation, System Building and Political Structuring between the Nation-state and the European Union, Oxford, Oxford University Press.
- Basaran, Tugba (2011), Security, Law and Borders. At the Limits of Liberties, London/ New York, Routledge.
- Bellanova, Rocco et Duez, Denis (2012), “A Different View on the ‘Making’ of European Security: The EU Passenger Name Record System as a Socio-Technical Assemblage”, European Foreign Affairs Review, vol. 17 (2), p. 109-124.
- Bellanova, Rocco et González Fuster, Gloria (2013), “Politics of Disappearance: Scanners and (Unobserved) Bodies as Mediators of Security Practices”, International Political Sociology, vol. 7 (2), p. 188-209.
- Berthelet, Pierre (2003), Le droit institutionnel de la sécurité intérieure européenne, Bruxelles, P.I.E.-Peter Lang.
- Bickerton, Christopher (2012), European Integration. From Nations-States to Member States, Oxford. Oxford University Press.
- Bieber, Roland et Monar, Jörg (eds) (1995), Justice and Home Affairs in the European Union. The Development of the Third Pillar, Brussels, European Interuniversity Press.
- Bigo, Didier (1996), Polices en réseaux : l’expérience européenne, Paris, Presses de Science Po.
- Bigo, Didier (2006) “Internal and External Aspects of”, European Security, vol. 15(4), p. 385-404.
- Bigo, Didier (2018), « Pour une sociologie des guildes transnationales », Cultures & Conflits, 109, p. 9-38.
- Bigo, Didier et Guild, Elspeth (eds) (2005), Controlling Frontiers. Free Movement into and within Europe, Aldershot, Ashgate.
- Bigo, Didier, Bonelli, Laurent et Deltombe, Thomas (2008), Au nom du 11 septembre... Les démocraties à l’épreuve de l’antiterrorisme, Paris, La Découverte.
- Bossong, Raphael et Rhinard, Mark (eds) (2016), Theorizing Internal Security Cooperation in the European Union, Oxford, Oxford University Press.
- Boswell, Christina (2007), “Migration Control in Europe After 9/11: Explaining the Absence of Securitization”, Journal of Common Market Studies, vol. 45 (3), p. 589‑610.
- Boswell, Christina et Geddes, Andrew (2011), Migration and Mobility in the European Union, Basingstoke, Palgrave Macmillan.
- Bosworth, Mary (2014), Inside Immigration Detention, Oxford, Oxford University Press.
- Bueger, Christian (2017), “Security as Practice”, in Myriam Dunn Cavelty et Thierry Balzacq (eds), Routledge Handbook of Security Studies, 2e éd., London/ New York, Routledge, p. 126-135.
- C.A.S.E Collective (2006), “Critical Security Studies in Europe : A Networked Manifesto”, Security Dialogue, vol. 37 (4), p. 443-487.
- Canihac, Hugo (2019), « Un marché sans économistes ? La planification et l’impossible émergence d’une science économique européenne (1957-1967) », Revue française de science politique, vol. 69 (1), p. 95-116.
- Carlier, Jean-Yves et Vanheule, Dirk (eds) (1997), Europe and refugees: A challenge? – L’Europe et les réfugiés : un défi ?, La Haye, Kluwer Law international.
- Carrapiço, Helena et Trauner, Florian (2013), “Europol and its influence on EU policy-making on organized crime : Analyzing governance dynamics and opportunities”, Perspectives on European Politics and Society, vol. 14 (3), p. 357-371.
- Chevallier-Govers, Constance (1999), De la coopération à l’intégration policière dans l’Union européenne, Bruxelles, Bruylant.
- Cohen, Antonin et Knudsen, Ann-Christina (2012), « L’institutionnalisation du Parlement européen. Pour une sociologie historique du parlementarisme supranational », Cultures & Conflits, vol. 85-86 (1-2), p. 7-12.
- Cowles, Maria Green, Caporaso, James et Risse, Thomas (eds) (2001), Transforming Europe. Europeanization and Domestic Change, Ithaca, New-York, Cornell University Press.
- Crettiez, Xavier et Piazza, Pierre (dir.) (2006), Du papier à la biométrie : identifier les individus, Paris, Presses de Sciences Po.
- Cross, Ma’ia (2013), Security Integration in Europe: How Knowledge-based Networks Are Transforming the European Union, Ann Arbor, University of Michigan Press.
- Crouch, Colin (2000), Social Change in Western Europe, Oxford, Oxford University Press.
- De Bruycker, Philippe (ed.) (2003), The Emergence of a European Immigration Policy, Bruxelles, Bruylant.
- Deflem, Mathieu (2002), Policing World Society: Historical Foundations of International Police Cooperation, Oxford, Oxford University Press.
- De Goede Marieke, et Wesseling, Mara (2017), “Secrecy and security in transatlantic terrorism finance tracking”, Journal of European Integration, vol. 39 (3), p. 253-269,
- De Kerchove, Gilles et Weyembergh, Anne (dir.) (2000), Vers un espace judiciaire pénal européen, Bruxelles, Éditions de l’Université de Bruxelles.
- Delanty, Gerard (2013), Formations of European Modernity: A Historical and Political Sociology of Europe, London, Palgrave Macmillan.
- Delanty, Gerard et Rumford, Chris (2005), Rethinking Europe. Social Theory and the Implications of Europeanization, London/ New York, Routledge.
- Delmotte, Florence (2008), « La légitimité de l’Union européenne, une affaire de bons sentiments ? Réflexions sur l’appartenance à la communauté politique », Revue internationale de politique comparée, vol. 15 (4), p. 541-554.
- Delmotte, Florence, Van Ingelgom, Virginie et Mercenier, Heidi (2017), “Belonging and Indifference to Europe: A Study of Young People in Brussels », Historical Social Research, vol. 42 (4), p. 227-249.
- Déloye, Yves (2003), Sociologie historique du politique, Paris, La Découverte.
- Déloye, Yves (2006), « Introduction : éléments pour une approche socio-historique de la construction européenne. Un premier état des lieux », Politique européenne, vol. 18 (1), p. 5-15.
- Déloye, Yves (2008a), « De Rome à Florence : le devenir historique de l’intégration européenne », Critique, vol. 731 (4), p. 312-321.
- Déloye, Yves (2008b), « Socio-histoire », in Céline Belot, Paul Magnette et Sabine Saurugger (dir.), Science politique de l’Union européenne, Paris, Economica.
- Déloye, Yves (2008c), « En guise de conclusion : ce que résister veut dire ou les paradoxes d’une construction européenne face aux contingences historiques et aux logiques politiques nationales », Revue internationale de politique comparée, vol. 15 (4), p. 679-685.
- Den Boer, Monica (ed.) (1997a), Schengen, judicial cooperation and policy coordination, Maastricht, European Institute of Public Administration.
- Den Boer, Monica (1997b), The implementation of Schengen: First the widening, now the deepening, Maastricht, European Institute of Public Administration.
- Den Boer, Monica (ed.) (2000), Schengen Still Going Strong: Evaluation and Update, Maastricht, European Institute of public administration.
- Dinan, Desmond (ed.) (2014) Origins and Evolution of the European Union, 2e éd., Oxford, Oxford University Press.
- Dravigny, Josselin, Maillard, Jacques de et Smith, Andy (2016), « Sécurité intérieure européenne et définition de l’intérêt national : le modèle français revisité », Revue française d’administration publique, vol. 158 (2), p. 405-417.
- Duchesne, Sophie et al. (eds) (2013), Citizens’ Reactions to European Integration Compared. Overlooking Europe, Basingstoke, Palgrave Macmillan.
- Duez, Denis (2008), « La ‘crise’ de l’Union et les apories de la sécurité intérieure européenne », in Paul Magnette et Anne Weyembergh (dir.), L’Union européenne : la fin, d’une crise ?, Bruxelles, Presses de l’Université de Bruxelles, p. 69-84.
- Duez, Denis (2018), « Libre circulation et crise des réfugiés. Réflexions sur le retour des frontières en Europe », in Heidi Mercenier et al. (dir.), La libre circulation sous pression, Bruxelles, Bruylant, p. 91-111.
- Duez, Denis et Bellanova, Rocco (2014), « Humains et non-humains dans la fabrique des frontières de l’Europe : une approche in medias res de l’européanisation », in Denis Duez, Olivier Paye et Christophe Verdure (dir.), L’Européanisation. Sciences humaines et nouveaux enjeux, Bruxelles, Bruylant, p. 223-252.
- Elias, Norbert (1973), La civilisation des mœurs, Paris, Calmann-Levy.
- Elias, Norbert (1975), La dynamique de l’Occident, Paris, Calmann-Lévy.
- Favell, Adrian (2014), Immigration, Integration and Mobility : New Agendas in Migration Studies, Colchester, ECPR Press.
- Favell, Adrian et Guiraudon, Virginie (eds) (2011), Sociology of the European Union, Basingstoke, Palgrave Macmillan.
- Fertikh, Karim (2016), « La construction d’un ‘droit social européen ’ : Socio-histoire d’une catégorie transnationale », Politix, vol. 115 (3), p. 201-224.
- Fijnaut, Cyrille (2015), “Revolution or Evolution through the Treaty of Lisbon : Police Cooperation in Europe in a Broader Historical Context”, in Hartmut Aden (ed), Police Cooperation in the European Union under the Treaty of Lisbon. Opportunities and Limitations, Baden-Baden, Nomos, p. 25-48.
- Gammeltoft-Hansen, Thomas et Nyberg Sorensen, Ninna (eds) (2013), The Migration Industry and the Commercialization of International Migration, Abingdon, Routledge.
- Georgakakis, Didier (2012) (dir.), Le champ de l’Eurocratie. Une sociologie politique du personnel de l’UE, Paris, Economica.
- Gerbet, Pierre (2007), La construction de l’Europe, Paris, Armand Colin.
- Esping-Andersen, Gøsta (1999), The Social Foundations of Postindustrial Economies, Oxford University Press.
- Guiraudon, Virginie (2002) « Logiques et pratiques de l’État délégateur : les compagnies de transport dans le contrôle migratoire à distance », Cultures et conflits, vol. 45, p. 51-79.
- Guiraudon, Virginie (2010), « Les effets de l’européanisation des politiques d’immigration et d’asile », Politique européenne, vol. 31 (2), p. 7-32.
- Hailbronner, Kay et Weil, Patrick (eds) (1999), From Schengen to Amsterdam, towards a European Immigration and Asylum Legislation, Köln, Budesanzeiger.
- Hirschman, Albert O. (1995), Défection et prise de parole, Paris, Fayard.
- Huysmans, Jef (2006), The politics of Insecurity. Fear, Migration and Asylum in the EU, London/ New York, Routledge.
- Infantino, Federica (2017), « La mise en marché de la frontière, un produit d’État. Compagnies privées et mise en œuvre de la politique du visa Schengen », Gouvernement et action publique, vol. 4 (6), p. 51-73.
- Infantino, Federica (2019), Schengen Visa Implementation and Transnational Policy-Making. Bordering Europe, Cham, Palgrave Macmillan.
- Jacquot, Sophie et Woll, Cornelia (dir.) (2004), Les usages de l’Europe. Acteurs et transformations européennes, Paris, L’Harmattan.
- Jeandesboz, Julien (2016), “Smartening border security in the European Union : An associational inquiry”, Security Dialogue, vol. 47 (4), p. 292-309.
- Joly, Danièle (1996), Haven or Hell ? Asylum Policies and Refugees in Europe, Basingstoke, Macmillan.
- Kaelble, Hartmut (ed.) (1988), Vers une société européenne : une histoire sociale de l’Europe, 1880-1980, Paris, Belin.
- Kaiser, Wolfram, Leucht, Brigitte et Rasmussen, Morten (eds) (2009), The History of the European Union. Origins of a trans- and supranational polity 1950-72, Abingdon, Routledge.
- Kaunert, Christian (2010), European Internal Security : Towards Supranational Governance in the Area of Freedom, Security and Justice ?, Manchester, Manchester University Press/ Palgrave Macmillan.
- Kaunert, Christian et Leonard, Sarah (eds) (2018), Searching for a Strategy for the European Union’s Area of Freedom, Security and Justice, Basingstoke, Routledge.
- Kaunert, Christian, Leonard, Sarah et Occhipinti, John (eds) (2015), Justice and Home Affairs Agencies in the European Union, Abingdon, Routledge.
- Kauppi, Niilo et Rask Madsen, Mikael (eds) (2013), Transnational Power Elites. The New Professionals of Governance, Law, and Security, Abingdon, Routledge.
- Klausen, Jytte et Tilly, Louise A. (eds) (1997), European Integration in Social Historical Perspective. 1850 to the Present, Lanham, Rowman & Littlefield.
- Kott, Sandrine (2011), « Les organisations internationales, terrains d’étude de la globalisation. Jalons pour une approche socio-historique », Critique internationale, vol. 52 (3), p. 9-16.
- Ladrech, Robert (1994), “Europeanization of Domestic Politics and Institutions : The Case of France”, Journal of Common Market Studies, vol. 32 (1), p. 69-88.
- Lavenex, Sandra (2015), “Justice and Home Affairs : Institutionnal Change and Policy Continuity”, in Helen Wallace, Mark Pollack et Alasdair Young (eds), Policy-Making in the European Union, Oxford, Oxford University Press, p. 367-387.
- Leese, Matthias et Koenigseder, Anja (2015), “Humor at the Airport? Visualization, Exposure, and Laughter in the ‘War on Terror’”, International Political Sociology, vol. 9 (1), p. 37-52.
- Lobkowicz, Wenceslas de (2002), L’Europe et la sécurité intérieure. Une élaboration par étapes, Paris, La Documentation française.
- Maillard, Jacques de et Smith, Andy (2007), « Introduction : L’Union européenne et la sécurité intérieure : une institutionnalisation en quête de légitimité », Politique européenne, vol. 23 (3), p. 5-15.
- Mangenot, Michel (2006), « Jeux européens et innovation institutionnelle. Les logiques de création d’Eurojust (1996-2004) », Cultures et Conflits, vol. 62, p. 43-62.
- Mau, Steffen et al. (2012), Liberal States and the Freedom of Movement. Selective Borders, Unequal Mobility, Basingstoke, Palgrave Macmillan.
- Mégie, Antoine (2006), « Généalogie du champ de la coopération judiciaire européenne », Cultures & Conflits, 2006, 62(2), p. 11-41.
- Mégie, Antoine (2013), “Behind the development of EU authority in criminal matters : a sociology of legal experts in EU policymaking”, Journal of European Public Policy, vol. 21 (2), p. 230-247.
- Milward, Alan S. (1984), The Reconstruction of Western Europe 1945–51, Berkeley and Los Angeles, University of California Press.
- Milward, Alan S. (2000), The European Rescue of the Nation-State, 2e éd., London/ New York, Routledge.
- Mitsilegas, Valsamis, Monar, Jörg et Rees, Wyn (2003), The European Union and Internal Security. Guardian of the People?, Basingstoke, Palgrave Macmillan.
- Monar, Jörg (2001), “The Dynamics of Justice and Home Affairs : Laboratories, Driving Factors and Costs”, Journal of Common Market Studies, vol. 39 (4), p. 747–764.
- Monar, Jörg (2012), “Justice and Home Affairs”, in Erik Jones, Anand Menon et Stephen Weatherill (eds), The Oxford Handbook of the European Union, Oxford, Oxford University press, p. 613-626.
- Monar, Jörg (2016), “EU internal Security Cooperation after Four Decades. Observations and Reflections”, in Raphael Bossong et Mark Rhinard (eds), Theorizing Internal Security Cooperation in the European Union, Oxford, Oxford University Press, p. 28-41.
- Monar, Jörg et Morgan, Roger (eds) (1994), The Third Pillar of the European Union. Cooperation in the Fields of Justice and Home Affairs, Brussels, European Interuniversity Press.
- Montain-Domenach, Jacqueline (1999), L’Europe de la sécurité intérieure, Paris, Montchrestien.
- Moore, Barrington (1993), Les origines sociales de la dictature et de la démocratie, Paris, La Découverte/ Maspéro.
- Moravcsik, Andrew (1998), The Choice for Europe. Social Purpose and State Power from Messina to Maastricht, Ithaca, Cornell University Press.
- Neal, Andrew (2009), “Securitization and risk at the EU Border. The origins of Frontex”, Journal of Common Market Studies, vol. 47 (2), p. 333-356.
- Noiriel, Gérard (1991), Réfugiés et sans-papiers. La République face au droit d’asile XIXe-XXe siècle, Paris, Hachette.
- Noiriel, Gérard (2008), Introduction à la socio-histoire, Paris, La Découverte.
- Pallister-Wilkins, Polly (2017), “Humanitarian Rescue/Sovereign Capture and the Policing of Possible Responses to Violent Borders”, Global Policy, vol. 8 (1), p. 19-24.
- Patel Kiran, Klaus (2013), “Provincialising European Union: Co-operation and Integration in Europe in a Historical Perspective”, Contemporary European History, vol. 22 (4), p. 649-673.
- Radaelli, Claudio (2003), “The Europeanization of Public Policy”, in Kevin Featherstone et Claudio Radaelli (eds), The Politics of Europeanization, Oxford, Oxford University Press, p. 27-56.
- Recchi, Ettore (2015), Mobile Europe. The Theory and Practice of Free Movement in the EU, Basingstoke, Palgrave Macmillan.
- Rokkan, Stein (1996), State Formation, Nation-Building, and Mass Politics in Europe: The Theory of Stein Rokkan, New York, Oxford University Press.
- Rokkan, Stein (2009), Citizens, Elections, Parties. Approaches to the Comparative Study of the Processes of Development, Colchester, ECPR Press.
- Rowell, Jay et Mangenot, Michel (eds) (2010), A Political Sociology of the European Union. Reassessing Constructivism, Manchester/ New York, Manchester University Press.
- Salter, Mark B. (2003), Rights of Passage: The Passport in International Relations, Boulder, Lynne Rienner.
- Sheptycki, James (2005), En quête de police transnationale. Vers une sociologie de la surveillance à l’ère de la globalisation, Bruxelles, De Boeck & Larcier.
- Skocpol, Theda (1985), États et révolutions sociales : la révolution en France, en Russie et en Chine, Paris, Fayard.
- Tarrow, Sidney et Tilly, Charles (2015), Politique(s) du conflit. De la grève à la révolution, Paris, Presses de Sciences Po.
- Tilly, Charles (1992), Contrainte et capital dans la formation de l’Europe. 990-1990, Paris, Aubier.
- Torpey, John (1998), « Aller et venir : le monopole étatique des “moyens légitimes de circulation” », Cultures & Conflits, vol. 31-32, p. 63-100.
- Trauner, Florian et Ripoll Servent, Ariadna (eds) (2015), Policy Change in the Area of Freedom, Security and Justice: How EU Institutions Matter, London, Routledge.
- Trauner, Florian et Ripoll Servent, Ariadna (eds) (2017), The Routledge Handbook of Justice and Home Affairs Research, Basingstoke, Routledge.
- Trenz, Han-Jörg (2011), “Social theory and European integration”, in Adrian Favell, et Virginie Giraudon (eds), Sociology of the European Union, Basingstoke, Palgrave Macmillan, p. 193-213.
- Van Middelaar, Luuk (2012), Le passage à l’Europe. Histoire d’un commencement, Paris, Gallimard.
- Vauchez, Antoine (2013), L’Union par le droit. L’invention d’un programme institutionnel pour l’Europe, Paris, Presses de Sciences Po.
- Weber, Max (2003a), Le savant et le politique. Une nouvelle traduction, Paris, La Découverte.
- Weber, Max (2003b), Économie et société. Tome 1. Les catégories de la sociologie, Paris, Plon.
Notes
-
[1]
Cet article a bénéficié des commentaires avisés de deux relecteurs anonymes, mais aussi de discussions éclairantes avec Florence Delmotte et Hugo Canihac. Qu’ils en soient remerciés ici.
-
[2]
European Commission (2017), Special Eurobarometer 464b on Europeans’ Attitudes Towards Security, Brussels, December 2017.
-
[3]
Conseil JAI (2010), Stratégie de sécurité intérieure pour l’Union européenne. Vers un modèle européen de sécurité, Luxembourg, Office des publications de l’Union européenne.
-
[4]
Pour une discussion critique sur la pertinence du 11 septembre 2001 comme date charnière en matière de politique de sécurité, voir Boswell (2007) et Bigo, Bonelli et Deltombe (2008).